SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
31 juillet 2025
VIDEO
ABDOU LATIF COULIBALY RÉVÈLE LE COMPLOT CONTRE SON FRÈRE
L'ancien ministre dénonce l'utilisation d'une IA pour créer un faux enregistrement visant à salir son frère magistrat au Conseil constitutionnel. L'auteur présumé ? Un agent des services secrets qui a depuis pris la fuite
L'ancien secrétaire général du gouvernement sous Macky Sall, Abdou Latif Coulibaly, a fait des révélations explosives concernant le scandale impliquant l'utilisation de l'intelligence artificielle pour compromettre son frère, haut magistrat au Conseil constitutionnel.
Dans une interview récente, Latif Coulibaly a affirmé connaître l'identité de la personne qui a fabriqué un enregistrement audio truqué visant à salir la réputation de son frère dans le cadre des rumeurs de corruption au Conseil constitutionnel dans la période préélectorale de 2024. "Je connais même la personne qui a fait l'enregistrement", a-t-il déclaré, précisant qu'il s'agit d'un individu "qui a toujours travaillé dans les services secrets".
L'ancien ministre a révélé que l'auteur présumé du montage audio s'est depuis "volatilisé" et n'est plus présent à Dakar. Coulibaly, fort de ses deux années de collaboration étroite avec les plus hautes instances de l'État sénégalais, a qualifié cette affaire de "sabotage de l'État" et dénoncé "le côté noir du pouvoir". Il a exprimé son dégoût face à ce qu'il considère comme des pratiques malheureusement courantes dans les pays en développement.
MAME BOYE DIAO PLACÉ SOUS BRACELET ÉLECTRONIQUE, MAMADOU GUÈYE RECHERCHÉ
La Commission d’instruction de la Haute cour de justice a franchi une nouvelle étape dans ce dossier, en inculpant plusieurs responsables de l’ancien régime.
L’affaire liée à l’attribution du terrain destiné à la construction du palais de justice de Pikine-Guédiawaye continue de susciter de nombreuses réactions. La Commission d’instruction de la Haute cour de justice a franchi une nouvelle étape dans ce dossier, en inculpant plusieurs responsables de l’ancien régime.
Parmi les personnalités mises en cause figure l’ancien ministre de la Justice Ismaïla Madior Fall, inculpé pour corruption et placé sous bracelet électronique. La procédure judiciaire concerne également Cheikh Guèye, entrepreneur impliqué dans le projet, et Mohamed Anas El Bachir, ancien directeur des constructions au ministère de la Justice, eux aussi soumis à un contrôle judiciaire renforcé.
Le journal Libération, dans son édition de ce mardi, révèle que quatre autres anciens responsables étatiques ont été inculpés et placés sous bracelet électronique. Il s’agit de Mame Boye Diao, ex-directeur des Domaines, Abdoulaye Sy, ex-Directeur de l’administration générale et de l’équipement (DAGE) au ministère de la Justice, ainsi que les anciens chefs des bureaux des Domaines et du Cadastre de Guédiawaye.
Par ailleurs, un mandat d’amener a été délivré à l’encontre de Mamadou Guèye, dernier directeur des Domaines sous le régime du Président Macky Sall. Il serait actuellement hors du territoire national, et la Division des investigations criminelles (DIC) est saisie pour procéder à son interpellation.
LE SYTJUST DÉCRÈTE UNE GRÈVE DE 48 HEURES À PARTIR DU 18 JUIN POUR EXIGER LE RESPECT DES ENGAGEMENTS
Cette décision, prise par le Bureau exécutif national (BEN) du syndicat, intervient dans un contexte de tensions persistantes entre les travailleurs de la justice et leur ministère de tutelle
Le Syndicat des Travailleurs de la Justice (SYTJUST) a annoncé une grève de 48 heures qui débutera ce mercredi 18 juin à 8 h, pour dénoncer le non-respect des engagements pris par les autorités et exiger de meilleures conditions de travail pour les agents du secteur.
Cette décision, prise par le Bureau exécutif national (BEN) du syndicat, intervient dans un contexte de tensions persistantes entre les travailleurs de la justice et leur ministère de tutelle. Dans un communiqué officiel publié ce mardi, le SYTJUST rappelle que plusieurs de ses revendications majeures n’ont toujours pas été satisfaites, malgré les multiples démarches entreprises.
Le BEN réclame notamment : L’alignement de tous les greffiers à la hiérarchie A2, le reclassement des fonctionnaires et agents non-fonctionnaires des hiérarchies B et C ayant au moins cinq ans d’ancienneté dans les corps des assistants des greffes et parquets, la satisfaction intégrale des revendications déjà formulées dans le préavis de grève déposé le 7 février 2025.
Le SYTJUST affirme que cette grève s’inscrit dans la continuité d’un combat de longue date pour la reconnaissance pleine des droits des travailleurs de la justice. Le BEN appelle ainsi tous les agents à une mobilisation massive, en respectant unité, discipline et détermination, afin de défendre leurs intérêts matériels et moraux.
« La victoire est à ce prix. Ensemble, unis et debout, nous ferons triompher la justice dans la justice », conclut le communiqué, dans un ton de défi et d’engagement.
UN MOIS APRES SA DISPARITION, DAKAR REND HOMMAGE A KOYO
Partie sur la pointe des pieds après une maladie, le monde de la culture a tenu à lui rendre un vibrant hommage dans ce Sénégal qu’elle avait choisi comme terre d’adoption
La disparition de Koyo Kouoh a été une grande perte pour le monde de la culture. Partie sur la pointe des pieds après une maladie, le monde de la culture a tenu à lui rendre un vibrant hommage dans ce Sénégal qu’elle avait choisi comme terre d’adoption. Cette célébration aux allures de funérailles, a été un moment pour rappeler le caractère universel de cette femme et son sens du rassemblement. Tous ont promis de perpétuer son œuvre.
