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22 juillet 2025
À DAKAR, LE CHEMIN VERS L'OBJECTIF ZÉRO DÉCHET EST JONCHÉ D'OBSTACLES
Si des efforts sont faits pour la collecte des ordures, à la fois par les autorités et des privés, cet objectif semble encore loin d’être atteint à la capitale. Reportage
Sputnik France |
Coumba Sylla |
Publication 25/08/2019
«Sénégal Zéro Déchet»: c’est l’une des priorités déclarées du Président Macky Sall à son investiture pour un second mandat, en avril 2019. Si des efforts sont faits pour la collecte des ordures, à la fois par les autorités et des privés, cet objectif semble encore loin d’être atteint à Dakar, la capitale. Reportage.
Nous sommes au Plateau, en plein centre-ville de Dakar. Sur une banderole attachée à une grille, à côté de la photo d’une poubelle frappée du symbole de l’interdiction, on peut lire: «Dépôt d’ordures interdit sous peine d’amende». Juste en dessous, sont éparpillés des gobelets de café usagés, des bouteilles, des restes alimentaires dans une bassine bleue, entre autres types de détritus.
À quelques encablures de là, à la Médina, un quartier populaire, traînent sur un monticule des sachets éventrés, des emballages alimentaires et des boîtes de conserve vides. Le tas d’immondices jouxte une clôture en tôle où il écrit d’une main hésitante et avec des fautes d’orthographe: «Interdi de déposer des d’ordures».
À côté, un vélo d’enfants et en face, sur l’esplanade d’un imposant immeuble abritant des services administratifs et des sièges d’organisations professionnelles, des gamins jouent au football, envoyant plus d’une fois leur ballon valser sur les tas d’ordures.
Ce genre de décor n’est pas inhabituel à Dakar, quel que soit le quartier, selon Madany Sy, travailleur du service de nettoyage et syndicaliste, qui déplore dans un entretien avec Sputnik le manque de civisme de certains de ses compatriotes. Cet homme affable et jovial, ayant 27 ans d’expérience dans le secteur, est secrétaire général du Syndicat National des Travailleurs du Nettoiement (SNTN) du Sénégal :
«Il y en a qui viennent déposer les ordures juste après le passage des camions de ramassage. Certains mettent leurs déchets là où ils veulent, sans respecter les points de collecte, d’autres font leurs besoins en pleine rue. Nous voyons tout ça. Il y a du “ma tey” ici!», s’emporte Madany Sy, précisant à Sputnik que «Ma tey» signifie «Je m’en fous» en wolof, une des langues les plus parlées au Sénégal. «Il y a du je-m’en-foutisme ici, de l’indiscipline. Ce sont des comportements qui n’honorent pas une capitale» digne de ce nom, déplore-t-il.
Ce chef syndicaliste des travailleurs du nettoyage note cependant qu’il y a «un léger mieux depuis près de deux ans maintenant» à Dakar en termes de propreté. Il observe aussi un nouvel engouement dans le grand public et chez des partisans du pouvoir «pour le concept Zéro Déchet». Le Président Macky Sall en a fait une priorité nationale dans son discours prononcé le 2 avril 2019 à l’occasion de son investiture, après sa réélection comme Président, pour un second mandat :
«J’appelle à une mobilisation générale pour forger l’image d’un nouveau Sénégal; un Sénégal plus propre dans ses quartiers, plus propre dans ses villages, plus propre dans ses villes (…) un “Sénégal Zéro déchet”», a déclaré le Chef de l’État sénégalais après avoir prêté serment.
Plus récemment, lors du Conseil des ministres du 24 juillet, cette question a à nouveau été évoquée, ainsi que la nécessité de promouvoir «Un Sénégal Propre» à travers la mise en œuvre rapide des programmes présidentiels «Zéro Déchet» et «Zéro Bidonville». Le Président Macky Sall a invité le gouvernement à «assurer le financement urgent et adéquat de ces programmes majeurs en veillant à l’implication notable des collectivités territoriales, des autorités administratives déconcentrées, des organisations communautaires de base et des populations».
Plusieurs responsables gouvernementaux ont mené des campagnes de nettoyage tambour battant, à Dakar, mais aussi dans des localités de l’intérieur du pays. Les médias locaux et les réseaux sociaux relaient régulièrement des opérations de ramassage des ordures, communément appelées «set setal», par des personnalités politiques, des associations ou mouvements et même des diplomates.
Depuis l’appel du Président Macky Sall en faveur du «Sénégal Zéro déchet», «nous avons eu des “clean-up challenges”» à gauche, à droite, des «set setal», mais il n’y a pas vraiment eu de coordination, pas de synergie avec les travailleurs du service de nettoyage et tous les acteurs du secteur, «or, ça ne fait que favoriser les dépôts sauvages», soutient Madany Sy.
D’autant qu’au Sénégal, la gestion des ordures, et particulièrement les déchets solides, n’est pas une simple affaire. Elle est régie par plusieurs lois (Code de l’Hygiène, Code de l’Environnement, Code des Collectivités locales, la loi contre les sacs plastiques non biodégradables). Elle implique surtout plusieurs acteurs, dont l’un des principaux est l’Unité de Coordination de la Gestion des déchets solides (UCG).
Actuellement rattachée au ministère de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique, l’UCG est née de la fusion, en 2011 de deux structures chargées de la propreté de Dakar, selon son site officiel. Elle est notamment «chargée d’accompagner les collectivités locales dans la prise en charge de leurs compétences, en matière de gestion des déchets solides (…), de la collecte et du transport des déchets», entre autres missions, selon la même source.
«Nous coordonnons, cela ne veut pas dire que nous faisons tout», déclare à Sputnik Lamine Kébé, coordinateur de l’UCG pour le département de Dakar et la décharge de Mbeubeuss, près de Dakar, qui reçoit les ordures de la capitale et de ses banlieues.
«2.200 tonnes de déchets solides par jour en moyenne» dans la région de Dakar
Parmi les acteurs les plus visibles dans les rues et sur les artères de la capitale figurent les agents du nettoyage. Tout au long de la journée, ils balaient les voies publiques, ils vident les contenus des poubelles réglementaires comme des poubelles de fortune déposées dans les rues, sur les pas des portes, parfois juchés sur leurs camions de collecte qui signalent leur passage dans les quartiers à coups d’avertisseurs stridents. Des véhicules appartenant à 19 concessionnaires, au total, travaillent avec l’UCG, d’après Madany Sy.
«Aujourd’hui, Dakar est plus propre qu’avant. Il y a un léger mieux» par rapport au début des années 2010, se félicite Lamine Kébé de l’UCG, évoquant un taux de collecte des ordures de 80,17 % actuellement dans la région de Dakar, «c’est-à-dire les départements Dakar, Pikine, Guédiawaye et Rufisque». Un travail qui mobilise «plus de 2.000 techniciens de surface (agents de nettoiement)». Ces derniers y collectent «2.200 tonnes de déchets solides par jour en moyenne», précise-t-il. Interrogé sur le budget pour cette mission, il répondu d’un ton sec: «Je ne suis pas financier, mais il est faible», sans plus de commentaires.
À eux quatre, les départements de Dakar, Pikine, Guédiawaye et Rufisque rassemblent plus de 3,73 millions d’habitants, selon les projections 2019 de l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD). Soit environ 23 % de la population globale du pays, estimée à près de 16,21 millions d’habitants, d’après l’ANSD.
Toutes les ordures collectées sont donc transportées à Mbeubeuss. Ce dépotoir, qui ne cesse de s’étendre au fil des ans, représente une source de pollutions multiples, constituant un danger pour les populations, s’inquiète Salimata Monsely Bonnaire, cadre dans un groupe de média privé, présidente de l’association Zéro Déchet Sénégal qui existe depuis 2018 et mène campagne sur le terrain et en ligne pour de bonnes pratiques écologiques.
Avant la naissance officielle de l’association, ses fondateurs avaient créé en juin 2016 une «Communauté Zéro Déchet Sénégal» sur Facebook, rassemblant aujourd’hui plus de 1.900 membres.
«En 2002, la décharge de Mbeubeuss faisait environ 36 hectares. Elle était à moins de 2 km de la mer. Les derniers chiffres que nous avons datent de 2016. Elle est passée à plus de 100 hectares de déchets, et ces déchets se rapprochent de la mer», affirme à Sputnik cette femme portant voile et lunettes, s’exprimant avec calme et douceur. Résultat, poursuit-elle, «pollutions des sols, de l’air, des eaux… tout est combiné à Mbeubeuss. Pour une petite ville comme Dakar, c’est incroyable!».
Les préoccupations de Zéro Déchet Sénégal rejoignent d’autres formulées auparavant par plusieurs experts, dont ceux de l’Institut Africain de Gestion Urbaine (IAGU) qui ont étudié le site. Selon un rapport de l’IAGU publié en avril 2011, c’est un «ancien lac asséché» utilisé depuis 1968 comme dépotoir de tous les «déchets solides ménagers et industriels produits dans la région» de Dakar.
