LE CONTINENT NOIR PERDU PAR LES PROBLEMES DE DEMOCRATIE
«Un recul inédit du niveau de gouvernance globale.» C’est l’appréciation faite par la fondation Mo Ibrahim suite à la publication de son indice sur la gouvernance en Afrique.

Pour la première fois depuis dix ans, il a été noté une performance en recul de la gouvernance dans le continent noir. Il ressort de l’Indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique (IIAG) 2020 publié le lundi 16 novembre dernier que cette situation est due à la détérioration simultanée de trois des quatre catégories de l’IIAG : Participation, droits et inclusion, Sécurité et Etat de droit, et Développement humain.
«Un recul inédit du niveau de gouvernance globale.» C’est l’appréciation faite par la fondation Mo Ibrahim suite à la publication de son indice sur la gouvernance en Afrique. Elle estime qu’avec 0,2 point de moins en 2019 qu’en 2018, la moyenne africaine de la Gouvernance globale enregistre sa première baisse annuelle depuis 2010. Ce qui, selon elle, devrait inciter à plus de vigilance d’autant que la pandémie de COVID-19 risque à la fois d’aggraver la détérioration déjà en cours et de détruire les gains acquis en termes de développement économique et humain.
Analysant toujours cette baisse, la fondation Mo Ibrahim a indiqué que ce recul résulte de la détérioration simultanée de la Participation, des droits et inclusion, de la Sécurité et de l’Etat de droit. En réalité, note-t-on, ce mauvais résultat s’inscrit dans la suite du ralentissement de la progression depuis déjà 2015. Cependant, les résultats encourageants obtenus dans les catégories Fondements des opportunités économiques (+4,1) et Développement humain (+3,0) proviennent principalement des progrès réalisés dans les sous-catégories Infrastructures et Santé, ainsi que, dans une moindre mesure, Environnement durable, lit-on dans le document parvenu à «L’AS». Juste que, souligne le rapport, ces tendances positives vont malheureusement de paire avec une insécurité croissante et la dégradation de la situation au niveau des droits ainsi que celle des espaces civiques et démocratiques. «Les deux catégories Participation, droits et inclusion (-1,4) et Sécurité et état de droit (-0,7) enregistrent en effet un recul préoccupant sur l’ensemble de la décennie.
Dans vingt pays, représentant 41,9% de la population africaine, l’amélioration sur la décennie des catégories ‘’Développement humain et Fondements des opportunités économiques’’ s’accompagne en parallèle d’une détérioration des catégories ‘’Sécurité et état de droit et Participation, droits et inclusion’’, informe la fondation Mo Ibrahim. Qui précise que seuls huit pays - Angola, Côte d’Ivoire, Éthiopie, Madagascar, Seychelles, Soudan, Tchad et Togo - réussissent à progresser dans chacune des quatre catégories. Par ailleurs, l’Indice Ibrahim a affiché ses craintes notamment sur les risques que la Covid-19 aggrave les détériorations déjà en cours et d’inverser les progrès enregistrés en termes de développement économique et humain.
Dans la mesure où, dit-il, les données disponibles s’arrêtent à 2019 et que l’état des lieux présenté par l’IIAG 2020 est antérieur à l’arrivée de la pandémie. Il laisse aussi entrevoir une insatisfaction croissante des citoyens africains à l’égard de la gouvernance de leur pays. «Les résultats de la nouvelle section Voix des citoyens - qui couvre 39 pays et un échantillon représentant actuellement environ 87% de la population du continent - montrent que la Perception des citoyens en matière de gouvernance globale atteint son niveau le plus bas de la décennie, suivant une détérioration dont le rythme a quasiment doublé depuis 2005 », fait savoir l’Indice Ibrahim. Il estime ainsi que les clés d’une bonne performance sont : une progression équilibrée entre les différentes catégories, et l’impact prioritaire des indicateurs relatifs à l’Etat de droit, la justice, l’inclusion et l’égalité.
En définitive, le président de la Fondation Mo Ibrahim a déclaré que l’Afrique est à l’épreuve et que les fragilités de gouvernance mises en exergue par l’IIAG 2020 sont exacerbées par la COVID-19 qui menace en outre les progrès réalisés dans les domaines économique et humain. «L’insatisfaction et la méfiance des citoyens à l’égard de la gouvernance publique s’aggravent un peu partout. Les gouvernements peuvent saisir cette occasion unique de démontrer à la fois leur détermination à sauvegarder la démocratie et leur capacité à définir un nouveau modèle de croissance, plus résilient, plus équitable, plus durable, et plus autonome», a-t-il expliqué.
INDICE MO IBRAHIM 2020 SUR LA BONNE GOUVERNANCE : Le Sénégal dans le TOP 10 Africain
Dans un contexte de recul des performances de la bonne gouvernance en Afrique, le Sénégal a réussi à se positionner à la dixième place de l’édition 2020 de l’indice de la Fondation Mo Ibrahim. Il a enregistré un indice de 63,2 et vient un peu loin derrière Maurice qui reste le meilleur pays africain en termes de gouvernance avec un indice de 77,2. Pendant ce temps, la Somalie est considérée comme le pire pays du continent en la matière avec un indice de 19,2. A noter qu’au cours de la dernière décennie, c’est la Gambie qui a réalisé la plus forte progression (+9,2) alors que la Libye détient la palme de la plus forte détérioration avec -5,5. En ce qui concerne les régions, c’est l’Afrique australe qui réalise en 2019 la meilleure performance en matière de bonne gouvernance avec un indice de 53,3 suivie de l’Afrique de l’Ouest(53,1), l’Afrique du Nord (52), l’Afrique de l’Est (46,2), et l’Afrique centrale (38,8).