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27 juin 2025
À MONTPELLIER, LA FRANÇAFRIQUE CHERCHE SON NOUVEAU SENGHOR
EXCLUSIF SENEPLUS - La Françafrique, c’est le TER surfacturé pour les beaux yeux d'Alstom, c’est une autoroute financée par le peuple sénégalais, mais qui donne des avantages ahurissants à Eiffage - ENTRETIEN AVEC GUY MARIUS SAGNA
Cet entretien est tiré de l'ouvrage collectif contre le sommet de Montpellier dirigé par Koulsy Lamko, Amy Niang, Ndongo Samba Sylla et Lionel Zevounou. "De Brazzaville à Montpellier, regards critiques sur le néocolonialisme français" rassemble une vingtaine de contributions. Le projet a été initié par le Collectif pour le Renouveau africain (CORA). »
Qui est Guy Marius Sagna ?
Je suis un africain du Sénégal, né à Etomé, un village de Ziguinchor. Je suis un révolutionnaire anti-impérialiste panafricain, membre du Front pour une Révolution Anti-impérialiste Populaire et Panafricaine (FRAPP).
C’est quoi le Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine (FRAPP) ? Quel est le contexte de sa naissance ?
Le FRAPP est un mouvement citoyen et social de masse qui prône la révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine. Il est né du constat que plusieurs petites organisations se réclament du panafricanisme et de l’anti-impérialisme mais travaillent rarement ensemble. Nous nous sommes demandé : « qui sont ces panafricains qui veulent unifier nos 55 États autour d’un seul gouvernement fédéral sans pourtant réussir à unifier dans leur département, dans leur pays - le Sénégal par exemple - les différentes organisations qui se réclament du panafricanisme ». Or, comme le dit la sagesse populaire africaine : le bon cultivateur est celui qui commence à travailler le sol sous ses orteils. C’est forts de ces observations que nous avons invité plusieurs organisations à se retrouver en fin 2016 et début 2017 autour d’une plateforme pour combattre le franc CFA. Nous voulions aussi, ce faisant, mutualiser nos forces afin de mieux faire face à nos tâches ; car la plus structurée de nos organisations ne pouvait peser d'aucun poids face à l’État néocolonial du Sénégal et ses alliés, l’État impérialiste français et les autres impérialismes. Lors du dernier trimestre de 2017, cette plateforme a pris le nom d’une campagne politique dénommée : « Pour la souveraineté monétaire, France dégage ! ». Les populations, la presse et même certains de nos membres ont abrégé en « France Dégage ! ». Cette fédération d’organisations unies autour de l’abolition du franc CFA néocolonial a estimé que les maux contre lesquels les peuples africains devaient se battre allaient au-delà du seul franc CFA et que la France n’était pas le seul pays impérialiste duquel l’Afrique devait se libérer. C’est pourquoi, tout en maintenant la campagne « Pour la souveraineté monétaire, France dégage ! », la plateforme a été appelée Front pour une Révolution Anti-impérialiste Populaire et Panafricaine.
Quels sont les objectifs du FRAPP ?
Nos objectifs sont les suivants : contribuer à mettre au cœur du débat politique, économique et social au Sénégal et en Afrique les questions de souveraineté ; sensibiliser les populations sur la nécessité de transformer radicalement les relations entre l’Afrique et le reste du monde ; sensibiliser sur la nécessité de transformer radicalement les relations entre les populations et leurs élus ; soutenir les peuples au Sénégal, en Afrique et dans sa diaspora mais également tous les peuples en lutte contre l’exploitation, l’oppression capitaliste, impérialiste ; lutter pour l’égalité en droits et en dignité des femmes et des hommes et plus généralement contre l’oppression exercée sur les femmes ; implanter partout au Sénégal des structures du FRAPP afin de participer à édifier un rapport de force favorable aux révolutionnaires anti-impérialistes panafricains ; contribuer à l’union libre des peuples libres d’Afrique.
Quelles sont les revendications concrètes de « France dégage » ?
Le slogan « France dégage ! » est le résumé du nom de notre campagne « pour la souveraineté monétaire, France dégage ! ». Face aux manœuvres dilatoires relatives à la monnaie unique de la CEDEAO, le FRAPP a proposé, en attendant l’avènement de cette dernière, trois mesures qui ne coûtent absolument rien : 1) sortir les représentants de la France des organes de nos banques centrales ; 2) demander à la France de restituer les réserves de change des pays africains ; 3) fabriquer nos outils monétaires (billets de banques et pièces de monnaie) en Afrique et non en France. En résumé, nous prônons un autre type de « Frexit », c’est-à-dire un départ de la France de nos instances monétaires. Ce n’est ni la Chine, ni les États-Unis, ni l’Allemagne qui occupent nos 14 pays africains en se servant du franc CFA. C’est la France et nous estimons qu’elle doit partir de gré ou de force. Et surtout, qu’il ne lui appartient pas de fixer elle-même les conditions de cet inéluctable départ. Très rapidement, notre organisation a été appelée à élargir les contours des revendications et s’est intéressée à des problématiques autres que la monnaie. Les citoyens eux-mêmes se sont approprié le slogan et en ont fait ce qu’ils ont voulu, en le déclinant dans tous les champs ou notre souveraineté est confisquée. C’est ainsi que nous avons un « France dégage ! » militaire, un « France dégage ! » linguistique, etc.
La bataille contre le franc CFA est de nos jours au centre des préoccupations d’un certain nombre d’activistes africains et même d’autres continents. Que pouvez-vous nous en dire ?
À chaque époque historique, les peuples opprimés trouvent dans leur lutte l’équivalent du point d’Archimède qui leur permet de soulever l’impérialisme afin d’en triompher. A telle époque ce sont les Accords de Partenariat Économique, à telle autre, les ressources naturelles, à telle autre encore c’est la remise en cause des structures et institutions qui prend le dessus. Depuis fin 2016, c’est la bataille contre le franc CFA qui est à l'ordre du jour. Il faut féliciter toutes ces organisations et ces économistes abolitionnistes qui parfois ont marché séparément pour frapper ensemble et à d’autres moments ont marché et frappé ensemble. La libération de la parole sur la question, par des conférences-débats, publications et autres actes subversifs symboliques a permis de faire de la monnaie le « territoire » d’un plus grand nombre de citoyens des pays africains de la zone franc. Aujourd’hui, il serait difficile pour un candidat à la présidentielle d’envisager un programme sans mettre au cœur de celui-ci la question de la monnaie. Il en est de même pour les rencontres avec la presse où le candidat sera interpellé sur sa position et ses propositions concrètes sur la monnaie. C’est justement cela qui fait aujourd'hui peur à la France. Mais ce qui est sûr est que le franc CFA est une monnaie du passé. Elle n’a plus aucun avenir. Bientôt elle sera rangée à côté du rouet et de la hache de bronze. Et ce ne sont pas les manœuvres dilatoires, conservatrices déguisées qui retarderont sa mort.
À côté de la campagne « Pour la souveraineté monétaire France dégage ! », le FRAPP a également lancé « Auchan dégage ! » Pouvez-vous nous parler de cette campagne ?
Pour anticiper l’application des Accords de Partenariat Économique (APE) mais également pour fuir une rude concurrence chez elles, des grandes surfaces françaises se sont installées au Sénégal et en particulier à Dakar. L’enseigne la plus visible de toutes est Auchan avec ses nombreux magasins.
