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22 juillet 2025
EXIT SDE, VOILA SEN’EAU !
La Sénégalaise des eaux (Sde) a été officiellement remplacée par une nouvelle société de gestion de l’exploitation et de la distribution de l’eau potable en zone urbaine et péri-urbaine du Sénégal sous l’appellation Sen’Eau (créée autour de Suez).
Exit Sde, place à Sen’Eau ! Toutefois, le prix de l’eau à l’usager ne connaîtra pas une hausse, le 1er janvier 2020, date de démarrage des activités de la nouvelle société de gestion et d’exploitation du service public de l’eau potable en zone urbaine et péri-urbaine au Sénégal, a assuré Sérigne Mbaye Thiam, ministre de l’Eau et de l’Assainissement. C’était, hier lundi, à Dakar, en marge du lancement officiellement de la nouvelle société dénommée Sen’Eau, créée autour de l’entreprise Suez, attributaire du contrat de production et de distribution de l’eau potable au Sénégal, remplaçant de facto la Sénégalaise des Eaux (Sde).
La Sénégalaise des eaux (Sde) a été officiellement remplacée par une nouvelle société de gestion de l’exploitation et de la distribution de l’eau potable en zone urbaine et péri-urbaine du Sénégal sous l’appellation Sen’Eau (créée autour de Suez). En effet, le contrat a été signé hier, lundi 30 décembre 2019, par le ministre de l’Eau et de l’Assainissement, Serigne Mbaye Thiam et la directrice générale de Sen’Eau, Jany Arnal. La nouvelle directrice de Sen’Eau dira: «Notre longue expertise internationale dans la production et la distribution de l’eau potable alignée au savoir des professionnels sénégalais nous permettra de délivrer aux familles, aux entrepreneurs, aux industriels sénégalais la qualité de service qui réponde à leurs aspirations. Je peux confirmer que vous aurez mon total engagement pour cette mission. Je peux vous dire que les 1200 collaborateurs seront engagés pour cette mission et, ensemble avec eux, nous feront l’excellence pour le Sénégal et la référence pour l’Afrique».
SEN’EAU RENTRE AVEC 6 MILLIARDS DE CONTRIBUTION AU CAPITAL
Le ministre fera savoir que «le capital social de Sen’Eau a été portée à 6 milliards FCFA contre 3 milliards FCFA pour la société actuelle aux fins de mieux prendre en charge les nouvelles orientations du contrat vers plus d’investissements de renouvellement du fermier afin d’améliorer la qualité de l’exploitation». Serigne Mbaye Thiam précise: «cette nouvelle société de droit sénégalais chargée de la gestion du contrat d’affermage présente une géographie du capital social fortement remaniée, en faveur de la partie sénégalaise par rapport au contrat en cours».
Aussi assurera-t-il que le prix de l’eau à l’usager ne connaîtra pas une hausse, le 1er janvier 2020. Non sans relever que «le partenaire technique de référence, Suez Groupe, détient 45% du capital de la nouvelle société contre 55% pour le partenaire du contrat qui s’achève, le reste du capital étant réparti entre l’Etat du Sénégal à hauteur de 24% contre 5% dans le contrat actuel, les travailleurs du secteur 11% et le secteur privé sénégalais 20%». Le ministre fera noter que par la volonté du Chef de l’Etat, «la part réservée aux salariés du secteur a été portée à 11% en lieu et place des 5% initialement prévus dans le dossier d’appel d’offres. Les employés de Sen’Eau se retrouvent ainsi avec 8% du capital social, les 3% restants étant répartis de manière égale entre ceux de la Sones et de l’Onas». Toutefois, il a tenu à indiquer que «des mesures idoines ont été prises afin de réduire fortement les risques de contentieux et faciliter un travail collaboratif performant entre l’Etat, Autorité Délégante, la Sones, concessionnaire, et Sen’Eau, Société d’exploitation et de gestion».
200 MILLIARDS A GENERER AVEC LE NOUVEAU CONTRAT
A en croire, le ministre «cette remise en concurrence du contrat d’affermage du service public de l’eau a permis de baisser le prix exploitant de l’eau, qui va passer de 364,7 FCFA, actuellement, à 298,5 FCFA, soit un gain de plus de 66 FCFA par m3 et plus de 200 milliards FCFA sur la durée du contrat» qui est de 15 ans. Enfin s’agissant des orientations des actions de l’Etat, le ministre a indiqué que «le président de la République a désigné le Fonsis pour les détenir conformément aux missions de cet instrument stratégique mis en place par le Gouvernement», tout en précisant que les intérêts de la partie sénégalaise ont été bien prises en compte, offrant ainsi au partenaire un cadre opérationnel et financier optimal pour exécuter de manière efficiente le nouveau contrat sur les 15 prochaines années.
