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20 juin 2025
CETTE JEUNESSE QUI SE SOULÈVE, C'EST CELLE QUI A PORTÉ MACKY SALL AU POUVOIR
Coordonnateur de Y’en a marre, Aliou Sané livre son analyse des évènements qui ont secoué le pays. Pour lui, l’arrestation d'Ousmane Sonko n’a été qu’une « étincelle »
Jeune Afrique |
Manon Laplace |
Publication 28/04/2021
En 2011, ils avaient entraîné dans leur sillon des milliers de Sénégalais pour s’opposer à un troisième mandat du président Abdoulaye Wade. Depuis l’arrestation d’Ousmane Sonko, le 3 mars dernier – l’opposant, toujours visé par une plainte pour viol, a depuis été libéré et placé sous contrôle judiciaire –, Y’en a marre bat de nouveau le pavé et se positionne comme l’un des acteurs de la contestation. Les membres fondateurs du Mouvement pour la défense de la démocratie (M2D) organisent la mobilisation aux côtés du leader du Pastef, de plusieurs partis d’opposition et de membres de la société civile.
Aliou Sané, coordonnateur du mouvement depuis 2019, revient pour Jeune Afrique sur l’embrasement qu’a connu le pays, son intensité et le rôle qu’entend jouer Y’en a marre dans la contestation.
Jeune Afrique : Qu’est-ce qui explique, selon vous, l’ampleur inédite des manifestations qui ont suivi l’incarcération d’Ousmane Sonko ?
Aliou Sané : L’affaire Ousmane Sonko n’a été qu’une étincelle et a suscité un sentiment d’injustice chez ses partisans, mais aussi chez des citoyens qui ne sont d’aucun bord, comme c’est le cas des membres de Y’en a marre. De nombreux Sénégalais craignent de voir leur pays se diriger vers une démocratie de façade, sans opposition. Mais les récents événements sont aussi l’expression du ras-le-bol d’une jeunesse enragée. Sous Macky Sall, l’espace civique a été extrêmement restreint, avec de nombreuses marches pacifiques interdites, des cadres d’expression supprimés.
Macky Sall n’entend pas les manifestations pacifiques. Le 31 décembre, il a assuré qu’« on ne [pouvait] pas [l]’intimider avec des brassards rouges » et que « si les gens [voulaient] attirer [son] attention, qu’ils le fassent autrement. » [Le président faisait alors référence aux brassards portés lors de manifestations dénonçant la gestion des ressources publiques, NDLR]. C’est grave ! En d’autres termes, il a dit qu’il n’entendrait le cri de son peuple qu’au prix de violences. Les Sénégalais y ont vu des signes d’arrogance et de suffisance d’un président qui défiait son peuple.
Comment expliquez-vous la part prise par la jeunesse dans ce mouvement ?
Tous les jeunes à Dakar et à travers le Sénégal ont saisi l’occasion de l’arrestation d’Ousmane Sonko pour exprimer les frustrations accumulées. Cette jeunesse qui se soulève, c’est celle qui a porté Macky Sall au pouvoir en 2012. Ce sont ces mêmes jeunes qui voyaient dans le fait d’élire un président jeune, né après les indépendances, une opportunité de rupture profonde dans la gouvernance du pays, la gestion des ressources publiques, et de réelles réformes des institutions.
Mais il n’a pas été à la hauteur des attentes, bien au contraire. Il y a également la problématique de la pauvreté dans le pays, qui pousse la jeunesse désœuvrée, faute d’avoir des perspectives d’avenir au Sénégal, à tenter l’aventure vers l’Europe en pirogue, au risque de sa vie.
Macky Sall a promis d’augmenter les budgets alloués à la formation, à l’emploi et au soutien à l’entrepreneuriat des jeunes. Ces mesures vous semblent-elles répondre aux besoins ? Ont-elles permis d’apaiser les esprits et favorisé le retour au calme que l’on observe aujourd’hui ?
Je ne commente pas les annonces, uniquement les faits. Et pour l’heure, aucun acte concret n’a été posé par Macky Sall. Ce ne sont pas ses annonces qui ont mené à l’actuelle accalmie, c’est la médiation des guides religieux, et en particulier celle du Khalife général des mourides.
La journaliste Marie-Roger Biloa analyse la situation en cours à N'Djaména et ses répercussions sur le Sahel.
par Rama Yade
ON NE RÈGLERA PAS LE DÉFI CLIMATIQUE SANS L'AFRIQUE
La clé du changement pourrait bien se trouver du côté des nations africaines dont les solutions – ancestrales et innovantes – pourraient être une source d’inspiration pour le reste du monde
Jeune Afrique |
Rama Yade |
Publication 28/04/2021
Alors que le sommet pour le climat de Joe Biden vient de se clore, les pays riches doivent respecter leurs engagements financiers s’ils veulent agir pour le climat, sans laisser de côté l’Afrique, dont les traditions et les ressources pourraient inspirer le reste du monde.
