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8 juin 2025
LE GROUPE PARLEMENTAIRE BENNO RÉAGIT À LA DISSOLUTION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Benno Bokk Yakaar estime que cette décision vise à empêcher le dépôt d'une motion de censure par la majorité parlementaire, une manœuvre perçue comme un détournement des institutions démocratiques du pays
Le 12 septembre 2024, le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a pris une décision qui bouleverse l'équilibre politique du Sénégal en prononçant la dissolution de l'Assemblée nationale. Cette action met fin au mandat des députés de la 14ème législature, suscitant des réactions fortes, notamment du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar (BBY).
Le groupe BBY, majoritaire à l'Assemblée nationale depuis les élections législatives de 2022, a pris acte de la décision présidentielle, mais ne cache pas son indignation. Dans un communiqué officiel, Abdou Mbow, Président du groupe parlementaire BBY, a dénoncé ce qu'il qualifie de "parjure" de la part du Président Faye. Le groupe fustige le timing de la dissolution, survenant en pleine session extraordinaire et à la veille de la déclaration de politique générale que le Président avait lui-même convoquée.
BBY estime que cette décision vise à empêcher le dépôt d'une motion de censure par la majorité parlementaire, une manœuvre perçue comme un détournement des institutions démocratiques du pays.
Des accusations d’abus de pouvoir
Le communiqué du groupe BBY va plus loin en accusant le Président et son Premier ministre de manipuler les institutions pour servir leurs propres intérêts politiques. Ces derniers, selon BBY, cherchent à dissimuler leur incapacité à résoudre les problèmes des citoyens sénégalais tout en consolidant leur pouvoir à travers des tactiques jugées "cyniques".
Pour Abdou Mbow, cette dissolution est une tentative flagrante de faire taire l'opposition parlementaire et d'éviter tout débat démocratique sur la gestion du pays. "Ces deux hommes s'amusent de nos institutions pour satisfaire leurs besoins politiques urgents", a déclaré Mbow.
Appel à la mobilisation citoyenne
Le groupe BBY a lancé un appel aux Sénégalais, les invitant à se mobiliser contre ce qu'il qualifie de dérive autoritaire. Ils encouragent les citoyens à utiliser les prochaines élections législatives comme une opportunité pour sanctionner ce qu’ils considèrent être une "gouvernance irresponsable".
Cette situation place le Sénégal à un carrefour politique important, où les choix des citoyens dans les prochains mois seront déterminants pour l'avenir démocratique du pays.
Cela correspond mieux au format d'un article, avec une structure plus journalistique.
ANTA BABACAR NGOM APPELLE À UNE RÉPONSE URGENTE APRÈS LES DRAMES DE MBOUR ET DE NDANGALMA
Lors d’un point de presse tenu aux Almadies, la présidente du mouvement ARC a dénoncé les tragédies répétées sur les routes et en mer. Elle exige une mobilisation collective pour mettre fin à cette « hécatombe »
Les réactions des politiques s’enchainent après le chavirement d’une pirogue au large de Mbour. Lors d’un point de presse tenu ce mercredi, en marge de la réception de la communauté mandingue aux Almadies, Anta Babacar Ngom Diack a dénoncé les drames répétés sur les routes et en mer et exigé une «réponse nationale urgente face à cette hécatombe».
Après avoir rappelé les tragédies précédentes, la présidente du mouvement Alternative pour une relève citoyenne (Arc) a indiqué que «le drame de Mbour et l’accident de Ndangalma n’en sont que les plus récentes illustrations », soulignant que «nous ne devons jamais nous habituer à ce décompte macabre».
La candidate malheureuse à la dernière Présidentielle a dénoncé «l’inefficacité des mesures actuelles» et souligné «la nécessité d’une mobilisation immédiate et collective». Face à «ces vies perdues», «ces familles brisées et ces destins fauchés», elle dit : «Nous devons prendre nos responsabilités et agir de manière décisive.»
Anta Babacar Ngom a, par ailleurs, déploré la «politisation stérile de ces tragédies». Elle a ainsi appelé le gouvernement de Bassirou Diomaye Faye à «convoquer d’urgence une concertation nationale, impliquant tous les acteurs de la société civile, les experts en sécurité, ainsi que les forces vives de la nation. Les mesures préconisées devront être mises en œuvre avec la plus grande rigueur. Cela demandera de la détermination, du courage, de la constance et un suivi sans faille».
