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16 mai 2025
COMMENT LA DETTE DU SENEGAL A EXPLOSE EN 20 ANS
L’encours total de la dette extérieure du Sénégal est passé de 4,650 milliards de dollars (1 dollar = 622 FCfa au cours actuel du dollar) en 2010 à 39,950 milliards de dollars en 2023.
L’encours total de la dette extérieure du Sénégal est passé de 4,650 milliards de dollars (1 dollar = 622 FCfa au cours actuel du dollar) en 2010 à 39,950 milliards de dollars en 2023.
Dans ce stock, la part de la dette extérieure à long terme est passée à 32,826 milliards de dollars en 2023 contre 4,198 milliards de dollars en 2010. La moitié (50 %) est constituée de dette multilatérale. Mais, on note une part croissante de la dette privée (33 % du total), passant de 1,048 milliard de dollars en 2010 à presque 16 milliards de dollars en 2023.
Le stock de la dette extérieure à court terme est estimé à 4,858 milliards de dollars en 2023. Le service de la dette est ainsi estimé à 1,527 milliard de dollars en 2023 contre 101 millions de dollars en 2010. Par créancier, la Banque mondiale arrive en tête (23 % du stock de la dette multilatérale du Sénégal), suivie de la Banque africaine de développement (10 %), de la Chine (7 % de la dette bilatérale) et de la France (6 %).
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LES UNES DE LA PRESSE DE CE JEUDI 5 DECEMBRE 2024
Sud Quotidien, Le Témoin Quotidien, L’As, Le Soleil, Walf Quotidien, Le Quotidien, Yoor-Yoor Bi, , Libération, EnQuête, L'Observateur
KEEMTAAN GI - CES BIENHEUREUX !
Belle performance ! Nous sommes ainsi l’un des pays les plus endettés du continent. Qui parmi vous pourrait s’en offusquer ? Dis donc, vous aussi, c’était pour la bonne cause ! Le coût de notre émergence. La chanson éculée et reprise comme un refrain par des gens qui s’en fichaient de notre niveau d’endettement. Ils avaient toujours la belle formule qu’ils nous servaient en guise de somnifères pour nous endormir. Et puis, n’ont-ils pas construit les plus belles infrastructures que nous envient nos voisins de la sous- région ? Ils nous ont saoulé d’une hypothétique émergence qu’ils étaient les seuls à apercevoir à partir de leurs volumineux comptes bancaires. Selon un rapport qui se présente comme « la source la plus complète et la plus transparente de données sur la dette extérieure des pays en développement », à fin 2023, le Sénégal est le pays le plus endetté du continent, avec un stock de dette de 40 milliards de dollars, soit 133 % de son revenu national brut (RNB). Bon, je crois vous l’avoir dit. Les calculs me donnent des tournis. Pendant qu’ils s’endettaient et s’amusaient avec les chiffres qu’ils maquillaient à la manière des « make-up » des nanas – une véritable supercherie esthétique-, le peuple barbotait dans une extrême pauvreté. Bref, c’était de la cosmétique. Bien entendu, alors que le bon peuple trimait au quotidien, il se trouvait de bienheureux à bien bouffer le fruit de leurs « escroqueries intellectuelles ». Parmi ces fortunés, des gens de notre corporation qui ne compte pas que de pauvres hères comme ce vilain et grincheux Kàccoor Bi. On apprend que le Palais de l’ex-Chef payait les salaires de quelques entreprises de presse. Ah, les veinards ! Et ça se passait dans un pays où tout partait en vrille. Des instants héroïques au cours desquels la parole était libérée pendant que les écrits explosaient. On se réfugie derrière la liberté que nous confère une profession pour tirer sur tout ce qui bouge. En désaccord avec tout le monde dans sa position de bienpensant qui ne se reconnait aucun sens interdit. Faisant feu de tout bois. On se croit tout permis et s’autorise tous les écarts. Des instants de délaissement qui font que vous regardez les gens de haut. On a raison sur tout le monde et gare à celui qui oserait se dresser contre lui. Même pour le rappeler avec courtoisie à l’ordre. Ça vous fait penser à des personnes ? On se calme ! Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d'une pure coïncidence. Mais selon la délatrice, ces avantages supprimés, ont fait perdre la raison à ces bienheureux. Vous avez compris maintenant ? KACCOOR BI - LE TEMOIN
DIOMAYE FAYE AUX EMIRATS ARABES UNIS
Le président de la République séjourne depuis hier aux Emirats Arabes Unis où il effectuera une visite officielle du 04 au 06 décembre 2024 à l’invitation de son altesse Sheikh Mohammed bin Zayed Al Nahyan Président des Emirats. A l’issue de cette visite, le chef de l’Etat se rendra au Forum de Doha au Qatar du 06 au 08 décembre à l’invitation de son Altesse Sheikh Tamim bin Hamad AL Thani Emir du Qatar. Ce forum est un événement international consacré aux grands enjeux globaux tels que la gouvernance, la sécurité et le développement durable selon une note de la Présidence.