Lorsque le président congolais Félix Tshisekedi s’est exprimé lors du sommet pour le climat de Joe Biden, il avait derrière lui la force d’un continent, en tant que président en exercice de l’Union africaine. Il a déclaré que les nouveaux engagements de réduction des émissions de gaz à effet de serre pris par les pays riches n’étaient pas suffisants. « Il est important que ce sommet accélère la mobilisation de ressources financières additionnelles et conséquentes », a déclaré Felix Tshisekedi, l’un des cinq chefs d’État africains à participer au sommet aux côtés du Gabonais Ali Bongo, du Kényan Uhuru Kenyatta, du Nigérian Muhammadu Buhari et du Sud-Africain Cyril Ramaphosa.
« Cela exige aussi de simplifier les procédures d’accès aux financements climatiques pour les pays les moins avancés dont la majorité se trouve en Afrique, a ajouté le président congolais. À cet égard, je voudrais rappeler l’importance de l’engagement des pays développés à mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020 et à le rehausser à l’horizon 2025. »
En pointant les promesses trahies des pays riches, les pays africains ont mis en évidence l’enjeu de ce sommet, à savoir l’insuffisance des fonds de financement climatique. Le président américain Joe Biden s’est, certes, engagé à augmenter la contribution de son pays de 5,7 milliards de dollars par an d’ici à 2024.
Il est vrai qu’alors même qu’il est le plus faible contributeur au réchauffement climatique, le continent africain est celui qui en paie le prix le plus élevé, lui qui aurait à apprendre au monde sur la façon de faire face à la crise climatique. À condition toutefois que le monde veuille bien l’écouter…. Alors qu’elle abrite 15 % de la population mondiale, l’Afrique n’est responsable que de 4 % des émissions mondiales de carbone.
Sollicité par le président Macron pour préparer son échange avec la société civile africaine au sommet Afrique-France de Montpellier, Achille Mbembe explique
Le Point Afrique |
Malick Diawara |
Publication 28/04/2021
La dernière actualité est l'illustration parfaite que la relation entre la France et l'Afrique est véritablement en zone de turbulences. Au-delà de la défiance d'une certaine frange de l'opinion publique africaine dans des théâtres d'opérations où l'Hexagone est engagé, notamment dans le Sahel, il y a une forte incompréhension à voir la France soutenir par exemple le Conseil militaire de transition (CMT) tchadien à la suite de la mort d'Idriss Déby. Beaucoup estiment en effet que ce CMT a simplement fait un coup d'État puisqu'il a suspendu la Constitution et créé une situation d'exception qu'il a qualifiée lui-même de « transition ». L'explication de la nécessité de maintenir une certaine « stabilité » du Tchad pour mieux assurer la sécurité dans la région ne semble pas avoir fait l'unanimité chez nombre d'observateurs. Ceux-ci, ont vu là une nouvelle illustration de la connivence qu'ils dénoncent régulièrement entre certains pouvoirs africains, fussent-ils dictatoriaux, et la France. Au nom de la realpolitik liée à la situation dans le Sahel, la démocratie et la voix des populations sont sacrifiées, se disent beaucoup d'Africains qui poussent leur raisonnement jusqu'à émettre des doutes sur les objectifs de l'opération Barkhane.
Pourtant, au vu des dernières déclarations d'Emmanuel Macron, le soutien est surtout pour « une transition pacifique et inclusive ». Et ce n'est là qu'un exemple des points de vue divergents qui nourrissent soupçons, méfiance et crise de confiance entre la France et certains Africains. Dans un tel contexte, l'analyse du Camerounais Achille Mbembe ne peut être que la bienvenue, et ce d'autant que le philosophe, politologue, historien, professeur à l'université du Witwatersrand de Johannesburg sera aux premières loges de l'échange que le président Macron entend avoir avec la société civile africaine lors du prochain sommet Afrique-France de Montpellier. Entretien.
Le Point Afrique : Qu'est-ce qui peut expliquer que le président Emmanuel Macron fasse appel à vous pour préparer l'échange qu'il entend avoir avec la société civile lors du prochain sommet Afrique-France ?
Achille Mbembe : Pour accompagner ce processus, j'imagine que le président voulait quelqu'un de crédible. Ni complaisant, ni obséquieux, ni cynique. Quelqu'un qui serait capable de dresser des constats nouveaux parce qu'il en faut, mais aussi de passer de la critique à des propositions, car c'est de cela que nous avons le plus besoin en ce moment. Il ne faut pas oublier, par ailleurs, que je n'y vais pas tout seul. J'ai mis en place un collège composé de femmes et d'hommes honnêtes et impeccables, dont l'intégrité et l'indépendance intellectuelle ne souffrent d'aucun doute. Ensemble, nous sommes là pour témoigner d'une urgence. Changer les rapports entre l'Afrique et la France est une cause politique éminente pour les jeunes générations d'Africains. Mais c'est aussi dans l'intérêt de la France elle-même, faute de quoi sa présence en Afrique deviendra l'une des causes décisives de son affaiblissement sur la scène du monde.
Après sa rencontre avec les étudiants de l'université de Ouagadougou en novembre 2017, le président Macron va aller au-devant de la société civile africaine en cette année 2021. Qu'est-ce qui peut justifier cette urgence à échanger avec la société civile africaine maintenant ?