Trois grands noms de la lutte sénégalaise avec frappe crèvent l’écran, depuis 2018, dans une discipline de combat libre appelé Arts martiaux mixtes (Mma, sigle anglais). Cette tendance va-t-elle déboucher sur quelque chose de permanent ?
Trois grands noms de la lutte sénégalaise avec frappe crèvent l’écran, depuis 2018, dans une discipline de combat libre appelé Arts martiaux mixtes (Mma, sigle anglais). Ont-ils tourné le dos à leur premier amour et cette tendance va-t-elle déboucher sur quelque chose de permanent ? Des observateurs de la lutte décortiquent le phénomène Mma.
C’est avec une fierté bien sénégalaise qu’on proclamait que la lutte avec frappe est un ‘‘sport de chez nous’’. Mais sur les dernières années, un sport de combat venu d’ailleurs est en train de surclasser et d’attirer les sportifs de chez nous. Le Mma, sigle anglais de ‘‘arts martiaux mixtes’’, est, comme son nom l’indique, un combat libre, condensé de tous les arts martiaux dont la violence est telle, qu’il est frappé d’interdiction en France, par exemple. De grands noms de la lutte sénégalaise avec frappe s’y livrent, depuis 2018. Combinée à la crise que connait le ‘’sport de chez nous’’, l’embryon d’intérêt autour du Mma est légitime.
Pour le moment, les pensionnaires de la lutte sénégalaise qui s’y adonnent ont tous livré des combats-éclair sanctionnées de victoires aussi expéditives que violentes. La postérité devra une fière chandelle, comme l’explique Abdoulaye Dembélé du quotidien ‘‘Sunu Lamb’’, à Rocky Balboa. Ce dernier, qui a vu son combat en lutte sénégalaise avec frappe contre Bombardier interdit par le Cng, a trouvé l’échappatoire avec son coach Alexi Claudio qui se trouve être responsable des arbitres Mma en Europe : attirer le B52 en Europe pour un combat Mma.
‘‘On peut dire que c’est Rocky Balboa qui a implanté le Mma au Sénégal’’. Mal lui en prit, pourtant. Pour le combat du 5 mai 2018 en Suisse, les présentations ont été plus longues que le combat-blitzkrieg lui-même où le B52 a littéralement laissé son adversaire sur le carreau en moins de deux.
Au pays de l’Oncle Sam, le lutteur de l’écurie Lansaar, Siteu, qui ne souffre pourtant pas d’impopularité, ni de prétendants souhaitant l’affronter au Sénégal, a choisi aussi le sentier plus bénéfique de Mma où il a soulevé son vis-à-vis comme un fétu de paille dans une démonstration de force à la limite de l’insolence, le 2 juin dernier. A peine un trimestre plus tard, pour son deuxième combat, sa victoire a été très nette, bien qu’il se soit employé en deux rounds pour venir à bout d’un vaillant Carl Culpepper dont le staff a dû jeter l’éponge en septembre dernier, lors du ‘‘Gladiator Challenge’’. Quant à Oumar Kane alias ‘’Reug-Reug’’, il a trouvé, en face de lui, il y a quelques jours, une opposition très faible, en la personne de Sofiane Boukichou.
‘‘Le Mma est plus intense parce que plus violent. En lutte sénégalaise, on a besoin d’être plus stratège’’, déclare Abdoulaye Dembélé.
Le Mma pas si gratifiant pour les combattants sénégalais, pour le moment
Mais les espérances d’un nouveau créneau sportif juteux pourraient être surfaites, d’après notre confrère spécialisé Abdoulaye Dembélé du quotidien d’informations de lutte ‘’Sunu Lamb’’. Le choix du B52 répondait plus à une logique sportive. ‘‘Bombardier était à trois ans de la retraite. Il savait qu’il avait un potentiel physique et le Mma était une belle opportunité de pratiquer son sport. En plus, le Mma est également une chance de ne pas concéder de saison blanche et de rester compétitif. Après, il a fait une communication en disant que le Mma paie beaucoup. Les autres ont compris qu’il y avait beaucoup d’argent. Ce qui n’était pas le cas. Quand ils se rendront compte que la lutte sénégalaise paie bien mieux, ils vont reculer peut-être’’, déclare-t-il au téléphone d’’’EnQuête’’.
Pour preuve, il fait savoir que Bombardier a reçu moins de 5 millions de F Cfa de son combat, alors que c’était en ‘‘Main Event’’ (tête d’affiche).