Emportée par une maladie le 10 mai dernier, Koyo Kouoh a été célébrée ce samedi à Dakar par le monde de la culture. Un dernier hommage à la directrice du Musée Zeitz d’art contemporain du Cap en Afrique du Sud (Zeitz Mocaa). Venus des Etats-Unis d’Amérique, du Brésil, de l’Asie, de l’Afrique noire, etc., ils étaient des hommes et des femmes venus célébrer une personnalité singulière. Certains vêtus de noir, assorti de blanc pour d’autres. Même les deux troncs du manguier planté au milieu de la cour se sont drapés du linceul blanc. Raw Material Company, l’espace d’art qu’elle a créé et fait vivre au cœur de Dakar, a abrité ce moment de célébration. Un mois après le départ de Mme Koyo, la tristesse se lit sur les visages. Une atmosphère rendue plus lourde par cette matinée nuageuse du début de l’hivernage. Et ils sont encore nombreux à ne pas accepter ce départ. «Te célébrer ici, sous ton manguier, devant les tiens, c’est te retrouver. Parce que tu es là, présente. Dans la lumière. Dans le vent. Dans le feuillage, dans le cœur de chacun d’entre nous. Nous sommes ici, réunis sous ton arbre. Et dans ce geste, je crois, il y a une forme de vérité. Tu as été racine et cime, ancrage et expansion. Tu as habité cette terre, et tu l’as rendue intelligible au monde. Je parle au présent, parce que tu ne seras jamais le passé, Koyo», a déclaré Aisha Dème dans un discours empreint d’émotion. Pour cette amie fidèle, cette dame au cœur généreux, qui aimait partager et rassembler, a beaucoup fait pour la culture africaine. «Tu es la lueur au bout du tunnel, pour nous, femmes en culture. Tu es cette lumière, présente ! Celle qui nous dit : Vous pouvez y arriver», a-t-elle ajouté. «Te dire donc merci ici, à Dakar, devant ceux qui t’aiment, dans cette ville que tu as tant aimée, mais également tant façonnée de ta pensée, et de ta présence, te dire merci ici, est une évidence…Alors merci. Merci d’être passée. Merci d’avoir été sur le chemin. Merci d’avoir été le chemin», ajoute Mme Dème, pour qui Koyo Kouoh, de son vrai nom Marie Noëlle, était une lumière pour tous. «Tu es un phare. Tu nous as montré que oui, c’était possible. Que l’on pouvait être des Koyo Kouoh. Nous, femmes africaines, habitées par notre passion et notre amour pour l’art et la culture de nos ancêtres. Tu as ouvert pour nous d’infinis horizons. Tu nous as donné la certitude que l’on pouvait avancer, debout…».
Maintenir la flamme du Raw
Un avis partagé par une autre proche de la disparue. «Koyo, c’était la vie, la liberté, la créativité. Elle avait un fort besoin d’aider les autres», a soutenu à son tour, Frieda Ekotto. Cette enseignante aux Etats-Unis se dit très touchée par la mort de Mme Koyo. «C’est une perte pour les amis, pour la famille et pour son fils», a-t-elle ajouté. Selon elle, cette femme, qui parlait l’allemand, l’anglais, le français et le Baoulé, était une femme universelle qui disait que «les gens sont plus importants que les choses». A l’en croire, elle enseignait beaucoup la qualité et la rigueur dans son travail. «Son travail, c’était l’épanouissement des autres», a-t-elle confié. Dans le même sillage, Rasha Salti, commissaire d’art, ne tarit pas aussi d’éloges à l’endroit de la défunte. «Elle aimait collaborer, se nourrir des autres», a témoigné aussi celle qui, jusqu’ici, peine à accepter son départ. Selon elle, Mme Koyo est un modèle à montrer aux jeunes générations. Une idée que le monde de la culture compte perpétuer en promettant de s’assurer que Raw Material Compagny puisse perdurer. Ce sera la seule manière de se rappeler de celle qui leur a donné le courage et l’affection. «Nous veillerons. Nous ferons vivre ton héritage. Parce que tu ne peux pas mourir. Tu n’es pas morte. Ton corps peut se reposer. Mais pas tes autres corps, ceux que tu as éveillés en nous, sur le continent, partout dans le monde. Ces corps-là, eux, sont là pour poursuivre le chemin. Nous ferons corps. Nous ferons UN. Non… Mieux : Nous ferons UNE. Nous continuerons, chère Koyo. Dans ce vide lumineux que tu laisses, nous continuerons. Avec ce que tu nous as transmis : la pensée libre, le geste juste, l’humain avant le reste», a promis Aicha Dème.
FERMETURE IMMINENTE DE SAINT LAZARE DE BETHANIE PAR MANQUE D’ESPACE
Ouvert en mars 1997, le cimetière catholique Saint Lazare de Béthanie fait face aujourd’hui à un manque d’espace.
Ouvert en mars 1997, le cimetière catholique Saint Lazare de Béthanie fait face aujourd’hui à un manque d’espace. Cette situation, d’autant plus inquiétante, préoccupe les gestionnaires des cimetières chrétiens qui appellent à son extension et à la mise en fonction du cimetière de Guédiawaye nouvellement construit.
