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1 octobre 2025
par l'éditorialiste de seneplus, bacary domingo mané
RÉFLEXIONS PHILOSOPHIQUES SUR UNE PANDÉMIE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le coronavirus met à nu l’individualisme débridé de l’homme qui a toujours succombé à la tentation d’être le centre du monde - : le présent se vit intensément, puisqu’au-delà de l’immédiat, il y a l’irréparable
Bacary Domingo Mané de SenePlus |
Publication 22/03/2020
L’irruption et la propagation de la maladie à coronavirus (Covid-19) nous met face à l’horizon indépassable de la mort. La panique et surtout la peur de l’irréparable qu’elle charrie, sont symptomatiques d’une société profondément ancrée dans une réalité capitaliste où l’avoir, la production et la consommation plongent le citoyen du monde dans une frénésie telle, qu’il n’a pas le temps de réfléchir à sa finitude ou destinée. Le «citoyen-consommateur» est tellement noyé dans le train-train quotidien, que la question de la mort ne taraude son esprit ou du moins accessoirement, lequel est plutôt envahi par le stress, fruit d’une insatisfaction quasi obsessionnelle à agrandir son espace physique. Il accumule les biens acquis parfois par des méthodes qui enlèvent à l’humain ce qu’il a de singulier et d’essentiel : la dignité. Aveuglé par l’avoir, il piétine, tel un bulldozer, toutes les valeurs qui cimentent les rapports entre les individus. Mais au sommet de sa vanité culmine le futile qui constitue le voile qui l’empêche de regarder la réalité de la mort en face. Il n’y pense que comme une parenthèse lorsqu’un proche en fait l’expérience.
La mort en face
Tel un cheveu sur la soupe, la pandémie de coronavirus nous jette la mort en pleine figure. Elle envahit notre quotidien : des hôpitaux débordés, des comateux, des malades en attente de l’instant fatidique, des patients qui doutent, des personnes qui ont lutté jusqu’au dernier souffle contre le virus, des médecins dépassés…Ajouter à ce tableau, le décompte macabre des médias qui montrent les dépouilles alignées, et des fosses communes. La mort est partout et l’humanité se met à découvrir que c’est l’élément résiduel de tout problème. Son imaginaire crée la suspicion chez les individus qui pensent que c’est l’autre qui est à l’origine de leur malheur. Du coup, les relations changent. Chacun se barricade, dresse sa baie vitrée, et multiplie les gestes barrière. Les villes sont devenues de vastes prisons à ciel ouvert et les maisons transformées en cellule.
L’altérité mise à rude épreuve
Les vocables : «confinement», «mise en quarantaine», «isolement», etc. renvoient à la question de l’altérité. L’autre est vu sous le prisme de l’obstacle à une vie saine et épanouie. Il est désormais celui qui peut me donner la mort en me transmettant le virus. L’autre n’est plus considéré comme mon semblable, porteur d’un humanisme, mais chosifié parce que renfermant dans ses entrailles le Covid-19. Nous sommes dans une sorte de solipsisme régressif, avec un moi qui va jusqu’à nier la réalité de l’autre. C’est l’instinct de conservation, cet amour de soi «infaillible» et toujours conforme à l’ordre.
Le coronavirus nous ramène à l’état de nature, au-delà de cette solidarité de façade qui pourrait acter la fausse socialisation du «loup». Il met à nu l’individualisme débridé de l’homme qui a toujours succombé à la tentation d’être le centre du monde. C’est d’un air amusé que nous guettons sur les antennes des radios ou dans les colonnes des journaux, les noms des fameux «bienfaiteurs» qui ne se soucient guère de la pureté de leurs actes. Ils ne boudent pas un seul instant le plaisir de voir l’humanité toute entière chanter leurs louanges. Le bien n’est pas fait pour le bien mais pour ce qu’il procure. Nos bienfaiteurs n’ont pas choisi la discrétion, mais le tintamarre. Même du malheur, ils veulent tirer une jouissance personnelle. Le Covid-19 nous révèle à nous-mêmes, humain trop humain !
Vanité en deçà, corona au-delà !
Nous sommes des êtres fragiles, dans un monde dont la marche semble dictée du dehors. En dépit des inventions qui ont révolutionné nos modes de vie, avec ces gratte-ciel qui titillent le ciel, ces machines intelligentes, ces vaisseaux qui ont conquis d’autres planètes, etc. il y a beaucoup de choses qui se cachent à la compréhension de l’humain. C’est pourquoi le coronavirus nous met en face de notre propre vanité. Cet infiniment petit est un mystère pour les chercheurs du monde entier. L’humanité est en face d’un virus intelligent, si l’on s’en tient à la symbolique du mot corona qui signifie en latin ou grec le «recourbé», couronne. Laquelle renvoie à la tête des princes, empereurs, rois ou chefs, le siège de la connaissance. Et du point de vue astronomique, corona ou couronne, est un milieu en perpétuelle évolution et dont l’équilibre est parfois brutalement rompu par le passage d’ondes de choc. Le covid-19 s’invite au banquet de l’innommable, de l’indicible en nous confinant dans le champ de ce qui est humainement accessible. Il nous met en face de nos propres limites, jusqu’à preuve du contraire. S’il arrivait à la science de connaître un jour l’origine de ce virus aux fins de proposer un antidote, le mérite en reviendrait à la fois aux sachants et à la nature. Tout problème a une solution et au cœur de cette dernière est logée son contraire, tel que nous enseigne la loi de la nature. Les choses non découvertes existent, elles sont justes couvertes du voile de l’indicible provisoire qui tombera dans le domaine du sens avec la complicité de la nature, grâce à la persévérance de l’homo sapiens dont la lame de curiosité déchirera le manteau de l’ignorance.
