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23 juillet 2025
QUAND LA SURVIE DEPEND DE LA RAPIDITE DES SECOURS
Le décès du jeune géomaticien Momar Ndiaye en service aux Impôts et Domaines de Pikine Guédiawaye, emporté par une crise cardiaque n’a pas encore fini de choquer les collègues du défunt, sa famille ainsi que ses voisins de Dalifort.
Le décès du jeune géomaticien Momar Ndiaye en service aux Impôts et Domaines de Pikine Guédiawaye, emporté par une crise cardiaque n’a pas encore fini de choquer les collègues du défunt, sa famille ainsi que ses voisins de Dalifort. Et pourtant, ce jeune homme fauché à la fleur de l’âge aurait pu être sauvé si ses collègues avaient acquis les bons réflexes qui sauvent dans ce genre de situation. Surtout s’agissant d’une urgence vitale où la survie dépend de la rapidité des premiers secours. En cas de crise cardiaque, que faut-il faire ? Convient-il réellement d’attendre l’arrivée des secours sans réagir ? « Le Témoin » a interrogé des spécialistes sur la conduite à tenir par l’entourage en cas de crise cardiaque…
Soudain, raconte-t-on, le jeune géomaticien Momar Ndiaye s’est écroulé dans son bureau. Il venait d’être victime d’une crise cardiaque. Malheureusement, ses collègues ignoraient qu’il n’y avait pas une minute à perdre dans ce genre de situation. Car la survie du pauvre Momar Ndiaye dépendait de la rapidité des secours sur place ou d’une prompte évacuation à l’hôpital voire la structure sanitaire la plus proche. Hélas pour le jeune géomaticien, ses collègues se sont contentés d’appeler et d’attendre les sapeurs pompiers dont l’arrivée tardive aurait ruiné ses chances de survie. Il faut le dire : au Sénégal, rares sont les témoins d’un tel accident ou d’une telle crise qui connaissent les premiers gestes qui sauvent : Appel des secours, réanimation cardio-pulmonaire de base avec le massage cardiaque externe et la ventilation artificielle par bouche-à-bouche. Pourtant, expliquent les spécialistes, c’est grâce à des gestes élémentaires de secours dispensés par des proches ou par des passants que quatre victimes sur cinq survivent. Si chacun d’entre nous avait conscience d’être au cœur de la chaîne de survie et prenait un peu de son temps pour acquérir les bons réflexes, bien des vies pourraient être sauvées. Malheureusement, la plupart des témoins multiplient les appels et autres harcèlements téléphoniques à l’endroit de sapeurs-pompiers qui en général, s’enlisent dans des embouteillages urbains. Lorsqu’ils disposent de véhicule ou d’essence pour intervenir ! Selon un officier des sapeurs-pompiers à la retraite, les soldats du feu ne quittent jamais en retard. « A chaque alerte, ils ont deux minutes pour quitter la caserne. Donc ils ne partent jamais en retard, plutôt ils arrivent en retard à cause des interminables bouchons de Dakar et sa banlieue. Que voulez-vous ? Les ambulances ne peuvent pas cabosser les véhicules dans la circulation ou écraser des piétons pour se frayer un passage. Non ! » se désole cet ancien officier des sapeurs-pompiers.
Trois minutes pour survivre !
Selon de nombreux médecins urgentistes, pour les cas d’accident corporel moins graves, les témoins de la scène peuvent appeler et attendre les sapeurs-pompiers. Ce, non seulement pour une bonne prise en charge médicale de l’accidenté, mais aussi pour des constats de police liés à des problèmes de réparation ou de dédommagements. « Par contre, une victime d’une crise cardiaque n’a que trois (03) et trois minutes seulement de chances de survie. C’est aussi valable pour les cas de noyades. Donc, attendre l’arrivée des secours les bras croisés, c’est de diminuer les chances de survie de l’accidenté cardiaque ou du noyé. Il est vrai qu’il faut toujours et rapidement alerter les pompiers, mais tout en entreprenant un massage cardiaque sans arrêt et autres gestes de secours » conseille un spécialiste en intervention et sauvetage. En tout cas, il y a de quoi s’imprégner des bons réflexes pour sauver les victimes de crises cardiaques. Surtout du fait que ces accidents surviennent souvent à domicile, au bureau ou sur la voie publique. Hélas, la plupart de ces crises surviennent devant des témoins, voire des curieux qui, le plus souvent, ne savent pas pratiquer les gestes élémentaires de sauvetage !
«LA CRISE CARDIAQUE EST UNE URGENCE VITALE !»
Médecin-Chef de la Clinique du Golf (Cœurs et vaisseaux), Dr Massamba Thiam, brillant cardiologue, nous fait le procès « fatal » de la crise cardiaque. Et sensibilise à travers cet entretien
Le Témoin : Docteur, qu’est-ce une crise cardiaque ?
Dr Massamba Thiam : Pour mieux faciliter la compréhension de vos lecteurs, disons tout simplement que la crise cardiaque est une urgence vitale. Dans les pays développés, près de 40 % des patients meurent sur place malgré d’énormes progrès en matière d’information et sensibilisation pour amoindrir le taux de mortalité. Car la crise cardiaque est une atteinte du muscle cardiaque. Un muscle irrigué par une ou plusieurs artères qui se bouchent. Et cela entraine une crise cardiaque. Seulement, il faut savoir rapidement détecter cette obstruction pour avoir des chances de survie. Et si le muscle nourri ne reçoit plus d’oxygène, plus on perd du temps, plus le muscle va souffrir et la situation s’aggrave. Et si rien n’est fait de façon très rapide, le cœur arrête de battre et entraine la mort. Pour éviter des explications trop techniques et scientifiques, voila une définition de la crise cardiaque pour me faire comprendre.
Quels sont les premiers reflexes de survie dans ce genre de situation ?
Le premier réflexe à avoir devant une personne inconsciente ou victime d’un malaise cardiaque, c’est d’appeler le « 15 » ou le Samu-National parce que c’est une urgence vitale. Car, le seul traitement consiste à déboucher cette artère dans les toutes premières heures. Donc une prise en charge initiale et rapide où le médecin urgentiste peut donner le premier traitement dans le but d’essayer de dissoudre le caillot sanguin bouchant l’artère.
En dehors des centres hospitaliers, votre clinique peut-elle prendre en charge les cas de crise cardiaque ?
Evidemment ! Car la Clinique du Golf a comme spécialité et discipline de base la cardiologie, c’est-à-dire le traitement médical et chirurgical des maladies du cœur et des vaisseaux sanguins. Grâce à notre plateau technique ultramoderne, nous faisons la coronarographie pour ponctionner l’artère bouchée. Ce qui nous permet de visualiser avec précision l’ensemble des artères coronaires afin de sauver le patient.