Nous sommes au bout d'un cycle historique qui aura duré près de 60 ans. Le pacte supposé régir les relations entre la France et ses anciennes colonies au lendemain des indépendances menace désormais la France elle-même d'affaiblissement et l'empêche d'affronter les nouveaux dangers ou de saisir les nouvelles opportunités à partir d'une position de force.
Par ailleurs, aussi bien ces nouveaux dangers que ce pacte conduisent droit au mur les pays africains qui y ont souscrit. Ils encouragent l'émergence et la cristallisation de pouvoirs foncièrement prédateurs responsables de la fragmentation sociale, de la destruction des capacités et de pratiques de cruauté incompatibles avec l'État de droit. D'un côté comme de l'autre, les choses ne peuvent plus continuer comme avant. Il est urgent que l'on change radicalement d'objectifs, d'approche, de grilles de lecture, de formes de présence et de méthodes d'action.
Qu'est-ce qui vous pousse à dresser ce constat ?
J'ai passé les deux derniers mois à écouter toutes sortes de gens. Des vieux, des jeunes, des experts et des non-experts, toutes professions confondues. Une chose revient sans cesse dans la bouche des uns et des autres. Le continent est en proie à une crise systémique. Celle-ci n'est pas la conséquence d'un grand accident. Elle est fomentée et entretenue par des systèmes politiques et économiques qui fonctionnent à la violence, à l'excès et à la brutalité. À la faveur du néolibéralisme, un nouveau cycle de la destruction a été engagé dès les années 1990. La destruction de l'environnement, l'extraction intensive des ressources naturelles, l'accaparement et le gaspillage de colossales richesses, une dette aussi fictive qu'insolvable en sont les manifestations. Tout cela entraîne des pertes continues en vies humaines, que l'on aurait pourtant pu éviter.
Ce n'est pas tout. Je suis surpris par le nombre de gens honnêtes et raisonnables qui accusent la France d'être complice de cette logique infernale. La majorité d'entre eux, ce sont des jeunes qui n'ont pas connu la colonisation. La plupart n'ont plus qu'une chose en tête, partir, quel que soit le prix à payer. Ils rêvent d'une vie autre, ailleurs, peu importe où, sauf chez eux. Ils disent que les terres, les forêts, les eaux, les ressources du sol, du sous-sol et celles qui sont enfouies dans les océans ont été gagées. Certains sont convaincus que ce sont leurs vies qui ont été gagées aux fins de paiement d'insolvables dettes fictives qui ne profiteront jamais à l'Afrique elle-même. Le procès fait contre la France ne l'est pas tant pour la colonisation que pour ce qu'elle continue de faire au lendemain de celle-ci. Évidemment, ce procès est le plus virulent dans les pays dits francophones où un véritable basculement culturel est en cours et où, grâce à l'activisme d'une lumpen-intelligentsia locale arc-boutée sur les réseaux sociaux, être par principe contre la France est en train de revêtir les traits d'un devoir moral.
Le Sénégal produit 200 000 tonnes de déchets plastiques par an, dont seulement 9 000 tonnes sont retraitées. Le reste est déversé dans la nature et les océans
Le Monde Afrique |
Théa Ollivier |
Publication 28/04/2021
Un an après l’interdiction des plastiques jetables et à usage unique, seules 9 000 tonnes de déchets sont retraitées sur les 200 000 produites chaque année.
Un attroupement se forme autour de Modou Fall, habillé d’une centaine de sachets multicolores. Chacun veut prendre en photo « l’homme plastique », ce militant qui se bat depuis quinze ans contre la pollution au Sénégal. A Guédiawaye, un quartier populaire de la banlieue de Dakar, il est venu sensibiliser les populations. Un an après l’entrée en vigueur de la « loi contre le péril plastique », « les gobelets qui traînaient dans la rue ont disparu mais il n’existe toujours pas de recyclage industriel des sacs », constate le militant. Le Sénégal produit toujours 200 000 tonnes de déchets plastiques par an, dont seulement 9 000 tonnes sont retraitées. Le reste est déversé dans la nature et les océans.
Une première loi avait été votée en 2015 pour interdire les sachets dits de « faible micronnage », peu épais, pas très résistants et donc difficilement réutilisables. Mal appliqué, le texte a été abrogé et remplacé par la loi de 2020. Cette dernière proscrit les plastiques à usage unique ou jetables, comme les gobelets, les couverts, les pailles ou les sachets. Des produits qu’on trouve encore en abondance sur les marchés… Pourtant, des efforts ont été faits : 182 opérations de contrôle ont été effectuées par les forces de l’ordre au cours de l’année 2020 et 70 tonnes de plastiques prohibés ont été interceptées, dont plus de la moitié dans la région de Dakar. D’autres saisies ont également eu lieu au niveau des douanes, selon le ministère de l’environnement, qui n’avance pas de chiffres.
« Les tasses pour servir le café dans la rue commencent à être remplacées par des gobelets en papier et les supermarchés ont banni les sachets plastiques à la sortie de caisse. Mais nous avons un problème de disponibilité de matériel alternatif », reconnaît Baba Dramé, directeur de l’environnement au ministère.
