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18 août 2025
NOUS POUVONS CONSTRUIRE UN DÉVELOPPEMENT À L'AFRICAINE
Baobab de la musique sénégalaise, Omar Pène, le leader du Super Diamono, est celui dont les textes et la musique ont accompagné Mbougar, le Goncourt 2021 - "Il a même emprunté une phrase d’une de mes chansons, "Moudjé" - ENTRETIEN
Le Point Afrique |
Viviane Forson et Malick Diawara |
Publication 16/12/2021
Voilà près de cinquante ans que sa musique fait le tour du monde. Sa voix à part et son style, qu’on a trop rapidement résumé par le concept « afro feeling », car ils mêlent les sonorités sénégalaises du Mbalax, aux rythmes du blues, du jazz, du reggae et de la salsa, font d’Omar Pène*, et de son mythique groupe le Super Diamono, l’un des plus grands artistes du continent africain. Reconnaissable par son allure svelte et son rire communicateur, le chanteur de 65 ans a mis à profit la longue période de cette pandémie de Covid-19 pour, au-delà de l’urgence sanitaire qui étreint l’Afrique, s’attaquer à une autre urgence planétaire : la nécessité d’intégrer les enjeux du changement climatique. Résultat : un album acoustique inédit intitulé tout simplement Climat.
Pour la réalisation de cet opus, il s’est entouré de musiciens talentueux de la nouvelle génération. Ainsi du guitariste franco-sénégalais Hervé Samb mais aussi du rappeur poète Faada Freddy qu’on ne présente plus. D’ores et déjà, l’album a été plébiscité par le public de fans qui traverse les générations. C’est qu’Omar Pène en bon conteur a, comme à l’accoutumée, ancré ses textes dans les préoccupations de notre époque dans un style accessible à tout mélomane comprenant ou pas le wolof, la langue la plus courante partagée par les Sénégalais, à côté d’autres langues nationales comme le pular, le bambara, le diola, le sérère, etc. Les thèmes abordés dans Climat : le terrorisme, le changement climatique, l’Afrique autour de son unité, son émergence, ses défis.
Depuis toujours, le leader du Super Diamono, groupe musical où sont passés un moment Ismaël Lô et un certain adolescent qui deviendra grand, Youssou N’Dour, doit son immense succès populaire à la dimension sociétale de ses textes ainsi qu’à la note d’espoir qu’il n’arrête pas de cultiver sur le sillon du panafricanisme et de la défense de la liberté. Est-ce cela qui a fait que Mohamed Mbougar Sarr, Prix Goncourt 2021, a trouvé la bonne inspiration en écrivant La Plus Secrète Mémoire des hommes ? En tout cas, pour nous rafraîchir la mémoire et nous plonger dans les méandres de la musique africaine populaire, Omar Pène s’est confié au Point Afrique. L’occasion de revivre dans un parcours artistique emblématique de l’effervescence musicale du continent dans sa mue entamée au début des années 1970.
Le Point Afrique : Quel est votre sentiment quand Mohamed Mbougar Sarr, le Prix Goncourt 2021, dit que vous l’avez inspiré pour écrire ses livres ?
Omar Pène : Il y a un fort sentiment de respect qui nous lie. Il m’a confié avoir écrit son nouveau roman, La Plus Secrète Mémoire des hommes, qui a reçu le Goncourt en écoutant le Super Diamono et mes albums. Je suis fier d’avoir participé à son évolution. Il a même emprunté une phrase d’une de mes chansons, « Moudjé », qui veut dire « Où est-ce qu’on va finir ». J’en suis plus que fier. Il y a vraiment des choses incroyables qui se passent parfois dans la vie. Ainsi d’apparaître dans le livre le plus recherché du moment dans le monde entier, celui du prix Goncourt. Je dois dire que Mbougar est un garçon très intelligent, qui a la tête sur les épaules. Son avenir est parti pour être radieux.
Comment vous portez-vous après quasiment huit ans d’absence sur scène ?
Il a fallu récupérer mon énergie, refaire la voix après la période de maladie. Pour cela, j’ai travaillé avec un coach. Cela a pris du temps et s’est fait petit à petit d’autant qu’avec la pandémie de Covid-19, nous sommes restés presque deux ans sans activité aucune à cause des restrictions. J’ai ensuite repris le chemin de la scène au Sénégal, puis en France pour mes premiers concerts après cette période. Cela fait très longtemps que je ne me suis pas produit à Paris et les spectateurs ont l’air super heureux de retrouver Omar Pène et le Super Diamono.
Comment vous est venue l’idée de faire cet album autour de cette thématique du climat ?
Je crois que nous vivons des moments extrêmement difficiles. Le réchauffement climatique fait l’actualité aujourd’hui et nous, en tant qu’Africains, nous sommes tout aussi concernés que le reste du monde. Le réchauffement climatique est en train de tout chambouler. Nous devons nous réveiller à son propos. On n’entend pas beaucoup les Africains parler de cette thématique alors que les effets se font déjà voir. Au Sénégal par exemple, ils sont déjà visibles dans la région de Saint-Louis, notamment dans le village de pêcheurs de Guet Ndar. Là-bas, la mer est en train d’engloutir bien des habitations. Nous devons prendre conscience aujourd’hui que c’est une réalité, c’est une évidence bien que les climatosceptiques tentent de nous faire croire le contraire. Certes, ce sont les gros pollueurs qui sont responsables des effets de ce changement climatique, mais tout le monde en est victime. Personne n’est épargné et, sincèrement, l’Afrique n’a pas besoin de ça. Aussi, en tant que leader d’opinion et citoyen du monde, j’ai associé ma voix à celles qui se sont déjà levées pour alerter sur ce sujet.
Ce n’est pas la première fois que vous évoquez ce sujet du climat. D’où vous vient cette conscience écologique ?
Je vis avec cette réalité depuis toujours. Je suis un panafricaniste très engagé et un afro-optimiste. Aujourd’hui, au Sénégal, on parle d’émergence. Permettez-moi de vous dire que j’y crois, car l’Afrique n’est pas que pauvreté, un mot trop souvent associé à notre continent. Les Africains doivent y croire comme les Chinois l’ont fait. Pour cela, ils ont travaillé à changer la donne de la réalité et de l’image de leur pays. Les Africains doivent faire de même pour léguer aux générations futures une autre Afrique.