LE PRESIDENT DE LA COOPERATIVE D’HABITAT DE L’ASECNA S’ENFUIT AVEC LES 30 MILLIONS DE FRANCS D’UN MEMBRE
L’affaire d’escroquerie portant sur le foncier du président de la coopérative d’habitat des Travailleurs l’Asecna, Lucien Blé, a comparu hier à la barre du tribunal correctionnel de Dakar
Le président de la coopérative d’habitat des agents de l’Asecna, Lucien Blé, a comparu hier à la barre du tribunal correctionnel de Dakar. Il répondait des faits d’abus de confiance, escroquerie et faux usage et faux au préjudice de Matar Fall qu’il a escroqué de la somme de 30 millions de francs. L’affaire est mise en délibéré pour le 12 septembre prochain.
L’affaire d’escroquerie portant sur le foncier du président de la coopérative d’habitat des Travailleurs l’Asecna, Lucien Blé, a comparu hier à la barre du tribunal correctionnel de Dakar pour des faits d’abus de confiance, escroquerie et faux usage et faux. Il est au cœur d’un scandale foncier portant sur un montant de 30 millions francs au préjudice de Matar Fall, membre de la coopérative. Selon le plaignant, le président lui avait proposé d’adhérer à la coopérative dans le but d’acheter un terrain d’une superficie de 24.867 mètres carrés, sur le titre foncier n°5475/Dg sur la Vdn.
Convaincu par son collègue, M. Fall avait alors intégré ladite coopérative. Espérant bénéficier d’un terrain, il avait versé la somme de 30 millions de francs dans le compte de la coopérative ouvert dans les livres de la Banque de l’habitat du Sénégal (Bhs). Mais depuis le versement du montant, il n’a pas reçu la parcelle promise. Lucien Blé lui a donné un numéro de compte de l’Asecna qui n’est pas sur les livres de la coopérative. « Blé est introuvable depuis qu’il a eu écho de la plainte. Je demande la restitution de mes fonds versés à la banque et qui se montent à 30 millions », a dit l’avocat du plaignant à la barre. Blé n’a pas comparu malgré les multiples sommations et interpellations qui lui ont été servies.
L’avocate de la partie civile a estimé que les chefs d’abus de confiance, escroquerie et faux usage et faux sont constants. Elle elle a demandé au tribunal de condamner le président de la coopérative d’habitat des travailleurs de l’Asecna à la peine requise par le ministère public. Pour la réparation du préjudice subi par son client, elle a réclamé une somme de 50 millions de francs de dommages et intérêts. Pour sa part, le parquet a requis l’application de la loi pénale. Au final, l’affaire est mise en délibéré pour le 12 septembre prochain.
MORSURES DE SERPENT, PLAN ORSEC CONTRE UN REDOUTABLE FLEAU… RAMPANT
L’histoire de la mendiante mordue par un serpent, il y a quelques mois, dans le parking de l’aéroport de Diass remet sur le tapis la question des morsures de serpents en zone urbaine.
L’histoire de la mendiante mordue par un serpent, il y a quelques mois, dans le parking de l’aéroport de Diass remet sur le tapis la question des morsures de serpents en zone urbaine. Et notamment dans les quartiers périphériques de Dakar et sa banlieue comme les Mamelles, Ouakam, Ngor, Yoff, Guédiawaye, Rufisque, Malika et Pikine. Quelques semaines plus tard, le président libérien Georges Weah était contraint de déserter ses bureaux suite à l’apparition de serpents que les multiples opérations de fumigation entreprises alors n’avaient pas fait déguerpir ! Chez nous, malgré le plan « Orsec » du ministère de la Santé généralisant la disponibilité des sérums antivenimeux sur l’étendue du territoire national, les serpents, ces redoutables reptiles continuent toujours de nous harceler jusque dans nos habitations. Surtout en cette période d’hivernage où, généralement, les morsures de serpents se multiplient. Après le sombre passage des reptiles, médecins, pharmaciens, infirmiers et tradipraticiens déclenchent un branle-le-bas de combat contre la mort par morsures vénéneuses. « Le Témoin » a enquêté.
Pour mieux camper le débat « vénéneux » et traquer le reptile, retournons à l’aéroport Blaise Diagne de Diass. Il y a quelques mois, et comme nous l’avions révélé, une femme, mendiante de son état, avait été mordue par un serpent — un « scorpion » avait supposé l’administration de l’aéroport — dans le parking de l’Aibd. Un aéroport construit en pleine brousse et infesté de reptiles où la victime avait élu domicile voire… métier. Selon le département des Relations publiques de l’Aibd, la direction une fois informée, le dispositif de prise en charge des urgences de l’aéroport avait fait le nécessaire après avoir reçu l’information relative à cette morsure. « Un traitement lui (Ndlr, à la mendiante) a été administré et en particulier du sérum antivenimeux. Ensuite, elle a été transférée à l’hôpital Principal de Dakar (…) » avait rassuré l’Aibd. Depuis cette triste et insolite histoire, le mythe entourant le serpent était sorti subitement de sa cachette… avant d’être éclipsé par l’actualité. Mais à la faveur de l’hivernage, la prise en charge médicale des victimes de morsures de reptiles semble de nouveau à l’ordre du jour. Surtout dans des zones urbaines ou résidentielles comme les Mamelles, Ouakam, Ngor, Yoff, Guédiawaye, Rufisque, Malika et Pikine où les « alertes » aux serpents sont rares, mais demeurent une préoccupation majeure dès qu’un cas de morsure est signalé quelque part à travers le territoire national.
L’inquiétude est alors d’autant plus de mise que nombreux sont les urbains qui pensent que les médecins de ville (Dakar) ne sont pas bien préparés ou outillés pour une bonne prise en charge des patients « envenimés ». Ce, contrairement aux médecins de brousse qui pratiquent dans les zones rurales les plus reculées et isolées de Casamance, Tambacounda, Kédougou et la Vallée du fleuve où les envenimations par morsures de serpents sont courantes. Des craintes sans fondement et des considérations battues en brèche par les directives du ministère de la Santé généralisant la disponibilité des sérums antivenimeux sur l’étendue du territoire national. Une bonne politique de santé que Dr Kalidou Ba, médecin-chef du district sanitaire de Koumpentoum (Tambacounda), magnifie à sa juste valeur. « Depuis plus de cinq ans, le ministre de la Santé avait donné des directives exigeant que le sérum anti-venin soit positionné dans tous les postes de santé du Sénégal. Comme quoi, chaque structure sanitaire doit stocker au moins une dose d’anti-venin pour les cas d’urgence de morsures de serpent. Malgré la cherté du sérum, qui coûte 47.000 francs la dose bien que subventionné, nous sommes obligés de l’acheter et le conserver pour traiter tout patient victime d’une morsure de serpent qui se présenterait » rassure notre interlocuteur. Officiant dans l’une des zones les plus touchées par le fléau des morsures de serpents, Dr Ba dit que les accidents par morsure de serpents sont très fréquents à Tambacounda où les vagues de chaleur frôlant les 40 degrés ne sont pas rares. « Dans des régions comme Tambacounda, Kédougou, Kaolack ou Ziguinchor englobant de nombreuses zones rurales, c’est normal que des serpents fuient la chaleur prévalant dans leurs trous pour se réfugier dans des habitations. Une cohabitation facteur de risques de morsures » explique Dr Kalidou Ba, médecin-chef du district sanitaire de Koumpentoum situé dans la région de Tambacounda.