Le mouvement d’humeur des travailleurs de l’Autoroute de l’Avenir ne semble pas ébranler la sérénité de la Direction générale, malgré l’appui des différents activistes
Le mouvement d’humeur des travailleurs de l’Autoroute de l’Avenir ne semble pas ébranler la sérénité de la Direction générale, malgré l’appui des différents activistes. Aussi bien dans ses notifications à l’Inspection du travail que par ses déclarations à la presse, la Direction de la Secaa tient à afficher sa sérénité et sa disposition à maintenir le dialogue, en restant ferme sur l’intérêt de préserver l’équilibre social de l’entreprise.
Des employés mécontents de leur situation sociale et professionnelle, on en trouve quasiment partout, et tous les jours. Mais qu’ils en viennent à accuser leur employeur d’attitude néocoloniale, l’accusation devient assez sérieuse pour être traitée par-dessus la jambe, d’autant plus que les délégués du personnel et les travailleurs se sont mis en mouvement et déclarent ne vouloir reculer sur aucun point de leurs revendications.
Pourtant, la direction de la Société Eiffage de la concession de l’Autoroute de l’Avenir (Secaa), se veut sereine et estime que le plus important est de maintenir les fils du dialogue, et que pour elle, rien dans la gestion de l’entreprise ne justifie la montée de fièvre au sein de la société concessionnaire du péage Dakar-Aibd. Xavier Idier et ses collaborateurs se veulent également très clairs sur les cas individuels que les délégués du personnel ont voulu inclure dans leur plateforme revendicative.
De leur point de vue, il ne peut plus être question que la dame Binta Sarr, à propos de laquelle une tentative de conciliation de la part de l’Inspection du travail avait échoué, ou que le sieur Raphaël Nzalé, qui a fait montre d’insubordination et envers lequel le contrat de confiance avec l’employeur semble définitivement rompu, puissent faire encore partie des effectifs. Le directeur et ses collaborateurs estiment qu’il s’agit dans ce cas, de préserver l’équilibre social de l’entreprise, tout en restant dans les strictes limites du droit du travail.
Car déjà, sur plusieurs situations, la Secaa semble être allée au-delà des exigences du Code du travail. Le véritable point de friction dans les revendications du personnel semble être l’ouverture du capital de la Secaa. Or, sur ce point, la société a fait comprendre que la politique d’Eiffage en la matière, est d’offrir à tous les salariés du Groupe, dans toutes les filiales de par le monde, de souscrire à des actions d’Eiffage, avec une décote de 20%. Et les souscriptions sont réalisées annuellement, par le biais de prêts accordés en interne.
Cette année, lors de l’ouverture de la période de souscription, un groupe de travailleurs a lancé un mouvement pour encourager le boycott de l’opération, sous le prétexte qu’ils préféraient plutôt entrer dans le capital de la Secaa. Ce qui techniquement, ne pourrait se faire, la maison-mère ne l’accordant pas. Cette situation a fait que beaucoup de travailleurs ont préféré rater l’occasion de devenir actionnaires d’Eiffage… pour n’avoir pas pu acquérir des actions de l’une de ses filiales !
La même «cohérence» dans la démarche, pousse les travailleurs à exiger des primes de risque, en lieu et place d’encourager l’entreprise dans la mise en œuvre des mesures de prévention et de protection sur le lieu de travail. Or, la Direction estime que, en plus de ne pas être prévue par le Code de travail ou la convention collective, la prime de risque n’est pas un moyen efficace pour prévenir ou maîtriser un risque. Au-delà de ces considérations, la Direction de la Secaa a tenu à faire savoir que tous ses salariés bénéficient d’une assurance individuelle accidents, souscrite par la société, et qui couvre les cas d’incapacité totale ou de décès.
La Direction de l’Autoroute de l’Avenir a fait noter par ailleurs, que la société a connu des moments difficiles depuis l’année dernière, avec l’éruption de la pandémie du Covid19. Elle a subi une très importante baisse de trafic, de l’ordre de 50% sur les mois de mars, avril et mai 2020, à la suite de restrictions sur la circulation imposées par les pouvoirs publics.
Après cela, lors des émeutes de début mars 2021, certaines de ses installations ont connu des dégradations majeures, qui les ont rendues inopérantes. Cela n’a pas conduit au licenciement ou même à la mise en chômage partiel d’un seul membre du personnel. Les délégués du personnel se sont longuement épanchés sur les radios durant ces deux jours pour défendre leur mouvement. Ce matin, ils vont annoncer la suite à donner à leur combat.
L’Inspection du travail a pour sa part, déjà été saisie et une mission de conciliation devrait entendre les différentes parties demain dans la journée. En ce moment où Macky Sall et son Gouvernement se demandent comment créer des emplois, il est à souhaiter que ceux qui en bénéficient sachent jusqu’où revendiquer sans casser la branche sur laquelle ils sont assis.
