COVID-19 : EN ITALIE, "LES GENS MEURENT COMME DES CHIENS"
Avec plus de 3 400 morts, le pays est passé jeudi devant la Chine. Alors que l’épidémie se propage rapidement , le confinement pourrait être durci et prorogé
La colonne de véhicules militaires s’est ébranlée dans la nuit depuis Bergame. A bord, des dizaines de cercueils de victimes du coronavirus que les autorités ont dû transférer dans d’autres villes, les services de crémation de la ville lombarde étant saturées. En moins d’un mois depuis le début de l’épidémie de coronavirus, l’Italie a connu plus de morts (3 405, selon le bilan établi jeudi) que la Chine avec, mercredi, le sombre record de 475 décès en une seule journée (contre 427 jeudi). A tel point que dans le Corriere della Sera, le président du Conseil, Giuseppe Conte, a admis jeudi que la fin du confinement, prévue au 3 avril, serait reportée : «Il est clair que les mesures que nous avons prises, tant en ce qui concerne les activités économiques et individuelles qu’en ce qui concerne l’école, ne pourront être que prorogées.» Car les seuls signes apparemment encourageants - à savoir le nombre de personnes guéries qui avoisine le chiffre de 1 100 et une augmentation des contaminations légèrement moins rapide qu’au cours des jours précédents - ne sont pas suffisants pour dire que l’épidémie est sur le point d’être enrayée.
«Au bord de l’implosion»
«La seule certitude, c’est que les chiffres de la Lombardie ne veulent plus rien dire. La situation est hors de contrôle», estime même Enrico Bucci, biologiste à l’université de Philadelphie selon qui le nombre de contaminés est beaucoup plus élevé que les quelque 17 713 cas recensés mercredi soir par le ministère de la Santé. «Les hôpitaux sont au bord de l’implosion, ils renvoient chez elles beaucoup de personnes présentant des symptômes sans leur faire les tests. Le nombre de cas positifs est donc largement sous-estimé.»
La Lombardie reste de loin la région la plus touchée par le Covid-19 avec près de 2 000 décès. Après Codogno, foyer initial de l’infection (où après l’isolement total de la commune pendant quatorze jours, on n’a plus enregistré de nouveau cas depuis le 10 mars), les communes de Bergame et maintenant de Brescia sont les plus martyrisées par le virus. «450 personnes sont mortes depuis le début de l’épidémie, essentiellement en l’espace de dix jours», se désespère Emilio Del Bono, le maire de Brescia. Pour l’heure, personne ne parvient à expliquer pourquoi certaines cités sont plus frappées que d’autres et pour quelles raisons (malgré les corrections à apporter en fonction du nombre de contaminés) le taux de mortalité en Lombardie s’élève à 11 % : soit deux fois plus que la moyenne nationale déjà exceptionnelle par rapport aux autres situations dans le monde. Sur place, l’inquiétude grandit, surtout depuis mardi, quand deux employés des postes, âgés de 59 et 63 ans, sont morts, victimes du virus. Le lendemain, c’est un médecin de famille de Lodi, âgé de 57 ans, qui est décédé. «C’est faux de dire que le virus ne tue que les vieux et les malades, mon père n’était ni l’un, ni l’autre», a confié Roberta Zaninoni, une fille d’une autre victime de 72 ans, qui a ajouté avec effroi : «Les gens meurent comme des chiens, comme des cochons.»
Environ 53 000 verbalisations
Face au désastre, les autorités lombardes s’apprêtent à ouvrir un hôpital d’urgence avec 400 lits en soins intensifs dans un pavillon de l’ancienne foire de Milan et demandent des nouvelles mesures de restrictions. D’autant que sur la base des téléphones portables, elles ont constaté que 40 % des habitants ne respectaient pas complètement les consignes de confinement. «D’un côté, je vois des gens qui sortent se balader et de l’autre des personnes qui n’arrivent plus à respirer, basta !» s’est indigné le président de la région Lombardie, Attilio Fontana, qui souhaite notamment l’interdiction de sortir pour faire du sport.
«Nous prendrons de nouvelles dispositions si les consignes ne sont pas respectées», a averti la ministre de l’Intérieur, Luciana Lamorgese, qui envisage en particulier de réduire ultérieurement les horaires d’ouverture des supermarchés durant le week-end. Jusqu’à présent, environ 53 000 personnes ont été verbalisées pour non-respect du confinement. «Somme toute, ce qui est le plus surprenant, c’est que 95 % des personnes contrôlées respectent les règles, relativise néanmoins le quotidien La Stampa. Imaginez comment serait le pays si les lois étaient respectées par plus de 95 % des citoyens et si 95 % des contribuables payaient leurs impôts ?»
Du côté du gouvernement, on prépare sérieusement le pays à la prorogation du confinement au-delà du 3 avril. D’autant qu’au-delà de la Lombardie, les évolutions dans certaines régions suscitent des inquiétudes. Dans le Piémont, le nombre de cas positifs a doublé en trois jours. Autre source de préoccupation : 8 % des personnes infectées par le Covid-19 font partie du corps médical et l’agence nationale du médicament dénonce un début de pénurie pour certains produits dans les hôpitaux. Pour l’heure, 94 % des Italiens approuvent les mesures prises par l’exécutif. Ils sont 80 % à estimer que, dans l’épreuve du coronavirus, le pays se comporte «mieux ou beaucoup mieux» que les autres pays européens.