Le coronavirus nous fait apprécier la vie
En effet, le coronavirus semble donner un coup d’arrêt à la routine, marque indélébile de notre volonté de vivre qui passe par le refoulement à chaque instant de la mort. Observez le comportement des investisseurs sur le marché boursier, du commerçant derrière son comptoir, calculette à la main, du promoteur immobilier en pleine prospection, du consommateur à la recherche de la dernière marque, du journaliste friand de scoop, etc. tous vivent pour le futur. Le présent, seule réalité tangible, est sacrifié à l’autel d’un avenir qui n’est qu’un mirage.
Mais l’avènement du coronavirus, avec la sensation de la mort totale, donne lieu à un changement de paradigme : le présent se vit intensément, puisqu’au-delà de l’immédiat, il y a l’irréparable. L’homme s’est mis à apprécier la valeur de la vie, car la sensation de la mort totale, c’est-à-dire inéluctable et imminente, l’a amené à surmonter la crainte de la faucheuse, revendiquant du coup sa liberté. Grâce au covid-19, l’homme reprend du poil de la bête sur une vie qu’il semblait vivre en spectateur, parce que dictée par le capital, et non acteur. Le virus intelligent lui a donné les armes d’une emprise totale sur le cours de sa vie. Il affiche la figure de l’enfant dans «Les trois métamorphoses de l’esprit» de Nietzsche (ainsi parlait Zarathoustra) : «L’enfant est innocence et oubli, un renouveau et un jeu, une roue qui roule sur elle-même, un premier mouvement, une sainte affirmation (…) l’esprit veut maintenant sa propre volonté, celui qui a perdu le monde veut gagner son propre monde». Désormais, grâce au coronavirus, l’homme contemplera le présent dans toute sa splendeur, changeant du coup son regard sur la mort.
Y a-t-il un lien entre la maladie du coronavirus et la mort ?
C’est comme s’il donnait raison à Spinoza qui présente la mort comme un élément extérieur à la vie. L’idée est que la mort n’est pas, par essence, inscrite dans la vie de l’individu. Ce qui fait qu’il n’est pas disposé à l’accepter parce qu’elle est perçue comme une contingence. Sinon comment comprendre que d’autres prennent le dessus sur le coronavirus ? Ils ont compris que l’essence même de la vie est de persévérer dans son être, c’est pourquoi l’individu n’est pas programmé pour mourir. Le fait que les rayons des supermarchés soient pris d’assaut et les étales des marchés vidés de leur contenu, dénote une volonté pour l’homme de lutter contre la mort que la vie ne féconde pas. Le stress né d’un bouleversement total de notre quotidien et la peur de voir s’arrêter une vie dont les équilibres fragiles sont constamment menacés par des forces extérieures, ne doivent être perçus comme des éléments négatifs. Au contraire, ce sont des signes de résistance à faire l’expérience de la limite.
Beaucoup de zones sont sans eau, depuis des mois, des semaines et des jours. La population se demande comment se prévenir du coronavirus sans le liquide précieux
Au moment où l’Etat demande à la population de respecter les mesures d’hygiènes, surtout en se lavant régulièrement les mains avec de l’eau et du savon, le Sénégal est confronté à des coupures d’eau. Beaucoup de zones sont sans eau, depuis des mois, des semaines et des jours. La population se demande comment se prévenir du coronavirus sans le liquide précieux.
‘’Tout d'abord, il faut se laver régulièrement les mains avec un produit à base d'alcool ou les laver à l'eau et au savon. Se toucher le visage après avoir touché des surfaces contaminées ou des personnes malades est l'un des modes de transmission du virus. En se lavant les mains, on peut réduire les risques. Pour la prévention de ce virus, il est conseillé de se couvrir la bouche et le nez avec le pli du coude ou avec un mouchoir en cas de toux ou d’éternuement. De jeter le mouchoir immédiatement après dans une poubelle fermée et se laver les mains avec de l’eau et du savon’’. Ce sont les mesures d’hygiène que préconise l’Organisation mondiale de la Santé (Oms) dans la lutte contre la Covid-19.
Elles sont répétées à outrance par le ministère de la Santé et de l’Action Sociale. Car, elles freinent la propagation du virus. Sauf qu’au Sénégal, l’eau est devenue une denrée rare, à cause des coupures inexplicables, dans certaines localités. Qui sont sans eau, depuis des mois. D’autres restent des semaines, des jours, sans une goutte d’eau. Comment peut-on lutter contre ce virus, alors qu’on n’a pas le minimum. C’est une situation qui désole aux Parcelles Assainies, Fann Hock, Ouakam cité Monument, Nord Foire, Yeumbeul cité Comico, Cité Soprim, Sicap Foire, Guédiawaye, pour ne citer que ces localités.
