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23 septembre 2025
par Abdourahmane Sarr
LEADERSHIP SÉNÉGALAIS, CAFOUILLAGE AU SOMMET
Les mécanismes permanents que sont le Fongip et le Fonsis n’ont pas donné les résultats escomptés car ce sur quoi il faut davantage travailler c’est l’inclusion financière des sénégalais dans une monnaie compétitive
L’appel du président Macky Sall pour une annulation de la dette publique du Sénégal et le réaménagement de la dette privée était une erreur pour un pays comme le Sénégal qui a une dette soutenable. Cet appel a soulevé et continue de soulever l’étonnement de tous ceux qui suivent ces questions sérieusement. L’erreur est humaine, mais ce n’est pas parce que le président a fait une erreur dans une tribune qui appelait à la solidarité, réaffirmée dans des interviews avec la presse étrangère écrite et télévisuelle, qu’il faut que ses laudateurs continuent d’enfoncer le clou en essayant de l’en sortir avec des arguments économiques qui ne tiennent pas la route. Il faut plutôt tourner la page.
Le meilleur argument de rattrapage nous est venu du ministre des Finances et du Budget dans sa tribune de Jeune Afrique. Après avoir expliqué toutes les raisons pour lesquelles le Sénégal était un bon débiteur, il a argumenté qu’une annulation de notre dette publique permettrait au Sénégal de reconstituer cette même dette jugée soutenable pour les besoins d’une relance contracyclique de transition. L’argument était clair, nous nous y sommes opposé pour une seule raison : La reconstitution de la dette en devises, puisqu’à son niveau actuel, ce qu’il faut faire est la réduire du fait de la vulnérabilité extérieure qu’elle représente au vu de la nécessité de flexibiliser notre monnaie. Le Sénégal a signé un programme avec le FMI qu’il a crié sous tous les toits être le sien sans y croire et qui appelle à réduire notre endettement en devises à moyen terme « Sénégal-FMI : Décryptage Paradigme à Revoir ». Si la communauté internationale veut contribuer à notre relance par le budget, qu’elle nous fasse des dons car à défaut nous ferons appel à notre résilience et c’est possible.
En effet, la nécessité d’une riposte contracyclique n’est pas remise en cause, nous l’avons défendue dans notre tribune intitulée « Organiser la Résilience Systémique au Covid-19 » et l’avons réaffirmée à la suite de la publication du plan de l’Etat dans notre tribune « Macky Sall : Réalisons Notre Destin Libres ». Cette réponse contracyclique est possible sans demander l’aumône à nos bailleurs si nous responsabilisons notre banque centrale et lui donnons une autonomie d’objectif sur le taux de change de l’Eco à mettre en œuvre en 2020 en ne ratifiant pas la garantie française qui nous est proposée. Nous l’avons argumentée dans la tribune intitulée «Financement UEMOA : Proposition Post-Covid ».
Dans tous les cas de figure, ceux qui nous dirigent doivent clarifier leurs positions politiques pour plus de cohérence dans leurs choix économiques. Qu’est-ce qu’ils sont quant au fond et qu’est ce qui les guide ? Ils veulent être libres ou dépendants ? Nous avons argumenté dans plusieurs tribunes d’avant la présidentielle de 2019 que le président Macky Sall était à la croisée des chemins. Soit il ne sait pas ce qu’il est véritablement ou il n’arrive pas à faire la synthèse des tendances idéologiques et doctrinales contradictoires qui l’entourent « Macky Sall: Socialiste, Libéral ou Souverainiste». Nous nous y perdons à chaque fois qu’il s’adresse à la nation, l’avant dernière en date nous appelait effectivement à réaliser notre destin, libre et la dernière devant l’impuissance de l’Etat face au Covid appelait aussi les Sénégalais à prendre leurs responsabilités redécouvrant son libéralisme. Le jour suivant, il participe à une visioconférence, le tout dans un argumentaire de dépendance et de main tendue. Les messages que nous recevons du palais dépendent peut-être de celui qui dans l’entourage était à la plume du jour.
C’est tout à fait vrai car nous nous sommes demandé cette dernière semaine à quel Boun Abdallah Dionne se fier. Sous sa propre plume, il nous a dit en défense de la cause perdue « qu’une annulation de dette ou de la reconversion de celle-ci en une rente perpétuelle, l’essentiel pour l’emprunteur est qu’il n’ait plus rien à payer afin de reconquérir sa capacité d’endettement", ceci parce que des impôts nouveaux ou un endettement nouveau sans annulation préalable s’avèreront insoutenables. Il avait à l’esprit le véhicule en discussion dans certains cercles qui permettrait, à l’image du mécanisme européen de stabilité, de racheter la dette africaine pour la restructurer en une dette à très long terme à taux nul. Ceci pour permettre aux bénéficiaires de créer des espaces nouveaux d’endettement car dit-il « l’Afrique a besoin d’emprunter massivement pour financer l’investissement productif et son industrialisation ».
Nous avons argumenté que ce mécanisme ne devrait pas être applicable au Sénégal pour les raisons que le ministre des Finances a évoqué dans sa propre tribune. En effet, le Sénégal ayant une dette soutenable, aucun créancier privé ne vendrait la dette sénégalaise pour réinvestir dans cette même dette puisque le Sénégal est solvable, à moins que certains parmi nos autorités veuillent nous convaincre du contraire. Ce mécanisme serait utile pour certains pays africains à la porte du défaut de paiement mais pas le Sénégal qui ne devrait même pas se porter volontaire pour un moratoire puisqu’un moratoire veut également dire ne plus pouvoir emprunter aux mêmes créanciers. Les créanciers nouveaux pourraient cependant être ceux adeptes d’un capitalisme d’Etat qui se rapprochent davantage des convictions socialistes et socialisantes véritables du président Macky Sall. Nous l’avons argumenté dans notre tribune intitulée « Macky Sall a choisi : Socialisme et Capital Etranger » à la veille de la présidentielle de 2019. Il cherche ainsi peut être à ne plus dépendre des marchés plus regardants.
