THIÈS : OUVRIERS ET VENDEURS DE LA GARE ROUTIÈRE ANALYSENT LES DISCOURS DES CANDIDATS
Des mécaniciens, vendeurs de pièces détachées et autres ferrailleurs officiant dans les environs de la gare routière de Thiès, ont indiqué, à l’APS, n’avoir pas entendu jusqu’ici de propositions de candidats à la présidentielle, les concernant directement

Thiès, 14 fév (APS) - Des mécaniciens, vendeurs de pièces détachées et autres ferrailleurs officiant dans les environs de la gare routière de Thiès, ont indiqué, à l’APS, n’avoir pas entendu jusqu’ici de propositions de candidats à la présidentielle, les concernant directement, hormis de "vagues promesses" d’appui au secteur informel ou aux PME.
Si certains disent ne pas suivre les déclarations des candidats, d’autres qui écoutent leur discours, s’y retrouvent à peine. Le choix des uns et des autres semble, toutefois, ne pas être dicté par les seules propositions de programmes en relation avec leur secteur d’activité.
C’est le cas Modou Ndiaye, mécanicien et vendeur de pièces détachées qui dit d’emblée : "J’ai déjà fait mon choix, je vote Macky". L’artisan dit n’avoir néanmoins vu "aucune amélioration" de son secteur d’activité avec le régime actuel, déplorant le fait que la ruelle qui longe leurs ateliers est inondée pendant l’hivernage au point que les voitures ne peuvent accéder à eux.
Il motive, par contre, son choix du président sortant par ses réalisations, comme les infrastructures routières, l’aéroport ou encore l’arène nationale.
"S’il fait deux mandats, il cèdera la place à un autre qui va poursuivre et il n’emportera pas avec lui ce qu’il a construit", commente-t-il.
Le vendeur de ferraille Malick Thiam qui relève que son secteur d’activité est souvent oublié par les hommes politiques, souhaiterait toutefois que les candidats "appuient davantage les Indiens qui leur achètent la ferraille à un prix meilleur que celui proposé par les Chinois".
Les Indiens achètent le kilo de ferraille à 150 francs, contre 120 francs CFA chez les Chinois, dit-il, ajoutant que’"en plus les Chinois ne prennent que le métal léger, alors que les Indiens prennent tout".
Beaucoup de jeunes gagnent leur pain en achetant des moteurs et autres pièces hors d’usage qu’ils réduisent en ferraille pour les revendre à des fonderies indienne ou chinoise, note-t-il.
Assane Faye, qui n’exerce ce métier qu’en saison sèche, souhaite aussi que les candidats "parlent davantage du développement de l’agriculture", son activité principale.
"Qu’il s’agisse de Macky, Sonko ou Idy, on n’a entendu personne parler du secteur informel", déplore Aly Sène, un mécanicien, la quarantaine.
Pour lui, le secteur informel, notamment les mécaniciens sont abandonnés à leur sort. Il souhaiterait qu’ils soient outillés pour mieux faire leur travail. "Il faut qu’on nous aide, parce que tous les enfants qui ratent leur scolarité nous sont envoyés", plaide-t-il.
Aly Sène, identifie au-delà de l’artisanat, d’autres "problèmes majeurs" dans la santé, l’assainissement, l’eau et l’électricité dans le monde rural, pour lesquels il attend des solutions. Comme son collègue Thierno Bâ, il fonde son espoir sur le candidat Idrissa Seck pour l’appui au secteur informel.
Thierno Bâ raconte que lorsqu’il était Premier ministre et maire de Thiès, "Idrissa Seck avait délocalisé beaucoup de mécaniciens qui s’agglutinaient autour de la gare routière, vers Khelcom Thiès". Nombre d’entre y ont installé leur atelier, tout en y logeant leur famille. "Je crois que s’il est élu, il va nous délocaliser nous autres", note-t-il.
M. Bâ indique qu’à part la promesse du candidat de "Idy 2019" de "soutenir les PME pour que la jeunesse puisse avoir des emplois et contribuer au développement", il est resté sur sa faim depuis le début de la campagne.
Pour lui, la réhabilitation des chemins de fer, une source d’emplois y compris à temps partiel pour beaucoup de jeunes, aiderait à réduire le chômage à Thiès.
A cette liste d’entreprises en difficulté, que la jeunesse thiessoise souhaite voir redressées, Aly Sène ajoute la Nouvelle société textile du Sénégal (NSTS) et la SIGELEC.
Vendeur de pièce détachées, Moussa Diallo souhaite un deuxième mandat au président sortant, pour lui permettre de "rectifier tout ce qu’il n’a pu faire dès le début".
Il souhaite qu’en cas de réélection, il s’attaque à la baisse des taxes sur les voitures importées ainsi que les pièces détachées. Le vendeur pense que le port étant la source d’approvisionnement des produits utilisés par les mécaniciens auto et métiers connexes, la cherté des taxes se répercute sur tout le monde.
Les mécaniciens, poursuit-il, ont aussi besoin d’être formés en électronique, puisque la quasi-totalité des nouvelles voitures sont électroniques et "le manuel tend à disparaître". Il suggère à ce propos, l’ouverture d’écoles de formation spécialisées.
"Ma campagne, c’est ici (son atelier)", dit pour sa part Bassirou Guèye, vendeur de pièces, disant écouter "un peu et pas de manière exagérée" les déclarations de candidats. A l’image de plusieurs de ses collègues interrogés, il dit attendre le jour du scrutin pour, selon lui, "voter pour le moins mauvais".
Il décline deux critères pour choisir le prochain bénéficiaire de sa carte : "il faut qu’il soit bon pour le pays et pour les musulmans". Concernant ses attentes de la part des candidats pour l’amélioration de ses conditions de travail, Bassirou Guèye note sans ambages ne pas compter sur eux.
"Nous avons vécu sans eux depuis que nous sommes nés", lance-t-il, ajoutant qu’"une bonne partie d’entre eux ont été aux affaires, mais notre vie n’a pas changé".
Les yeux rivés sur son écran de téléphone portable et le casque bien vissé, Ibra Ndiaye, chef d’un garage de mécanique auto, marque un désintérêt total pour la campagne présidentielle, même s’il dit avoir son candidat.
"Franchement la politique n’est pas mon dada. Si vous me parliez de Eumeu Sène - Bala Gaye (des lutteurs), j’aurais beaucoup à dire", lance-t-il, déclenchant les éclats de rire de ses apprentis.