Au Parcelles Assainies, à l’unité 22, dès l’aube, les robinets sont fermés jusqu’à tard dans la nuit, à 23 heures voire 00 heure. A l’unité 23 et à la cité Damel, c’est pire. Les habitants ne voient la couleur de l’eau qu’à 3h du matin. Avant 4 heures du matin, les robinets sont fermés. ‘’C’est vraiment écœurant ce que nous vivons. Où est ce qu’on va trouver l’eau pour se laver fréquemment les mains, alors que les robinets sont quotidiennement fermés. L’Etat doit prendre des dispositions. Si Suez est incapable de fournir de l’eau à la population, qu’on trouve une solution. On est menacé par ce virus et il ne faut pas qu’une société nous tue’’, peste Aliou Diop, un vieux retraité qui lit son journal devant sa maison à la cité Damel.
Selon ‘’Pa Diop’’, c’est ainsi que l’appelle son entourage, sa famille est obligée, tous les jours, d’utiliser des réserves pour faire leurs besoins. ‘’Ma femme met de l’eau de javel dans les bassines, afin de pouvoir l’utiliser. Il faut que l’Etat réagisse. On est en danger. L’eau est le premier dispositif à mettre en place’’, déclare l’octogénaire.
Les coupures d’eaux freinent le respect des mesures d’hygiènes
Dans la même citée, les habitants qui ont la paresse de se lever à ces heures pour remplir les bassines n’ont pas d’eau. Ils sont obligés d’acheter, tous les jours, de l’eau minérale pour leurs besoins. Pour eux, l’achat n’est pas un problème. Ce qui les dérange, c’est la discrimination et le non-respect dont ils font objet. Alice Sagna vit à la cité Damel, depuis plus de 5 ans avec sa famille. Pour elle, depuis qu’ils se sont installés sur les lieux, ils n’ont jamais eu d’eau courante. Une situation qu’ils dénoncent depuis longtemps, mais que l’Etat peine à régler. ‘’Je ne vais pas me lever à 4 heure du matin pour chercher de l’eau qui va repartir, moins d’une trentaine de minutes plus tard. On préfère acheter, tous les jours, de l’eau minérale, même si cela a un coût. Je n’ose pas vous dire combien nous dépensons par mois pour nous approvisionner en eau. Mais, je rends grâce à Dieu, parce qu’il nous donne tous les jours les moyens’’, dit-elle.
Le plus grand souci d’Alice, ce sont ses enfants. ‘’Quand j’achète les bouteilles, je verse une partie dans une bassine pour permettre à la famille de se laver tout le temps les mains. Mais, j’ai lu dernièrement dans un journal qu’on doit utiliser de l’eau courante. C’est problématique. C’est pourquoi, j’ai acheté une pompe que j’ai mis dans les bouteilles pour se laver les mains. On court deux dangers ici, le manque d’eau et le virus. L’Etat doit régler cette affaire’’, fulmine la dame.
La façon de vivre des habitants de Damel n’est pas nouvelle, soutient Saliou Dem, un commerçant. ‘’Nous prions tous les jours pour que la maladie ne se propage pas dans tout le pays. Parce que cela sera une catastrophe. Nous courons un grand risque. On demande aux citoyens de respecter les règles d’hygiène, sans pour autant mettre les dispositions qu’il faut. Il faut que l’Etat règle les coupures d’eau, pour permettre à la population de respecter les mesures. Sans cela, la lutte sera vaine’’, précise Saliou Dème.
Aux unités 22 et 23 des Parcelles, c’est une citerne qui approvisionne les habitants en eau, depuis plus de deux mois. Mais, avec le coronavirus, les gens ont peur. ‘’Depuis que l’on parle de la maladie, je n’utilise plus l’eau de la citerne pour faire la cuisine. Ce n’est pas prudent. On ne sait pas d’où vient l’eau des citernes. Il faut que l’Etat agisse le plus rapidement possible. Nous sommes en danger’’, fulmine Madeleine Mendez.
L’incapacité de la société SEN’EAU indexée
Sa colocataire Elisa Gnoucky pense que c’est la société SEN’EAU qui n’a pas la capacité de fournir tout le pays en eau. ‘’Je ne peux pas comprendre, avec tout le tintamarre qu’ils ont fait, que quelques mois après, on se retrouve toujours avec des coupures d’eau. L’Etat doit arrêter de signer des partenariats n’importe comment, avec n’importe qui. Cette société est incapable, il faut le reconnaitre’’, tonne-t-elle. Pour cette jeune fille, normalement avec la pandémie du coronavirus, l’approvisionnement en eau doit être une exigence et une priorité.
‘’Il ne devrait même pas y avoir des coupures d’eau. Hier, j’ai regardé une vidéo où Macky Sall relevait le défi de Paul Kagame, en se lavant les mains. Sauf que Chez Kagame, il y a de l’eau, alors que ce n’est pas le cas chez lui. Avant de relever le défi, il devait s’assurer de la situation de son pays. Donc, qu’il trouve une solution à ces coupures d’eau, après on pourra respecter ce qu’il dit’’, dit Elisa. Qui déplore le mutisme de l’Etat par rapport à la situation. ‘’Ils savent que certaines zones n’ont pas d’eau. Mais l’Etat préfère faire l’Autruche. Il y a une rupture de gels hydro-alcooliques, il s’y ajoute le manque d’eau. Comment pouvons-nous nous protéger, alors que nous n’avons pas d’eau, arrêtons cette hypocrisie’’, peste-t-elle.
