Les évènements qui ont secoué le pays du 03 au 08 Mars, du fait de leur ampleur, inattendue, ainsi que des différents acteurs, nous interpellent sur beaucoup de questions : mais également sur les développements possibles de la situation, ainsi que sur tous les risques et toutes les opportunités (notamment politiques) qu’elle ouvre.
« Ouf ! On l’a échappé belle ! » ; serait-on tenté de dire. Pour le moment du moins. Et on doit notre salut à un Homme de Dieu de Paix. Ce qu’il représente, et que nous devrions chercher à comprendre, a pu mettre en échec une révolution mercenaire qui, elle, avait déjà mis échec et mat le Roi du large rassemblement au pouvoir. Groggy, le Roi SALL, poussé devant la scène, a fait ce qu’il sait faire le mieux, la seule chose à sa portée : dégainer des milliards sans savoir où se situe sa cible.
Pour l’essentiel, les jeunes qui étaient dans la rue étaient constitués – au-delà des étudiants de l’Université – de jeunes, scolarisés ou pas, qui avaient l’âge d’être au collège ou au lycée. Leur lien avec l’emploi passe pour tous, par les structures de formation. S’ils savent qu’ils sont de futurs sans-emplois et que c’est juste une question de jours pour qu’ils aillent retrouver dans la rue leurs amis déflatés ou écartés des cursus scolaires, ils savent aussi que leur salut ne viendra pas du financement de l’entreprenariat rapide :
¾ D’une part, c’est l’école et l’Université qui doivent être réformées pour produire les jeunes dont notre développement a besoin, par le biais d’un système qui ne soit pas élitiste et inégalitaire. De ce point de vue, l’aveu, dans la même période, du Ministre chargé de l’Enseignement Supérieur sur l’inadéquation de l’offre et des besoins en matière de formation, est très éloquent.
¾ D’autre part, ces jeunes sont issus de familles. Sans doute pas de familles où l’on mange à sa faim.
Sinon, ils n’auraient pas eu besoin de se trouver dans la rue : leur sécurité alimentaire aurait compensé l’insécurité liée à leur employabilité et les aurait maintenus à l’écart des émeutes. Donc là également c’est la situation sociale des milieux d’où ils sont issus, faite de disette, de déficits divers et de beaucoup d’incapacités qui est en cause ; situation elle-même liée à des politiques sociales et de protection sociale incohérentes, incapacitantes, adossées à un appareil productif laminé, aliéné aux forces économiques étrangères. Les problèmes sont profonds.
¾ Ensuite, quels choix va-t-on opérer ? Transformer rapidement des novices en entrepreneurs-express, sachant qu’ils ne maitrisent aucune des conditions du marché, dans un environnement des affaires qui leur est hostile ?
- Pendant ce temps que faire des jeunes et des adultes qui avaient déjà trouvé à s’employer dans la pêche et que la raréfaction des ressources a rejetés sur les berges, du fait du pillage des bateaux étrangers ? Quel est le financement qui ramènera les bandes de poissons dans les eaux ?
- Que faire de tous les artisans (tailleurs, menuisiers, cordonniers, artisans d’art, etc.)
qui se sont retrouvés du jour au lendemain sans boulot, du fait que leurs secteurs déjà moroses à cause de l’insolvabilité des ménages, se trouvent concurrencés par des manufactures chinoises, turques, marocaines et autres, installées dans le pays ou exportant vers le Sénégal ?
- Que faire des travailleurs horticoles organisés dont les récoltes pourrissent du fait de leur indigence en matière d’infrastructures de conservation et d’écoulement et de la concurrence de SénégIndia et Cie ?
- Des travailleurs de la filière tomate mourante après la fermeture de l’usine de Dagana pour permettre à d’autres d’importer des produits, de les mettre en pots et de les écouler sur le marché national ? Sans parler de tous les paysans organisés ou pas, laissés aux aléas de la nature et du marché ainsi qu’à l’arbitraire des intermédiaires, dans l’agriculture comme dans l’élevage ?
- Que faire des déflatés du Rail dont 820 ouvriers réclament encore leurs salaires ; des
76 employés licenciés à King FAHD après une trentaine d’années de service ; des travailleurs des Ex-SIAS et Ex-AMA qui courent toujours après 4 milliards de leurs francs ; des 1500 employés du Port Autonome de Dakar dont des ponctions abusives sont régulièrement faites sur les salaires ; des 90 travailleurs de IKAGEL en déflation programmée après 18 mois de chômage technique ?
- Que va-t-on faire des 16 000 migrants qui vont nous revenir d’Espagne ?
¾ Enfin où vont-ils travailler ces entrepreneurs fast-truck si l’agriculture, la pêche, l’artisanat, les services et l’industrie sont dans un tel état de détresse ?
Les Trois /quatre cent cinquante milliards (ou ce qu’il en restera quand ils auront, comme les Mille milliards de la Covid-19, transité par les besaces des responsables politiques et de leur clientèle improductive) serviront peut-être à financer les voyages de la mort vers l’Europe, qui auraient déjà fait plus de 16 000 décès entre 2014 et 2017 (soit plus que les 24 années précédentes) et dont 2370 entre seulement Janvier et Novembre 2020.
Le Sénégal est dans l’impasse. Et ce ne sont pas des réformettes qui nous en feront sortir ! Le salut ne viendra pas non plus de « militants » occasionnels qu’il a fallu « secouer » pour qu’ils sortent de leur torpeur – si ce n’est de leur peur – qu’ils exorcisent en se tapant les uns sur les autres à chaque meeting. Ce n’est certainement pas sur ces gens-là que le pouvoir compter pour contenir un conflit civil !
Sur quelles forces sociales le gouvernement actuel peut-il s’adosser ?
¾ Si les chefs des Centrales syndicales observent le silence ou dénoncent les casses comme
destructrices d’emploi, des syndicats de branches ont réchauffé le front social :
- Chez les enseignants cela reprend du poil de la bête et même les syndicats-jugés-
maison du G7 se rebiffent, craignant sans doute d’être débordés sur leurs flancs dans leur compétition avec ceux du G20 qui ont profité de la situation politique pour redorer leurs blasons.
