SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
23 septembre 2025
«NOUS RISQUONS D’ETRE DEBORDES ET LES CONSEQUENCES RISQUENT DE TOMBER SUR TOUT LE MONDE»
A l’heure où je vous parle, il y a beaucoup de patients graves qui sont à domicile qui refuse de venir à l’hôpital du fait de la stigmatisation, selon Pr Moussa Seydi, chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital de Fann
« (…) A l’heure où je vous parle, il y a beaucoup de patients graves qui sont à domicile qui refuse de venir à l’hôpital du fait de la stigmatisation. Et parmi ces patients, il y a même des personnes qui travaillent dans le secteur de la santé. La stigmatisation met en danger l’entourage du malade, parce qu’une personne stigmatisée est moins prompte à respecter les mesures barrières de base allant à l’endroit de son entourage. La stigmatisation pourrait réduire à néant véritablement la lutte que nous sommes en train de mener. (…)
Pour ce qui est du traitement à base d’hydroxychloroquine et d’azytromicine, nous avons poursuivi notre projet de recherche en analysantles données de 559 patients. Ces données sont issues des sites de Fann, de Dalal Jam et de Diamniadio. Parmi ces 559 patients, 498 étaient âgés de plus de 12 ans.
L’âge médian était de 33 ans et tous les âges étaient représentés, des nourrissons aux personnes âgées de 85 ans. Il y avait autant d’hommes que de femmes. 1 patient sur 5 avait une comorbidité. 65% de nos patients hospitalisés dans ces sites étaient symptomatiques. A Fann 89% des patients hospitalisés, étaient symptomatiques. Donc ce traitement à base d’hydroxy chloroquine et d’azytromicine administré nous a montré que l’efficacité était réelle. Parce que la durée médiane des patients d’hospitalisation qui avaient pris ce traitement était de 10 jours environ contre 13 jours chez les patients qui n’avaient pas pris ce traitement.
Tous les patients qui avaient pris ce traitement au stade précoce, c’est-à-dire avant l’apparition de complications, sont guéris et aucun n’est décédé. Nous n’avons noté que12% de cas d’intolérance. Les effets secondaires cardiovasculaires se voyaient sur 0,8% des cas. Tous les autres effets secondaires étaient bénins et réversibles à l’arrêt du traitement sans nécessiter un traitement supplémentaire. C’est donc dire, que le traitement est efficace pour réduire la charge virale parce que les patients ne sortent qu’après deux charges virales négatives. Aussi, le traitement est efficace dans la prévention des complications qui peuvent aboutir aux décès s’il est pris précocement et si le traitement est bien toléré.
C’est important de mentionner tout ça, compte tenu de cette polémique. Nous allons donc poursuivre notre traitement et poursuivre l’évaluation des traitements disponibles en relation avec l’institut Pasteur de Dakar. Je voudrais dire que désormais la lutte est entre les mains des communautés. Il ne faut pas se leurrer, si les cas continuent de se multiplier, nous risquons d’être débordés et les conséquences risquent de tomber sur tout le monde. J’en appelle donc au respect des mesures qui sont édictées par le ministère de la santé et de l’action sociale qui sont des mesures simples et invariables.»
«UNE ANNEE BLANCHE EST INENVISAGEABLE»
L’organisation non gouvernementale de la coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (COSYDEP) n’envisage pas une année blanche malgré les trois mois de retard des enseignements.
L’organisation non gouvernementale de la coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (COSYDEP) n’envisage pas une année blanche malgré les trois mois de retard des enseignements. Son directeur exécutif, Cheikh Mbow, qui s’est prononcé hier sur la situation scolaire, a soutenu qu’il y a une large marge pour éviter une année blanche qui ne sera que regrettable.
Malgré le retard enregistré dans le système éducatif causé par la pandémie du coronavirus, il y a toujours des lueurs d’espoir pour sauver l’année scolaire. Cette option est une chance à saisir pour le COSYDEP. Selon Cheikh Mbow, chaque pays est en train de trouver une solution à sa situation. Donc, estime-t-il, nous considérons que nous sommes mis devant nos responsabilités en toute liberté. C’est pourquoi, dit-il, le Sénégal doit sauver l’année scolaire. «Nous devons faire de sorte que nos enfants ne subissent pas une année blanche ou une année invalidée. C’est pourquoi depuis le début, nous avons voulu écarter deux choix extrêmes à savoir maintenir le calendrier initial des examens ou opter pour une année blanche ou invalidée, ce qui est totalement à mettre de côté d’autant plus que je n’ai pas entendu les acteurs se prononcer là-dessus. Vraiment, nous ne soupçonnons pas une année blanche», déclare-t-il.
BILAN ET AMELIORATION DES DECISIONS GOUVERNEMENTALES
Pour éviter un tel scénario, le directeur exécutif de la COSYDEP propose une amélioration des décisions au profit de toutes les classes. «On doit apporter une réponse pour les classes intermédiaires. Pour nous, une classe d’examen n’est pas plus importante qu’une classe intermédiaire. D’ailleurs, c’est grâce aux classes intermédiaires que nous avons une consolidation du système. Il faut donc accompagner tous les apprenants sans exception. Cependant, la proposition qui est entrevue par le gouvernement du Sénégal en la personne du président de la République qui est d’apprendre à la maison est une proposition insuffisante.
Par conséquent, il faut mettre sur place un dispositif pour accompagner tous les élèves». Aussi, soutient-il, la présentation d’un bilan avant la reprise effective des cours reste impérative car elle permettra d’avoir une idée globale sur la situation depuis le début de la pandémie. «Il y a beaucoup d’options qui ont été développées à travers un apprentissage à distance par les télés et les réseaux sociaux. Un des principes est de mettre en avant la culture du bilan des initiatives qui ont été faites en mettant l’accent sur les enfants qui sont dans les zones éloignées où il n’y a pas d’électricité et pas d’accès à l’internet. Mais aussi faire un bilan de l’échec de la reprise car la raison officielle qui a été annoncée pour reporter l’ouverture et qui est liée à la maladie de 10 enseignants au niveau de la région de Ziguinchor nous pose un problème, parce qu’il y a des non-dits. La première raison est que le niveau de protocole de mise en œuvre était insatisfaisant, c’est-à-dire qu’on ne répondait pas aux exigences des autorités scientifiques et sanitaires », déplore-t-il. Concernant la question des barrières de sécurité et de la distanciation sociale, Cheikh Mbow souligne que même avec la fermeture des classes, les enfants continuent de fouler au pied ces mesures, donc une reprise des cours reste un avantage car la place des enfants n’est pas dans la rue.
CONSEQUENCES D’UNE ANNEE BLANCHE
Toutefois, même si une année blanche n’est pas envisageable, le Sénégal pourrait la subir pour la troisième fois. Mais Cheikh Mbow estime : «Il faut que cela découle des raisons sanitaires car sur le plan des ressources, notre pays est capable de la sauver. » A l’en croire, une année blanche pourrait avoir des conséquences incalculables sur l’avenir des enfants. « Elle pourrait entraîner des déperditions massives dans les effectifs pour des raisons liées à l’âge, à la soutenabilité de la scolarisation, à la déception, au découragement entraînant l’abandon massif des élèves. Nous avons déjà constaté qu’il y a beaucoup d’élèves qui sont en train de chercher du travail. C’est pourquoi notre volonté est que tout doit être accentué sur la recherche de solutions. Maintenant, une année blanche peut s’imposer à nous mais nous ne devons pas nous relâcher. Si on se rend compte que c’est de notre faute parce qu’on n’a pas su accompagner la reprise dans la mesure de nos possibilités, ce serait vraiment incorrect et l’histoire retiendra que les leaders en 2020 n’ont pas pu apporter une réponse, contrairement aux autres pays, et évidemment nous serons condamnés par nos enfants. Maintenant, si nous faisons tout notre possible et que nous nous rendions compte que pour des raisons médicales, nous n’avons rien pu faire, nous considérerons que ce n’est pas un échec », dit-il.