UN ACCORD DE PARTAGE DES RESSOURCES PÉTROLIÈRES ENTRE DAKAR ET BISSAU RETOQUÉ
Le Parlement bissau-guinéen a voté mercredi une résolution qui considère comme "nul et sans effets" un accord entre le président Embalo et son homologue sénégalais Macky Sall sur l'exploration pétrolière dans la zone maritime commune entre les deux pays
L'accord signé en octobre à Dakar établit une clé de partage qui attribue 30% des ressources à la Guinée-Bissau et 70 % au Sénégal. Sur les 72 députés présents dans l'hémicycle, 70 ont rejeté l'accord, et deux dont le président de l'Assemblé nationale se sont abstenus, a constaté un correspondant de l'AFP. "Nous déplorons le fait qu'aucun membre des organes de souveraineté ne soit au courant de cet accord tenu secret. Les députés l'ont appris avec étonnement", a déclaré Armando Mango député de APU-PDGB (Agence populaire unie - Parti démocratique de Guinée-Bissau). "Nous avons agi pour protéger les intérêts supérieurs du pays", a indiqué Bamba Banjai du Mouvement pour l'alternance démocratique (MADEM), la famille politique du président Embalo.
Pour sa part, le président de l'Assemblée nationale Cipriano Cassama a dit avoir lui-même demandé au Premier ministre de lui fournir une copie de l'accord qu'il a partagée avec les députés. Mais le secrétaire exécutif de l'Agence de gestion et de coopération (AGC), Inussa Baldé, a balayé d'un revers de main l'existence d'un tel accord d'exploration pétrolière. "Même s'il y a du pétrole, ni le Sénégal ni la Guinée-Bissau ne sauront l'explorer car cela coûte très cher de s'aventurer dans un projet où on n'est pas sûr de trouver suffisamment de pétrole", a déclaré M. Baldé, lors d'un point de presse. Il a précisé que "les présidents Embalo et Sall n'ont signé qu'un accord concernant l'AGC et non l'exploration du pétrole dans la zone commune".
L'AGC, qui a son siège à Dakar au Sénégal, est une structure chargé de faciliter la coopération entre les deux pays. Créée en 1993, elle rend compte directement aux présidents des deux pays de tous les développements de l'industrie pétrolière et gazière. L'AGC réalise des études géologiques et géophysiques, de travaux de forage et d'activités liées à l'exploration et aux ressources pétrolières. Plusieurs députés ont exigé la dissolution de l'AGC et la fin de la zone commune "pour que chaque pays exploite tout seul ses ressources".
LA MARCHE BLANCHE DES FEMMES
Cette manifestation du 19 décembre sera l’occasion de fédérer les forces vives du Sénégal, mais aussi de mettre en synergie les initiatives en cours dont les objectifs convergent vers une fin définitive des abus perpétrés contre les femmes
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué du comité d'organisation de la marche blanche des femmes contre les violences basées sur le genre, prévue pour le 19 décembre prochain.
"« Marche blanche des femmes » 19 décembre 2021, à partir de 9h
Itinéraire : Place de la Nation au rond-point de la RTS
Un mouvement est né!
Un mouvement pour dire non !
Un mouvement pour porter la voix des femmes!
Un mouvement nommé la @Marche Blanche Des Femmes
Une marche pour la paix « Jammi jigéen fepp, moo’y jammi nepp » !
Un mouvement pour dénoncer toutes les formes de violences faites aux femmes!
Au Sénégal ces dernières années, les violences faites aux femmes et aux enfants ont pris des dimensions inquiétantes qui se retrouvent sur toutes les formes : violences domestiques, violences conjugales, harcèlement ou agressions sexuelles, mariage précoce et forcé, exploitation sexuelle, féminicides, infanticides, crimes dits "d’honneur", mutilations génitales etc...
Ces violences constituent une atteinte grave aux droits fondamentaux des femmes, des enfants et entrainent des conséquences néfastes immédiates ou a long terme sur le bien-être général des femmes aussi bien sur le plan physique, économique, sexuel et mental. Elles ont aussi des répercussions énormes sur les familles, la communauté et le pays.
Face à cette situation alarmante, plusieurs femmes, filles, hommes, jeunes et associations se sont regroupés, de façon spontanée pour se soutenir mutuellement, partager leur désarroi et leur douleur face aux nombreux cas qui secouent notre pays ces derniers temps.
Lors des discussions, l’idée d’une marche blanche a été retenue. C’est dans ce contexte que les initiateurs ont élaboré et partagé une pétition pour dénoncer les Violences Faites aux Femmes aux filles et aux enfants.
A ce jour 1500 signatures ont été obtenues. Parallèlement une invitation a été lancée aux femmes via la plateforme WhatsApp pour rejoindre le mouvement dénommé «l@MarcheBlancheDesFemmes » (MBDF).
Ce réseau apolitique et laïc regroupe des individus femmes, filles et hommes. Il rassemble une grande communauté composée d'associations de femmes, des regroupements de professionnels et de jeunes et compte a ce jour 446 membres. Comme une seule entité, guidé par la recherche de la paix a travers le slogan « Jammi jigéen fepp, moo’y jammi nepp » , le réseau a décidé d'organiser cette @Marche Blanche Des Femmes le 19 Décembre 2021 à partir de 9h.
Cette manifestation pacifique sera l’occasion de fédérer les forces vives de ce pays, mais aussi de compléter et de mettre en synergie les initiatives en cours dont les objectifs convergent unanimement vers une fin définitive des abus perpétrés contre les femmes, les filles et les enfants. Ce mouvement, faut-il le rappeler, a pour objectif principal d’opérer activement des changements majeurs au coeur de notre société et de nos institutions."
RÔLE DE L'ART ET DE L'HÉRITAGE CULTUREL DANS LA RENAISSANCE AFRICAINE
Conversation intergénérationnelle en marge du 10e Dialogue de Haut Niveau de l’UA sur la Démocratie, la Gouvernance et les Droits Humains, avec l’écrivaine Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga et l'universitaire Rama Salla Dieng de l'Université d’Édimbourg
Conversation intergénérationnelle en marge du 10e Dialogue de Haut Niveau de l’Union Africaine sur la Démocratie, la Gouvernance et les Droits Humains, avec l’écrivaine Zimbabwéenne Tsitsi Dangarembga, première africaine noire à publier un roman en anglais et l'universitaire Rama Salla Dieng de l'Université d’Édimbourg.