- Les travailleurs de UTS, du SYNTTAS, de AND GESEM menacent de reprendre le
flambeau des luttes.
- Des organisations de travailleurs affichent leur soutien à FRAPP France DEGAGE
dont les responsables continuent à frayer avec les secteurs sociaux en difficulté.
- Mouvement Force Ouvrière (MFO) inaugure ce qui semble être une velléité
d’organisation, indépendante du syndicalisme classique que le pouvoir a phagocyté en même temps que la gauche traditionnelle en octroyant à leurs dirigeants des sièges de PCA ou de Conseillers Economiques ou Territoriaux. Ce qui ne garantit en rien la soumission des travailleurs en cas d’enjeux essentiels.
Rien n’est donc gagné pour le pouvoir !
Nous sommes dans une crise. Une crise comme celles qui ont mené ailleurs à l’effondrement d’Etats. Tous les signes précurseurs en sont réunis :
- Abaissement du niveau de vie matériel (des infrastructures qui disparaissent, une production qui baisse et une inflation à la hausse);
- Abus de pouvoir, Corruption, Arbitraire et Terreur à l’horizon ;
- Mépris des intérêts du peuple, Avidité des dirigeants ;
- Manipulation des forces politiques, sociales et militaires ;
- La société a de plus en plus de mal à s’acquitter de ses fonctions de demande (formuler
des exigences) et de ses fonctions de soutien, afin d’influencer, légitimer, voire remplacer l’Etat : l’opposition est désarmée, les contre-pouvoirs neutralisés ;
- Attisement des contradictions interethniques, confessionnelles, … ;
- ‘’Fieffisation’’ presqu’accomplie du territoire national avec des zones dédiées à des
responsables politiques qui peuvent demain se transformer en chefs de guerre ;
- Un contexte sous-régional d’insécurité liée au djihadisme, de mouvements
incontrôlables d’armes, de l’existence d’un mouvement irrédentiste en Casamance et d’attaques à mains armées, etc.
- Des voisins avec qui les relations se détériorent. Ceux qui nous accusent déjà de nous
ingérer directement dans leur politique intérieure à des fins de déstabilisation.
Et Ceux qui ne cracheraient pas sur la possibilité d’empiéter sur notre souveraineté nationale, d’autant plus que nos populations sont déjà liées à leurs échanges commerciaux, se servant de leurs monnaies, de leurs infrastructures sanitaires ou même de leur état-civil. La crise politique de 1988 et ses lendemains dans nos relations avec la Mauritanie doivent nous rester en mémoire.
- Et pour finir, l’Etat est en plus ou moins perte de crédibilité internationale.
Nous ne sommes peut-être pas dans une situation où l’Etat Sénégalais serait bientôt incapable d’accomplir les fonctions requises pour justifier l’appellation d’Etat. Mais ce qui est remarquable dans les situations de crise qui mènent à l’effondrement des Etats, c’est qu’à aucun moment, on ne décèle de point de non-retour. Les gens en place ayant une tendance a voir dans les pentes dangereuses, des dénivellations sur le terrain normalement cahoteux de la politique, il leur est donc difficile de concentrer leur attention sur la gravité du problème jusqu’à ce qu’il soit trop tard.
A moins que l’Etat lui-même ne soit intéressé à semer le chaos…
Mais j’ai l’impression que le pouvoir sait aujourd’hui, de manière certaine s’il peut attendre ou non des forces de défense et de sécurité qu’ils exterminent en masse les Sénégalais pour permettre à des apatrides et des renégats à saucer leurs dîners avec le sang de leurs compatriotes. (Le professionnalisme dont les forces de l’ordre ont fait montre lors des évènements, a été une affaire de professionnels non de politiques).
Alors de nouveau la question : Sur quelles forces – autres que mercenaires – le gouvernement peut-il compter ?
Quelle est sa stratégie de sortie de crise ?
¾ Partir du fait, objectif, que des choses sont à tirer au clair et que les crimes commis ne doivent pas passer par pertes et profits, et créer ou provoquer sciemment les conditions d’exacerbation des divers contentieux nationaux en un seul conflit social généralisé et déstabilisateur ?
¾ Ou créer les conditions de désamorcer les ingrédients du chaos, revenir en eaux calmes et laisser à la Nation – qui sait prendre ses responsabilités – le choix de voir comment résoudre ses problèmes, panser ses plaies selon son timing et ses modalités, et continuer à vivre dans la paix et la stabilité ?
Je serais tenté d’en appeler à la lucidité et à l’humilité des uns et des autres, mais ce serait vain !
Les intérêts en jeu, les intérêts des différents groupes en présence et de leurs alliés, ce qu’on appelle les « intérêts de classes », prédominent et prédomineront pour sûr encore longtemps. Les intérêts des grands groupes et de grands Etats qui se disputent l’hégémonie sur nos ressources actuelles et futures, sont prépondérants sur les intérêts des groupes nationaux qu’ils assujettissent et instrumentalisent. Il ne sera donc pas facile de leur faire lâcher le morceau par simple civilité ou moralisme. Et même s’ils ne réussissent pas cette fois-ci, ils reviendront à la charge. Indubitablement.
Ces grands groupes, et leurs subversifs suppôts – dans l’Etat ou dans la « société civile » – n’accepteront de « suicider » leurs intérêts et accepter des relations gagnant-gagnant, que face à une force mentalement supérieure, autonome, organisée et déterminée qui n’acceptera de se ranger ni d’un côté ni de l’autre et qui sera capable de contraindre les forces étrangères et leurs alliés compradors à réviser leurs plans maléfiques. Cette force salvatrice, je l’appelle la Nation.