Sur les mêmes traces venimeuses, Dr Abdou Ndiaye, médecin-chef adjoint au district sanitaire de Sakal (Louga), confirme que les directives du ministère de la Santé généralisant la disponibilité des sérums antivenimeux ont fait reculer le nombre de décès par morsures de serpents « parce que ces directives bien suivies par la direction de la Prévention nous obligent à nous approvisionner en sérums antivenimeux pour les prépositionner au niveau des postes de santé. Ce dispositif permanent garantit une bonne prise en charge des patients victimes de morsures pouvant provoquer une envenimation. Car, il est bon de souligner que ce ne sont pas toutes les morsures de serpent qui entraînent une envenimation. Il y a des exceptions ! Toujours est-il qu’au niveau de notre district, les rares cas signalés ont été bien pris en charge » se félicite Dr Abdou Ndiaye.
« Wouyay diaane ! »
Selon une récente étude réalisée par Pronasef, les serpents tuent presque autant que les accidents de la circulation au Sénégal avec près d’une victime par jour. Et sur les 81 espèces recensées en Afrique de l’Ouest, notre pays se taille la part du… reptile avec 70 % des serpents connus. Ce qui explique que la mortalité par envenimation soit beaucoup plus importante au Sénégal que dans les pays voisins avec près de 8.000 morsures de serpents par année dont 300 mortelles. En effet, ces chercheurs de la Direction des Eaux et Forêts s’alarment du nombre important de ces décès qui surviennent en particulier en milieu rural et dans les zones humides abondamment arrosées lors de la saison des pluies. Or, l’hivernage, nous y sommes justement ! Malheureusement, la région de Dakar n’est pas à l’abri. Car les résultats de l’enquête révèlent que des espèces de serpents comme le cobra, la vipère et le boa se meuvent dans nos « entrailles ». Et particulièrement dans les quartiers périphériques tels que Hann, Ngor, Ouakam, Yoff, Rufisque, Mbao, Guédiawaye, Pikine, Malika, Mamelles etc. où ces dangereux reptiles échouent périodiquement dans les jardins, les égouts, les eaux stagnantes, les jardins maraichers, les poubelles et les cimetières. Et n’hésitent pas à rentrer dans les maisons pour s’y réfugier. Comme ce fut le cas à la Patte d’oie, Gueule-Tapée et Cité Pépinière de Pikine où les sapeurs-pompiers ont eu à intervenir suite à des alertes aux serpents : « Wouy diaane !»
Le règne des tradipraticiens en milieu rural
Compte tenu des millions de cas d’envenimation enregistrés à travers le monde chaque année, l’Organisation mondiale de la santé (Oms) a jugé nécessaire d’inscrire les morsures de serpents sur la liste des fléaux et des maladies tropicales négligées à anéantir. Surtout en Afrique subsaharienne où les morsures de serpents entrainent près de 30 000 décès annuels, et autant de séquelles invalidantes. Dieu sait que ce ne sont pas les sérums de sauvetage qui manquent, mais s’il y autant de morts, c’est parce que les patients n’ont pas bénéficié d’une prise en charge rapide. Surtout en milieu rural où ils sont pour la plupart loin des postes de santé et plus encore des hôpitaux. A cela s’ajoute la cherté de l’anti venin qui coûte environ 50.000 cfa dans les postes de santé et 80.000 cfa dans les pharmacies privées. Face à ce dilemme qualité prix ou prix-vie, les malheureuses victimes, pour qui le temps est compté pourtant, préfèrent aller se faire « soigner » chez les tradipraticiens du village alors que le sérum anti-venin est susceptible de les sauver. Mais est malheureusement hors de leur portée financière ! Une situation que déplore Dr Alfousseyni Diallo, médecin-chef du district sanitaire de Makacolibantang (Tambacounda). « Vous savez, nous sommes dans une zone où les gens sont très conservateurs. A cet effet, la plupart des victimes de morsures de serpents font recours aux guérisseurs traditionnels ou tradipraticiens utilisant leur savoir-faire à base de plantes et autres incantations magico-religieuses. C’est pour cela que nous ne recevons pas assez de cas bien que le fléau des morsures soit bien réel dans cette région infestée de reptiles. En tout cas, il est temps de multiplier les campagnes d’information et de sensibilisation en milieu rural car le sérum antivenimeux soigne efficacement les envenimations dues aux différentes espèces de serpents » explique Dr Diallo, médecin de…brousse. Dans les sociétés comme la notre, la peur des serpents compte parmi les phobies les plus répandues. Selon nos professionnels de la santé, les morsures de serpents venimeux peuvent entraîner une paralysie pouvant bloquer la respiration (mort subite), des troubles sanguins aboutissant à des hémorragies fatales, des insuffisances rénales irréversibles ou des lésions tissulaires susceptibles de provoquer des incapacités définitives et de nécessiter l’amputation d’un membre. Pire, se remettre d’une morsure de serpent n’est pas évident du fait que, chez de nombreuses victimes, la réaction ou l’évacuation est souvent trop tardive et trop lente par rapport à la vitesse d’action du venin qui, dans certains cas, peut provoquer la mort en quelques minutes voire heures seulement.
Anti-venin introuvable en pharmacie !
Selon une idée follement répandue, il est conseillé en cas de morsure d’identifier le type de serpent. Et dans le « meilleur » des cas de l’attraper afin de couper la tête en guise d’« échantillon » puisqu’il est dit que l’efficacité du sérum anti-venin, ou la bonne prise en charge médicale, dépend de l’espèce. Mais comment peut-on, dans une telle situation de sauve-qui-peut ou de panique, avoir le reflexe d’identifier le monstre, à plus forte raison se lancer à sa poursuite pour le rattraper pour le tuer ? Bigre ! Pour le Dr Assane Ka, pharmacien, la question n’est pas « idiote » d’autant que, scientifiquement, il est prouvé que l’efficacité du traitement dépend de l’identification de l’espèce « parce que le venin est propre à chaque espèce. C’est pour cela que les sérums anti-venins sont propres à chaque espèce de serpent. Mais aujourd’hui, l’identification de l’espèce n’est plus une priorité d’urgence car il existe des sérums polyvalents, valables donc pour n’importe quelle morsure de serpents. D’ailleurs, ces sérums anti-venins polyvalents ou universels sont commercialisés dans toutes les pharmacies ainsi que les districts sanitaires du Sénégal » rassure notre pharmacien très connu à Thiaroye-gare. Ce que semble oublier notre spécialiste des médicaments, c’est que la plupart des officines de pharmacie ne s’approvisionnent pas en sérums anti-venins à cause de leur cherté qui fait que c’est un produit qui ne s’écoule pratiquement pas. Ou alors souffre d’une insuffisance de demandes ! Et comme les pharmaciens ne veulent pas de produits qui restent trop longtemps en stock… Est-ce une raison pour ne pas s’encombrer de produits susceptibles de traiter un fléau considéré comme un problème de santé publique ? « Non, ce n’est pas une raison ! » convient Dr Assane Ka qui ajoute que « les pharmacies sont obligées de s’approvisionner en anti-venins polyvalents, ne serait-ce qu’une dose en cas d’urgence. Qu’importe le coût du sérum ou la rareté de clients, le produit doit être toujours disponible en pharmacie » tranche-t-il. Décidément ! Vous voyez comment la légère morsure d’un serpent ou le moindre frôlement d’un reptile peut provoquer un branle-bas de combat contre la mort. Un chanteur à succès ne disait-il pas que « kou diaane maat, sa khel dem thi dé... » ?