Dans les allées qui mènent au cimetière Saint-Lazare de Béthanie, les va-et-vient frappent le visiteur. Les uns sont à pied, tandis que d’autres stationnent leurs véhicules au parking d’en face. Ce rite habituel, pour venir formuler des prières aux défunts, est un grand signe d’honneur et de respect envers les morts. D’après Pascal Dionne, président du Comité des gestionnaires des cimetières chrétiens (Cogecic), tous les jours des familles viennent se recueillir auprès de leurs défunts. Toutefois, ce lieu réservé à la communauté chrétienne, est confronté à un problème d’espace.
Ce site de 16 ha ne dispose maintenant que de quelques poches, dont la majeure partie est déjà réservée et d’après les gestionnaires, le cimetière va devoir fermer faute de places. À l’entrée, un bâtiment de deux étages est aménagé et occupé par des gestionnaires qui veillent au grain. Ils sont chargés du contrôle et du bon fonctionnement. Ici, les gens viennent dans la plupart du temps pour une réservation. Habib Sagna, l’un des gestionnaires, est chargé de recevoir leurs demandes et d’étudier les dossiers. « Aujourd’hui, je peux vous dire que le cimetière Saint-Lazare de Béthanie est plein à 97 %. Il nous reste peu d’espace pour les enterrements et nous avons des difficultés pour trouver quelques poches », renseigne Habib Sagna.
Pour lui, la cause est liée à la période de la pandémie Covid-19, durant laquelle les enterrements avaient triplé. D’après lui, il urge de trouver des solutions pour l’extension du cimetière de Saint Lazare. « De manière générale au Sénégal, partout où l’on programme des cités ou des habitations, il faut prévoir des cimetières. On a tendance à faire des aires de jeu, des espaces de loisirs, des marchés, entre autres, mais on pense rarement au cimetière et c’est notre dernière demeure. Une raison de plus pour les inclure dans les politiques d’aménagement », fait-il savoir.
L’ouverture du cimetière de Guédiawaye, la solution
Un homme vient pour enregistrer le corps de son cousin en provenance de Rufisque. « Tous les chrétiens de la région Dakar amènent leurs morts ici. Ce qui fait que Saint Lazare se remplit très vite», assure Habib Sagna. Pour juguler ce problème, le Cogecic avait pris les devants avec l’implantation d’un autre cimetière à Guédiawaye. Mais jusqu’ici, celui-ci n’a pas encore étrenné sa première pierre tombale.
Selon Pascal Dione, le président du Cogecic, le cimetière de Guédiawaye, conçu comme bouée de sauvetage, est déjà clôturé. Cependant, énumère-t-il, les infrastructures minimales pour son exploitation comme l’adduction d’eau, l’alimentation électrique, les bureaux et les toilettes tardent à se faire. «D’ici le mois de décembre, nous allons fermer le cimetière Saint-Lazare de Béthanie, parce qu’il reste peu de places. Maintenant, nous demandons aux autorités de rendre fonctionnel celui de Guédiawaye en guise de solution, avant sa fermeture », dit-il.
Sur les lieux, le constat est vite fait. Le cimetière est quasi plein. Il ne reste que quelques petites portions de terre. Dans les coins et recoins, les visiteurs arpentent les différents chemins à la recherche de tombes de leurs parents, amis, etc. Certains qui n’ont pas une maîtrise parfaite des lieux sont aidés par des gens qui travaillent dans l’entretien des tombes. En y pénétrant, une atmosphère de calme et de recueillement s’impose aussitôt. Une tranquillité plate y règne. Ici, même le bruit est mort.
Ce lieu sacré, empreint de sérénité, témoigne d’un lien indéfectible entre les vivants, et ceux qui les ont quittés. Les allées, bordées de pierres tombales alignées avec soin, invitent au recueillement. Loin de l’agitation du monde extérieur, ce lieu semble suspendu dans le temps, comme une passerelle entre la terre et le ciel. Les tombes, bien ordonnées, portent des croix, symboles de la foi chrétienne, ainsi que des inscriptions gravées à la mémoire des défunts. Ici et là, des bouquets de fleurs sont déposés.
Un espace, deux mondes : la vie et la mort
Certaines stèles sont même ornées de photos. De temps à autre, le silence est troublé par le chant des oiseaux ou encore le bruissement des feuillages. Le cimetière, loin d’être un lieu triste, est aussi perçu comme un lieu de paix et de mémoire, où la foi et l’amour unissent les vivants et les morts dans une profonde communion spirituelle. Michelle Mendy est une jeune fille venue formuler des prières à l’endroit de son défunt père. Assise confortablement sous un arbre, elle tient à la main une belle fleur de couleur rose.
Celle-ci, dit-elle, va être déposée sur la tombe de son papa disparu il y a un an. Le visage triste, elle a les yeux souvent baissés ou perdus dans le vide. Le chagrin de perdre un être est passé par là. C’est un visage qui parle sans mots exprimant ainsi une solitude. Néanmoins, la jeune fille a bien pris note du manque d’espace au cimetière Saint-Lazare. « J’ai bien remarqué ce fait. Le cimetière n’a plus de places et il faut vite remédier à cela », constate-t-elle.
BAKHIYA DE TOUBA, UNE ORGANISATION FLUIDE ET MAITRISÉE
Du rite de la toilette mortuaire jusqu’à l’enterrement, le Dahira Moukhadimatoul Khidma, responsable de sa gestion, assure une organisation impeccable pour accompagner les défunts dans leur dernier voyage.