Si j’ignore de quoi est faite la Nation, je sais au moins ceux qui ne peuvent en être exclus : Ceux qui souhaitent ou œuvrent pour une Alternative politique crédible, nationale et populaire, endogène et démocratique, dans l’intégrité et la solidarité nationales, l’intérêt des plus démunis. Cela concernera certainement la plupart des créateurs de richesses (travailleurs et entrepreneurs, ruraux et urbains) ; des paysans sans terres ; des sans-emploi en détresse ; des femmes et des jeunes déboussolés ; des groupes vulnérables ; des minorités ethniques ; des sentinelles de la foi, des cultures et des religions ; des artistes et des intellectuels ; des habitants des régions du centre comme de celles de la périphérie du pays ; de ceux qui semblent condamnés à l’errance, en exil comme chez eux…Ce sera tous ceux qui aspirent à réorganiser leur vie de sorte à peser de leur empreinte sur la destinée collective comme sur leurs destins personnels, dans la paix. La paix est une donnée fondamentale au Sénégal… (Empêche-t-elle de faire la révolution ?)
Nous avons besoin d’un discours social refondateur pour instituer cette Nation-là, qui est à (re)construire. Et pour la mettre sur l’orbite d’un développement autocentré. Il faut une organisation révolutionnaire extraordinaire pour s’acquitter de cette tâche.
Mon regard, naturellement, se tourne vers mon Parti, le seul que je connaisse, le seul en qui je peux avoir un espoir confiant.
Je voudrais que les camarades qui pensent que la situation est grave ou, à défaut, est inquiétante, développent une réflexion autonome, en leur âme et conscience, et des démarches pour permettre à notre parti d’aider le pays à sortir de ce guêpier.
Le moment est venu de choisir entre la Nation et le pouvoir !
Je pense qu’un Comité Central spécial, consacré exclusivement – je dis bien exclusivement – à cette situation nationale, devrait être convoqué en urgence. Et être organisé (sur deux jours, comme avant) de sorte à aller au fonds dans les échanges. Le Comité Central est la voix la plus autorisée entre deux congrès, pour engager en toute responsabilité le Parti dans son ensemble, devant une situation aussi cruciale.
A défaut de le réunir, il serait difficile de maintenir les gens dans le silence et l’inaction.
Passez un Ramadan de paix !
LES JEUNES AVEUGLES DIPLÔMÉS AU CHOMAGE DANS LA RUE LUNDI PROCHAIN
Pour exiger « un quota spécial sur les recrutements dans la fonction publique », entre autres doléances, le Collectif des jeunes aveugles diplômés de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur en chômage, compte battre le macadam
Cheikh CAMARA, correspondant permanent à Thiès |
Publication 16/04/2021
Ce lundi 19 avril 2021, les non-voyants des 45 départements du Sénégal se retrouveront à Thiès pour d’une grande marche nationale destinée à exprimer leur désarroi face au « traitement pitoyable » dont ils disent «être l’objet de la part du gouvernement de Macky Sall». Une manifestation à l’initiative du Collectif des jeunes aveugles diplômés de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur en chômage.
Pour exiger du gouvernement « un quota spécial sur les recrutements dans la fonction publique », entre autres doléances, le Collectif des jeunes aveugles diplômés de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur en chômage, compte battre le macadam à travers les rues de la cité du Rail en début de semaine prochaine. Une grande marche nationale à laquelle prendront part les non-voyants de l’ensemble des régions de notre pays qui invitent d’ailleurs toutes les forces vives de la nation à adhérer à leur cause. Ce mouvement de protestation partira du Cem Lat Dior, à Nguinth, pour se terminer à la gouvernance où les marcheurs déposeront un mémorandum auprès du chef de l’exécutif régional. Il inaugure une série d’actions devant s’organiser à tour de rôle dans les 15 régions du pays. Un membre du bureau dudit collectif, Mactar Thiaw, dénonce « le non-respect des instructions du chef de l’Etat par certains membres du gouvernement qui ont plutôt choisi de nous laisser à notre sort. Aucune initiative n’est inscrite en notre faveur, ce contrairement à ce qui se fait dans des pays comme la Turquie, la Tunisie, la Côte d’Ivoire, entre autres, qui accordent un traitement particulier à leurs non-voyants ».
Abdou Sagne, président du Collectif des jeunes aveugles diplômés de la formation professionnelle et de l’enseignement supérieur en chômage lui veut attirer l’attention du président de la République sur le fait que « le chemin qui nous a conduits vers l’école devait être le même qui nous ferait accéder à l’emploi.
En effet, malgré toutes les difficultés liées à l’enseignement des aveugles et malvoyants, nous avons bravé avec brio toutes les étapes de l’éducation et de la formation pour obtenir des diplômes que nul ne peut contester. Ce qui devait s’en suivre devrait être l’accès à un emploi, qu’il soit salarié ou non salarié ». Mais, regrette-t-il, « le contraire s’est imposé en nous : ‘’Le retour à la mendicité’’. Citoyens à part entière, cette situation risque de faire de nous des compatriotes à part, car après la réussite c’est bien le réconfort qui doit suivre ».
« Liggeey moo ňu gēnal yalwaan »
Le collectif des jeunes aveugles diplômés se veut catégorique : « nous n’affronterons jamais les océans, nous ne choisirons jamais la facilité, c’est-à-dire l’oisiveté et la dépendance ; nous réclamons tout juste un recrutement dans la fonction publique des aveugles diplômés de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle, entre autres diplômés. « A défaut, nous voulons un financement de projet générateur de revenus pour tous les artisans aveugles diplômés de la brosserie et du tissage ainsi que pour les aveugles sans diplômes ».
Abdou Sagne et ses camarades réclament aussi « une intégration effective des standardistes aveugles en activité dans la fonction publique pour l’amélioration de leur statut ». Pour toutes ces raisons, Mactar Thiaw, Abdou Sagne et leurs camarades demandent au chef de l’Etat « l’adoption d’un certain nombre de mesures d’urgence ».