«DANS DES CAS DE MORSURES D’ORIGINE MYSTIQUE, LES MEDECINS SONT IMPUISSANTS…»
Lamarana Cissokho soutient surtout exceller dans le traitement des cas de morsures de serpents.
Domicilié à Keur Mbaye Fall, dans la banlieue dakaroise, Lamarana Cissokho est un guérisseur traditionnel. Originaire de la Guinée-Conakry, ce quadragénaire prétend être doté d’un savoir empirique, quelques fois mystique ou spirituel, le rendant capable de deviner la cause d’une maladie avant de la soigner. Lamarana Cissokho soutient surtout exceller dans le traitement des cas de morsures de serpents. A travers cet entretien, notre tradipraticien livre son expertise étiologique et son traitement thérapeutique qui visent entre autres à neutraliser le venin et à sauver le malade.
Le Témoin : Quels sont les types de serpents et de morsures auxquels vous êtes confronté dans l’exercice de votre métier de tradipraticien ?
Lamarana Cissokho : D’abord, permettez-moi de vous rappeler que l’Afrique renferme les serpents les plus dangereux au monde. Et la plupart de ces espèces se trouvent au Sénégal comme dans tout pays chaud et humide. Il y a des pythons, des boas, des cobras, des vipères, des anacondas etc. Parmi ces types de serpents, certains sont offensifs, d’autres inoffensifs ! Cependant, même parmi les offensifs, il y a une différence sur le degré de dangerosité car certains de ces reptiles sont provocateurs et attaquent dès qu’ils font face à un être qui n’est pas leur semblable. Particulièrement s’il s’agit d’un homme. Par contre, il y a des serpents qui mènent leur existence de façon secrète, fuyant même la présence humaine comme n’importe quel animal sauvage. Mais lorsqu’ils sont dérangés, ils sont capables de réagir cruellement. Donc, pour répondre à votre question, je suis confronté à plusieurs espèces de serpents. Il faut préciser que, chez mes patients, le degré de morsure n’est pas important car la gravité de cette morsure d’un serpent réside dans le degré de toxicité et la quantité de son venin qui varient d’une espèce à l’autre. Par exemple, les serpents de couleur blanchâtre appelés vipères sont les plus mortels car leur venin peut provoquer une paralysie rapide suivie d’une mort au bout de quelques minutes. Par contre, il y a certaines espèces de vipères dont l’envenimation entraine une douleur intense, un gonflement autour de la morsure ainsi que des nausées, vomissements, diarrhées, accélération du rythme cardiaque etc. Et si la victime n’est pas rapidement prise en charge, elle décède à terme. En ma qualité de tradipraticien, j’ai eu à secourir plusieurs patients victimes de divers cas de morsures et d’envenimation.
Comment traitez-vous ces cas de morsures de manière traditionnelle ?
Principalement, j’ai deux façons de traitement traditionnel par rapport aux morsures de serpents. Mais avant tout prise en charge, on commence par diagnostiquer la zone de la morsure sur le corps du patient avant de l’interroger sur la nature du reptile en cause pour pouvoir déterminer le type de soins le plus efficace et le plus approprié. Donc en ce qui me concerne, je procède d’abord aux évocations d’ordre mystique dont je suis dépositaire pour amoindrir la douleur. Ensuite, j’utilise des potions de plantes médicinales qui peuvent être des feuilles, des tiges, des racines, des fleurs, des graines, des fruits ou tout mélange aboutissant à une décoction que le patient doit absorber. Il y a aussi des traitements à application locale ou utilisés comme bain chaud. Et dans d’autres prises en charge thérapeutiques où la nature du reptile est connue, je délivre aux patients des antidotes pour bain de corps, séances de massage etc…Il est bon de révéler que j’ai eu à recevoir des patients mordus par des serpents ayant agi par manifestations mystiques et surnaturelles. Dans tous ces cas, l’usage d’incantations mystiques ou rituelles serait plus approprié pour soigner le malade. Ou alors conjurer le mauvais sort émanant du reptile.
Dans ce dernier cas de figure, peut-on dire que la médecine moderne recèle des limites ?
En tout cas, je vois mal comment des professionnels de santé pourraient prendre en charge des patients mystiquement atteints par une morsure de serpent ! A mon avis, il n’est pas interdit d’affirmer que, dans certains cas de morsures d’origine occulte ou mystique, la médecine moderne voire conventionnelle atteint ses limites et est incapable de soigner ces patients particuliers.
Pouvez-vous nous donner une idée du coût de vos prestations dans ce domaine ?
Vous savez, le traitement traditionnel des cas de morsures de serpents n’est pas chose aisée. Et surtout quand il s’agit d’une question de vie ou de mort nécessitant une course contre la montre. Parce que les venins sont des poisons d’origine animale représentant des armes d’attaque ou de défense d’un animal sur une autre espèce, y compris l’homme. Si certains animaux ont des cornes ou des griffes pour se défendre, d’autres n’ont que leur venin comme arme de survie dans la jungle. Le venin est une arme redoutable qui, une fois injectée dans le sang, provoque une coagulation rapide. Et dans d’autres cas, le venin entraîne des infarctus ou des accidents vasculaires cérébraux. Face à ces situations d’urgence, c’est notre expertise qui est mise en jeu. En ce qui me concerne, dans ce sens, la prise en charge se fait par rapport au type de serpent. Pour les reptiles dangereux dont les morsures sont difficiles à soigner, il faut débourser au minimum 500.000 cfa. Mais, il existe aussi d’autres types de serpents dits « noirs » dont les coûts de soins des morsures tournent entre 100.000 et 300.000 cfa. Parfois, il arrive certains cas mineurs où le traitement est simple et la somme à payer peut être fixée même à 5.000 cfa.
Et que faites-vous lorsque vous êtes confronté à des patients dans une situation d’extrême urgence ?
Ecoutez, nous sommes des tradipraticiens ou guérisseurs traditionnels. Juste pour vous dire qu’il y a des cas que nous ne pouvons pas régler. Moi personnellement, les patients qui arrivent tardivement, ici, avec des symptômes et pathologies compliqués, je les oriente vers les hôpitaux. Cependant, j’ai une fois reçu un parent victime de morsure et disant avoir bénéficié de plusieurs soins à l’hôpital, mais sans succès ! Il souffrait de douleur atroce au niveau du pied. Par peur, ce patient est venu solliciter mes soins traditionnels.