Par Serigne Ousmane BEYE
POUR UN NOUVEAU PARADIGME COMME RAMPE DE RELANCE DE L’ECONOMIE
L’impact de la pandémie de la Covid-19 sur l’économie a ouvert les yeux des gouvernants et des acteurs du développement
L’impact de la pandémie de la Covid-19 sur l’économie a ouvert les yeux des gouvernants et des acteurs du développement. En effet, la contraction de l’économie et les cohortes de chômeurs consécutives à la crise sanitaire, et les troubles sociaux qui en ont découlé, montrent que rien ne sera plus comme avant, en tout cas rien ne doit plus être comme avant. La Covid-19 a fini de mettre l’économie à genou durant plus d’un an. Malgré la capacité de résilience au plan national, qui du reste a été renforcée par les pouvoirs publics avec le Pres (Plan de résilience économique et social), les conséquences de la crise multiforme se font sentir, jusque dans les foyers les plus reculés. Alors, il s’agira de s’appuyer sur cette résilience pour relancer l’économie qui, il faut le dire, est mal en point. Cependant, pour ce faire, nous devons rompre avec les expériences passées qui n’ont pas produit de résultats probants. Des voies et moyens réalistes et pragmatiques existent, pour relancer l’économie, au regard des enseignements tirés de la crise sanitaire et de son impact sur l’économie.
La modernisation des activités de l’économie informelle
Relancer l’économie suppose, a priori, le redressement des entreprises en difficulté. Ce sont les entreprises qui créent et de la valeur et des emplois. Notre économie reposant pour l’essentiel sur l’informel, il s’agira donc de relever le défi de sa modernisation. Ce faisant, beaucoup d’emplois seront créés ; des emplois visibles, identifiables et connus des services fiscaux. Cela permettra, corrélativement d’élargir l’assiette fiscale.
Les financements prévus pour l’emploi des jeunes ne doivent plus transiter via des structures dédiées existantes et dont on sait qu’elles n’ont pas atteint les résultats escomptés, principalement la résorption du chômage des jeunes. Les pouvoirs publics doivent organiser et accompagner les acteurs de l’économie informelle à se constituer en Gie ou en coopératives. Les initiatives solitaires ne peuvent pas prospérer longtemps, il faut mettre en place des regroupements, c’est l’union qui fait la force. Encadrer et financer des groupements est plus simple que de financer des individualités. Il faut mettre fin à la prolifération des ateliers installés de façon anarchique dans les rues. Des acteurs comme les mécaniciens, les tôliers, les peintres d’automobile peuvent être regroupés dans des entités pour former des garages modernes et performants. Cet exemple peut être multiplié dans les grandes villes.
Les menuisiers, les ébénistes peuvent être regroupés dans des ateliers modernes, spacieux, d’où ils pourront saisir plus facilement les opportunités afférentes à la commande publique. Ces exemples peuvent être appliqués aux autres corps de métiers, comme les tailleurs, les cordonniers et les bijoutiers ; pour ces derniers, l’Etat doit mettre en place un comptoir de vente d’or brut, provenant de Kédougou, à des prix compétitifs. Dans le secteur de la pêche, parallèlement à la politique de modernisation des pirogues, les pêcheurs peuvent s’organiser en Gie ou en coopératives au niveau de Soumbédioune, de Kayar, de Bargny, de Rufisque, de Guet-Ndar, etc. Chaque entité pourrait bénéficier d’un ou de deux chalutiers modernes. La modernisation de ce secteur permettra de réduire les chavirements de pirogues et leurs corollaires de pertes en vies humaines. Cela permettra aux nationaux qui s’activent dans ce secteur de pouvoir concurrencer les chalutiers étrangers qui viennent pêcher dans nos eaux, en haute mer. Les acteurs de la pêche, organisés au sein d’entités viables, pourront être encadrés par les sortants de l’Ecole nationale de formation maritime. Ces exemples supra peuvent être dupliqués dans beaucoup d’autres secteurs. In fine, il s’agira pour l’Etat de mettre en place des financements pour l’accompagnement d’une part, et de créer des structures de formation spécifique, d’autre part.
Contrats-emplois avec les entreprises
L’Etat peut certes recruter, mais ce n’est pas sa vocation de créer des emplois. C’est le secteur privé qui a pour vocation la création d’emplois. Le rôle de l’Etat est de promouvoir un environnement des affaires propice à la création de richesses et d’emplois par les Pme/Pmi. Au demeurant, l’Etat peut signer des contratsemplois avec les acteurs du secteur privé, notamment avec le patronat. Les pouvoirs publics peuvent mettre à la disposition des chefs d’entreprise des financements en contrepartie de l’embauche et de la formation au bénéfice de cohortes de jeunes, pour parfaire leur employabilité, si possible les recruter par la suite. Par ailleurs, l’Etat peut confier l’implémentation des contrats-plans aux Isep (Instituts supérieurs d’enseignement professionnel). Sous la supervision du ministère de la Formation professionnelle, les Isep se chargeront alors de traiter avec les entreprises, pour prendre en charge la problématique de l’adéquation formation/emploi. C’est justement l’absence de passerelle entre les centres d’incubation, tels que les Isep, qui constitue le chaînon manquant dans la politique d’insertion des jeunes. Cette coopération entre l’Etat et le secteur privé peut être poussée pour y intégrer les apprenants en quête de stages de courte durée, pour les besoins de rapport de stage ou de rédaction de mémoire.