A Fann Hock rue 70x63, la famille Bâ habite au 4e étage. Depuis deux jours, elle n’a pas d’eau. ‘’Ce manque d'eau est très fréquent, ici. En plus, quand cela commence, on reste parfois plus de 10 jours sans eau. C’est très difficile de descendre pour chercher de l'eau. Dans ce contexte, avec le coronavirus, c'est encore plus inquiétant. Pour respecter les mesures de prévention, il faut se laver fréquemment les mains. Avec le manque d'eau, c'est impossible’’, explique la cadette Safra Bâ. Le malheur, dit-elle, est que quand les robinets sont coupés, même la nuit, l’eau ne vient pas, comme dans certains quartiers.
‘’Dans notre appartement, tout le monde travaille. Certains travaillent dans les restaurants et autres grandes surfaces. Ils sont toujours en contact avec du monde. Hier, j’étais au bureau et ma colocataire m’a envoyé un texto m’informant qu’il y a coupure d’eau. Depuis lors, je suis angoissée et très inquiète’’, dit-elle.
En ce moment, tous les esprits sont tournés vers l’annonce des cas positifs. Alors que, si le pays n’est suffisamment ni couramment approvisionner en eau, le risque sera beaucoup plus élevé. Tous les moyens d’hygiène doivent être mis à la disposition de la population. SEN’EAU et l’Etat doivent le comprendre et tout mettre en œuvre pour cela, au moment où les tournées et les journées de sensibilisations sont organisées partout pour que les gens se prémunissent.
La population dénonce et se lamente du manque d’eau. Elle demande une solution diligente.
DÉCÈS DU JOURNALISTE NDIAYE DOSS
Le journaliste Mamadou Ndiaye Doss vient de rendre l'âme, ce dimanche en Espagne.
Le journaliste Mamadou Ndiaye Doss vient de rendre l'âme, ce dimanche en Espagne. Il a été évacué, suite à une longue maladie. L'information est livrée par le groupe D-Média.
11 NOUVEAUX CAS POSITIFS AU COVID-19
Il s’agit de cinq cas importés, six contacts suivis par les autorités sanitaires. Le Sénégal compte désormais 67 cas confirmés, dont cinq guéris. En tout, 62 patients sont sous traitement à Touba, Dakar
Le nombre total de cas de COVID-19 au Sénégal est passé à 67 suite à la détection de 11 nouveaux cas, a annoncé dimanche, le porte-parole du ministère de la Santé et de l’action sociale, Docteur Alyose Waly Diouf.
Selon le Dr Diouf, sur 85 tests d’examen virologiques reçus, 11 sont revenus positifs.
Il s’agit de cinq cas importés, six contacts suivis par les autorités sanitaires, a fait savoir le porte-parole du ministère de la Santé et de l’action sociale lors d’un point de presse.
Avec ces 11 nouveaux cas, le Sénégal compte désormais 67 cas confirmés, dont cinq guéris. En tout, 62 patients sont sous traitement à Touba, Dakar, Diamniadio et Ziguinchor.
Dr Diouf a assuré que leur état de santé "évolue favorablement" et exhorté les populations au "strict respect des mesures de prévention".
Il a indiqué que le ministre de la Santé et de l’Action sociale Abdoulaye Diouf Sarr a lancé un appel et un encouragement au personnel médical du secteur public et privée qui est en première ligne dans le combat de la pandémie.
par Mouhamadou Sy
CES GENS HONNÊTES QUI BRÛLENT QUAND MÊME LES FEUX...
Ce qui se passe au Sénégal avec le non-respect délibéré des lignes de conduites établies par l'Etat révèle les lacunes de notre société. Le niveau d'éducation d'une génération définit le niveau de discipline de la société dont elle aura la direction
Ce qui se passe au Sénégal, avec le non-respect délibéré des lignes de conduites établies par le gouvernement révèle les lacunes de notre société, des lacunes quant à notre lecture des phénomènes, des lacunes quant à notre mode d'agir, bref des lacunes quant à notre façon d'éduquer.
Lacunes que l'on collectionne, sacralise et présente comme identité à respecter, surtout quand il s'agit de nous comparer à ceux qu'on appelle les autres, les différents, les pas comme nous, si on ne les nomme pas ennemis.
Ce comportement irrationnel, et si je voulais juger je dirais irresponsable, n'est pas un fait d'individus isolés dont la faiblesse morale serait connue de tous. Non, il s'agit principalement d'individus qui ont justement la plus grande responsabilité morale aux yeux de la population à tous ses niveaux. Il s'agit des personnalités qui ont le respect des militaires, des ministres, des médecins, des professeurs, du président, si ce n'est leur adoration. Mais visiblement, par ignorance ou par autre défaillance intellectuelle ou morale, ces individus refusent de respecter la raison et les consignes des spécialistes, qu'ils prennent certainement de haut car il ne s'agirait que de leurs "disciples spirituels".
Et ils mettent donc tout le peuple en danger ; ce qui compte c'est bien de ne pas bouleverser les positions sociales qui satisfont les égos même si tout le monde va en pâtir ! Du suicide collectif qui rappelle ceux organisés par les grands gourous de certaines sectes. Mais cela ne peut pas être notre cas, car nous ne sommes pas en secte et, nous, ce ne sont pas des gourous que nous avons. N'est-ce pas ?
Oui, je comprends qu'il est nécessaire pour l'humain de toujours se rattacher à la branche à sa portée pour éviter la dégringolade. De s'y agripper même, quand le vent souffle et que les branches se mettent à se balancer. Est-ce l'aspect singe, difficilement effaçable, qui se recycle au fond de notre mentalité, nous humains ? Je pose la question...