DIOMAYE BRANDIT LA FORCE DU DROIT
Face à une opposition qu'il accuse de violer la Constitution, le président de la République dit utiliser les outils légaux à sa disposition pour imposer son agenda, à travers la dissolution de l'Assemblée nationale
Le président Bassirou Diomaye Faye a annoncé jeudi la dissolution de l'Assemblée nationale, invoquant "la force du droit" face à ce qu'il qualifie d'obstruction systématique de l'opposition.
Dans son allocution, il a déclaré : "L'ordre politique sous mon magistère ne supplantera jamais l'ordre légal." Le chef de l'État a ensuite énuméré une série de griefs contre la majorité parlementaire, dont "le refus" d'organiser le débat d'orientation budgétaire le 29 juin, le rejet, le 29 août, d'un projet de loi constitutionnel visant à supprimer le Haut Conseil des collectivités territoriales et le Conseil économique, social et environnemental, l'usurpation présumée des prérogatives présidentielles en fixant unilatéralement la date de la déclaration de politique générale.
Face à ces actions, Diomaye Faye affirme qu'il est allé de son devoir juridique, éthique et moral de ne céder la moindre parcelle de tolérance aux "contempteurs de la loi."
Il ainsi a invoqué l'article 87 de la Constitution pour dissoudre l'Assemblée. De nouvelles élections législatives sont prévues pour le 17 novembre 2024.
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LES ÉLECTIONS LÉGISLATIVES FIXÉES AU 17 NOVEMBRE
Le président de la République en a fait l’annonce à l’occasion d’un discours à la nation annonçant la dissolution de l'Assemblée nationale.
Le chef de l’Etat Bassirou Diomaye Faye, a annoncé la dissolution de l’Assemblée nationale et la tenue le 17 novembre prochains d’élections législatives anticipées.
Le président de la République en a fait l’annonce à l’occasion d’un discours à la nation.
”En vertu des pouvoirs qui me sont conférés par l’article 87 de la Constitution, et après avoir consulté le Conseil Constitutionnel sur la bonne date, le Premier Ministre et le Président de l’Assemblée nationale, sur l’opportunité, je dissous l’Assemblée nationale. La date des élections législatives est ainsi fixée au dimanche 17 novembre 2024”, a dit le chef de l’Etat.
L'OPPOSITION DANS LE VISEUR DE DIOMAYE
Le président a dénoncé une série d'obstructions, allant du refus d'examiner le budget à l'usurpation de prérogatives présidentielles. Il pointe notamment du doigt la fixation unilatérale de la date de la déclaration de politique générale par l'opposition
Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye a dissous l'Assemblée nationale ce jeudi 12 septembre 2024, accusant l'opposition d'entraver délibérément son action. Dans un discours incisif, Faye a dressé un réquisitoire implacable contre la majorité parlementaire.
Premier grief : le refus d'organiser le débat d'orientation budgétaire le 29 juin. "Une violation d'une obligation légale", selon Faye, qui aurait "gravement nui à l'image du Sénégal" sur la scène internationale.
Deuxième accusation : le rejet, le 29 août, d'un projet de loi constitutionnel visant à supprimer le Haut Conseil des collectivités territoriales et le Conseil économique, social et environnemental. Pour le président, ce refus va à l'encontre des "urgences de rationalisation des dépenses publiques".
Enfin, le président dénonce une "usurpation des prérogatives constitutionnelles" du chef de l'État, l'opposition ayant unilatéralement fixé la date de la déclaration de politique générale.
Face à ce qu'il qualifie de "culte du blocage", Faye convoque de nouvelles élections pour le 17 novembre 2024.
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FIN DE LA COHABITATION
Diomaye annonce la dissolution de l'Assemblée et fixe la date des nouvelles législatives au 17 novembre. Il dresse un réquisitoire contre la majorité parlementaire, l'accusant de saboter son action à travers une série d'obstructions
Le président Bassirou Diomaye Faye a frappé fort ce jeudi 12 septembre 2024, en annonçant la dissolution de l'Assemblée nationale. Dans un discours à la nation, le jeune chef d'État a justifié sa décision par une "obstruction systématique" de la majorité parlementaire, accusée de "ramer à contre-courant de la volonté populaire".
Il a évoqué une série de blocages : refus d'organiser le débat budgétaire, rejet d'une réforme constitutionnelle promise, et même "usurpation des prérogatives présidentielles". Pour lui, la cohabitation est devenue impossible avec une Assemblée qu'il qualifie de "dernier avatar bloquant du régime déchu".