Considéré comme le plus vaste cimetière de Touba, Bakhiya est un lieu de repos éternel pour de nombreux mourides. Du rite de la toilette mortuaire jusqu’à l’enterrement, le Dahira Moukhadimatoul Khidma, responsable de sa gestion, assure une organisation impeccable pour accompagner les défunts dans leur dernier voyage.
TOUBA – Inauguré en janvier 2014 sur les conseils de Serigne Sidi Mokhtar Mbacké, le khalife général des mourides de l’époque, le cimetière Bakhiya se trouve à l’est de Touba, à seulement 4 km de la grande mosquée. Depuis son ouverture, le Dahira Moukhadimatoul Khidma a renforcé les mesures de contrôle. Afin de mieux se conformer aux préceptes de l’islam, des sessions de formation ont été mises en place pour tous les travailleurs, de la morgue jusqu’à l’enterrement. « Bien qu’il existe plusieurs méthodes pour effectuer la toilette mortuaire, nous avons choisi d’uniformiser notre approche pour nos agents », a expliqué Makhtar Kane, membre de la commission d’organisation du Dahira Moukhadimatoul Khidma, chargé de la gestion de la grande mosquée de Touba et du cimetière de Bakhiya.
Il est important de souligner que la toilette mortuaire est généralement réservée aux proches du défunt qui peuvent choisir la personne de leur choix pour cette tâche. « Par exemple, une femme peut réaliser la toilette mortuaire pour son mari. Nous le permettons ici, mais cela doit se faire sous la supervision de nos membres », précise Makhtar Kane. Après cette étape, une nouvelle organisation s’installe dans le cimetière. L’espace est soigneusement aménagé et divisé en parcelles, chacune portant un numéro de série attribué à chaque défunt. Selon lui, cette disposition permet aux visiteurs de retrouver facilement les tombes de leurs proches grâce à des pierres tombales numérotées. Le contrôle des décès avant leur enterrement est d’une importance cruciale pour le Dahira Moukhadimatoul Khidma. D’après Makhtar Kane, rien n’est fait à la hâte au sein de la morgue. Selon lui, cette institution est administrée par des professionnels aguerris. « Ils ont reçu une formation spécialisée dans ce domaine », souligne-t-il.
15.000 FCfa pour un enterrement
La prise en charge des défunts à Bakhiya n’est pas gratuite. Comme le souligne un représentant de l’établissement, « nous sommes une structure privée », précisant toutefois que certaines personnes, comme les cas sociaux et les enfants de 0 à 10 ans, peuvent bénéficier d’une prise en charge gratuite. En dehors de ces exceptions, il faut prévoir de 15.000 FCfa pour l’enterrement d’un défunt à Bakhiya. Cette somme couvre l’ensemble des frais, incluant la toilette mortuaire, le linceul, la tombe, le tableau et bien d’autres services. Matar Kane a souligné que cette somme peut être augmentée pour ceux qui le souhaitent. Toutefois, selon ses dires, le Dahira met l’accent sur la solidarité à travers toutes ses actions.
C’est pourquoi, dit-il, Touba demeure l’endroit où les dépenses liées aux défunts sont les moins élevées. « On ne peut perdre un être cher, et également perdre beaucoup d’argent », a-t-il ajouté. Les personnes responsables de la toilette mortuaire reçoivent une rémunération de 2.000 FCfa pour chaque défunt qu’elles préparent. Ce travail est exécuté par une équipe de trois. La personne qui creuse la tombe reçoit également 2.000 FCfa. Abdoulaye Cissé, qui exerce le métier de toiletteur mortuaire depuis 16 ans, a confirmé ces propos.
Originaire de Saint-Louis et résidant désormais à Touba Tindodi, il souligne que Touba est parmi les villes du Sénégal où le secteur de la mort n’est pas particulièrement lucratif. En effet, il fait observer qu’à Saint-Louis, les frais pour l’inhumation peuvent atteindre 50.000 FCfa, tandis qu’à Touba, cette dépense est réduite à seulement 15.000 FCfa. À cet égard, il considère le montant de 2.000 FCfa dérisoire pour ceux qui s’occupent de la toilette mortuaire. Selon ses estimations, il peut gagner en moyenne jusqu’à 10.000 FCfa par jour. En 2024, le cimetière de Bakhiya a accueilli les dépouilles de 12.192 personnes dont 5.896 hommes et 6.296 femmes.
Par Babacar Gueye DIOP
SAUVONS NOTRE MER NOURRICIERE !
Des tas de gravats, des déchets de ressources halieutiques, rives transformées en dépotoirs d’ordures, fonds marins pollués… La mer souffre au Sénégal et ses « enfants », entendez les pêcheurs, qui n’ont que son eau pour survivre, ne font rien
Des tas de gravats, des déchets de ressources halieutiques, rives transformées en dépotoirs d’ordures, fonds marins pollués… La mer souffre au Sénégal et ses « enfants », entendez les pêcheurs, qui n’ont que son eau pour survivre, ne font rien pour l’entretenir. Au contraire. Jadis cadre florissant où des milliers de Sénégalais, en quête de pitance, trouvaient leurs comptes, cette masse d’eau est devenue un endroit de désillusions (émigration irrégulière, destruction liée à l’avancée de la mer, poissons quasi-introuvables…).
Aujourd’hui, cette mer lutte pour un environnement plus reluisant. Et ses usagers ne sont pas exempts de reproches. Lors d’une campagne de nettoiement, du 29 avril au 5 mai 2023, la Direction de la gestion et de l’exploitation des fonds marins, sur trois sites à savoir Hann, Thiaroye et Mbao, a sorti 30 tonnes de déchets de l’océan. C’est de notoriété publique que les pêcheurs jettent leurs déchets dans l’eau salée. C’est aussi un secret de polichinelle que les populations riveraines déversent leurs ordures sur les plages. Ajoutez-y les eaux usées des canaux, on aura un cocktail de pollution à grande échelle qui dégrade l’océan et fait fuir ses résidents.