DAKAR SOMMÉE DE FERMER TOUTES SES MOSQUÉES
Le ministère de l’Intérieur a décidé ’’à compter de ce vendredi jusqu’à nouvel ordre’’ de la fermeture des mosquées dans la région de la capitale
Dans le cadre de la lutte contre la propagation de la Covid-19, le ministère de l’Intérieur a décidé ’’à compter de ce vendredi jusqu’à nouvel ordre’’ de la fermeture des mosquées dans la région de Dakar, informe un communiqué reçu à l’APS.
‘’En application des dispositions de l’arrêté N°7782, de monsieur le ministre de l’Intérieur , portant interdiction provisoire de manifestations ou rassemblements , et en raison du rythme de progression de la maladie du coronavirus (Covid-19) dans la région, les mosquées sont fermées à partir du 20 mars 2020, jusqu’à nouvel ordre sur l’étendue du territoire régional’’, annonce le texte.
Selon le document, ‘’tout contrevenant aux dispositions du présent arrêté , sera passible des peines prévues par les lois et règlements en vigueur’’.
Les préfets des départements de Dakar, Guédiawaye, Pikine et Rufisque, le commissaire central de Dakar, chef de service régional de la sécurité publique, le Commandant de la Légion ouest de Gendarmerie,sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’éxécution du présent arrêté qui sera publié et communiqué partout où besoin sera, ajoute la même source.
64 MILLIARDS POUR ATTÉNUER LES EFFETS DU CORONAVIRUS SUR L’ÉCONOMIE NATIONALE
Dans le sens de préserver ’’les répercussions sociales de la crise’’, le ministre des Finances indique que ce fonds proposera une ’’batterie de mesures’’, notamment en termes d’accompagnement des secteurs affectés par l’épidémie
Le gouvernement sénégalais a prévu de doter le Fonds de riposte et de solidarité contre les effets du Covid-19 (Force-Covid-19) d’une enveloppe de 64 milliards de FCFA, pour atténuer les effets dus à la pandémie de maladie à coronavirus sur l’économie nationale, a appris l’APS de source officielle, jeudi.
’’[…] Avec l’évolution de l’épidémie, un plan de contingence (Force-Covid 19) a été élaboré et chiffré, pour le montant de 64.039.279.189 FCFA afin de renforcer les capacités du pays à faire face à la situation’’, a déclaré le ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, Amadou Hott, lors d’une conférence de presse.
Cette décision fait suite à une première mesure qui avait été prise dès l’enregistrement des premiers cas positifs au Covid-19 au Sénégal, consistant à dégager un budget de 1,4 milliard FCFA sur les ressources de l’Etat pour préparer la riposte et gérer les premiers cas.
Amadou Hott souligne que ce plan de contingence va permettre de ’’soutenir les secteurs affectés afin d’atténuer les effets négatifs de l’épidémie sur la croissance et les emplois’’.
Dans le sens de préserver ’’les répercussions sociales de la crise’’, il a souligné que ce fonds proposera une ’’batterie de mesures’’, notamment en termes d’accompagnement des secteurs affectés par l’épidémie, tels que le tourisme, le transport aérien, les chaînes d’approvisionnement du commerce formel et informel et l’industrie.
Le ministre a aussi précisé que ce plan sera financé ’’essentiellement’’ par le budget de l’Etat et par les contributions des partenaires au développement et des Sénégalais de bonne volonté.
’’La taille du fonds dépendra des besoins identifiés sur la base des études, évaluations et enquêtes conduites par les différentes structures de l’Etat, en collaboration avec les acteurs économiques et nos partenaires’’, a également indiqué le ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération.
Outre ’’Force-Covid-19’’, Amadou Hott a aussi annoncé la création prochaine d’un comité de ’’croissance et de veille économique’’, pour notamment anticiper sur les répercussions économiques directes et indirectes de la crise sanitaire sur l’économie nationale.
’’Ce Comité qui sera composé de représentants de plusieurs ministères, du secteur privé et de la BCEAO se réunira autant de fois que de besoin et soumettra des propositions au conseil des ministres’’, renseigne-t-il.
Dans cette perspective, il a rappelé la nécessité pour les pays africains d’initier, une fois cette crise sanitaire terminée, ’’des réflexions profondes sur leur mode de production et de consommation en davantage soutenant la production locale.’’
Interpellé sur une possible augmentation des prix des denrées alimentaires, Amadou Hott a assuré que ’’les mesures de confinement frontalier ne concernent pas les cargos et le fret (aérien et maritime)’’.
‘’Il n’y a pas de raisons de s’inquiéter. Que les populations soient rassurées que d’autres décisions seront prises en fonction de l’évolution de la situation’’, a-t-il insisté.
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
« LA CRISE SANITAIRE VA IMPACTER LE NIVEAU DES RECETTES »
EXCLUSIF SENEPLUS - Nous devons rompre avec les systèmes financés par l’aide au développement - Il faut privilégier l’option d’une loi de finance rectificative pour adapter nos ressources à la nouvelle situation - ENTRETIEN AVEC MOUSSA BALA FOFANA
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 19/03/2020
La facture économique du coronavirus risque d’être lourde pour le Sénégal comme pour beaucoup d’autres pays. Dans l’entretien accordé à SenePlus, le planificateur et banquier d’affaires, Moussa Bala Fofana, fait une analyse de la difficile situation économique qui peut résulter de la crise sanitaire provoquée par le Covid-19.