À savoir « la représentation de notre collectif à la conférence nationale sur l’emploi et l’employabilité des jeunes diplômés qui aura lieu le 22 avril 2021 », « l’institution d’un quota spécial pour le recrutement à la fonction publique des jeunes aveugles diplômés en formation professionnelle et en enseignement supérieur », « la facilitation à l’accès aux financements des projets des aveugles artisans en tissage et en brosserie et autres activités », « l’amélioration du statut des travailleurs contractuels (Formation INEFJA, standardiste dans les établissements hospitaliers) ».
Le Collectif a conclu son face-à-face avec les journalistes sur un slogan poignant : « Nous voulons un emploi et non le chômage. Nous voulons vivre à la sueur de notre front et non tendre la main. ‘’Liggeey moo ňu gēnal yalwaan’’ ». Encore des jeunes pour lesquels les 80 milliards promis par le Président pourraient bien être utiles…
«UNE RÉAPPROPRIATION DES IMAGES DE NOIRS DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE»
L’artiste Roméo Mivekannin plonge dans les archétypes de l’imagerie coloniale. C’est à travers l’exposition «Hosties noires» qui a démarré le 2 avril dernier et se poursuit jusqu’au 5 juin 2021
L’artiste Roméo Mivekannin plonge dans les archétypes de l’imagerie coloniale. C’est à travers l’exposition «Hosties noires» qui a démarré le 2 avril dernier et se poursuit jusqu’au 5 juin 2021.
Ouverte le 2 avril dernier, l’exposition de l’artiste béninois Roméo Mivekannin, Hosties noires, se poursuit jusqu’au 5 juin 2021 à la galerie Cécile Fakhoury à Dakar. Un retour en images de la seconde Guerre mondiale 1939-1945, consacré aux soldats noirs de la force coloniale française en Afrique, plus connus sous l’appellation de «tirailleurs sénégalais». Ils sont des soldats maliens, sénégalais, burkinabè et d’Afrique française équatoriale, Tchad et Gabon. «L’artiste plonge dans les archétypes de l’imagerie coloniale et s’intéresse notamment aux cartes postales que les soldats français envoyaient à leur famille en métropole et qui représentaient des femmes de tirailleurs dans les tâches quotidiennes.
Entre fantasme d’exotisme, idéologie coloniale et fascination pour l’autre, ces images témoignent du rapport ambigu entre la métropole et ses colonies», selon un communiqué.
Roméo Mivekannin reproduit dans «un acte de réappropriation les images de ces femmes noires devenues ‘’image-objet’’, sous l’œil mécanique de l’appareil photo colonial», nous renseigne la note. Elle ajoute que l’artiste peint sur un assemblage de draps passés à l’épreuve de bains rituels qui leur donnent leur teinte si particulière. Et l’espace de la peinture devient alors à la fois un lieu de dialogue et de confrontation des imaginaires pour le spectateur contemporain, poursuit le communiqué. «Ailleurs, dans un clair-obscur travaillé, une installation suspendue rassemble les visages de tirailleurs sénégalais peints sur des journaux datant des années 1944-1945. D’un support à l’autre, l’exposition Hosties noires se déploie comme un champ choral de voix, donnant une place privilégiée à l’archive comme terreau de nouveaux imaginaires».
«Poursuivant sa quête de sens, mais aussi esthétique, Roméo Mivekannin nous pousse ici encore avec autant de subtilité que de puissance plastique à questionner la construction des représentations des Noirs à travers l’histoire», d’après toujours le communiqué. Ainsi après Les âmes du peuple noir, l’exposition emprunte son titre au recueil de poèmes éponyme, écrit par Léopold Sédar Senghor en 1948.
«Certains de ces soldats, particulièrement ceux postés en Afrique du Nord, étaient autorisés à s’établir avec femmes et enfants, non sans provoquer certaines tensions chez leurs camarades français, stationnés, eux, loin de leur épouse et de leur famille.» Et c’est de là où sont venues les images qui inspirent Roméo Mive¬kannin pour Hosties noires.
par Ousmane Sonko
NON À LA FERMETURE DU CAMPUS SOCIAL
L'étudiant sénégalais est moralement torturé par l'absence d'horizon, toujours tenaillé par le doute. Je marque ma compassion à ces étudiants victimes d'un système incompétent, corrompu et injuste
Je suis meurtri par les multiples violences que subissent nos jeunes sœurs et frères étudiants.
- la première violence ce sont les conditions d'études et d'existence inhumaines dans les amphithéâtres et les campus, tellement bondés qu'il faut faire des coudes pour assister aux cours, se battre pour se loger (jusqu'à10 étudiants par chambre), ou suivre une longue queue pour se restaurer ;
- la deuxième violence c'est le retard apporté au paiement de leurs bourses d'études, pourtant vitale pour l'écrasante majorité d'entre eux, souvent issus de milieux assez modestes ;
- la troisième violence, ce sont les brimades disproportionnées, subies à chaque fois qu'ils veulent manifester contre ces traitements déshonorants infligés par leurs propres gouvernants, avec leur lot de blessés, d'arrestations et, quelques fois, de morts d'étudiants jamais élucidés ; mais les quatrième et cinquième violences sont les plus insidieuses puisque d'ordre psychologique :
- l'étudiant sénégalais est moralement torturé par l'absence d'horizon, toujours tenaillé par le doute, voire le scepticisme d'un présent difficile et d'un lendemain sans aucune perspective sérieuse de trouver un travail ;
- l'étudiant sénégalais est toujours sous le choc causé par le regard et le cliché que dresse de lui les seuls responsables de sa condition, c'est à dire les pouvoirs publics. Les étudiants s'entendent toujours traiter de voyous, de délinquants, de jeunes ratés et maintenant, de terroristes par le gouvernement et ses démembrements.
Pourtant eux, président de la République, ministres, DG et autres, tous produits de nos universités du temps de leur lustre, leurs enfants déroulent tranquillement leurs études dans les meilleures universités du monde au Canada, aux États-unis, en France... où ils vivent dans des palaces et valsent entre les avions pour des vacances à Dubaï, Paris ou la Californie. Quand ils sont au Sénégal, leur vie se résume aux villas, boites de nuit et de jeux des quartiers chics de Mermoz, point E et Almadies où ils se déplacent en voitures de luxe coûtant des centaines de millions. Tout cela avec l'argent du contribuable détourné de ses destinations que sont l'éducation et la santé, entre autres.