par Madiambal Diagne
FINALEMENT, ILS ONT FAIT PIRE QUE LES WADE AVEC NOS TERRES
Sous le prétexte de donner des lots de terres à quelque 300 victimes de spéculateurs fonciers sur un projet de la cité Tobago, une superficie de 60 hectares vient d’être morcelée sur les réserves de l’aéroport de Léopold Sédar Senghor
Quand on évoque le souvenir du régime de Abdoulaye Wade (2000 à 2012), les esprits sont marqués par les actes de prévarication de ressources publiques. Le Sénégal avait été mis en coupe réglée et tout le système était organisé aux fins d’un enrichissement on ne peut plus grossier des élites du pouvoir. Mais c’était surtout dans la gestion du patrimoine foncier de l’Etat que Abdoulaye Wade a posé les actes les plus ignobles. Il avait fini de passer sa boulimie foncière à tous ses collaborateurs. Les terres du Sénégal étaient dépecées pour être distribuées à des pontes du régime Wade, qui se transformaient en de vulgaires spéculateurs fonciers. Des fortunes avaient été ainsi fabriquées. Le chef de l’Etat lui-même, prenait une règle et un crayon pour découper des parcelles de terres. A la faveur de l’enquête judiciaire qui avait été ouverte contre l’ancien directeur des Domaines, Tahibou Ndiaye, à l’arrivée du Président Macky Sall au pouvoir, on découvrit qu’il arrivait au Président Wade de survoler Dakar à bord d’un hélicoptère pour repérer les espaces de terres à se partager. Abdoulaye Wade se servait toujours en premier. Ainsi, il s’était aménagé pour lui-même et sa propre famille des domaines fonciers larges de plusieurs hectares dans les endroits les plus prisés de Dakar, comme les différentes Corniches, la zone du Cap Manuel, les différentes plages de Dakar, les quartiers des Almadies, de Ngor, des immeubles du centre-ville de Dakar, entre autres. Abdoulaye Wade lotissait des camps militaires, des casernes, des réserves forestières. Il avait fait entailler, sur instigation de son architecte-conseil Pierre Goudiaby Atepa (l’intéressé le révéla lui-même dans les colonnes du journal Le Quotidien), plus de 75 hectares des surfaces de l’aéroport international Léopold Sédar Senghor, pour en faire des lotissements de terrains vendus au prix fort. Les terres étaient cédées à moins de 5 mille francs le m2 à Mbackiyou Faye, qui les aura revendues, à plus de 150 mille francs le m2, suite à une action de courtage du Président Wade lui-même. Abdoulaye Wade ne s’interdisait de toucher à aucune portion de terre, jusqu’au stade Assane Diouf de Rebeuss, et les hôpitaux et camps militaires. Il se disait même qu’il avait fait chasser l’Armée française afin de pouvoir mettre la main sur les vastes superficies de ses camps installés au Sénégal. Le régime de Abdoulaye Wade poussait la spéculation foncière jusque dans les zones rurales et agricoles. Abdoulaye Wade avait fait main basse sur des centaines d’hectares de terres agricoles notamment à Bambylor et plus de 240 mille hectares de terres de la communauté rurale de Mbane avaient été distribuées à des pontes du pouvoir, alors que la superficie disponible ne dépassait pas 180 mille hectares. Abdoulaye Wade n’épargnait pas le patrimoine bâti de l’Etat. Il était donc difficile de faire pire que lui.
Dès 2013 on alertait : «Macky, le risque de faire pire que Wade»
On avait donc déjà appris avec Abdoulaye Wade tout ce qu’il ne fallait plus faire. Dans le cortège d’une marche de l’opposition, nous commentions avec un groupe de leaders politiques, dont feu Ousmane Tanor Dieng, Jean-Paul Dias et Abdoulaye Bathily, des informations, publiées par la presse, de la cession à vil prix par le régime de Abdoulaye Wade d’appartements et de villas à Mermoz, dans Dakar-Plateau, à Fann Résidence et à la Cité Fayçal, à des membres de son entourage. Avec Wade, si vous occupiez un logement de fonction et que vous étiez dans les bonnes grâces de son régime, il suffisait de savoir demander qu’il vous fût cédé. Ousmane Tanor Dieng tirait la conclusion sentencieuse : «De toute façon, une fois au pouvoir nous leur ferons payer le juste prix ou ils rendront les villas ou appartements.»
Le 25 février 2013, dans une chronique intitulée : «Macky, le risque de faire pire que Wade», nous relevions : «Que n’a-t-on pas dit de la gouvernance prédatrice de Abdoulaye Wade notamment sur la gestion du patrimoine foncier de l’Etat ? La façon dont les réserves foncières de l’aéroport de Dakar avaient été dépecées avait choqué. Ces terres avaient été aliénées dans le cadre d’une opération qui a généré des ressources publiques importantes et qui n’ont nullement été tracées dans le Trésor public (…) On pensait que plus jamais de telles pratiques n’auraient cours, surtout que le Président Macky Sall porte en bandoulière un slogan de gestion vertueuse. Force est de constater que le cauchemar continue, que le gouvernement, après moins d’une année de gestion des affaires publiques, s’illustre négativement par des pratiques peu orthodoxes. La corruption est bien présente et constitue l’une des principales tares de l’équipe dirigée par Abdoul Mbaye.
Dans son édition du 18 février 2013, le journal Le Quotidien révélait un nouveau gros scandale foncier. L’Etat du Sénégal venait de signer avec les entreprises Socabeg et Dms Habitat, des protocoles pour un montant de 6,8 milliards de francs pour l’acquisition de terrains pour ériger des logements sociaux dont le Président Macky Sall a annoncé la réception des clefs pour le mois de juillet 2013 (Ndlr : ironie du sort, ces villas ne sont toujours pas livrées, sept bonnes années après). Une partie du paiement sera réalisée par le biais d’une dation en paiement. Cela ne rappelle-t-il pas le montage du Monument de la Renaissance africaine ? Cette nouvelle affaire tourne en une véritable opération d’escroquerie portant sur des deniers publics. En effet, l’Etat du Sénégal achète des terrains qui lui appartiennent déjà, au prix de 10 mille francs le m2. Ces terrains de Tivaouane Peulh constituent des baux que l’Etat du Sénégal se proposait d’allouer à ces opérateurs immobiliers pour moins de mille francs Cfa le mètre carré. Autrement dit, l’Etat du Sénégal se permet d’acheter ce qui juridiquement lui appartient déjà. Les services fiscaux auraient élevé, en vain, une protestation face à cette forfaiture. Ils avaient du reste fait de même lors des opérations de découpage des terres de l’aéroport Léopold Sédar Senghor. Le gouvernement de Abdoul Mbaye est dans la même logique. (…) Franchement, on ne pouvait pas s’imaginer que le schéma des terres de Bambylor soit réédité sous le magistère du Président Macky Sall.» Mais plus grave, on ne s’imaginait pas, non plus, que le nouveau régime politique avait aussi appris de son prédécesseur comment dénicher des lopins de terres à se partager.