SenePlus : Étant donné que la Chine est l’un des principaux moteurs de l’économie mondiale représentant 16,3% du PIB, tout ralentissement significatif de son activité économique se traduit inévitablement par un ralentissement de l’activité économique mondiale. Alors ne risque-t-on pas, avec cette crise sanitaire du virus Covid-19 qui frappe la Chine, de vivre une récession économique majeure à l’échelle planétaire ?
Moussa Bala Fofana : Effectivement, la fulgurance de la pandémie impose un arrêt successif des moteurs de l’économie mondiale. Fatalement, les indices boursiers (CAC40, FTSE100, DOWJONES, le STOXX600 et S&P500) qui sont les symboles de la performance du système et de la confiance des investisseurs dans les bénéfices futurs des entreprises, accusent des pertes graves alors que le Vix qui est l’indice de la peur monte tranquillement et surement. Alors que nous n’en sommes qu’au début, la récession pour certains pays est évidente notamment l’Italie, l’Espagne et la France. Le pouvoir des banques centrales est limité, car il ne s’agit pas seulement d’un ralentissement lié à une crise systémique. Ici, nous sommes en face d’un phénomène inédit.
En effet, en plus de la peur des acteurs économiques, la gestion préventive de la pandémie exige des pouvoirs publics d’opérer à un arrêt total des économies l’une après l’autre et sur les différents continents. Les gouvernements veulent éviter la psychose de mort en millier et en quelque dizaine de jours. La panique et l’impuissance peuvent engendrer un traumatisme social aux effets économiques désastreux. Ainsi, la récession économique majeure est donc à nos portes et le débat aujourd’hui porte sur le dispositif de résilience sanitaire et l’ingénierie de la planification de la relance économique. Cette pandémie risque de changer fortement les fondements, principes et cibles de la prise de décision politique des décennies à venir.
Et que doivent faire les gouvernements pour en limiter l'impact dans la durée ?
Le leadership politique doit avoir la crédibilité et le courage d’amener toute une nation à accepter la limitation des libertés et les conséquences économiques que cela va engendrer. Cependant, il faut que le leadership inspire confiance de par sa gestion et des moyens budgétaires et financiers de mitigation des impacts sanitaires, économiques et sociaux. A travers l’instrument budgétaire et fiscal, le gouvernement canadien par exemple, a été en mesure de mobiliser l’équivalent de 3% de son PIB, soit 82 milliards de dollars visant une assistance directe des travailleurs et des entreprises (27 milliards) et le reste allègement et report fiscal.
Parallèlement, les banques centrales et les banques commerciales doivent faciliter l’accès au crédit pour aider à redémarrer la machine. Les banques commerciales doivent conseiller et assister les entreprises dans cette phase délicate de gestion de la liquidité, des charges fixes et du passif à court terme. Au Canada, c’est plus de 400 milliards de dollars qui seront injectés via la banque centrale et les banques commerciales pour stabiliser les ménages et les entreprises. Ainsi, lutter contre ce virus exige une discipline collective, un leadership éclairé, un système financier agile et un plan de résilience sanitaire et de relance économique qui prend en compte les enseignements, les enjeux et nouveaux défis qu’impose désormais la pandémie du Covid-19.
Vera Songwe, la secrétaire exécutive de la CEA de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a affirmé que l’Afrique, le principal partenaire commercial de la Chine, peut perdre la moitié de son PIB avec sa croissance passant de 3,2% à environ 2%. Dans ce cas, quelle solution adopter pour éviter cette catastrophe économique ?
Ces prévisions sont principalement basées sur notre relation avec la Chine, aujourd’hui l’Europe est l’épicentre, les USA et le Canada sont en mode d’arrêt progressif et l’Afrique est au début. Tout cela pour vous dire qu’il est très difficile d’évaluer l’impact d’un phénomène que l’on ne connaît pas, qui est encore en cours et dont nous africains n’avons pas encore subi les impacts directs. L’OCDE prévoyait une baisse de -0,5 ; aujourd’hui on parle de -1,5 de moins sur une prévision de croissance de 2.4%.
L’Afrique présente un niveau de risque sanitaire élevé et la négligence du niveau d’éducation des populations va être un défi pour la gestion préventive. Devant l’urgence, un leadership courageux et les bons comportements des citoyens seront les armes des Africains. Sur le long terme, nous devons rompre avec les systèmes sanitaires et sociaux financés par l’aide au développement et une croissance creuse portée par le capital étranger. Nos plans de relances devront viser le développement économique de nos territoires. Par la productivité et l’industrie locale, nous devons équilibrer le partage de la chaine de valeur issue de nos ressources et renforcer par la même occasion la base défensive de notre économie.
Quelles peuvent être les contrecoups économiques et sociaux de la crise provoquée par le Covid-19 pour notre pays, le Sénégal ?
Nous pouvons d’ores et déjà dire que nos matières premières vont connaître des invendus et des baisses de cours devant les arrêts successifs des moteurs de l’économie mondiale. L’exemple du pétrole est édifiant. Les flux financiers des émigrés vont diminuer, car les étrangers sont les premiers à souffrir des licenciements et pertes d’emplois avant les faillites. Mais plus directement, le Sénégal devra comme tous les pays procéder à l’arrêt de la vie sociale et économique de manière progressive pour diminuer la fulgurance du virus et cela a un coût économique et cela va creuser le déficit budgétaire.