«Or, l’ouverture de cette décharge n’a été précédée d’aucune étude ni d’aménagements techniques préalables. Ainsi, elle constitue un dépotoir à ciel ouvert sans clôture, où se pratique une intense activité de récupération. La cohabitation de cette décharge sauvage avec les zones d’habitations, d’aviculture, d’élevage porcin et de maraîchage est source de multiples difficultés pour les populations riveraines en particulier», peut-on lire dans ce rapport intitulé «Villes ciblées — Décharge de Mbeubeuss: Analyse des impacts et amélioration des conditions de vie et de l’environnement à Diamalaye (Malika), Dakar».
Pour Madany Sy du SNTN, la décharge de «Mbeubeuss est devenue une bombe écologique» et le fait qu’elle demeure le seul site à ce jour à accueillir les déchets de Dakar illustre une des difficultés d’arriver au Zéro Déchet. Il rappelle que le gouvernement avait envisagé de fermer Mbeubeuss et créer un centre d’enfouissement technique (CET) de déchets à Sindia, à environ 50 km de Dakar. Une initiative aujourd’hui abandonnée, d’après la presse locale, en raison de l’hostilité des populations de Sindia.
En juin 2010, Abdoulaye Wade, alors Président du Sénégal, avait signé un décret pour la réalisation du CET de Sindia, et un centre de transfert et de tri des ordures à Mbao (environ 10 km de Dakar), avec le projet de fermer Mbeubeuss à compter de novembre 2010 puis de réhabiliter le site, mais sans que l’on sache à ce jour ce qu’il en est advenu.
Fin janvier 2018, lors d’un Conseil des ministres, le Président Macky Sall avait invité le gouvernement à «accélérer la modernisation de la décharge de Mbeubeuss et à encadrer l’ouverture de décharges contrôlées dans les communes», mais aucun détail n’a alors été fourni.
L’UGC «est aujourd’hui en train de faire un travail colossal à Mbeubeuss» pour améliorer le processus de dépôt et éviter que les ordures ne débordent, assure Madany Sy, le chef syndicaliste. «Malheureusement, il n’y a pas d’usine de recyclage, pas d’usine de traitement. Il n’y a que les récupérateurs qui sont là-bas. Aujourd’hui, il y en a presque 3.500», indique-t-il, regrettant «que l’État ait reculé devant ses responsabilités» sur le projet de Sindia: «Les ordures, on ne les mange pas, on ne les met pas dans nos poches. Il faut qu’il y ait des infrastructures» adéquates pour leur gestion et leur traitement.
Pour Salimata Monsely Bonnaire de Zéro Déchet Sénégal, la déclaration du Président Macky Sall a mis sous les projecteurs le concept de Zéro Déchet, mais beaucoup en ont une compréhension partielle.
«Pour eux, le Zéro Déchet, c’est de ne pas laisser traîner les déchets. Alors qu’il s’agit carrément de ne pas produire de déchets, et aussi d’éviter le gaspillage», indique la responsable associative. «Aujourd’hui, à Dakar, une personne produit environ 200 kg de déchets par an, c’est énorme. Aujourd’hui, on met tout dans des sachets plastiques. C’est le phénomène de la microproduction qui a envahi notre mode de consommation, surtout au Sénégal, et c’est un problème. Je ne sais pas si c’est dû au fait que le pouvoir d’achat a baissé, que la vie est devenue plus compliquée, que les gens n’ont plus vraiment les moyens forcément d’acheter en gros ou de faire leurs courses en une fois», dit encore Salimata Monsely Bonnaire.
Son association, qui compte aujourd’hui «70 membres actifs, tous bénévoles», se joint à des événements ponctuels de nettoyage, pour informer et sensibiliser sur la question, mais elle s’investit surtout dans la formation, espérant ainsi mieux faire passer le message et comptant sur un effet boule de neige.
«Nous sensibilisons et formons différentes composantes de la société: des particuliers, des entreprises, organisations, institutions, écoles… Nous les accompagnons dans leur démarche Zéro Déchet quand nous sommes sollicités. (…) Certaines des personnes formées finissent par devenir membres de l’association», se réjouit-elle.
Quand ils sont sollicités par une structure, les membres de l’association commencent par identifier les différents types de déchets qu’elle produit. Et une fois ce diagnostic établi, «nous essayons de voir comment faire pour qu’il n’y ait plus ces déchets. Nous leur proposons des alternatives, ou de supprimer certaines habitudes», précise Salimata Monsely Bonnaire, dont les collègues ont aussi formé des personnels de maison à la demande de leurs employeurs au tri sélectif et aux bonnes pratiques environnementales. Exemples ?
«Donner ses déchets alimentaires à des animaux du quartier (poules, moutons, chiens, chèvres, etc.) ou installer un composteur dans son jardin ou son appartement. Refuser les sacs plastiques en ayant toujours» avec soi «un sac réutilisable pliable. Choisir l’eau filtrée ou l’eau en bidons consignés, et emporter sa gourde, pour éviter les bouteilles en plastique jetables» ou encore «demander sa boisson sans paille au restaurant», énumère l’association, entre autres astuces listées sur son site.
Pour Lamine Kébé, de l’UCG, il est clair que l’objectif Sénégal Zéro Déchet ne sera pas atteint à court terme.
«À moyen terme, on peut faire de grands efforts avec un cadre de concertation transversal incluant tous les types de déchets, des moyens financiers adéquats, l’éducation des populations» à la culture environnementale et écologique, «la valorisation des déchets et la répression» en cas de besoin, juge-t-il. «On a un bon dispositif juridique, mais le mal que nous avons, c’est qu’il n’y a pas de sanctions».
Comme lui, les autres personnes interrogées par Sputnik reconnaissent que le chemin vers l’objectif Zéro Déchet est long, jonché de contraintes techniques ou de financement. Mais le principal obstacle est celui du comportement de la majorité des citoyens, estiment-ils :
«C’est un problème d’éducation civique, morale auquel il faut trouver une solution. C’est important, parce qu’on ne peut pas vouloir vivre dans un cadre agréable, être en bonne santé et paradoxalement produire autant de déchets», avance Salimata Monsely Bonnaire, espérant que l’engouement noté autour du Zéro Déchet ne sera pas «juste un phénomène de mode ou une excuse politique».
Madany Sy, l’agent de nettoyage syndicaliste, est catégorique.
«Même si on amenait ici la société de nettoyage la plus performante du monde, avec tous les moyens financiers qu’il faut, si les comportements qu’on voit maintenant ne changent pas, notre travail sera toujours voué à l’échec. Les techniciens de surface à eux seuls ne peuvent pas nettoyer et maintenir une ville propre. Le Zéro Déchet, c’est un état d’esprit, ça ne doit pas être une expression vaine», martèle-t-il.
À Dakar, beaucoup espèrent que cette capitale affichera un jour un visage comme se plaisent à le souligner ceux qui visitent Kigali, au Rwanda, avec ses voiries propres et dégagées, où tous, dirigeants comme population, s’impliquent pour nettoyer la ville et la maintenir propre.
PAR Abdou Latif COULIBALY
POUR TOI, AMATH !
Une sensibilité à fleur de peau, une préoccupation constante pour l’autre. Toute ta vie durant, tu auras tout sacrifié pour ton pays et ton peuple
Amath, je m’en souviens, il y a de cela une dizaine d’années, en septembre 2010 précisément, je publiais un portrait de toi dans lequel je disais ceci : « dans nos pratiques et traditions journalistiques, il n’est presque pas admis de parler d’un homme vivant encore avec nous, comme j’ai aujourd’hui l’intention de le faire avec toi. J’ai choisi de parler d’un homme exceptionnel, alors qu’il partage encore avec nous les joies et peines de la vie. Rien ne s’y oppose, dès lors que nous acceptons de nous référer aux coutumes et traditions fondant notre société. Celles-ci le recommandent.
La seule limite posée est d’ordre éthique. Le propos doit être sincère et honnête. Et Dieu seul sait, à quel point, je suis sincère et honnête en parlant de toi ». Aujourd’hui que tu as baissé pavillon, renonçant définitivement au combat de la vie, mais surtout au combat politique, je me sens à l’aise pour chanter à nouveau ta gloire et ton extraordinaire engagement pour les causes justes, pour la dignité de ton pays, son indépendance et sa grandeur tout court.
Comme le fit avec lyrisme et élégance l’académicien Edgar Faure recevant le poète-président sous la coupole de l’académie française, j’ai envie de rependre ses mots, même si sa verve me manque, pour te dire : Amath, je dirai, ton nom : il se décline et se déclame, on le psalmodie et on le chante.
Il doit sonner comme le sarong, rutiler comme le sabre au soleil ».
Le clin d’œil à Senghor n’est ni gratuit, ni fortuit.