Ces nouveaux scandales fonciers qui éclaboussent Macky Sall
Selon l’entendement général, il ne restait plus de terres à Dakar après le passage de Abdoulaye Wade. Mais on aura la preuve du contraire. Macky Sall avait dénoncé les attributions foncières scabreuses du régime défunt et avait promis que plus jamais de telles pratiques ne seraient tolérées. Il avait chargé le Pr Moustapha Sourang d’élaborer un rapport sur la question foncière. Des consultations furent faites sur l’ensemble du territoire national pour voir clair sur tous les litiges et proposer des réformes sur la question foncière au Sénégal. Mais très rapidement le régime de Macky Sall a pris le pli de son prédécesseur. Des terrains, en veux-tu, en voilà. On se nourrit toujours sur la bête. Les cas sont légion et on en oublierait même ! Dès 2014, une nouvelle opération de morcellement de parcelles a été effectuée sur les réserves foncières de l’aéroport de Dakar. Mais le plus sulfureux est à venir. Sous le prétexte de donner des lots de terres de 200 mètres carrés à quelque 300 personnes, victimes de spéculateurs fonciers sur un projet de la cité Tobago, une superficie de 60 hectares vient d’être morcelée, sur les réserves de l’aéroport de Léopold Sédar Senghor. Cette surface va du siège de la Boa au hangar de l’avion de commandement du président de la République. Des hauts fonctionnaires, des responsables politiques, des chefs religieux, des journalistes, ont été servis. Ces terrains sont aujourd’hui revendus au prix moyen de 50 millions de francs l’unité de 200 m2. Un rapide calcul donne une idée des énormes gains réalisés. Les bénéficiaires du lotissement sur le Tf 5725/DG aux abords de l’hôtel Radisson sont encore plus heureux, car le mètre carré sur ce site est cédé à 1 million de francs. Ce site qui provoque les hurlements de Barthélemy Dias, le maire de la commune Mermoz-Sacré-Cœur, a été partagé à des autorités politiques, des hauts fonctionnaires, des guides religieux, des personnalités étrangères et des opérateurs économiques. Le titre foncier numéro 17861/DG constituant le camp militaire Leclerc au quartier Liberté VI, a été découpé pour les mêmes catégories de personnes. Un guide religieux s’y est vu offrir un lot de 9 hectares qu’il a immédiatement revendu à plus de 5 milliards de francs. Une partie du camp militaire de l’armée de l’Air a été morcelée en 63 parcelles de 500 m2, distribuées à des autorités militaires et des personnalités civiles. Le Haut commandement de l’Armée nationale avale difficilement la pilule, du fait qu’il existait sur le site un projet d’érection du siège de l’Etat-major de l’armée de l’Air. A quelques encablures de ce site, un beau domaine surplombant la mer et la Mosquée de la Divinité a été affecté à un opérateur qui y construit un hôtel. Un autre opérateur économique a bénéficié d’une autre affectation foncière sur la falaise protégeant la zone côtière, sur le flanc de la colline du phare des Mamelles, derrière les immeubles en construction de la Caisse des dépôts et consignations. De l’autre côté du phare, sur l’ancien champ de tirs, affecté en son temps par Karim Wade au projet hôtelier du groupe Kharafi et qui devait également abriter des villas présidentielles pour le Sommet de l’Organisation de la conférence islamique en 2008, une certaine bamboula a été organisée. Des groupes de citoyens déclarés protecteurs de l’environnement protestent vigoureusement contre ces affectations foncières. L’ancienne gare routière «Pompiers» a été donnée à des promoteurs immobiliers marocains et une partie de la caserne de police Abdou Diassé est tombée dans l’escarcelle des opérateurs immobiliers. La zone du hangar des pèlerins de l’aéroport de Yoff vient de faire l’objet d’un nouveau lotissement en 400 parcelles de 250 m2. Les attributaires les revendent au prix de 75 millions de francs Cfa. Sur la Corniche Ouest de Dakar, les terres controversées jouxtant l’hôtel Terrou-Bi ont fini d’être définitivement affectées.
Le périmètre qui était affecté pour la construction de l’Ambassade de Turquie, un projet contre lequel s’étaient soulevés des habitants de Dakar, a été réaffecté. Une extension a aussi permis de servir d’autres personnalités. Le Président Macky Sall avait fait stopper le lotissement de la bande des filaos de Guédiawaye, sur une longueur de plusieurs kilomètres, entre la plage Malibu et le village de Malika. De nombreux lots de terrains devaient revenir à des proches de Ousmane Sonko, le leader de Pastef. Mais curieusement, le lotissement a été repris et devrait passer prochainement devant la Commission de contrôle des opérations domaniales (Ccod). On relèvera que ce lotissement en parcelles à usage d’habitations trahit le Plan d’aménagement urbain de Dakar qui destinait la zone à l’érection de réceptifs hôteliers et autres endroits de villégiature longeant la future «autoroute la côtière». L’affectation de grands espaces de terres à Pointe Sarène, à un opérateur économique qui n’a pas tardé à les revendre à prix d’or, défraie la chronique.
Par ailleurs, on a fini de constater que des dizaines d’hectares de terres de la nouvelle ville de Diamniadio ont été allouées à des particuliers qui se sont livrés à des opérations de spéculation foncière. De vastes terres qui n’ont pu être vendues font déjà l’objet d’hypothèques. Le nouveau Délégué général du Pôle urbain de Diamniadio, Diène Farba Sarr, a du mal à reprendre ces terres qui n’ont pu être mises en valeur. Toujours à Diamniadio, d’autres opérateurs immobiliers ont bénéficié d’affectations foncières pour des logements sociaux, mais ont réalisé sur les sites des logements vendus à des centaines de millions de francs Cfa. Les lotissements entamés par le régime de Wade à Bambylor, Sangalkam et le Lac rose ont pu être poursuivis.
Les parangons de vertu à la bouche pleine
Ils sont nombreux à vouloir s’indigner devant des scandales de prévarication de ressources publiques. Mais la question foncière s’avère assez délicate pour nombre d’entre les parangons de vertu de la scène publique sénégalaise. Elles sont nombreuses, ces vigies de la bonne gouvernance, journalistes, leaders de la Société civile, activistes, hommes ou femmes politiques, qui se taisent comme des carpes dès qu’il s’agit de ces questions foncières, ou qui font une dénonciation sélective, tant certains se sont fait servir à l’occasion. «Une bouche pleine ne parle pas», dit un proverbe africain. Cela explique la confusion de bien des personnalités sur la question foncière, mais l’opinion constate bien ce silence. Ils sont nombreux, journalistes et hommes politiques, à s’être égosillés sur l’affaire du Tf 1451/R, indexant un prétendu scandale qui aurait porté sur 94 milliards de francs. Il est fort utile de dénoncer des actes de prévarication et pour autant on ne les a jamais entendus sur le lotissement de la «zone de recasement» de l’aéroport de Yoff, effectué sous le régime de Macky Sall, comme on ne les avait jamais entendus du reste et jusqu’à présent, dénoncer le dépeçage de plus de 80% de la superficie du site de la Foire de Dakar par le régime de Wade. On entend de nombreuses personnes fulminer, certainement à juste raison, contre les lotissements au pied du phare des Mamelles. C’est sans doute une belle posture patriotique, mais protéger le littoral pour protéger le littoral de Dakar, ne devrait-on pas aussi parler de certains projets immobiliers du Cap Manuel ou derrière l’hôtel Terrou Bi ? Qu’on nous appelle tous à montrer nos mains propres ! C’est dans l’air du temps, avec les mesures de prophylaxie contre la pandémie du Covid-19. Le Sénégal ne s’en porterait que mieux !
ET SI MAMADOU TALLA ETAIT EXEMPT DE TOUT REPROCHE
Une vive polémique a été notée à la suite de l’échec de la reprise des enseignements-apprentissages dans les classes d’examen le 2 juin dernier.
La reprise avortée des enseignements-apprentissages dans les classes d’examen a suscité un énorme tollé dans le pays, après que des enseignants ont chopé le virus du coronavirus. A qui doit-on imputer les failles notées dans le convoi des enseignants qui a déclenché tout ? En tout cas, l’on est tenté de dire que le ministre de l’Education Nationale, Mamadou Talla, est exempt de tout reproche.