Avez-vous une anecdote relative à un de vos patients ?
D’abord, il faut noter que, depuis le début de cette année en cours, j’ai reçu cinq patients victimes de morsures de serpents. Je me rappelle qu’une fois, c’était un jeune garçon accompagné de ses parents qui était venu me voir, un soir, pour bénéficier de mes soins médicaux. Mais arrivé ici, la jambe était enflée au point que le garçon marchait à peine. Les symptômes se manifestaient par une forte fièvre suivie d’une faiblesse totale. Le garçon avait été mordu par un serpent aux alentours d’une maison en construction dans son quartier à la périphérie de Dakar. Le venin avait commencé à se propager dans son corps. Nous avons arrêté toutes nos activités pour lui effectuer une prise en charge urgente. Apres plusieurs formules incantatoires, j’ai fait des recours à des plantes médicinales. Aujourd’hui, Al hamdoulillah, le garçon se porte bien. Il est sauvé et guéri...
Par Gora N’DIAYE
REBEUSS HOTEL
Conversation fictive entre Guy Marius Sagna et le président Macky Sall
Un petit salon dans un quartier de la banlieue dakaroise. Un homme y est assis, seul, dans un fauteuil et regarde les images défiler sur une télévision à écran plat. Sur une petite table en bois d’ébène reposent un téléphone et un vase en porcelaine.
Driing !...Driing !...
Oui, Allo ?...
Allo, Guy-Marius Sagna ?...
Lui-même à l’appareil, à qui ai-je l’honneur ?....
Au premier de tous les citoyens de ce pays ! Prési Mack’s Niangal alias wathiathia himself!...
Eh ! Ça alors ! Quelle surprise majest…eh, pardon, excellence…J’aurais quand même dû reconnaître votre belle voix suave, votre voix de baryton !...Toutes mes excuses !...
Bon…bon…ça va… ça va… amul solo…
Excellence, que me vaut un si grand honneur ?!...
Ah bon, tu ne le sais pas ?! (la voix devient subitement agressive) Eh bien je vais te le dire : Guy-Marius Sagna je n’ai pas, mais alors pas du tout apprécié les insanités que tu as osé dire à propos du système sanitaire de notre pays !
Mais excellence, ce ne sont pas des insanités….Je n’ai fait que dire la vérité !...
La vérité ! Mon œil ! Des balivernes oui ! Rien que de fausses allégations, du dénigrement !...
Excellence, malgré tout le respect que je vous dois, permettez moi de vous dire que je ne suis pas d’accord avec vous et je maintiens que mes propos ne sont que l’exact reflet de la réalité.
Ça c’est toi qui le dis ! Je ne suis pas obligé de te croire et puis, sache que toute vérité n’est pas bonne à dire, surtout que tu as choisi le plus mauvais moment pour le faire ! Juste après le départ pour l’au-delà de l’un de mes potes préférés ! Alors là, tu as exagéré !
Écoutez excellence, je m’excuse sincèrement si j’ai pu vous blesser ou toucher votre amour-propre, ce n’était pas du tout mon intention….
Ouais…Tu aurais mieux fait de ne pas l’ouvrir !
Tu m’as causé un grand tort !
Mais…
Il n’y a pas de mais ni de si ! Tu as déconné grave et je voudrais donc que tu arrêtes avec tes sorties incendiaires ! Tu es un pyromane et je te soupçonne de vouloir f… le feu au pays !
Encore une fois excellence je vous prie de croire que je n’ai pas cherché à vous faire mal mais à dire ce qui est, tout simplement… Vous savez, je ne peux pas m’empêcher de dire la vérité, c’est plus fort que moi, j’ai ça dans le sang…
Hum….
Oui, la vérité pour moi, c’est comme l’oxygène que je respire, si Je l’étouffe si je la refoule, elle m’asphyxie… Mes ancêtres affirmaient que ne pas dire la vérité équivalait à avaler du poison, un poison qui vous tue lentement mais sûrement…
Cesse de faire l’intéressant avec tes histoires à dormir debout, je connais des historiens mille fois plus chevronnés que toi, tu veux seulement faire le buzz !
Moi faire le buzz ? Voyons excellence je ne suis pas une abeille !
Abeille ou singe sache que ta manie de dire la vérité n’importe où et n’importe quand peut te coûter cher, très cher même ! j’ai horreur des gens qui se prennent pour des diseurs de vérité ! Dans notre pays il n’y a que des bonimenteurs et il n’y a qu’une seule vérité : la mienne ! tu as bien compris ? Tu as intérêt à bien te caler ça dans ta caboche de Mancagne !
Excellence, malgré tout le respect que je vous dois, je ne cesserai jamais de dire la vérité, dussé-je y laisser ma peau !... Autre chose, je ne suis pas Mancagne, mais Diola !
Mancagne, Diola, Bassari, tout ça c’est du pareil au même !...Bon, maintenant écoute moi bien Guy-Marius, malgré toutes les bêtises que tu fais j’ai une certaine sympathie pour toi et je pourrais même t’enrôler dans ma garde rapprochée si tu changes ton fusil d’épaule…
Oh, merci excellence, vous êtes vraiment généreux ! Vous savez moi aussi je vous porte en grande estime, et c’est pourquoi j’ai choisi de vous dire la vérité car je sais que vous n’avez pas souvent l’occasion d’en entendre la douce musique autour de vous !...
Guy-Marius arrête de jouer au poète ! Tu m’énerves à la fin ! Tu finiras par me rendre méchant !
Excellence, je ne suis pas poète mais agent de la santé… Mais dites moi, n’auriez vous pas un lien de parenté avec Achille Talon par hasard ?
Achille Talon ?...C’est qui ce gus là ?... Est ce que tu ne serais pas en train de te payer ma tête ? Fais gaffe dé ! Moi je ne badine pas avec ces choses là et c’est d’ailleurs bien pour ça qu’on me surnomme « le sévère » !
Mais excellence je ne me paie pas votre tête, cela ne me serait jamais venu à l’esprit ! Mais puisque vous ne semblez pas le connaître, Achille Talon est un héros de la mythologie vaudou du Bénin et si vous étiez amateur de bandes dessinées vous l’auriez su…
Guy-Marius pour la dernière fois, arrête de faire le mariole, ma patience est à bout !
Excellence, sauf votre respect, je n’aime pas du tout votre mauvais petit jeu de mot. Je porte le prénom de mon arrière-grand-père maternel Essamaye-Guy-Marius Diatta et je ne permets à personne d’en faire de la marmelade ; d’autre part, je vous prie de ne plus me tutoyer ; nous n’avons pas gardé les vaches ensemble que je sache…
Ah bon ! c’est comme ça ! Espèce d’insolent ! tu vas me le payer cher ! Tu ne perds rien pour attendre ! Sois sûr que tu auras bientôt de mes nouvelles, péquenot ! (il raccroche avec violence)
Et toi des miennes, tyranneau ! Ah ! Ah ! Ah ! Ah !