Avec une production annuelle en 2019 de 566 693 tonnes, dont 80% provenant de la pêche artisanale pour une valeur commerciale de 263 milliards de FCfa et des exportations qui ont atteint 294 milliards, la pêche contribue à hauteur de 3,2% au Pib national et 12% au Pib du secteur primaire, selon la Direction des pêches maritimes. Ce secteur joue un rôle clé dans la nutrition et la sécurité alimentaire avec une contribution de 70% aux apports en protéines d’origine animale. Mais au Sénégal, l’environnement marin ne semble pas être une priorité pour les acteurs. Par conséquent, la raréfaction des ressources halieutiques prend de plus en plus de l’ampleur. Les chiffres de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie attestent une baisse des débarquements annuels entre 2020 et 2023. Raison pour laquelle les pêcheurs défient les eaux de la Mauritanie au prix de leur vie. D’autres se procurent des licences moyennant de fortes sommes d’argent. En Guinée-Bissau, les piroguiers sénégalais achètent une licence à 1,3 million de FCfa !
Du reste, la mer perd de son lustre d’antan, car les pêcheurs sont divisés dans l’utilisation d’engins comme le mono-filament, un désastre pour l’environnement marin. L’usage se fait partout sauf à Yoff et Cayar malgré l’interdiction du Code de la pêche. Ont-ils conscience de la destruction de leur mer nourricière ? Certains acteurs n’en ont cure même si l’État est déterminé à appliquer la loi.
Par ailleurs, après cinq jours de délibérations à Nice, la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan (du 9 au 13 juin) a conclu ses travaux par l’adoption par consensus de sa déclaration politique, intitulée « Notre océan, notre avenir : unis pour une action urgente ». Au Sénégal, la mer qui a nourri tant de générations vit des heures difficiles, doux euphémisme pour exprimer l’état de déliquescence de cette masse d’eau. S’occuper de la mer, c’est tenter de préserver les écosystèmes naturels. Car, un cadre de vie sain aura forcément des impacts socio-économiques. Il y va de la santé de la pêche, une activité qui, d’après les chiffres officiels, crée 600.000 emplois et indirects. Et même plus, selon Dr Fatou Diouf, ministre des Pêches, des infrastructures maritimes et portuaires.
Sauvegarder l’environnement marin, c’est aussi prendre des mesures urgentes contre le dépôt de gravats le long du littoral. De la Corniche ouest en passant par Diamalaye, Yoff et la bande des filaos, les pierres jonchent le sol et la plage perd des mètres. Dans un reportage réalisé en février dernier, « Le Soleil » pointait du doigt ces pratiques qui ont pignon sur rue dans nos plages. Madeleine Diouf Sarr, directrice du Changement climatique, de la transition écologique et des financements verts, interpellée, avait déclaré que le ministère allait déclencher une mission pour combattre ces actes. Jusque-là, rien n’a été fait.
Ainsi, sur la Grande côte dakaroise, le taux d’érosion moyenne annuel est de 1 à 1,5 m/an, selon la division Gestion du littoral au ministère de l’Environnement et de la Transition écologique. Pour lutter contre l’érosion de la côte, l’État du Sénégal s’appuie sur la Stratégie de gestion intégrée des zones côtières comme document de base. De plus, le ministère de l’Environnement dispose du Plan national d’adaptation des zones côtières. En attendant, derrière les vagues qui viennent lécher la berge de l’Atlantique, se cache une situation qui risque de compromettre l’avenir de populations côtières. Voilà pourquoi il faut sauver notre mer nourricière.
QUAND LES MORTS SONT À L’ETROIT
Entre mémoire, conflits et manque d’espace…A Dakar et dans les autres localités du pays, les cimetières connaissent des fortunes diverses
A Dakar et dans les autres localités du pays, les cimetières connaissent des fortunes diverses. Si au niveau de la capitale, Bakhiya de Yoff espère mettre en œuvre une nouvelle politique avec des stèles pour éviter les constructions qui prennent trop d’espace, à Saint Lazare de Béthanie, plein à 95 %, les acteurs appellent l’Etat à prendre les mesures idoines pour l’ouverture du cimetière de Guédiawaye. Tandis que dans les autres localités comme Touba, on assiste à une maitrise du foncier funéraire malgré le fait qu’en 2024, le cimetière de la ville sainte a accueilli les dépouilles de 12.192 personnes dont 5.896 hommes et 6.296 femmes.
Cimetière de Bakhiya de Yoff : Dialogue bruissant entre morts et vivants
Au cœur de la cité Djily Mbaye de Yoff, le cimetière Bakhiya est bien plus qu’un lieu de sépultures. Dans ce havre de paix, rythmé par les cortèges funèbres, se croisent prières, souvenirs et gestes d’amour. Loin du vacarme et de l’agitation de la capitale, le cimetière Bakhiya impose un calme impressionnant, presque sacré. Ici, le silence de mort prend tout son sens. C’est dans cette nécropole, située au cœur du quartier de la Cité Djily Mbaye à Yoff, que reposent des centaines de milliers d’âmes ayant fait le voyage vers l’Au-delà. Le soleil y filtre ses rayons dorés à travers un ciel souvent dégagé et de temps à autre, une brise marine, chargée d’embruns, vient caresser les narines, comme un souffle venu d’un autre monde. Ce lieu de repos éternel, baptisé Bakhiya en hommage au cimetière des compagnons du Prophète (Psl) à Médine, ne connaît de perturbations que les allées et venues des cortèges funèbres.