Mais ce qui est bien chez le singe, c'est son activité, passer de branche en branche, occuper l'étendue de son espace en permanence. Il trouve son équilibre en bougeant plutôt qu'en restant sur place. A la différence du paresseux qui s'agrippe, se fige et stagne.
La nature faite d'incessants changements semble favoriser l'activité sur la stagnation, qui elle se voit dépasser et écraser tôt ou tard !
De qui voulons-nous nous rapprocher, je parle de notre mentalité ; singe ou paresseux ? Désolé, mais ce sont les deux choix dans la carte des menus !
Si nous passions à un niveau au-dessus, si nous changions de branche, si au lieu de s'agripper à de la misère magnifiée, comme pour en masquer le caractère funeste, si au lieu de ruser avec la peur en en faisant une puissance qui octroie sa pitié, nous décidions d'y faire face ; si nous actionnions notre rationalité jusqu'à ce qu'elle prenne le dessus sur cette phobie du vide, jusqu'à ce qu'elle stipule et intègre, une fois pour toutes, que l'important n'est pas de s'agripper mais d'évoluer tout en maintenant l'équilibre. Jusqu'à ce qu'elle comprenne que ceux qui s'agrippent finissent par le perdre en s'effondrant tout comme le paresseux l'expérimente ; mais que ceux qui ont la hardiesse de bouger sont ceux qui ont une chance de se maintenir.
Nos sociétés renferment de l'intelligence, de l'honnêteté, de la compétence, ce n'est pas là la question. La question est comment tout ceci se laisse organiser. Car avoir les bonnes cartes ne suffit pas à gagner à une partie d'un jeu ; la stratégie, à savoir l'organisation des coups, la façon de réagir aux attaques, et surtout la planification, est celle qui marque la différence.
Dans une société, une bonne stratégie de vie est celle qui aide à préserver la vie, à l'élever, à prévenir du danger et à y faire face quand il est là ; elle est multiforme, mais de quelque forme qu'elle soit, elle requiert la discipline, qui de mon point de vue se définit comme une attitude commune qui préserve la cohérence dans les interactions entre individus, entre organes, et entre les individus et les organes. Un code de la route des actes auquel les citoyens doivent se soumettre, y compris le marabout le plus suivi.
Cependant, on n'improvise pas une telle attitude commune dans une société, on l'instaure progressivement, on en fait une habitude, on la plante, la cultive et la surveille. L'éducation est le pivot d'un tel projet social. Le niveau d'éducation d'une génération définit le niveau de discipline de la société dont elle aura la direction.
Sur la question de choisir entre le singe et le paresseux, dans le cas où nous portons notre choix sur le dernier, ayons quand même la vivacité minimale de profiter d'une de ses caractéristiques utiles, à savoir respecter l'isolement nécessaire pour endiguer le coronavirus !
LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN
LES ENFANTS DE LA RUE
EXCLUSIF SENEPLUS - L’Etat ne cesse de concéder de l’espace aux féodalités religieuses. La République ne peut pas marcher dans un pays où l’Etat doit rendre des comptes, s’abaisser - NOTES DE TERRAIN
Vendredi 20 mars 2019. J’ai rassemblé les quelques affaires indispensables pour travailler, désormais, chez moi. Au bureau, nous avons décidé, depuis le début de la semaine, d’instaurer le télétravail. Nous n’étions plus que deux à venir faire le point quotidiennement, et assurer un service minimum. Tout est maintenant réglé. Il est plus sûr de rester chez nous. Surtout que je prends les transports en commun. Si rien n’est encore alarmant au niveau national, et dans la région de Dakar, le coronavirus continue de se propager au Sénégal. Nous avons jugé plus sage de prendre nos dispositions. Pour ne pas être des vecteurs de transmission de la maladie. Ou devenir des victimes.
Je descends. Pour chercher de l’eau et acheter un paquet de mouchoir, avant de rentrer. Sur le chemin de la boutique, je tombe sur un attroupement composé de garçons. Je les reconnais. Ce sont les mêmes. Ils passent la majorité de leur journée dans le coin. Des talibés. Ils jouent aux billes. Ils sont sept, aujourd’hui. Ils s’invectivent en pulaar. C’est la seconde fois que je m’arrête devant ce groupe de gamins. La première fois, j’avais joué au ballon avec eux. Aujourd’hui, je m'inquiète un peu. A cause du coronavirus. Quel sera le sort de ces enfants en ce temps d’incertitude ? J’essaie de savoir s’ils ont des informations par rapport au fléau qui touche l’humanité. J’aborde la conversation en leur demandant leur âge. Le plus âgé du groupe a treize ans. Le cadet n’a que huit ans.
A peine ai-je entamé la discussion qu’ils se mettent à courir. Joyeusement. Je me retourne. Une femme est venue leur apporter des restes d’un repas. Ils se précipitent autour d’un bol, qui semble contenir un plat de "domoda". Ils mangent, frénétiquement. Les mains nues. Le plus petit a l’air d’avoir plus faim que les autres. Il se démène tant bien que mal au milieu de ses camarades et enchaîne les bouchées de riz. On dirait que sa respiration est suspendue. Sa bouche contient tellement de nourriture que son visage se déforme. Trois d’entre eux restent à l’écart ; ils sont en train de régler leurs affaires d’argent. Je m’approche, leur parle. Ils baragouinent des paroles en pulaar. Ils ne comprennent pas le wolof. La discussion est interrompue. J’abdique et repars prendre mes affaires. Je voulais leur poser plusieurs questions. D’où viennent-ils ? Où sont-ils logés ? Leur a-t-on parlé du coronavirus ? Comment cela se fait-il qu’on les voie, ici, pendant une longue partie de la journée ?