Cependant, dans le magazine inaugural Tam Tam de l’Emergence sous le leadership du ministre en Charge du PSE, il est attribué les propos suivant à Boun Adballah Dionne qui cette fois mentionne le sujet tabou, la monnaie (la quatrième voie, après celles de l’impôt, de la dette, et de son annulation). Il nous dit : « Notre aptitude de riposte face à des chocs étant prioritairement budgétaire, fortement contrainte par des règles très restrictives en matière d’endettement et de déficit, doivent changer. Le politique devant dorénavant déterminer l’économique et non l’inverse. Il en sera de même au plan de l’autre versant du budget. Notre politique monétaire et financière devra être plus audacieuse et plus accommodante, même si elle est mise en œuvre par une banque centrale commune et indépendante, pour s’articuler davantage aux politiques budgétaires expansionnistes entreprises par les pays ouest-africains pour faire face à la crise.. Certes, nos stratégies d’émergence continueront à tirer profit de l’aide publique au développement et du marché financier international, bien qu’émettre aujourd’hui des eurobonds sur le marché international va devenir ne plus en plus un exercice à haut risque pour nos trésors publics. Il est ainsi attendu une endogénéisation accrue de nos politiques de financement à travers un recours plus systématique aux ressources du système bancaire et financier domestique. Il est aussi attendu davantage d’espace pour le secteur de l’industrie, donc notre secteur privé national dans nos stratégies d’émergence. C’est à ce double prix que le PSE d’après va porter de manière durable le champion ouest-africain de la reprise post-Covid que le président de la République ambitionne ».
Nous lui disons que cette dernière position n’est possible qu’avec un ECO flexible et pour ce faire il ne faut pas ratifier l’accord de garantie proposée par la France. A défaut, nous répéterons l’histoire. Les politiques proposées dans les deux positions ne produiront pas de résultats car nous les avons toutes expérimentées. Senghor a emprunté, Diouf a essayé de payer, on lui a pardonné une partie et une autre partie à Wade. Wade a emprunté, Macky a encore plus emprunté sans les résultats annoncés que sont la transformation structurelle, une croissance durable, et la révolution agricole. La gestion 2012-2019 a fini avec des arriérés payés par le FMI grâce au Covid-19, un endettement extérieur excessif, et une croissance en décélération avant Covid-19, et qui n’espérait se relever que grâce au pétrole et au gaz dont l’exploitation est reportée grâce aussi au Covid-19 qui révélera la vérité. Comme nous l’avons argumenté dans nos tribunes intitulées « Annulation de Dettes Non, Souveraineté Monétaire Oui » et «Afrique : Acteur Marginal Réveil Forcé », il faut rester fidèle à vos convictions libérales proclamées ou nous clarifier votre changement de cap car les critères de convergence après la riposte contracyclique devront demeurer pour laisser de la place au leadership du secteur privé.
Le ministre de l’Economie quant à lui nous dit « qu’il est évident que s’il y a une leçon à retenir de cette crise, c’est qu’il faut d’abord compter sur soi-même. Il faut qu’on accélère la correction de certaines tendances de notre économie, notamment notre dépendance vis-à-vis de l’extérieur en produisant davantage et en consommant nos produits et construire des bases solides pour exporter…En plus de ses investissements propres, l’Etat nouera des partenariats avec le privé et mettra en place des mécanismes pour un meilleur accès des entreprises au financement ». Nous lui disons que les mécanismes mis en place pour riposter contre les effets sur le financement de l’économie sont, comme ce qui s’est fait aux Etats-Unis et ailleurs, des mécanismes quasi-budgétaires et temporaires pour apporter la garantie conjoncturelle de l’Etat.
Les mécanismes permanents que sont le FONGIP et le FONSIS n’ont pas donné les résultats escomptés car ce sur quoi il faut davantage travailler c’est l’inclusion financière des sénégalais dans une monnaie compétitive qui nous donnera l’exutoire du taux de change au cas où les interventions de l’état accommodées par la banque centrale devaient échouer. Il faudra également des mesures qui ne sont pas d’ordre financier mais d’amélioration de la liberté économique car il est tout simplement difficile pour nos PMEs du secteur informel de réussir. L’aide attendue n’est pas pour les lobbys affairistes dépendant de l’Etat pour des marchés. Nous l’avons argumenté dans notre tribune intitulée « SENEXIT : Libéralisme Patriotique ou Socialisme? ». Il nous faut changer de paradigme et créer notre propre libéralisme car il n’y a pas d’autre voie vers le progrès. Tous les pays qui ont réussi ont adapté ce libéralisme à leur contexte, y compris la Chine et nous ne sommes pas obligés de perdre le temps qu’elle a perdu.
Nous appelons nos autorités et les sénégalais à s’approprier le slogan « Moom Sa Bopp Mënël Sa Bopp » et de construire un Sénégal de Liberté, de Démocratie, et de Responsabilité. Ce Sénégal n’est pas compatible avec le discours actuel de notre leadership qui est en réalité multiple selon l’interlocuteur. Il faut une unicité de commandement. Nous avons toutes les cartes en main, alors construisons notre avenir en comptant principalement sur nous-mêmes pour nous départir d’une mentalité d’assisté que notre situation d’aujourd’hui ne justifie pas. Pour ce faire, il nous faut arrêter de soutenir nos leaders même dans l’erreur et de leur attribuer des qualités de visionnaires ou de leadership qu’ils n’ont pas nécessairement. Ils ne sont pas des Dieux.
Les propos exprimés dans cette tribune référencée ne sont pas nuancés comme le voudraient certains de mes amis. Ils sont des convictions fortes réfutables d’un « homme ouvert » et patriote. Il serait bien que le président Macky Sall nous définisse lui-même son Libéralisme Social et nous explique comment le réaliser économiquement pour le Sénégal.
Librement.
LE PÉRIPLE DU CAS IMPORTÉ
C'est un jeune Sénégalais âgé de 23 ans, qui a quitté son pays d’accueil, le Burkina Faso, transitant par le Mali à la marche, avant de rejoindre Kédougou à bord d’une moto, avec l’objectif de pour rallier Kolda, sa localité d’origine.
Kédougou est la 12e région du Sénégal touchée par la Covid-19. La région qui n’était jusque-là pas impactée vient d’enregistrer son premier cas. Il s’agit d’un des cas importés répertoriés dans les 67 nouveaux cas recensés dans le bulletin de ce samedi, 23 mai, du ministère de la Santé et de l’Action sociale.