Tout cela va impacter le niveau des recettes. Le régime doit prévoir cela et anticiper sur le renforcement de sa capacité à mobiliser des fonds pour le financement du plan de relance économique et sociale. Ce phénomène arrive dans un contexte où beaucoup de pays africains font face à une situation d’endettement. Au Sénégal, la tension trésorerie est une réalité. Nous devons donc faire preuve d’unité, de solidarité et d’entraide afin de contenir le virus car cela demande des moyens financiers.
La chaîne d’approvisionnement de biens et de services en provenance de Chine étant maintenant gravement perturbée, ne craint-on pas une pénurie alimentaire si cette crise perdure ?
Une pénurie alimentaire est un cas de figure extrême et le Sénégal est un pays d’agriculteur, d’éleveurs, de pêcheurs et d’artisans. Alors à nous de capitaliser sur nos forces. Cependant, le volume du commerce va ralentir et cela va engendrer une raréfaction des produits importés de la Chine et de l’Europe. Nous pourrions avoir un effet inflationniste, si nous ne prenons pas garde. Cependant, nous pouvons le pallier par un changement de nos habitudes alimentaires. Le gouvernement doit d’urgence accompagner l’économie locale à travers un plan de relance qui se concentre à bâtir la base défensive de notre économie. Nous ne devons plus accepter d’être des lieux d’extraction de ressource et de déversoir des produits finis.
Mot de la fin sur cette crise économique qui menace le monde ?
Le culte de la planification et l’esprit entrepreneur vont être les atouts majeurs pour le déploiement du plan résilience sanitaire et de relance économique. Je demande aussi à nos dirigeants de mobiliser les équipes de planificateurs afin d’analyser les impacts à moyen et long terme pour l’élaboration d’un plan de relance économique et sociale.
Dans le court terme, il faut sérieusement privilégier l’option d’une loi de finance rectificative pour adapter nos maigres ressources à la nouvelle situation en plus de la solidarité dont nous devons faire preuve. En effet, devant l’absence des instruments de souveraineté monétaire et le contexte de tension budgétaire, une rectification de l’usage initial de nos ressources via l’instrument budgétaire pour l’adapter au plan de relance économique et de résilience sanitaire est l’option la plus viable et que nous maîtrisons.
Enfin dans l’urgence, un leadership fort et une discipline collective seront nécessaires. Nous devons ensemble travailler à mobiliser les moyens afin d’aider le régime, les populations et porter assistance au personnel de santé. Nous demandons au régime de faire preuve de transparence et d’ouverture, car nous allons avoir besoin de l’appui de tout le monde. A nous aussi de leur apporter notre soutien dans ces moments où nous devons sauver des vies.
CORONAVIRUS : DEUX NOUVEAUX CAS ET TROIS GUÉRISONS
Au total, cinq patients ont guéris de la maladie à coronavirus, 33 patients se font encore soigner à Touba
Deux nouveaux cas de coronavirus ont été déclarés positifs au Sénégal, ce qui porte à 38 le nombre total de cas recensés dans le pays depuis le 2 mars, a annoncé jeudi le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, qui a annoncé la guérison de trois patients.
Donnant le bilan de la pandémie de coronavirus au Sénégal, il a affirmé que deux des 22 tests virologiques transmis au ministère de la Santé par l’Institut Pasteur de Dakar sont positifs.
‘’Il s’agit de deux cas importés’’, a précisé Abdoulaye Diouf Sarr, avant d’annoncer que trois patients, dont un enfant de deux ans, ont guéri de la maladie.
Un homme âgé de 80 ans, testé positif le 3 mars, et sa femme, complètent le trio de patients qui ont recouvré la santé, selon M. Sarr.
La mère de l’enfant de deux ans guéri fait partie des malades qui se font encore soigner.
Cet enfant sera mis à la disposition de la Direction de l’action sociale pour sa prise en charge, en attendant la guérison de sa mère, selon le ministre de la Santé.
Abdoulaye Diouf Sarr précise que les patients guéris vont sortir de l’hôpital, jeudi.
Au total, cinq patients ont guéris de la maladie à coronavirus, 33 patients se font encore soigner à Touba (centre) et à Dakar.
LES MÉDIAS SOLLICITENT L'APPUI DE L’ETAT FACE AUX CONSÉQUENCES DU COVID-19
‘’Aujourd’hui, en ce qui concerne la presse écrite, la publicité est en train de chuter. Certains lecteurs, même s’il y a un besoin d’information, refusent de toucher le journal, car ils pensent que le papier peut être un vecteur de transmission du virus"
Les patrons de presse ont plaidé jeudi auprès du ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, pour une aide financière en faveur des médias, en vue de les aider à faire face aux conséquences de la propagation du Covid-19.
’’Cette maladie, plus qu’Ebola est un peu particulier, parce qu’elle paralyse tous les secteurs d’activité’’, a déclaré le président du Conseil des diffuseurs et éditeurs de presse du Sénégal (CDEPS), Mamadou Ibra Kane, lors d’une rencontre d’échanges sur la maladie avec les représentants des organes de presse.
Le propriétaire des journaux sportifs ‘’Stades’’ et ‘’Sunu Lamb’’ avertit que la presse ne sera pas épargnée par les conséquences de la propagation du Covid-19 qui a touché le Sénégal depuis le 2 mars, avec au jour d’aujourd’hui 36 cas positifs recensés.
‘’Aujourd’hui, en ce qui concerne la presse écrite, la publicité est en train de chuter. Certains lecteurs, même s’il y a un besoin d’information, refusent de toucher le journal, car ils pensent que le papier peut être un vecteur de transmission du virus. Ce qui veut dire qu’elle va souffrir des ventes ’’, a-t-il alerté.