Amath Dansokho, tu me racontas un jour, alors que nous déjeunions, ton histoire avec Senghor en ces termes : « alors que j’étais très jeune élève au lycée Faidherbe, il est arrivé à Saint-Louis après son entrée en politique.
Je l’ai vu pour la première fois à la Gouvernance. En l’écoutant j’ai été
séduit, même presque subjugué par son discours.
Je suis devenu un admirateur de
l’homme.
C’est ainsi que j’ai couru derrière ses cortèges.
Je croyais vraiment que c’était
l’homme de la situation à cette époque du combat contre le colonialisme.
Par la suite, je n’ai pas hésité à rompre définitivement quand j’ai pensé que l’homme et ses options fondamentales n’étaient pas en stricte adéquation avec les intérêts du peuple ».
Les idées marxistes avaient pris le jeune politique. Le révolutionnaire, Amath Dansokho, c’était cela : la franchise et les convictions chevillées au corps. Le peuple était sa seule préoccupation. Devant ses intérêts et ses aspirations, il n’y a aucune considération qui vaille.
Toute autre chose devenait secondaire, voire futile. Aucune amitié, aucune admiration ne compte alors aux yeux d’Amath Dansokho, dès lors qu’il s’agit de la cause du peuple. Il combattra alors sans concession Senghor et son régime.
Revenant à cette citation de Edgard Faure, je dirai qu’il en est ainsi partout au Sénégal pour toi, de l’Est du pays où tu es né un 3 janvier 1937, au nord où tu as fait tes classes secondaires, en passant par le Sud où tu as été si souvent pour vibrer avec les populations laborieuses, et enfin, à l’Ouest, où tu as mené une immense carrière politique.
Amath tu as marqué les esprits et recueilli l’admiration de tous tes compatriotes. L’humoriste Kouthia inimitable dans son art de la parodie savait avec un talent inégalable rendre toute la profondeur de ton être. Son rapport à ta personne traduit chez l’artiste-comédien une affection et un immense respect pour l’homme et le politique que vous avez su incarner depuis votre tendre jeunesse avec une droiture et une sincérité sans nulles pareilles. Ce sont ces qualités et ces vertus qui ont toujours
fécondé la conduite avec bonhomie, non sans rigueur cependant, de ton action politique.
Elles ont aussi servi d’appui pour la poursuite inébranlable de causes humaines et sociales hors norme. Ce sont également ces qualités et vertus qui ont étéla source de ton engagement mis au service de ton pays et de toutes les causes justes.
Amath, tu te souviendras que nous avions ensemble déjeuné le lendemain de la publication dans les colonnes du magazine La Gazette, de ce portrait évoqué au début de cet hommage.
L’occasion pour nous deux d’évoquer les idées ayant structuré mon texte et parler de l’avenir politique du pays. Nous avions surtout évoqué la gouvernance de l’époque, rappelé l’extraordinaire travail politique réalisé dans le cadre des Assises nationales qui engageaient la finalisation de ses travaux.
En rappelant cela je résume, j’en conviens, de façon presque lapidaire ce que tu as toujours symbolisé et incarné, c’est-à-dire une obsession quasi atavique de la manière saine et utile de conduire le destin de ce pays, dans le meilleur intérêt du peuple sénégalais. En écrivant ce texte je sens mes yeux embués, je n’ai pu m’empêcher de laisser dégouliner mes larmes en repensant à notre déjeuner au Téroubi. Ce jour tu n’arrêtais pas de sangloter comme une madeleine, à chaque fois quand tu as voulu parler de mon « papier ».
Une sensibilité à fleur de peau, une préoccupation constante pour l’autre. Toute ta vie durant, tu auras tout sacrifié pour ton pays et ton peuple. Comme si tu ne nous avais pas quittés, j’ai choisi de m’adresser à nouveau à toi, en utilisant les mêmes mots et le même temps dans lequel je m’employais à rédiger ton portrait, il y a une dizaine d’années. Tout est passé dans ton engagement politique sans concession : ta jeunesse, ta vie de famille et de couple, ton épanouissement personnel.
Au double plan matériel et spirituel. Pour le seul bonheur de ton peuple et pour sa seule grandeur.
Paraphrasant Saint Simon, parlant de Vauban, je te dis : patriote comme tu es, tu as été, toute ta vie, touché par la misère du peuple et par toutes les vexations qui l’accablent.
En 1991, tu étais confortablement assis au sein d’un gouvernement de majorité présidentielle élargie (Gmpe).
Ton parti avait largement contribué à l’asseoir. Dans ta vision, comme dans la perception de ta formation politique, il s’agissait d’aider à apaiser le pays soumis à un terrible cycle de surenchère, voire de violence politique, par l’opposition de l’époque.
Tu en as été chassé, « défenestré » pour reprendre ta propre expression, sans égard pour ton rang et ton immense apport politique. Il en fut ainsi, pour avoir dénoncé avec courage les dérives qui portaient tant de torts à ton peuple. Tu n’avais pas en effet hésité un seul instant, à vitupérer les travers d’un gouvernement dans lequel tu siégeais pourtant. Tu y étais avec tous les avantages que ton statut pouvait te procurer. Tu dénonçais ces travers au risque d’en être « défenestré ».
Ce qui ne tarda pas. Pour toi, un portefeuille ministériel n’a jamais été et ne pouvait pas être d’ailleurs, loin s’en faut, une sinécure. Il ne pouvait constituer qu’un moyen, un instrument au service du peuple et des citoyens. Tu n’as jamais put’associer à une équipe qui avait une autre conception que cette noble vision qui en était la sienne. Tu as récidivé en 2001, quelques mois seulement après l’installation de l’opposant de l’époque, Abdoulaye Wade, élu entretemps, Chef de l’Etat.
Pourtant tu l’avais accompagné dans tous ses combats et pendant des années, afin de le conduire au pouvoir.
Tu as fait partie de ceux qui ont rendu possible son élection en 2000. Là également, tu disais haut, ce que les citoyens pensaient tout bas, en pointant du doigt ce que tu appelais à juste titre la conduite scandaleuse du pouvoir, par le président nouvellement élu. Pour avoir parlé au nom de ceux qui n’avaient pas une tribune appropriée pour s’exprimer, tu avais subi les foudres d’un homme qui t’en avait voulu. Il t’en voulait, pour lui avoir simplement rappelé, à juste raison, ses engagements envers son peuple. J’ai eu le privilège de siéger avec Amath à compter d’octobre 2012 en Conseil des Ministres.
Son franc parler et son engagement indéfectible marquaient avec ce style qui lui était propre toutes ses interventions.
Il a cheminé avec le Chef de l’Etat, le président Macky Sall dans la coalition Benno dans la loyauté, il y est resté jusqu’à sa mort intervenue hier soir. Si cet homme exigeant est resté dans cette coalition avec son parti, c’est parce qu’il était convaincu que le challenge que constituait cette solidarité politique agissante valait la peine d’être entrepris, entretenu pour l’intérêt supérieur du peuple sénégalais. Ton rapport à ce peuple est singulier et particulier.
Personne n’a jamais et ne saura jamais, mieux que toi, aimer son peuple et travailler à le rendre heureux et confiant dans son avenir. Je mesure à quel point ta modestie souffre de ces mots, par lesquels je tente laborieusement peut-être - j’en suis conscient - de restituer à un homme qui le mérite bien toute sa place dans l’histoire de son pays. Tu auras incontestablement marqué cette histoire. Et de fort belle manière ! Dimanche 24 mai 2009, alors que nous venions juste de terminer la
restitution des conclusions des Assises nationales, nous avons eu un petit entretien, pour nous féliciter les uns et les autres, et nous dire toute la joie et la fierté que nous éprouvions.
Nous pensions que nous avions modestement contribué, un tant soit peu, à rendre possible la tenue des ces rencontres qui avaient abouti à des résultats importants. J’ai été bouleversé quand tu m’as dit : « je peux maintenant retourner me soigner, j’en ai besoin, je ne me sens pas bien, après on verra… ». On verra, disais-tu ! Nous, nous avons déjà vu, ton œuvre est là, immense.
Tu as été un symbole, une référence absolue dans ta manière élégante et patriotique, j’allais dire révolutionnaire, de faire la politique, avec dignité et un engagement altruiste. Même si tu n’as jamais assumé dans ta vie autre fonction officielle que celle de ministre et de député, nous retenons de toi : tes idées, ton engagement politique, ton combat pour la démocratie,
ton idéal de justice et ton acharnement à combattre toutes les déviances politiques. Sans distinction, qui qu’ils soient et qui qu’ils fussent, tes prises de position publiques ont toujours édifié tous tes compatriotes honnêtes sur l’homme Amath Dansokho.