(rideau)
Gora Ndiaye est Dramaturge, metteur en scène
OUSMANE SONKO À L'OFFENSIVE
Le leader de Pastef a joint l’acte à la parole. Ses avocats viennent de déposer deux plaintes, l’une contre Mamour Diallo, et l’autre contre la commission d’enquête parlementaire
Ousmane Sonko a joint l’acte à la parole. Ses avocats viennent de déposer deux plaintes, l’une contre Mamour Diallo, et l’autre contre la commission d’enquête parlementaire.
L’annonce avait été faite par le leader de Pastef LesPatriotes, face à la presse le 2 juillet dernier. L’opposant annonçait qu’il va traîner en justice les membres de ladite commission parlementaire pour « divulgation de secrets de l’enquête » dans l’affaire relative au dossier des 94 milliards FCFA, en maintenant ses accusations contre l’ex-directeur des Impôts et Domaines, Mamour Diallo. Dans ce sillage, Sonko, qui s’est constitué partie civile, entend saisir le Doyen des juges d’instruction.
La déclaration de ses avocats est attendue au Tribunal de Dakar. Affaire donc à suivre.
DERNIERS HOMMAGES À UN « MISSIONNAIRE DU PROGÈS SOCIAL »
Dans l’enceinte de la morgue, les témoignages étaient unanimes : « Jacques Diouf était un homme bien ». Les six orateurs qui se sont succédé au micro ont tous relevé le caractère humaniste du défunt.
La morgue de l’hôpital Principal Dakar a refusé du monde. Parents, amis, sympathisants ou encore anciens collaborateurs sont venus rendre un dernier hommage à l’ancien Directeur de la FAO, Jacques Diouf, décédé samedi dernier, 17 août, à Paris.
Dans l’enceinte de la morgue, les témoignages étaient unanimes : « Jacques Diouf était un homme bien ». Les six orateurs qui se sont succédé au micro ont tous relevé le caractère humaniste du défunt. « Il était un missionnaire incontestable du progrès social », dira l’ancien ministre de l’Agriculture et de l’Equipement rural, Papa Abdoulaye Seck.
L’Etat du Sénégal, par le biais du ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop a aussi rendu hommage à son illustre fils.
Sur le cercueil, enveloppé du drapeau national et porté par six gendarmes, était posté une médaille du Commandeur de l’ordre national du Lion. Une décoration à titre posthume du ministre au nom du président de la République, Macky Sall.
Après la levée du corps, le corbillard de la dépouille de Jacques Diouf s’est ébranlé vers Saint-Louis où l’ancien directeur de la FAO sera inhumé, cet après-midi, auprès des siens.
ENTRE INFANTICIDE ET PARRICIDE
D’Idrissa Seck à Oumar Sarr, Maitre El Hadj Amadou Sall et consorts, la plupart de ceux qui ont quitté le Parti démocratique sénégalais ont accusé Wade fils, devenu le parfait bouc-émissaire
Pourtant, les même l’ont toujours adulé, tant qu’ils étaient dans les bonnes grâces du Maitre, prenant même à partie tous ceux qui ont osé s’en prendre au “fils adoré’’ qu’ils voulaient porter à la tête du Sénégal.
Ce sont des histoires où l’on ne sait jamais si c’est le père qui déjoue une tentative de parricide de la part de ses enfants ou bien le contraire. C’est-à-dire le pater lui-même qui serait tenté d’assassiner froidement tout enfant qui contesterait son héritier désigné.
En tout cas, si l’on en croit le journaliste Cheikh Yérim Seck, la fronde actuelle qui sévit au Parti démocratique sénégalais ne devrait surprendre personne. “Elle couvait depuis longtemps. Elle attendait juste un élément déclencheur qui est venu avec le réaménagement stalinien du Secrétariat national par Maitre Abdoulaye Wade. Cela a servi de détonateur’’, analyse l’ancien journaliste de “Jeune Afrique’’. Et le combat ne fait que commencer. Il s’annonce même très âpre, selon nombre d’observateurs. Pour le moment, on s’observe des deux côtés. Mais les crépitements des bombes ne vont certainement pas tarder à se faire entendre. Pendant que les bannis annoncent une conférence de presse aujourd’hui, du côté du nouveau task-force, on affûte encore les armes et on attend la convocation du Secrétariat national avant de dévoiler la stratégie à adopter. Celle-ci ne saurait tarder, nous confient certains responsables. Un des nouveaux hommes forts invite d’ailleurs l’opinion à ne pas tomber dans le piège des dissidents. Selon lui, ces derniers, en boudant, ont fait preuve d’enfantillages. Karim Wade, à l’en croire, serait “une proie facile’’ qui attire tous les détracteurs du Pds. “Il est la cible privilégiée et des opposants et des dissidents. C’est un incompris. Mais ça, c’est le propre de tous les grands hommes. Ce que tout le monde peut constater, c’est que tant que ces gens étaient dans les schémas de Wade, ils ne pipaient mot. En plus, ce que Karim Wade fait pour le bon fonctionnement du parti, aucun d’entre eux ne le fait. Bien que le parti leur ait tout donné’’.
Notre interlocuteur d’indiquer que dans le parti, c’est soit Wade qui finance les grandes activités comme les élections, soit Karim. “Personne ne cotise. C’est vrai que ces responsables mettent leurs moyens, mais uniquement pour entretenir leur propre base. Quand nous devons aller à des élections, c’est Abdoulaye Wade et Karim qui financent’’, précise-t-il. La vie du Parti démocratique sénégalais est ainsi faite. Il y en a peu qui dégainent. Abdoulaye Wade est la seule constante. Karim Wade, le fils préféré. Les autres, des enfants d’emprunt qui doivent obéir à la lettre.
Depuis 2005, avec la rupture de ban d’Idrissa Seck, ancien principal collaborateur du secrétaire général, les choses semblent claires. Attaqué de toutes parts par des caciques, dont les nouveaux bannis, ce dernier alertait dans son fameux Cd “Lui et Moi’’. Il disait : “Si, au moment d’écouter ce Cd, je suis en prison ou déjà mort, sachez que ceux qui m’auront imposé l’un quelconque de ces états ont une motivation qui est, depuis longtemps, en germe. Tenter de punir et détruire le fils d’emprunt après usage. Un fils pour qui loyauté n’est pas synonyme de génuflexion, un fils qui ne se prosterne que devant Dieu, plus digne de sa crainte et de son respect.’’ Pour le camp d’Idrissa Seck ainsi qu’une bonne partie de l’opinion, tout cela procédait d’une volonté de l’ancien président d’imposer à tout le monde son fils biologique. Karim Wade n’avait alors que 36 ans.
Quand Macky Sall, Samuel Sarr, Me Madické Niang, Oumar Sarr et Cie combattaient Idy pour me Me Wade
Ironie de l’histoire, à l’époque, c’étaient les Macky Sall, Samuel Sarr, Maitre Madické Niang, Oumar Sarr, El Hadj Amadou Sall, Aïda Mbodj, Modou Diagne Fada, Farba Senghor, Pape Samba Mboup, Souleymane Ndéné Ndiaye, entre autres, qui n’hésitaient pas d’aller au front pour en découdre avec les pro-Idy. C’était l’ère de ce qu’il était convenu d’appeler la “Deseckisation’’ et dont l’un des plus grands animateurs médiatiques était l’actuel Pca de la Rts, Ndiogou Wack Seck.