Partenariat public-privé et joint-venture
La pandémie a montré que beaucoup de choses restent à parfaire dans divers secteurs. Il y a des domaines dans lesquels le pays doit nécessairement être autosuffisant, ou tout au moins disposer de l’essentiel. Sur le plan de l’autosuffisance alimentaire, des efforts sont faits, mais il reste encore du chemin à parcourir. La crise sanitaire, avec la fermeture des frontières, nous a fait prendre conscience qu’il y a des domaines dans lesquels nous devons être autosuffisants. En ce 21ème siècle, il est inadmissible de continuer d’importer les besoins en nourriture de base des populations, tel que le riz. Toujours dans ce secteur agricole, il existe des niches insoupçonnées de création de valeurs et d’emplois. Par exemple dans le sous-secteur de l’horticulture, il y a d’énormes potentialités. Les jeunes qui migrent vers l’Europe, particulièrement vers l’Espagne, vont travailler pour la majeure partie dans les champs ou les plantations, comme ouvriers agricoles. Ils peuvent avoir sur place ce qu’ils vont chercher ailleurs. L’Etat peut et doit aménager des hectares de terres arables, pour les mettre à la disposition des jeunes. Naturellement, il faudra les organiser en coopératives par exemple, ensuite les faire encadrer par les sortants de l’Ensa (l’Ecole nationale supérieure d’agriculture) de Thiès. L’industrie pharmaceutique n’est pas en reste, ce sous-secteur de la santé peut être inclus dans le périmètre de la souveraineté. La pandémie nous a ouvert les yeux sur la nécessité de produire localement, en dehors des masques, certains médicaments essentiels de base. C’est la raison pour laquelle l’Etat peut contracter des partenariats publics-privés, pour la création d’unités industrielles, la production de médicaments, etc. Le secteur privé a évidemment sa partition à jouer, il doit en effet nouer des accords de joint-venture avec des investisseurs et des détenteurs de technologies et/ou de compétences, venant des pays développés.
Recrutement dans la fonction publique
Même si le rôle de l’Etat n’est pas la création d’emplois, néanmoins il a un rôle régalien d’embaucher ses propres agents. Récemment, le Président Macky Sall a promis le recrutement des milliers de gendarmes et d’enseignants. Ces décisions qui participent à la relance de l’économie, en mettant à disposition un pouvoir d’achat conséquent, sont à saluer. Cela préfigure l’arrivée dans le marché de consommateurs potentiels. Nous avons un déficit de personnels dans presque tous les domaines. Chaque fois que le budget le permettra, l’Etat devra penser recruter, surtout au niveau de la santé. Comme indiqué supra, la relance de l’économie commence par aider les entités en difficulté, ou qui végètent dans la précarisation.
Les Agents de sécurité de proximité (Asp) jouent un grand rôle, complémentaire, aux côtés de la police. Cependant, il faut reconnaître qu’ils vivent dans la précarité. Il est temps de revoir leur situation. Pour relancer l’économie post Covid-19, il faut avoir une vision nouvelle par rapport aux options et aux objectifs économiques, un nouveau paradigme, en tenant compte des moyens qui permettent la réussite. Il ne s’agit pas de mettre à disposition des fonds pour financer des projets souvent non viables, et dont le remboursement poserait des difficultés.
LE BADMINTON SENEGALAIS SALUE L’EXPERTISE IVOIRIENNE ET PAKISTANAISE
Réunir les meilleurs badistes, c’est ce qu’a réussi à faire le Comité national de promotion du badminton sénégalais (Cnpbn) dont le président est Tony Diandy.
Réunir les meilleurs badistes, c’est ce qu’a réussi à faire le Comité national de promotion du badminton sénégalais (Cnpbn) dont le président est Tony Diandy.
Les responsables de cette discipline les ont regroupés à travers un stage élite au courant de ce mois (9 au 11 avril 2021) à Thiès au stadium de Lat Dior. Une plus value a été tirée au sortir de cette rencontre si l’on s’en tient aux responsables du dadminton sénégalais à la suite d’une évaluation faite dans ce sens. Parce que ces jeunes badistes ont été à bonne école pour avoir eu à bénéficier de l’expertise de deux techniciens pour renforcer leurs capacités au cours de ce stage.
«Nous avions travaillé avec un coach ivoirien de niveau 2, qui s’appelle Richard Kouakou, et un coach Pakistanais qui est venu avec la Fédération gambienne que nous avions invitée. Le séjour de Richard était financé par l’Association francophone de badminton et le Cnpb. La particularité est que la méthode du coach ivoirien est basée sur le programme de la Bwf (Fédération mondiale de badminton) qui l’a formé. Alors que l’entraîneur pakistanais a reçu une formation locale. «Les jeunes badistes ont été très réceptifs. Et cela augure de lendemains meilleurs pour les Joj 2026», fait savoir Djiby Guissé Diakhaté, Directeur technique national du badminton au Sénégal et enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis. Qui estime que la présence de ces deux techniciens a été bénéfique pour ces jeunes badistes qui ont participé au stage de Thiès.