Il indique que ‘’les conditions de travail sont aujourd’hui très difficiles’’. Ainsi, pour respecter les barrières sanitaires, les responsables des médias doivent assurer le transport des journalistes et des autres travailleurs du secteur.
‘’Même si le transport public est nécessaire, il ne remplit pas les conditions normales pour respecter les barrières indiquées pour lutter contre la transmission du virus’’, a expliqué le patron de la Société africaine de communication (AFRICOM). Compte tenu de cela, il pense que ‘’l’Etat du Sénégal doit venir en aide aux organes de presse, comme dans d’autres secteurs de l’activité économique pour un peu faciliter la gestion des entreprises de presse’’.
Il annonce que certaines entreprises de presse pourraient envoyer leurs employés au chômage technique ou autoriser des congés exceptionnels pour une partie du personnel. Mamadou Ibra Kane précise que certains patrons seront obligés de le faire, du fait de leurs difficultés à assurer les charges en matière de transport et d’hygiène.
‘’Ce sont des difficultés économiques auxquelles nous seront confrontées. Je pense même qu’il faudra distribuer l’aide à la presse et revoir le montant de manière substantielle. Des mesures fiscales aussi peuvent être apportées au secteur de la presse’’, dit-il.
Le Directeur général de la RTS, Racine Talla, a abondé dans le même sens, en affirmant que ‘’c’est tout à fait légal pour la presse de réclamer de façon légitime sa part dans le budget consacré à la lutte contre le Covid-19’’.
‘’On doit appuyer tous les organes de presse, surtout privés, qui voient toute leur grille de programme perturbée du fait du coronavirus’’, a lancé M. Talla, faisant valoir que ‘’l’information reste la première denrée de consommation actuellement’’. Il soutient que l’opinion fait tout pour avoir les dernières informations sur la propagation de la maladie.
Pour sa part, le Directeur de l’information du Groupe Futurs Médias (GFM, privé), Souleymane Niang, évoque ‘’la vulnérabilité économique des différentes entreprises de presse’’. ‘’Nous ne demandons pas des choses exceptionnelles, mais juste que le secteur de la presse soit pris en charge et dans l’immédiat. Il faut imaginer les mécanismes qui permettent d’assurer la survie de ce secteur qui est vital dans le combat contre le Covid-19’’, a-t-il lancé.
En réponse à cette demande, le ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, a rappelé que l’urgence est d’abord d’’’assurer la protection des patients’’. ‘’Une fois qu’on arrivera à régler ce problème, on aura la capacité de faire face à l’aide et à l’accompagnement de la presse’’, a-t-il dit.
Il annonce une rencontre restreinte avec le ministère des Finances afin de voir ce qui pourra être fait de manière urgente.
LES CÉRÉMONIES FAMILIALES DOIVENT SE TENIR DANS LES MAISONS
Le ministère de l’Intérieur rappelle qu’en application des décisions prises par le président à ’’l’effet de réduire la propagation’’ du Coronavirus, les manifestations ou rassemblements dans les lieux publics sont interdits sur l’ensemble du territoire
Les cérémonies familiales doivent se tenir dans les maisons, sans grand rassemblement, occupation ou empiétement de la voie publique conformément aux mesures arrêtées par les autorités dans le cadre de lutte contre la propagation du Covid-19, a indiqué le ministre de l’Intérieur.
’’Pour les événements tels que les funérailles, baptêmes, mariages et autres cérémonies familiales, il est demandé aux organisateurs de veiller scrupuleusement à leur tenue dans les maisons sans grand rassemblement et d’éviter toute occupation ou empiétement de la voie publique’’, a souligné Aly Ngouille Ndiaye dans un communiqué transmis à l’APS.
Le ministère de l’Intérieur rappelle qu’en application des décisions prises par le président de la République à ’’l’effet de réduire la propagation’’ du Coronavirus, les manifestations ou rassemblements de personnes dans les lieux ou endroits ouverts au public sont interdits sur l’ensemble du territoire national pour la période allant du 14 mars au 14 avril.
Sont concernés par ces mesures d’interdiction les manifestations soumises à une déclaration préalable obligatoire, les processions sur la voie publique telles que les marches, cortèges, défilés, randonnées pédestres, chants religieux, marchés hebdomadaires, etc., indique le communiqué.
La même source cite les rassemblements ou groupements de personnes dans certains lieux publics, tels que les salles de spectacle, les stades et autres terrains dédiés au sport, et les lieux de baignade, etc.
Les établissements et autres lieux de collation recevant du public tels que les restaurants qui sont invités à privilégier la vente des plats à emporter afin de réduire au strict minimum les regroupements à fort contact humain, selon le ministre de l’Intérieur.
par Abdou Fall
LE TEMPS DES LARGES CONSENSUS
Aucun système de santé au monde ne peut vaincre cette pandémie avec de seuls moyens médicaux. Tous les pays qui en sont arrivés à la maîtrise l’ont réussi par la détermination des citoyens, à l’échelle individuelle et collective
C'est connu. C'est dans les moments d'épreuves que les hommes comme les nations mesurent leur capacité de résilience et de riposte face aux chocs et tourmentes de la vie. Dans le contexte actuel de pandémie du covid 19 qui est encore loin d’avoir livré tous ses secrets en termes d’impact sur la vie des communautés humaines, notre pays est en train de vivre sa part d'histoire avec ce phénomène bouleversant du siècle et du millénaire naissant.