AMINATA TOURE « THIAROYE, C’EST TOUT SIMPLEMENT UN MASSACRE… »
Avec Aminata Touré, les mots sont précis et nets. Interrogée par Jeune Afrique (voit page 4) sur ce qui s’est passé à Thiaroye le 01 décembre 1944, elle sera sans équivoque. « Les tirailleurs qui ont combattu auprès de soldats français réclamaient leurs droits, mais ils ont eu pour seule réponse des rafales de mitrailleuses. Ce fut un massacre et il n’y a pas d’autres mots qui puissent définir cette tragédie. C’est une évidence historique, il n’est jamais trop tard pour la reconnaître. En février 2017, le président Emmanuel Macron lui-même avait dit que la colonisation était un crime contre l’humanité. Sa reconnaissance de ce qu’il s’est passé à Thiaroye s’inscrit donc dans cette lignée. Si c’est un crime contre l’humanité, cela doit donner lieu à des réparations » dira l’ancien Premier ministre.
SOUVERAINETE MILITAIRE
Restons toujours avec Aminata Touré. Sur la présence des militaires français au Sénégal, elle ne met pas aussi de gants. «On compte développer des partenariats avec tout le monde mais sous d’autres formes. Cela peut être des échanges de renseignements ou de la formation. Mais il faut se rappeler pourquoi les bases militaires étaient en Afrique. C’était pour venir au secours de gouvernements complètement à la solde et à la merci de la France. Nous avons dépassé cette période. Cela ne veut pas dire que c’est la fin de la coopération militaire avec la France, la Chine, les États-Unis ou qui que ce soit. Nous restons ouverts, mais les termes changent. Aujourd’hui, les Africains ont davantage de souveraineté et cela passe par la souveraineté militaire » argumente-t-elle.
ASSEMBLEE NATIONALE LES NOUVEAUX DEPUTES RETOURNENT A L’HEMICYCLE CE VENDREDI
Les députés de la 15ème législature n’auront pas de répit. A peine installés ce lundi 02 décembre, ils retournent à l’hémicycle ce vendredi pour la ratification des listes des membres des Commissions permanentes. Cette étape s’inscrit dans la continuité des travaux entamés le 2 décembre dernier, lors de la première session de l’Assemblée nationale. Au cours de cette session inaugurale, El Malick Ndiaye a été élu président de l’Assemblée nationale. Le bureau a également été constitué, permettant aux députés de désigner ses membres. La prochaine étape concerne désormais la validation officielle des Commissions permanentes. Les Commissions permanentes jouent un rôle central dans le processus législatif et de contrôle parlementaire. Au total, l’Assemblée nationale compte 14 Commissions permanentes (Finances et Contrôle budgétaire, Affaires économiques, Aménagement du Territoire, Urbanisme et Transports, Développement rural, Développement durable et Transition écologique, Énergie et Ressources minérales, Lois, Décentralisation et Droits humains, Affaires étrangères et Intégration africaine, Défense et Sécurité, Éducation, Jeunesse et Sports, Culture et Communication, Santé et Solidarité nationale, Comptabilité et Contrôle, Délégations. Les membres des Commissions sont désignés au début de chaque législature et à l’ouverture de la session ordinaire annuelle. Leur composition reflète la représentation proportionnelle des groupes parlementaires, incluant les députés non-inscrits. Le processus suit ces étapes. Chaque groupe parlementaire propose ses candidats une heure avant la séance plénière. Les listes sont ratifiées en séance par l’Assemblée. Après leur constitution, chaque Commission élit son bureau composé d’un président, de deux vice-présidents et d’un secrétaire.
REGULATION DES MEDIAS LA DEPUTE ANTA BABACAR NGOM SOMME LE MINISTRE ALIOUNE SALL DE S’EXPLIQUER
Anta Babacar Ngom Diack, députée de la 15 ? législature installée le lundi 2 décembre dernier, a adressé une série de questions écrites au ministre de la Communication, des Télécommunications et du Numérique, Alioune Sall. Dans sa correspondance, la parlementaire s’appuie sur les dispositions du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale pour solliciter des éclaircissements sur la publication récente de la liste des organes de presse dits « conformes » à la réglementation en vigueur. La première question posée par Anta Babacar Ngom Diack porte sur les bases légales qui définissent la conformité des organes de presse. Elle demande : « Quels sont les critères spécifiques définis par la législation sénégalaise ou les régulations sectorielles pour déterminer la conformité des organes de presse ? Ces critères ont-ils été validés par les instances compétentes en matière de régulation des médias ? ». Sur le plan de la transparence, elle interroge les mécanismes garantissant l’impartialité du processus. «Quels mécanismes précis sont en place pour garantir l’impartialité et la transparence dans le processus de sélection des organes de presse dits conformes, en particulier pour ceux éligibles aux partenariats avec les institutions publiques ou aux appuis financiers de l’État ? ». La députée questionne également la méthode employée pour élaborer la plateforme d’enregistrement des organes de presse. Elle souhaite savoir si cette dernière a été conçue en concertation avec des acteurs clés, notamment le Conseil des Diffuseurs et Éditeurs de Presse du Sénégal (CDEPS). Par ailleurs, elle s’intéresse au sort des organes jugés non conformes et demande : « Quelles mesures ont été mises en place pour accompagner les organes de presse considérés comme non conformes afin de leur permettre de régulariser leur situation ? Existe-t-il un mécanisme d’appel ou de recours pour ces derniers, et, le cas échéant, quelles en sont les modalités ? ».