Nous avons compris le sens du combat que tu as mené au nom de valeurs qui font d’un homme un citoyen utile à son pays. Nous avons aussi, d’une certaine manière, appris de toi le sens du patriotisme. Amath : un homme d’Etat français, le général De Gaule, en l’occurrence, disait : « un grand homme, c’est la rencontre d’un événement et d’une volonté ». Sans aucun doute ! Toi, Amath, ta grandeur tient dans cette rencontre longtemps établie entre ton pays et ta volonté jamais démentie de l’aimer d’un amour tyrannique.
Tu incarnes avec générosité et conviction l’idéal de dirigeant dont l’Afrique a besoin pour changer le cours de l’Histoire. Tu as tôt compris le sens de cette belle pensée du philosophe africain : « il n’y a pas de destin à jamais forclos, il n’y a que des responsabilités désertées ». Tu as toujours assumé. Pour toi, Amath ta mort n’est qu’un juste rappel, la maladie t’avait éloigné de nous ces deux dernières années, mais tu es toujours resté dans les esprits et les cœurs. Il en sera éternellement ainsi pour tous les Sénégalais.
Repose en paix Combattant ! La Terre de Ndar, la ville Téranga, a le privilège de t’accueillir éternellement, comme l’aurait souhaité Sémou Pathé Guèye ton vaillant compagnon d’arme à ses côtés, comme l’aurait souhaité d’ailleurs n’importe quelle contrée du pays pour lequel tu as sacrifié ta vie. D’autres illustres fils du pays reposant paisiblement dans ce mythique cimetière de Thiaka Ndiaye pour ne citer que Babacar Sine et Jacques Diouf, vous y attendent, les bras ouverts, aux portes du paradis.
Ainsi soit-il, avec la bénédiction d’Allah et Son Prophète Muhammad (PSL) !
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LIBÉRATION DE PARIS, POURQUOI IL N'Y AVAIT AUCUN SOLDAT NOIR DANS LES DÉFILÉS MILITAIRES
Il y a soixante-quinze ans, Paris fêtait sa libération. Parmi les soldats français qui défilent alors, aucun combattant noir. Une discrimination appelée « blanchiment », exigée par l’état-major américain
Il y a soixante-quinze ans, Paris fêtait sa libération. Parmi les soldats français qui défilent alors, aucun combattant noir. Une discrimination appelée « blanchiment », exigée par l’état-major américain.
Il y a soixante-quinze ans, Paris fêtait sa libération, et la fin de quatre années d’occupation nazie. Le 25 août 1944, la capitale organisait même une cérémonie d’hommage à la division blindée qui a libéré Paris, celle du général Leclerc. Une 2e division blindée (DB) devenue célèbre, avec les chars et ses 16 000 hommes. Mais les images de l’époque ne montrent étrangement pas un seul combattant noir, alors que les troupes coloniales ont formé une part importante des Forces françaises libres. La raison en est le « blanchiment » de troupes, opéré par les armées américaines, britanniques et françaises à plusieurs reprises au XXe siècle.
Il consiste à remplacer les soldats noirs par des soldats blancs. Un « blanchiment » exigé en 1944 par l’armée américaine, qui forme et équipe la 2e DB. Explications, avec Raffael M. Scheck, professeur d’histoire moderne au Colby College (Etats-Unis).
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LA GAUCHE SÉNÉGALAISE À LA LOUPE
À en croire Mamadou Mao Wane, spécialiste des questions de société et éditorialiste de SenePlus, les partis de cette obédience politique ont du mal à faire adhérer la masse, dont ils sont censés défendre
e-media |
Babacar FALL & Pape Doudou Diallo |
Publication 25/08/2019
La disparition d’Amath Dansokho, une icône de la gauche sénégalaise a servi de prétexte pour analyser, dans Lr du Temps ce dimanche, ce courant politique. Le premier constat soulevé par les invités d’Alassane Samba Diop est qu’au Sénégal les leaders de la gauche ont toujours eu des difficultés à accéder à la magistrature Suprême. Les partis de cette obédience politique ont du mal à faire adhérer la masse, dont ils sont censés défendre leur idéologie. S’il en est ainsi, estime le Spécialiste des questions de sociétés et Politiques, Mamadou Wane dit Mao, c’est parce que le système capital a dominé les Etats africains. « Les politiques que l’on voit ne sont pas des politiques économiques autonomes. Elles sont voulues et édictées par la Banque mondiale. Nos Etats n’ont pas de souveraineté même dans la conception de leurs politiques publiques. Et c’est là où la gauche a échoué. Elle n’a jamais eu un programme autonome de prise de pouvoir politique. Les leaders de gauche ont eu le génie d’accompagner. Mais, ce n’est pas des forces électoralistes même s’ils parlent au nom du prolétariat », pense Mao.
« C’est l’absence d’idéologie qui justifie la transhumance »
Son co débatteur, Hady Ba va plus loin. Selon le Philosophe et spécialiste des questions cognitives, c’est l’idéologie même qui commence à disparaître en politique. Ce qu’il y a, ce sont des ambitions personnelles. « Depuis les années 90, l’idéologie politique a disparu au Sénégal. Les gens font de la politique par ambition personnelle. C’est pourquoi, l’on voit un président de la République libéral et qui fait de grands travaux qui sont d’inspiration non-libérale. Parce que pour lui, l’idéologie n’a aucune importance », analyse M. Ba. Qui ajoute : « S’il ne reste que des ambitions personnelles, à chaque fois que cette ambition ne peut être satisfaite, les personnes porteuses de l’ambition vont transhumer ». Selon Hady Ba, si les partis de gauche ne parviennent pas à gagner des élections, c’est parce qu’ils n’ont pas les moyens de leur politique. « C’est le paradoxe de la gauche. Et ce n’est pas qu’au Sénégal. C’est partout au monde. Pour gagner des élections démocratiques, il faut gagner la guerre idéologie. Alors que, pour gagner la guerre idéologique, il faut avoir les moyens de propagande. Hors, ce sont ceux qui ont de l’argent qui les moyens de propagande ».
AUDIO
OBJECTION AVEC EL HADJI HAMIDOU KASSÉ
Le ministre-conseiller en charge de la culture et des arts, revient sur le sens du combat d'Amath Dansokho, ancien ministre et leader du PIT, décédé vendredi 23 août 2019
El Hadji Hamidou Kassé, ministre-conseiller en charge de la culture et des arts, évoque au micro de Baye Omar Gueye de (Sud Fm) dans l'émission Objection, la vie et le sens du combat d'Amath Dansokho, ancien ministre et leader du PIT, décédé vendredi 23 août 2019.
par Alassane Kitane
LETTRE À CEUX QUI VEULENT CONTRÔLER FACEBOOK
Nous savons que sans ce pouvoir, vous ne serez plus rien, car vous n'avez jamais été quelque chose pour le pays avant la politique - Activistes et lanceurs d’alertes sur Facebook unissez-vous car le monstre rêve de vous faire taire
Si vous croyez que vous pouvez me congédier de Facebook en sabotant chaque jour mon compte, c'est que vous êtes malheureusement très mal informés. Les pratiques de censure n'ont jamais permis à un homme politique de faire ce qu'il n'aurait pas pu faire sans elles. Mon compte Facebook est chaque jour sur bloqué après quelques posts et commentaires, mais vous vous fatiguez inutilement.
Nous savons comment entre 2009 et 2012 un immeuble a été équipé de matériels informatique avec une connexion pour employer des pollueurs du net donc l'activité principale était de lyncher avec une virulence inouïe les dirigeants de l'époque. Nous savons qu'il y a eu la complicité de certains sites Internet, car nous savons qu'il y a une façon de filtrer ou de modérer les commentaires par la rubrique "Approuver". Ne passent dans ce filtre que les commentaires que l'on veut laisser passer.
Nous savons parfaitement comment vous avez fait vôtre cette leçon du maître de la propagande nazie Goebbels : " C'est l'un des droits absolus de l'Etat de présider à la constitution de l'opinion publique". Vous êtes la honte de la démocratie, vous ne méritez pas de diriger un pays de Garmi comme le Sénégal.
Nous savons, pour avoir déjà géré un site, qu'il est possible pour le gestionnaire ou administrateur du site de voir en direct qui visite son site. L'adresse IP et le numéro de la ligne peuvent être clairement identifiés. Il y a mieux : les robots qui produisent des commentaires instantanés peuvent actuellement être neutralisés.
Nous savons exactement que vous avez appliqué à la lettre cette maxime de Goebbels "Celui qui peut régner sur la rue régnera un jour sur l'Etat, car toute forme de pouvoir politique et de dictature à ses racines dans la rue". Le caractère artificiel de certaines émeutes sut Internet n'a jamais échappé aux initiés. Vous ne me pousserez jamais à l'insulte et à la vulgarité, car mon style est le mur où vos manigances achopperont comme des vagues scélérates sur le décor infini du rivage de l'océan. Vous ne me pousserez pas à la faute !