Dans un Sénégal où plus de 300.000 nouveaux jeunes demandeurs d’emplois arrivent chaque année sur le marché de l’emploi, des jeunes à qui ne sont proposés que 30.000 emplois ; dans un pays où le taux de mortalité des petites et moyennes entreprises est de 64% et où l’informel à une place prépondérante dans l’économie, l’installation de grandes surfaces comme Auchan ne peut qu’aggraver la situation. Il n’est pas nécessaire d’être un expert pour savoir que si les petits commerces français et les Gilets Jaunes se plaignent des mêmes magasins, ceux-ci ne feront qu’une bouchée des petits commerces et marchés traditionnels africains. Voilà pourquoi le FRAPP a lancé la campagne « Auchan dégage ! ». Nous avons agi de concert avec les commerçants et notre tournée commune nous a menés à Thiès, Diourbel, Kaolack, Mbour et dans plusieurs marchés traditionnels de Dakar. LE FRAPP a donné un contenu précis au slogan « Auchan dégage ! » en demandant : la suspension de l’installation des magasins de grandes surfaces ; l’organisation des états généraux du commerce intérieur ; la réglementation des magasins de grandes surfaces. La pression a été telle que c’est en plein rassemblement « Auchan dégage ! » à la place de l’Obélisque de Dakar que le président de la République a convoqué les représentants des commerçants au palais présidentiel pour leur soumettre un projet de décret. Nous en avons cependant montré les incohérences et les insuffisances. Ce décret stipule par exemple que la distance minimale entre deux magasins doit être de 800 mètres à vol d’oiseau contre 1000 mètres à vol d’oiseau entre deux marchés traditionnels. Le FRAPP a réagi en disant que s’il avait crié « Auchan dégage ! » avec les commerçants, ce n’était pas pour se retrouver avec des distances aussi ridicules. Ce n'est d'ailleurs pas tout car le décret stipule que les magasins déjà installés ne peuvent être remis en cause et qu’il y aurait désormais un comité régional chargé de décider de l’installation ou non d’un magasin de grande surface. Enfin, un arrêté est censé élaborer la liste des produits autorisés à la vente au détail. Cette lutte avait permis de combler un vide juridique, ce qui est une victoire indéniable. Mais le Président de la République et le ministre du Commerce ont réussi à maintenir les magasins déjà installés et à mettre sur pied des comités régionaux contrôlés par l’État qui y est majoritaire. Le Président de la République, pour affaiblir la mobilisation des commerçants, a même offert des quotas de sucre à certains dirigeants à la tête de l’UNACOIS Jappo (Union Nationale des Commerçants et Industriels du Sénégal). Quelle amère victoire ! Le FRAPP s’est rendu compte par la suite que ce que nous considérions comme des avancées infinitésimales, fruits de la lutte « Auchan dégage ! » n’allait même pas être respecté par l’État. En effet, Auchan a ouvert un magasin dans la localité de Tivaouane sans respecter les 1000 mètres de distance entre les magasins de grandes surfaces et les marchés traditionnels. Le FRAPP a saisi la Cour Suprême qui a pris une « décision néocoloniale » en nous déboutant de notre demande.
« Françafrique » : qu’est-ce que ce concept vous évoque ? Y a-t-il des illustrations concrètes des réalités de la « Françafrique » que vous pouvez citer, dans le cas du Sénégal par exemple ?
La Françafrique est un système par lequel la France, tout en accordant « l’indépendance » à ses colonies africaines, les maintient sous sa stricte domination. Et donc, nous pouvons dire pour nous pays africains pataugeant encore dans ce système impérialiste, à l’instar du mouvement indépendantiste martiniquais (MIM), que nous sommes des colonies « politiquement dominées, économiquement exploitées, culturellement appauvries et militairement occupées ». La Françafrique est la matérialisation du conseil d’Onésime Reclus : « Lâchons l’Asie, prenons l’Afrique : où renaître ? Et comment durer ? ». Notre digne prédécesseur Thomas Sankara disait que l’impérialisme est dans nos assiettes : regardons les grains de riz importés que nous consommons. Dans un pays comme le Sénégal, la Françafrique c’est la langue française comme langue de travail, c’est la présence militaire française. La Françafrique c’est aussi l’occupation monétaire française avec cette monnaie contrôlée par la France qu’est le franc CFA. La Françafrique c’est le Train Express Régional (TER), surfacturé à plus de 1000 milliards de francs CFA pour les beaux yeux de Alstom et de la bourgeoisie bureaucratique sénégalaise, et à des années-lumière des priorités du peuple Sénégalais. C’est aussi une autoroute à péage financée majoritairement par le peuple sénégalais, mais qui donne des avantages ahurissants à une entreprise privée française, Eiffage. C’est aussi la téléphonie et l’eau du Sénégal contrôlée par Orange, Free et Suez. La Françafrique c’est aussi l’exploitation des travailleurs sénégalais avec des licenciements arbitraires qui leur tombent dessus lorsqu'ils se battent pour leurs droits ou contre des conditions scandaleuses de travail à Eramet, l'entreprise française qui exploite une partie de notre zircon.
Vous avez souvent été en prison dans le cadre de vos combats. Est-ce le traitement réservé aux militants anti-impérialistes ?
D’abord très souvent faisant l’objet de violences inouïes ! Les agents des forces de défense et de sécurité ne font pas dans la dentelle, ni avec moi, ni avec mes camarades, ni avec d’autres citoyens qui ont le malheur de tomber entre leurs griffes. Ces violences de la police ou de la gendarmerie s’expliquent par le fait que ces deux institutions sont restées très coloniales car héritières directes des forces françaises d’avant « l’indépendance ». Et oui, on m'a également souvent jeté en prison, à trois reprises par exemple entre 2019 et 2021, en moins de deux ans. Aujourd’hui je me retrouve avec trois libertés provisoires pour chacune de ces affaires qui sont comme autant d'épées de Damoclès suspendues au-dessus de ma tête. Mais il ne s'agit pas seulement de moi car les membres du FRAPP sont traqués et violentés par des partisans du président Macky Sall un peu partout au Sénégal. Quand des suppôts de l’impérialisme sont au pouvoir dans un pays donné, transformé ainsi en néocolonie ou semi-colonie, la place de celles et ceux qui résistent est en prison. La persécution s’est accrue depuis les événements de février et mars 2021 pendant lesquels des intérêts français (stations Total, magasins Auchan, etc.) ont été directement ciblés par la colère d’un peuple qui exprimait son ras-le-bol d’un système politico-économique anti-national, anti-démocratique et anti-populaire. Le FRAPP a été mis au banc des accusés par la bourgeoisie bureaucratique collabo et sa presse. Aujourd’hui, les néocolonies sont si fragiles que tout fait peur à ceux qui gouvernent. Les populations y sont tellement opprimées que les conditions objectives de la révolution anti-impérialiste panafricaine y sont réunies. Et donc ceux qui maintiennent artificiellement en vie la néocolonie savent que la moindre étincelle pourrait réduire tout l’édifice en cendres. C’est pourquoi les droits politiques y sont très souvent piétinés. Pour un tel pouvoir, emprisonner est un mode de gestion, il s'agit de laisser en liberté ceux qui pillent les ressources du pays tout en s'acharnant sur ceux qui combattent leur système de déprédation.
Que vous évoque le concept de « sentiment anti-francais » utilisé par les officiels français et certains médias de nos jours alors que depuis toujours il semble que personne dans l’Hexagone ne se souciait de ce que les Africains pouvaient penser de la France ?
Les nazis qualifiaient la résistance française d’anti-allemande ; les États-Unis qualifiaient la résistance vietnamienne d’anti-américaine ; la Grande-Bretagne qualifiait la résistance des États-Unis d’anti-anglaise ; la Belgique disait des Lumumba et Mulele qu’ils étaient anti-belges ; la France qualifiait la résistance Upéciste ou algérienne d’anti-française. Alors si l’objectif est de nous ébranler en nous présentant sous des dehors fallacieux, c’est peine perdue. Nous sommes anti-impérialistes, ni anti-états-uniens, ni anti-français. Nous ne disons pas « fwansé dewo ! » mais « France dégage ! ». Par France, nous entendons l’État français que nous distinguons du peuple français. Nous entendons l’État impérialiste au service des intérêts des entreprises du CAC 40 qui opprime les Français, les entraînant vers diverses formes de suicide, la pauvreté et la condition de sans-domicile fixe, et qui opprime aussi à la périphérie du système capitaliste, les peuples et les travailleurs néocoloniaux. Ce qu’ils appellent « sentiment anti-français » est en réalité la progression de l’éveil anti-impérialiste et panafricain de Dakar à Bamako et de Niamey à Bangui. Par rapport à la situation d’il y a cinq ans, la jeunesse africaine parle aujourd’hui beaucoup plus des APE, du franc CFA, des diktats des institutions de Bretton-Woods et de divers accords léonins. Et cela fait peur à la France qui sévit aux quatre coins de la planète. Cette peur est d’autant plus grande que l'éveil des consciences africaines s’inscrit dans un contexte de rudes rivalités inter-capitalistes et d’émergence de pays qui réduisent les parts de marchés des entreprises du CAC 40.
Après plus de 60 ans des indépendances des pays africains francophones, nous en sommes toujours à revendiquer nos espaces de souveraineté véritable. Où donc situer les responsabilités des uns et des autres par rapport à ce qui semble être un échec ?