Aux Etats-Unis, l’Ufc, une organisation américaine d’arts martiaux mixtes, actuellement reconnue comme la plus importante ligue mondiale de ce sport de combat, fonctionne sur le même principe que la lutte sénégalaise. Les salaires de 2018 sont mirobolants, suivant l’échelle de popularité et les performances : 11 500 dollars (6 millions 785 mille) pour Molly Mc Cann, soit le 570e salaire le plus faible, contre... les 3 millions 30 dollars de Connor Mc Gregor (près de 2 milliards). Pour le moment, les ‘‘mbeurs’’ n’y sont pas. ‘‘Le fait d’aller en Mma ne garantit pas de gagner automatiquement des centaines de millions. Il faut livrer plus d’une dizaine de combats pour prétendre au pactole. Reug-Reug, par exemple, ne peut pas venir et gagner 100 millions. C’est impossible !’’, affirme Omez Diagne, consultant en lutte pour Bantamba Tv.
La lutte avec frappe tient le choc
Il est question de trouver sa voie. Juan le ‘‘Lion blanc’’, qui avait momentanément émerveillé l’arène sénégalaise, ‘‘gagne jusqu’à 500 millions F Cfa par combat actuellement’’, fait savoir M. Dembélé. Mais pourquoi cet intérêt soudain pour le Mma, s’il n’est pas aussi bien rémunéré ? Une arène sénégalaise en perte de vitesse n’est pas étrangère à cet état de fait. Les analystes vont même plus loin et prévoient que certains pourraient reconsidérer leur décision de s’aventurer pour cette discipline d’ailleurs, si le ‘’sport de chez nous’’ reprend des couleurs. Siteu, qui sera opposé à Papa Sow, en mars prochain, peut notamment être dans ce lot.
‘‘La fuite des sponsors a sa part de responsabilité. S’ils avaient été là, les lutteurs allaient avoir de bons cachets et n’auraient même pas le temps d’aller voir ailleurs. Siteu est parti aux Usa, car c’était sa première saison blanche depuis plusieurs années. Il y a livré deux combats pour pouvoir gravir les échelons et gagner plus d’argent. S’il sort vainqueur, sa valeur marchande actuelle de 40 millions pourrait monter jusqu’à 60 millions. Ce qui causera plus d’engouement pour la lutte avec frappe et il pourrait être amené à rejeter des offres en Mma’’, croit savoir Dembélé.
Pour l’instant, le consultant en lutte, ancien coach de Tapha Tine, Omez Diagne, est d’avis que le phénomène Mma est trop embryonnaire et trop en marge de la lutte pour s’imposer. Sans compter que les athlètes l’ont toujours fait. ‘‘Bismi Ndoye était un lutteur qui pratiquait le rugby en même temps. Tout le monde croit que le Mma est venu tuer la lutte. Non ! C’est à nous de faire rehausser le niveau de notre lutte et il faut que tout monde s’y mette’’, défend-il, précisant que les textes permettent bien à tout sportif dans le monde d’effectuer deux à trois disciplines. ‘‘Exercer le Mma n’a donc rien de vraiment conséquent sur la lutte avec frappe ou la lutte simple’’, poursuit-il.
Pour le moment, c’est l’occasion qui fait le larron, estime le journaliste. ‘‘Les organisateurs ont compris que la lutte sénégalaise est en crise et que les champions sénégalais drainent beaucoup de monde. Donc, ce qu’ils font c’est recruter les grands champions qui drainent les foules dans leurs programmes’’, affirme Abdoulaye Dembélé qui se projette déjà dans le combat à venir. Pour lui, ses piges en combat libre en Amérique pourraient être bénéfiques. ‘‘Siteu, son défaut est qu’il n’est pas trop agressif dans l’enceinte. Le Mma pourrait être un avantage pour lui, sur ce point. S’il bat Papa Sow, on dira forcément qu’il a disputé deux combats en Mma et qu’il s’est amélioré en frappe et en boxe’’.
Exposition médiatique, avantage Mma !
Samedi 14 décembre, pour la première compétition internationale Mma à Dakar, 24 combats ont été programmés à l’esplanade du musée des Civilisations noires. Une grosse pointure de l’industrie sportive, Vivendi Sport, est derrière la structure Ares Fighting Championship créée cette année, qui a organisé ce tournoi combat. Elle a créé la Ligue afro-européenne avec pour objectif de devenir la plus grande plateforme de Mma sur le continent africain dont le potentiel en lutte sénégalaise est un gros atout qui explique le choix de la capitale sénégalaise. Une grille de programmes pour la diffusion et la rediffusion du combat Reug-Reug/Boukichou allant du 14 décembre 2019 au 3 janvier 2020 est déjà disponible sur les chaines françaises Canal+Sport 3 et Rmc4.