Nous savons que la racine de ce régime fasciste, c'est la rue, et cette rue a été d'abord l'Internet. Votre force est en réalité une grande faiblesse : ne pas avoir de limite dans le cynisme, n'avoir aucun atome de loyauté dans l'adversité. Vous n'êtes pas Garmis.
Nous savons que vous donnez des ordres à certains médias pour censurer des citoyens, esprits libres. Nous savons que vous exercez des pressions sur certains sites en ligne et sur certains journaux pour qu'ils ne publient pas les contributions de tel ou tel citoyen. Nous savons que vous avez constamment peur parce que vous n'êtes pas des Garmis.
Nous savons par quels procédés on peut signaler le compte de quelqu'un comme véhiculant des messages de haine ou de discrimination afin que le protocole de sécurité de Facebook le bloque sur certaines fonctionnalités. Arrêtez vos gamineries politiciennes et consacrez-vous à la prise en charge des préoccupations de votre peuple.
Nous savons que sans ce pouvoir, vous ne serez plus rien, car vous n'avez jamais été quelque chose pour le pays avant la politique.
Nous savons comment des journalistes ont été "réseautés" (c'est leur langage !) entre 2008 et 2012 pour occuper les médias et faire des actes politiques sous le couvert de l'analyse et de la chronique journalistiques. Nous savons qui a fait recruter par une haute station ses amis "licenciés" dans un organe de presse. Nous savons ce que vous faites.
Activistes et lanceurs d’alertes sur Facebook unissez-vous car le monstre rêve de vous faire taire.
J'AI PERDU UN AMI, UN FRÈRE
Entre Moustapha Niasse Amath Dansokho, c’est une longue histoire. Tout est parti de Saint-Louis, à une époque marquée par des luttes dans le milieu scolaire.
Le ministre d'état amath Dansokho n'est plus. alité depuis un bon bout de temps, l'ancien secrétaire général du Parti de l'indépendance et du travail (Pit) est décédé hier à Dakar l’âge de 82 ans. ami de longue date du défunt, le président de l’assemblée nationale Moustapha niasse lui a rendu un vibrant hommage.
Alors que le pays se préparait aux obsèques de Jacques Diouf, ancien directeur général de la FAO, une nouvelle triste est venue accentuer la douleur déjà immense. Il s’agit du décès hier à 82 ans, d’Amath Dansokho, figure emblématique de l’histoire politique du Sénégal. Juste après l’annonce de la nouvelle, les témoignages se sont multipliés sur les ondes de la RFM.
« Dieu décide souverainement.Ses décrets sont imparables et nous devons les accepter avec foi, en tant eu musulman, en tant que croyant. Un grand homme a rejoint aujourd’hui l’au-delà Au moment où Dieu rappelle cet homme à lui, nous pouvons témoigner en tant que croyant. Amath était un homme de conviction. Il était au dessus de certaines contingences. Il vivait dans un monde de générosité, de paix, de sérénité, d’engagement et œuvrait pour un Sénégal de paix, d’unité et de stabilité. Voilà l’homme qu’était Amath », a déclaré Moustapha Niasse.
Entre Moustapha Niasse Amath Dansokho, c’est une longue histoire. Tout est parti de Saint-Louis, à une époque marquée par des luttes dans le milieu scolaire. « Je l’ai connu quand il avait 12 ans. Donc, nous avons partagé beaucoup de choses. Par la suite, nous nous rencontrions, moi en tant que dirigeant de la jeunesse de l’Union progressiste sénégalaise de Senghor et lui, venant de Prague où il avait terminé ses études de journalisme.
Nous sommes également rencontrés à Helsinki. J’étais à la tête de la délégation sénégalaise et lui, il était venu pour combattre les positions sénégalaises. Nous sommes restés des amis. Nous allions en salle, nous discutions ensemble, on prenait le diner ensemble, avant que chacun ne regagne sa chambre», s’est remémoré le fondateur de l’Alliance des forces progressistes (AFP).
« Quand nous organisions des manifestations, il était toujours devant, toujours le premier à affronter les forces de l’ordre. Il nous a toujours donné l’exemple. C’était un leader né. Depuis le lycée de Faidherbe, au milieu des années 1950, il dirigeait les grèves pour les revendications », a rappelé Moustapha Niasse.
Très engagé et craint pour son franc-parler, Dansokho a dirigé le PIT jusqu'au 23 mai 2010, avant de passer le témoin à Magatte Thiam. « Amath n’a jamais varié dans son choix et dans l’option extraordinaire qu’il avait faite pour la liberté, le respect des droits humains, pour la solidarité humaine. Il ne cherchait pas la richesse et a vécu comme il a vécu. En homme austère, comme un adepte de la philosophie qui est porté par la morale et la recherche du bien », renseigne le patron de l’Hémicycle.
Son limogeage du gouvernement de Wade
« Il est entré dans le gouvernement en 2000 et faisait partie des personnalités que j’avais proposées au président Abdoulaye Wade. Le 21 novembre 2000, le président Wade avait décidé de le retirer du gouvernement. La veille, Amath était parti en mission à Madrid, en tant que ministre de l’Urbanisme. C’est moi qui l’avais appelé pour lui dire que le président de la République avait décidé de mettre fin à ses fonctions. J’avais immédiatement appelé son frère et ami Ibrahima Séne qui était son directeur de cabinet. Et il avait accepté cette décision, avec une grandeur extraordinaire et remarquable », se rappelle Moustapha Niasse.
Avec le décès de Dansokho, Niass affirme avoir perdu un être cher. « J’ai perdu un frère, un ami. Je suis allé le voir à Paris il y a un an et demi. Le président Macky Sall n’a ménagé aucun effort pour le soutenir et l’accompagner. Nous sommes des croyants et l’être humain est sensible à la douleur. C’est la raison pour laquelle nous le pleurons. Mais nous le confions au Seigneur pour qu’il lui ouvre les portes du paradis. Que Dieu le rétribue, pour sa générosité, son engagement, son honnêteté, sa capacité de s’élever en toutes circonstances », a ajouté Moustapha Niasse.
"SI JE MEURS, JE NE VEUX PAS D'HOMMAGE..."
Un entretien accordé en 2010 à Walf Grand-Place, alors quotidien du Groupe WalFadjri, par Amath Dansokho qui évoquait, dans une sorte de prémonition, sa mort
Walf Grand-Place |
Ndèye Awa Lo |
Publication 24/08/2019
On ne peut parler de politique au Sénégal sans parler de lui. À 72 ans, Amath Dansokho fait partie des hommes politiques les plus respectés pour sa constance dans ses idéaux. Ancien ministre sous les régimes de Diouf et de Wade, cet homme s’est battu toute sa vie durant pour combattre l’injustice sociale. Un combat qui lui tient à coeur au point qu’il en oublie sa santé. Malade depuis quelques années maintenant, le secrétaire général du Parti de l’indépendance et du travail (Pit) ne sent pas bien. Même pour marcher, il a des problèmes avec des jambes enflées. De retour de Paris, le leader du Pit se confie à Walf Grand-Place. Autour du Damier, le Kédovin d’origine en pleurs revient sur sa vie, son exil, sa maladie, la mort… Confessions comme vous n’en avez jamais entendu. Un entretien qui s’est déroulé dans une ambiance pour le moins lourde avec un père de famille qui retient difficilement ses larmes dès qu’on évoque certains sujets.
Walf Grand-Place : Vous revenez de France où vous avez subi des soins. Vous semblez visiblement affaibli. Comment vous portez-vous ?
Amath Dansokho : Effectivement, je suis affaibli. La motricité est difficile. Avant, pour marcher, je risquais de tomber à tout moment. Maintenant que je suis le régime, le sucre a diminué. Mais, j’en avais trop dans mon sang. Je suis rentré à la veille de la présentation des conclusions des Assises.
Est-ce que vous suivez les prescriptionsdu médecin ?
Je suis obligé. Parce que si je veux vivre encore deux ou trois ans, il faut faire le régime. J’ai eu la chance, on ne m’a pas amputé la jambe. C’était possible car j’étais allé trop loin avec un sang imbibé de sucre. Heureusement que mes jambes deviennent de plus en plus ferme.
Parlant de votre maladie, certains soutiennentque vous avez fait la dialyse ?
Non ! Je n’en suis pas encore là. J’espère que cela ne m’arrivera pas. Parce que si je devais faire la dialyse, je me mettrais une balle dans la tête pour ne pas emmerder les gens.
Vous versez des larmes depuis un instant.Qu’est-ce qui vous fait craquer. Quecraignez-vous ?
Je ne pleure pas pour ma maladie. Je n’ai non plus pas peur de la mort. Je souhaite vivre encore longtemps. Je le souhaite car on ne m’a pas dit que je suis condamné à mourir sous peu. Et puis, si tel était le cas, je l’aurais dit. De même que si j’avais le cancer ou le sida. Il n’y a pas de maladie honteuse. Il vous arrive donc de penser à la mort ? Non ! La mort, c’est le cadet de mes soucis. Je sais que ça viendra un jour.