En ce jeudi après-midi, les sirènes de corbillards retentissent. S’ensuivent de longues files de véhicules : taxis, 4×4, « Ndiaga Ndiaye », « cars rapides », transportant parents, amis, voisins, collègues. Tous animés d’un seul désir : accompagner les défunts à leur dernière demeure. Dans ces moments, l’on perçoit un pacte d’humanité, un lien profond qui transcende les frontières du visible. Sur les lieux, certains sont déjà là, devançant l’arrivée du corps. D’autres tiennent à faire le chemin complet, par respect et fidélité. Sous le hangar jouxtant la petite mosquée du cimetière, les sièges sont occupés par des hommes et femmes de tous âges, en boubous traditionnels.
Les gardiens de l’ombre
Tandis que certains coordonnent les derniers détails au téléphone, d’autres murmurent des invocations en égrenant leur chapelet. Parmi eux, Ibrahima Sarr, un homme grand au teint ébène, visiblement accablé. « Je viens pour déposer le permis d’inhumation et le certificat de décès, mais j’ai oublié ma pièce. J’attends mon neveu… », explique-t-il, d’une voix lasse. Son cousin est décédé. Un peu plus loin, Mohamed Charles Ndoye, en djellaba, débarque de son scooter. Il a quitté la Médina après le travail pour venir enterrer une voisine. « Nous habitions à la rue 19×22. C’est la sœur de mon ami. J’ai tenu à être là, pour témoigner ma solidarité et entretenir les liens de bon voisinage », confie-t-il. Au bureau du gestionnaire, les déclarations s’enchaînent. Abdoulaye Blondin Diouf, responsable du site, semble débordé. « Tu vois, je n’ai même pas le temps de parler. Les déclarations ne s’arrêtent jamais », lance-t-il en jonglant entre dossiers et appels.
Mais Bakhiya, ce n’est pas seulement un cimetière. C’est un espace de vie silencieux, un territoire habité par des liens invisibles, où les vivants viennent converser avec les morts. Mame Diarra Diop, vêtue d’un voile blanc immaculé, s’agenouille auprès de la tombe de son époux. Elle y vient chaque jeudi. « Mon mari était un fervent disciple de la tarikha Cheikh. Il faisait beaucoup de prières les nuits du vendredi. Je perpétue cette tradition pour lui », murmure-t-elle, les yeux embués, le chapelet entre les doigts.
Plus loin, deux frères nettoient une tombe soigneusement carrelée, ornée d’une plaque de marbre. C’est celle de leur mère. « Elle nous a tout donné. C’est notre façon de lui rendre hommage », confie Maguette Niang, la voix tremblante, l’émotion à fleur de peau. Le cimetière de Yoff, c’est aussi le domaine des vivants dont l’existence est liée à celle des morts. Les fossoyeurs, les laveurs mortuaires, les bénévoles y jouent un rôle central. Vêtus de gilets où l’on peut lire « fossoyeurs », ils creusent, guident, ensevelissent des vies. Mamour Faye, vieil homme aux cheveux blancs, est fossoyeur depuis 1986. « On creuse les tombes à 3.000 FCfa. Mais souvent, on le fait gratuitement, pour l’amour de Dieu. Tous les fossoyeurs ici sont des bénévoles», affirme-t-il avec fierté. Leur revenu dépend des enterrements du jour et des dons des familles.
Les tombes… des vivants
Un membre d’une famille témoigne : « C’est ma mère qui avait acheté cet espace pour moins de 200.000 FCfa ». Au fond de l’aile est du cimetière, à quelques minutes de marche du portail, surgissent des tombes bien différentes : celles des vivants. De grandes surfaces fermées, soigneusement entretenues. Des pierres tomba les y portent de curieuses inscriptions : «réservé famille Sall », « réservé famille Ka », « réservé famille Ndiaye ». Ces sépultures en attente rappellent que l’homme, en prévoyant sa propre mort, tente d’apprivoiser l’inéluctable. Selon Ousseynou, il y avait des réservations, mais aujourd’hui, la mairie a mis fin à sa pratique. Une nouvelle qui s’est propagée comme une traînée de poudre. Ce qui a poussé certains à venir entretenir leurs espaces réservés auparavant. À Bakhiya, le silence n’est pas vide. Il est habité. Habité de prières, de souvenirs, de gestes simples et de fidélité. Ici, les morts dorment, mais les vivants veillent encore.
MARSEILLE FONCE SUR ARONA SANGANTE, GALATASARAY LORGNE NICOLAS JACKSON
En quête de renforts pour sa charnière centrale, l’olympique de Marseille s’intéresse au Sénégalais Arouna Sangante. mais le club phocéen doit composer avec une rude concurrence sur ce dossier.
En quête de renforts pour sa charnière centrale, l’olympique de Marseille s’intéresse au Sénégalais Arouna Sangante. mais le club phocéen doit composer avec une rude concurrence sur ce dossier. A un an de la fin de son contrat, le défenseur central et capitaine du Havre plaît à de nombreuses formations comme Manchester United. Par contre, en Turquie, Galatasaray lorgne Nicolas Jackson comme successeur de Victor osimhen.