VIDEO
DES FÉMINISMES AFRICAINS
Session de questions/réponses avec Françoise Moudouthe, Mame Fatou Niang, Ndeye Debo Sec, Fatou Sow et Rama Salla Dieng au sujet du recueil d'entretiens Féminismes africains, une histoire décoloniale (éd. Présence Africaine)
Session de questions/réponses à propos de Féminismes africains, une histoire décoloniale, un recueil d'entretiens paru aux Éditions Présence Africaine avec Françoise Moudouthe (directrice générale du fonds de développement de la femme africaine- AWDF, Ghana), Dre Mame Fatou Niang (Carnegie Mellon University, USA), Ndeye Debo Seck (Enseignante d’anglais ), Professeure Fatou Sow (chercheure et universitaire, Sénégal) et Dr. Rama Salla Dieng (Université d’Édimbourg, Royaume Uni).
Par Pape Sadio Thiam
MENTIR VRAI ET PARAITRE VERTUEUX PAR LE VERBE
La duplicité de l’homme par le langage est une vieille problématique, mais c’est la communication politique qui va la porter au rang d’instrument politique par excellence.
Ce n’est pas un hasard si au Sénégal comme aux Etats-Unis, le volet communication est parfois l’ossature du projet politique autour d’un homme. Le philosophe allemand du XIXe siècle, Arthur Schopenhauer, parodiant Socrate («Parle pour que je puisse te voir.»), a dit que la bonne formule à propos du rapport entre langage et vérité est : «Ne parle pas pour que je te vois.» Le langage devrait en principe révéler la personnalité, l’identité de l’individu, communiquer ses idées et sentiments. Parler, c’est en effet, communiquer sa pensée et son être. Mais, ce principe est parfois noyé ou occulté dans les faits. La parole est très souvent un moyen de déguisement, un outil d’occulter ses vraies intentions, ses pensées, bref, sa vraie nature. La duplicité de l’homme par le langage est une vieille problématique, mais c’est la communication politique qui va la porter au rang d’instrument politique par excellence. Les enjeux de la communication dépassent très largement le cadre strict de l’intercompréhension, ils s’inscrivent désormais dans celui de l’interaction entre acteurs politiques et économiques, avec les autres sphères de la société. Ces enjeux sont surtout un souci de conditionner la pensée et les comportements des citoyens.
La communication, la mère de tous les enjeux politiques
Beaucoup d’organisations politiques pré- tendent vendre un projet politique et économique, alors qu’en réalité, il ne s’agit que d’idées, de slogans, de credo et de formules plus ou moins heureuses, engrangées au cours de débats et répétées à outrance au point de devenir une culture. L’explosion des médias sociaux a contribué à faire de la communication, la mère de tous les enjeux politiques. Même dans les démocraties où le paramètre censitaire est important, un projet politique est nul ou sans effet, s’il n’est assis sur une bonne communication. Communiquer, c’est exister en politique, faire, se défendre, détruire ou entretenir une image. Il n’est pas de patrimoine politique qui ne soit bâti ou perdu par la communication : c’est désormais le nerf de la politique. Dans la communication politique, la vérité et le mensonge ne sont pas d’ordre épistémique, ils sont tributaires de facteurs purement aléatoires comme l’appartenance à un groupe, les intérêts, l’opinion, les émotions, etc. Dans un univers pareil, ceux qui savent manipuler les émotions s’en sortent mieux que ceux qui misent sur les raisonnements démonstratifs. Plus on touche le Peuple dans ses émotions, plus la communication est efficace. Par la communication, on peut faire dire ou faire à des masses, ce qu’ils ne pensent ni n’ont envie de faire. Art de communiquer et art politique se confondent sur beaucoup de points : persuader, dissuader, manipuler, faire rêver, flatter les égos, désigner au Peuple des ennemis sur qui déverser sa colère…
Théorie de Charles Pasqua
On attribue à Charles Pasqua, une formule baptisée théorème Pasqua, qui veut que : «Quand on est emmerdé par une affaire, il faut susciter une affaire dans l’affaire, et si nécessaire une autre affaire dans l’affaire de l’affaire, jusqu’à ce que personne n’y comprenne plus rien.» Derrière ce sophisme rebutant, il y a le cynisme emblématique de l’homme politique, en général. Brouiller les repères et les pistes est le jeu favori d’une partie des communicants et hommes politiques. Les spécialistes de la communication se comportent en effet, comme de véritables ensorceleurs du cerveau des citoyens : les belles formules qu’ils inventent, les simulacres de sagesse et d’assurance que cachent de telles formules, sont une république du point de vue du langage de ce théorème de Pasqua. La plupart de ceux qui écoutent, tombent sous le charme de ce qu’ils entendent et qu’ils n’entendent qu’au moment précis où ils cessent de penser. C’est l’effet magnétique du personnage (c’est-à-dire son physique, sa voix, son intonation, sa mimique, son habillement et ce qu’il est réputé incarner) qui effectue ce travail psychologique d’asservissement volontaire du décodeur (destinataire du message) au locuteur. Comme un amant envoûté qui s’abandonne à son partenaire, les foules, une fois conquises, peuvent digérer tout, faire sembler de comprendre tout, défendre tout : elles s’abandonnent à l’arbitraire et la fantaisie des hommes politiques. Quand on réfléchit sur la communication des hommes politiques sénégalais (du pouvoir comme de l’opposition), on est parfois scandalisé par le degré de superficialité de leur discours, mais aussi sur l’absence d’originalité. On a à peu près un discours standardisé autour de thèmes trop domestiques, pour sortir le Sénégal de son gouffre : mandat, pétrole, «affaire tel ou de tel», scandale de…, élection, partage du gâ- teau… Pourtant, les problèmes cruciaux de la société, qui devraient être les points saillants de la communication de l’homme politique, sont là, mais ils sont esquivés. Pire, ces vrais enjeux sont voilés ou dissous dans ce torrent de non-sens : l’essentiel de la communication réside désormais chez la personne qui diffuse le message. Sa crédibilité supposée ou réelle suffit à garantir le sens et la véracité de ses propos, on n’a pas besoin de faire le moindre recoupement. Mieux, l’exigence de vérification et de contrôle est elle-même suspecte et jugée par les partisans comme une hérésie religieuse.