Nous vous souhaitons de vivre encorelongtemps. Mais si Dieu vous rappelle à lui un jour, que voulez-vous que les Sénégalais fassent pour vous rendre hommage?
Non, je ne veux pas d’hommage. Ce que le peuple fait pour moi est largement suffisant. Je ne crois pas qu’il ait une autre qui bénéficie d’une affection comme la mienne. Je ne voudrais pas de folklore, mais de la sobriété. La population a beaucoup fait pour moi. Il faut faire l’économie de chose pareille. Je demande à être enterré dans la plus grande discrétion. J’aurais aimé que ce soit à Kédougou, mais ce ne sera pas facile pour ma femme et mes enfants de se rendre souvent jusque là-bas pour se recueillir sur ma tombe. Je n’ai pas encore fait de choix. Peut-être que j’opterai pour Dakar.
Vous avez récemment perdu un compagnonen la personne de Sémou PathéGuèye. Que retenez-vous de cet homme ?
C’était une grande intelligence. (Il fond en larmes).
Latif Coulibaly a fait un texte poignant sur vous dans le journal La Gazette pour vous rendre un hommage. Vous l’avez lu ?
Non. Je n’ai parcouru que quatre ou cinq lignes et je me suis arrêté. Je n’ai pas jusqu’à présent pu supporter. (Il fond à nouveau en larmes) C’était trop fort pour moi. C’est un proche qui m’a demandé de lire. Mais, je n’ai pas pu. Latif est un ami. Il me harcèle, depuis dix ans, pour que j’écrive avec lui mes mémoires.
Il dit que vous vous êtes sacrifié pourvotre patrie. Avez-vous le sentimentd’avoir accompli votre mission ?
Je n’ai pas fini. Je continue d’accomplir ma mission. On n’a qu’une petite séquence dans la vie avec ce que le destin nous donne. Durant ces instants de lutte pour votre patrie, avez-vous regretté des choses ? Mon seul regret est que j’aimerais avoir beaucoup de voix et que l’autorité et l’estime dont je bénéficie des couches sociales se traduisent dans l’urne. Peut-être que cela se fera un jour. J’aurais souhaité que notre pays se développe, se modernise le plus rapidement possible.
Celui qui détient les rênes de ce pays estun compagnon de longue date. Peut-onsavoir les circonstances de votre premièrerencontre avec Abdoulaye Wade ?
La première fois que je l’ai rencontré, c’est Majmouth Diop qui nous a présentés. On se trouvait au restaurant des intellectuels de l’époque, Barbier (devenu le moulin- Rouge au Plateau). Ce jour-là, Wade était venu déjeuner à midi avec Cheikh Anta Diop. Ils venaient tout juste de finir leur plat. Mais, notre premier contact, c’était en 1960 au cours d’une conférence sur le socialisme qu’il animait à Daniel Brottier en présence de Gabriel D’Arboussier. Abdoulaye Wade, qui vivait en France, était venu en vacances. À la suite de sa communication, je lui ai apporté une contradiction par rapport au thème «socialisme et religion». Il a souri. Ensuite, il m’a enseigné les mathématiques économiques en 1962.
Quel genre de professeur fut M. Wade ?
Wade fut un professeur sans pédagogie car les étudiants ne comprenaient rien de ses cours. Il venait toujours avec un retard de 20 mn et passait tout son temps à parler de lui, de la politique. Et les 10 mn qui restaient, il se mettait à bâcler la leçon. On n’y comprenait rien. J’ai travaillé davantage pour son parti que pour le mien. Je dois dire aussi qu’il s’est constitué pour me défendre en 1964 lorsque j’ai été arrêté.
Pour quelqu’un qui l’a côtoyé commevous, dites-nous deux qualités del’homme Wade ?
Il a un sens extraordinaire de fascination sur son peuple. Quand il sortait dans la rue, c’était comme s’il détenait une force surnaturelle d’attirer les individus. Senghor et Lamine Guèye furent certes populaires. Mais personne n’a eu cette fusion avec la population comme lui.
Deux défauts que vous avez remarquéschez le Président Wade ?
La conviction qu’il sait tout et son refus de partager l’opinion des autres. C’est le président qui a le plus de conseillers au monde, mais on ne se rend pas compte de leur travail. Je suis certain qu’il aime le peuple, croit à sa grandeur, mais il fait les choses dans le désordre. Le malheur est qu’il est arrivé au pouvoir avec un âge avancé et veut tout réaliser en si peu de temps. Alors que personne n’a la chance de tout accomplir sur cette terre. Même le prophète (Psl) n’a pas eu cette opportunité.
On dit que jamais il ne vous emprisonneracar vous aurez vécu des chosesfortes. Peut-on avoir une idée de ce quivous lie ?
Ce que Abdoulaye Wade et moi avons vécu de fort, n’est rien d’autre que la passion pour le Sénégal. C’est moi qui ai eu l’intuition que le changement passerait par lui. J’ai dit un jour : «Avec tous les défauts qu’on lui connaît, il faut le soutenir.» C’était le chemin obligé, le plus court du changement car aucun d’entre nous n’avait la surface populaire requise pour conduire le changement. Je savais que pour cette étape de la démocratie, Wade fut l’homme idéal. Je ne me suis pas trompé. C’est lui qui a changé. Je me rappelle le soir de sa victoire, on s’est congratulé. Nous étions au Point E, debout sur des chaises, saluant le peuple. Je ne lui demandais pas de me confier un poste. Wade sait que je ne suis pas du genre à me casser devant qui que ce soit. Avant son élection, on se voyait tous les jours. Dès que je le quitte pour me mettre même à table, il rappelle pour me demander de revenir. J’habitais à Liberté 6. Mais, je faisais cinq fois le trajet Sicap-Point E. On était viscéralement très lié. J’ai failli perdre mon enfant à cause de lui.
Perdre votre bébé ? Comment ?
Parce que ma femme a failli accoucher dans la rue. C’était le 25 décembre 1978. J’habitais à Liberté 6. Samba Diouldé Thiam et moi étions
partis rencontrer le parti de Wade pour nouer une alliance. Nous y sommes allés à 21h pour ne quitter qu’à 5h du matin. A mon retour, j’ai
trouvé Sémou (Ndlr : le défunt Sémou Pathé Guèye) et ma femme, en train de chercher désespérément un taxi.On l’a amenée à l’hôpital, Le Dantec. Et dès qu’elle a franchi le seuil de la salle d’accouchement, le bébé est sorti dans des conditions horribles.
Qu’est-ce qui vous a marqué chez Wade, ce compagnon d’antan ?
Je dirais ses dons linguistiques qui font marrer plus d’un. Il a une connaissance extraordinaire de la langue wolof, mais aussi du Français. Wade est dans le crâne des Sénégalais comme il puise dans un ordinateur. Pendant longtemps, il les a manipulés. C’est une tête extraordinaire. Et quiconque lui nie ses dons raconte des histoires.
Quand est-ce que vous vous êtes rencontréspour la dernière fois pour discuter ?
C’était le 9 novembre 2006, lorsqu’il m’a demandé, pour la 9e fois, de rentrer dans le gouvernement. Ce que j’ai toujours refusé. Car, comme on ne partage pas les mêmes convictions, je risque de me faire limoger, 24h après. (Rires).
Etes-vous allé présenter vos condoléanceslors du décès de sa belle fille, Karine ?
Je suis arrivé à Paris le 19. D’habitude je dormais, mais je me suis rendu dans la demeure mortuaire. On s’est rencontré, j’ai embrassé
Viviane Wade. Elle a beaucoup d’affection pour moi car elle sait que j’ai beaucoup aidé son homme. Il en est de même pour ses enfants, Karim et Sindiély qui me considèrent comme leur oncle. En 2008, quand j’étais hospitalisé en France, Karim m’a téléphoné et il m’a dit : «Tonton, je suis à Paris, il paraît que vous êtes malade, je viens vous voir.» Il était en route pour la Chine et a tout fait pour me retrouver. J’étais vraiment surpris. Karim me dit que toute sa famille a de l’affection pour moi. Et je ne crois pas que ce soit faux.
Pensez-vous que Karim Wade a les compétencespour gouverner un jour le Sénégal ?
La question n’est pas là. Karim Wade est un Sénégalais à part entière. Je ne partage pas l’avis de ceux qui estiment qu’il n’est pas Sénégalais parce qu’il est blanc. La Constitution ne se base pas sur des critères pigmentaires. Elle le reconnaît comme citoyen sénégalais.
De ce point de vue, il peut être candidat. Ce qu’on ne peut accepter, c’est qu’on dise qu’il doit succéder à son père. Or, il nous semble que ce dernier fait des choses qui vont en ce sens. Mais, si les Sénégalais votent pour Karim, je serais le premier à reconnaître sa victoire. Aussi, je tiens à préciser que si quelque chose arrive à Karim, je porterais plainte contre Abdoulaye Wade pour l’avoir poussé dans une aventure suicidaire. Je prendrais cette responsabilité, en tant que citoyen.