Une vive polémique a été notée à la suite de l’échec de la reprise des enseignements-apprentissages dans les classes d’examen le 2 juin dernier. D’ailleurs, le débat ne s’est pas encore estompé et les commentaires vont bon train sur l’identification des personnes responsables des failles dans le processus de convoi des enseignants, qui est à l’origine de cet échec, puisque plus d’une quinzaine ont contracté le virus. Il urge de souligner que le processus de convoi des 13 000 enseignants a impliqué trois secteurs que sont le transport, la santé, et l’éducation qui était chargée de la planification.
Compte tenu de tout ce qui a été fait sur le dernier volet, il n’est pas insensé de dire que le ministre de l’Education nationale, Mamadou Tall, est exempt de tout reproche. Il suffit simplement de rappeler certains faits pour s’en rendre compte. En effet, la planification des départs a été faite dans le temps et dans l’espace. A cet effet, le ministère de l’Education avait pris les dispositions pour la mise en œuvre et le respect du protocole sanitaire édicté par les professionnels de la santé. C’est ainsi qu’il s’était prescrit le devoir de voir chaque élève et chaque enseignants avoir à sa disposition 3 masques, mais aussi un thermo flash pour 100 élèves. En plus de cela, chaque classe ne devait contenir que 20 élèves.
En outre, autorisation a été donnée aux enseignants souffrant de maladies chroniques et donc vulnérables à la Covid-19 de ne pas retourner dans les classes. Le ministère avait prévu de mettre sur pied une salle d’isolement, un comité d’alerte et de veille au niveau de chaque établissement scolaire pour parer à toutes les éventualités. A cela s’ajoute l’interdiction de vente de marchandises et d’aliments dans l’espace scolaire. Et à une semaine de la date du 2 juin, Mamadou Talla avait déclaré à Thiès que le protocole sanitaire sera strictement respecté parce qu’il constitue la seule condition pour le démarrage effectif des enseignements.
D’ailleurs, ajoutait-il : «S’il n’y a pas un comité de suivi, s’il manque un seul élément qui est dans le protocole, dans un établissement quelconque au niveau du Sénégal, que cela soit dans les villes, dans les villages, dans les hameaux, que l’Inspecteur de l’Education et de la Formation (IEF) ou le Directeur d’école ferme aussitôt cette salle ou cette école, parce que la santé n’a pas de prix.» En raison de tous ces éléments, on peut dire que le report sine die de la reprise, à cause de la contamination de certains enseignants à la Covid-19, sonne comme une décision qui s’inscrit dans l’ordre normal des choses. Cette mesure doit être perçue comme une volonté de reculer pour mieux sauter…en toute sécurité.
«IL Y A UNE LETALITE DE 46% PAR RAPPORT AUX CAS GRAVES»
Le nombre de décès rapporté sur le nombre de cas graves est de 47. Cela veut dire que sur le nombre de malades qui sont entrés en réanimation un peu plus de la moitié sont sortis totalement guéris.
«(…) Nous étions, il y a de cela un mois, à 1115 cas confirmés, avec 28 cas graves et 8 décès. Un mois après, nous sommes à 4155 cas confirmés, 96 patients dans un état grave et 47 décès. La répartition géographique suit la même courbe que la répartition géographique des cas confirmés. Et la plupart de ces cas graves ont été notés à Dakar notamment avec 84 % et le reste des patients a été pris en charge entre Touba, Ziguinchor et Tambacounda. Même si l’âge moyen des cas confirmés n’est pas élevé, l’âge moyen des patients graves est de 61 ans. Et nous avons noté des extrêmes de 37 ans et de 85 ans. Pour ces patients présentant des cas graves, les hommes sont les plus concernés, parce que nous avons 5 hommes pour une femme. Nous avons noté aussi que chez ces patients, les comorbidités sont presque toujours présentes en plus de l’âge. Car, 9 patients sur 10 présentent au moins une comorbidité dans 75% des cas, et 2 comorbidités pour les autres patients.
L’hypertension artérielle et le diabète ont été des pathologies très souvent rencontrés. Mais d’autres ont été notés notamment l’obésité, les problèmes respiratoires chroniques dont l’asthme etc. Mais nous avons noté pour ces patients que nous avons reçus dans les services d’urgences et de réanimation, 100 % ont été admis avec une détresse respiratoire et une pneumonie. Ce qui a nécessité d’ailleurs toutes les mesures de réanimation dont l’oxygénation pouvant aller parfois jusqu’à l’utilisation du respirateur artificiel.
Parmi ces patients, 18 ont présenté au cours de leur hospitalisation une insuffisance rénale qui a nécessité une dialyse pour ces malades. Nous avons eu également des lacunes, parce que tout simplement nous avons beaucoup de patients dialysés chroniques et si on utilise ces générateurs de dialyse pour ces malades de Covid-19, cela pose d’énormes problèmes. Et c’est à ce titre d’ailleurs que des mesures ont été prises pour doter tous les centres de traitement à Dakar mais également dans les régions de générateurs de dialyse. (…)
Le nombre de décès rapporté sur le nombre de cas graves est de 47. Cela veut dire que sur le nombre de malades qui sont entrés en réanimation un peu plus de la moitié sont sortis totalement guéris. Ce qui fait une létalité de 46% par rapport aux cas graves. Mais, il faut noter que 18 patients parmi ces cas graves sont encore sous nos services et sont en train d’être pris en charge par les collègues réanimateurs. On l’a toujours dit, les conditions de prise en charge de ces patients graves doivent être améliorées à Dakar mais également dans toutes les régions du Sénégal.
La réanimation de l’hôpital Dalal Jamm va entièrement être consacrée à la prise en charge de ces cas graves et c’est le cas aussi du futur centre de traitement de l’hôpital Matlaboul Fawzeyni de Touba qui va abriter un centre de traitement épidémiologique, mais également un service de réanimation entièrement dédié à la prise en charge de ces cas graves.»
LES 253 VICTIMES DE GADAYE EN GREVE DE LA FAIM SI...
«Si d’ici 15 jours les autorités ne réagissent pas, nous allons venir sur ce site pour observer une grève de faim avec nos familles », avertit le secrétaire administratif du Collectif des victimes de Gadaye, Babacar Tine.
Mécontents de la non-applicabilité de la décision de justice de la Cour suprême qui a tranché en leur faveur, suite au différend qui les opposait avec le promoteur Mbaye Fall, les 253 victimes de Gadaye ont organisé hier un rassemblement pour menacer d’entamer une grève de la faim dans les prochains jours si les autorités continuent de s’emmurer dans leur silence.
«Si d’ici 15 jours les autorités ne réagissent pas, nous allons venir sur ce site pour observer une grève de faim avec nos familles », avertit le secrétaire administratif du Collectif des victimes de Gadaye, Babacar Tine. Sur les raisons de la prise d’une telle décision, Monsieur Tine accuse la justice. « Il y a une léthargie de l’affaire Gadaye. Une autorité qui fait des promesses à ses populations doit pouvoir les respecter. Nous ne pouvons pas comprendre que l’Etat nous dise : ‘’si vous gagnez à la Cour suprême, nous allons restituer vos terrains par un bail’’, et qu’aujourd’hui, rien n’ait évolué. » Et de poursuivre pour s’en prendre à la justice. « La décision de justice doit être appliquée.