ASSEMBLEE NATIONALE AMADOU MAME DIOP PASSE LE RELAIS A EL MALICK NDIAYE
Restons à l’Assemblée nationale pour signaler la passation de services entre les présidents Amadou Mame Diop et El Malick Ndiaye. Une cérémonie simple et courtoise qui a permis au président sortant de dresser l’état des lieux de l’institution parlementaire et une transmission formelle des dossiers en cours. D’ailleurs dans un message transmis au peuple sénégalais avant cette rencontre, le président El Malick Ndiaye a réaffirmé sa volonté de bâtir une Assemblée nationale dynamique en phase avec les préoccupations des citoyens afin de répondre plus efficacement aux défis majeurs du pays.
PETROLE 2,94 MILLIONS DE BARILS PRODUITS EN NOVEMBRE
Le puits de pétrole de Sangomar continue d’afficher une bonne dynamique de production. Selon un rapport de production parvenu à la Rédaction, la production totale du site Sangomar pour le mois de novembre est de 2,94 millions de barils de pétrole brut. Au cours de ce mois, 3 cargaisons d’un volume total équivalent à 2,89 millions de barils ont été enlevées et commercialisées sur le marché international. En 2024, la production annuelle devrait s’établir autour de 15 à 16 millions de barils de pétrole brut. Ce nouvel objectif est au-dessus de la cible initiale de 11,7 millions de barils.
LE SÉNÉGAL CHAMPION AFRICAIN DE LA DETTE
Le pays consacre plus du tiers de ses recettes d'exportation au seul remboursement de sa dette, contre moins de 20% pour la plupart de ses voisins. Avec une dette représentant 133% de son RNB et 545% de ses exportations, Dakar bat des records
(SenePlus) - La Banque mondiale vient de publier son rapport sur la dette internationale 2024, et les chiffres concernant le Sénégal interpellent. Avec une dette extérieure culminant à 39,95 milliards de dollars fin 2023, le pays s'impose comme l'un des États africains les plus endettés proportionnellement à ses capacités économiques.
L'analyse comparative révèle une situation alarmante : la dette sénégalaise représente 545% des exportations du pays, un ratio qui pulvérise les moyennes régionales. Cette proportion dépasse largement celle des autres économies majeures du continent : la Côte d'Ivoire (203%), le Ghana (257%), ou encore le Nigeria (163%). Même des pays traditionnellement considérés comme fortement endettés présentent des ratios plus modérés, à l'instar du Maroc avec 180%.
Le poids du service de la dette illustre la gravité de la situation : 37% des recettes d'exportation sont englouties par les remboursements, contre 21% pour la Côte d'Ivoire et 19% pour le Cameroun. Ce fardeau représente 9% du Revenu National Brut (RNB) sénégalais, compromettant sérieusement les capacités d'investissement public dans les secteurs essentiels du développement.
Une dépendance marquée aux créanciers multilatéraux
La structure de l'endettement sénégalais révèle une autre vulnérabilité : la prédominance des créanciers multilatéraux, qui détiennent 50% de la dette. Cette proportion, nettement supérieure à celle observée au Nigeria (33%) ou au Maroc (38%), traduit une forte dépendance aux institutions financières internationales. La Banque mondiale-IDA (23%) et la Banque africaine de développement (10%) figurent en tête des créanciers.
Malgré ces indicateurs préoccupants, le Sénégal continue d'attirer les capitaux. Les flux nets atteignent 10 milliards de dollars en 2023, dont 7,36 milliards de dette nouvelle et 2,64 milliards d'investissements directs étrangers. Ces chiffres, supérieurs à ceux du Nigeria (2,5 milliards) ou du Ghana (0,8 milliard), suggèrent une confiance persistante des investisseurs internationaux.
La situation s'inscrit dans un contexte particulièrement défavorable : hausse globale des taux d'intérêt, ralentissement économique post-Covid, et volatilité des marchés internationaux. La Banque mondiale souligne que ces conditions affectent particulièrement les pays fortement endettés comme le Sénégal.
Un défi crucial pour l'avenir
Cette position de "champion" de la dette pose un défi majeur pour le Sénégal. Le pays doit impérativement augmenter ses capacités d'exportation et diversifier ses sources de financement pour réduire sa vulnérabilité financière. Sans une stratégie efficace de gestion de la dette, le risque d'une spirale d'endettement pourrait compromettre les perspectives de développement du pays.
La comparaison avec d'autres nations africaines montre que le Sénégal a atteint un niveau critique d'endettement qui nécessite des mesures urgentes. Le rapport de la Banque mondiale sonne comme un avertissement : sans correction de trajectoire, le pays pourrait faire face à des difficultés croissantes pour honorer ses engagements financiers.
PAR Less Salla
JUB-JUBAL-JUBBANTI OU LE PARACHÈVEMENT DU SOPI
EXLCUSIF SENEPLUS - Les similitudes sont frappantes entre ces deux mouvements qui ont promis une transformation radicale de la société. Mais le nouveau pouvoir, fort de sa double victoire électorale, semble avoir retenu les leçons de l'échec du PDS
Le rideau vient de tomber sur les élections législatives anticipées du 17 novembre, avec une victoire écrasante du parti au pouvoir Pastef les Patriotes qui rafle 130 députés sur les 165 sièges de l’hémicycle. Ce succès vient couronner celui de la présidentielle du 24 mars qui avait porté le candidat Bassirou Diomaye Faye à la tête du pays, et conforter le parti et ses sympathisants dans leur plébiscite. Le Sénégal a encore une fois montré sa maturité démocratique en se prononçant sans heurt, le jour du scrutin après une campagne teintée de violence et de provocations et dérapages multiples. Avec l’installation de la nouvelle législature le 2 décembre, l’heure est désormais au travail.