Cette décision, prise en vertu de l'article 87 de la Constitution, marque un tournant dans la jeune présidence de Faye, élu en mars dernier sur un programme de rupture. De nouvelles élections législatives sont prévues le 17 novembre 2024
SON ÉMISSION À LA RTS ANNULÉE, PAPE DJIBRIL FALL PARLE DE CENSURE
“La RTS vient d’annuler avec fracas l’émission prévue aujourd’hui après le journal de 20h, pourtant à son initiative. L’heure est grave ; le pays anxiogène et le désespoir qui étreint nos concitoyens exige de la RTS une vraie pluralité", a-t-il écrit.
Le député Pape Djibril Fall qui devait être l’invité du journaliste Migui Mariame Ndiaye, dans l’émission “Champ contre Champ”, programmée pour ce jeudi après le journal de 20 heures, n’a pas apprécié l’annulation de l’entretien.
Sur ses Réseaux sociaux, il a dénoncé ce qu’il conçoit comme une censure. “Mes chers compatriotes, Sine die, la RTS vient d’annuler avec fracas l’émission prévue aujourd’hui après le journal de 20h, pourtant à son initiative. L’heure est grave ; le pays anxiogène et le désespoir qui étreint nos concitoyens exige (Sic) de la RTS une vraie pluralité et non de façade dans le traitement de l’information pour le bien de la population sénégalaise. Halte à la censure”, a-t-il écrit.
A souligner que l’annulation de l’émission fait suite à l’annonce de l’adresse à la Nation du président de la République ce jeudi à 20 heures. D’habitude après un tel exercice, des débats télévisés sont organisés sur toutes les chaines pour décrypter le message du chef de l’Etat. Cela pourrait expliquer l’annulation de la tenue de l’émission “Champ contre Champ” de ce jour.
LE SÉNÉGAL DÉCROCHE SON BILLET POUR LES DEMI-FINALES DE L'AFROBASKET U18
En demi-finales, le Sénégal affrontera le vainqueur du dernier quart de finale, qui oppose en ce moment le Mali au Nigeria.
iGFM (Dakar) Le Sénégal a décroché son billet pour les demi-finales de l'Afrobasket U18, après sa victoire devant l'Égypte, ce jeudi soir en Afrique du Sud.
Les Lionceaux ont battu les Égyptiens tenants du titre sur le score de 68 à 61. Ce succès, le Sénégal le doit à Cheikh Bitèye meilleur marqueur du match avec 23 points.
En demi-finales, le Sénégal affrontera le vainqueur du dernier quart de finale, qui oppose en ce moment le Mali au Nigeria.
L’équipe nationale du Sénégal de basket s’est qualifiée pour les quarts de finale de l’Afrobasket masculin des moins de 18 ans, après avoir battu, mardi à Pretoria, celle du Cameroun, sur le score de 72 à 56;
DIOMAYE PROMET DE DÉSIGNER UNE PERSONNALITÉ CONSENSUELLE POUR COORDONNER LA PRATIQUE RELIGIEUSE AU SÉNÉGAL
”Nous avons la volonté inébranlable, dans un futur proche, de nommer une personnalité qui va parcourir tous les foyers religieux, afin de susciter une démarche commune, qui conduit une vision qui rassemble en rassurant”, a indiqué le chef de l’Etat.
Le président de la République Bassirou Diomaye Faye a promis, jeudi, de choisir, ”d’ici quelque temps”, une personnalité qui fait l’unanimité, pour coordonner la pratique religieuse au Sénégal.
”D’ici quelque temps, je mettrai la dernière touche sur le choix de la personnalité qui fera, j’en suis sûr, l’unanimité pour coordonner la pratique religieuse au Sénégal”, a déclaré le président de la République, Bassirou Diomaye Faye.
Le président Faye était en visite au domicile du Khalife général des Tidianes, en prélude au Gamou de Tivaouane, qui sera célébré dimanche.
”Nous avons la volonté inébranlable, dans un futur proche, de nommer une personnalité qui va parcourir tous les foyers religieux, afin de susciter une démarche commune, qui conduit une vision qui rassemble en rassurant”, a indiqué le chef de l’Etat.
Bassirou Diomaye Faye a fait part de son souhait de réaliser ce qu’il avait prévu, pour tous les foyers religieux.
”C’est la première fois que je vous vois mais j’ai une bonne impression de vous”, a dit Serigne Maodo Sy Dabakh, au nom du Khalife général des Tidianes.