La communication politique est propagandiste
La communication politique est essentiellement propagandiste, au sens où cette notion signifie une action exercée sur l’opinion publique et destinée à lui faire adopter certaines idées, à influencer ses choix et conditionner son comportement. Toute communication de masse est fatalement propagandiste : il y a toujours quelque chose qu’on met en valeur ou qu’on dévalorise et le résultat attendu est un certain comportement des membres de la communauté. Selon Y. Winkin (La nouvelle communication, Seuil, 1981, p.24), la communication est «un processus social permanent intégrant de multiples modes de comportement : la parole, le geste, le regard, la mimique, l’espace interindividuel, etc.». Processus social : communiquer, c’est joindre ; relier ; mettre en relation. Le socle de la société serait ainsi la communication qui non seulement la crée, mais la maintient en vie. Ce n’est pas un hasard donc si l’accroissement démographique des sociétés modernes s’est naturellement accompagné d’un développement fulgurant des moyens de communication. Chaque époque, chaque société a ses moyens et son mode de communication, définis ou créés en fonction des types de comportement qu’on veut susciter ou promouvoir, du type de citoyen qu’on cherche à bâtir, etc. Aucune communication n’est dès lors innocente, neutre, objective : il suffit de regarder le manichéisme qui caractérise les discours et relations entre camps politiques au Séné- gal, pour illustrer cette dimension chauvine de la communication politique. Le biologiste allemand, Serge Tchakhotine, n’a pas tort de parler de «Viol des foules par la propagande politique», titre éponyme de son ouvrage traduit et édité en 1939 en France. S’appuyant en partie sur la théorie des réflexes conditionnés de Pavlov, il établit clairement les dangers de la propagande. Les pulsions majeures de l’homme (pulsions sexuelles et d’autoconservation d’une part et pulsions de violence et d’autodestruction d’autre part) sont systématiquement capturées dans les techniques de communication politique. Politique, érotisme et violence se mêlent pour engendrer un monde chaotique et potentiellement explosif. C’est sciemment que les héros politiques sont qualifiés de beaux gosses, de vrais mecs, téméraires au caractère de bulldog. On n’oublie pas de faire mention de leur tendance sportive (surtout dans les arts martiaux) : la plupart des documentaires sur Poutine font état de ses performances en judo. Cette forme de suggestion cherche à instiller l’idée selon laquelle, le héros est un bagarreur, un résiliant, un conquérant, etc. C’est la stratégie du symbole dont parle Serge Tchakhotine : associer le parti à des puissances ou performances ; à des mots qui donnent espoir ou font rêver. Ce symbolisme est extrêmement puissant et fé- cond en termes de mobilisations, discours narrateurs (storytelling) et de comportement hystériques susceptibles de faire les pires ravages en un clin d’œil. C’est ainsi par exemple que la notion de Patrie et les adjectifs que l’on forme avec, sont actuellement revisités aux quatre coins du continent, après avoir servi à asseoir les indépendances.
Le Front patriotique rwandais de Kagamé, l’Union des patriotes congolais de Thomas Lubanga, l’Alliance des jeunes patriotes pour le sursaut national de Charles Blé Goudé en Côted’Ivoire, Pasteef/les patriotes de Sonko au Sé- négal, etc. Tous ces partis et mouvements citoyens, qui se réclament du patriotisme, ne sont en général que faiblement imprégnés du patriotisme et de ses exigences actuelles, mais comme ça accroche, on l’a adopté pour galvaniser les foules. En plus de fouetter la fierté d’un peuple, de telles expressions ont l’avantage de fédérer sans nécessiter des connaissances théoriques ou des compé- tences techniques. «Je suis patriote», c’est déjà un programme, une vision et un projet de société : quelques sous-thèmes comme transformation locale, secteur privé local, transformation des produits, réciprocité, suffisent à habiller le discours parfois dénué de consistance. Les plus habiles à propager les vagues idées de la propagande sont la presse, les semi-intellectuels (toujours doctrinaires et peu créatifs) et les fanatiques. Avec les Tic qui sont de redoutables amplificateurs, la communication politique n’est pas une science, un art qui requiert du génie, elle est devenue affaire de réseaux, de likes, de partages, de followers. Dans les réseaux sociaux, l’effet de redondance donne l’illusion ou l’impression aux membres d’un groupe, qu’ils sont majoritaires, qu’ils ont la force avec eux, que le virtuel doit entraîner ou féconder le réel. Tous les partis politiques rejetteront cette évidence et pourtant ils développent avec beaucoup d’attention, d’énergie, et des moyens, un projet numérique parfois en connexion avec des sociétés basées à l’étranger. Ce qui s’est passé avec l’élection inattendue de Trump à la Maison blanche, l’ingérence numérique de la Russie, est loin d’être une exception.
Les manigances et intrigues qui font et défont la communication digitale sont aujourd’hui une équation à plusieurs inconnus. Les faux comptes Facebook, les groupes WhatsApp de lynchage, d’insultes et de dénigrement, font d’énormes dégâts à la fois psychologiques et sociaux. Dans certains partis politiques, la communication digitale est d’un enjeu tellement capital, que des consignes sont données dans les groupes WhatsApp et Facebook pour noyer la communication adverse, supprimer les «ennemis», en les rendant invisibles, bref de véritables officines de fabrication de fanatisés snipers, capables de débiter les pires insanités tout en les rendant normales. On assiste actuellement au Sénégal et dans le monde, à un développement de véritables stratégies de guerre digitale entre partis ou entre pays. Les partis politiques forment à la haine et à l’agressivité et non à la démarche discursive qui devrait être la voie indiquée pour féconder des citoyens. On développe à outrance le manichéisme pour occulter les dé- bats de fond : l’enjeu est désormais de quel côté «il est». On ne se préoccupe ni de vérité, ni de solution, ni de sens : dès que «On» fait partie de nous, il est bon et quand il n’est pas de nous, il est mauvais. C’est simple et dangereux, mais c’est efficace : on ne fait pas la guerre avec le cœur. La sanctuarisation des postures partisanes n’est pas fortuite, elle rend contingente la question de la vérité et la possibilité des solutions préconisées.