Où va évoluer le défenseur sénégalais Arona Sanganté la saison prochaine ? Auteur d’une saison aboutie avec le Havre, le joueur âgé de 23 ans affole le marché des transferts. Avec la Ligue des champions en ligne de mire, Marseille souhaite renforcer son effectif pour jouer les premiers rôles dans cette compétition. Et pour y parvenir, le club phocéen, sous la houlette de l'entraîneur Roberto De Zerbi, est en quête de joueurs solides pour consolider l'équipe. Le coach italien souhaite notamment installer une défense à quatre lignes la saison prochaine, ce qui implique de recruter des éléments fiables en défense centrale. C’est dans ce contexte que Mehdi Benatia, directeur sportif de l'OM, a identifié le roc sénégalais, actuellement sous contrat avec le Havre. Le joueur âgé de 23 ans s’est distingué cette saison par ses prestations convaincantes où il a disputé 16 rencontres de Ligue 1, inscrivant 3 buts.
MAN UNITED A PRIS DE L'AVANCE
Ses performances ont séduit la direction phocéenne, qui aurait déjà lancé des investigations en vue d’une offre de transfert. De son côté, le joueur se montre prêt à relever un nouveau défi et serait motivé à l'idée de rejoindre l’OM. Et étant donné sa situation contractuelle, ses dirigeants ne le retiennent pas. L’Olympique de Marseille pourrait donc en profiter. Malgré les vœux des Marseillais, le club français a d’autres concurrents dans ce dossier. Nottingham Forest, Augsbourg, Stuttgart, le FC Séville et surtout Manchester United seraient également sur le coup. Les Red Devils auraient déjà entamé des discussions avec le Sénégalais de 23 ans et leurs échanges seraient positifs. Autant dire que les Mancuniens feraient un pas décisif en cas d’accord avec le capitaine du Havre, dont la valeur est seulement estimée à 8 millions d’euros d’après le site de Transfermarkt.
GALATASARAY SUR LES PAS DE NICOLAS JACKSON
Galatasaray garde un œil attentif sur l’attaquant de Chelsea, Nicolas Jackson. Le club turc envisage de recruter le joueur formé au Casa Sports en cas d’échec du dossier Victor Osimhen. Même si le Nigérian reste clairement la priorité de Galatasaray après une saison de prêt éclatante où il a brillé avec 37 buts et 8 passes décisives en 41 matchs. Cependant, le chemin pour s’attacher les services d’Osimhen reste semé d’embûches, notamment à cause de sa clause libératoire impressionnante de 75 millions d’euros. Si ce dossier échoue, l’attention de Galatasaray se portera résolument sur Nicolas Jackson. Ce jeune prodige sénégalais de 23 ans a rejoint Chelsea l’été dernier en provenance de Villarreal pour environ 32 millions d’euros. Malgré quelques hauts et bas, l’ancien de Villeréal s’est fait remarquer avec 14 buts dès sa première saison, sa valeur marchande étant estimée à 50 millions d’euros. Avec le nom de Jackson dans la balance, le club turc affiche clairement sa volonté de recruter un buteur de premier ordre capable de guider son attaque la saison prochaine.
Par Cheikh Niang,
CRISE ISRAËL-IRAN, ET SI LE SENEGAL DEVAIT CHOISIR…
Les frappes israéliennes du 13 juin 2025 sur des sites iraniens à caractère nucléaire, immédiatement suivies d’une riposte de Téhéran, n’ont pas simplement ouvert un nouveau front au Moyen-Orient : elles marquent une inflexion stratégique significative
Les frappes israéliennes du 13 juin 2025 sur des sites iraniens à caractère nucléaire, immédiatement suivies d’une riposte de Téhéran, n’ont pas simplement ouvert un nouveau front au Moyen-Orient : elles marquent une inflexion stratégique significative dans l’ordre international. Cette crise pourrait ainsi amorcer une phase de conflictualité ouverte, durable et asymétrique, où les lignes de fracture militaires, économiques et symboliques se superposent dangereusement. Dans ce contexte, l’Afrique - et le Sénégal en particulier - se trouvent exposés à une confluence de chocs exogènes, d’autant plus préoccupants qu’ils révèlent des fragilités systémiques anciennes encore peu traitées par les politiques publiques.
Le premier effet visible de cette confrontation militaire est la flambée des prix de l’énergie, en particulier du pétrole. Mais au-delà de la hausse des cours, c’est le mode même de fonctionnement du commerce mondial qui vacille. La menace d’un blocus du détroit d’Ormuz - par lequel transite près d’un quart du pétrole brut mondial-illustre la vulnérabilité d’un système logistique globalisé, dans lequel la moindre friction régionale agit comme un multiplicateur de risques systémiques.
Pour le Sénégal, ce n’est pas seulement un renchérissement de ses importations de carburant qui est en jeu. C’est un effet domino sur l’ensemble de la chaîne alimentaire (via l’augmentation des coûts des intrants agricoles), sur la logistique nationale (transport, distribution), et in fine, sur la stabilité sociale. Les récents investissements dans les gisements gaziers de Grand Tortue Ahmeyim et le pétrole de Sangomar, bien que prometteurs à moyen terme, ne suffisent pas à amortir un tel choc à court terme. Pire : si les conditions de financement international se durcissent - ce qui est probable dans un contexte de stagflation mondiale - ces projets stratégiques pourraient être ralentis ou rendus moins viables économiquement.
L’histoire économique récente offre un parallèle glaçant : la guerre du Kippour en 1973, suivie du premier choc pétrolier mondial, avait engendré une combinaison délétère d’inflation, de ralentissement économique et de tensions sociales dans de nombreux pays en développement. L’Afrique, alors soumise aux plans d’ajustement structurel, en avait payé le prix fort. Aujourd’hui, le piège est réel : les économies africaines - encore convalescentes des effets de la pandémie de Covid-19, de la guerre en Ukraine et des dérèglements climatiques - risquent d’être entraînées dans une spirale de stagflation importée.