Le promoteur Babacar Fall a été condamné à 06 mois de prison ferme avec contrainte par corps. Mais ironie du sort, Babacar Fall se pavane comme si de rien n’était. Et au même moment, de pauvres citoyens qui avaient misé toutes leurs économies sur ce site sont en train de vivre la misère. C’est injuste. »
Parlant de leur situation sociale actuelle, Babacar Tine crie son désarroi : «C’est une population affaiblie, meurtrie. Car c’est l’Etat qui a accompagné Babacar Fall pour détruire les biens de ses honnêtes citoyens. Et aujourd’hui, cet Etat est en train d’abandonner ses citoyens qui aujourd’hui vivent dans la misère.» Il poursuit pour interpeller le Chef de l’Etat Macky Sall à réagir au plus vite : «Gadaye est un drame social qui ne doit laisser personne indifférent. Le Président a l’obligation de réagir pour rendre la justice à ses citoyens.»
par la chroniqueuse de seneplus, Rama Salla Dieng
L’ENSEIGNEMENT COMME MILITANTISME FÉMINISTE À LA BASE
EXCLUSIF SENEPLUS - Nous ne pouvons pas continuer à glorifier la dextérité des acteurs de l’informel. On peut être féministe sans avoir à choisir entre cela et l'appartenance à une communauté - ENTRETIEN AVEC NDÈYE DÉBO
Ndèye DéboSeck est journaliste et professeure d’anglais au Collège d’éducation Moyen Waly Thiobane à Kaffrine, au Sénégal.
Ndèye Déboet moi nous sommes rencontrées à Dakar en novembre 2012 lors d'une conférence sur la gouvernance organisée par l'organisation pour laquelle je travaillais. Elle était journaliste stagiaire au quotidien sénégalais Sud Quotidien et est maintenant enseignante à Kaffrine. Dans cette conversation, elle raconte comment son activisme féministe de base se nourrit de sa pratique enseignante, du système éducatif sénégalais, de sa passion pour le football et de bien-être.
Ndèye Débo : Bonjour la sœur, je suis Ndèye Débo. Je suis journaliste et professeure d'anglais. J'ai enseigné dans le sud du Sénégal, à Bounkiling et maintenant je suis à Kaffrine, dans le centre. Je suis l'aînée d'une grande famille, principalement des femmes. Je suis photographe (pour le plaisir) et j'ai une passion pour l'agriculture.
Comment vivez-vous une vie féministe et est-ce facile au Sénégal (en zone rurale surtout) ?
Ndèye Débo : Je crois en ce que j'appelle la pédagogie de l'action. Je vis selon certains principes en privé et en public. J'essaie de montrer qu’on peut mener une existence selon les normes féministes sans avoir à choisir entre être féministe et appartenir à une communauté. Maintenant, c'est plus facile qu'il n'y paraît. Parce que, je négocie. Je suis une Sénégalaise, une Lebu, une musulmane, une féministe. Beaucoup de cultures, de pratiques, de valeurs se retrouvent en moi. La difficulté était de reconnaître que ces systèmes de croyance ne s’excluaient pas mutuellement. Et de voir qu'au cœur de chacun d’entre eux se trouve le développement intégral de l'être humain, qui est une des finalités de la Loi d’orientation de l’éducation Nationale du Sénégal. Maintenant que j'en suis consciente, je navigue à travers ces identités avec une intelligence émotionnelle et sociale.
Vous avez travaillé dans le journalisme et le blogging auparavant. J’ai été vraiment impressionnée après avoir lu votre article intitulé «Leçons d’économie domestique» en 2013 dans lequel vous évaluiez de manière critique l’offre télévisuelle qui, selon vous, se concentrait principalement sur «les souffrances des femmes sénégalaises et les maladies des hommes», est-ce que cela a changé ?
Ndèye Débo :Dans une certaine mesure, il y a des changements importants dans le paysage médiatique. Maintenant, les télévisions nationales diffusent des émissions où des femmes occupent le devant de la scène, décident de leur vie etc. et ne sont plus seulement les anges de la maison. D'un autre côté, toutes les émissions auxquelles j'ai fait référence dans cet article de 2013 sont toujours diffusées. Aujourd’hui plus que jamais, les prêcheurs religieux ont la possibilité de dicter le code vestimentaire des femmes, les devoirs de l’épouse et de la mère, etc. Récemment, une série télévisée a en quelque sorte ébranlé l’opinion publique, Maîtresse d’Un Homme Marié (MDMH). Les principaux protagonistes sont des femmes, mais elles peuvent clairement décider d’avec qui elles sortent, comment elles vivent, etc. MDHM est remarquable en ce qu'il change la perspective et présente les protagonistes non seulement comme perdues, des anges etc. mais pointe du doigt les dynamiques de pouvoir en jeu dans les relations sénégalaises et la complexité du problème. Pas comme il apparait une opposition entre la bonne épouse et la maîtresse, mais clairement, de quelle manière le patriarcat, les hommes bien sûr et les femmes travaillent pour maintenir le statu quo. L'émission est si réussie et si stimulante qu'elle a irrité des censeurs religieux qui ont ensuite été invités à jeter un œil au scénario.
Merci Ndèye Débo, moi aussi j'ai lu plusieurs bonnes critiques de MDHM dont celle de Marame Guèye. Alors, qu'est-ce qui vous a poussée à devenir enseignante d'anglais ?
Ndèye Débo : Dans une certaine mesure, ma mère a suscité mon amour dans l'enseignement. Elle n'a jamais fréquenté l'université alors qu'elle avait été une excellente élève jusqu'au lycée. Elle était notre répétitrice et beaucoup de mes camarades de classe venaient à la maison pour bénéficier du renforcement après les classes. J’ai toujours pensé qu'elle aurait été une excellente enseignante. Je porte donc en quelque sorte le flambeau.
Quand j'étais au lycée, je voulais terminer un doctorat et devenir professeure d'université. J'ai littéralement quitté l'université après mon certificat de maîtrise en anglais. J'ai suivi une formation et je suis devenue journaliste, mais je n'avais pas soutenu mon mémoire de maîtrise. Donc, j’y suis retournée. J'ai obtenu mon diplôme et je suis allée à la FASTEF (Faculté des Sciences et Technologies de l’Education et de la Formation) pendant deux ans. Et là, j'enseigne l'anglais au lycée depuis 6 ans maintenant.
Vous décrivez votre enseignement comme du «militantisme féministe à la base», pouvez-vous nous en dire plus ?
Ndèye Débo : Je crois vraiment au pouvoir de transformation de l'éducation. J'ai le privilège d'avoir eu de nombreuses expériences qui m'ont conduite là où j'en suis maintenant. J'ai participé à un institut féministe avec WLUML (Women Living Under Muslim Laws), j'ai travaillé pour l'un des premiers journaux privés au Sénégal, Sud Quotidien. Je suis bénévole dans un réseau agricole, je suis (je n'ai pas assisté aux réunions depuis des années) membre dormante du CNCR (Conseil National de Coopération et de Concertation des Ruraux), j'ai des expériences de travail en protection de l'enfance, plaidoyer agricole, communication pour le développement. Et, j'ai vraiment eu le privilège d'apprendre directement auprès de femmes fortes comme le Dr Fatou Sow, Codou Bop, Vore Gana Seck, Khady Ndao (de la Fédération Nationale des Groupements de Promotion Féminine). Et j'ai la chance de pouvoir apporter tout ce vécu dans ma pratique d'enseignante. Je travaille avec des pré-adolescents et des adolescents. Mes élèves sont littéralement à un âge où ils se construisent une personnalité. À ce stade, des problèmes de représentation, d'estime de soi, de confiance sont en jeu. De plus, dans ma pratique quotidienne, je respecte la recommandation de la loi d’orientation nationale qui propose «de lier l’école à la vie réelle». Je tiens à toujours élaborer des contenus qui, d'une manière ou d'une autre, s’adressent à la réalité que vivent mes élèves sur le plan culturel, social et religieux. Par exemple, pendant deux ans, je leur ai demandé d'écrire des contes de leurs groupes ethniques. Les Peuls ont écrit des contes peulh, les Mandjaks ont fait de même, etc. De cette façon, je suis sûr de satisfaire leur sens de la communauté ainsi que leur maîtrise de la langue anglaise, car, ils/elles font de la recherche, utilisent des dictionnaires, collaborent, etc. Je les incite également à s‘intéresser aux sujets de l’heure, à l’actualité internationale, etc. J'essaie de faire appel à leur sensibilité culturelle et leur pensée critique.