Saër Ndao, le gouverneur de région explique que c’est un jeune Sénégalais âgé de 23 ans, qui a quitté son pays d’accueil, le Burkina Faso, transitant par le Mali à la marche, avant de rejoindre Kédougou à bord d’une moto, avec l’objectif de pour rallier Kolda, sa localité d’origine. Il a marché pendant un mois, révèle le gouverneur. C’est ainsi qu’entré par « les points non normalisés », il a été intercepté à hauteur de la sortie de la ville par les forces de défense et de sécurité, qui veillaient au grain.
LES ASSURANCES DU GOUVERNEUR
Le représentant régional de l’Exécutif loue « la vigilance » des forces de défense et de sécurité et « la promptitude » des agents de santé. « Ce qui a permis d’amoindrir les risques et circonscrire le cas », assure Ndao. Qui tient à « rassurer les populations de Kédougou, leur (disant) que c’est un cas qui n’a pas fréquenté de famille, ici, parce qu’il n’habite pas Kédougou. Il devait continuer son chemin. Mais grâce à la vigilance des forces de défense et de sécurité, il a été contrôlé, interpellé et mis en isolement par les services du médecin-chef de district ».
Malgré tout, dit-t-il, la recherche des potentiels cas contacts se poursuit.
LA STIGMATISATION EST UN FREIN DANS LA LUTTE CONTRE LE CORONAVIRUS
Des malades expulsés par leurs propriétaires, des infirmières quittées par leur époux, les noms de cas contacts jetés en pâture sur les réseaux sociaux: en Afrique subsaharienne, la bataille anti-Covid-19 passe aussi par la lutte contre la stigmatisation
«Le coronavirus n'est pas une maladie honteuse», martèlent les autorités à travers le continent, où des personnes suspectées de l'avoir contracté sont pointées du doigt au travail, dans leur quartier et jusque dans leur foyer.
Il y a un mois, Fatou, une Sénégalaise d'une vingtaine d'années qui préfère ne pas donner son vrai prénom, en a fait l’amère expérience: après avoir été en contact avec un malade, la jeune femme - qui s'est immédiatement confinée dans sa chambre - a été mise au ban de son quartier.
«Des messages ont circulé sur les réseaux sociaux, avec mon prénom, mon nom et mon adresse», explique la jeune fille qui ne veut même pas qu'on écrive dans quelle ville du Sénégal elle habite. Puis des jeunes du quartier ont commencé à propager des mensonges, affirmant qu'elle «avait contracté le virus en couchant avec des blancs», confie-t-elle.
Fatou, qui n'a jamais quitté sa chambre avant d'être testée négative, a ensuite quand même dû passer deux semaines en isolement dans un hôtel alors qu'elle ne présentait aucun symptôme: les médecins qui la suivaient avaient reçu «des appels anonymes», selon elle. Cela lui a au moins permis de souffler, «loin des cancans».
A 5.000 km de là, au Gabon, Jocelyn - là aussi un prénom d'emprunt -, un biologiste qui teste les cas suspects à Libreville, subit «cette discrimination chaque jour».
- Rester caché -
Avec son équipe, il essaye de rester discret lorsqu'ils se rendent dans les domiciles, quitte à se mettre eux-mêmes en danger. «On s'équipe avec nos combinaisons à l’intérieur plutôt que sur le perron», affirme-t-il.
«Les Gabonais sont paniqués à l'idée qu'on vienne chez eux», alors on essaye d'organiser des tests «ailleurs, dans des endroits neutres», raconte-t-il.
Car la situation peut vite dégénérer. Dans le pays voisin, au Cameroun, la deuxième personne testée positive a été expulsée par son propriétaire, témoigne le professeur Yap Boum, épidémiologiste à Yaoundé.
La stigmatisation n'est pas l'apanage de l'Afrique et a été observée partout ailleurs, nuance-t-il, ajoutant: «Mais il est vrai qu'ici, nous vivons en communauté, nous connaissons nos voisins».
Certains préfèrent même rester cachés. «Plusieurs personnes sont décédées car elles avaient retardé leur prise en charge par peur de la stigmatisation», assure le professeur, également directeur du centre de recherche de Médecins sans frontières en Afrique. «Il faut prendre en compte le volet psychologique si nous voulons gagner cette bataille», soutient le chercheur.
- Soignants mis à l'écart -
Et notamment pour les soignants. «Ils sont doublement stigmatisés», explique Yap Boum. Au travail, où le personnel des autres services refusent quelquefois de leur «adresser la parole ou d'utiliser les mêmes toilettes qu'eux» et, à la maison, où ils sont parfois «vus comme des pestiférés».
Des infirmières camerounaises ont été quittées par leurs époux, chassées de leur foyer car elles travaillaient dans des unités coronavirus, assure la psychiatre Laure Menguene Mviena, chargée de la réponse psychologique au Covid-19 à Yaoundé.
«Il est urgent de les accompagner psychologiquement car, s'ils s'épuisent mentalement et physiquement, comment allons-nous faire pour soigner les autres ?», s'inquiète-t-elle.
Mais pour cela, il faut sensibiliser la population.
Une difficile équation pour les autorités qui doivent, d'un côté, adopter un ton ferme pour faire appliquer les gestes barrières et, de l'autre, éviter la psychose qui engendre la stigmatisation.
Il faut «communiquer davantage» et rappeler «que le taux de mortalité reste faible chez nous, moins important qu'en Europe», avance la psychiatre. L'Afrique subsaharienne ne déplore, pour l'heure, que quelque 1.400 morts du coronavirus.
Pourtant, l'anathème qui frappe certains malades peut les poursuivre après la guérison.
- Surnommée Corona -
C'est le cas de Roselyn Nyambura, une Kenyane qui, après sa sortie de l'hôpital, a continué «d'être moquée et dévisagée» par ses voisins, confie-t-elle. Certains allant même jusqu'à la surnommer «Corona».
Il faut faire «témoigner les personnes rétablies à la télévision», propose le professeur Boum, ou «distribuer aux guéris des documents certifiant qu'ils ne constituent» pas «plus un danger» que les autres citoyens, «un peu comme après Ebola».
Aucune étude n'a encore démontré scientifiquement qu'un patient guéri était immunisé, même temporairement, contre le coronavirus.
L'épidémie d'Ebola, qui avait très durement frappé l'Afrique de l'Ouest en 2014, a montré aux autorités que la réponse ne pouvait pas être que sanitaire.