Les combats de nos prédécesseurs ont permis de remporter quelques victoires et d’imposer au colonisateur français un rapport de force l’obligeant à faire certaines concessions. Avant 1960, nos pays n’étaient ni réellement ni théoriquement indépendants. D'âpres luttes ont permis d’aboutir à une indépendance de forme et à la détention des insignes de la souveraineté internationale. Cependant quelqu'un comme Nkrumah ne tardera pas à tirer la sonnette d'alarme en disant de l'Afrique : « En réalité, son économie, et par conséquent sa politique sont manipulées de l’extérieur ». C'est ainsi que nous sommes passés de la colonie à la néocolonie. Les succès remportés n'ont donc pas suffi pour remporter la guerre, celle en vue de la souveraineté réelle. Pour nous cette première phase de la décolonisation a été un échec. L’essentiel est aujourd'hui de savoir en tirer les leçons. Je refuse de pointer un doigt accusateur sur nos devanciers qui ont fait ce qu'ils ont pu, chacun de nous doit se considérer comme responsable de l'échec actuel. Mais la faute la plus lourde est celle des bourgeoisies bureaucratiques qui ont été à la tête de nos États. Elles ont préféré servir l’impérialisme et leurs intérêts de classe au détriment de ceux des peuples africains.
Le Sommet Afrique-France aura lieu cette année à Montpellier du 07 au 09 octobre. Ce sommet verra la participation des « sociétés civiles africaines » et de certains intellectuels africains connus. Le FRAPP n’a pas été invité. Que pensez-vous de ce type de rencontre et des « sociétés civiles » qui y sont conviées ?
Ces sommets, qu’ils soient appelés France-Afrique ou Afrique-France, et l’ordre et le lieu où ils se tiennent n’y changent rien, sont des revues d’effectifs des pays et des présidents qui acceptent la tutelle française. Ces sommets sont des rencontres qui permettent à la France de prendre la jauge pour savoir quelle est cette Afrique qui accepte de contribuer à « l’histoire de France au 21e siècle » pour paraphraser François Mitterrand. Partout où il y a oppression, il y aura toujours une « société civile » et des « intellectuels » de service suppôts de l’impérialisme. La France impérialiste sait que les présidents africains en général et ceux des pays africains de la zone franc CFA n’ont aucune légitimité aux yeux des peuples qu’ils sont censés représenter et aux yeux de l’opinion publique française. Voilà pourquoi Paris a besoin du renfort et de la caution de collabos ou au mieux de réformistes prêts à laisser intacte la mécanique françafricaine. Le néocolonialisme est en crise profonde dans nos pays. La question est celle de la portée de nos actions sur le terrain. Que faire, en somme ? Faut-il sortir le néocolonialisme de sa crise ou sortir du néocolonialisme en crise ? L’impérialisme français et sa « société civile » et ses « intellectuels » cherchent à sortir le néocolonialisme de sa crise. Cela signifie aussi que nous sommes dans la même configuration que lors des « indépendances », quand la France a remis le pouvoir à celles et ceux qui ne se sont jamais vraiment battus contre la colonisation. Aujourd'hui aussi, elle choisit ses interlocuteurs et donne la parole à celles et ceux dont elle sait qu’ils n’exigeront rien. Le journal d’extrême-droite Action française disait du premier président du Sénégal qu’il était « le type de ces élites dont la France a le droit d’être fière ». La France manœuvre et cherche de nouveaux Senghor dans la société civile, parmi les intellectuels, des leaders qui pourraient reprendre à leur compte la prière du poète de Joal : « Seigneur, parmi les nations blanches, place la France à la droite du Père ».
Quelles sont les propositions que vous formuleriez dans l’optique de « refonder » sur des bases saines les relations franco-africaines ? A moins de militer pour une rupture totale…
Nous ne pouvons rien attendre de la France impérialiste. L’histoire de l’humanité a montré qu’une classe exploiteuse ne se suicide jamais en tant que classe. Ce suicide n'est concevable qu'au niveau individuel, comme le dit Amilcar Cabral. Les États-Unis par exemple ne vont pas renoncer d'eux-mêmes à leurs intérêts au Venezuela, en Colombie, au Panama. De la même manière, la France ne comprendra le langage anti-impérialiste que si l’on menace ses intérêts. Nous n’avons donc aucune proposition à faire à la France impérialiste. Nous devons nous en tenir à notre ligne anti-impérialiste et panafricaine. Il s'agit de décoloniser notre monnaie, notre budget, nos armées, notre commerce, nos constitutions, nos esprits. Et dans cette entreprise d'émancipation, celle à l’égard de la France a une part essentielle. La sagesse populaire africaine dit que si l’hyène ose défier l’éléphant, c'est qu'elle a senti de la faiblesse chez ce dernier. Les bourgeoisies bureaucratiques des ex-colonies africaines de la France, particulièrement des pays de la zone CFA, sont responsables de la politique de rapine exercée sur nos peuples par Paris et par d'autres puissances étrangères. Nous ne militons pas pour une politique d’autarcie, mais le gouvernement de l’Afrique, par l’Afrique et pour l’Afrique. Ce que les peuples de Chine, du Vietnam, de Cuba, d'Inde ont réalisé, l'Afrique peut le réussir.
SOMMET AFRIQUE-FRANCE, MACRON FAIT SON SHOW
En réunissant 3 000 Africains de l'Hexagone et de la diaspora, le président espérait conjurer la montée d’un profond ressentiment à l’égard de Paris sur le continent, un phénomène qu’il a lui-même contribué à aggraver
L'Humanité |
Marc de Miramon |
Publication 10/10/2021
C’est un véritable show à l’américaine que l’Élysée a orchestré ce vendredi à Pérols, dans l’agglomération de Montpellier. Entre 2 000 et 3 000 Africains de France et de la diaspora, pour la plupart triés sur le volet par le ministre français des Affaires étrangères et son réseau d’ambassades, devaient incarner une société civile moderne et connectée, pour « dépoussiérer » un format où se précipitent habituellement ministres et Chefs d’États, symboles d’une Françafrique surannée.
La « start-up nation » chère à Macron a pourtant connu quelques ratés. « Nous avons dû attendre deux heures pour rentrer. Au lieu de fonctionner avec un simple QR code, tout le monde devait faire la queue, présenter ses papiers pour finalement obtenir un badge d’entrée », s’agace un cadre ivoirien venu suivre l’événement pour le compte d’une agence gouvernementale. Dans les allées de l’Aréna de Pérols se croisaient chefs d’entreprise, figures de la macronie originaires du continent, sportifs, artistes, créateurs, et influenceurs. « Tous ces invités vont rentrer dans leur pays et auront peut-être une image changée de la France », espère Jean-Eric Sendé, éducateur sportif devenu assistant parlementaire du député Bruno Bonnell (LREM), et fondateur du Réseau international pour l’Éducation par le sport francophone (RESF). « Dans mon pays d’origine, le Cameroun, la détestation de la France a atteint des niveaux alarmants. Il faut infuser la jeunesse avec un autre message », ajoute-t-il.
Passé colonial et militaire
Armand, un quadragénaire diplômé de l’ENA venu de Yaoundé, confirme l’ampleur du phénomène : « Contrairement à la plupart des gens de ma classe sociale, je continue de prendre les transports publics et j’entends des choses incroyables. La population en général et la jeunesse en particulier détestent la France. On la rend responsable de tout : l’assassinat d’Idriss Déby, le coup d’État contre Alpha Condé, la montée du djihadisme, le pillage des ressources, etc. » Son explication ? Le passé colonial bien sûr – bien que le pays ait été colonisé par l’Allemagne avant de passer sous mandat français – mais surtout la guerre secrète pilotée par Paris entre 1957 et 1962. Occulté pendant des décennies, l’épisode sanglant de l’écrasement du soulèvement des indépendantistes de l’UPC, avec des méthodes comparables à celles employées pendant la guerre d’Algérie (assassinats ciblés, torture, guerre psychologique, bombardements au napalm…) a fait des dizaines de milliers de morts. « Peut-être qu’une ouverture totale des archives françaises pourrait crever l’abcès et permettre d’aller de l’avant, mais je ne suis même pas sûr que ça serait suffisant », soupire-t-il.