Un stage «très enrichissant et qui a permis de découvrir d’autres méthodes d’entraînement avec deux coaches de nationalités différentes», se félicite le Dtn qui se dit satisfait par rapport aux objectifs qui ont été largement atteints. 16 badistes, de 11 à 23 ans, ont participé à ce stage dont un Gambien
«TOUT LE DEVELOPPEMENT DU BASKET RWANDAIS EST ENTRE MES MAINS»
Ancien coach des Lions du basket, Cheikh Sarr va faire bénéficier son expertise à l’étranger, précisément au Rwanda où on vient de lui confier le développement de la «balle orange»
Ancien coach des Lions du basket, Cheikh Sarr va faire bénéficier son expertise à l’étranger, précisément au Rwanda où on vient de lui confier le développement de la «balle orange». Un gros défi à relever chez le pays hôte du prochain Afrobasket masculin.
Qu’est-ce qui vous a motivé à accepter le poste de sélectionneur du Rwanda ?
Je dois dire qu’il y a eu le conseil de mon agent. J’avais la possibilité d’aller dans plusieurs Equipes nationales dans la sous-région, en Afrique, mais c’est le projet et une vision à long terme qui m’ont beaucoup attiré. C’est pour cela que je suis venu au Rwanda. Je suis d’abord parti avec eux en Tunisie, mais là c’était dans le cadre de la supervision. Je suis donc revenu exprès pour revoir tout cela et discuter des possibilités. Finalement, cela m’a plu et j’ai signé.
Quel rôle allez-vous occuper concrètement pour le développement du basket rwandais ?
Je suis en charge de mettre en place un plan stratégique de quatre ans pour le développement du basket rwandais. Dedans, il y a le développement du joueur, la formation, mettre en place un processus de certification, d’intégration de tous les acteurs pour le développement du basket rwandais. C’est cela mon travail. En plus, je suis en charge des équipes nationales. Je suis le sélectionneur et il y aura des entraîneurs qui vont travailler avec moi, des assistants. On met en place des staffs dans les équipes nationales pour conduire ce programme sous ma responsabilité. Mais aussi tous les secteurs nécessaires pour développer le basket comme la vidéo analyste. On est en train de mettre en place tout cela. En plus, je vais coacher effectivement les équipes nationales Garçons et Filles, aider et insuffler du sang neuf dans le développement des jeunes. En quelque sorte, c’est tout le développement du basket rwandais qui est entre mes mains. Et je me réjouis de cette confiance que la Fédération rwandaise a envers moi.
Alors, c’est quoi le potentiel du basket au Rwanda ?
Le basket rwandais est basé sur le spectacle, un basket qui attire le public. Même s’il y a beaucoup de secteurs qui nécessitent des renforcements. Il y a un bon potentiel dans ce pays et en dehors, aussi bien chez les Garçons que chez les Filles. Le projet de développement est entamé depuis longtemps. Cela nécessite quand même beaucoup de réaménagements, c’est pourquoi ils m’ont appelé. Il y avait un Bosniaque qui était là et qui a fait du bon travail. Maintenant, quand un pays africain fait appel à un Africain, c’est une très bonne chose. Cela aussi m’a beaucoup plu et m’a motivé à accepter ce projet. Le potentiel, il faut le lifter, le rebooster, pour que le développement de l’élite soit quelque chose de pérenne. C’est à ce niveau que je dois mettre l’accent pour qu’on ait un potentiel plus important, pendant longtemps et que les gens puissent compter sur un potentiel de qualité dans les joutes à venir.
Avec tout ce travail à faire, allez-vous résider au Rwanda ou faire des va-et-vient entre Dakar et Kigali ?
C’est très flexible ! J’ai la possibilité de faire des allers et retours. Il y a des périodes de travail qui nécessitent quand même une résidence pour un certain temps pour la préparation de l’Afrobasket, des qualifications…
Quel est l’objectif qui vous a été assigné par les autorités rwandaises ?
L’objectif se base sur la satisfaction des standards professionnels communs. Il y a des standards qui sont mis dans le contrat et qui sont en rapport avec la qualité du travail, des prestations, du déroulement de tout le processus de développement de ce basket, aussi bien au niveau des équipes nationales qu’au niveau de la formation, des projets de développement en général. C’est vrai qu’on ne me demande pas de gagner la Coupe d’Afrique, même d’aller en demi-finale, mais si on met un projet en place, c’est pour que le processus aboutisse, qu’on fasse le maximum pour que ces standards communs au comportement d’un professionnel, soient atteints. C’est sur cette base que je suis évalué. Il faut savoir qu’un bon entraîneur, c’est celui qui a l’expérience et la connaissance. Et là, il est compétent. Quand vous allez à la Nba, on a autant d’entraîneurs, mais il n’y a qu’un seul entraîneur qui va gagner. Ça ne veut pas dire que les autres ne sont pas bons. Donc, c’est un métier. On évalue les gens en fonction de leur compétence et de la qualité de leur prestation. C’est tout !