Avec Karim Wade, vous discutez souventde politique ?
Quand Karim est venu chez moi, c’était pour me remercier. À Paris, il était venu s’enquérir de mon état de santé. Pour vous dire qu’on ne parle pas de politique.
Parlant de votre santé, il se susurre quevous avez refusé la prise en charge médicalequ’Abdoulaye Wade vous a offertepour aller vous soigner à Paris. Qu’en est-il ?
C’était en 2004. C’est vrai qu’il avait pris toutes les mesures pour que j’aille me soigner à Paris. Je n’ai pas refusé. J’ai apprécié. D’ailleurs, c’est lui qui m’a appris que j’étais presque au bord de l’effondrement. Heureusement qu’il m’a averti. La preuve, à Paris, j’ai perdu connaissance dans un restaurant. Je n’ai pas pris les soins parce que je n’en avais pas besoin dans le seul but que je suis totalement assuré par mon épouse qui travaille à l’Organisation mondiale de la santé (Oms). Seulement, j’avoue que si Wade n’avait pas attiré mon attention sur la nécessité de me soigner rapidement, le pire pourrait arriver. Il avait pris des mesures extraordinaires en choisissant des médecins de niveau exceptionnel pour s’occuper de mon cas. Mieux, il avait demandé à ce qu’on me transporte chaque jour mon régime, de Dakar à Paris.
Malgré les divergences politiques, AbdoulayeWade compatit à votre maladie ?
Tout comme moi qui ne peux parler de lui sans verser des larmes. Je suis un humain qui a des sentiments. J’ai de l’affection pour Abdoulaye Wade. J’ai fait des choses avec cet homme. Viviane m’a une fois invité chez lui. Et dès que je me suis mis à dérouler des séquences de ce que l’on a vécu, j’ai craqué. Je ne lui veux pas de malheurs. C’est pourquoi je veux qu’il parte pour son intérêt et celui du
peuple. Les sentiments existent. J’aime Wade. Il a posé des actes à saluer. Cette autoroute à péage est une grande œuvre. Idem pour la Corniche. Ce qu’on ne peut accepter, ce sont les surfacturations. Pour le cimetière, je lui ai dit : «Si vous y touchez, les Lébous
vont se soulever.» Heureusement qu’il a suivi mes conseils.
Au-delà de Wade, vous travaillez dansl’opposition avec des leaders commeMoustapha Niasse, Tanor Dieng qui nes’entendent pas souvent. Comment parvenez-vous à les gérer ?
Je n’ai pas à les gérer. Ce sont de gros gaillards. Nous travaillons ensemble parce que nous sommes des esprits rationnels. Je crois qu’il y a aussi le fait que nous subordonnons tous à notre patrie. C’est une dimension partagée qui fait que quel que soit notre état d’âme, quel que soit ce que nous pensons les uns des autres, on doit se mettre ensemble. Ils se rencontrent souvent chez moi. Nous avons souvent des hypothèses différentes. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de problème, mais cela ne peut empêcher qu’ils travaillent ensemble. Ce qu’ils font depuis 2002. J’avoue qu’ils sont des dirigeants d’une grande qualité qui ont occupé d’importants postes. Tanor Dieng, par exemple, a l’esprit rigoureux et travailleur. Niasse est une intelligence étincelante et très cultivée avec une culture d’Etat. Ils ont beaucoup appris sous
Senghor.
Dites-nous quels sont les défauts deTanor Dieng et Moustapha Niasse?
Non, je n’aime pas juger les gens.
Vous rêviez de devenir président de laRépublique du Sénégal ?
Cela ne m’a jamais effleuré l’esprit. Je ne suis pas devenu marxiste pour la galerie. C’est juste la libération de l’homme sous tous les rapports.
Vous vivez seul dans votre maison. Oùsont vos enfants et leur maman ?
J’en ai quatre. L’aînée Yacine, une ancienne camarade de classe de Karim au collège des Maristes, est née en 1968. Ils vivent tous à l’étranger et ont pratiquement terminé leurs études en sciences politiques, sociologie, télécommunication… Ils se nomment Adèle, Laurence, Alcalie, Elsa. Leur maman est médecin. Elle se trouve actuellement en mission au Tchad. Elle est l’assistante d’Eva Marie Coll Seck. On a des boulots différents et chacun respecte le choix de l’autre. Je dors tout seul. Ce n’est pas prudent (Il rigole). Quand je vais mourir ici… Comme la maison ne désemplit pas, je n’ai jusqu’à présent pas pensé à chercher quelqu’un pour me tenir compagnie.
Après tant d’années passées dans la politique,c’est quoi le patrimoine de Dansokho.Des comptes bancaires en Suisse ?
Comptes bancaires ! Je n’ai aucun sou dans une banque du monde. J’ai deux maisons à Liberté 6 et à côté de l’aéroport que je viens de solder. Cet appartement de Mermoz, je le loue. Mon enfant qui étudie encore, je dois le soutenir. Les frais de France pour ma maladie ne sont pas gratuits. Même si on me rembourse mes médicaments.
Peut-on avoir une idée du genre d’enfanceque vous avez eue ?
J’ai eu une enfance heureuse dans une famille aisée et très sociale. Tous les fonctionnaires qui débarquaient à Kédougou logeaient chez nous. C’était une famille élargie avec un père qui eut quatre épouses. J’y ai fait l’école primaire. Avant d’aller faire mon entrée en 6e à Saint-Louis, à l’école Duval. En 1951, mon père nous a envoyés, mon frère et moi, chez ses collègues fonctionnaires. On était dans la maison de son ami, Mbagnick Diouf, l’oncle à Abdou Diouf.
Pouvez-vous nous dire quel élève vousétiez ?
Je fus remuant à la limite non-conformiste. J’écoutais ce que je voulais savoir. Déjà au cm2, je fus un Senghoriste fanatique. Mes maîtres comme Macodou Diène, l’ancien footballeur Abdoulaye Thiam, devenu administrateur civil, peuvent en témoigner. Ils étaient tous inquiets car au moment où mes camarades se mettaient aux révisions pour préparer l’examen, je suivais ceux qu’on surnommait les va-nu-pieds à l’époque. Ensemble, nous préparions la venue de Senghor dans la capitale du Nord. Comme anecdote, j’ai assisté au discours de Senghor en 1951 au cinéma Rex. Pour vous expliquer combien je l’aimais, je lui ai serré la main jusqu’à la porte, j’ai failli me faire écraser par la foule. Je suis venu à Dakar après le baccalauréat. Je me suis inscrit au département d’Economie de l’Université de Dakar. À la première assemblée générale, on m’a élu vice-président, directeur de publication du journal Dakar étudiant. Je fus tellement actif dans les mouvements de lutte que la plupart des élèves me connaissaient de nom. C’est à cause de cet engagement dans le mouvement estudiantin que j’ai arrêté mes cours. Puis, j’ai fait du journalisme en vrac en tant que patron de ce journal. Comme j’avais un besoin d’expression et que je luttais contre les Français, on n’est paru qu’une seule fois. Senghor nous a interdit de parution à l’imprimerie Diop. Comme solution, j’allais tous les mois à Conakry pour faire éditer, mettre les exemplaires dans les valises à destination de Dakar.
C’est ce qui a fait que vous n’avezpas pu faire des études universitairespoussées ?
Effectivement, cet incident en fait partie. Mais j’apprends toujours. Et je n’ai rien à envier à ceux qui ont fait des études poussées en sociologie, histoire, économie… D’ailleurs, j’étudie toujours. Je me cultive.
Comment êtes-vous entré en politique ?
Je suis entré dans la politique en 1949 dèsque le Bds (Ndlr : Bloc démocratique sénégalais) est né dans l’atelier du fondateur du parti à Kédougou. Je n’avais que 10 ans. J’entendais parler de Senghor, le savant qui fut capable de dire le nombre de feuilles qu’il y a dans un arbre. Et c’est ce savoir qui fascinait chez lui. C’est pourquoi quand je l’ai quitté, j’ai pris la gauche.
Qu’est-ce que cela vous fait d’idolâtrerune personne, la côtoyer puis la quitterpour des divergences idéologiques ?
C’est une question d’évolution. J’ai su beaucoup de choses au fur et à mesure que je grandissais. J’avais adhéré à une idéologie. C’est pourquoi quand je ne me retrouvais plus j’ai intégré le Pit. Mon premier cadeau après mon entrée en sixième fut un livre sur le communisme offert par Mady Cissokho, le premier ministre d’Etat du Sénégal. C’est de cette manière que je me suis décidé à faire avancer la démocratie et la justice sociale.
Vous avez été contraint à l’exil sous lerégime de Léopold Senghor. Racontez nousce que vous avez vécu au Mali ?