Au Nigeria, les autorités ont diffusé des spots de prévention martelant que le coronavirus n'était pas synonyme de «peine de mort», que «la stigmatisation était une mauvaise chose».
Mais, le message a encore parfois du mal à passer. En Somalie, porter un masque de protection n'est pas facile: Mohamed Sharif, chauffeur à Mogadiscio, est obligé de s'équiper d'un cache-nez pour travailler. Mais il a remarqué que les gens l'évitaient ou même s'enfuyaient en sa présence.
Certains pensent que «si vous portez le masque, vous avez forcément le virus», témoigne-t-il, avouant qu'il lui arrive «de l'enlever pour éviter cette humiliation».
LES SCANDALES EN SÉRIE DU SECTEUR DE LA PÊCHE
Pendant combien de temps le Sénégal gardera-t-il encore la souveraineté de ses ressources halieutiques ? L’octroi de licences de pêche à tout-va sous le magistère de différents ministres, menace la sécurité alimentaire de milliers de Sénégalais
A chaque nomination à la tête du ministère de la Pêche et de l’Economie maritime, de nouveaux espoirs s’emparent des acteurs locaux de la pêche. En novembre 2019, Alioune Ndoye, nouvellement nommé pour diriger ce département ministériel, en avait suscité. Seulement, lui aussi ne fait guère exception et semble promis à décevoir les quelques ambitieux de son secteur. Six mois après sa mise en place, il s’inscrit déjà dans la voie tracée par certains de ses prédécesseurs empêtrés dans des polémiques d’attribution de licences de pêche à des bateaux étrangers. De sorte qu’au département de la Pêche, les ministres passent et les scandales sur les licences de pêche s’enchainent, au grand dam de la disponibilité de la ressource pour la consommation locale.
Ce n’est pourtant qu’une dizaine de jours après son installation comme ministre de la Pêche et de l’Economie maritime que l’ONG Greenpeace Afrique, dans une lettre ouverte, alertait Alioune Ndoye sur des ‘’choix inappropriés des politiques menées et la non-application des textes réglementaires et documents stratégiques" qui impactent ‘’négativement’’ les communautés de pêcheurs. Ces ‘’choix inappropriés’’ constituent une menace supplémentaire pour les stocks de poisson déjà surexploités, selon les conclusions de la dernière campagne menée par le Centre de recherche océanographique Dakar-Thiaroye (CRODT).
Ces choix concernent, entre autres, l’attribution d’autorisations aux unités de production de farine de poisson qui constituent une réelle menace et surtout celle des licences de pêche à des bateaux étrangers pour pêcher dans les eaux sous juridiction sénégalaise.
Aujourd’hui, l’ONG s’associe au Groupement des armateurs et industriels de la pêche au Sénégal (GAIPES) pour dénoncer une probable attribution de 52 licences de pêche à des bateaux d’origine chinoise et turque. En effet, dans une lettre adressée au ministre, les armateurs s’offusquent de voir ‘’13 demandes de promesses de licences’’ sur des ressources démersales côtières dont l’octroi de nouvelles licences dans le secteur a été gelé depuis 2006, et sur des ressources en petits pélagiques côtiers, déjà surexploitées et réservées aux pêcheurs artisanaux. Plus grave, alerte le GAIPES, les 39 demandes de navires ont été introduites sur l’espèce merlu, avec une ressource à la limite de la surexploitation.
Tout ceci vient s’ajouter au fait qu’entre 2018 et 2019, plusieurs dizaines de licences avaient été accordées dans le plus grand secret et sur un type de pêche (‘’chalutier de pêche démersale profonde option poisson et céphalopode’’) qui n’existe ni dans le Code sénégalais des pêches ni dans son décret d’application. La commission mise en place pour tirer cette histoire au clair n’a toujours pas encore rendu ses conclusions, que de nouvelles licences sont agitées.
La conservation de la ressource jamais priorisée
Ces licences, signées entre 2018 et 2019, l’auraient été sous l’ex-ministre Oumar Guèye. Une démarche d’autant plus incompréhensible que, face à la rareté de plus en plus observée de la ressource, le Sénégal se démerde auprès de ses voisins disposant de côtes maritimes, pour trouver des licences de pêche pour ses ressortissants. Les dernières complications sur de pareils accords avaient débouché sur les scènes de violence survenues le 4 février 2020 à Saint-Louis, au cours d’une manifestation de pêcheurs à Guet-Ndar, réclamant des licences de pêche pour accéder aux eaux maritimes mauritaniennes.
Dans ce contexte, comment comprendre que le Sénégal puisse accorder des licences sur les maigres ressources qu’il lui reste pour nourrir des milliers de citoyens ?
Peut-être avec son prédécesseur. Entre septembre 2013 et juillet 2014, Haïdar El Ali occupe la tête du ministère de la Pêche et de l’Economie maritime. Durant son bref passage, l’écologiste signe avec l’Union européenne (UE) un accord qui autorise désormais 38 navires de l'UE à pêcher le thon dans les eaux territoriales sénégalaises, pour un peu plus de 9 milliards de F CFA sur 5 ans. Acculé par les acteurs du secteur et les ONG, le principal intéressé s’en était expliqué : ‘’Je n’ai fait que régulariser une situation anormale. L’Union européenne, depuis 2006, pêche gratuitement dans nos eaux. Voilà que je prends une compense financière pour régulariser cet accord pour lequel l’Institut international de conservation de la ressource thonière (ICAT) m’autorise à pêcher 50 mille tonnes de thon. Je signe un accord pour 14 000 t de thon et ils ruent dans les brancards.’’
Le directeur de l'Oceanium de Dakar en avait même profité pour révéler un protocole thonier signé en 2006, permettant à des bateaux de l’UE de pêcher 15 000 t de poisson par an dans la ressource sénégalaise et cela dans le plus grand secret, alors que l'accord de pêche entre l'UE et le Sénégal était officiellement suspendu.
15 dollars la tonne de poisson
Considérées parmi les plus poissonneuses au monde, les côtes sénégalaises souffrent beaucoup de cette pêche illicite non déclarée et non réglementée (INN) des navires industriels qui jettent leurs filets sans autorisation dans les eaux sous juridiction nationale. Selon une étude de l’Institut d’études de sécurité (ISS) publiée en 2015, le Sénégal perd chaque année 150 milliards de F CFA, conséquence de l’INN. Rien qu’une surveillance efficace des eaux nationales pourrait faire gagner au gouvernement plus d’argent que ce que l’ensemble des licences de pêche octroyées fournit.