Le Khalife promet de tout faire, pour aider le président Bassirou Diomaye Faye à réussir tous les projets, au grand bénéfice de tous les Sénégalais, a-t-il indiqué.
”Par mes prières, je vais vous soutenir, car c’est Dieu qui demande aux musulmans de formuler des prières”, a dit le marabout, qui a présenté ses condoléances au chef de l’Etat, suite au naufrage à Mbour d’une pirogue transportant des candidats à l’émigration irrégulière et l’accident de circulation de Ndiama Fall ayant causé la mort de 16 personnes.
Le Khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour a annoncé qu’il saisira le président de la République, ”dans les prochains jours”, de son intention de recommander 48 heures de prières aux populations. Le Sénégal ”est un pays de prières”, a noté le chef de l’Etat.
Auparavant, Bassirou Diomaye Faye avait évoqué l’urgence pour les hommes religieux de prier davantage et de conscientiser les jeunes qui tentent de rejoindre les côtes espagnoles. Il avait demandé au Khalife général des Tidianes de multiplier les prières en direction des jeunes candidats à l’émigration irrégulière.
”Nous comptons sur la crédibilité de vos messages pour arrêter ce qui s’apparente au suicide en mer. Dans vos messages, les jeunes doivent savoir que nous allons bâtir ce pays avec eux. Je vous prie de parler avec les jeunes”, a insisté le chef de l’Etat.
Il a fait part au Khalife des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, de sa volonté de rassembler des familles religieuses par un message qui rassure.
Serigne Habib Sy Borom Daradji a, au nom du Khalife et du comité d’organisation du Maouloud, exprimé sa satisfaction au président quant au respect des directives pour la bonne organisation du Maouloud 2024.
Le président de la République s’est ensuite recueilli au mausolée de Seydi Hadji Malick Sy, avant d’entrer à la mosquée Serigne Babacar Sy au moment de l’appel à la prière du muezzin.
par Boubacar Boris Diop
ÉCHANGER POUR CHANGER LE MONDE
Il vaut mieux être alphabétisé dans sa langue que dans une langue d'emprunt. C'est ce que commandent le simple bon sens et un souci d'efficacité. Nos pays sont presque toujours beaucoup moins anglophones ou francophones qu'on le croit
L'alphabétisation, un droit fondamental et un pilier du progrès social. C'est le message fort que délivre l'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop lors de la Journée internationale de l'alphabétisation célébrée le 9 septembre 2023 à Yaoundé. Dans son discours publié ci-dessous, il explore les enjeux complexes de l'éducation en Afrique et dans le monde. Diop invite à repenser notre approche de l'apprentissage, en mettant l'accent sur l'importance des langues maternelles.
Il y a une certaine beauté, morale et philosophique, dans la tradition des ''Journées internationales'' et l'on ne peut que se féliciter de l'opportunité de dialogue que nous offre celle de ce 9 septembre 2024 à Yaoundé.
Qu'il me soit donc permis de vous dire à cette occasion ma fierté d'être partie prenante d'un exercice qui, au-delà de l'invite au vivre-ensemble, appelle à une méditation individuelle et collective sur le bon usage du savoir, sujet vital s'il en est. Cette pause réflexive des femmes et des hommes de bonne volonté, sans cesse renouvelée depuis bientôt soixante ans, nous permettra d'explorer les voies menant à une éducation universelle pouvant favoriser le dialogue entre les peuples et, ce faisant, la paix parmi toutes les nations de la terre.
Je ne peux résister à la tentation de partager avec vous, d'entrée de jeu, un souvenir de jeunesse qui m'est souvent revenu à l'esprit au cours des dernières semaines. J'appartiens à une génération d'intellectuels africains qui ne fut pas toujours très raisonnable, qui fut même souvent prompte dans les années 70 à prendre au mot les plus audacieuses utopies. Parmi celles-ci figurait en bonne place le rêve d'une société sans école. Nous faisions circuler entre nous pour en discuter avec passion le célèbre ouvrage d'Ivan Illich ainsi intitulé du reste. Il ne faut cependant pas se fier à son titre provocateur et d'une brutalité étudiée car pour Illich il s'agissait moins de se débarrasser de l'école que de la débarrasser de tout ce qui pourrait l'empêcher d'être accessible à tous. C'était une sorte de profession de foi démocratique au sens le plus fort du terme et l'essayiste autrichien nous glissait en quelque sorte à l'oreille l’idée qu'en révolutionnant les méthodes d'acquisition de la connaissance on en vient à révolutionner la nature même de cette connaissance ainsi que son impact social.