Le président Macky Sall qui préside aux destinées du Sénégal dans ces circonstances historiques exceptionnelles a pour sa part posé des actes de haute portée politique et sociale dont le décryptage pourrait aider à nourrir un débat de fond sur notre pays et son devenir. Une première remarque qu’il est intéressant de faire. Des experts reconnus des politiques de santé publique dans le monde s'interrogent depuis le début de la pandémie sur ce qui apparaît comme le paradoxe sénégalais réputé le plus touché dans notre sous-région alors qu’il est loin d’ être plus exposé à la contamination que les autres pays du continent .
Madame Anne Marie Moulin, Directrice de recherche au CNRS (France) livre sa lecture dans un article du quotidien Le Figaro repris par l’hebdomadaire Français Le Point où elle déclare : " ce n’est pas un hasard si le premier cas d’infection en Afrique subsaharienne a été détecté au Sénégal. C’est un des pays qui bénéficie des meilleures structures médicales du continent ". Ce qui est bien vrai. Les classements de l'OMS nous plaçaient longtemps du point de vue des performances de notre système en 3eme position sur le continent et en première position en Afrique noire. Autant un tel jugement qui reflète celui de la communauté scientifique internationale constitue un motif réel de satisfaction, autant il nous donne une raison supplémentaire d'assumer avec le maximum de rigueur les responsabilités qui s'y attachent. Car personne ne peut invoquer le doute pour se laisser aller au laxisme qui ne peut être que suicidaire dès lors que nous sommes dotés de toutes les capacités de surveillance épidémiologique, de dépistage, de test et de prise en charge sanitaire de nos cas d’infection au virus. Autrement dit, nos acquis dans ce domaine nous confèrent à la fois des atouts et des responsabilités qu’il convient sans cesse de rappeler.
C'est précisément à cette noble mission que les autorités sanitaires et les personnels de santé se consacrent sans relâche depuis le déclenchement de l’épidémie avec le soutien aux premiers rangs du chef de l’Etat et de toute l’équipe gouvernementale. La stratégie nationale de lutte contre l’épidémie du coronavirus appelle non seulement la mise en place d’un dispositif sanitaire de riposte opérationnel à tous points de vue, ce à quoi les pouvoirs publics sont en train vaillamment de s'atteler, mais elle comporte surtout une dimension politique et sociale décisive qui appelle de la part des individus et des communautés des changements radicaux dans les comportements individuels et collectifs.
C’est de ce point de vue que le pays a réussi d'un consensus presque unanime suite aux décisions présidentielles du week- end dernier mérite d’être appréhendé dans une perspective qui dépasse la gestion d’une conjoncture pour donner lieu à des initiatives majeures sur la gouvernance actuelle et future de notre société.
Au stade où on en est dans l'évolution de la pandémie, les problèmes ne se posent plus seulement en sujets de santé publique. Ils se posent désormais en question de sécurité nationale ! C'est en ces nouveaux termes que le président Macky Sall s’est exprimé lors du conseil des ministres de ce mercredi 18 Mars.
Le président Français Emmanuel Macron n'a pas dit autre chose lors de son allocution télévisée de la semaine dernière. S’adressant aux Français, il a déclaré sans ambages son pays en état de guerre contre le covid19. Depuis lors, tous les ménages sont sous tension et en état d’alerte, chacun s’attachant à assumer sa part de responsabilité à l’échelle où il se situe, en acceptant de s'astreindre à toutes les contraintes et rigueurs qu'exige la gravité de la situation.
Le moment est donc venu pour nous d’en faire autant. Car il n y a pas de secret pour la victoire dans un combat de quelque nature que ce soit : " un peuple déterminé', fort de la confiance qu’il a en lui-même, ose tout entreprendre et peut tout réussir " La Chine vient encore une fois d'en administrer la preuve au monde entier. Le Japon et la Corée du Sud sont sur ces pas.
Toutes les vieilles démocraties occidentales sont à la manœuvre pour réussir autant que les pays d’Asie. La condition première de cette victoire reste toutefois la rigueur implacable que les dirigeants et les citoyens s’imposent en matière d’organisation, de discipline et de mise en cohérence des interventions. En un mot : le civisme ! Nous en avons les moyens car nous venons de le prouver. La période d’attente qui a précédé l’annonce des décisions présidentielles du samedi 14 Mars a donné lieu dans les milieux intellectuels et les médias à des débats souvent passionnés sur les décisions attendues des pouvoirs publics face aux événements de caractère religieux qui étaient toutes de nature à exposer le pays à une flambée de l’épidémie. On a fait souvent référence à des pays du monde arabo islamique tels que le Maroc, l’Arabie saoudite et l’Iran où les dirigeants avaient décidé d’autorité l’interdiction de tout rassemblement, y compris religieux dans le cadre de la lutte contre la propagation du coronavirus. Des voix s’étaient élevées pour attirer l’attention sur le cadre institutionnel de tous ces pays cités en exemple caractérisés par l’unicité du pouvoir entre le temporel et le spirituel. De ce point de vue, notre pays présente ce que d’aucuns qualifient " d’exception Sénégalaise " marquée par une longue tradition, depuis l’époque coloniale, d’institutions fortement laïques dans le contexte d’une société où les confessions et les confréries occupent une place importante et jouent un grand rôle dans l’encadrement et l’animation de la vie culturelle, sociale et spirituelle des citoyens.