Tout a déjà été dit sur la situation des talibés. Les dangers qui les guettent dans la rue. Leur précarité. La violence infligée par leurs bourreaux. L'inconscience des parents qui les mènent à la galère. L’absence d’empathie et de discernement d’une grande partie de la population, qui continue de nier les malheurs de ces enfants au nom de la culture. L’inconséquence de l’Etat. Finalement, nous fermons les yeux et acceptons la condition d’oppression dans laquelle ces enfants sont confinés. Par habitude. Ils font maintenant partie du décor. La communauté nationale ne s’émeut plus face à la déshumanisation de ces enfants. Qu’est-ce qui justifie cette grande apathie ? Pourquoi le corps social, dans son ensemble, ne condamne pas l’exploitation de ces enfants ? Avons-nous perdu toute capacité de raisonnement moral ?
Les systèmes d’exploitation sont tous les mêmes. Ils s’appuient sur des croyances et des idéologies. Sur un pouvoir autoritaire, qui parfois utilise une violence symbolique pour s’imposer à la majorité. Ils ont une certaine sensibilité au despotisme. Ils méprisent la réflexion. Ainsi, au Sénégal, ce sont les féodalités religieuses qui permettent l'asservissement des talibés. Le justifient. Elles se moquent des lois votées par les représentants du peuple sénégalais. De l’interdiction de la mendicité des enfants. De l’agitation citoyenne. La situation des enfants de la rue est révélatrice du paradoxe de notre pays : une incapacité à choisir entre le République et les pouvoirs héréditaires. Les féodalités religieuses, qui gouvernent les consciences, empiètent sur les prérogatives de la puissance publique. L’Etat est à chaque fois obligé de négocier avec elles. Nous sommes arrivés à un point où le pouvoir religieux ne se soumet plus au contrôle de la légalité. Il détient, lui-même, un pouvoir discrétionnaire illimité. Or, la République ne peut pas marcher dans un pays où l’Etat doit rendre des comptes, s’abaisser. Se dédire. Et la démocratie ne peut pas aller sans la liberté et l'égalité. C’est pourtant le cas au Sénégal. L’Etat ne cesse de concéder de l’espace aux féodalités religieuses.
Un souffle social asphyxié. Nous sommes arrivés à une situation d’anomie. D’une part, la République est étouffée par l’aristocratie religieuse. L’Etat s’écrase à chaque fois que les intérêts religieux sont en jeu. D’autre part, les religieux ne détiennent pas de pouvoir politique à proprement parlé. Sauf dans leurs fiefs où l'administration du contrôle social leur est pratiquement dévolue. Ce qui mène à des impasses. Car les féodalités religieuses ne chercheront jamais à se réformer dans le sens de leur intégration et de leur soumission à la République. Tout cela nous assigne à une situation de stagnation sociale. Cela ne peut pas durer immuablement. Notre nation perd en énergie et en dynamisme. Se cherche inlassablement des boucs émissaires. Au lieu de regarder, dans le champ social environnant, les tares et les discours qui empêchent toutes possibilités de progrès.
Les talibés, à qui on enlève une grande partie de leur dignité, sont les victimes de la léthargie sociale. Qui défend cette exploitation ? Les religieux. En tout cas, beaucoup d’entre eux sont favorables à cet asservissement. La situation des talibés nous montre que la République et la démocratie sont préférables aux pouvoirs héréditaires. Les féodalités religieuses n’en ont rien à faire des principes de progrès social. A chaque fois que l’Etat tente de leur faire entendre raison, ils ruent dans les brancards et accusent des ennemis imaginaires : franc-maçonnerie, lobbies anti-religieux. D’autres mots d’ordre - anti-impérialisme, néocolonialisme - s’y ajoutent, qui s’ils sont vrais en partie, ne justifient pas vraiment notre situation d’engourdissement social, et le contexte économique et social mauvais dans lequel nous sommes englués.
La vérité, c’est que la société sénégalaise, écartelée entre deux forces antagoniques, n’arrive plus à être en mouvement. Elle est dans une situation de stagnation structurelle. Il n’y a plus de force d’équivalence pouvant permettre la respiration du corps social. Toute la vitalité politique que nous produisons devient presque inefficace à cause d’un regain d’immobilisme et des postures d’intransigeance et d’absolutisme de l’aristocratie religieuse. L’Etat doit reprendre ses droits. Entièrement. En étant, par le biais de ses représentants élus, inflexible. En exerçant les compétences et prérogatives dévolues à travers la souveraineté populaire. Le pouvoir ne peut pas se partager. Sinon, il montre une faiblesse coupable, qui ne mène qu’à des impasses. A une faillite de toute la société. C’est ce qui est arrivé au Mali et dans d’autres pays de la sous-région. Si nous choisissons certains d’entre nous, de manière pacifique et transparente, pour être aux commandes de l’appareil d'État, si nous payons nos impôts, c’est pour qu’ils assurent notre sécurité et veillent à la bonne marche de la société. Pour qu’ils gèrent l’existant et les catastrophes. En utilisant tous les leviers de la puissance publique. Autrement, nous serons tous plongés dans un désordre social invivable. Mais, jusqu’à preuve du contraire, nous n’avons pas renoncé à l’exercice de notre liberté politique. Nous n'avons demandé à aucune aristocratie de mener les affaires de notre pays.