Neuf mois après son accession au pouvoir, le Pastef a désormais les coudées franches pour matérialiser son agenda national de transformation Sénégal 2050 présenté à la communauté nationale et internationale le 14 octobre dernier. Cette période de gestation a accouché d’un bébé bien portant et selon la formule consacrée « le bébé et la maman se portent bien ». Maintenant, il faut que le bébé grandisse en bonne santé, soit bien éduqué, et se réalise pleinement dans les 25 prochaines années que représente l’horizon fixé par le référentiel 2050.
La maman Pastef a déjà annoncé que l’éducation de son bébé de projet devra se faire suivant les valeurs du Jub-Jubal-Jubbanti qui incarne la rupture ou changement radical d’avec les modes de gouvernance passés. Cela n’est pas sans rappeler le mouvement Sopi de Maitre Abdoulaye Wade comme dépositaire des frustrations et revendications du peuple, qui avait entretenu l’espoir de transformer le Sénégal en une terre de valeurs partagées comme socle de rayonnement et d’émergence. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. De plus, la soi-disant deuxième alternance de 2012 qui émanait des flancs des libéraux, à l’ombre du patriarche Wade a très vite montré ses limites, incapable de changer en profondeur le mode de gouvernance et de gestion de la chose publique pourtant annoncée sobre et vertueuse.
Aujourd’hui, l’avènement des pastéfiens au pouvoir, après une longue lutte faite de multiples rebondissements douloureux et énigmatiques, mettant fin à douze ans de mackyavélisme, fait renaitre l’espoir d’une rupture qui rappelle bien celle qui était attendue de la première alternance sous la déferlante bleue du Sopi.
Nous écrivions à ce sujet, dans une tribune intitulée L’insoutenable légèreté de Maître : Discours de la méthode, publié dans l'édition du vendredi 2 décembre 2005 du journal Le Quotidien : « Pour tous les Sénégalais, désormais actionnaires de l’alternance, l’accession de Maître Abdoulaye Wade au pouvoir inaugurait une nouvelle ère de rupture d’avec l’ancien système socialiste et ses méthodes décriées sous tous les fronts, par les politiques, la société civile et les différentes couches de la population qui réclamaient un nouveau leadership. La demande sociale rimait avec un appel à l’espoir par le changement profond des méthodes jusque-là appliquées. Le slogan Sopi, que l’on traduit à tort et de manière réductrice par le substantif « changement », était plus que jamais d’actualité pour le peuple qui vivait une véritable « révolution » pacifique et ordonnée. Mais le Sopi, plus qu’un changement de personnes auquel l’opinion l’avait faussement réduit (« tout le monde sauf Diouf »), veut en réalité dire « Changeons !» L’impératif ici contraste avec le substantif statique « changement », en ce que le verbe appelle à une double action d’introspection et de mutation vers un Sénégal régénéré à travers un nouveau contrat social qui affranchirait ses citoyens des gabegies et pratiques clientélistes des socialistes usés par le pouvoir à l’aube du troisième millénaire. Le peuple sénégalais venait ainsi de signer un chèque à blanc à Maître Wade et rempli d’espoir, avait misé sur le vieil homme pour renvoyer les pratiques du dinosaure socialiste à la préhistoire. »
Nous retiendrons ici que le « Sopi » traduit mécaniquement par « changement » avait été dévoyé de sa portée transformatrice. En réalité, le « Sopi » comme slogan fait appel à l’action et devrait être plutôt traduit par « Changeons ! » Et là se posent les questions suivantes : changer qui ? quoi ? comment ? Pour répondre à ces interrogations, il faudrait disséquer les trois dimensions que renferme le concept même de Sopi. Tout d’abord au niveau individuel, le Sopi comme transformation de soi, c’est-à-dire de sa manière de voir et d’être qui a longtemps été théorisé comme le nouvel homo-senegalensis, affranchi des pesanteurs du post-colonialisme et conscient de sa propre responsabilité dans son émancipation. Ensuite, vient la dimension Sopi comme l’appel à changer sa manière de faire vis-à-vis de son entourage. Et enfin, la dimension du Sopi vu comme l’injonction de changer les habitudes et les modes opératoires et de gouvernance au niveau collectif.
Changeons ! La première étape du Sopi est donc celle de la transformation personnelle, se changer soi-même, comme premier gage de rupture car il nécessite de remplacer notre logiciel intérieur par une prise de conscience et un dépassement personnel. Une fois ce travail accompli, changeons nos comportements pour impacter positivement les choses autour de nous et transformer notre environnement direct. Puis, changeons notre action collective et corrigeons les erreurs du passé pour sortir du statu quo ante, et réaliser nos aspirations légitimes en tant que peuple. Toutefois, le PDS et son leader Maitre Wade une fois au pouvoir ont péché sur le « comment ? ». Comment transformer cette manne du Sopi en ciment fédérateur d’une société avide de changement et de dépassement ?