Une offensive des chaines françaises pour devancer l’américaine Ufc sur le créneau africain. Le Sénégal est un des centres de cette bataille, ainsi que le Cameroun dont le natif Francis Ngannou est l’une des stars mondiales du Mma. L’exposition médiatique est un argument qui pourrait aussi intéresser les lutteurs sénégalais ‘‘plus tentés de renforcer et monnayer leur notoriété dans d’autres marchés’’, estime Dembélé ; mais surtout des annonceurs qui cherchent plus de lisibilité et de formalité, au contraire d’une arène à la limite de l’anarchie.
‘‘Il est plus facile d’organiser et de diffuser un combat Mma. C’est plus exportable’’, explique Omez Diagne. Ce dernier estime que ‘‘l’Etat doit accompagner les promoteurs et le Cng, pour autoriser au moins une exonération pour les télés qui veulent diffuser la lutte’’.
L’autre solution tient au fait que les lutteurs doivent revoir leurs prétentions financières à la baisse, croit-il savoir. ‘‘Un cachet de 50 millions, ce n’est pas rien’’. Dernière proposition de M. Diagne pour intéresser les chaines étrangères au développement de la lutte avec frappe, un tournoi de grande envergure du Cng qui ciblerait les huit ténors qui accepteraient de lutter entre eux. Un pari à la limite de l’illusoire.
OUATTARA-SORO, CHRONIQUE D'UN DIVORCE ANNONCÉ
Alors que pour Soro, la perspective de participer à la présidentielle de 2020 semble s’éloigner, tout comme la possibilité de retourner dans son pays, l’éventualité d’une réconciliation entre le «fils » rebelle et le « père » en colère paraît impossible
Jeune Afrique |
André Silver Konan |
Publication 31/12/2019
D’un côté, on crie à la trahison ou à l’infanticide, de l’autre à la félonie ou au parricide. Entre Guillaume Soro, le « fils », et Alassane Ouattara, le « père », la guerre est désormais déclarée. Les choses se sont précipitées le 23 décembre, à l’occasion du retour manqué de l’ex-chef rebelle en Côte d’Ivoire. Retour sur les étapes de ce divorce annoncé.
Février 2019. Guillaume Soro vient de démissionner de la présidence de l’Assemblée nationale, sous la pression du président Alassane Ouattara. Pomme principale de discorde : le refus du premier d’adhérer au Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP), parti nouvellement créé par le second.
L’objectif de Soro est de s’allier à Henri Konan Bédié, inamovible patron du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), dans la perspective de la présidentielle d’octobre 2020. Ce dernier a, lui aussi, refusé de faire adhérer son parti au RHDP et a rompu son alliance avec Ouattara. Toujours dans la perspective de la présidentielle.
Dans une interview accordée à Radio France internationale (RFI), Ouattara ne cache pas sa frustration et met en garde Soro contre une adhésion à la plateforme de l’opposition que comptent créer Bédié et d’autres dissidents du RHDP, ainsi que des partisans de Laurent Gbagbo. « Je pense que ce n’est pas dans l’intérêt de Guillaume Soro de le faire. Et je lui ai dit », assène le président ivoirien, d’un ton ferme.
« Je suis un homme libre », lui rétorque Soro, qui se rend par la suite à Daoukro pour rencontrer Bédié dans son fief. Une provocation ? Le bras de fer vient en tout cas d’éclater au grand jour.
Depuis que l’ancien président de l’Assemblée nationale a quitté le pays en mai 2019, ses sorties répétées ainsi que celles ses proches ont fini par exaspérer le camp présidentiel, Ouattara en tête. En octobre, depuis l’Espagne où il a dit avoir échappé à une tentative d’enlèvement dans sa chambre d’hôtel, accusant directement Abidjan, Soro a envoyé la pique de trop, selon le camp Ouattara.
« Moi Guillaume Soro, je ne suis pas un messie ; je ne suis pas “Soro Solutions” [allusion à “ADO Solutions”, l’un des slogans de campagne de Ouattara en 2010, NDLR]. Non, je ne connais pas tout. Mais quand quelqu’un se lève, [et dit] : “J’ai la solution à tous vos problèmes”. Tu es Dieu ? Un homme mortel et imparfait qui vient vous dire : “J’ai solution à tous les problèmes”, c’est un “djinamori” [magicien, en malinké, NDLR]. Il n’y a pas quelqu’un qui est super-intelligent et nous autres sommes super-bêtes », avait alors attaqué Soro.