C’est à partir de ce consensus entre décideurs politiques et guides religieux de toutes obédiences que nous avons bâti un modèle de laïcité positive inspirée par une volonté fortement partagée d’un vivre-ensemble exemplaire en termes de convivialité et d’œcuménisme. Ce trésor d’une nation capable en toutes circonstances de préserver jalousement son unité tout en s’enrichissant de la diversité des singularités qui la composent a toujours fait de notre pays une référence en Afrique et dans le monde.
C’est ce capital précieux que nous venons de démontrer, à travers le remarquable consensus du weekend dernier, qu’on reste toujours capable de sauvegarder à chaque fois que les institutions de la république nous ont appelés à nos devoirs de patriotisme et de citoyenneté. Il est important de ce point de vue de retenir la belle leçon de responsabilité donnée par les guides spirituels du pays en décidant de surseoir pour des besoins de santé publique à la tenue de rassemblements religieux de la plus haute portée dans la vie de leurs communautés respectives pour qui sait réellement ce que ces événements y représentent.
C’est pourquoi, il serait tout à fait indiqué que les consultations et concertations qui ont rendu possible ces consensus fédérateurs sur le primat de la République et des citoyens soient poursuivis dans le sens d’une mise à jour du contrat social, socle de l'unité et de la cohésion qui font la force des grandes nations. Et dans le contexte de notre monde d’ aujourd'hui où le fait religieux s’exprime de plus en plus sous des formes tout à fait éloignées des modèles connus chez nous, il y a bien lieu d'intégrer dans cette mise à jour tous les nouveaux paramètres de nos sociétés en pleine mutation dans un environnement international et sous régional des plus agités. Les pouvoirs publics ont bien campé le décor à partir de l’engagement des dignitaires religieux de toutes confessions, des acteurs politiques de toutes obédiences, des leaders syndicaux et des mouvements de la société civile. Il convient de mobiliser autant, dans le même élan, la communauté scientifique et tous acteurs du système de santé, public et privé, en somme toutes les composantes de notre nation qui se sont rendues disponibles pour participer aux premiers rangs à l’effort de guerre contre la pandémie avec un objectif fondamental unique : la rupture de la chaîne de transmission ! ! Car, ne faisons aucune illusion à ce sujet. Aucun système de santé au monde ne peut vaincre cette pandémie avec de seuls moyens médicaux. Tous les pays qui en sont arrivés à la maîtrise de la pandémie l’ont réussi par la détermination des citoyens, à l’échelle individuelle et collective, à réussir une campagne de promotion de la santé par la conscience partagée que le capital santé est la première ressource de l’être humain.
Dans le cas de cette pandémie où l’humanité fait face à un ennemi invisible qu’on peut porter et propager partout autour de nous avant que les signes d’infection ne se déclarent, la seule solution qui s'offre est une solution de rigueur, de vigilance, de discipline par le strict respect de toutes les recommandations d’une stricte hygiène individuelle et collective avec tous les changements qui s’y attachent dans nos comportements de tous les jours. C'est le moment de nous convaincre que le développement d’un pays est certes l’affaire des dirigeants et de l’Etat mais aussi et surtout l’affaire des peuples et des organisations populaires C’est cette belle opportunité que nous devons mettre à profit pour tirer de la conjoncture toutes les possibilités de renégociation de pactes actualisés de stabilité durable avec les principaux acteurs de la vie politique, économique, sociale et culturelle du pays.
Au regard de la dynamique d’entente nationale obtenue à partir de l’appel du samedi 14 Mars, le président Macky Sall dispose aujourd'hui de tous les atouts pour provoquer, avec le concours de tous, des effets de leviers en vue d'une mobilisation nationale contre la pandémie. C’est à ce prix que non seulement nous mettrons de notre côté toutes nos chances de succès dans cette grande entreprise, mais que cette même dynamique nous conduira plus loin encore dans la réalisation de nos ambitions d’émergence en 2035 ...
Abdou Fall est ancien ministre de la santé et de la prévention médicale.
par Ousmane Ndoye
POUR UN PLAN D’URGENCE SANITAIRE ET ECONOMIQUE
Cette crise est certainement une opportunité majeure pour repenser l’allocation des ressources publiques dans notre pays
« Gouverner, c'est prévoir ; et ne rien prévoir, c'est courir à sa perte »[1]
Les faits :
L’épidémie de coronavirus qui s’est déclenchée en Chine en fin 2019 a fait à ce jour (17 mars 2020) un nombre de 7 426 décès sur 179 111 cas décelés à travers le monde, avec 150 pays touchés. Dans ce décompte, l’Afrique a une part de 228 cas dont 4 décès enregistrés. Malgré le fait d’être le 3e pays africain le plus touché du continent avec 27 cas, le Sénégal n’enregistre pas de décès[2].
L’épidémie, entre-temps reclassée pandémie par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), a également d’importantes répercussions économiques avec un effet domino depuis une Chine usine du monde et représentant 20% du PIB mondial. Dans un contexte de systèmes économiques et financiers fortement mondialisés, les mesures exceptionnelles de confinement général ou partiel en Asie, en Europe (Italie, France, etc.), et en Amérique, paralysent une partie de l’économie de ces pays mais également celle des pays moins ou pas touchés (ex des pays d’Afrique). Aujourd’hui, même pour ces pays développés ou émergents, la distribution de produits alimentaires à la population devient problématique.