Retrouvez sur SenePlus, "Notes de terrain", la chronique de notre éditorialiste Paap Seen tous les dimanches.
Tant d’autres voies s’offraient à nous. Nous aurions pu emprunter tant d’autres chemins. Rien, en effet, ne nous condamnait à échouer sur ces bords.
(...) Le siècle sera peut-être celui au cours duquel l’humanité, finalement, ingèrera ses artefacts. Elle ne fera plus qu’un avec ceux-ci et avec le monde extérieur, lequel aura, par la même, disparu, enseveli dans ses entrailles. (...) Transcender nos limites corporelles, la dernière frontière, tel à toujours été notre rêve. Il nous aura coûté la Terre.
À présent, le chemin du choc est largement ouvert (...). L’époque n’est donc pas seulement étrange. Elle est propice à toutes sortes de débordements sans finalité apparente.
(...) La Terre sera l’oasis à partir duquel l’humanité toute entière entreprendra la gigantesque œuvre de régénération du vivant. Ou elle en sera le tombeau universel, son mausolée, dans la continuité de la période géologique de l’histoire de l’univers.
Ce mausolée accueillera non pas la dépouille de l’humanité, mais sa momie. Les funérailles de l’humanité n’auront pas lieu dans le grand secret, mais dans un tumulte absolu. Elle attiseront une gamme de passions et convoqueront l’histoire intime de chacun. Certains y viendront armes de funestes souvenirs et de poisons, et d’autres de cadeaux, toutes sortes d’objets inutiles, des bibelots, du rhum, de la cocaine et du tabac, des peaux d’animaux et des fusils de chasse, quelques cabris et d’énormes miroirs, des fétiches usés, et peut-être aussi de l’encens. Tout sera remis en question. Mais il y a longtemps que le temps des réponses aura été définitivement clos.
Extrait de la conclusion de BRUTALISME (Paris, La Découverte, 2020), pages 233-234, puis 236.
LA CHINE ATTEND SON ATTAQUANT VEDETTE CÉDRIC BAKAMBOU
L'attaquant de la RDC est actuellement confiné en France alors que sa compagne va bientôt accoucher
La Chine semble sortir de la crise sanitaire provoquée par le coronavirus et son championnat de football doit reprendre dans quelques semaines. L'une de ses vedettes est le Congolais Cédric Bakambu mais l'attaquant de la RDC est actuellement confiné en France alors que sa compagne va bientôt accoucher.
Cédric Bakambu doit rejoindre Pékin à la fin du mois de mars. Les consignes de son club, le Beijing Sinobo, sont tombées : le buteur congolais aura pour objectif d’être prêt pour la reprise du championnat chinois, début mai.
Et comme il vient de France, pays à son tour engagé dans la lutte contre le covid-19, il lui faudra observer une période de quarantaine, avant de rechausser les crampons.
Le problème, c’est que Cédric Bakambu est actuellement à Paris, auprès de sa compagne et de son fils. Alors que les Français sont confinés depuis quelques jours, la famille doit s’agrandir dans un mois à peine et elle ne pourra pas l’accompagner en Asie.
Difficile de quitter les siens dans un tel contexte, d’autant que le joueur de 28 ans ne sait absolument pas quand il pourra, par la suite, retrouver l’hexagone. En fin de semaine, « le léopard» a raconté son histoire à nos confrères du journal L’Equipe, celle d’un joueur qui n’a probablement plus le temps de penser à son transfert avorté au Barça cet hiver, quand la vie était encore normale en Europe.
Cédric Bakambu s’inquiète pour son clan, mais aussi pour son pays, la République démocratique du Congo, une promesse dans cet entretien accordé à L’Equipe. « On n’est à l’abri nulle part. Je sensibiliserai également mes compatriotes à travers mon émission sur ma chaîne YouTube, dès dimanche ».
LES VÉRITÉS DE L’IMAM CHEIKH ALIOU CISSÉ DE MÉDINA BAYE
Le religieux regrette le retard accusé par les autorités étatiques pour les informer des dispositions prises notamment l’interdiction des rassemblements pour éviter la propagation de la maladie du coronavirus
Cheikh Aliou Cissé, Imam de la mosquée de Médina Baye a regretté le retard accusé par les autorités étatiques pour les informer des dispositions prises notamment l’interdiction des rassemblements pour éviter la propagation de la maladie du coronavirus.
‘’Ce n’est qu’aujourd’hui (vendredi) vers midi que nous avons été informés des dispositions prises par les autorités gouvernementales concernant ces rassemblements’’, a dit après la prière de vendredi l’imam dans un message audio véhiculé à travers les médias sociaux.
‘’Dieu donne la possibilité au musulman de prier chez lui en cas de calamité et nous sommes conscients de cette réalité’’, a dit l’Imam invitant les autorités étatiques à se rapprocher d’eux pour leur exprimer leur volonté.