Fort du soutien de son mouvement politique Générations et peuples solidaires (GPS) nouvellement créé et qui connaît un succès relatif – plus de 50 000 adhérents en quatre mois – , Soro comptait retourner en Côte d’Ivoire, en vue de lancer sa pré-campagne, depuis le Nord, chasse gardée de Ouattara…
Une longue histoire filiale
On est loin de l’époque où l’idylle politique a commencé entre les deux hommes. Nous sommes en 1998. Guillaume Soro, surnommé « Bogota » dans le milieu estudiantin, doit céder son fauteuil de secrétaire général de la puissante Fédération estudiantine et scolaire (Fesci). Alors que le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbagbo soutient la candidature de Charles Blé Goudé, le Rassemblement des républicains (RDR) d’Alassane Ouattara, soutient celle de Yayoro Karamoko, candidat de Soro.
Charles Blé Goudé, qui deviendra plus tard le « ministre de la Rue » de Gbagbo, après l’éclatement de la rébellion de Soro en septembre 2002, est élu. Au détriment de Karamoko, qui se consolera avec la présidence des jeunes du RDR.
Cette époque marque le rapprochement entre Ouattara et Soro et, évidemment, la rupture entre Gbagbo et Soro.
Commence alors une longue histoire filiale entre les deux fils du Nord, originaires tous les deux de la région sénoufo du Tchologo. En 2000, Soro est même colistier d’Henriette Diabaté, secrétaire général du RDR, aux élections législatives à Port-Bouët (une commune d’Abidjan), avant que le parti ne décide de boycotter le scrutin suite à l’élimination de la candidature de Ouattara par la Cour suprême, alors contrôlée par des proches de Gbagbo.
A la tête des forces nouvelles
En 2002, quand éclate la rébellion des Forces nouvelles (FN) contre Laurent Gbagbo et que Soro se présente comme le secrétaire général de ce mouvement, le FPI désigne tout de suite Ouattara comme « le père » de la rébellion.
Une accusation démentie par Soro à plusieurs reprises, quand bien même les FN reprenaient les revendications du RDR, dont la lutte contre l’Ivoirité, ce concept défendu par Henri Konan Bédié, destiné selon lui à promouvoir la culture ivoirienne et présenté par ses pourfendeurs comme une arme d’élimination de ses adversaires politiques du Nord.
Dix-huit ans plus tard, Affoussiata Bamba-Lamine, ex-porte-parole de la rébellion désormais en rupture de ban avec le pouvoir Ouattara, comme Soro, son patron, affirme autre chose. « Soro tient à rassurer les Ivoiriens qu’il reconnait une seule déstabilisation, celle du 19 septembre 2002, pour le compte de l’actuel Président, M. Alassane Dramane Ouattara », a annoncé, le jour de Noël, Bamba-Lamine. Cette fois, la rupture est vraiment consommée.
La nouvelle Constitution, pomme de discorde
« En réalité, la pomme de discorde remonte à novembre 2016, à la faveur du vote de l’adoption de la nouvelle Constitution », assure le journaliste politique Jules Claver Aka. Avant cette date, le président de l’Assemblée nationale prenait la présidence en cas de vacance du pouvoir. La nouvelle Constitution, promue par Alassane Ouattara, a écarté cette disposition pour faire du vice-président, un poste nouvellement créé, l’intérimaire constitutionnel du président.
Pour Jules Claver Aka, « Guillaume Soro a sans doute compris qu’il n’était plus dans le schéma de succession de son mentor, d’autant que ce dernier avait pris soin de faire monter en puissance le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly », natif, lui aussi, du Nord.
En mai 2017, les relations se sont encore tendues. La Côte d’Ivoire est alors secouée par une deuxième mutinerie d’ex-soldats rebelles qui ont été intégrés à l’armée nationale après la chute de Laurent Gbagbo, en avril 2011.
Ceux-ci réclament des millions de francs CFA à Alassane Ouattara, au nom, selon eux, d’une promesse de guerre non tenue.
Alors que l’armée loyaliste s’apprête à mater la contestation dont l’épicentre est Bouaké, une ville qui fut de 2002 à 2011 le quartier général de Soro et de ses chefs de guerre, les mutins sont orientés vers une cache d’armes, au domicile de Kamarate Souleymane Koné dit « Soul To Soul », directeur du protocole de Soro.
Les armes de guerre dont s’emparent les mutins inversent le rapport de force. Les loyalistes sont freinés net dans leur élan et les mutins obtiennent gain de cause. Ouattara se sent trahi. Tout de suite, il soupçonne Soro d’avoir été à la manœuvre. Ce que ce dernier nie, la main sur le cœur. Soul To Soul est arrêté et jeté en prison, il sera libéré un an plus tard, à la faveur de l’amnistie présidentielle d’août 2018, qui a vu, par ailleurs, la libération de Simone Gbagbo.
Réconciliation impossible ?