Idrissa Seck, une icône de la communication traditionnelle
L’efficience ou le réalisme d’un acte politique, un programme, une décision, se jugent à l’aune du «moi» du chef de parti ou du parti lui-même. Il y a donc un renversement ou, peut-être, une transmutation de la communication politique dans notre jeune démocratie. L’arène politique a connu de vé- ritables monstres de la communication avec un niveau de discours à la fois profond et accessible au public. Le Président Wade, du haut de ses 26 ans d’opposition, faisait preuve d’une spontanéité exceptionnelle en matière de communication. Qu’il lise un discours ou qu’il les improvise, ses allocutions étaient suivies d’action au niveau de la société. Jamais Wade, malgré ses connaissances dans divers domaines, n’a fait preuve d’arrogance dans ses propos. Il était même réputé être «très nuancé». Idrissa Seck également, est une icône incontestable de la communication politique traditionnelle : son timbre vocal, ses références coraniques et bibliques, sa connaissance de la culture sé- négalaise, sa maîtrise du wolof et du français, sa culture générale, etc. sont des éléments essentiels d’une bonne communication politique. La jeune génération incarnée par Barthélemy, Sonko, Mayoro Faye, Nafi Diallo, Mame Mbaye Niang, Seydou Gueye, etc. ont d’énormes potentialités en matière de communication politique. Mais aux uns, il manque la sagesse du discours, aux autres, la fougue conquérante. Le problème est que l’univers politique détermine, du moins en partie, la nature et la qualité de la communication des acteurs
LAMINE GUEYE, PIONNIER DU SOCIALISME AU SENEGAL ET TOMBEUR DE MAMADOU DIA
Homme politique de premier plan, il a été aussi le premier juriste de l’Afrique francophone
Le nom de Lamine Guèye est aujourd’hui immortalisé sur le fronton de l’un des plus prestigieux lycées de Dakar qui, avant de porter son nom, s’appelait lycée Van Vollenhoven mais que les élèves appelaient seulement « Van Vo » ou «lycée Van». C’était véritablement lui rendre justice que de débaptiser un lycée qui portait le nom d’un colonisateur qui n’évoquait rien pour le Sénégalais ordinaire alors que lui a marqué de son empreinte l’histoire de notre pays. Lamine Guèye était en effet de ces personnages remarquables de courage, de persévérance et qui faisait preuve d’une réelle empathie pour son peuple.
C’est grâce à lui que tous les fonctionnaires africains qui travaillaient pour l’Afrique occidentale française (AOF) vont acquérir d’office la nationalité et les mêmes avantages que les Français de souche établis en Afrique. Car, avant qu’il n’introduise un projet de loi dans ce sens à l’Assemblée nationale française, seuls les natifs des quatre communes du Sénégal (Dakar, Gorée, Rufisque et Saint-Louis) étaient considérés comme Français, les autres ayant le statut d’« indigènes ». Son projet adopté par l’Assemblée nationale française est connu sous le nom de « Loi Lamine Guèye » et il venait de corriger une des aberrations de la colonisation qui faisait une distinction discriminatoire entre Africains d’origines diverses, entre villageois et citoyens des quatre communes. Il fallait à l’époque un courage politique certain pour introduire un tel projet de loi à l’Assemblée nationale de la France, alors très peu soucieuse d’équité pour les autochtones de ses colonies. Les uns étaient Français, les autres Indigènes et ils n’avaient pas les mêmes traitements pour le même travail. La loi Lamine Guèye mettra un terme à cette discrimination le 30 juin 1950 en proclamant l’égalité de traitements et d’avantages de toutes sortes à tous les fonctionnaires civils et militaires servant Outre-Mer, sans distinction de race, de religion ou de statut. En introduisant son projet de loi, Lamine Guèye était dans son élément.
Juriste de formation, homme politique né au Mali mais de nationalité française parce que son père était originaire de Saint-Louis dont les habitants étaient considé- rés comme Français d’office, il n’était pas très à l’aise face à ses frères Maliens qui, même fonctionnaires ou militaires pour la France, étaient traités différemment de lui car ils avaient le statut d’indigènes. L’adoption de cette loi par l’Assemblée nationale française fut donc une grande victoire pour le panafricaniste qu’il était. Lamine Guèye, que tous les Saint-Louisiens considèrent comme un patrimoine de leur ville, était pourtant né à Mé- dine, non loin de Kayes, au Mali, le 20 septembre 1891. Son père était établi là-bas en tant que commerçant et c’est là qu’il débutera ses études coraniques avant d’être envoyé à Saint-Louis, ville d’origine de son père, où il devait entrer à l’école française en 1903, à l’âge de 12 ans, ce qui n’était pas rare à l’époque. C’est de sa mère, Coura Waly Cissé, que lui viendra le nom de Lamine Coura.
Après son certificat d’études et son brevet élémentaire, il devient instituteur puis il s’inscrit pour une licence de mathématiques. Son diplôme obtenu, il enseigne les maths à l’école normale William Ponty — alors établie à Gorée avant de déménager à Sébikotane — où il compte parmi ses camarades un certain Félix Houphouët-Boigny qui deviendra le premier président de la République de Côte d’Ivoire. Après dix ans d’enseignement, Lamine Guèye prend le bateau et se rend en France métropolitaine pour entreprendre des études de droit. Il obtient un doctorat en droit et deux DESS en droit privé et en droit romain. Il s’inscrit alors au barreau et devient avocat auprès des tribunaux et cours d’appel de l’Afrique occidentale française. A ce titre, il a eu l’occasion de défendre quelques-uns de ses amis politiques comme Galandou Diouf ou Amadou Dugay Clédor Sène. Mais d’avocat, il deviendra magistrat et il sera, pendant 6 ans, président de Chambre correctionnelle. En février 1937, il est nommé conseiller à la Cour d’appel de la Martinique mais, en 1940, il quitte la magistrature pour redevenir avocat et rentre au Sénégal où il avait déjà entamé sa carrière politique plusieurs années auparavant. Car, c’est en 1912 qu’il se signale dans un premier temps en tant qu’activiste en créant, en compagnie de quelques amis avec qui il partageait une association culturelle, « Aurore de Saint-Louis », le premier groupe de revendication politique d’Afrique Noire dénommé « Jeunesse sénégalaise ».