De plus, l’obtention d’une licence ne garantit point la pratique d’une pêche licite. Greenpeace dénonce, depuis plus de 15 ans, les pratiques de navires chinois sur de fausses déclarations de leurs prises au Sénégal, en Guinée-Bissau et en Guinée, pour minimiser les redevances à payer à l’Etat. L’ONG évalue cette perte au Sénégal à 372 millions de F CFA entre 2000 et 2014. Et cette somme pourrait ‘’être revue à la hausse, dans la mesure où certaines fraudes pourraient avoir échappé aux enquêteurs’’ de l’ONG.
Le changement de régime en 2012 avait cependant permis aux pêcheurs de se rassurer sur la concurrence des chalutiers étrangers et sur le renouvellement de la ressource halieutique.
Fraichement installé à la tête du ministère, Pape Diouf annonçait l’annulation des autorisations de pêche accordées jusqu'alors à 29 chalutiers étrangers, lors des deux années précédentes par le gouvernement sortant. Ces accords conclus permettaient à des bateaux européens de pêcher moyennant 15 dollars la tonne de poisson.
La période 2010-2012 correspond au passage de Khouraïchi Thiam au département de la Pêche et de l’Economie maritime. L’homme fut certainement l’un des ministres les plus contestés par les acteurs de la pêche locale. Sa gestion du secteur a été marquée par plusieurs accusations d’octrois illégaux de licences de pêche à des bateaux étrangers. L’on se souvient du rapport ‘’Main basse sur la sardinelle’’ de Greenpeace, publié en 2012, accusant l’ex-ministre d’avoir, par l’octroi de licences de pêche à des bateaux russes, fait perdre au Sénégal plus de 7,5 milliards de F CFA et participé à un bradage des ressources halieutiques.
Plus de 7,5 milliards de F CFA perdus, en plus du pillage de la ressource
Le rapport soulignait que Khouraïchi Thiam a ‘’ignoré le droit sénégalais et signé des accords bradant les droits de pêche dans la Zone économique exclusive (ZEE) à des prix trois fois inférieurs à la norme pratiquée dans les pays voisins et très inférieurs à ceux formulés par les armateurs russes en mars 2011’’. Avec la bénédiction de la présidence, le ministre signe au moins 11 protocoles d’autorisation au bénéfice de 4 ‘’consignataires’’ qui servent d’intermédiaires pour le compte des armateurs de 21 chalutiers.
Les scandales liés à l’attribution des licences de pêche à des bateaux étrangers remontent aussi à la gestion du régime socialiste. Après son accession au pouvoir en 2000, le président de la République Abdoulaye Wade exprimait ses préoccupations par rapport à la gestion de l'argent généré par la vente des licences de pêche qui, selon des enquêtes à l’époque de la Division des investigations criminelles (Dic) était directement versé dans des comptes ouverts par la présidence. Une affaire que des responsables libéraux prenaient un malin plaisir à jeter à la figure des socialistes, notamment Ousmane Tanor Dieng, avant la Présidentielle 2012.
Aujourd’hui, la problématique des licences de pêche revient au-devant de scène. Elle permet de remarquer que malgré les régimes politiques changeants, les pratiques restent les mêmes, dès qu’un besoin pressant d’argent se fait ressentir. Préparation d’élections, entretien d’une clientèle politique ou enrichissement personnel, le large sait entretenir son monde loin des regards. Et pas que des marins.
GUINEE, GUINEE-BISSAU, MAURITANIE, SENEGAL, GAMBIE ET SIERRA LEONE
114 navires chinois ont été mis en cause dans 183 cas de pêche INN
Dans les ‘’Résultats généraux des pêches maritimes 2018’’, rapport publié par le Bureau des statistiques de la Direction des pêches maritimes, les chiffres officiels montrent que ‘’la production de la pêche maritime artisanale et industrielle (nationale et étrangère) s’élève, pour l’année 2018, à 524 851 t pour une valeur commerciale estimée à 272,466 milliards de F CFA, contre 510 596 t pour une valeur commerciale estimée à 222,719 milliards de F CFA en 2017. (…) La part de la pêche artisanale dans la production nationale représente 76 %, soit 398 643 t, et celle de la pêche industrielle 126 209 t, soit 24 % en valeur relative. Les captures de la pêche industrielle sont réalisées, pour l’essentiel, par la flotte nationale à hauteur de 94 % et, dans une moindre mesure, par la flotte étrangère pour 6 %. La production maritime est destinée à la consommation, à la transformation et à l’exportation’’.
Pour avoir une idée de l’importance de ces activités, Greenpeace évalue la contribution de la pêche à environ 70 % des apports nutritionnels en protéines d’origine animale. Ce qui constitue un rôle majeur dans la sécurité alimentaire des Sénégalais. Et c’est bien cette ressource stratégique que les licences de pêche aux grands navires étrangers menacent. L’organisme rapporte également que 114 navires chinois ont été mis en cause dans 183 cas de pêche INN en Gambie, en Guinée, en Guinée-Bissau, en Mauritanie, au Sénégal et en Sierra Leone, pour défaut de licence, utilisation de mailles non-réglementaires et pêche en zones interdites.
VIDEO
DESTRUCTION DE DEUX STATUES DE VICTOR SCHOELCHER EN MARTINIQUE
Relayée sur les réseaux sociaux, la vidéo de la chute de ces statues, réalisée par des activistes qui se présentent comme anti-béké et hostiles à l'héritage colonial, a provoqué une vague d'indignation
Emmanuel Macron a condamné ce samedi ces dégradations qui « salissent la mémoire » de Victor Schœlcher et « celle de la République ».
L'affaire fait grand bruit en Martinique : des manifestants contestant la figure historique de Victor Schœlcher ont renversé deux statues de celui qui a décrété l'abolition de l'esclavage le 27 avril 1848, le jour même où l'île commémorait cette décision historique. Ces actes, perpétrés vendredi à Schœlcher et Fort-de-France, ont suscité de nombreuses condamnations, dont celle d'Emmanuel Macron. « En abolissant l'esclavage il y a 172 ans, Victor Schœlcher a fait la grandeur de la France. Je condamne avec fermeté les actes qui, perpétrés hier en Martinique, salissent sa mémoire et celle de la République », a tweeté samedi le chef de l'État.