Je marque ma compassion à ces étudiants victimes d'un système incompétent, corrompu et injuste.
Oui à la régulation et à la règlementation des universités qui doivent absolument demeurer des espaces de savoir, de paix et de quiétude, mais je dis non à la fermeture du campus social qui compromettrait davantage la situation et les chances d'une jeunesse déjà trop abandonnée et sacrifiée, alors que l'année universitaire vient à peine de démarrer. Comment imaginer un étudiant, sans ressources et avec un système de transport public insuffisant, quitter tous les jours Pikine, Keur Massar, Diamniadio, Thies, Mbour ou beaucoup plus loin, pour venir faire ses cours à Fann ?
Pendant ce temps, le gouvernement continue de vendanger les intérêts nationaux aux étrangers, d'entretenir un système d'escroquerie sur les deniers et biens publics, de dilapider l'argent public dans des rassemblements politiques farfelus et de mentir à cette jeunesse par des promesses chimériques d'emplois.
Gageons que c'est justement pour réunir les 450 milliards de promesses démagogiques d'argent à se partager entre politiciens de BBY qu'il faille opérer des économies par des ponctions budgétaires dans les secteurs névralgiques de la santé, de l'enseignement supérieur et de l'éducation.
Je reviendrai sur la situation des enseignants et le business des politiques d'emplois de 2012 à maintenant.
LES ETUDIANTS «DECHIRENT» LA RESOLUTION DE L’ASSEMBLEE DE L’UNIVERSITE
La réaction du Collectif des amicales de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) n’a pas tardé, suite à la décision du Conseil restreint de l’Assem¬blée de l’Université de suspendre les amicales jusqu’à nouvel ordre.
La réaction du Collectif des amicales de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) n’a pas tardé, suite à la décision du Conseil restreint de l’Assem¬blée de l’Université de suspendre les amicales jusqu’à nouvel ordre.
Dans un communiqué, les étudiants membres de cette organisation ont rejeté «toute tentative de suspension des amicales de l’Ucad». Selon eux, ces entités constituent «les derniers remparts contre les dérives de cette Adminis¬tration universitaire, déboussolée et sans expérience».
Indigné par les décisions prise par le Conseil, le Collectif des amicales «exige la dissolution de la commission chargée de réfléchir sur le statut des amicales d’étudiants sans ces derniers». Les étudiants refusent également «la fermeture du campus social, habitat des étudiants venant d’horizons divers». Faisant dans la menace, le Collectif des amicales soutient que «si des mesures conservatoires et un dialogue transparent et permanent ne sont pas enclenchés, il s’ensuivra des événements qui iront dans le sens de rendre à l’étudiant ce qui lui revient de droit».
Par ailleurs, le Collectif exige «la publication des listes des sélectionnés en Master 1 et le paiement des arriérés de bourse de tous les niveaux, ainsi que les retards et les omissions».
AFFAIRE DES TERRES DE NDIAEL ET SPOLIATION FONCIÈRE À PAKOUR
«Victimes de spoliation foncière dans tout le Sénégal, unissez-vous», a clamé Guy Marius Sagna, paraphrasant ainsi Karl Marx, pour appeler à une mobilisation générale du peuple sénégalais afin d’arrêter la «machine à spoliation foncière»
Le Mouvement Frapp France Dégage a co-organisé, hier, à son siège une conférence de presse avec le Collectif pour la Défense des Terres de Ndiael et celui des associations et groupements de la commune Pakour. Endossant le combat de ces organisations qui luttent contre la spoliation de leurs terres, Guy Marius Sagna a annoncé la tenue, dans les prochains jours, d’une grande manifestation sur la problématique foncière.
«Victimes de spoliation foncière dans tout le Sénégal, unissez-vous», a clamé Guy Marius Sagna, paraphrasant ainsi Karl Marx, pour appeler à une mobilisation générale du peuple sénégalais afin d’arrêter la «machine à spoliation foncière».
Recevant le Collectif pour la défense des terres de Ndiael et celui des associations et groupements de la commune de Pakour représentés respectivement par Ardo Sow et Salif Mané, le célèbre activiste a endossé, comme à son habitude, le combat de ces derniers pour la défense de leurs terres. Selon, le porte-parole du Collectif pour la défense des terres de Ndiael, la problématique de la question foncière est une maladie qui persiste au Sénégal.
Ardo Sow accuse le chef de l’Etat d’avoir signé en 2012 un décret cédant définitivement 20.000 hectares à l’entreprise étrangère «Sen-huile» qui a été à l’origine d’un conflit foncier à Fanaye. «Ce qui est inquiétant, c’est pendant cette même période qu’on a signé les décrets attribuant à Frank Timis des blocs de pétrole. Sans discuter avec les populations, les autorités ont déclassé une zone pour l’attribuer à cette entreprise», peste le représentant du Collectif pour la défense des terres de Ndiael devant la presse. Si les populations ne se dressent pas contre ces accaparements de terres, prévient-il, le citoyen sénégalais va devenir bientôt étranger dans son propre pays. «C’est aberrant que les terres sénégalaises deviennent une marchandise. 20.000 hectares d’un seul tenant sur les terres du Sénégal, c’est extraordinaire. On n’a jamais vu cela.
L’affaire Ndingler a retenu l’attention des Sénégalais pendant plusieurs mois. Et c’était sur 300 hectares attribués à un Sénégalais. Là, on parle de 20.000 hectares cédés à des étrangers pour faire du biocarburant. C’est incompréhensible. Il faut que cette mascarade s’arrête», tonne le porte-parole du Collectif. Cachant mal sa colère, Salif Mané alerte l’opinion sur l’affectation de 1000 hectares de terres dans la commune de Pakour sur le long du fleuve de Kayanga. Une décision qui date du 28 novembre 2016.