Ancien coach des Lions et Lionnes, quelle lecture faites-vous des chances du Sénégal au prochain Tournoi qualificatif (Tqo) pour les Jo de Tokyo 2021 ?
Les chances du Sénégal pour le TQO sont réelles. Je pense qu’il faut travailler en équipe. Ils ont un bon entraîneur, des joueurs professionnels. Cette équipe est composée de joueurs qui ont chacun du caractère et une histoire. Il faut donc composer avec ça. Ils doivent mouiller le maillot et tout faire pour être dans ce gotha olympique. On a déjà fait quelque chose à la Coupe du monde, qu’ils savent qu’ils seront attendus. Mais le potentiel est là et les chances sont réelles.
Par Yoro DIA
LES VICES INHERENTS AUX FORCES EXPÉDITIONNAIRES
Au Vietnam, en Afghanistan et dans le Sahel, la force expéditionnaire échoue face aux insurgés, parce que cette force qui vient en renfort ne trouve pas d’armée à la hauteur sur le terrain et est donc obligée de se substituer à elle pour faire la guerre
Vous voulez savoir l’avenir de l’opération Barkhane ou celui de la Minusma ? La réponse est simple. C’est le présent de l’opération «Liberté immuable», nom de l’intervention américaine en Afghanistan. L’opération «Liberté immuable» qui a été lancée en 2001 après les attentats du 11 septembre pour traquer Ben Laden et Al Qaeda prendra fin cette année avec le retrait des troupes américaines, après 20 ans de guerre.
La plus longue guerre des Etats-Unis se termine sur un bilan plus que mitigé, après des milliers de morts et des milliards de dollars engloutis. La seule victoire dont les Américains peuvent se prévaloir est la liquidation de Ben Laden et l’affaiblissement d’Al Qaeda, mais sur le terrain, les Talibans sont toujours aussi forts et vont sûrement reprendre le pouvoir dès le départ des Américains.
On en reviendrait ainsi à la situation d’avant l’intervention. Dans cette guerre, face à l’armada américaine, les Talibans ont eu un allié de taille : le temps, car ils ont vite compris que la force expéditionnaire ne resterait pas éternellement et qu’une victoire militaire est impossible. C’était presque le même schéma et le même épilogue au Vietnam. Aujourd’hui, toute chose étant égale par ailleurs, nous avons le même schéma au Mali. Le Chef d’état-major de l’Armée française a déjà dit dans une interview au Monde qu’une victoire militaire était impossible au Mali et force est de constater que les jihadistes au Sahel, comme les Talibans, ont le temps comme plus grand allié, car à Bamako on n’a pas encore compris que le «temps ne chôme pas», comme dit Saint Augustin.
Au Vietnam, en Afghanistan et dans le Sahel, la force expéditionnaire échoue face aux insurgés, parce que cette force qui vient en renfort ne trouve pas d’Armée à la hauteur sur le terrain et est donc obligée de se substituer à elle pour faire la guerre. C’est pourquoi au Vietnam, dès qu’on a vietnamisé le conflit avec le retrait américain, le sud est rapidement tombé. En Afghanistan, dès que les Américains partiront, les Talibans marcheront sur Kaboul pour ouvrir un nouveau cycle de guerres interminables qui ont toujours déchiré le pays, dont l’implication des Etats-Unis n’aura été qu’un épisode.
Comme au Vietnam, les Américains dans leur optimisme instinctif ont été naïfs en croyant apporter liberté et démocratie dans ce pays où les archaïsmes se sont sédimentés depuis des siècles. Au Mali aussi, la force expéditionnaire a été souvent obligée de se substituer à l’Armée pour faire la guerre aux jihadistes, avec Bamako qui fait le jeu de yoyo entre instabilité démocratique et transitions militaires.
Les interventions américaines au Vietnam et en Afghanistan, et celle française au Mali, ont un dénominateur commun qui est aussi un grand enseignement. Les forces expéditionnaires passent rapidement de «libérateurs» à «force d’occupation» aux yeux de la même opinion. Au Mali, on est rapidement passé à la célébration nationale du martyr de Damien Boiteux (le nom de son bébé au premier mort français de l’intervention au Mali), aux manifestations anti françaises. Plus que les forces ou les acteurs autochtones, le temps est l’adversaire le plus redoutable des forces expéditionnaires, en plus de l’évolution de la situation politique des pays qui envoient des soldats, comme on le voit au Tchad ou aux Etats-Unis, avec des alternances qui entraînent des changements de politiques.
Donc se préparer à la confrontation avec les jihadistes, c’est surtout se préparer à une guerre de longue durée, dont la première bataille est surtout psychologique et dissuasive. Nous y sommes déjà. Une bataille de l’ombre. Une guerre du renseignement d’une part, et d’autre part faire étalage de puissance par les manœuvres ou médiatiser sa force de frappe pour montrer que le pays est prêt à faire face. Nous sommes en plein dans cette «drôle de guerre» avec les jihadistes, tout en profitant du sursis stratégique que nous offre la présence de la force expéditionnaire pour être prêts à toutes les hypothèses