Pour comprendre cet échec, il faut se rappeler, qu’en s’installant au palais, les premiers mots du président Wade étaient : « nos problèmes de sous sont terminés », son premier directeur de cabinet, Idrissa Seck dixit (d’ailleurs on attend toujours le livre « Lui et moi » qu’il nous avait promis). Quel message envoie-t-on à sa jeunesse, à son peuple qui aspire au changement et à une gestion rigoureuse des maigres deniers publics, avec une déclaration pareille ? L’accession au pouvoir et faire de la politique d’une manière générale était désormais vue comme un moyen de s’enrichir rapidement. De plus, c’est sous le magistère de Maitre Wade que nous avons entendu dire que « xalis da niu key lijenti » une sorte d’hymne à la roublardise légitimée par certains actes des proches et sympathisants du président et autres arrivistes qui engraissaient la thèse de l’enrichissement illicite. Dès lors, la vertu qui devait être érigée comme soubassement du Sopi pour porter la rupture tant désirée, était absente.
Comment changer soi-même, son entourage et son mode de fonctionnement de manière durable si l’attitude et le comportement donnés par le leadership au sommet du pays ne sont pas louables ? La suite du magistère de Maitre Wade est assez révélatrice du désenchantement de la population devant les pratiques affairistes, clientélistes et dérives antidémocratiques du pouvoir libéral qui fut sanctionné aux urnes en 2012, faute d’avoir su répondre de manière satisfaisante à la demande sociale, malgré quelques réalisations notables au plan des infrastructures.
La situation actuelle ressemble fort à celle de la première alternance en matière d’engouement populaire mais surtout par le parcours des deux figures politiques et chefs de partis emblématiques du PDS et du Pastef qui ont porté leurs mouvements respectifs au sommet, à savoir Maitre Abdoulaye et Ousmane Sonko. Ils ont des traits de personnalités et des trajectoires similaires à bien des égards. Le charisme et l’aura des deux personnages, leur côté populiste, la nature de leur combat contre un establishment décrié par le peuple appelant à la rupture, et leur panafricanisme affiché, sont autant de points communs qu’ils partagent allègrement.
Toutefois, la différence majeure qui pourrait voir le parti Pastef porter et parachever le combat jadis entamé par le PDS à travers le Sopi, est dans la manière de gérer le pays une fois au pouvoir. Là où le PDS a rencontré des difficultés à transformer le Sopi en action par manque de repères et valeurs partagées, le Pastef a, aussitôt arrivé au pouvoir, élevé la droiture ou « jub » comme valeur cardinale de son action. Ainsi, le triptyque Jub-Jubal-Jubbanti (ou Se redresser-Redresser-Dresser) a été érigé comme la colonne vertébrale qui va soutenir la réalisation du projet de société de Pastef tel qu’il a été présenté aux Sénégalais et théorisé à travers le référentiel 2050.
Jub ou « Se redresser » : c’est se tenir droit, c’est être honnête. C’est un appel à s’assumer, à changer soi-même, comme l’a été la première étape du Sopi, au niveau individuel après une prise de conscience. Le Sénégalais, à l’instar des ex-colonisés a longtemps marché courbé, la tête en bas, ignorant le plus souvent ses droits les plus élémentaires et subissant la loi du plus fort. Le temps est venu de se redresser, de relever la tête et de marcher droit.
Jubal que l’on peut traduire par redresser, mettre sur le droit chemin, vise à changer les comportements et impacter positivement son entourage, correspondant à la deuxième étape du Sopi décrite plus haut. C’est faire ce qui est juste et faire son devoir.
Jubbanti ou Dresser, veut dire littéralement « remettre à la verticale », c’est-à-dire détordre ce qui est tordu ou rectifier ce qui est hors champs, ou encore mettre sur les rails c’est-à-dire ramener sur le droit chemin. Il y a là, la notion de corriger les choses, pour le bien commun. En fait, toutes ces actions du Jub-Jubal-Jubbanti sont mues par le désir de rendre compte, à soi-même et à son peuple. Le pouvoir en place a donc donner le la.
En effet, les premières mesures de reddition des comptes sont en phase avec les promesses de campagne et combat du Pastef depuis sa création, laissent espérer que la démarche est logique et soutenue. Le discours de la méthode pastéfienne est jusque-là cartésien, donc rationnel. Les moyens de mettre en œuvre leur projet de société, le référentiel 2050, sur base de rupture, sont déployées au fur et à mesure de l’évolution de leur trajectoire allant de la conquête à l’exercice du pouvoir. C’est ce que le PDS n’a pas pu réussir avec la déconnexion entre la lutte vers le sommet et la réalité des faits dans l’exercice du pouvoir. L’aurait-il réussi que Macky Sall ne serait certainement pas arrivé au sommet de l’État, pour en plus décevoir les espoirs de tout un peuple à qui il avait promis la patrie avant le parti.
Aujourd’hui, le Pastef a une belle occasion de réaliser la vraie deuxième alternance du Sénégal, à travers le Jub-Jubal-Jubbanti, en instaurant un mode de gouvernance basé sur la droiture avec des atouts tangibles de faire de l’équité sociale une réalité. En effet, qui dit droiture invoque les valeurs d’honnêteté, de dignité, de liberté, et de fierté. Le jub-Jubal-Jubbanti appelle les Sénégalais à se tenir droit, libres et à marcher ensemble vers la prospérité et le développement. Pour cela, il faudrait que la justice soit là pour tout le monde. La réussite du projet exige que le nouveau leadership se tienne droit et s’applique les règles qu’il invite les citoyens à adopter. Ce n’est qu’ainsi que la population qui s’érige désormais en sentinelle de la démocratie et de la justice sociale, pourra accompagner et veiller sur la mise en œuvre du référentiel Sénégal 2050. La page des compromissions devra être définitivement tournée, et une nouvelle s’ouvrir. Le futur du Sénégal sera écrit par les dignes fils et filles du pays ou ne sera pas.