Les prévisions :
Il y a un consensus général qu’il est impossible à l’étape actuelle de faire des prévisions solides sur l’évolution de la pandémie ainsi que sur ses impacts économiques.
Toutefois, sur le plan sanitaire, on notera que le nombre de cas décelés dans le monde a doublé en 17 jours, et au Sénégal en 2 jours. Et, en tout état de cause, les spécialistes considèrent que le nombre de cas est toujours sous-estimé puisque l’ensemble de la population n’est pas testée.
En définitive, à l’instar des pays très touchés tels la Chine, l’Italie et la France, il y a une grande probabilité d’une forte augmentation des cas décelés en Afrique.
Sur le plan économique, après avoir tenté en vain de retarder l’échéance d’un confinement généralisé aux effets désastreux, les pays les plus affectés y ont été contraints. Concernant ces effets, l’Afrique risque également de ne pas être épargnée. Il est déjà estimé que le taux de croissance en 2020 qui était prévu à 3,2 % devrait tomber à 1,8 %.
Que faire ?
Sur le plan sanitaire, le Sénégal, à l’instar de plusieurs pays africains, a récemment pris des mesures de confinement partiel avec la fermeture des écoles, l’interdiction des rassemblements de personnes et des vols en provenance des pays les plus affectés. L’Etat a également annoncé la mise en place d’un budget de 1 milliard 400 millions FCFA pour le financement du plan de riposte. L’espoir est que ces mesures combinées avec les efforts de maîtrise de l’épidémie par les équipes médicales puissent permettre de juguler la crise. Toutefois, c’est à ce niveau que se situe le plus grand problème : après des décennies de sous-investissement – le Sénégal consacrant moins de 5% de ses dépenses publiques à la santé comparée à la norme mondiale de 15%. – le système de santé, classé 173e sur 195 pays en 2017, était déjà à l’agonie et n’est certainement pas en mesure de gérer une épidémie de grande ampleur. Dans ce contexte, le gouvernement doit mobiliser des ressources financières mais également humaines (recensement et mobilisation des diplômés en santé) beaucoup plus importantes pour parer au pire, tout en renforçant le contrôle sur la gestion des structures de santé.
Sur le plan économique, il nous faut aussi agir vite. Des pans entiers de l’économie sénégalaise tels le tourisme et l’hôtellerie, le secteur aérien avec ses activités connexes, le commerce, et en particulier celui de l’import-export agroalimentaire, sont touchés de plein fouet. Les conséquences seront immédiates avec des pertes d’emplois et de revenus, ainsi que des pénuries. Avec l’effet domino et dans un scénario d’aggravation de la crise, ces conséquences risquent de se généraliser. La réduction des transferts d’argent des Sénégalais de l’extérieur qui sont concentrés dans des pays largement affectés par la crise sera un facteur aggravant de la crise économique.
C’est pourquoi il y a nécessité pour le guvernement sénégalais d’élaborer un plan d’urgence économique. Ce plan devrait contenir une combinaison de mesures telles :
La réduction des prix de l’eau, de l’électricité et du carburant devant faciliter un encadrement de la baisse des prix des denrées alimentaires de base ;
une aide au chômage aux travailleurs à faibles revenus qui ont perdu leur emploi ;
la généralisation des bourses familiales pour les ménages les plus démunies, permettant également d’impacter les familles des travailleurs du secteur informel;
un soutien aux entreprises, en particulier les PME, en priorisant les secteurs les plus affectés : ce soutien pourrait prendre la forme de suspension du paiement des impôts et taxes dus, prêts à taux bonifiés et subventions ;
la subvention de la fourniture d’eau en milieu rural et la suspension de la coupure pour non-paiement de facture d’eau en milieu urbain ;
une coordination étroite avec les producteurs et les commerçants pour la mobilisation de stocks alimentaires de sécurité pouvant couvrir les besoins essentiels nationaux pour une période pertinente.
Il est évident que la question fondamentale sera celle de la mobilisation des ressources financières nécessaires à la réalisation de ce plan. Cette crise est certainement une opportunité majeure pour repenser l’allocation des ressources publiques dans notre pays. En effet, pendant longtemps, les secteurs capables d’impulser une demande orientée vers une production nationale, de catalyser une croissance inclusive, et d’assurer un bien-être sanitaire et social partagé ont été négligés. Il s’agira donc de changer de paradigme en renonçant à la course aux infrastructures prestigieuses qui n’ont pas de véritables impacts transformationnels et en réduisant à sa plus simple expression le train de vie de l’Etat. En tout état de cause, le moment est aux priorités : la santé et la sécurité alimentaire des populations.
Dans ce contexte, il est aussi évident qu’il urge d’avoir une concertation régionale pour, entre autres, lever les limites à l’endettement et au déficit public. Il est vrai que le Sénégal est déjà fortement endetté, mais dans ce contexte nous risquons de n’avoir d’autres choix que d’augmenter sensiblement notre dette: à ce niveau il nous faudra surtout faire les bons choix en empruntant auprès des bailleurs offrant des taux concessionnels (La Banque mondiale a déjà annoncé son engagement auprès des pays pauvres). La BCEAO aura aussi sans nul doute sa partition à jouer en particulier en poussant les banques commerciales à sortir de leur zone de confort pour mieux financer l’économie.
L’heure est à l’action rapide pour nos gouvernants, car considérant l’évolution accélérée des situations liées à cette pandémie, tout retard dans l’action pourrait nous conduire vers un chaos sanitaire, économique et social.