Mais aujourd'hui, avec des décennies de recul et pas mal de cheveux blancs, on a plutôt envie de relativiser le potentiel subversif de cette thèse qui se voulait, pour reprendre le mot du poète, un coup de feu en plein concert. C'est en effet une chose de se désoler à juste titre que les lieux d'apprentissage soient partout si désespérément fermés et une autre de donner l'impression de vouloir les dynamiter.
C'est précisément l'alphabétisation, par définition ouverte au grand nombre, qui aidera le mieux à forcer les portes de la citadelle réservée à une toute-puissante caste de lettrés. Voilà sans doute pourquoi, de John Kennedy à Nelson Mandela en passant par Koffi Annan, Amarty Sen et la jeune prix Nobel pakistanaise Malala Yousafzai, ils sont nombreux à avoir souligné que l'alphabétisation est un droit humain fondamental. Mais c'est peut-être Frederick Douglass qui en exprime le mieux l'importance lorsqu'il dit y voir "le fondement de la civilisation et le pilier de tout progrès social et économique." Douglass parlait assurément en connaissance de cause. À en croire son biographe David William Blight, le petit esclave de Baltimore, formellement interdit de lecture par ses maîtres, leur avait désobéi en cachette pendant des années et était devenu au final une des plus éminentes figures politiques de son époque et un immense orateur. Douglass a du reste sobrement résumé en 1845 son propre destin en une seule phrase : ''Education and slavery were incompatible with each other''. Ce constat du "prophète de la liberté" - dixit Blight - ne devrait-il pas s'appliquer à toutes les communautés humaines ? Je crois bien que pour nous tous la réponse va de soi.
Il est de fait difficile d'imaginer une société humaine véritablement éclairée sans une large circulation, à l'horizontale, des intelligences et du savoir. C'est elle qui permettra à chaque membre du groupe de développer une pensée critique, de participer pleinement à la vie civique et de mieux comprendre le monde qui l'entoure. Le temps est venu d'en finir avec l'approche réductrice dépeignant la personne alphabétisée comme un rescapé d'extrême justesse des ténèbres de l'ignorance quasi au soir de sa vie et qui, sachant au moins lire et écrire, devrait être bien content de ne pas mourir idiot.
En vérité il ne s'agit pas pour l'adulte en apprentissage d'ânonner des sons et de déchiffrer laborieusement des signes. Il s'agit de bien plus que cela.
En accédant à l'éducation les humains acquièrent non seulement des connaissances pratiques mais aussi la capacité de se remettre en question et de faire avec leurs semblables cette chose merveilleuse qui s'appelle échanger pour changer le monde. Voilà qui bâtit des ponts entre les peuples et les cultures et ouvre la voie vers un univers aux possibilités de progrès quasi infinies.
Que l'éducation soit un des principaux indicateurs du développement humain ne doit donc étonner personne. Les statistiques montrent que les taux d'alphabétisation élevés sont corrélés à une réduction de la pauvreté, à une amélioration de la santé publique et à une plus grande stabilité économique.
Mais comme bien souvent les statistiques, même parfaitement fiables, peuvent aisément fausser la lecture des situations. Dans le cas d'espèce, le risque de malentendu est dû au fait que le mot alphabétisation renvoie à des réalités différentes d'une aire de civilisation à une autre ou même plus globalement d'un continent à un autre. Si en Afrique les chiffres, tout en étant en constante amélioration, restent plus bas qu'ailleurs, c'est en raison des conflits, de la pauvreté, de la crise du système éducatif et des disparités aussi bien de genre qu'entre les villes et un monde rural trop facilement abandonné à son sort. En outre, les données et la dynamique en matière d'alphabétisation ne sont pas du tout les mêmes selon qu'on parle de l'Afrique du Nord ou de l'Afrique subsaharienne.
C'est parce qu'il mérite une attention particulière que je n'ai pas mentionné le problème linguistique parmi les obstacles à une éducation de masse réussie. Voici à ce propos la question essentielle et elle est toute simple : dans quelle langue l'Africain, enfant ou adulte, doit-il apprendre à lire et à écrire ? Beaucoup y répondent, avec l'agacement de ceux qui n'ont pas de temps à perdre, par une autre question : pourquoi pas en portugais, en anglais ou en français, langues certes non-africaines mais tout de même utilisées depuis toujours à l'école ?