Relayée sur les réseaux sociaux, la vidéo de la chute de ces statues, réalisée par des activistes qui se présentent comme anti-béké et hostiles à l'héritage colonial, a provoqué une vague d'indignation. Une jeune femme soupçonnée d'avoir participé à l'action a été placée en garde à vue et, à l'issue, elle a été convoquée au tribunal le 9 juillet, selon son avocat Maître Dominique Monotuka.
« Schœlcher n'est pas notre sauveur »
« Schœlcher n'est pas notre sauveur », ont écrit dans un communiqué les manifestants. Les mêmes avaient déjà bloqué pendant plusieurs semaines fin 2019-début 2020 les hypermarchés tous les week-ends, accusant leurs propriétaires, souvent de grandes familles locales (béké), d'être à l'origine de la pollution au chlordécone. Ce pesticide, longtemps utilisé dans les bananeraies, est suspecté d'être à l'origine de cancers de la prostate.
Le 22 mai 1848, les esclaves qui s'étaient rebellés contre les colons arrachaient leur liberté en Martinique au terme de plusieurs jours de violentes émeutes. À peine un mois plus tôt, le 27 avril, avait été signé à Paris le décret abolissant l'esclavage, porté notamment par Victor Schœlcher. Ce dernier était ensuite devenu député de la Martinique. La bibliothèque de Fort-de-France porte son nom. Ainsi qu'en 1889, la toute nouvelle ville de Case Navire également baptisée de son nom. Ces hommages, pour certains opposants, empêchent la reconnaissance des héros locaux de l'abolition, tel l'esclave Romain.
Les manifestants ont d'ailleurs demandé que la bibliothèque et la ville qui portent le nom de Schœlcher soient renommées au bénéfice d'acteurs locaux de l'abolition de l'esclavage et de l'émancipation des Noirs. Dans un communiqué, le maire de Fort-de-France, Didier Laguerre, a condamné « avec la plus grande fermeté » la destruction de ces statues et appelé à « ne pas céder à la tentation de réécrire l'histoire ».
« Maladroit révisionnisme »
La ministre des outre-mer, Annick Girardin, a estimé sur Twitter que, s'il est « permis à tous de questionner l'histoire, cela nécessite un travail méthodique et rigoureux. En aucun cas cela ne doit se faire à travers la destruction de monuments qui incarnent notre mémoire collective ». De même, les sénateurs Catherine Conconne et Maurice Antiste appellent à refuser « ce maladroit révisionnisme » et à reconnaître que si « la pression finale a eu raison de la barbarie », il y eut « un apport extérieur de penseurs et autres philosophes européens et donc français ». Pour le député Serge Letchimy, ces « actes de vandalisme (...) portent atteinte au travail de l'homme dont on ne peut nier le rôle et la contribution dans l'abolition de l'esclavage en 1848 ».
Samedi, la Fondation pour la Mémoire de l'Esclavage a expliqué, dans un communiqué, que « ce combat a réuni les personnes réduites en esclavage, qui n'ont cessé de se révolter contre leur état, et l'ont fait encore le 22 mai 1848 en Martinique, et des militants abolitionnistes comme Victor Schœlcher ». Sur Twitter, l'écrivain martiniquais Patrick Chamoiseau a dénoncé la récupération politique du travail de Victor Schœlcher, mais appelé à respecter l'homme. « Honte aux auteurs de cet acte ignoble, ne rien lâcher jamais face à la haine et au racisme », a tweeté la maire de Paris Anne Hidalgo.
"NOUS DEVONS ÊTRE PRÊTS À GÉRER LE CARACTÈRE COMPLEXE DE LA MONNAIE"
Papa Demba Thiam, économiste international et expert en développement industriel intégré, revient sur l'étape décisive dans le processus d’adoption de l’Eco, la future monnaie ouest-africaine
La Tribune Afrique |
Ristel Tchounand |
Publication 23/05/2020
Le conseil des ministres français a adopté le 20 mai le projet de loi amorçant la fin du franc CFA au sein de l’UEMOA, faisant suite à l’accord de coopération monétaire annoncé à Abidjan en décembre dernier par les présidents Emmanuel Macron et Alassane Ouattara. Avec La Tribune Afrique, Papa Demba Thiam, économiste international et expert en développement industriel intégré, revient sur cette étape décisive dans le processus d’adoption de l’Eco, la future monnaie ouest-africaine. Entretien.
La Tribune Afrique - La France avance vers la fin du franc CFA, qu'est-ce qui change désormais selon vous ?
Papa Demba Thiam - D'entrée de jeu, je dirais que le gouvernement français n'a fait qu'appliquer les éléments de son calendrier, en prenant une décision qui était déjà prévue dans l'accord conclu en décembre 2019. Bien avant cela, la décision de l'UEMOA de mettre un terme au franc CFA pour adopter l'Eco introduisait déjà un changement vis-à-vis de la gestion des ressources en devises des pays de l'UEMOA. La mise en œuvre des nouveaux arrangements telle que prévue à partir du 1er juillet, impactera forcement la manière de travailler des organes de l'UEMOA, dans leurs rapports entre eux, mais aussi dans leurs rapports avec la France et avec les économies de des pays de la zone.
Mais dans ce type de processus, la Banque centrale régionale devient hautement importante. Il ne faut pas oublier que le Franc CFA n'existe que par un traité. De ce fait la BCEAO avec son voisin la BEAC en Afrique centrale sont les seules banques qui ne font pas de véritable politique monétaire. Si on repense globalement les économies africaines, leurs manières de se financer pour être moins dépendantes de la dette, telle que nous l'avons proposé récemment dans notre note pour le Maroc, la question va se poser sur la forme de banque centrale (liée aux banques commerciales) qui peut assurer ce genre de travail.
Une chose est donc certaine, avec la fin du franc CFA, la forme de la banque centrale (BCEAO) doit changer en fonction des impératifs de reconfiguration économiques qui existaient déjà avant l'avènement de la Covid-19, mais ont été suramplifié parce que toutes les vulnérabilités de nos économies ont été exposées.