Dans ce combat fratricide, certains faucons se montraient même parfois plus durs dans le discours que Wade lui-même. L'alors président de la République, dans un entretien publié par “Ja’’ le 12 octobre 2004, juste au lendemain du limogeage de Seck, disait : “Je ne peux pas dire qu’Idrissa Seck ne reviendra plus à mes côtés. Le mot jamais ne s’emploie pas en politique. Mais Idy s’est mis à dos plusieurs de mes proches collaborateurs, ainsi que de nombreux responsables et militants du parti. Il a abusé de ma confiance, tenté de casser mon parti à mon insu pour le remodeler en fonction de ses ambitions présidentielles…’’
A l’époque, pour beaucoup de ceux qui s’agitent aujourd’hui, et ceux qui ont déjà quitté la formation libérale, Wade avait totalement raison. Idy, totalement tort. Karim était blanc comme neige. Idy, totalement coupable de tous les péchés. C’est ainsi la galaxie des Wade. Tant qu’on est dedans, les choix du père, “seule constante’’, sont les meilleurs. Son fils, Karim Wade, érigé en modèle. Une fois en disgrâce, on change de fusil. On invoque la tentative de “dévolution monarchique’’ pour entrer dans les bonnes grâces de l’opinion amnésique. Une recette qui paie, même pour ceux qui étaient considérés comme les “pires’’ exemples de l’ancien régime. En l’occurrence, Papa Samba Mboup, ancien chef de cabinet de Wade, cité dans l’affaire des marteaux de Talla Sylla, mais aussi Farba Senghor, supposé commanditaire des attaques perpétrées à l’époque contre des journaux de la place. Mais le promoteur du site “Yérim post’’ ne semble pas le voir de cet œil. Il met ce silence coupable des victimes d’aujourd’hui sur le compte de la nécessaire discipline de parti. A la question de savoir si on ne peut pas opposer à Oumar Sarr et Cie leur mutisme antérieur, sa réponse est catégorique : “Non. Discipline de parti oblige. Ils ne pouvaient que ravaler leurs frustrations jusqu’à ce que celles-ci dépassent les limites du supportable.’’ Pourtant, Idrissa Seck, parti en 2004, Macky Sall est arrivé. Dans son discours, Wade était presque un dieu. Réputé proche de Karim à l’époque, il est resté à son poste de 2004 à 2007. Devenant, du coup, le recordman au poste privilégié de Premier ministre durant le premier mandat de Wade. Après la réélection de ce dernier, en 2007, il a été déplacé de la Primature à l’Assemblée nationale. Mais pour certains analystes ainsi que ses proches, c’était une volonté de Wade de l’éloigner du cercle des potentiels successeurs. C’est le début des grabuges avec la Wade Family.
L’ancien numéro 2 anime l’aile dure, poste laissé vacant depuis le départ d’Idrissa Seck. Avec certains caciques dont Mamadou Seck qui va lui aussi abandonner la barque libérale, après la perte du pouvoir, ils entreprennent de convoquer le “fils adoré’’ de Wade, pour reprendre “Ja’’, à l’Assemblée. L’argument brandi était surtout de rendre compte de sa gestion contestée à l’Agence nationale en charge de la conférence islamique. S’ensuit une guerre sans merci entre Pro et anti Macky. Laquelle va déboucher sur le départ de ce dernier du Pds et son accession à la magistrature suprême. Et comme jamais deux sans trois, à partir de ce moment, presque tous ceux qui quittent le Pds ont eu à invoquer directement ou indirectement le même argument. Jusqu’à Souleymane Ndéné Ndiaye, lui aussi ancien Premier ministre comme Macky Sall et Idrissa Seck.
Dans une interview avec le site “Pikini’’, il confiait avoir quitté le Pds, parce que la manière dont le candidat (Karim Wade) avait été désigné ne l’avait pas plu. “Il n’a pas la légitimité. Moi, j’ai plus de légitimité, car j’ai rampé dans ce parti. Je n’ai pas attendu jusqu’en 2000 pour prétendre à des postes. S’il ne s’agissait que de dévolution monarchique, le président Wade ne serait jamais président de la République du Sénégal. La République, ce n’est pas une affaire d’héritage. Karim, on ne l’a vu qu’en 2000. Et même là, il n’a pas adhéré au parti, il a préféré créer une structure parallèle, la Génération du concret. Et aucun des membres de cette structure ne faisait partie du Pds. Moi, je le sentais venir, depuis le début. Moi, personne ne peut me contraindre à me ranger derrière quelqu’un. Mon père faisait partie des responsables du Ps dans le département de Gossas. Cela ne m’a pas empêché de militer au Pds, à l’époque’’.
Seulement, l’ancien homme fort de Guinguinéo, qui peine depuis la perte du pouvoir, était de ceux-là qui combattaient et Macky Sall et Idrissa Seck qui n’ont eu de tort, selon nombre d’observateurs, que de prêcher la même position. Bien auparavant, d’autres éminents responsables comme Pape Diop, qui a eu même en 2009 à abandonner son rêve de rempiler à la mairie de Dakar au bénéfice de son “jeune frère’’, Serigne Mbacké Ndiaye, la voix de Wade défenseur invétéré de Karim et bien d’autres avaient déjà pris la tangente d’un Parti démocratique sénégalais où il n’y a plus de gâteaux à distribuer. A chaque fois, c’est une histoire d’ambition étouffée, tant que le parti libéral était au pouvoir.
La dernière rébellion
Parmi les nombreux départs, il y a également Habib Sy, écrasé à Linguère par Aly Ngouille Ndiaye, Amadou Kane Diallo, Sada Ndiaye, pour ne citer qu’eux. Si l’on en croit Jules Ndéné, ces derniers ont même servi, en quelque sorte, de marionnettes à Wade pour légitimer la candidature de Karim Wade à la Présidentielle de 2017 finalement tenue en 2019. Ceux-là sont certes beaucoup plus modérés dans l’anti Karimisme, mais, ils n’en demeurent pas moins des adversaires, depuis qu’ils ont quitté l’aile protectrice de Wade pour rallier les prairies marron. En tout cas, pour certains. Aujourd’hui, Oumar Sarr, en perte de vitesse à Dagana, Maitre El Hadj Amadou Sall, fervent défenseur de Wade, mais à qui on a toujours reproché une absence de base, Aziz Diop et consorts entrent dans le maquis. Pour l’heure, ils ne se sont pas beaucoup épanchés sur les raisons de leurs bouderies, mais il est fort probable que la volonté de confier le parti à Karim Wade n’y est pas étrangère. Si Wade est resté constant, depuis le début, en jetant son dévolu sur celui qui était nommé “ministre du ciel et de la terre’’, depuis belle lurette, l’on ne saurait en dire autant du maire de Dagana et Cie. Hier adulateurs, aujourd’hui détracteurs. Cela dit, avec le dernier “remaniement’’, tout le monde s’accorde que Karim et ses hommes ont été davantage renforcés.