Selon Salif Mané, ces terres ont été affectées à un opérateur privé du nom de Mamadou Oumar Sall par le Conseil municipal. «Ce qui est dommageable, c’est qu’une bonne frange de la population n’a pas été informée de cette décision de la mairie. Ce qui porte à croire que la procédure d’affectation a été biaisée. Et cela constitue une violation flagrante du décret fixant les conditions d’affectation et de désaffectation des terres du domaine national compris dans les communautés rurales devenues communes», souligne-t-il avant de demander une désaffectation totale des terres dans les plus brefs délais et l’entame de négociations pour une nouvelle procédure d’affectation incluant toutes les parties prenantes. D’autant que, dit-il, toutes les signatures sont passées par lui. «L’affectation des terres se fait de façon opaque. Il n’y a pas d’Acte III de la décentralisation, mais d’Acte III de la spoliation foncière qui repose sur une gouvernance sombre, vicieuse et anti-démocratique», fulmine le leader de Frapp France Dégage.
Ainsi appelant ses hôtes à la résistance et à travailler sur une alternative, l’activiste a annoncé l’organisation d’une grande marche à Dakar, à Pakour et à Ndiael dans les prochains jours. Dans cette perspective, le Secrétaire Exécutif du mouvement Frapp France-Dégage appelle à une mobilisation pour imposer la question foncière au cœur des débats politiques et économiques. «Nous invitions les hommes politiques à mouiller le maillot contre la spoliation foncière comme ils le font pour des questions relatives à l’organisation d’élections et autres», martèle Guy Marius Sagna qui demande au Président Macky Sall de sortir un décret sur la répartition des terres en zone territoriale, forestière, pionnière et urbaine. Ce qui permettra de résoudre les spéculations foncières.
SPOLIATION FONCIÈRE À NDIAEL : Gora Seck au banc des accusés
Le patron du projet Sen-huile est dans le viseur des populations de Ndiael, localité située dans le département de Dagana. En effet, Gora Seck est accusé par le Collectif pour la défense des terres de Ndiael d’avoir hérité de leurs terres des responsables étrangers de Senhuile. Selon le porte-parole du Collectif qui s’exprimait hier lors du point de presse, Gora Seck, membre du Club des Investisseurs du Sénégal (Cis) a obtenu leurs terres à l’époque où il était le PCA de Sen-huile Sen éthanol. «Ils ont cédé l’ensemble de leurs actifs à Gora Seck, selon nos informations. Peut-être c’est lui qui a revendu les terres à Frank Timis», indiquent les membres du Collectif.
LES LOCALES OBJET DE TIRAILLEMENTS
L’équation reste entière. Les acteurs politiques éprouvent toujours des difficultés à fixer une date consensuelle pour l’organisation du scrutin. Si l’opposition s’accroche à décembre 2021, la majorité campe toujours sur janvier 2022
Face au blocage des négociations sur la date des élections locales, le pôle des non-alignés au dialogue politique a proposé un compromis consistant à accepter le report de ce scrutin à janvier 2022 à condition que le gouvernement prenne l’engagement de tenir les Législatives à date échue. L’opposition s’était dans un premier temps accordée à cette éventualité avant de faire une volte-face.
L’équation reste entière. Les acteurs politiques éprouvent toujours des difficultés à fixer une date consensuelle pour l’organisation des élections locales. Même la sous-commission du dialogue politique chargée spécialement de réfléchir sur la question n’est pas parvenue à un accord. D’ailleurs, lors de sa rencontre lundi dernier, le pôle des non-alignés avait proposé un compromis pour lever toutes suspicions selon lesquelles le gouvernement voudrait organiser les Locales en janvier 2022 pour reporter ensuite les Législatives prévues la même année. Il a été ainsi demandé au gouvernement de se prononcer officiellement pour s’engager à organiser les élections législatives à date échue. «Cet engagement permettrait de maintenir les Législatives de 2022 quelle que soit la date retenue pour les élections locales », a soutenu le coordonnateur du pôle des non-alignés Déthié Faye, joint au téléphone.
A l’en croire, cette proposition est opportune dans la mesure où si observe les dates de chacune des parties, on se rend compte que l’écart ne fait pas un mois. En effet, si l’opposition s’accroche à décembre 2021, la majorité campe toujours sur janvier 2022. Et lors de la réunion d’hier du comité de suivi du dialogue politique, la majorité a dit qu’elle était d’accord sur la proposition des non-alignés et que si le comité de suivi du dialogue politique prenait une résolution pour demander que le gouvernement s’engage, cette résolution engagerait également la majorité. Mais c’était sans compter sur l’opposition qui, malgré son accord lors de la dernière rencontre de la sous-commission, est revenue faire volte-face.
A en croire Déthié Faye, les représentants du pôle de l’opposition ont indiqué hier qu’ils ont reçu mandat de ne discuter que de la date des élections. Et qu’ils s’accrochaient toujours à tenir le scrutin au courant de cette année. Une décision qui, selon Monsieur Faye, fait suite au point de presse, mercredi dernier, du Front de résistance nationale (Frn) qui reste intransigeant pour le moment sur cette question.
DETHIE FAYE : «LES MANIFESTATIONS DU MOIS DE MARS DERNIER ONT FAIT QUE CERTAINS ACTEURS POLITIQUES PENSENT QU’IL FAUT UN RAPPORT DE FORCES… »
Néanmoins, d’après Déthié Faye, le pôle des non-alignés, en accord avec les autres parties prenantes, continuent de demander que le gouvernement s’engage à tenir les élections législatives à date échue pour restaurer la confiance et enlever certaines suspicions. Toujours selon Déthié Faye, ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est un problème de contexte. «Les manifestations du mois de mars dernier ont fait que certains acteurs politiques pensent que le rapport de forces est tel qu’aujourd’hui, il est permis de faire un certain nombre d’exigences. Mais il y a aussi dans ce même camp des gens qui sont réalistes et qui savent qu’il est préférable d’être autour de la table et de trouver des consensus qui s’imposent au président de la République plutôt que de lui laisser les coudées franches pour prendre les décisions parce que on ne s’entend pas sur les questions », a déclaré le coordonnateur du pôle des non-alignés au dialogue. C’est pourquoi, ajoute-t-il, quand cette garantie sera donnée, il n’est pas exclu que cela puisse faire bouger les lignes dans le camp même de ceux qui ont pris cette décision.