EXCLUSIF SENEPLUS - Cette typologie des enfants errants en souffrance renseigne amplement sur l’ivresse dans laquelle notre pays a plongée au-delà des limites acceptables. Dis-moi comment tu traites tes enfants, je te dirais quelle société tu produiras
Tous les jours et toutes les heures de la journée et de la nuit, nous croisons des jeunes enfants de la rue, dans la rue et à la rue de tous les âges sans que cela nous émeuve par ailleurs. Cette typologie des enfants errants en souffrance renseigne amplement sur l’ivresse dans laquelle notre pays a plongé au-delà des limites acceptables pour tanguer dans les pires incertitudes de notre avenir. Dis-moi comment tu traites tes enfants, je te dirais quelle société tu produiras. Pays de la teranga pour les autres pays de l’indifférence par rapport à ses propres enfants. Une véritable introspection s’impose à nous pour dire non à la traite et à la maltraitance des enfants au 21e siècle.
La problématique de la quête de pitance et enjeux socioéconomiques et politiques
La situation des enfants et le traitement dont ils font l’objet constituent un prisme sur leur place dans les projets de gouvernance. Un peu partout en Afrique les enfants arpentent nos rues devant notre indifférence collective ou notre addiction à les observer comme acteur de notre décor quotidien. En Afrique centrale, certains les appellent des enfants sorciers (Shegues), Talibé en Afrique de l’Ouest.
Aujourd’hui, la Protection sociale et les Conventions internationales sur la protection des enfants y compris aussi des adultes, constituent un enjeu important du point de vue de la gouvernance vertueuse et affective. En effet, le Sénégal dispose d’une source inépuisable de conventions internationales et de lois internes qu’il me plairait de mettre en perspective dans la situation précoloniale avec les migrations arabes pour le commerce, la situation coloniale et post-coloniale.
Cette situation est à mettre en relation avec l’introduction tardive de la religion musulmane avec les migrations arabes entre 1640 et 1840, seule puissance étrangère selon Vincent Montreuil, 1986. Les premiers Daaras qui ont été créés en cette période ont précédé l’École occidentale. L’introduction de l’Islam se faisait sur le modèle du djihad pour islamiser les populations. Le film « Ceddo » d’Ousmane Sembéne en est une parfaite illustration.
La situation de 1970 à la fin des années 1990, le Sénégal a traversé́ une situation économique difficile. Les chocs pétroliers, respectivement de 1973 et de 1970, doublés d’une sécheresse persistante au cours de la même période a engendré entre autres conséquences une baisse importante des recettes d’exportation et de profonds déséquilibres intérieurs et extérieurs. La récession économique va atteindre des proportions alarmantes dans le courant des années 1980 avec les politiques d’ajustements structurels de la Banque Mondiale (BM) et du Fonds Monétaire International (FMI) [au nombre de quatre, entre 1980 et 1993], immédiatement suivis de la dévaluation du franc CFA, intervenue en 1994. L’aggravation de la crise économique et la sécheresse a impacté sur les vastes mouvements migratoires des zones affectées vers les centres urbains avec un exode rural massif et un important phénomène de « daariasation » de l'’espace urbain et rural.
Des chiffres sans résonnance politique et de coeur
Les chiffres relatifs au recensement des enfants Talibés font l’objet de controverses du fait des enjeux politiques, sociaux, économiques et diplomatiques avec des données contradictoires et non exhaustives. Plusieurs sources d’informations et d’acteurs dans le recensement des enfants talibés selon les gouvernements.
Le recensement du Secrétariat à la promotion humaine 1967 dénombrait des enfants talibés mendiants, âgés de 6 à 14 ans, à 6.300 pour la ville de Dakar. Le recensement effectué par l’Union Nationale des Écoles Coraniques (Unec 1980,) avec un effectif des talibés au Sénégal à 60.000.
Étude Enda 2008, plus de 100 000 enfants impliqués dans la mendicité au Sénégal, 4. Save the Children Suède 2 000, l’analyse de la situation de l’enfant et de la femme effectuée révèle qu’il y aurait plus de trente-neuf mille (39.000) enfants mendiants, âgés de 0 à quatorze ans au Sénégal. Une enquête du gouvernement en 2014 révèle qu’il y aurait plus de 30 000 Talibés. Human right Watch a fait un rapport en 2019 qui a recensé plus de 100 000 enfants talibés au Sénégal. Dans la région de Dakar, une étude du CNTLP en 2014 a recensé plus de 1006 Daaras avec 54 837 enfants talibés dont 69% de garçons (38 079) et 31% de filles (16 758), 53% pratiquent la mendicité chaque jour et 91% de ceux-ci y consacrent plus de cinq heures par jour. Tous ces chiffres périodiques et non exhaustifs ont le mérite de révéler l’ampleur du phénomène des talibés et l’adaptation de l’opinion comme vecteur pour chasser les mauvais esprits ou solliciter des prières. Les derniers recensements nous fournissent des données sur 54 000 Talibés à Dakar sans compter les 154 000 recensés dans le département de Kaolack et les chiffres constatés au niveau des villes transfrontalièreres.
Gouvernance de la protection des enfants
Le phénomène de la mendicité des enfants de la rue a pris des proportions inquiétantes en milieu urbain pour prendre une forme singulière de traite des enfants qui varie selon qu’on soit en milieu urbain ou rural. Le cadre juridique et politique est bien en place avec :
-le Plan national d’action pour éliminer la mendicité des enfants (2013–2015) ;
- le programme concernant la réforme et la réglementation des daaras (2013) ;
- le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes (2012–2014) ;
- le Plan d’action national concernant la réforme légale pour l’incrimination des châtiments corporels et de toutes formes de violences faites aux enfants ;
- le Plan cadre national de lutte contre le travail des enfants 2012-2016 ;
- le projet de loi portant modernisation des daaras ;
- Cellule Nationale de Lutte contre la Traite des personnes (ministère de la Justice) ;
À cela, il faut ajouter le fait que la prise en charge des enfants est transversale avec l’implication des ministères de la Bonne gouvernance et de la protection de l’enfance, le ministère de la Femme, de la Famille et du genre, le ministère de la Santé et de l’action sociale, le ministère de la Jeunesse, le ministère en charge du Travail, le ministère de l’Intérieur, et le ministère de l’Économie, des Finances et du plan.
La coordination de toutes les interventions de protection des enfants se décline à travers le Comite intersectoriel de protection de l’enfant, le comité intersectoriel national contre le travail des enfants, le Comité technique national Mutilation génitale Féminine et le Comité de pilotage de la stratégie nationale de lutte contre les violences basées sur le genre. Le gouvernement sous le coup des injections américaines par rapport à la traite des enfants, avait décidé en juin 2016 de faire retirer les enfants talibés de la rue. Ainsi entre le 30 juin 2016 et le 26 mai 2017, 440 enfants accompagnés de leur mère dont 225 garçons et 215 filles ont été retirés de la rue, et 1145 enfants talibés dont 1131 garçons et 14 filles ont été également retire de la rue. C’est la volonté politique qui fait défaut devant la furie des lobbys du business religieux.
Les contours et détours de la traite des enfants
La mendicité des enfants est l’expression la plus achevée de la marginalité associée à la vulnérabilité. Le rituel de la mendicité en milieu urbain renvoie aux formes du paganisme avec la cola, le riz, le lait caille, les œufs, les bougies comme des offrandes. Il ne s’agit du pauvre (Miskine) qui se cache et qui reçoit des dons de personnes anonymes, c’est l’enfant prescripteur de la compassion auprès de sa pauvre mère ou envoyé par son marabout dans la rue. Leur nombre croissant pour ne pas dire leur envahissement dans les rues qui ne choque personne jure d’avec un circuit de recyclage de la pitance notamment avec la revente des morceaux de sucre, du lait, des baguettes de pains, des bougies, de la cola, des tissus, des feuilles blanches, aux boutiquiers, aux gargotières et aux vendeurs de café Touba et le transfert de l’argent au marabout.