Alors que, pour Soro, la perspective de pouvoir déposer sa candidature pour la présidentielle d’octobre 2020 semble s’éloigner, tout comme la possibilité de retourner dans son pays, l’éventualité d’une réconciliation entre le «fils » rebelle et le « père » en colère paraît impossible.
Ironie du sort, « Guillaume Soro se trouve aujourd’hui dans la même situation que son ex-mentor Ouattara, il y a de cela vingt ans, avant le coup d’État de Noël 1999 qui a fait tomber Bédié. Il est visé par un mandat d’arrêt, est accusé de vouloir déstabiliser le pouvoir et est contraint à l’exil. L’histoire, en Côte d’Ivoire, semble un perpétuel recommencement », note l’analyste politique Sylvain N’Guessan.
LE VIOL ET LA PÉDOPHILIE DEVIENNENT DES CRIMES
L’Assemblée nationale à voté ce lundi à l’unanimité et par acclamation le projet de loi criminalisant les actes de viol et de pédophilie
L’Assemblée nationale à voté ce lundi à l’unanimité et par acclamation le projet de loi criminalisant les actes de viol et de pédophilie, a constaté l’APS.
Ce projet de loi avait d’abord été adopté en Conseil des ministres le 27 novembre dernier. Il s’agit d’une loi modifiant celle du 21 juillet 1965, portant sur le Code pénal, relative notamment aux chapitres visant à durcir la répression du viol et de la pédophilie avec des peines pouvant aller jusqu’à la reclusion criminelle à perpétuité.
Jusque-là, le viol était considéré comme un délit, passible de cinq à dix ans de prison.
La criminalisation du viol était une demande des associations de défense des droits des femmes à la suite d’une série d’agressions sexuelles relevée ces derniers mois.
En mai par exemple, le corps de Bineta Camara, 23 ans, a été par exemple retrouvé à son domicile de Tambacounda (Est). La jeune femme avait péri lors d’une tentative de viol.
Au lendemain de ce drame, une manifestation avait rassemblé à Dakar 300 personnes pour dire ‘’stop aux violences faites aux femmes’’.
Le président Macky Sall avait alors demandé au ministre de la Justice de préparer un projet de loi criminalisant le viol et la pédophilie.
Le projet de loi criminalisant les actes de viol et de pédophilie prévoit un durcissement des condamnations, lesquelles pourront aller jusqu’à l’emprisonnement à perpétuité à l’encontre d’éventuels coupables, a expliqué, vendredi à Dakar, le ministre de la Justice, Malick Sall.
’’Ce projet de loi a prévu de renforcer les sanctions. Il a décidé de criminaliser les viols et la pédophilie. Cela signifie que certains auteurs de ces actes horribles pourront être condamnés à perpétuité’’, a dit le Garde des Sceaux à un atelier consacré audit projet de loi avec le Collectif des femmes parlementaires.
’’Cela signifie que vous resterez enfermer dans une prison toute votre vie. Nous pensons qu’une perspective pareille serait de nature à faire réfléchir les gens dotés d’un esprit de discernement avant de commettre de tels actes’’, a ajouté Sall.
La loi sur la criminalisation du viol et de la pédophilie devrait permettre au Sénégal de garantir aux femmes et aux enfants ’’une plus grande protection’’, a salué, la présidente du Collectif des femmes parlementaires, Awa Guèye
La député Awa Guèye (majorité) a plaidé pour une application effective de cette loi, qui espère-t-elle ne sera pas une de plus.
Selon le député Mamadou Diop Decroix, ‘’le viol porte atteinte à la vie de l’être humain’’. L’Assemblée a rejeté son amendement portant sur une remise de peine.
’’Nous devons tous veiller à l’application de cette loi’’, a plaidé le président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niass sous les regards des responsables des associations de lutte contre les violences faites aux femmes qui avaient pris place dans les box réservés au public.
HAÏDAR EL ALI, L'HOMME QUI ENRICHIT LA TERRE DU SÉNÉGAL
Autodidacte, celui qui vient d’être nommé à la tête de la nouvelle agence de reforestation est l’un des écologistes les plus respectés d’Afrique de l’Ouest - Sa mission : reboiser un pays dont la nature est victime de maux pluriels
Le Monde |
Matteo Maillard |
Publication 30/12/2019
« Sembe ! Sembe ! », le cri se perd dans le sillon poussiéreux de la voiture. Haïdar El Ali jette à peine un regard dans le rétroviseur où s’agite un jeune homme. En Casamance, région au sud du Sénégal, il a l’habitude que les populations l’appellent Sembe (« la force », en diola), que les enfants lui courent après et que les vieilles dames tirent leur révérence à « Adiakene Etame », « l’homme qui enrichit la terre ».