À mon humble avis, ce n'est certainement pas aussi... simpliste.
L'exemple de Cheikh Anta Diop est une parfaite illustration de la complexité du sujet. Le linguiste sénégalais, d'habitude iconoclaste, reste assez consensuel lorsqu'il s'en tient à une analyse pour ainsi dire en surplomb : « Sans une éducation sérieuse, observe-t-il, aucune nation ne peut espérer atteindre le développement. L'alphabétisation est le fondement même de tout progrès. » Mais dès qu'il se focalise sur l'Afrique, le ton se fait plus militant pour ne pas dire plus martial et il écrit : « L'alphabétisation est un outil de libération, non seulement de l'individu, mais aussi de toute une communauté. C'est par l'éducation que nous pouvons comprendre notre histoire, notre culture et notre place dans le monde. »
Et voilà que, comme bien souvent, la réflexion sur un problème particulier concernant l'Afrique nous fait dériver lentement vers la lancinante question des langues nationales. C'est un point crucial qui ne cesse d'interpeller l'écrivain que je suis tout comme mes aînés et inspirateurs, Cheikh Anta Diop, que je viens de nommer, mais aussi Ngugi wa Thiong'o et Cheik Aliou Ndao.
Le temps qui m'est imparti ne me permet malheureusement pas de creuser davantage ce sujet pourtant crucial. J'aimerais juste formuler ici ce qui me paraît une évidence : il vaut mieux être alphabétisé dans sa langue que dans une langue d'emprunt. C'est ce que commandent le simple bon sens et un souci d'efficacité. Il ne s'agit pas là d'une position abstraite puisque toute mon existence a été faite d'allers-retours entre le wolof, ma langue maternelle et celle qui a été imposée à mon peuple par la conquête coloniale. J'ai été des années durant professeur de lettres françaises dans différents lycées du Sénégal puis de Wolof à l'université Gaston Berger de Saint-Louis ; après une production littéraire exclusivement en français voilà 20 ans que j'écris en wolof, cette dernière production incluant trois romans et la traduction de la pièce d'Aimé Césaire Une saison au Congo. Je crois donc pouvoir dire que l'être humain apprend et comprend infiniment mieux à partir de sa langue de vie, celle qu'il parle en société et dans le cercle familial. Et nos pays sont presque toujours beaucoup moins anglophones ou francophones qu'on le croit. Je ne connais pas les chiffres pour le Cameroun où nous nous trouvons aujourd'hui mais au Sénégal les chiffres de l'Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) publiés en mai dernier sont sans équivoque : après des siècles d'utilisation obligatoire du français à l'école, seuls 0,6% de mes compatriotes s'en servent à l'heure actuelle au quotidien. Les classes-pilotes de l'Unesco où les cours sont dispensés dans les langues nationales, montrent bien du reste que votre institution a une claire conscience de tels enjeux. Ceux-ci sont éminemment culturels car le savoir ne saurait être acquis au prix d'une scission de son âme, au prix d'un écartèlement trop douloureux comme c'est si souvent le cas en pays dominé. De quel dialogue entre les peuples parle-t-on quand un des interlocuteurs n'a le choix qu'entre silence et bégaiement ? Cela revient à nier l'identité de l'Autre puisque comme le rappelle Ngugi wa Thiong'o "La langue, n'importe quelle langue, a une double nature : c'est à la fois un moyen de communication et un vecteur de culture.." Et l'auteur de Decolonizing the Mind de donner l'exemple de l'anglais, parlé en Grande-Bretagne, en Suède et au Danemark, notant toutefois que "pour les Danois et les Suédois, c'est seulement un moyen de communication avec les non-Scandinaves."
Dans l'idéal, l'échange que postule une alphabétisation universelle se doit d'aller bien plus profond que le seul commerce des mots, il doit nous rendre capables de découvrir les autres à partir de leur langue, de lire leurs histoires pour nous enrichir de leur perspective unique sur les êtres et les choses. On n'accède à la meilleure part de soi-même qu'en acceptant de voir le monde à travers les yeux de nos semblables de l'autre côté du miroir. Ainsi peut-on espérer vaincre la peur qui naît de l'ignorance et qui est le ferment des haines les plus irrationnelles.
En dépit des nombreux défis que nous connaissons tous, promouvoir l'alphabétisation à travers un système éducatif ambitieux, c'est investir dans la compréhension mutuelle et la paix. C'est poser un acte de foi en l'humanité et en notre capacité à susciter un monde plus harmonieux.