La mendicité́ est une stratégie adaptative, une voie de survie, face à̀ des pouvoirs publics incapables d’offrir des réponses aux plus vulnérables de ses membres. Cette réalité́, que nul ne saurait nier, remet directement en cause les modes de « justice » distributive de l’État postcolonial. Plus largement encore, elle exprime le degré́ de précarisation de certaines populations dans le nouveau contexte de mondialisation. » [Sèye, 2010 : 216]
La Stratégie nationale de protection sociale (SNPS), 2014 p 41 : « Les enfants de la rue ou enfants en situation de rupture avec leur famille, constituent environ 1,3% des enfants de 6 à 18 ans (enfants sans attache familiale, enfants fugueurs, vivant d’expédients dans la rue). Ils sont plus nombreux à Saint-Louis (3,8%) ensuite à Kaolack 1,9%. À Dakar, ils représentent 0,7%, néanmoins leur nombre est plus important que dans les autres villes. Ils proviennent en majorité des régions de Diourbel, Thiès et Saint Louis, mais aussi des pays voisins (Guinée, Gambie, Mauritanie). Les orphelins ne représentent que 3% de l’effectif, 84% sont de parents divorcés. Les fugues ont souvent pour origine la maltraitance. Ces enfants sont souvent intégrés dans des bandes où la toxicomanie et les violences les guettent. L’enquête sur les enfants de la rue à Thiès et à Mbour (UNICEF, 1999) a montré que leur état nutritionnel et la fatigue physique qu’ils accumulent engendrent chez eux un fort taux de morbidité et 31,80% d’entre eux s’adonnent à l’usage de la drogue ».
À cela il faut ajouter les sévices et abus sexuels la prostitution juvénile et les Infections sexuellement transmissibles et le VIH.
Une société en mutation avec une transfiguration de la famille
Nous avons tous grandi avec ces enfants pour les avoir côtoyés ou même s’essayer à l’exercice par le jeu et le mimétisme durant les grandes prières du vendredi et ils faisaient partie du décor de la cite. Au-delà des chiffres ces enfants dans la rue, de la rue et a la rue reflètent en partie la place de l’enfant en Afrique avec une forte obligation de rendement à l’investissement dès la naissance. À l’origine de tout système religieux se situe un homme inspiré, qui émerge du groupe et dispense un enseignement qui serait le contenu du message qu’il a reçu de la puissance tutélaire.([1] ) Le Daara se définit comme une structure ou se transmet l’éducation islamique grâce aux maîtres et aux parents.([2]) Un maître coranique disait qu’il est plus difficile pour un talibé de se voir interdit de mendier, les heures dévolues pour mendier leur petit déjeuner, et diner sont les seuls moments de distraction pour eux. . Le phénomène des talibés est perçu comme une forme d’apprentissage à l’ascétisme et à la vie; Le daara ne forme pas à des métiers, ou un rôle, mais juste à être un croyant qui domestique son corps aux rigueurs et vicissitudes de la vie.([3]). À l’époque les apprenants donnaient tous les mercredis, une contribution symbolique de 25F (alarba) par apprenants de l’externat pour subvenir aux besoins du maître. Nous nous retrouvons dans une situation permanente de médiation pour ne pas dire d’intermédiation divine, parce que nous sommes incapables seuls d’accéder au sacré.
La convention des droits de l’enfant qui est la charpente de toute la logique humanitaire de protection de l’enfant, considère l’enfant comme un titulaire à part entière de droits, et non comme un objet à protéger. Nous sommes dans une situation ambiguë qui consiste à croire que la mendicité fait partie de l’échange symbolique entre un riz, sucre, bougie, cola lait, en échange des prières d’un talibé qui est un abonne matinal. Le développement urbain a laissé place à des stratégies de résilience des enfants talibés et des mendiants qui consistent à développer des stratégies marketing de la pauvreté avec des trajets cibles notamment devant les boulangeries, les banques, les guichets automatiques, les restaurants, les pâtisseries, les salons de thé. Avant ils faisaient le tour des maisons pour récupérer les restes des repas le matin, le déjeuner et le dîner et les familles ne peuvent plus fournir des restes quand la famille explose au point de vue démographique. La mendicité est ancrée dans la culture sénégalaise et marque tous les rituels de la naissance, au mariage, à l’examen, au Rendez-vous d’embauche, au baptême et à la mort. C’est impressionnant de voir dans la circulation le nombre de personnes conduisant de rutilantes voitures s’arrêter au niveau des feux rouges ou des carrefours pour remettre des sacrifices recommandés par le marabout.
Les enjeux de la mesure d’interdiction ne se limitent pas seulement au Marabout/Parents de talibés au niveau des gains et du dividende social, mais aussi ceux qui sont censés distribuer des aumônes tous les jours.
Plusieurs hadiths du prophète PSSL n’encouragent pas la mendicité. Celui qui, malgré ses moyens suffisants, demande aux autres se présentera le jour du jugement dernier avec un visage déformé” ; où : “Que quelqu’un parmi vous aille chercher du bois à revendre vaut mieux que de tendre la main pour demander l’aumône, qu’il l’obtienne ou non” ; enfin : “Tout homme qui ne cesse de demander aux gens viendra le jour du jugement dernier avec des mâchoires décharnées”.
Il faut une approche pédagogique et des mesures d’accompagnement pérennes et ne pas verser vers des solutions qui seront contournées par les acteurs au profit de nouvelles entités souterraines. La plupart des marabouts actuels avec des talibés sont les produits du même système avec des compétences professionnelles pénibles qu’ils ont abandonnées au profit de la traite des enfants. Les plus ruses passent par le mécanisme du financement arabe avec la Zakat pour créer des mosquées et des complexes scolaires baptises franco-arabe ou on apprend que l’arabe avec un système d’internat juteux ou les élevés peuvent contribuer de 25,000 à 125,000 par mois. La zone de Keur Maassar, Niacourab, Keur Mbaye Fall, Sangalkam sont réputés entre le nouvel eldorado des nouveaux prêcheurs de la classe moyenne avec des moyens motorisés (4X4 flambants neufs et un harem de femmes). Il faut reprendre Vuarin qui définit 4 pôles du système de protection sociale en Afrique à savoir (la sécurité sociale, politique sociale) le marché (Assurance, tontine) le la société civile (système populaire d’entre aide, solidarité familiale, parenté) et la religion (Charité) ; [4].
Cette forme de mendicité structurée autour des Daaras diffère de celle des familles de la sous-région avec des handicaps, des familles entières émigrent vers le Sénégal du fait de la prégnance de la mendicité et des revenus importants génères par la mendicité. La cartographie des rues de Dakar révèle un découpage thématique selon les types de handicaps moteurs, sociaux produits de l’exode rural massif bordant des rues ou des restaurants fast-food et les boulangeries pour faire le marketing de la pauvreté avec un enfant a bas âge sur le dos ou a cote de leur siège. Les territoires sont pris en fonction du potentiel de trafic humain commercial. L’hôtel des députes, l’hôtel Terranga, Centre culturel français, les restaurants, les gargotes, les boulangeries/pâtisseries, les gares routières, les hôpitaux, les marchés Sandaga, Tilene sont autant de lieux symboliques pour que les enfants talibés interpellent votre conscience humaine.
Au-delà des aspects émotionnels que le phénomène de la mendicité soulève, il est important que cela soit une opportunité pour la déconstruction de l’imaginaire des Sénégalais sur la place et la trajectoire de l’éducation de l’enfant ; Il est courant que les parents reçoivent des injonctions de leur famille pour les obliger à ce qu’on appelait le confiage des enfants. Il s’agit d’un phénomène familial en Afrique, qui consiste à transférer la prise en charge des enfants par d’autres consanguins que leurs géniteurs. (...) [C’est un] trait important de l’organisation des rapports entre parents et alliés. » [Lallemand, 1980 : 19]
L’agence Nationale de la statistique et de la Démographie du Sénégal a publié l’enquête sur la pauvreté et structure familiale (Epsf) qui révèle que la distribution des ménages selon le milieu de résidence fait apparaître qu’«il y a 14,3% d’enfants confiés à Dakar, contre 18,1% dans les autres villes. Et dans le milieu rural, ils sont 16% contre 84%. Ce qui fait un total de 22,2% contre 77,8%. Ces confiages qui procèdent de la même logique que les enfants talibés sont justifiés par les parents à travers la scolarisation avec 26,4% pour Dakar, 22,4 pour les autres villes et 18,8% en milieu rural. L’autre raison phare, c’est la situation difficile dans le ménage qui fait qu’à Dakar, on a 12,3%, 12,2% pour les autres villes et 5,1% en milieu rural. À côté de ces prétextes, il y a la raison pour étudier le Coran avec 13,1% à Dakar, 8,2% pour les autres villes et 31% en milieu rural.