Je me souviens d'avoir lu un article émouvant que vous avez écrit en 2017 sur votre défunt étudiant, Mamadou Saliou, décédé en Libye en essayant de migrer vers l'Europe, et vous décriviez la «situation des migrants comme une crise de citoyenneté». Pouvez-vous nous en dire plus ?
Ndèye Débo : Cette année-là, nous avions entendu de nombreuses rumeurs selon lesquelles des écoles avaient perdu des élèves à cause de l'immigration clandestine. Nous ne pouvons savoir exactement combien d’étudiants de tout le Sénégal sont morts dans les mers ou en Libye. Combien vivent sous la contrainte, soumis à l'exploitation, aux abus systématiques, à la traite des êtres humains ? Nous n'en avons aucune idée. Et je pense toujours que s'ils avaient un peu d'espoir dans le futur, ils ne seraient pas partis. S'ils avaient été dans des conditions décentes à la base, ils auraient peut-être voulu migrer. Mais ils auraient pris des décisions moins désespérées et fatales.
Mamadou Saliou était dans l’une de mes classes lors de ma première année. Je suis admirative des élèves de Bounkiling ou de tout autre endroit sans ressources qui, contre toute attente et défiant tout pronostique, passent le cap du lycée. Ces enfants sont l'incarnation du courage. C’est un miracle qu’ils surmontent la pauvreté, de longues marches pour se rendre à l’école, la faim, travailler comme bonne ou conduire une charrette après l’école.
Bien sûr, tout le monde ne peut pas réussir à l'école, mais nous avons construit un système où l'école est pratiquement le seul moyen de sortir de la pauvreté. Ce n’est pas une question d’éducation ou d’absence d’éducation en soi. C’est une question d’égalité de chances, de politique et de disponibilité de l’emploi. Nous ne pouvons pas continuer à glorifier le travail précaire et la dextérité des acteurs de l’informel dans un contexte systémique de survie. Et nous sommes responsables. Nous, pauvres citoyen.ne.s, nous élisons des dirigeants non pas en fonction de leurs programmes mais de leur charisme ou de leur fausse proximité avec le peuple. Nous les autorisons à piller nos ressources et ne les tenons jamais comptables. Bref, j'ai été dévastée par la nouvelle de la mort de Mamadou Saliou. Mais je l'ai définitivement compris.
De nombreux enseignants et universitaires ont écrit sur la crise persistante du système éducatif sénégalais. Quelles sont les raisons de cette crise et comment pourrions-nous la résoudre ?
Ndèye Débo :Les raisons sont très simplement, une mauvaise gouvernance et une mauvaise gestion. Depuis des années, régulièrement, le gouvernement propose de nouveaux projets, dont la plupart n'apportent pas d'amélioration systémique. Ils visent souvent un aspect de l'éducation, comme le taux d'alphabétisation, les compétences en lecture, etc. Parallèlement, les budgets des écoles ont diminué avec des réductions drastiques des ressources allouées à l'équipement. Les enseignants ont des salaires ridicules et des conditions de travail désastreuses. Et chaque année, le gouvernement, les parents, la société civile, tous les autres segments de la société en appellent à la responsabilité sacerdotale des enseignants. Un ministre disait : «nous vous avons confié ce que la Nation a de plus chère». Pour les solutions, nous pourrions commencer par une meilleure répartition des ressources, une augmentation des budgets scolaires et des salaires des enseignants, de meilleures conditions de travail.
Nous sommes actuellement confrontés à cette pandémie mondiale du Covid-19, comment sensibilisez-vous vos élèves ?
Ndèye Débo :Depuis le début, c'est-à-dire lorsque nous avons appris l'existence du Covid-19 à Wuhan, j'ai discuté avec mes élèves, posé des questions sur le virus, son origine, les mesures de prévention, etc. Beaucoup de collègues le faisaient déjà pour sensibiliser celles/ceux qui n'avaient pas accès à l'information. Donc, avec mes élèves nous avons discuté des bases, de la prévention, le lavage des mains, etc. Chaque jour avant la décision du gouvernement de suspendre les cours, on y consacrait littéralement 5 minutes. Une anecdote, dans l'un de mes cours de 6e, le jour où le premier cas a été détecté au Sénégal, j'ai décidé d'en parler à la fin de la leçon, et un des élèves, Mayacine s’est tout d’un coup écrié ‘Coronavius’. J’ai d’abord fait mine de ne pas l’entendre mais il a insisté et je lui ai dit que nous en discuterions avant la fin du cours. Le lendemain, j’ai rencontré deux autres élèves, et quand l’un d’eux a voulu me serrer la main, son compagnon l’a littéralement poussé sur le côté, en disant «on a dit on ne sert pas la main ». Ces enfants ont entre 11 et 12 ans.
Avec les élèves plus âgé.e.s, en 4e, nous avons des groupes de discussions sur WhatsApp depuis le début de l'année. Avec la propagation du virus au Sénégal, on a travaillé à fact-checker les fakes-news que certains d'entre eux/elles partagent, j’essaie toujours de transmettre des informations et messages vérifiés et de les inciter à être prudent.e.s avec les nouvelles qu'ils/elles reçoivent et partagent.
Nous avons vu les photos navrantes des enseignant.e.s tentant de rejoindre leurs écoles en se précipitant dans les bus (insuffisants) mis à leur disposition. Au-delà des questions sur les risques posés en termes de distanciation physique, pensez-vous en tant qu’enseignante, que le moment soit opportun ?
Ndèye Débo : C’est absurde. Les cours ont arrêté le 14 Mars alors qu’il y avait très peu de cas ; et le président Macky Sall avait pris la bonne décision en les suspendant. Jusqu’ici, nous avons salué la riposte mis en place par les services compétents. Mais force est de constater qu’il y a eu des ratés dans la communication qui ont brouillé le message initial. Beaucoup de personnes déjà sceptiques face à la maladie ont vu là une bonne occasion de baisser la garde, voire de ne plus respecter du tout les mesures de prévention. Résultats des courses, beaucoup de stigmatisation, des malades qui se cachent etc. Nous en sommes à 4249 cas aujourd’hui (6 juin). Dans ces conditions, reprendre les cours me semble inopportun. Au-delà des rassemblements et des départs chaotiques qu’on a vus au terminus Liberté 5, nos écoles ne sont pas toutes équipées pour observer les gestes barrières. Beaucoup ne disposent simplement pas d’eau, de toilettes. A beaucoup d’endroits ce sont des abris provisoires, ou alors des classes qui menacent de s’écrouler. Des kits d’hygiène et des masques ont été mis à disposition, mais je me demande si on peut porter un masque fut-ce pendant une heure et transmettre une quelconque connaissance. C’est extrêmement difficile de respirer avec ; maintenant s’imaginer parler en classe, à des températures par endroit de +40 degrés, c’est absurde. La distanciation physique n’en parlons pas ; il faut beaucoup de présence d’esprit pour l’observer rigoureusement. Dans le contexte actuel, les enseignant.e.s qui sont des adultes auront eux/elles-mêmes du mal à rester concentré.es, les apprenant.e.s encore moins.
Vous avez une vraie passion pour le football comme vous le décrivez ici et là, je suppose que vous la partagez avec vos élèves… à votre avis, le football est-il plus regardé que la lutte (lamb) et pourquoi ?