Qu’elle soit meuble, craquelée par l’harmattan, latérite rouge des pistes ou limon des mangroves, Haïdar El Ali aime plonger ses mains dans cette terre qu’il connaît mieux que quiconque. Plus d’un demi-siècle qu’il l’ensemence avec la passion d’un autodidacte qui a fait de lui l’un des écologistes les plus respectés d’Afrique de l’Ouest.
La mission qu’il s’est fixée : reboiser un pays dont la nature est victime de maux pluriels. Réchauffement climatique, trafic de bois, pollution atmosphérique, salinisation des sols, érosion côtière, surpêche et avancée du désert. Pour cela, il utilise tous les moyens, de la fronde à graines au largage aérien de semences.
Le Sénégal, sentinelle sahélienne bordée par le Sahara et l’Atlantique, est devenu en vingt ans un symbole de la violence de l’impact des hommes sur leur environnement. Chaque année, le pays perd 40 000 hectares de forêt, soit l’équivalent de 157 terrains de foot par jour, selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). L’érosion côtière progresse de deux mètres par année et la mangrove a perdu 25 % de sa superficie depuis les années 1970.
Reboiser 300 hectares de mangrove par an
Au volant de son tout-terrain, Haïdar El Ali zigzague entre les nids-de-poule. Barbe blanche de trois jours, lunettes à écailles autour de deux billes noires rivées sur l’horizon, chapeau en cuir gondolé par le temps et sacoche d’aventurier en bandoulière, l’homme cultive un style éloigné des « bureaucrates »d’ONG « qui produisent des analyses mais pas de résultats ».
La route nationale s’engouffre dans une mangrove qui s’étend à perte de vue : « 65 000 pieds », pré cisetil, plantés en 2006 avec 200 jeunes d’un village. C’était sa première expérience de reboise ment à grande échelle: 60 % des plants ont tenu. Ce qui n’était qu’un marécage salé est devenu une forêt de palétuviers noirs (avi cennia) et rouges (rhizophora) qui offre un refuge aux animaux et ré gule la salinité de l’eau, permettant aux rizières du delta d’être à nou veau fertiles. Depuis, il a multiplié les actions mettant la population à contribution pour planter 300 hectares de mangrove par an. « Cet été, on a eu des températures jamais atteintes, plus de 43 degrés, des centaines de plants sont morts », s’exaspère Haïdar.
Aux études, il préfère la mer
Né en 1953 dans une famille liba naise installée dans le quartier populaire de la médina à Dakar, il grandit avec les Noirs, ce que le préfet français interdisait aux Blancs. Peu lui importe, il est sé négalais et non descendant de Gaulois, comme on lui apprend à l’école. Aux études, il préfère la mer. « Je suis tombé dedans à 11 ans et je ne me suis jamais arrêté de nager. » Douze mille plongées au compteur, d’innombrables épaves fouillées, il a eu le temps de voir les dégâts de la pêche in dustrielle. « J’ai alors laissé les poissons pour revenir sur terre parler aux hommes. »
A l’Oceanium de Dakar, club de plongée qu’il transforme en asso ciation de défense de la vie ma rine lorsqu’il le reprend en 1988, il développe ses activités envi ronnementalistes, crée des sanc tuaires marins afin de protéger des lamantins. A la fin des années 1990, l’OrientFlower, navire pou belle qui a déversé des tonnes d’acide au large du Brésil, accoste à Dakar chargé de produits chi miques qui rongent la coque : ce sera le combat de Haïdar ElAli. Il organise des manifestations, le ministre de la pêche le fait arrê ter. « Vous vous fichez de l’environnement mais le pouvoir vous est donné, lui lancetil. Alors je ferai de la politique pour vous rem placer. » En 2000, il s’engage dans le Rassemblement des écologis tes du Sénégal, l’un des premiers partis verts d’Afrique de l’Ouest. « On est appelé par la nature pour être son avocat », assure-t-il. Pas de révélation mystique mais une passion qui « se construit doucement de l’intérieur ».
La piste s’ouvre sur sa maison au bout d’un tunnel de verdure. Dans son jardin laboratoire, Haïdar El Ali mène diverses expérimentations écologiques et bâtit une banque de semences. Là, une technique indonésienne de bouture, ici, un nouveau système aspersoir de son cru pour arroser son potager, plus loin, un verger international : goyavier du Brésil, cocotier de Côte d’Ivoire, corosso lier de Guinée, anacardier de Bissau ; un jardin d’Eden qu’il souhaite étendre au Sénégal, voire à la sous-région, si on lui en donne les moyens.