Aujourd’hui, c’est important de changer de paradigme en insistant sur la nécessité de développer une véritable politique de protection sociale de la famille avec un programme d’éducation à la parente pour les jeunes en insistant sur les droits des enfants en vue de renforcer la souveraineté des droits des enfants, la responsabilité des parents, et la culture Citoyenne. Les normes de la ruralité en crise qui font de la mendicité des enfants comme un rite de passage de la migration en milieu urbain doivent être revisitées pour avoir un filet social adapte et généreux pour l’enfance. Le Sénégal constitue un Eldorado de la mendicité au niveau de la sous-région et abrite une multitude d’acteurs, pas seulement des mendiants, mais aussi des travailleurs migrants saisonniers (Navetane) dont le phénomène remonte même à la période précoloniale, coloniale et postcoloniale comme trajectoire de vie et de circularité des forces de travail. Mais nous devons tout faire pour mieux organiser cette solidarité disparate sans effet sur les leviers de la transformation sociale nécessaire sur de nouvelles valeurs positives.
[1] Professeur Assane Sylla , le fait religieux , Actes du collogue philosophie et religion , Universite de Dakar, 7-8 juin 1982, NEA
[2] Mbacke K, 1994 Daaras et droits de l’enfant, IFAN
[3] Gandolfi S L’enseignement islamique en Afrique noire « cahiers d’etudes africaines,vol XLIII , N°1,2,PP,261-277, 2003
[4] Varin R , 1990, « l’enjeu de la misère pour l’islam Sénégalais » Tiers monde t 31 ,n° 123, PP.600-621
journal d'une confinée, par annie jouga
BEER LA GLORIEUSE
EXCLUSIF SENEPLUS #SilenceDuTemps - Tout est propre : les ruelles, la plage. Le service d’assainissement a dix fois moins de travail. Gorée est en ces temps de Covid comme elle devait être lorsque Gorée savait transformer ses faiblesses en force
#SilenceDuTemps - Jamais post n’a suscité autant de réaction, en tout cas depuis bien longtemps et tout ça pour un mot, ou plutôt deux : « femme de » … Mais pourquoi donc personne ne me croit ?
Je puis rassurer les « ceux qui doutent » que je n’ai pas commencé à romancer mes chroniques, elles restent jusqu’à présent vérité vraie.
Rappelez-vous il y a 3 ans, j’annonce que je suis prête à être totalement dépendante. Si vous l’aviez vu le Papi Viou ce jour-là, il était affolé, n’y croyant pas vraiment.
Seulement je l’ai dit et redit avec un très grand sérieux et pour seule réponse obtenue : « tu aurais dû le dire il y a 35 ans » ! Va savoir pourquoi donc cela aurait dû faire moins peur avant !
Et puis il y a les « ceux qui y croient » - peu nombreux nakk ! -, me demandant d’être patiente.
D’autres lecteurs enfoncent le clou du défi lancé au futur écrivain. Mieux, il y a comme un ultimatum solidairement lancé … merci à vous de pousser, toujours et encore, on finira par y arriver.
J’apprends ce matin que sainte Zita est bel et bien réelle. Enfin si on peut le dire comme ça. De plus elle est la patronne des gens de maison, domestiques, servantes … Celle–là et surtout par les temps qui courent, est à implorer tous les soirs ou tous les matins plutôt, tant qu’à faire, pour bien commencer la journée.
Moment magique cette journée, j’ai passé tout l’après-midi sur l’île de Gorée. J’avais envie de voir comment, en dehors de toute obligation, les heures C. s’écouler là-bas.
Pur bonheur déjà ! Dans la chaloupe moins de 30 personnes à l’aller, sans personne le sac à dos rempli de pacotille à fourguer. Aucun guide à virevolter autour d’une possible proie et à peine une vingtaine au retour ne ramenant pas les mêmes absents du matin mais les quelques travailleurs de service dans l’île habitant à Dakar. Il est 17h, c’est la dernière chaloupe ; tous les passagers portant masque.
Sur la place des Droits de l’Homme (ex-place du Débarcadère) idem : pas de guides, ni marchands pistant le chaland, aucun gosse à l’affût.
Seuls quelques jeunes volontaires aperçus et venant du quai avec des charriots remplis de vivres offerts par de généreux donateurs.
Ce calme, si rare dans l’île en temps normal, on ne le retrouve que lorsqu’il fait très froid et à partir de 19/20h où plus un chat ne traîne jusqu’au matin.
J’ai déambulé près de 5 heures. Il fait beau, ni chaud ni froid, un peu de vent ça aide à marcher. Aucun restaurant, aucun musée, aucun marché ouvert, juste quelques boutiques vendant des produits de soudure.
Tout est propre, les ruelles, les places, la plage. Le service d’assainissement a dix fois moins de travail, les poubelles ne débordent pas comme à l’accoutumée. Plus de montagne de déchets à la décharge !
Oserai-je frapper à la porte de qui que ce soit quand la consigne donnée est « Restez chez vous ». J’ai donc continué de marcher. À mon compteur santé, j’aurai fait 7,6 km en retirant les 2,5 km A/R entre l’embarcadère et la maison. Le compte est bon. En chemin, j’ai parlé avec certains installés devant chez eux, devant leur boutique pour ensemble évaluer, réfléchir à l’après C. Et toujours « ne pas recommencer comme avant » revient dans les discussions.
À méditer sérieusement.
Avant de partir je m’arrête, me couche sur une balustrade au bord de l’eau. J’attends la dernière chaloupe, personne ne me remarque et pour cause, il n’y a pratiquement personne qui passe. Seul le vent qui souffle doucement s’entend et au loin de jeunes enfants.
En fait Gorée est bien là, dans sa plus belle robe, dépolluée de tous ce qui lui fait du tort, ce qui nuit. Sûrement comme elle devait être des siècles durant, lorsqu’il n’y avait qu’une chaloupe par mois, lorsque Gorée savait transformer ses faiblesses en force. Dakar n’existant pas, la vraie vie était conçue et consommée par les Goréens, sûrement le Gorée de Rose Chatel, l’arrière-grand-mère de Mamina, Gorée que l’on appelait en ces temps-là « Beer la Glorieuse ».
Au loin, la chaloupe tourne à la bouée Tacoma et m’arrache à ma rêverie. Pas question de la rater. Je quitte avec regret cette ambiance où même la mer semble se reposer…
Jour 37
Apprendre des étudiants ! Cela fait aussi parti des équilibres de l’enseignement, même de petits rien, je comptabilise.
Cet après-midi je me suis réjouie d’apprendre d’un de mes étudiants que les cartes Google peuvent être paramétrées en fonction des dates voulues. « Mais c’est génial », me suis-je exclamée !
J’ai oublié de demander s’il est aussi possible de savoir comment était Dakar à ma naissance… ? Je suis sûre qu’entre eux, ils ont dû en douce se moquer. Bon, ils ne seront pas les seuls. Mon ami, Mamadou Jean, que j’appelle régulièrement au secours dès que j’ai un petit problème avec ma « machine », mais lui seul sait que je viens de loin … Mes premiers cours d’informatique à la rue Carnot, où nous avions notre première agence, dans les années 80, j’étais si réticente que même toucher le clavier quand il fallait passer à la pratique, je n’y arrivais pas. Comme si le fait de toucher allait me transformer.
J’ai eu le même problème avec le téléphone portable. Le même Mamadou Jean, toujours en avance sur tout le monde dans ce domaine, avait acheté un abonnement à tout le personnel et comme il me voyait très lointaine, j’ai eu droit à un portable, un numéro avec abonnement. Il pensait ainsi me ferrer à sa technique. J’ai résisté des mois et découragé, il a offert le téléphone à sa maman.
Seulement 2002 est arrivée, je ne sais ce que cela vous dit mais à moi, une année charnière, les élections municipales, et me voilà engagée, élue et tout le temps sur le front goréen quand je n’étais pas à l’agence. Combien de fois j’ai dit : « prête-moi ton téléphone, je dois régler un problème au bureau … » Et autant de fois j’ai entendu me répondre : « mais achètes-toi un téléphone quand même ». Un an après, j’avais un téléphone et paraît-il, j’en étais accro’, disent les mauvaises langues.
J’aime le cinéma, je veux parler de celui qui se passe dans une vraie salle de cinéma, comme celle de mon enfance. Et tout à l’heure, pour répondre à la sollicitation d’un ami professeur à l’Ucad, je l’ai aidé à retrouver les salles de Dakar et à les situer : un jeu sympa qui m’a rappelé cette période où je passais ma vie au cinéma.