C’était en 1964. J’ai été arrêté pour activités clandestines et j’ai bénéficié d’une liberté provisoire. Je suis parti donc absent au moment du procès. Je vivais au Mali dans la résidence que Modibo nous avait offerte. C’est dur de vivre loin des siens. On a annoncé ma mort. Ce n’est qu’en septembre 1968, quand je suis venu au congrès du Parti démocratique de Guinée (Pdg) à Conakry que les journalistes m’ont interviewé à l’aéroport. De 1964 à 1968, je n’ai eu les nouvelles de personne dans ma famille. Elle me manquait tant. L’exil peut détruire une personne.
C’était quoi vos activités durant cesquatre années d’exil ?
Je faisais du journalisme dans l’organe théorique d’informations des partis communistes dans le monde. Ce n’est pas facile. Heureusement que je n’ai jamais été coupé du pays car je suivais l’actualité. Même pour manger, je me mettais à la cuisine. Je sais faire le thiébou dieune, couscous… D’ailleurs, c’est de là que je tiens l’habitude de faire le marché. Tous les vendeurs de Soumbédioune, Castor me connaissent. Je m’y rends souvent. J’en connais les thiofs, dorâtes, mulets et le meilleur qu’est le yaboye.
Un message à lancer ?
Je souhaite plein succès à Walf Grand-Place tout en renouvelant mes longues amitiés avec Sidy Lamine Niasse (décédé le 4 décembre 2018) qui a joué un rôle important pour mon entrée dans le gouvernement de Diouf. C’était lors de la crise de 1989. Sidy venait souvent me voir à mon siège à Khar Yalla. Je prie pour que notre pays ne connaisse jamais les turbulences nées des mauvaises gestions.
LA COSYDEP RECOMMANDE LA SUPPRESSION DE L’ENTRÉE EN SIXIÈME ET LE CFEE
La médiocrité des résultats au Baccalauréat et au Bfem préoccupe les acteurs de l’éducation et leurs partenaires. C’est en ce sens que la Coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (Cosydep), a tenu hier un panel sur l
La médiocrité des résultats au Baccalauréat et au Bfem préoccupe les acteurs de l’éducation et leurs partenaires. C’est en ce sens que la Coalition des organisations en synergie pour la défense de l’éducation publique (Cosydep), a tenu hier un panel sur les résultats des examens 2019. une occasion pour ces acteurs de faire un diagnostic sans complaisance de ces données, mais aussi de faire des recommandations.
Dans le cadre du démarrage de sa campagne « vacances pour l’école », la Cosydep a procédé hier à l’analyse des résultats des examens de l’année 2019. Selon Cheikh Mbow, Directeur exécutif de la Cosydep, les résultats sont médiocres.
En 2019, le taux de réussite au baccalauréat est évalué à 37,65%. Ainsi, l’analyse de l’évolution des taux de réussite au Bac de 2001 à 2019, laisse entrevoir, selon le rapport de la Cosydep, que le taux le plus élevé atteint dans cette période (48,82%), est réalisé en 2006. il apparait ainsi qu’entre 2001 et 2019, le taux de réussite est inférieur à 40%.
Pour ce qui est de la distribution des performances dans les académies, le rapport démontre que les régions qui sont premières au Bfem sont les dernières au Bac. À ce propos, la région de Saint-Louis est en avant pour les résultats du Bac, avec un score de 48,86% sur les régions dont les données ont pu êtres collectés. Le plus faible score au Bac est enregistré à Ziguinchor .
Selon la même source, le plus grand score au Bfem est noté dans cette région. Cette situation constitue une équation pour les acteurs. C’est en ce sens que la Cosydep a initié la campagne « vacances pour l’école », afin de pouvoir discuter de ce genre de questions à enjeux. « C’est cela qui pourrait nous permettre d’avoir une année scolaire paisible mais avoir également une année scolaire où on peut être sur les véritables enjeux du secteur de l’éducation et la formation. C’est un moment d’échange et de partage entre les différents acteurs et partenaires institutionnelles. Cela nous permet de construire des consensus et des recommandations qui seront portés à l’attention des décideurs», a expliqué Cheikh Mbow.
Selon M. MBow, le système éducatif est suffisamment inefficace, malgré les ressources qui y sont injectées. «Il faut juste qu’on arrête d’être dans la réaction et plutôt proactifs dans la prise en charge de ces aspects », préconise-t-il. En analysant le rapport, il en ressort que chaque année, six élèves sur dix échouent aux examens. « Nous considérons que nos élèves ne sont pas nuls. Au contraire, ils sont intelligents. Il faut simplement un système d’orientation permettant de détecter le talent qui dort en chacun de nos enfants», suggère le rapport.
L’étude a également pointé du doigt le concours d’entrée en 6ème et le Cfee. Et de l’avis de Cheikh Mbow, ces étapes dans le cursus des élèves devraient être supprimées. « A l’ère des Odd, nous sommes dans une disposition d’avoir au moins 10 années d’obligation scolaire. C’est-à-dire 6 ans de l’élémentaire et 4 ans dans le moyen. Donc, la logique voudrait qu’on supprime le concours de l’entrée en 6ème et réviser l’examen du Cfee, car il a un coût. Nous pensons qu’il faut avoir les moyens pour l’organiser au niveau local. Cela coûterait moins cher. Nous devons être cohérents avec l’agenda 2030 qui prône une obligation scolaire de 10 ans », préconise Cheikh Mbow.
LE COLLÈGE DES DÉLÉGUÉS DEMANDE A L'ETAT DE PAYER SES DETTES
La dette que l’etat et Senelec doivent à la Société africaine de raffinage estimée à plus de 80 milliards de francs CFa (Sar) a fait réagir le Collège des délégués de la société située à Mbao
La dette que l’etat et Senelec doivent à la Société africaine de raffinage (Sar) a fait réagir le Collège des délégués de la société située à Mbao. Ils demandent à l’etat de procéder au remboursement de cette dette estimée à plus de 80 milliards de francs CFa afin que la société puisse travailler sans arrêt. en conférence de presse, hier ces délégués membres du SntPgS ont dénoncé la situation syndicale scandaleuse que la direction les fait vivre. une stratégie mise en place, selon eux pour museler le personnel syndical.
Le Collège des délégués de la Société Africaine de Raffinage (SAR), en conférence de presse, hier a dénoncé les difficultés auxquelles est confrontée la société, mais aussi les travailleurs de cette entreprise. Pour les membres du Syndicat National des Travailleurs du Pétrole et du Gaz du Sénégal (SNTPGS) affiliés à la Confédération Nationale des Travailleurs du Sénégal/ Force du Changement (CNTS/FC), la responsabilité est partagée entre la direction de la SAR et l’Etat du Sénégal.
«Ces deux entités plongent depuis un certain temps l’entreprise dans un gouffre financier et une tension de trésorerie insupportable», a dit El Hadji Maguette Diop, Secrétaire Général du Collège des délégués de la Société Africaine de Raffinage. Et d’après les délégués, les causes majeures de ces difficultés sont les arrêts intempestifs des installations pour cause de rupture de brut. «Depuis un certain moment, l’approvisionnement en pétrole brut connaît des ruptures fréquentes causées par des retards dans l’ouverture des lettres de crédit. Il y a également les dettes de la Senelec et de l’Etat du Sénégal qui sont estimés à plus de 80 milliards de francs CFA qui plombent les finances de la société », a déclaré El Hadji Maguette Diop.
Les délégués demandent à l’Etat de prendre au sérieux la SAR comme il en fait avec la Senelec. Pour El Hadji Maguette Diop, la SAR participe aussi à la bonne distribution de l’électricité au Sénégal. « Il faut que l’Etat nous paie cette dette qu’il nous doit pour qu’on soit dans de bonnes conditions de travail et faire face aux arrêts intempestifs des installations pour cause de rupture de brut », a lancé M. Diop.
En plus de cela, les délégués dénoncent les recrutements abusifs et parfois injustifiés de la direction, qui, selon eux ne respectent aucune règle de procédure en matière de recrutement. Pour les délégués, ces derniers sont faits par complaisance au lieu de faire de la promotion interne. Au plan syndical, ils ont décrié une situation scandaleuse. Selon les délégués, le personnel syndical ne dispose pas de salle pour tenir ses réunions, car celle-ci a été récupérée par la direction pour en faire des bureaux.
Pour El Hadji Maguette Diop, la promesse de cession des 5% de l’actionnariat au personnel de la SAR n’a pas été tenue. « Cette vieille promesse s’est heurtée au refus du ministre de l’énergie sortant, argumentant qu’il fallait attendre que la SAR soit rentable. Un point de vue que nous ne partageons pas. Que la société soit rentable ou pas nous croyons en son avenir et comptons nous battre pour relever tous les défis », dit-il.
La dette que l’etat et Senelec doivent à la Société africaine de raffinage estimée à plus de 80 milliards de francs CFa (Sar) a fait réagir le Collège des délégués de la société située à Mbao