MEDECINS ET OBSERVATEURS NE PECHENT… PAS AU FILET
«La cause la plus vraisemblable de ces lésions me semble être un agent infectieux», dixit le dermatologue, Pr Mame Thierno Dieng

«La cause la plus vraisemblable de ces lésions me semble être un agent infectieux», dixit le dermatologue, Pr Mame Thierno Dieng
Pour certainement faire sortir les « chercheurs » du labyrinthe de suppositions et suggestions, des médecins et observateurs qui pensent que la thèse du filet devrait être la première abordée, trouvent que l’origine de la maladie pourrait être ailleurs, et que la cause pourrait même être un agent infectieux, selon le dermatologue, Pr Mame Thierno Dieng
Le premier cas, c’était le 12 novembre dernier. Cela fait aujourd’hui 12 jours, mais on n’arrive toujours pas à sortir les Sénégalais de l’embarras lié à la maladie « mystérieuse » apparue chez des centaines de pêcheurs de Thiaroye Sur Mer et dans d’autres localités. Dans les échantillons examinés, on a certes trouvé des substances en excès avec une forte présence quasi permanente de l’acide ophtalmique, du souffre, de l’acide benzène, entre autres. Mais leur publication a plus installé les Sénégalais dans le doute que dans l’acceptation. En effet, on peine encore à trouver l’issue du labyrinthe de suppositions. Les résultats des premières recherches ont fait dans la réorientation. Lesquels suggèrent d’ailleurs d’orienter les recherches sur les filets utilisés par les pêcheurs. Comme si on avait fait subir l’opération chirurgicale pour ensuite anesthésier. Pourtant, et logiquement, on devait commencer avec les filets. C’est l’avis de ce médecin sous l’anonymat qui pense que, « au moins, on devait analyser les filets pour voir si les substances incriminées sont présentes ou pas. Ils doivent poursuivre les recherches. D’autant plus que les filets ne concernent pas seulement les pêcheurs en mer. Ces filets sont assemblés, réparés par les vieux ou les gens au sol », a-t-il martelé tout en soulignant qu’« à leur (Ndlr : chercheurs) niveau, la contamination n’est plus en cours. On dirait des historiens qui racontent le passé. Ils ne sont pas dans la prospection. Ou bien ils ne disent pas tout ce qu’ils savent. Ils devaient dire simplement que, pour l’instant, nous ne savons rien ». Ce médecin rappelle que « Qui peut le plus, peut le moins ». Donc, si on avait commencé avec « le filet », cela pourrait peut-être nous épargner une « noyade » !
Les Sénégalais encore plus dans le doute
Pour le moment, les résultats issus de l’étude faite par le Centre régional de recherche en Écotoxicologie et Sécurité environnementale (Ceres) suggère de soumettre les résultats d’analyses aux toxicologues et d’orienter les recherches sur les filets utilisés par les pêcheurs. Sauf que les conclusions de ces travaux ont installé les Sénégalais plus dans le doute. C’est à l’image de Malick Fall, Professeur de construction mécanique, qui explique que, « si les filets seraient à l’origine, cela voudrait dire qu’ils ont été souillés par un produit se trouvant dans les eaux de l’Océan ». Donc, et pour lui, les filets utilisés par les pêcheurs ne peuvent pas être à l’origine de la maladie cutanée des pêcheurs. « Si les filets étaient livrés neufs au même moment à tous les pêcheurs malades, il serait possible que ces filets, au premier contact avec ces derniers, causent des démangeaisons. Mais apparemment, tel n’est pas le cas », a-t-il indiqué tout en pensant que c’est « de l’ignorance et de l’incompétence ». Ou plutôt « de la diversion », selon Mbaye Tall, observateur, qui reste convaincu que « ces filets sont utilisés dans des espaces maritimes présentant des risques ». Sur ce, M. Fall suggère d’aller chercher ailleurs, « notamment la qualité de l’eau ou une denrée consommée spécifiquement par les pêcheurs ». Des voies indiquées, il n’en manque pas. Echantillonnage sur l’eau, prélèvement sanguin… et après près de deux semaines, on est resté figé à l’étape des suppositions et des suggestions. Les causes ne sont pas encore percées.
Penser à un agent infectieux
Mais en attendant de savoir un peu plus sur la thèse du filet, le dermatologue, Pr Mame Thierno Dieng, pense qu’on devrait aussi penser à un agent infectieux. Lui qui, dans un texte publié sur la page facebook de « Femmes médecins du Sénégal », fait appel à Poincaré qui pense que « Ce n’est ni l’instrumentation, ni la discipline qui fait la bonne science. Mais la démarche basée sur les faits » avant de rappeler la célèbre citation de Claude Bernard qui dit que « Quand les faits contredisent l’hypothèse, c’est l’hypothèse qu’il faut abandonner » !
Selon Pr Dieng, une étude des tissus qui forment les boutons pourrait être contributive. « Je ne pense pas que les lésions dermatologiques observées chez ces pêcheurs soient imputables aux substances trouvées en excès dans les échantillons examinés. La cause la plus vraisemblable de ces lésions me semble être un agent infectieux à identifier pour des moyens appropriés. Il faut prélever des lésions cutanées récentes non rompues sur lesquelles les recherches appropriées d’agents viraux et/ou bactériens doivent être faites. Il ne faut pas sous-estimer l’apport possible d’un cytodiagnostic correctement fait et savoir qu’il n’a de valeur que positif. Un examen histologique sur une légion pustuleuse non rompue peut être contributif. Il ne faut oublier de cultiver un prélèvement cutané stérile sur des milieux adéquats. C’est seulement après que toutes ces exploitations deviennent non contributives qu’on peut formellement exclure une cause infectieuse. La sémiologie des lésions ne renvoie à aucune cause toxique ou allergique connue. Par contre, l’aspect pustuleux, la nette ombilication centrale des lésions renvoie volontiers vers une cause infectieuse. On ne trouve que ce que l’on a cherché. Je rappelle une célèbre citation de Claude Bernard qui dit que ‘’quand les faits contredisent l’hypothèse, c’est l’hypothèse qu’il faut abandonner’’.
Restons médecins, cliniciens armés d’une démarche scientifique rigoureuse. ‘’Ce n’est ni l’instrumentation, ni la discipline qui fait la bonne science. Mais la démarche basée sur les faits’’ comme le précise Poincaré. On fait la science avec les faits comme on construit une maison avec les pierres. Mais une accumulation des faits n’est pas plus une science qu’un tas de pierre n’est une maison. C’est la façon d’agencer les pierres qui fait la maison. Et celle d’interpréter les faits, fait la science », a expliqué le dermatologue, le Général Dieng. Sur cette suggestion du dermatologue, notre médecin anonyme pense qu’il se peut qu’elle soit « une maladie contagieuse de type varicelle », et que dans ce cas de figure, « les membres de leurs familles en contact des pêcheurs seraient concernés ».