Une fois passé l’âge où les parents vous choisissent le programme et chez nous c’étaient les films de Cape et d’Épée et les films spectaculaires du genre Ben Hur …, je me suis fait mes propres programmes et à Dakar, nous avons eu la chance d’avoir tous les cinémas du monde allant des classiques russes (Eisenstein), japonais (les Kurosawa et Cie), français (les vieux films des années avant celles de la Nouvelle Vague) et surtout Italiens y compris les Westerns. Mais aussi des films africains, peu nombreux certes. Allez au cinéma « Le Rialto » en plein air pour voir le film « Les oiseaux » d’Hitchcock… fantastique dans tous les sens. Et d’ailleurs qui se souvient de l’emplacement de ce cinéma ? Le fait qu’il soit remplacé par la Banque Centrale BCEAO (le siège) et bien plus valorisant que « El Malick » transformé en centre commercial ! Et puis, pendant longtemps la séance de cinéma commençait par un court métrage appelé « les actualités sénégalaises ». Nous n’avions pas de TV encore et Paulin Soumanou Viera, le réalisateur, nous tenait au courant des événements du pays mais aussi de l’Afrique, dans le monde et ensuite deux longs métrages. On en avait pour notre argent. Je me souviens que nous payions 250 F la séance et avec mon amie Maimouna nous avions un carnet sur lequel nous notions tous les films vus durant une année et le record battu, devinez ? 300 films dans une année, c’est à peine croyable ! Je passais vraiment ma vie au cinéma.
Où placer la bonne limite de ce qui est permis, possible, impossible, interdit en ces temps de C. ?
J’ai vraiment le sentiment de m’être déjà posée la question ! Mais apparemment pas de réponse. Ma sœur Mémé Lolo me raconte tout à l’heure qu’elle s’est offerte avec 2 ou 3 copines un bel après-midi, en respectant les barrières me dit-elle … Plaisir de siroter une, deux, trois … coupes de champagne, question d’oublier un moment cette situation tourmentée et au grand dam de son fiston passant par-là, trouvant sûrement insensé que 3 petites vieilles prennent des risques pour du champagne elles qui soit-disant, sont les premières cibles de C.
Mais bas les masques !
Jour 38
« S’appeler pour autre chose que pour dire sa compassion, son soutien à un ami lorsque la mort frappe ». Ainsi m’interpelle mon amie Marième de Jo’burg qui vient de perdre un proche. En fait elle s’interpelle elle-même. C’est vrai, notre dernier échange téléphonique, quelques mois avant celui-ci, pour partager à distance sa douleur, elle avait perdu un proche.
Oui je comprends que dans ces cas-là on a presque honte, et on se surprend même à dire : « je n’appelle pas pour dire bonjour, comment ça va, pourquoi des condoléances… ?»
Souvent aux enterrements on y retrouve ceux/celles que l’on ne voit nulle part ailleurs que là-bas et pareil, à chaque fois on se dit « on devrait faire l’effort …
Les enterrements réduits à leur plus stricte expression par temps de C. ; j’y suis confrontée de plus en plus, normal non avec l’âge.
Je me souviens, plus jeune je disais à Mamina : « Mais tu passes ton temps au cimetière à enterrer quelqu’un » et elle de me répondre : « ne t’inquiètes pas, ton tour viendra et tu en feras autant ! »
Pourtant ma tante préférée, Mame Boy, disait souvent :« celle-là, elle choisit ses morts », en parlant de ma présence très « calculée » aux enterrements ! La coquine, elle m’avait cernée ! Je choisis effectivement, sans laisser cela dit, percevoir ce qui est enfoui …
Aujourd’hui, je suis fâchée avec ma feuille de papier, elle aussi n’a pas envie d’entendre plus que ces quelques lignes « tristounettes » déjà griffonnées, mais ainsi va la vie !
En pensant quand même au jour, proche je le souhaite, où je pourrai déclencher le compte à rebours de cette chronique, je vais me chercher un petit verre de punch à la vanille. Il en reste un peu dans le placard … comme ça fait du bien !
La fête du travail de C. ne sera pas un jour comme les autres, alors attendons demain voir …
Annie Jouga est architecte, élue à l’île de Gorée et à la ville de Dakar, administrateur et enseignante au collège universitaire d’architecture de Dakar. Annie Jouga a créé en 2008 avec deux collègues architectes, le collège universitaire d’Architecture de Dakar dont elle est administratrice.
GRAND-PLACE, LIEU DE DÉSINFORMATION ET D'EXPERTISE EN TOUT
Ils sont une partie du décor de nos quartiers. Mais les grand-places ne sont pas que des espaces à palabres. Elles sont pour beaucoup un espace de partage d’informations, vraies ou fausses. Ici, l’expert peut être contredit par un profane
Ils sont une partie du décor de nos quartiers. Mais les grand-places ne sont pas que des espaces à palabres. Elles sont pour beaucoup un espace de partage d’informations. Qu’elles soient vraies ou fausses, ces informations sont distribuées à grande vitesse. Ici, l’expert peut être contredit par un profane. Tout est toléré.
Il est midi passé. Le soleil darde de chauds rayons. Entre va-et-vient incessants, d’autres préfèrent se réfugier à l’ombre d’un arbre. À Guediawaye, au quartier Notaire, non loin de l’hôpital Roi Baudouin, une sorte de tente fait office de grand-place pour chauffeurs de clandos, vendeurs, laveurs de voitures. Tous s’y retrouvent même si les premiers sont majoritaires. Entre siège de véhicule usé, banc, chacun se débrouille pour se trouver une place. Ça discute de tout. La parole est à qui veut la prendre, quitte à parler en même temps.
Si certains prennent le soin d’écouter la radio, la plupart se contentent de bribes d’informations glanées sur les réseaux sociaux pour concocter leur revue de presse. « Il paraît que Guy Marius est pris en otage », lance un chauffeur qui venait juste de garer sa voiture. C’est parti pour des analyses de toutes sortes. « C’est quelqu’un qui fait peur au pouvoir. S’il n’est pas prudent, il risque d’être éliminé », alerte un autre. « Il n’a pas peur. Il a été enfermé à plusieurs reprises, mais ce n’est pas ce qui va le faire reculer. C’est pourquoi ils l’ont pris en otage pour lui faire peur », ajoute quelqu’un d’autre.
En un temps record, l’information fait le tour de la grand-place. Les plus réactifs se permettent même de partager sur WhatsApp. Policier à la retraite, le vieux Massamba joue bien son rôle de régulateur. Alors que tous avaient fini de croire à la prise en otage de l’activiste, il lui suffit de quelques clics sur des sites crédibles pour donner la bonne information. Comme si de rien n’était, on passe à un autre sujet. De la cherté de la vie aux élections locales, tout y passe.
Les intellectuels ou la bonne information
La grand-place située en face de la Police de Guédiawaye est une des plus anciennes du coin. Elle regroupe professeurs à la retraite, anciens commis de l’administration… Ici, il y a un système qui permet de disposer de tous les journaux le matin sans se ruiner. C’est à tour de rôle, explique quelqu’un. Très sélectifs dans le choix des journaux, ils dépensent 600 FCfa par jour. Entre un quotidien sportif et des généralistes, ils disposent d’une bonne palette de lecture. « Nous sommes autour de 13 personnes. Chaque semaine il y a six personnes qui sont désignées pour acheter le journal. Mais ce sont les autres qui lisent en priorité. Celui qui achète peut rentrer avec son journal, à moins qu’il décide de l’offrir à quelqu’un », explique Diaby, instituteur à la retraite. Ici, ça débat sur tous les sujets. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres garages où l’écrasante majorité est analphabète, on ne raconte pas n’importe quoi ici. En plus des journaux, les vieux ne ratent pas le journal à la radio. Si certains préfèrent les chaînes locales, d’autres restent scotchés à Rfi. C’est une question d’habitude, souffle un vieillard, abonné à cette radio depuis plusieurs années. Avec les journaux et la radio, il est sûr d’avoir un résumé de l’information mondiale.
Selon lui, si beaucoup croient en toutes les informations qui émanent des grand-places, c’est parce que par le passé, seules des personnes ayant servi pendant des années s’y retrouvaient. Chacun, dit-il, mettait son expérience au service. « L’actualité y était décortiquée. Certains pouvaient même, dans leurs analyses, prédire des choses, surtout en politique. Mais, aujourd’hui, même de simples chômeurs peuvent créer une grand-place. À l’époque, à travers leur profil, les membres de grand-places inspiraient respect », analyse-t-il.