Pour le Sénégal, la situation est doublement critique : le pays ne dispose pas encore d’une base industrielle suffisante pour amortir une contraction prolongée de la demande extérieure, et son espace budgétaire est restreint par une dette publique croissante, en partie libellée en devises étrangères. En cas de remontée des taux d’intérêt internationaux (notamment par la BCE ou la FED), le service de la dette pourrait devenir insoutenable, forçant l’État à arbitrer entre paiement des créanciers et dépenses sociales essentielles.
La confrontation Israël-Iran pourrait raviver une logique de confrontation des puissances et réactiver des lignes de fracture idéologiques, religieuses et militaires. Dans ce scénario, l’Afrique, en tant qu’espace stratégique convoité, entrerait dans une nouvelle phase de polarisation. Israël y mène depuis plusieurs années une diplomatie proactive, notamment en matière de sécurité classique, de cybersécurité et d’agriculture. L’Iran, pour sa part, maintient une présence plus discrète mais constante, parfois via des réseaux religieux chiites, des partenariats énergétiques ou une rhétorique anti-impérialiste séduisante pour certains segments de l’opinion.
Dans un tel contexte, le Sénégal - pays à majorité sunnite malikite, au positionnement diplomatique modéré - pourrait être appelé à ajuster finement sa posture. Membre actif de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) et engagé dans les missions de paix onusiennes, il devra procéder à une lecture lucide et stratégique de la situation pour adopter des positions équilibrées. Car, comme tout pays à voix audible sur la scène internationale, ses prises de position seront scrutées par les chancelleries. Toute posture déséquilibrée pourrait générer des effets secondaires : frictions avec des partenaires économiques, crispations internes ou récupération politique par des courants extrémistes.
Au-delà des indicateurs macroéconomiques, ce conflit agit comme un révélateur brutal des fragilités sociales africaines. Dans un contexte de hausse continue des prix, d’accès limité au crédit et de chômage endémique des jeunes, le moindre choc externe peut devenir un détonateur social. Le Sénégal, dont le tissu social reste globalement solide, n’est pas à l’abri d’un phénomène de «défiance systémique», nourri par une perception d’injustice économique et de dépendance structurelle vis-à-vis de l’extérieur.
La réponse ne peut être uniquement conjoncturelle. Elle appelle une reconfiguration stratégique profonde : souveraineté alimentaire renforcée, diversification des sources d’énergie, relocalisation partielle des chaînes de valeur, mais aussi amélioration de la gouvernance publique, notamment au niveau local. Cette crise doit accélérer l’ambition d’un nouvel État stratège africain, capable d’anticiper les chocs et d’articuler le court terme à la transformation structurelle. Dans cette guerre non frontalière, trois scénarios prospectifs peuvent être esquissés :
Scénario 1 - Conflit prolongé, blocage logistique régional, récession globale (probabilité élevée): Le détroit d’Ormuz est ciblé, les Houthis multiplient les attaques en mer Rouge. L’acheminement des biens est perturbé durable – choc : inflation énergétique et baisse des exportations. Pour le Sénégal, les impacts seraient lourds : exacerbation des déséquilibres macroéconomiques, pression sur la monnaie, tensions sociales accrues.
Scénario 2 – Conflit contenu, retour progressif à l’équilibre mondial(probabilité moyenne): Les hostilités restent circonscrites à des frappes limitées. Les États-Unis exercent une pression diplomatique sur Israël. Les prix du pétrole demeurent élevés, mais redescendent dans les mois suivants. Pour le Sénégal, ce serait une tension économique transitoire, mais gérable, à condition de mettre en œuvre un bouclier tarifaire temporaire et de mobiliser efficacement les partenaires multilatéraux.
Scénario 3 – Déflagration majeure, élargissement du conflit, reconfiguration des alliances (probabilité faible mais critique) : Israël franchit un seuil nucléaire. L’Iran active ses réseaux dans toute la région. Le Moyen-Orient bascule. Ce scénario, bien que peu probable, serait catastrophique pour l’Afrique : arrêt brutal du commerce mondial, fuite des capitaux, réalignements géopolitiques forcés. Le Sénégal serait contraint à des choix diplomatiques inédits et potentiellement coûteux.
En définitive, l’enseignement fondamental est que l’Afrique est confrontée à une alerte stratégique majeure. La crise israélo-iranienne de juin 2025 n’est pas une crise régionale ; c’est un avertissement global. Elle rappelle à l’Afrique - et au Sénégal en particulier - que l’interdépendance mondiale n’est pas seulement une opportunité, mais aussi un facteur de vulnérabilité. Les États africains doivent désormais intégrer, dans leur planification nationale, l’hypothèse de ruptures géopolitiques majeures, de désordres systémiques et de conflits asymétriques. C’est dans cette conscience accrue de la complexité du monde que pourront émerger une diplomatie africaine plus affirmée, une stratégie économique plus résiliente, et une gouvernance plus prévoyante. La paix etla stabilité du continent ne se gagneront pas seulement dans les urnes ou sur les marchés, mais dans la capacité à lire les temps qui viennent - et à y répondre avec lucidité, courage et intelligence. Tel est, en définitive, le sens profond de cette mise en garde de Zbigniew Brzezinski, acteur diplomatique américain etthéoricien de la haute stratégie : «La géopolitique est l’art de la prévoyance à l’échelle des continents.»
Ambassadeur Cheikh NIANG
Ancien Représentant permanent du Sénégal