J'avais déjà dit à l'époque qu'il était impératif que les Chefs d'Etats de l'UEMOA constituent des groupes d'experts pour réfléchir à cette problématique pour leur emmener des solutions qui sortent hors des sentiers battus, la manière dont on a toujours géré nos banques centrales et notre monnaie. Et la Covid-19 ne nous laisse pas le choix, c'est même devenu un impératif. Cette pandémie nous place dans une logique de construire nos économies avec des instruments monétaires qui sont appropriés.
Justement dans ce contexte de crise du coronavirus, on pourrait penser que ce dossier monétaire aurait pu être suspendu, au vu notamment des conséquences sur les économies. Mais l'agenda se poursuit. Que faut-il comprendre à votre avis ?
Ce contexte de crise sanitaire mondiale est certes un des aléas majeurs dans le fonctionnement d'une économie, mais gouverner n'est pas seulement gérer. C'est aussi prévoir et faire face à des contradictions et des chocs. J'imagine que les experts de l'UEMOA, des ministères des Finances et de la BCEAO n'ont pas arrêté, pendant que s'opérait le choc du coronavirus, de travailler sur cet agenda tracé depuis fin 2019.
Une chose est certaine, la pression budgétaire et la pression sur l'endettement des Etats membres de l'UEMOA face à la nécessité de répondre aux questions de sauvegarde sanitaire, économique et financière au niveau de leurs pays -tout en pensant à relancer leurs économies- créent une nouvelle donne qui fera en sorte que les critères de convergence de tout ordre ne pourront tout simplement pas être respectés. Qu'il s'agisse des niveaux d'endettement ou des déficits budgétaires, la question fiduciaire va fondamentalement se poser. En théorie, quand des gouvernements et des institutions fonctionnent normalement, il devrait y avoir des circuits de veille qui permettent d'identifier les risques et de pourvoir proposer des systèmes de dilution pour ces risques. Je fais donc confiance aux institutions qui sont en charge, en me disant que je ne peux pas imaginer une seule seconde que ce dossier ait pu être mis en veille alors qu'il était évident que l'agenda du franc CFA devrait avancer et que nulle part son report n'a été évoqué.
Comme je l'ai toujours dit, il faut considérer que la monnaie telle qu'elle est aujourd'hui, le franc CFA, est plus un instrument de paiement qu'une véritable monnaie, parce que l'émission monétaire dans tous les pays du monde pour être équilibrée, doit être basée sur la volonté d'endettement de l'économie, c'est-à-dire qu'elle est indissociable de la politique de crédit. Et il ne faut pas oublier que nous sommes dans un contexte où les pays africains sont en train de devenir un enjeu stratégique dans le nouvel ordre économique mondial qui va s'instaurer après ou pendant la crise de la Covid-19.
La France quitte les instances de gouvernance de l'UEMOA, la BCEAO n'aura plus à déposer ses réserves de change auprès du Trésor français, mais le maintien de la parité fixe entre la future monnaie, l'Eco, et l'Euro suscite des critiques en Afrique de l'Ouest. Quel est votre regard d'expert sur la question ?
Il ne faut pas être pressé. On ne peut pas du jour au lendemain changer totalement de manière de faire et de perspective. Il y a tout un travail à faire pour mettre en place des dispositions visant à reconfigurer la manière dont le franc CFA est géré, surtout au niveau de la centralisation des réserves en devises, mais aussi sur la nature de la garantie que la France devrait donner. Car, si la France promet de garantir la parité entre l'Eco et l'Euro, elle n'est cependant pas seule dans l'union monétaire européenne, il y a donc plusieurs paramètres à prendre en compte.
DES REPAS CINQ ÉTOILES AUX SOIGNANTS SUR LE FRONT DU COVID-19
Deux fois par semaine, de grands chefs cuisiniers de « l’Académie du Bocuse d’Or » préparent bénévolement des plats gastronomiques pour les livrer au personnel médical et aux malades, notamment à l’hôpital Le Dantec de Dakar
Au Sénégal, des repas 5 étoiles sont offerts aux soignants engagés dans la lutte contre le coronavirus. Deux fois par semaine, de grands chefs cuisiniers de « l’Académie du Bocuse d’Or » préparent bénévolement des plats gastronomiques pour les livrer au personnel médical et aux malades, notamment à l’hôpital Le Dantec de Dakar. La plupart des restaurants de la capitale étant fermés, ils louent un appartement pour cuisiner.
L'ARTEMISIA, NOUVEL "OR VERT" DE MADAGASCAR ?
Le président malgache a contribué à doper les ventes de tisanes d’artémisia afra, l’autre armoise cultivée en Afrique, dans les boutiques du Tchad au Sénégal
Aucune étude clinique sérieuse n’a confirmé l’efficacité de cette plante contre l’épidémie de Covid-19, mais Andry Rajoelina, le président malgache l’assure : l’artemisia contenue dans le remède « Covid Organics », fabriqué sur l’île, pourrait devenir « l’or vert » de Madagascar.
Madagascar est avec la Chine le premier producteur au monde d’artemisia annua, une plante verte aussi appelée armoise annuelle, qui peut atteindre un mètre de haut, et qui avait connu un premier succès au début des années 2000, lorsque l'on avait scientifiquement prouvé son utilité contre le paludisme.
Stocks d’artemisia
Une filière s’était créée à Madagascar, autour d’une entreprise, Bionexx, qui avait conclu des contrats avec des cultivateurs des hauts plateaux. Malheureusement on avait entre-temps réussi à synthétiser chimiquement l’artemisia. L’usage de la plante malgache avait donc stagné. Bionexx avec sa production de 2 500 tonnes par an avait du mal à écouler ses stocks de plante séchée à plus de 500 dollars la tonne.
Exportations interdites
Le lancement du « Covid-Organics » pourrait dans une certaine mesure relancer la filière. Le président Rajoelina a su populariser le remède local, à base d’artemisia et d’autres plantes gardées secrètes, tout en faisant taire les critiques de l’Académie malgache de médecine. Tant que les victimes du Covid 19 à Madagascar étaient rares, le discours passait très bien. Et il a contribué à doper les ventes de tisanes d’artémisia afra, l’autre armoise cultivée en Afrique, dans les boutiques du Tchad au Sénégal.
25 centimes d’euros le kilo
Mais à Madagascar l’artemisia annua est interdite à l’exportation, la logique étant de fabriquer les remèdes localement pour capter la valeur ajoutée. Cela réduit considérablement le marché potentiel de cette herbe.