Ndèye Débo : Dans les régions où j'ai servi, je pense que le football est plus suivi. Parce que les matchs de football sont, disons, plus démocratiques. La lutte est devenue un business depuis longtemps, récemment certains promoteurs ont proposé des projections payantes... Donc, ce que nous avons observé il y a quelques années, où les lutteurs étant littéralement des modèles et des leaders d'opinion est en train de reculer. Il y avait des programmes télé quotidiens, où on les montrait à domicile, au sein de leurs familles. Ils partageaient leurs routines, leur régime alimentaire (fonde, pain ndambe), maintenant ils sont plus distants. À Bounkiling, mon premier poste, je me souviens durant mes premières années, nous avons beaucoup parlé du lutteur Balla Gaye 2 qui est originaire de Casamance. Au fil des ans, Sadio Mané est plus revenu dans les conversations, non seulement à cause de ses talents. Mais Sadio est originaire de Bambali, non loin de Bounkiling. Beaucoup d'élèves peuvent littéralement s'identifier à lui ou le voient comme un frère ou un cousin. Et c’est fréquent de rencontrer des Sadio Mané dans la région. Tiens ! J’avais une élève nommée Sadio Mané.
Si vous deviez citer trois leçons de vie que vous avez apprises en enseignant l'anglais à des jeunes du Sénégal rural, quelles seraient-elles ?
Ndèye Débo : L’humilité, la résilience et la foi.
Vous êtes également doctorante, photographe et blogueuse, comment conciliez-vous votre travail avec l'enseignement ?
Ndèye Débo : Je me suis inscrite à un programme de doctorat au Laboratoire d’études Africaines et Postcoloniales (LEAP). Je n’ai pas officiellement renouvelé mon inscription. Cependant, je travaille toujours sur le doctorat. Je lis, écris, revois toujours. Maintenant pour la photographie, je le fais pour le plaisir, pas comme une activité professionnelle. Je dis être photographe car je pratique depuis plus de 10 ans. Je dirais «je fais des photos». Idem pour les blogs ... C'est pour le plaisir. De plus, étant dans une zone rurale, avec une connexion pas toujours disponible, je blogue très sporadiquement. Donc, dans une certaine mesure, je n'ai pas à arbitrer entre la recherche, la photographie et l'enseignement.
Parlons maintenant de votre autre passion : la littérature. Quels sont les trois livres qui vous ont marqué, et recommanderiez-vous de les lire ?
Ndèye Débo : Weep Not Child par Ngugi Wa Thiong’o (1964)
Murambi, le livre des ossements de Boubacar Boris Diop (2000)
La Couleur Pourpre d'Alice Walker (1970)
Puis-je ajouter The Waves de Virginia Woolf (1931) ?
Comment prenez-vous soin de votre bien-être ?
Ndèye Débo :La photo ! Quand je stresse il me suffit de tendre la main pour prendre mon appareil photo ou mon téléphone et je suis instantanément apaisée. Je fais régulièrement du yoga. Quand je suis à la maison, c'est-à-dire à Dakar, je fais de longues promenades le long de la plage, auquel cas je prends aussi des photos. Je pratique parfois le tricot et la couture qui me permettent de me déconnecter et de m’aérer l’esprit.
J'ai aussi des sessions karité, où chaque matin après la douche, je m’enduis de beurre de karité.
Dr. Rama Salla Dieng est écrivaine, universitaire et activiste sénégalaise, actuellement maîtresse de conférence au Centre d'études africaines de l'Université d'Édimbourg, Ecosse.
EXCLUSIF SENEPLUS - La réforme dite ambitieuse du gouvernement français est un leurre - Le retour d'expérience sur la gestion du covid-19 doit aider à mieux s'armer contre les périls à venir - AU FOND DES CHOSES AVEC FÉLIX ATCHADÉ
Pour Felix Atchadé, les fondamentaux du FCFA demeurent, malgré la réforme annoncée par Alassane Ouattara en décembre et récemment entérinée par le gouvernement français. L'éditorialiste de SenePlus, revient dans ce numéro de "Au fond des choses" avec Mame Lika Sidibé, sur les motivations de son texte intitulé "Non à la rénovation du FCFA" publié sur notre site.
L'auteur de "Radioscopie d'un système de santé africain : le Sénégal", est également interrogé sur la gestion sanitaire de la crise du coronavirus par le gouvernement de Macky Sall.
«LAISSER UN LEGS AUX GENERATIONS FUTURES»
Invité de la plateforme de l’association nationale de la presse sportive (ANPS), ce samedi, me augustin Senghor a passé en revue les questions brulantes de l’actualité du football.
Invité de la plateforme de l’association nationale de la presse sportive (ANPS), ce samedi, me augustin Senghor a passé en revue les questions brulantes de l’actualité du football. De l’impact de la pandémie du Covid-19, de ses conséquences à l’éventualité d’une Co organisation de la Can 2025 avec la Guinée, aux infrastructures sportives en passant par son mandat à la tête de l’instance dirigeante du football, le président de la fédération sénégalaise de football a fait le point. Sans détour.
Reprise du championnat : «la décision du Comité d’urgence reste de vigueur»
A la lumière de ce qui s’est passé ces derniers jours, le Comité d’urgence s’est réuni et a proposé de convoquer le mois prochain le Comité exécutif pour étudier les possibilités d’anticiper sur le mois de novembre. Cela voudrait dire que nous pourrions envisager de terminer la saison en jouant les phases retours de Ligue 1 et L2, sans oublier les autres championnats amateurs. Ce sera juste une étude et la décision initiale prise par le Comité d’urgence reste de vigueur. La difficulté c’est qu’il nous paraissait difficile sans qu’on nous le reproche ou que ça ne fasse des griefs aux autres équipes de déclarer Teungueth FC champion. C’est pourquoi nous avions pensé à cette formule qui serait moins injuste.
«L’Etat devra accompagner le sport et le football»
Nous sommes en pleine pandémie de Covid-19 et comme beaucoup de secteurs d’activités dans le pays, le sport en particulier le football, seule fédération en son sein avec une Ligue professionnelle de football et des clubs amateurs investissent plus que d’autres disciplines et en payant des salaires. Nous avons été impactés négativement et nous avons espoir que l’Etat devra accompagner le sport et le football. La Fédération a pris les devants en aidant les clubs et acteurs à supporter les difficultés financières. Nous avons conçu un programme post Covid-19, incluant la fin de cette saison et celle 2020-2021
600 millions pour appuyer l’ensemble des clubs
Je dois comptabiliser toutes les actions qui ont été menées. Nous sommes aux alentours de 550 millions. Si on doit comptabiliser l’appui de la FSF, les membres du Comité exécutif, la LSFP, les ligues, les présidents de Ligue, les joueurs de l’Equipe nationale, on n’était pas loin de 150 ou 180 millions. La FSF vient de débloquer près de 350 millions pour appuyer l’ensemble des clubs et démembrements qui ont été impactés… Nous n’avons pas encore terminé et si nous recevons d’autres fonds nous allons soutenir les clubs. Nous tournons autour de 550 voire 600 millions depuis le début de la pandémie.
Moderniser le stade Demba Diop
Nous avons beaucoup investi dans les infrastructures ces dernières années et nous allons continuer à le faire. Nous n’avons pas mal de projets qui pourraient être achevés ou avancés d’ici l’année prochaine. Dans le cadre de ces projets, je parlerai du stade Demba Diop qui est fermé depuis 2017. Cela pose beaucoup de préjudices au football et particulièrement au football dakarois. Il est important, vu la place de ce stade dans la vie du football sénégalais et des autres sports, qu’il soit réhabilité et rouvert. Le président de la République nous l’a confié et nous avons commencé à travailler avec le ministre des Sports pour la réhabilitation. Ce sera une réhabilitation et une modernisation. C’est un patrimoine sportif qui a une histoire.