« C’est le meilleur endroit pour décompresser »
Même s’il n’est pas le plus âgé, Mame Mbaye est le régulateur de la grand-place des chauffeurs. Une responsabilité qu’il doit à sa ponctualité et à sa régularité. Tôt le matin, il est sur place, nettoie, range et s’installe. « C’est grâce à lui qu’on a interdit la cigarette et les insultes ici. Celui qui insulte est obligé de payer une amende de 200 FCfa sinon on ne lui autorise plus l’accès à l’endroit », explique un vendeur de café, non loin de là.
Selon le régulateur, au-delà d’un simple espace de discussion, la grand-place permet à beaucoup de ses membres de changer d’air. « Je connais des gens qu’on décrit comme colériques mais qui s’épanouissent ici. Le simple fait de trouver à qui parler de plusieurs choses peut soulager. Aujourd’hui, poursuit Mame Mbaye, les liens sont tels que certains peuvent même se confier à des membres. C’est devenu une famille ».
Baye Mor a su compter sur la présence de ses compagnons quand il traversait des périodes difficiles dans son ménage. « J’étais vraiment au bord de la rupture. Un jour, alors que je venais de péter un câble à la maison et prêt à divorcer, je suis sorti pour aller griller une cigarette. En me promenant, je me suis retrouvé à la grand-place. Un des vieux a compris que je n’étais pas dans mon assiette. Il s’est rapproché de moi et Dieu sait que c’est cette discussion qui a sauvé mon ménage », raconte-t-il. Depuis ce jour, il a mesuré l’importance de la grand-place.
YOUSSOU N'DOUR VA SORTIR UN NOUVEL ALBUM
Le nom de l’album est encore gardé secret, mais on sait déjà qu’il sera composé de dix titres. Dix morceaux écrits dans des conditions particulières, expliquent Bouba N'Dour
Au Sénégal, le roi du mbalax Youssou N'Dour annonce la sortie d’un nouvel album le 12 novembre prochain. Un album et un retour sur la scène musicale attendus alors que le leader du Super-Étoile avait sorti son dernier opus en 2019. Son dernier single Waññi Ko, qui date de juillet, avait provoqué une forte attente chez ses admirateurs.
Le nom de l’album est encore gardé secret, mais on sait déjà qu’il sera composé de dix titres. Dix morceaux écrits dans des conditions particulières, expliquent Bouba N'Dour, frère de Youssou N'Dour et producteur de l’album.
« C’est un album qui est inspiré un peu de toute cette période, un peu compliquée avec le Covid-19 où il s’est retranché chez lui et qu’il a travaillé, où il a eu le temps d’écrire et de vraiment s’inspirer. Donc, c’est un album qui vient du Sénégal », raconte-t-il.
Tyson Fury a écrit un nouveau chapitre de sa fabuleuse histoire dans la nuit de samedi à dimanche à Las Vegas. Il a vacillé dans le 4e round.
Mais le Britannique est resté debout pour imposer sa supériorité à un Deontay Wilder plein de courage et d’abnégation. Vainqueur par KO à la 11e reprise, le "Gipsy King" a conclu cette lutte d’anthologie de la plus belle de manière.
En portant son invincibilité à 32 combats. En dominant Wilder pour la deuxième fois. Et surtout en conservant cette ceinture de champion du monde des poids lourds.
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QUAND LES PÊCHEURS ÉTAIENT PLUS RICHES QUE LES FONCTIONNAIRES...
Au Sénégal, les pêcheurs n’ont pas toujours été dans la précarité. Ils ont connu des périodes fastes avec une situation bien enviable parce qu’ils s’en tiraient avec suffisamment d’argent. Tout le contraire de ces dernières années. Témoignage
Dans la deuxième partie de l'entretien accordé à AfricaGlobe, le pêcheur Pape Oumar Samba,évoque cette belle époque de la pêche au Sénégal, où les pêcheurs pouvaient gagner le multiple du salaire d’un fonctionnaire
Le secteur de la pêche est de plus en plus difficile au Sénégal sous l’effet combiné de la surpêche et du changement climatique, dont les pêcheurs doutent de la réalité sur le secteur. Les ressources se raréfie, les océans sont en tension. Les lébous, qui sont pêcheurs de pères en fils depuis les temps immémoriaux, pensent à d'autres perspectives pour leurs survies.
Des jeunes générations ont compris qu’avec la gouvernance du secteur, combinés sans doute aux effets du changement climatique, il n'y a plus d'avenir dans le secteur. Tant et si bien qu'ils commencent à investir d’autres secteurs d’activité. C’est le cas au village traditionnel de Ngor où les jeunes deviennent cuisinier, restaurateurs, etc.
Des décennies auparavant, les ressources halieutiques étaient abondantes et les pêcheurs vivaient mieux. Ils pouvaient surtout gagner plus d'argent par mois que les fonctionnaires, des centaines de milliers de francs par mois. Mais aujourd'hui, l’avenir de cette communauté est hypothéqué.
LES RETRAITÉS CRIENT LEUR RAS-LE-BOL
Dans la rue ce samedi 9 octobre, entre la Place de la Nation (ex-Obélisque) et le rond-point Rts, les retraités du Sénégal ont dénoncé la gestion jugée nébuleuse de l’institution de prévoyance retraite du Sénégal (IPRES), entre autre maux.
Dans la rue ce samedi 9 octobre, entre la Place de la Nation (ex-Obélisque) et le rond-point Rts, les retraités du Sénégal ont dénoncé la gestion jugée nébuleuse de l’institution de prévoyance retraite du Sénégal (IPRES), entre autre maux.
"On est maltraité par les dirigeants de l’IPRES, qui sont principalement Mamadou Racine SY, qui est le PCA, et les responsables à la Direction. Ce qu’on veut, c’est très simple, d’abord, la réforme des textes de l’IPRES qui datent de 1958, au temps du Général de Gaulle", campe leur président et porte-parole du jour. Dembélé Diop de poursuivre : "ensuite, c’est la prise en charge des retraités, on n’arrive pas à se soigner.
Arrivés à l’hôpital, on nous dit que l’IPRES leur doit de l’argent. Alors qu’ils débloquent tous les ans quatre milliards rien que pour les médicaments." D’où la revendication portant sur le 3e point qui est l’audit financier : "on doit savoir comment roule l’IPRES", enchaîne, dans ce sillage, Diop.
Enfin, il pose le problème concernant "les détournements". Dans son argumentaire, concernant ce point, le retraité a réactualisé le scandale financier dans la gestion des tickets entre avril 2018 et janvier 2019. Pour rappel, dans cette affaire, tout serait parti d’un audit interne après que les factures de certains prestataires concernant les tickets subventionnés à hauteur de 75% par l’IPRES, pour la restauration du personnel, et qui aurait atteint des montants faramineux avec un écart défavorable de 207 millions F CFA, représentant le stock de tickets non distribués aux agents.
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LE CHÔMAGE, LES PETITS BOULOTS, LA MUSIQUE ET MOI
Malmené par le chômage, Corvo Phenomeno a dû faire tout ce qui lui tombait sous la main comme activité pour survivre. Tour à tour vendeur de journaux, aide-maçon, carreleur, docker avant sa trouvaille avec la musique - Entretien
Dans la 3è partie de l'entretien avec AfricaGlobe Tv, Corvo raconte une autre partie de sa vie. Malmené par le chômage alors qu’il a quitté trop tôt l’école, Corvo Phenomeno a dû faire tout ce qui lui tombait sous la main comme activité pour survivre. Tour à tour vendeur de journaux, aide-maçon, carreleur, docker, le jeune artiste a fait tout ça avant de retrouver son chemin : la musique. Sa philosophie est qu’il n’y a pas de sot métier. Tout ce qui peut lui apporter dignement un pécule, il ne crache pas dessus.
Artiste positif, Corvo Phenomeno souhaite que tous ceux qui l’écoutent soient aussi positifs, qu’ils aient de la motivation et surtout confiance en eux. Ne pas se laisser abattre par les contingences et les problèmes du quotidien. Tel un coach, le jeune artiste veut transmet l’énergie.
Pour lui, chaque personne doit garder le sourire même quand tout ne va pas forcément bien. Et pour cause chacun est toujours un modèle ou une source d’inspiration pour quelqu’un d’autre. Suffisant pour donner une image zen qui nourrisse l’espoir d’un tiers.