Lamine Guèye adhère à la SFIO et est élu maire de Saint-Louis
En France, il ne s’est occupé que de ses études et de sa carrière de juriste. C’est là-bas qu’il rencontrera son épouse, Marthe Dominique Lapalun, d’origine guadeloupéenne, qui lui donne deux enfants : une fille, Renée, qui se mariera avec un avocat originaire de Côte d’Ivoire, et un fils, Iba qui deviendra avocat comme son père mais qui embrassera une carrière cinématographique comme acteur à succès. De retour au Sénégal en 1922, Lamine Guèye adhère à la SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière) dès 1923. En 1925, il obtient son premier succès électoral car il est élu maire de Saint-Louis. Auparavant, il avait racheté au dé- puté François Carpot le journal L’AOF qui sera le support de son engagement politique. Malheureusement ce succès politique ne sera que de courte durée car il perdra aux élections législatives de 1928 face à la liste de Blaise Diagne et ne réussit pas à se faire élire aux élections municipales de 1929. Mais, pugnace de nature, il reviendra bientôt aux affaires après un retour à sa carrière judiciaire en 1931 comme magistrat à l’île de La Réunion. Trois ans plus tard, en 1934, il revient à la politique quelque peu contraint mais surtout encouragé par un mouvement de jeunes étudiants sénégalais de France. Blaise Diagne venait de mourir. Pour le remplacer, ces étudiants pensent à Lamine Guèye et lui adressent une lettre pour l’inviter à revenir aux affaires politiques. Il accepte et se présente de nouveau aux élections législatives, sans succès car il avait en face la liste de Galandou Diouf, plus populaire que lui au pays et qui finit par le battre. Malgré cette défaite, il persévère et cherche un moyen pour rebondir. C’est là qu’il a l’idée de réorganiser le Parti socialiste sénégalais (PSS), dont il est l’un des fondateurs, afin d’attirer la jeune élite sénégalaise de l’époque. Le Parti socialiste sénégalais est réputé être le premier parti politique moderne de l’Afrique sous domination française.
En 1945, il se présente aux élections municipales de Dakar et il est élu. Il restera maire de Dakar pendant seize ans. Et, en 1946, soutenu par la section sénégalaise de la SFIO, il remporte facilement la représentation des communes urbaines et siège à l’Assemblée nationale française. Ce qui lui a permis de faire voter la Loi Lamine Guèye qui octroyait les mêmes droits que les Français aux autres fonctionnaires africains qui, auparavant, étaient considérés comme des indigènes et faisaient l’objet d’une intolérable discrimination dans le traitement salarial. La même année, il entre dans l’attelage du Conseil du gouvernement de Léon Blum comme sous-secrétaire d’Etat, fonction qu’il n’occupera que pendant un tout petit mois, du 16 décembre 1946 au 22 janvier 1947. Mais en 1948, il rompt les amarres avec Léopold Sédar Senghor, qui avait pourtant été son colistier lors des élections municipales de 1945. Senghor crée le Bloc démocratique sénégalais (BDS) et se présente comme son adversaire pour les législatives de 1951. Lamine Guèye consacre sa campagne aux grandes villes mais Senghor investit la campagne et réussit à le battre même à Dakar où il avait comme candidat un certain Abass Guèye, père de l’activiste bien connu aujourd’hui par son ONG, Jamra, Mame Matar Guèye. Bon perdant mais lucide politiquement, il s’allie de nouveau avec Senghor et, en 1958, le Parti socialiste sénégalais de Lamine Guèye et le Bloc populaire sénégalais de Senghor fusionnent pour devenir l’Union progressiste sénégalaise (Ups), l’ancêtre de l’actuel PS. Lamine Guèye se retire alors en France afin de se soigner d’une grave maladie.
Durant ce séjour, il est nommé délégué de la France à la représentation politique auprès des Nations unies. Il revient en 1957 et prend la tête du Mouvement socialiste africain (MSA). Il devient directeur politique de la section locale sénégalaise, le Parti sénégalais d’action socialiste (PSAS). Du 8 juin 1958 au 15 juillet 1959, il devient sénateur de la Quatrième République française. En 1958, dans le cadre des négociations pour l’accès à l’indépendance, il s’unit avec Senghor face aux autres dirigeants africains qui favorisent l’autonomie pour chaque territoire de l’AOF plutôt qu’une structure fédérative. Le Sénégal parvint ainsi à la création de la Fédération du Mali regroupant le Mali et le Sénégal. Le MSA et l’UPS fusionnent. Lamine Guèye devient directeur politique de l’Union progressiste sénégalaise (UPS). Il fait son entrée dans l’hémicycle comme député UPS à l’Assemblée constituante du Sénégal. Puis il devient président de l’Assemblée nationale du Sénégal indépendant.
En décembre 1962, survient un désaccord entre Senghor et le président du Conseil du gouvernement, Mamadou Dia. L’un tenait à la suprématie du parti sur l’Etat et l’autre le contraire. L’Assemblée nationale devait les départager. Mamadou Dia fait encercler le siège de l’Assemblée par la gendarmerie afin d’en interdire l’accès aux députés et Senghor fait protéger le Palais par l’armée mais maintient sa demande de faire limoger Dia par l’Assemblée nationale. Interdits d’accès à l’Assemblée nationale, les députés se réunissent alors au domicile de leur président, Lamine Guèye, ce qui était autorisé par les textes en cas de force majeure, mais la décision qui serait issue de cette session ne pouvait être valable que si le quorum était atteint. Ce fut le cas et Mamadou Dia fut destitué, arrêté et envoyé à Ké- dougou, dans une prison qu’il avait lui-même fait construire. Lamine Guèye n’a pas cessé ses activités politiques aux côtés du président Senghor et il est resté président de l’Assemblée nationale jusqu’à sa mort le 10 juin 1968. Il a été enterré au cimetière de Soumbédioune auprès de son unique fils Iba, décédé en 1963 et dont l’aéroclub de Dakar, dont il était un des membres les plus actifs, porte le nom.
DES SENEGALAIS EXPRIMENT LEUR RAS-LE BOL DE LA SEN’EAU
Manque ou mauvaise qualité de l’eau et cherté des factures - Ce sont des plaintes et des complaintes
Aujourd’hui, tout le monde pleure le manque d’eau et la cherté des factures qui persistent. Hélas, malgré toutes les récriminations et complaintes des Sénégalais, la SEN’EAU reste indifférente à cette situation. Des Sénégalais donnent leur point de vue. Reportage….
Ce sont des plaintes et des complaintes. Entre la Sen’Eau et les consommateurs, ce n’est pas et ça n’a jamais été le grand amour. C’est même une déclaration de guerre faite par les premiers à la filiale sénégalaise de la multinationale française SUEZ. Un langage de sourds. Du jour au lendemain, des consommateurs se sont retrouvés avec des factures qui sont passées du double au triple voire plus. Et face à cette hausse vertigineuse de la facture du liquide précieux, la Sen’Eau peine à convaincre. Elle sert des explications alambiquées sans opposer aux clients le moindre argument sérieux si ce n’est celui d’une possible fuite. C’est la rengaine servie par les responsables de la société française face à des consommateurs qui s’interrogent sur comment ils sont parvenus à consommer autant d’eau. A la devanture d’une agence de la société, Abdoulaye Sagna peine à retenir sa colère.