En réalité, le Jub-Jubal-Jubbanti est voué à réussir là où le Sopi a buté, c’est-à-dire sur l’affranchissement de tout un peuple qui désormais relève la tête et décide de prendre son destin en main. Le renouveau du Sénégal est en marche et se caractérise déjà à l’interne par la reddition des comptes, et la mise en place d’un pool judiciaire financier, la séparation effective des pouvoirs avec l’indépendance affirmée de la justice, l’assainissement du secteur galvaudé de l’audiovisuel, l’exigence du paiement des impôts en souffrance auprès des entreprise, les actions prises en vue régler le secteur de l’immobilier et mettre fin à la gabegie foncière du patrimoine national. A l’externe, déjà, nous observons la redéfinition des relations avec les institutions de Bretton Woods, la renégociation des contrats d’affaires désavantageux pour le pays, le suivi alerte de l’exploitation de notre énergie pétrolière et gazière, mais aussi le départ annoncé des troupes étrangères stationnées sur le territoire sénégalais dont celle de l’ancienne métropole particulièrement, qui représenterait urbi et orbi, une étape importante dans l’affirmation de notre souveraineté nationale. La commémoration ce 1er décembre, des 80 ans de la tragédie des tirailleurs sénégalais du camp de Thiaroye en 1944, qui a vu la France reconnaitre ce massacre, en est belle une illustration.
Toutefois, le chèque à blanc signé par le peuple en faveur du pouvoir n’est pas dépourvu de conditionnalités intrinsèques. Nul n’a envie de revoir les pratiques abusives d’un passé récent se reproduire, et les leaders du Pastef en sont certainement conscients et sont donc avertis. La période de grâce est terminée, place à l’action : Sopi ak Jub-Jubal-Jubbanti !
LA JOURNALISTE LORRAINE DE FOUCHER REMPORTE LE PRIX ALBERT LONDRES
La reporter a écrit sur les viols en série subis par Gisèle Pelicot, des femmes migrantes violées, des victimes du milieu pornographique et des adolescents tueurs à gages.
Lorraine de Foucher a remporté le prix Albert Londres du journalisme francophone. La journaliste d'investigation du journal Le Monde a publié plusieurs enquêtes sur les violences faites aux femmes.
La reporter Lorraine de Foucher a écrit sur les viols en série subis par Gisèle Pelicot, des femmes migrantes violées, des victimes du milieu pornographique et des adolescents tueurs à gages.
"Elle s'attaque à des sujets trop longtemps tus dans notre société", a salué le jury.
Lorraine de Foucher a commencé au Monde comme pigiste en 2014, avant de devenir membre du service Société. Elle avait été préselectionnée en 2023 pour le prix Albert Londres pour le documentaire réalisé avec Jean-Baptiste Renaud "Philippines: viols d'enfants en ligne, l'enfer derrière l'écran".
Le prix de l'audiovisuel a été décerné à Antoine Védeilhé et Germain Baslé pour le film "Philippines: les petits forçats de l'or", qui expose le travail d'enfants exploités.
Le prix du livre a recompensé Martin Untersinger, journaliste au service Pixels du Monde, pour "Espionner, mentir, détruire", une investigation sur les cyberattaques.
Le prix du reportage audiovisuel a été créé en 1985 et celui du meilleur livre d'enquête en 2017.
LES DÉPUTÉS CONVOQUÉS EN SÉANCE PLÉNIÈRE VENDREDI
L’ordre du jour porte sur la ratification des listes des membres des Commissions permanentes.
Les députés sont convoqués en séance plénière le vendredi 06 décembre 2024 à 10 heures, informe un communiqué de l’Hémicycle.
Selon la source, l’ordre du jour porte sur la ratification des listes des membres des Commissions permanentes.
L’élection du bureau de la nouvelle Assemblée nationale a été précédée lundi, tard dans la soirée, par un vif débat tournant autour de l’interprétation des règles encadrant la parité.
Tout est parti d’un blocage né de la volonté du groupe Takku Wallu Sénégal (opposition) d’attribuer le poste de vice-président qui lui revenait de droit à Mohamed Ngom dit Farba. Ce à quoi le groupe majoritaire, Pastef-Les Patriotes s’est opposé, arguant qu’il devait revenir à une femme conformément aux règles de la parité.
Aïssata Tall Sall, présidente du groupe de l’opposition a fermement défendu la position de son camp, rejetant les accusations de non-respect des droits des femmes. Elle a estimé que sa désignation à la tête des parlementaires de Takku Wallu Sénégal à l’Assemblée nationale était la preuve d’un attachement au respect des droits de la femme.
‘’Pour la première fois, notre groupe a investi une femme comme présidente. Cela illustre clairement notre engagement en faveur des droits des femmes”, a-t-elle tenu à faire valoir.