Cela tombe bien, le président Macky Sall l’a nommé début octobre à la tête de la toute nouvelle Agence sénégalaise de reforestation. Inefficace, la structure chargée de la grande muraille verte a été dissoute au mois d’août. Haïdar doit accélérer le projet, censé freiner l’avancée du désert sur 500 kilomètres au nord du pays. Le président sait qu’il peut compter sur son an cien ministre de l’environnement (20122013). « Macky Sall a une grande confiance en Haïdar, c’est pourquoi il lui a donné la direction de l’agence, avance son frère et conseiller, Yahya El Ali. Mais il n’aura pas la liberté de sanctionner, comme il le faisait quand il était ministre. »
De son passage au gouvernement, son bilan ministériel affiche une loi contre la vente de sacs plastiques, le renforcement du code forestier, la fermeture de scieries illégales et la réduction du trafic de bois de vène en direction de la Chine. Il estime que son in corruptibilité lui a coûté sa place : « L’activiste qui gueule dans les radios», comme il se décrit, a été condamné, en 2018, à trois mois de prison avec sursis pour avoir qualifié le président de l’Union des forestiers de « trafiquant ».
Ses ennemis sont d’abord les braconniers et « coupeurs de bois» qui vident la nature de ses ressources, mais aussi certains politiciens qui s’opposent à la protection de l’environnement ou la jugent dispensable. « Haïdar est d’abord écologiste. S’il est venu à la politique, c’était pour combattre l’ancien président Abdoulaye Wade [2000-2012] qui lui a refusé l’autorisation de créer un parc marin dans la région du Sine Saloum, poursuit son frère. Ça l’a énervé qu’on utilise la politique contre l’écologie. Selon lui, la politique est un moyen pour servir l’écologie, rien de plus. »
Pour l’agence, son plan d’action est prêt : dresser un état des lieux du couvert forestier, définir les zones prioritaires à reboiser et en gager un contrôle strict. « Si un chef d’équipe me dit qu’il a planté 2 000 arbres dans son rapport mais que l’on n’en trouve que 1 900, il saute ! » Une vingtaine d’opérations de reboisement sont prévues chaque jour des deux ans de son mandat. « Je suis un emmer deur mais un efficace », sourit Haïdar. Il projette aussi de créer des écovillages, énergétiquement indépendants, où l’on cultive dans le respect du développement durable. « Puis cent pépinières qui produiront un million d’arbres chacune », bouillonne-t-il, sautant dans sa voiture. Il est at tendu dans un village pour en inaugurer une.
« Je suis un Cro-Magnon »
A 66 ans, malgré son énergie dé vorante, il est conscient qu’il ne pourra pas renverser la tendance. «Les gens de mon âge ont volé l’avenir de la jeunesse », répète-t-il. A celui qui s’enquiert de sa santé, il a pris l’habitude de répondre : « Je vais mal, comme le monde. » « Les gens qui, comme moi, ne sont pas optimistes sont mal perçus. » Pour tant il exècre les cyniques qui ne s’engagent pas. « Je ne pense pas que la solution émergera de moi ou d’une Greta [Thunberg]. Il faudra une baffe écolo pour remettre les équilibres en jeu. » Au bord de la route, un homme le hèle : « M. Haïdar, ça fait deux ans qu’on ne vous a pas vu planter ici.
– Ça fait combien de temps que tu crois en Dieu ?
– Depuis toujours.
– Et pourtant tu ne l’as jamais vu. Moi, au moins, tu me vois de temps en temps. »
Haïdar El Ali savoure sa célébrité. « Tu sais qu’une centaine d’enfants portent mon nom ? » Avant d’être le héros vert du Sénégal, il était celui du Joola. En 2002, il fut le premier secouriste à plonger sous la coque de ce ferry chaviré, pour sauver des vies. Il a extrait 368 des 2000 victimes de la plus grande catastrophe maritime de l’ère moderne, devant le Titanic. Un souvenir qu’il évite d’aborder. Trop proche d’une autre blessure, ce jour de juin 1993 où il ne put sauver son fils de 17 ans d’une mer déchaînée.
Haïdar El Ali est adulé des populations locales. «Aujourd’hui, les politiques ont besoin de son image. Il est populaire, les gens le soutiennent car il est en prise de terrain », affirme son frère. Mais il se méfie des hommes. « Je suis un Cro-Magnon qui aime les plantes et les animaux », glisse-t-il. Difficile d’y croire complètement lorsque, arrivé au village, il est accueilli par des centaines de jeunes dansant au son d’une fanfare. Il se jette dans la foule. Bientôt, de la marée humaine, n’est visible que son chapeau qu’il agite en rythme audessus des têtes scan dant son nom. Ils en sont con vaincus, « Sembe le planteur » est venu les sauver.