Venu faire une réclamation après avoir reçu sa dernière facture, il a failli en venir aux mains avec la personne qui gère la clientèle. « Elle ne m’a opposé aucun argument valable qui motive cette hausse exagérée. Il y a plus de six mois, j’ai entrepris des travaux à mon domicile et les maçons avaient consommé une importante quantité d’eau. Et pourtant, je n’avais pas payé une telle somme », dit-il tout en colère. La fuite qu’on lui oppose, il dit qu’elle n’existe que dans la tête des responsables de la société d’eau. « Ils n’ont aucun argument valable », dit-il défiant la société d’oser venir le priver d’eau. Abdoulaye n’est pas le seul à enrager. A l’agence de Nord Foire, ils étaient nombreux à venir faire une réclamation. Ce, pendant que d’autres cherchaient un compromis à travers un moratoire pour ne pas être privés du liquide précieux.
Devant la représentation parlementaire, le ministre en charge de l’Eau et de l’Assainissement, Serigne Mbaye Thiam, avait été confronté aux récriminations de députés scandalisés par la subite hausse sur les factures des Sénégalais. Une hausse intervenant paradoxalement à un moment où ce qui manque le plus dans la capitale, c’est l’eau devenue une denrée rare dans beaucoup de quartiers. « Nous ne fermons pas l’œil de la nuit. Nous sommes obligés de veiller jusqu’à des heures tardives pour voir l’eau couler du robinet. Maintenant, devoir payer de telles sommes alors que nous ne voyons pas l’eau, cela s’apparente à du vol », se désole la dame Ndèye Maty, venue faire une réclamation sans être satisfaite par les explications des agents. « En plus de la mauvaise qualité de l’eau, on nous exige de payer ce que nous n’avons pas consommé », éructe-t-elle.
Le vieux retraité Ismaila Sy, lui, en plus de se désoler des factures qui sont exorbitantes, se plaint du fait que celles-ci viennent tardivement. Et souvent après la fin du mois ou à quelques jours du délai de rigueur. Alpha Sy est habitant de l’unité 19 des Parcelles Assainies dans un immeuble de 4 étages. Au troisième étage où il vit, le liquide précieux ne coule pratiquement pas du robinet. « Je suis colocataire dans un immeuble. Mon appartement, je le partage avec trois des mes collègues. Mais notre plus grand calvaire, c’est le manque d’eau que nous vivons constamment. Parfois, c’est très tard dans la nuit que la pression monte chez nous. Mais quand la facture arrive, nous sommes surpris de voir le montant. Et cela crée des tensions puisque certains de mes colocataires clament que Sen Eau ne bouffera pas impunément leur argent et refusent de cotiser plus qu’ils ne donnaient habituellement. « Ça suffit largement ! Nous sommes nombreux à vivre cette même situation. Donc, levons-nous » , lance un jeune homme qui se dit scandalisé par l’inertie des autorités face à ce qui s’apparente ni plus ni moins à une grande arnaque de la société française « Depuis que Sen Eau a pris ses aises, on constate une mauvaise qualité du service, un manque de réactivité sur les réclamations des clients. Sans compter le recours incessant aux dérogations pour la qualité de l’eau, la cherté des factures tant décriée par les clients, le changement des compteurs et le tâtonnement dans la distribution des factures », dénonce notre interlocuteur qui appelle les Sénégalais à s’opposer à cette forfaiture de la société française.
HAUSSE DE 25 FCFA SUR LE PRIX DU PAIN, LES CONSOMMATEURS, MECONTENTS, DEVERSENT LEUR COLERE SUR LE GOUVERNEMENT
Si les boulangers affichent le sourire avec la hausse de 25 francs sur le pain autorisée par l’Etat, le consommateur, lui, se demande où il pourrait encore trouver le diable pour lui tirer la queue.
L’augmentation du prix du pain est apparemment le sujet le plus commenté ces jours-ci par compatriotes qui estiment qu’elle n’avait pas sa raison d’être. Et surtout en cette période où les factures d’eau et d’électricité s’envolent tout en leur donnant le tournis. Un malheur ne venant jamais seul, les prix des denrées de première nécessité comme le pain prennent également l’ascenseur. Résultat : beaucoup de consommateurs et de commerçants manifestent leur mécontentement et leur déception contre le régime de Macky Sall.
Si les boulangers affichent le sourire avec la hausse de 25 francs sur le pain autorisée par l’Etat, le consommateur, lui, se demande où il pourrait encore trouver le diable pour lui tirer la queue. Surtout les familles nombreuses qui devront se sacrifier plus encore pour pouvoir se payer leurs baguettes de pain nécessaires au petit déjeuner. Voire acheter plus cher le « pain-ndambé », le « pain-omelette » et le « pain-thon » qui leur tiennent lieu de dîner ! C’est dans la journée de mardi que ce père de famille a appris devant l’étagère du boulanger la hausse du prix du pain. Il a ainsi dû retourner à la maison prendre une pièce supplémentaire de 100 francs avant de prendre ses quatre miches de pains habituelles pour sa famille. « Ça ne sera pas facile. Certains pourront trouver insignifiante cette hausse, mais les familles nombreuses vont ressentir le coup », lance dépité notre interlocuteur. Juste en face de cette boulangerie, tenant un restaurant de fortune à la devanture de sa maison, la dame Aida Ndiaye dit être très surprise par cette hausse du prix du pain. Elle doit donc réviser ses prix mais pense à ses nombreux clients dont certains avaient du mal, déjà, à s’offrir un repas. « Les temps sont durs. Beaucoup de personnes font du ‘’TaabaTaaba’’ et du goorgorlu. Nous, qui vendons dans la rue, sommes mieux placées que quiconque pour le dire. Nous sommes confrontées à toutes sortes de clients. Des gens se présentent les poches vides. Certains viennent souvent avec la modique somme de 100 FCFA. Beaucoup de clients prennent le petit déjeuner à crédit, et au milieu de la journée, lorsqu’ils terminent de faire le ‘’goorgorlu’,’ ils reviennent payer », renseigne la tenancière. Parmi ses clients, des pères et mères de famille font un crochet chez elle pour le goûter de leurs tout petits.