Selon Yérim Seck, “il est le deus ex machina de tout ce qui se fait et défait au Pds. Par l’instrument de son père, il formate le parti et ses positions à sa guise, sans égard pour la moindre règle de forme, ni de bienséance. Les dissidents d’aujourd’hui ont ravalé beaucoup d’humiliations, avant de se rebiffer’’. Aujourd’hui, c’est ainsi l’avenir du Pds qui est en jeu. Certains comme Aïdara Sylla, homme de confiance de Wade, ont pris leur bâton de pèlerin pour recoller les morceaux. Des initiatives qui n’ont encore rien donné. Ce qui pousse à se demander, si on a atteint le point de non-retour, comme en 2005 avec Idrissa Seck ? Pour répondre à la même question à l’époque, Wade faisait usage d’une de ses boutades dont il avait, seul, le secret. “Quand vous échappez à la morsure du serpent venimeux, vous ne l’hébergez plus chez vous’’, disait-il dans le site français lexpress.fr.
«QUI RÈGNE PAR L’ÉPÉE PÉRIRA PAR L’ÉPÉE »
Chroniqueur à la RFM, le journaliste Abdoulaye Cissé analyse, pour « EnQuête », cette crise qui éclabousse le parti de Maitre Abdoulaye Wade
Cette défiance de caciques comme Oumar Sarr, Me Amadou Sall et Cie ne vient-elle pas tardivement ?
Ce n’est pas une question d’opportunité du moment, mais plutôt l’ultime bataille de survie que ces caciques, comme vous dites, doivent mener, s’ils veulent continuer à exister. Il faut avouer que le secrétaire général national du Pds ne leur laisse pas trop le choix : c’est soit s’aligner ou disparaître. Si vous prenez le seul exemple d’Oumar (Sarr), puisque vous le citez, s’il s’aligne, il n’est plus rien politiquement, pour parler de façon triviale et terre à terre. Donc, il faut bien faire des effets de manches, ne serait-ce que pour essayer de ramener Wade à reconsidérer sa nouvelle nomenclature. L’histoire du Pds a montré que face à Abdoulaye Wade, vous ne pouvez pas lutter de l’intérieur. Ou vous êtes avec lui ou il vous dégage. Et le Pds, à travers ses textes, lui en donne le pouvoir. Comme vous pouvez le voir, aucun de ceux qui sont en disgrâce ne dit que les décisions sont illégales ou infondées. Pour répondre plus directement à votre question : ce n’est pas que ça arrive tardivement, cette révolte des frondeurs, mais c’est maintenant ou jamais.
N’est-ce pas la fronde de trop pour le Parti démocratique sénégalais ?
Quand vous pensez à une fronde de trop, c’est que vous laissez entendre que cela peut exploser le Pds. Honnêtement, je ne crois pas. Ce sera juste une fronde de plus. Mais le Pds restera celui d’Abdoulaye. Honnêtement, vous savez, sans présager de quoi que ce soit, c’est plutôt Abdoulaye Wade qui a les clefs de survie de son parti. Mais on ne va pas se mentir, même si la vie ne tient pas forcément à l’âge avancé, Wade est plus sur la fin de carrière politique et même sur la fin de vie, osons le dire (même si on lui souhaite de rester encore longtemps parmi nous). C’est à lui de choisir de laisser une situation pour que le Pds lui survive. Mais ça, vous savez, ce n’est pas une spécificité du Pds. Trouvez-moi une seule formation sur l’échiquier politique dont on peut présager de l’avenir, à la disparition de son chef du moment. Il n’y en a pas !
On a remarqué que tant que certains responsables étaient dans les bonnes grâces de Wade, ils acceptaient de s’aligner. Une fois en disgrâce, ils brandissent l’argument de la dévolution monarchique. Quelle lecture en faites-vous ?
Je rigole de la question. Puisque la réponse est dans la question elle-même : bien évidemment, ca crève les yeux. Si je veux être cynique jusqu’au bout, je reprendrais le chanteur qui disait que celui qui règne par l’épée périra par l’épée. C’est le même système qui les a faits, ces frondeurs. C’est ce même système qui est en train de les bouffer. Reste à savoir s’ils vont être servis saignants, cuits à point, bien cuits ou mangés tout cru. Tout compte fait, c’est un supplice, ce combat. Ils vont lutter, mais ils vont retenir leurs coups face à Abdoulaye Wade. J’allais dire, presque par courtoisie et par reconnaissance à leur bienfaiteur d’hier. Je ne vois aucun de ceux qui s’opposent aujourd’hui ou plus exactement aucun de ceux qui ne se reconnaissent pas dans les décisions de Wade, aller à la confrontation directe avec Wade, tel un Mohamed Lamine Massaly qui avait entamé de vilipender un Abdoulaye Wade qu’il avait traité de tous les noms au lendemain de la Présidentielle. Tout le contraire d’un terme usité aujourd’hui : “Guerre bi dou meuna saf mondial’’, pour dire que ce ne sera pas une adversité féroce. En revanche, je ne suis pas de ceux qui vont reprocher à Oumar Sarr et Cie d’exprimer leur désaccord quand ils ne sont pas d’accord. Ce n’est jamais trop tard de mener un combat pour un “idéal’’.
Selon vous, Karim Wade est-il le parfait bouc émissaire ou coupable ?
Ecoutez, moi, j’aime qu’on ait de la mémoire. Je ne vois pas un seul de tous ceux qui sont choqués aujourd’hui par les décisions de Wade, s’interposer à l’époque où le vieux s’était pourtant fait plus clair dans sa tentative de dévolution monarchique du pouvoir avec son fameux ticket présidentiel. C’est la particularité au Pds : Karim Wade, comme n’importe quel autre militant ou responsable du Pds, est légitime à prétendre à des responsabilités, pourvu seulement que Wade soit disposé à lui donner et à le consacrer. Au Pds, plutôt que d’aller chercher une base politique et des militants, il faut chercher à être dans les bonnes grâces du “frère secrétaire général’’, comme ils aiment à l’appeler. Wade peut convoquer demain le Congrès du Pds, mais prendre auparavant les mesures pour changer la composition des délégués et des délégations, de sorte à avoir une assemblée du congrès qui lui soit toute acquise. C’est ça le Pds. Les textes du Pds le lui permettent en tant que Sg. Alors, en fin de compte, faut garder le bouc, mais changer d’émissaire. Le combat, c’est de se battre pour changer les textes et les attributs du “seigneur’’ secrétaire général national. Karim n’y est peut-être pour rien. Il a juste le malheur d’avoir les faveurs du décideur. Mais une fois qu’on a dit ça, on comprend que le fonctionnement du Pds est tout sauf basé sur les principes de démocratie interne. Pour un parti dit démocratique, j’avoue que ça l’a fiche mal.