Nous voulons en faire un petit modèle sénégalais des stades anglais. Tous les sièges seront assis et nous allons aussi réorganiser pour que la distribution change. On se rend compte que tout le monde est à l’étroit, tribune de presse, espace VIP, le salon d’honneur... Ce stade sera aux normes de sécurité FIFA pour éviter les incidents. Nous avons tous en tête les moments mémorables, où les Lions jouaient dans ce stade. Il a beaucoup d’histoires. Mais, je vais insister sur les délais car, Dakar est sevré de terrain et nous voulons moderniser en une année le stade. Il suffira juste de faire les commodités d’accès, de sortie, de fluidité, d’organisation, du confort, des panneaux d’affichage moderne, des sièges assis de 15 à 18 000 places, si c’est possible nous irons jusqu’à 20 000 places. Autre projet, c’est le siège de la Fédération sénégalaise de football. Je pense que nous sommes à l’étroit dans l’actuel siège qui ne reflète pas le niveau de rayonnement de notre football Il est temps d’avoir ce siège qui sera logé dans les locaux de l’ancienne ligue de football du Cap-Vert, au Point E. Ce sera un immeuble R+6 extension que nous voulons moderne et fonctionnel. Nous allons continuer jusqu’à ce que les 13 ligues de l’intérieur du pays puissent avoir leur siège. Il y a aussi l’hôtel fédéral, centre d’hébergement de haut niveau qui sera à Toubab Dialaw. Nous avons pu nous accorder avec le département d’investissement de la FIFA dans ce sens. Il y a beaucoup de projets et nous voulons les boucler dans un délai court.
Candidature en 2021 : «Je suis focus sur ma mission et mon travail»
J’ai été élu pour un mandat de quatre ans et il me reste à peu près 15 mois. Une période durant laquelle je serai tourné vers mon travail, ma mission et engagements que j’avais souscrit en 2017. Je pense que beaucoup de choses ont été faites, mais il en reste encore. Il y a de grands chantiers et notre objectif ce n’est pas de savoir si on reste ou part. Ce qui nous intéresse c’est de laisser un legs aux générations et aux dirigeants futurs des acquis qui leur permettront de maintenir les progrès en cours. Les générations futures diront que l’actuelle équipe dirigeante a laissé sur place une bonne organisation, des infrastructures des équipes compétitives pour pouvoir rester le plus longtemps possible au sommet du football africain, glaner des trophées pour rattraper le temps perdu depuis les indépendances. Ma candidature ce n’est pas ce qui compte. Je suis focus sur ma mission et mon travail. Il y a eu tellement de crises où j’aurais dû partir. Je me dis que je suis un miraculé.
Présidence de la CAF : «C’est un poste prestigieux, mais chacun a son destin et son mérite»
On estime que j’ai un profil intéressant pour diriger la CAF, ça se dit. J’entends et j’ai eu à me prononcer làdessus. Je reste sur mes principes qui veulent que je sois quelque part pour apporter ma contribution aux côtés d’autres. Par contre, je me couche tous les jours en pensant à une CAF rayonnante et je travaille aux côtés du président Ahmad pour bâtir un football africain fort et sans aucune ambition personnelle. C’est ça notre objectif, nous y travaillons. Le travail est toujours sanctionné positivement ou négativement. Tout le monde ne sera pas président de la CAF. C’est un poste prestigieux, mais chacun a son destin et son mérite. Il ne faut pas oublier qu’être président de la CAF demande un investissement beaucoup plus important que celui de président de Fédération nationale.
Maintient de la CAN en janvier 2021 : «Elle est assez compromise»
En tant que membre du Comité exécutif et vice-président du COCAN, il me sera difficile de vous donner mon avis. Je suis soumis à une certaine réserve. Je dirais simplement que nous sommes confrontés à une pandémie qui porte atteinte à toutes les compétitions internationales non seulement de la FIFA, mais aussi celles des Confédérations, dont la CAF. Cette CAN qui devait voir ses éliminatoires se terminer dans quelques mois. Elle est assez compromise, car il sera difficile de trouver les fenêtres FIFA nécessaires pour terminer quatre journées d’éliminatoires (3ème, 4ème, 5ème et 6ème journées, Ndlr).
Co-organisation CAN 2025 : « C’est la Guinée qui doit dire si elle est prête ou non»
Je dois d’abord dire clairement que la CAN 2025 a été attribuée à la Guinée et non pas aux deux pays. Aujourd’hui, nous n’avons pas les cartes en main et c’est la Guinée qui doit dire si elle est prête ou non à organiser seule ou s’ouvrir à d’autres pays. Je me suis prononcé une fois sur cette question en disant que ce serait une excellente chose de le faire. Notre président et son gouvernement ont mis en branle un certain nombre de projets qui nous permettront d’avoir 4 ou 6 stades internationaux en plus de la réfection de Demba Diop. C’est autant de facteurs qui montrent que le Sénégal se prépare pour organiser dans quelques années. Si c’est une co-organisation sera plus légère, il ne faut pas oublier que cette CAN quand on la donnait à la Guinée c’était avec 16 équipes, maintenant c’est 24. C’est lourd pour n’importe quel pays africain à l’exception de deux ou trois. Il faut que nous Africains qu’on puisse avoir l’humidité de faire les choses ensemble. Des pays gigantesques comme les Etats-Unis, le Canada et le Mexique décident de se mettre ensemble pour la Coupe du monde 2026. L’Afrique devrait le faire pour une CAN à 24 et la CAF pourrait inciter les pays qui ne remplissent pas ces critères d’aller vers cette option. Cette CAN à 24 n’aura de sens que si on arrive à pousser les pays voisins d’aller vers des co-organisations. Je suis certain que ça sera de belles fêtes, des CAN bien organisées ou les vols seront distants d’une à deux heures. Chaque pays pourra se doter d’infrastructures et avoir un héritage post–CAN pour pouvoir développer son football. Je pense que c’est l’avenir de cette CAN si on veut la maintenir à 24 pays.
Football local : «Le financement du football professionnel au Sénégal pose problème»
C’est le paradoxe qu’on vit au Sénégal. Pendant trop longtemps, on se plaignait des résultats de nos équipes nationales. On était inexistant en petite catégorie et on allait de déception en déception pour l’équipe nationale A. Aujourd’hui, l’équipe A domine le classement africain depuis 3 ans, les petites catégories et le foot féminin gagnent, le Beach Soccer rayonne. Mais, nos équipes locales sont éliminées au niveau des compétitions africaines. Le financement du football professionnel au Sénégal pose problème. Nous avons beaucoup de clubs, mais aucun ne constitue la panacée. On a aujourd’hui des clubs qu’on dit «Académie», il y a des avantages et des inconvénients. Les clubs traditionnels ont connu leurs heures de gloires, ainsi que ceux des entreprises. Il faut s’asseoir et voir le meilleur format. Je pense qu’on doit travailler à assurer de grands ensembles pour avoir des clubs forts et structurés. Pourquoi ne pas avoir des fusions entre des clubs traditionnels et des clubs d’entreprises, surtout insister sur l’argent injecte dans le football professionnel. Partout en Afrique, les Etats ont mis la main à la poche pour le développement du football professionnel. L’Etat ne doit pas regarder le football comme une simple activité de loisirs. C’est une activité économique et elle est éligible au même titre que les autres dans le Programme Sénégal Emergent (PSE). Il faudra financer ce football pendant 5 ou 6 ans et on verra qu’il décollera. Je crois aussi qu’il faudrait accompagner nos télévisions nationales pour l’acquisition des droits et en avoir l’exclusivité. Si la RTS ou d’autres télévisions s’associent, le football professionnel demeurerait au Sénégal.