La hausse du prix du pain va donc alourdir leurs dépenses quotidiennes. C’est le cas d’Ousmane Diouf accompagné de ses deux enfants et qui s’approvisionnait auprès de la restauratrice Aïda Ndiaye. Tout en se désolant de cette hausse, il estime que tout est devenu plus cher dans le pays et tout a augmenté malgré les sorties du ministre du Commerce visant à rassurer les consommateur. « Tout a augmenté. Les prix des denrées de première nécessité et même le bouillon a connu une hausse. Ce, sans compter l’eau et l’électricité », se désole notre interlocuteur qui pense que ce n’était pas ça la promesse faite par Macky Sall en 2012. « Les Sénégalais en ont marre de se réveiller chaque jour avec des hausses. Il est temps que ça s’arrête ! », éructe de rage notre interlocuteur. Si M. Diouf fulmine contre les hausses, le taximan Ousseynou Niang enrage contre la qualité du pain qui n’est plus la même qu’avant. « Mbourou légui khott rékk la (Ndlr, le pain, aujourd’hui, ce n’est plus qu’une carcasse sans mie à l’intérieur) . Même avec deux miches, si on ne le remplit pas avec des brochettes, des œufs ou du ‘’ndambé’’, ce pain ne sert à rien », dit-il avec un humour décapant , montrant sa gourmandise .
Face à la hausse du pain et sa pauvreté supposée en qualité nutritive, notre interlocuteur dit porter sa préférence pour le couscous avec du lait caillé ou « Caacry ». Ce dès lors qu’il lui arrive de dépenser 700 FCFA ou 800 FCFA en pains chez la restauratrice d’à côté sans pour autant être rassasié. Aussi appelle –t-il les Sénégalais à retourner à la consommation des produits locaux moins chers et plus riches que le pain en éléments nutritifs. Mais face à leur dépendance à l’égard du pain, qui n’a d’égale que leur attachement au riz, ce n’est pas demain que les sénégalais changeront leurs habitudes alimentaires. Les mé- nages devront donc se résoudre à souffrir financièrement pour la consommation de leur traditionnelle baguette de pain. Autrement dit, de leur cher « mbourou ».
PLUS DE 2,5 MILLIONS D’ENFANTS À VACCINER CONTRE LA POLIOMYELITE
Alors qu’elle avait été déclarée vaincue, la poliomyélite a refait surface
Les responsables du Programme Elargi de vaccination (Pev) ont tenu hier un point de presse pour parler de l’épidémie de poliomyélite qui a refait surface, mais aussi de la campagne nationale de vaccination initiée pour contrer le virus. Elle va se dérouler du 17 au 19 décembre 2021 sur toute l’étendue du territoire pour les enfants âgés de 0 à 5 ans. Ainsi, 2.803.175 d’enfants sont ciblés.
Alors qu’elle avait été déclarée vaincue, la poliomyélite a refait surface. Causée par un entérovirus humain, cette maladie est très contagieuse et grave, d’autant que le virus peut envahir le système nerveux et provoquer une paralysie. Il n'existe pas un traitement. Le seul moyen est la prévention, notamment la vaccination. Raison pour laquelle, le Programme Elargi de Vaccination (Pev) a initié une campagne de vaccination à l’intention des enfants âgés de 0 à 5 ans.
Ainsi, plus de 2,5 millions enfants ont été ciblés pour être vaccinés en trois jours. Selon Dr Ousseynou Badiane, coordonnateur du Pev, «les prélèvements montrent que le virus est présent dans l’environnement et que tant qu’il est là-bas, tous les enfants sont menacés. C’est pourquoi, nous organisons ces journées de vaccination pour interrompre la circulation de ce virus».
Par ailleurs, des cas humains ont été recensés dans 06 régions. «A Dakar, nous avons le virus dans l’environnement, mais il n’y a pas eu de cas humains. Les régions touchées sont Diourbel (qui a enregistré la moitié des cas), Thiès, Louga, Fatick, Matam et Kaolack. Cette campagne permet de vacciner ceux qui n’ont pas été vaccinés mais aussi de renforcer l’immunité de ceux qui ont été déjà vaccinés», explique Dr Badiane qui table sur la stratégie du porte à porte. «Cela n’empêche pas d’aller dans les zones où il y a une forte concentration d’enfants pour les vacciner. Ce sera le cas au niveau des préscolaires, des crèches, mais aussi des lieux de rassemblement comme les gares routières, les marchés ou les quais de pêche. L’objectif est de vacciner plus de 2,5 millions enfants en trois jours», affirme-t-il.
Interrogé sur les raisons de la ré- apparition de la polio alors qu’elle avait été éradiquée, Dr Ousseynou Badiane évoque deux raisons. «En 2019, nous avions célébré l’éradication du virus sauvage qui est le plus agressif. Quand il y a beaucoup de virus en compétition, et qu’on parvient à en éliminer un, l’autre qui reste émerge. Les enfants qui étaient vaccinés seront vaccinés de nouveau. La deuxième chose, c’est qu’il n’y a pas un vaccin efficace à 100%. Donc, le fait de donner encore une dose permet de renforcer l’immunité des enfants qui étaient déjà vaccinés», explique le coordonnateur du Pev qui ajoute que ce virus est un dérivé. «Au Sénégal, nous n’avons jamais connu le virus dérivé, mais comme cela circulait dans la sous-région avec les mouvements des populations, il y a eu des contaminations».
Par ailleurs, Dr Badiane renseigne que la maladie peut toucher les adultes, mais ce n’est pas la cible réelle. «Au Sénégal, nous n’avons pas encore vu un cas de polio chez les adultes, mais cela peut arriver », précise-t-il. Et d’ajouter : «Dans l’environnement, nous avons recensé 12 cas et il y a eu 17 cas humains qui ont été détectés entre janvier et décembre. Les premiers cas humains ont été détectés à Touba».
A l’en croire, la transmission humaine a été rompue, mais le virus est toujours là. «Les vaccinateurs se rendront dans chaque maison pour administrer deux gouttes du vaccin à chaque enfant de 0 à 5 ans. Après la vaccination, chaque enfant vacciné doit être marqué au doigt. Cela permet de vérifier si tous les enfants sont vaccinés. Chaque maison doit également être marquée pour vérifier si toutes les maisons ont été visitées», indiqueDr Ousseynou Badiane, coordonnateur du Programme Elargi de Vaccination (Pev).