L’ancien ministre de la Justice n’a pas manqué de contester l’interprétation des articles 13 et 14 du règlement intérieur concernant la parité, précisant qu’aucune disposition ne l’impose dans ce contexte précis. “L’Assemblée nationale n’est pas un tribunal. Si une disposition est jugée violée, seuls les tribunaux peuvent en décider,” a-t-elle rappelé.
Concernant la proposition pour le poste de huitième vice-président, elle a souligné que son groupe avait déposé une liste complète dès 11 heures du matin, conformément aux exigences, et désigné leur candidat, M. Mohamed Ngom.
“Nous avons respecté la loi et déposé nos documents dans les délais. Le débat a uniquement porté sur l’application de la loi, qui doit être discutée dans un esprit de concertation et non d’accusation” a-t-elle ajouté.
De son côté, le président du groupe parlementaire de Pastef-Les Patriotes, Mohamed Ayib Salim Daffé, a souligné que la liste de candidats, déposée auprès du Secrétariat général, respecte scrupuleusement les exigences de parité conformément aux textes.
“Selon le calcul basé sur la méthode de la plus forte moyenne, les sept premières positions de vice-présidents nous reviennent, et nous avons respecté la parité sur cette liste,” a-t-il indiqué, en dénonçant ce qu’il considère comme des manœuvres visant à bloquer les travaux de l’institution parlementaire.
“Depuis ce matin, une autre liste de candidats ne respectant pas la parité a été déposée. Ce qui constitue une tentative délibérée de retarder le processus et de faire croire à l’opinion publique que c’est la majorité qui bloque,” a-t-il déploré.
Le poste de 8e vice-président de l’Assemblée nationale est finalement revenu à la députée du groupe Pastef-Les patriotes, Ramatoulaye Bodian après que le président de l’institution, Malick Ndiaye, a tranché en faveur du parti au pouvoir.
GUINÉE, DES JOURNALISTES APPELLENT À LA LIBÉRATION DE LEUR CONFRÈRE HABIB CAMARA
L’enlèvement du journaliste par des hommes en tenue militaire, dans la banlieue de Conakry, a suscité l’indignation de l’Association Guinéenne de la Presse en Ligne (AGUIPEL). L’organisation dénonce une atteinte grave à la liberté de la presse.
L’Association Guinéenne de la Presse en Ligne (AGUIPEL) a exprimé son indignation face à l’enlèvement de Habib Marouane Camara, journaliste et administrateur du site d’information Le Révélateur224, membre actif de l’association.
Selon les informations relayées dans un communiqué par l’AGUIPEL, « notre confrère a été kidnappé par des hommes en tenue militaire, qui l’ont extrait de force de son véhicule et conduit à une destination inconnue , le mardi 3 décembre 2024, dans la banlieue de Conakry ».
« Si ces faits se confirment, ils constituent une grave violation de la liberté de la presse, de toutes les lois en vigueur et même de l’Avant-projet de la Constitution qui dispose en son Article 10 alinéa 2 que “Nul ne peut être poursuivi, arrêté, gardé à vue, inculpé, détenu, jugé ou condamné qu’en vertu et selon les formes prévues par une loi antérieure aux faits qui lui sont reprochés », a-t-elle rappelé.
L’AGUIPEL exhorte les autorités judiciaires à s’inscrire dans « l’ambitieux projet de Refondation de toutes les institutions, en s’abstenant de violer les lois et les procédures », appelle-t-elle condamnant avec fermeté « cette forme d’arrestation d’un journaliste et exige sa libération immédiate ».
par René Lake
LA FRANCE ENTRE RÉACTION ET RÉINVENTION, UN MOMENT DE VÉRITÉ
L’intérêt de Paris repose désormais sur la capacité à écouter, à comprendre et à accompagner, sans chercher à diriger. Il ne s’agit pas seulement d’un choix stratégique, mais d’une exigence morale pour garder un minimum de pertinence en Afrique
Le double revers diplomatique infligé à la France par le Sénégal et le Tchad, analysé dans l’éditorial du Monde du 2 décembre 2024, marque une étape critique dans les relations franco-africaines. Ces deux décisions souveraines, bien que portées par des contextes distincts, soulignent un rejet grandissant de l’ordre néocolonial par les nations africaines. Ce moment historique pose une question fondamentale : la France continuera-t-elle de s’accrocher à une posture réactive, dictée par le maintien de ses intérêts stratégiques et économiques, ou bien adoptera-t-elle une approche proactive et transformatrice, axée sur la reconnaissance des aspirations africaines ? Ce choix déterminera si Paris peut encore prétendre à un rôle significatif sur le continent.
Depuis les indépendances des années 1960, les relations entre la France et ses anciennes colonies africaines se sont construites sur des bases pour le moins déséquilibrées et à bien des égards abusives. Si les indépendances ont officiellement marqué la fin de la domination coloniale, la réalité a été toute autre. À travers des dispositifs institutionnels comme le franc CFA, des accords de défense unilatéraux et une politique étrangère paternaliste, la France a maintenu une emprise économique, politique et culturelle sur les pays de la zone francophone.