Des doutes commencent en outre à s’exprimer à Madagascar sur la gestion de l’épidémie par les autorités : le nombre de cas explose à Antananarivo. Il est donc fort peu probable que l’artemisia devienne comme le proclame Andry Rajoelina le nouvel « or vert » de Madagascar, susceptible de se vendre selon lui à 3 000 dollars la tonne, dix fois plus cher que le riz. Pour l’heure, la dizaine de milliers de cultivateurs malgaches qui produisent de l’artemisia pour Bionexx reçoivent à peine dix fois moins que cela, l’équivalent de 25 centimes d’euros le kilo.
LA CAN 2021 AURA-T-ELLE LIEU ?
L'incertitude quant à la reprise des matchs internationaux fait planer un doute croissant sur la tenue de la compétition en début d'année prochaine au Cameroun
L'incertitude quant à la reprise des matchs internationaux fait planer un doute croissant sur la tenue de la CAN 2021 en début d'année prochaine au Cameroun. Avec quatre journées d'éliminatoires restant à disputer, la CAF joue serré et pourrait être contrainte de reprogrammer sa compétition reine.
La CAN 2021 aura-t-elle lieu à la date prévue ? La question se pose aujourd'hui pour les décideurs du football africain. Programmée du 9 janvier au 6 février prochain au Cameroun, l'épreuve paraît de plus en plus compromise par la crise du Covid-19. Alors que la pandémie a déjà provoqué le report des 3eme et 4eme journées des éliminatoires, prévues initialement en mars, l'embouteillage du calendrier fait planer une menace croissante sur la reprise de ces rencontres qualificatives. Consciente de la situation, la Confédération africaine de football préfère pour l'heure temporiser et remettre sa décision à plus tard. « Face à une telle situation, j'estime que toutes les parties prenantes dans l'organisation de ces compétitions pourront se retrouver plus tard pour discuter et se concilier pour que l'on puisse ensemble trouver un moyen de reprendre ces compétitions », a déclaré le président de l'instance, Ahmad Ahmad, dans une interview accordée à la Deutsche Welle. En clair : tant que la pandémie n'est pas sous contrôle, le football africain devra attendre.
La FIFA a son mot à dire
Une attitude prudente et attentiste, qui se comprend d'autant mieux que la FIFA a également son mot à dire dans cet épineux dossier, puisqu'elle a la haute main sur le calendrier. Après avoir décidé d'annuler les fenêtres internationales de mars puis de juin, l'instance faîtière va devoir statuer sur une éventuelle reprise en septembre. Les Fédérations nationales sont actuellement sondées à ce sujet. Le temps commence à presser : quatre journées des éliminatoires restent à disputer alors qu'il ne reste au mieux que trois créneaux FIFA pour le faire : septembre, octobre et novembre 2020. En fonction de l'évolution de la pandémie, sera-t-on alors en mesure d'organiser des matchs dans tous les pays concernés ? Par ailleurs, sera-t-il possible de faire voyager des centaines de joueurs après de longs mois de fermeture totale ou partielle de l'espace aérien ? Enfin, dans un contexte de reprise décalée (et assortie de protocoles sanitaires stricts) des championnats européens, les clubs seront-ils disposés à laisser leurs joueurs à disposition de leurs équipes nationales ? Loin d'être tranchées, ces questions n'ont sans doute pas fini de se poser.
Quelle nouvelle date pour cette CAN ?
Si leurs réponses s'avéraient négatives, à quelle date pourrait alors avoir lieu la CAN initialement prévue début 2021 ? La réponse n'a rien d'évident. La date de juin 2021 paraît tomber sous le sens, mais il est pourtant peu probable de voir la CAN se dérouler à cette période. D'abord parce que cela mettrait la compétition africaine reine en concurrence frontale avec l'Euro, qui se jouerait (au moins en partie) sur le même créneau. Ensuite parce que l'édition 2021 avait officiellement été programmée en hiver pour des raisons météorologiques (à la demande du Cameroun, qui craignait d'accueillir la compétition en pleine saison des pluies), et qu'on voit difficilement la CAF enclencher le rétropédalage et ainsi se contredire. Un décalage d'une année, de janvier 2021 à janvier 2022, resterait dès lors la solution la plus raisonnable. Ce saut de douze mois dans le temps offrirait en outre au pays organisateur de l'événement un répit pour en peaufiner la préparation.
LES VENDEURS DE VOLAILLE PRIS D'ASSAUT POUR LA FIN DU RAMADAN
Un million de poulets seront mis en vente pour cette korité, d’après une estimation du ministère du Commerce
La korité, la fête pour la fin des 30 jours du jeûne du ramadan, aura lieu dimanche 24 mai au Sénégal. Une célébration dans des conditions particulières, car les autorités ont interdit les rassemblements en raison de l’épidémie de coronavirus. Mais dans les familles, pas question de faire une croix sur la fête et le repas, qui comptera avec le plat préféré pour l’occasion : le poulet.
Dans le marché central de Ouakam, l’heure est aux provisions avant la fin du ramadan. Penda Diagne regarde l’étal de ce boucher : des poulets emballés individuellement dans du plastique jaune, qui seront ensuite rôtis, accompagnés de sauces épicées et servis en famille.
« Sincèrement, je ne sais même pas d’où vient cette tradition. Se retrouver en famille pour fêter la korité est d’une importance capitale », explique Aliou Sané, qui achète lui aussi sa volaille. Le fonctionnaire passera la fête avec sa famille restreinte, coronavirus oblige. « Parce que la korité, on peut la fêter sans se rassembler autour de la famille, mais sans renoncer au poulet, bien évidemment », ajoute-t-il.
Dans cette boutique, chaque volatile est déplumé, préparé puis vendu par Moustapha Lô. Le prix : entre 2 500 et 3 500 francs CFA (3 à 5 euros) l’unité. « On vendra tout. On pourra même vendre plus que la centaine de poulets qu'on a en stock, si les choses marchent normalement, assure ce dernier. On s'en sort tant bien quel mal, même si c'est vrai qu'avec la pandémie, les affaires ne tournent pas aussi bien qu’avant. »
Un million de poulets seront mis en vente pour cette korité, d’après une estimation du ministère du Commerce.