Par ailleurs, il faut relever que lors de la rencontre d’hier, lorsque l’opposition a fait volteface remettant ainsi les compteurs à zéro, la société civile a suggéré qu’on poursuive l’évaluation du processus électoral en décidant que les conclusions n’impactent pas les Locales mais plutôt les Législatives et la Présidentielle prochaine. Mais à ce niveau, d’après monsieur Faye, la discussion n’a pas avancé. «Certains ont considéré que ce serait incohérent, après avoir relevé beaucoup de dysfonctionnements et des pratiques qui dénaturent les résultats des élections. Ce serait contradictoire de dire qu’on ne peut plus aller à des élections sans au préalable effectuer un audit du fichier et une évaluation du processus électoral et revenir accepter le contraire. Les Sénégalais ne nous prendraient plus au sérieux. Finalement, cette proposition n’a pas été débattue », déclare-t-il.
Par Mamadou Mbakhé NDIAYE
PANSER ET PENSER NOS PLAIES
Désignant en effet le neuvième mois du calendrier musulman, la racine du mot ramadan veut dire en arabe brûler, consumer. Certainement les péchés, les impuretés et les scories qui sont en nous durant cette période.
Le jeûne du mois de ramadan fait partie, comme tout le monde le sait, des cinq piliers de l’Islam. Et le Sénégal étant un pays à majorité musulmane, cela va de soi donc que les sénégalais en grande partie ne peuvent pas se soustraire à cette règle religieuse. Mais cette année, elle survient dans un contexte marqué par une crise sociale sans précèdent dans le pays.
Au-delà de la souffrance liée à la pandémie de la Covid-19 qui a mis notre économie à terre mais qui n’est pas une spécificité sénégalaise, il y a eu ces violences du mois de mars qui ont émaillé le pays. Les cœurs sont lourds, la nation au bord de la division, de l’implosion avec des débats aux relents identitaires inédits. C’est pourquoi ce mois d’abstinence et de répit dans nos habitudes vient à son heure. Le besoin se faisait sentir.
Désignant en effet le neuvième mois du calendrier musulman, la racine du mot ramadan veut dire en arabe brûler, consumer. Certainement les péchés, les impuretés et les scories qui sont en nous durant cette période. Mais au Sénégal, force est de dire que ces quatre semaines devront brûler beaucoup plus. Elles devront consumer les mauvaises humeurs, les colères des citoyens de tous bords. La question n’est plus de savoir qui a tort ou qui a raison. Ce mois est un appel à la prière, au dialogue intérieur, à la négation constructive.
L’Islam, les autres religions révélées, les traditions bouddhistes et même certains philosophes comme Nietzche qui a beaucoup écrit sur la notion de souffrance, trouvent que l’épreuve est un don. Ainsi le Sénégal et partant les sénégalais doivent, à travers ces violences inouïes, saisir cette occasion offerte pour se remettre en question.
Faire de ces épreuves, comme le dit Pr Tariq Ramadan, qui sont à la fois physiques, psychologiques et existentielles l’initiation à réformer nos manières de faire, à les questionner. Si on souffre, c’est qu’une porte s’ouvre à l’intérieur et il faut y aller. Il faut entrer. Pour l’auteur de Mon Intime Conviction, la souffrance, c’est la porte d’entrée de la conscience vers le cœur. C’est la porte d’entrée de la conscience vers la foi, la porte d’entrée de la conscience vers l’être. Non pas pour chercher la culpabilité mais l’humanité.
L’espérance de l’émancipation, de l’édification, du dépassement. Même si elle ne signifie pas lâcheté, résignation, incapacité de résister, hypocrisie, la paix, plus que le gaz et le pétrole, est sans conteste notre ressource la plus précieuse, la plus utile mais aussi la plus fragile si on n’y prend garde. Donc tous ceux qui aspirent à diriger ce pays ou qui le servent déjà, doivent veiller à cette valeur qui a fait de cette nation une exception, un havre de bienveillance, une oasis de bonne humeur. Il urge de se départir de tout excès.
L’abstinence pendant le mois de ramadan n’est pas simplement liée à la consommation alimentaire. Au Sénégal on a tendance maintenant à consommer jusqu’à la démesure du parti pris, de la liberté d’expression, de la mauvaise foi, de l’indifférence et même du patriotisme. On fait l’éloge de beaucoup de choses dans ce pays sans prendre le recul nécessaire pour les disséquer.
Alors vivons pleinement ces quelques jours d’une intense spiritualité, loin du brouhaha des réseaux sociaux et des polémiques futiles, pour se purifier sur le plan gastronomique, mais aussi pour panser et penser nos plaies. En silence …
«LE NUMERIQUE N’EST PAS UNE ARME DE DESTRUCTION DE LA DIGNITE»
La remise du prix de l’innovation 2020 hier à l’Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT) a été encore une occasion pour Yankhoba Diattara, d’évoquer la problématique de l’utilisation des réseaux sociaux
L’Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT) a procédé hier à la remise du prix de l’innovation 2020, sous la présidence de Yankhoba Diattara ministre de l’Economie Numérique et des Télécommunications. Une occasion pour lui de revenir sur la problématique de l’utilisation des réseaux sociaux. « Le numérique ne doit pas être une arme de destruction de la dignité humaine, mais un moyen pour bâtir une personnalité économique et sociale », a-t-il souligné.