Le franc CFA, instauré dès 1945, est emblématique de cette continuité néocoloniale. Contrôlé par le Trésor français, il lie les économies africaines à une monnaie dont les priorités ne reflètent pas leurs besoins. Ce système a permis à la France de garantir la stabilité et la croissance de ses opérations économiques multiples et de préserver ainsi son influence économique, tout en maintenant les pays africains dans un état de dépendance structurelle. En parallèle, les accords de défense conclus après les indépendances ont permis à la France de maintenir son influence militaire sur le continent, en échange de garanties sécuritaires largement perçues comme illusoires et avant tout destinées à protéger des régimes impopulaires et autocratiques, alignés sur les intérêts français.
Cependant, ces mécanismes, qui ont longtemps servi les intérêts français, s’effritent sous la pression d’une jeunesse africaine affranchie et des rivalités géopolitiques croissantes. Des puissances comme la Chine, la Russie, la Turquie, les pays du Golfe et même les États-Unis d’Amérique ont investi dans des partenariats stratégiques en Afrique, offrant des alternatives à une domination française perçue comme obsolète.
Le projet de l’Eco, monnaie ouest-africaine censée remplacer le franc CFA, illustre la maladresse de la France dans sa tentative de réformer son héritage néocolonial sans en abandonner les fondements. En décembre 2019, lors d'une visite à Abidjan, Emmanuel Macron et Alassane Ouattara, président de la Côte d’Ivoire, avaient annoncé la transition vers l’Eco. Présentée comme une réponse aux critiques croissantes contre le franc CFA, cette initiative devait incarner une avancée historique.
Mais le projet a rapidement été discrédité. L’Eco, tel que proposé, maintenait une parité fixe avec l’euro et dépendait toujours du Trésor français pour sa garantie. Ce qui devait être un symbole d’émancipation s’est révélé être une simple réinvention cosmétique du système existant. Pour de nombreux Africains, ce projet représentait une tentative de sauvegarder l’influence française sous une autre forme. Les critiques ont fusé de toutes parts, y compris de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), qui travaille depuis des années sur une véritable monnaie régionale.
L’Eco, dans sa version franco-ivoirienne, n’a toujours pas vu le jour. Cet échec souligne une leçon essentielle : la France ne peut plus imposer de réformes de haut en bas en Afrique dans la continuité néocoloniale. La stratégie de Macron, consistant à réformer sans bouleverser l’ordre établi, a montré ses limites. Toute initiative future devra être pilotée par les Africains eux-mêmes, avec, éventuellement, la France dans un rôle d’accompagnement technique et non de leadership.
Une souveraineté africaine portée par les jeunesses
La montée en puissance des aspirations souverainistes en Afrique, portée principalement par les jeunesses, représente un défi majeur pour la France. Ces générations connectées et informées rejettent les cadres hérités de la colonisation et exigent des relations internationales fondées sur l’égalité et le respect mutuel. Ce souverainisme moderne, loin d’être une simple réaction à des frustrations passées, incarne une volonté de transformation profonde.
Dans des pays comme le Sénégal et le Tchad, cette revendication s’exprime de manière variée, mais elle converge autour de principes communs : autonomie économique, contrôle des ressources nationales et respect des choix politiques locaux. La France, en tant qu’ancienne puissance coloniale, est souvent perçue comme l’obstacle principal à ces aspirations.
La persistance des relations néocoloniales est contre-productive pour toutes les parties. Elle perpétue des déséquilibres économiques et politiques en Afrique, alimentant les frustrations populaires et les mouvements anti-français. Pour la France, ce modèle est devenu un fardeau diplomatique. Il ternit son image et limite sa capacité à nouer des partenariats authentiques avec des acteurs africains émergents.
Décoloniser ces relations implique :
Une autonomie monétaire totale. Le franc CFA et toute tentative similaire doivent être abandonnés. La France doit clarifier qu’elle n’a aucun rôle à jouer dans la gestion des monnaies africaines, tout en offrant un soutien technique, si demandé, pour faciliter une transition autonome.
Des partenariats économiques équitables. Les termes des contrats doivent être revus pour refléter les intérêts des nations africaines. Cela inclut des clauses garantissant que les bénéfices des industries extractives profitent davantage aux populations locales.
Une approche diplomatique horizontale. La France doit traiter les nations africaines comme des égaux, sans interférence dans leurs affaires intérieures. Cela inclut le respect des choix politiques et des orientations stratégiques définis par les Africains eux-mêmes.
Le moment est venu pour la France de réinventer ses relations avec l’Afrique. Il ne s’agit pas seulement de préserver ses intérêts économiques ou stratégiques, mais de redéfinir sa place dans un monde multipolaire. Une rupture franche avec le passé néocolonial permettra de construire des partenariats fondés sur la confiance et le respect mutuel, à l’image de ceux que la France entretient déjà avec des pays anglophones comme le Ghana ou le Nigeria.
Ce repositionnement exigera du courage politique et une vision à long terme. Mais c’est également une chance pour la France de se réconcilier avec son histoire et de jouer un rôle positif dans l’émergence d’une Afrique souveraine et prospère. C’est à travers une telle transformation que Paris pourra prétendre à un rôle d’allié respecté, et non de puissance déclinante accrochée à un passé révolu.
L’avenir des relations franco-africaines repose désormais sur la capacité de la France à écouter, à comprendre et à accompagner, sans chercher à diriger. Il ne s’agit pas seulement d’un choix stratégique, mais d’une exigence morale face aux aspirations légitimes de millions d’Africains. La balle est dans le camp de Paris.