‘’Si les autorités nous expliquent les contours de cette loi qui interdit les rassemblements, nous ne ferons que nous en plier car notre volonté n’est pas de les défier’’, a dit Serigne Cheikh rappelant que ‘’dans le sermon lu au cours de cette prière Baye qui l’a écrit il y a 50 ans priait pour que Dieu préserve le monde des épidémies.
Il a lancé un message du Khalife Cheikh Tidiane Ibrahima Niasse à l’endroit des fidèles les prévenant que ‘’si demain des faits nouveaux nous poussent à prier à la maison, sachez que vous serez rétribués à la dimension de celui qui a effectué ce rituel dans la mosquée’’.
OUSMANE FAYE, LE VIROLOGUE EN PREMIÈRE LIGNE CONTRE LE CORONAVIRUS
À la tête du département de virologie de l’Institut Pasteur de Dakar, il conseille quotidiennement les pouvoirs publics sénégalais. Le quinquagénaire a supervisé début février la formation de quatorze laboratoires africains au diagnostic du covid-19
Jeune Afrique |
Manon Laplace |
Publication 22/03/2020
À la tête du département de virologie de l’Institut Pasteur de Dakar, en première ligne contre le début d’épidémie de coronavirus, le Dr Ousmane Faye conseille quotidiennement les pouvoirs publics sénégalais.
1. Point quotidien
À la tête d’une équipe de 54 personnes, ce biologiste virologue annonce chaque jour au gouvernement sénégalais, un peu avant 17 heures, le résultat des analyses quotidiennes. Le ministère de la Santé peut ainsi rendre public le nombre de nouveaux cas, de cas suspects ou de patients guéris.
2. Premier sur la recherche
En plus de l’analyse des prélèvements qui leur sont envoyés, les équipes du Dr Faye portent une attention particulière à l’étude du virus. Depuis 2003 déjà et l’épidémie de sras en Chine, ils ont étudié d’autres formes de coronavirus. Ils planchent aujourd’hui sur le séquençage du Covid-19.
3. Quatre piliers
Travail en laboratoire, surveillance, communication et instauration d’un protocole de crise : voici les quatre piliers nécessaires à la bonne gestion d’une épidémie, selon lui. Le docteur estime qu’il faut « parfois s’affranchir du tout médical ».
4. Expert en épidémie
Le Sénégalais n’en est pas à la gestion de sa première crise. Entre 2014 et 2018, il a été responsable de plusieurs laboratoires, entre la Guinée et la RDC, dans le cadre de la lutte contre Ebola. En 2016, il dirigeait également le laboratoire de l’Institut Pasteur de Dakar envoyé en Angola pour participer à la lutte contre la fièvre jaune.
5. Conseiller
Tous les matins, il part jouer les conseillers auprès du ministre de la Santé. De son expérience dans la gestion d’Ebola, il a conservé une notion importante : le protocole de test, qui exige notamment d’obtenir deux analyses négatives avant qu’un patient soit considéré comme guéri.
6. Formateur
Après avoir formé des laboratoires rwandais, ougandais et zambiens aux techniques de diagnostic de la fièvre jaune en 2013, il a supervisé début février la formation de quatorze laboratoires africains au diagnostic du coronavirus. Au début de la crise, seuls deux établissements subsahariens étaient en mesure de mener des tests : l’Institut Pasteur de Dakar et l’Institut national des maladies transmissibles, en Afrique du Sud.
Ousmane Faye et son équipe de chercheurs ont enseigné l’utilisation des outils de diagnostic et fourni des kits de dépistage à des laboratoires de tout le continent. Ils continuent aujourd’hui à dispenser des conseils à travers un groupe WhatsApp.
7. Prolifique
Il est l’auteur de 121 publications scientifiques et médicales, parues depuis 1992 dans différentes revues internationales.
8. Occupé…
Sur pied tous les jours à 5 heures du matin et mobilisé au moins jusqu’à 23 heures, le quinquagénaire a des journées bien remplies. Entre deux analyses, il échange avec le Comité national de gestion des épidémies et répond à des coups de téléphone via sa montre connectée.
9… mais pas dépassé
Avec une capacité de 1 000 tests par jour, pouvant être élargie grâce à des unités mobiles (des laboratoires dans des camions), l’Institut Pasteur assure qu’il est loin d’être dépassé. Il en va de même pour les unités d’isolement comme celle de l’hôpital de Fann à Dakar, qui a accueilli les premiers malades, estime Ousmane Faye.
10. Diagnostic précoce
À l’Institut Pasteur, les premiers tests ont commencé le 6 février et le premier cas n’a été confirmé que le 28. Selon le virologue, « tout a été fait pour être prêt très tôt face à un virus qui est arrivé tard en Afrique, mais qui se propage très vite ». Une « capacité à identifier rapidement les cas suspects et à les sortir de leur communauté » qui déterminera l’évolution de la pandémie sur le continent, selon Ousmane Faye.
Le cas d’un patient sénégalais de retour d’Italie et installé dans la ville de Touba, à l’est de Dakar, devenue l’épicentre de l’épidémie au Sénégal, pourrait marquer un tournant. Le malade, diagnostiqué positif au Covid-19 le 11 mars, a déjà contaminé 18 personnes et le ministère de la Santé a identifié 71 individus avec qui il aurait été en contact. Si le nombre de contaminations devient trop important, il faudra changer de stratégie, estime Ousmane Faye, et demander aux individus de se placer en auto-isolement.