La remise du prix de l’innovation 2020 hier à l’Université Iba Der Thiam de Thiès (UIDT) a été encore une occasion pour Yankhoba Diattara, ministre de l’Economie Numérique et des Télécommunications, d’évoquer la problématique de l’utilisation des réseaux sociaux qui sont en train de faire beaucoup de dégâts dans le pays, avec des dérives de plus en plus exacerbées. Dans ce cadre, il a directement interpellé la jeunesse du Sénégal, à travers les lauréats du prix de l’innovation. Il leur a lancé : «Vous êtes la réponse que le numérique ne peut et ne doit être utilisé comme une arme de destruction de la dignité humaine. Mais c’est au contraire un moyen privilégié pour bâtir une personnalité économique et sociale à travers un usage responsable.» Il a cependant noté que des initiatives sont déjà mises en mouvement, à travers une série de concertations avec les acteurs de l’écosystème afin de trouver ensemble une solution inclusive et participative. «La régulation des réseaux sociaux s’impose à nous, d’autant plus que le président de la République Macky Sall a consenti d’énormes efforts pour accompagner l’innovation et la créativité», a-t-il notamment souligné.
Revenant sur la remise du prix, il affirme que, suite aux derniers événements survenus au Sénégal, « le chef de l’Etat a instruit le gouvernement pour une meilleure prise en charge des préoccupations des jeunes, par un changement de paradigme, en développant davantage une démarche d’écoute et de proximité dans la formation, l’encadrement, l’entrepreneuriat, l’insertion et l’emploi des jeunes ».
L’organisation de ce concours s’inscrit donc dans le cadre de la promotion de l’auto-emploi et de la culture entrepreneuriale au sein de l’Université. Il vise à motiver et à accompagner les étudiants dans la structuration d’idées de projets innovants et créatifs, capables à terme de générer des emplois et de la valeur ajoutée et éligibles à une incubation.
Le premier prix est décerné à l’étudiant Youssoupha Ndiaye de l’Ecole Nationale Supérieure d’Agriculture pour sa plateforme Sen agro équipement et qui va empocher 5 millions de Fcfa ; le second prix à Badara Diop de l’ENSA également pour sa production « biogaz gain de la nature », qui va se retrouver avec une enveloppe de 3 millions de Fcfa ; et le troisième prix à Mourtalla Mbéguéré de l’Université de Thiès, qui aura un million de Fcfa.
De l’avis du ministre de l’Economie Numérique, les résultats déclinés par le concours montre qu’au-delà de dispenser des formations de qualité en adéquation avec les besoins du marché de l’emploi, l’Université Iba Der Thiam de Thiès met en œuvre un véritable programme formation-emploi pour faciliter l’insertion de ses diplômés, en partenariat avec les entreprises et en promouvant l’auto-emploi. Il s’y ajoute que ledit concours constitue une pertinente plateforme pouvant permettre aux étudiants de mieux préparer le Grand Prix du président de la République pour l’innovation numérique qui, à sa première édition, a récompensé un étudiant-entrepreneur de l’Ecole Supérieure Polytechnique de Dakar (ESP).
C’est dans ce sillage qu’il a appelé l’ensemble des acteurs de l’écosystème numérique à travailler davantage avec les Universités en général et avec l’Université de Thiès en particulier, afin de développer la créativité et les capacités d’étudiants-champions du numérique de demain. Une telle perspective, aux yeux du ministre, offre de bonnes opportunités pour booster l’économie nationale à travers le numérique. Il indique que c’est d’ailleurs fort de ce constat et surtout en se fondant sur les priorités fixées dans le Plan Sénégal Emergent (PSE), notamment pour la transformation structurelle de l’économie, que le Sénégal a élaboré une stratégie nationale dénommée «Sénégal Numérique 2025».
La vision déclinée à travers cette initiative porte sur «le numérique pour tous et pour tous les usages avec un secteur privé dynamique et innovant dans un écosystème performant, en 2025». C’est dans cette dynamique, note le Ministre Yankhoba Diattara, que s’inscrit également la construction du Parc des Technologies numériques et le Data Center de Diamniadio, dont l’inauguration est calée au courant du mois de mai prochain. Il s’agit d’une infrastructure de dernière génération, qui va contribuer à l’éclosion de 4 600 entreprises, avec la création de plus de 15 700 emplois dont 720 directs.
60% DES MALADIES INFECTIEUSES HUMAINES CONNUES SONT D’ORIGINE ANIMALE
Renforcer la capacité des acteurs des médias et des communicants sur l’approche One Health ou une Seule santé, tel est l’objectif visé par l’atelier de formation initié hier par le Haut Conseil National de la Sécurité Sanitaire Mondiale
Renforcer la capacité des acteurs des médias et des communicants sur l’approche One Health ou une Seule santé, tel est l’objectif visé par l’atelier de formation initié hier par le Haut Conseil National de la Sécurité Sanitaire Mondiale, en partenariat avec Breakthrough action. Lors de cette rencontre tenue au Service National de l’Education et de l’Information pour la santé (Sneips), les experts ont indiqué que 60% des maladies infectieuses humaines connues et 75% des maladies émergentes ou réémergentes sont d’origine animale.
Au 21e siècle, les crises sanitaires comme l’influenza aviaire hautement pathogène A/H5N1, le syndrome respiratoire aigu ou sévère (Sars), l’encéphalopathie spongiforme bovine ou maladie de la vache folle, les fièvres hémorragiques comme Ebola, la fièvre de la vallée du Rift, la fièvre de Crimée Congo, la fièvre de Lassa etc. qui se sont succédé sur notre planète, ont fini par convaincre les autorités étatiques, les chercheurs et les organisations internationales de la nécessité de fédérer les forces, en vue d’apporter des solutions durables pour la prévention, la détection rapide, la réponse efficace et le rétablissement des situations d’urgences. Certains phénomènes comme les changements climatiques, les pollutions atmosphériques, les agressions des écosystèmes, la perte de la biodiversité, les inondations et les catastrophes naturelles sont de nature à exacerber ou à précipiter l’émergence de dangers sanitaires. Les facteurs de risques d’émergence de maladies pandémiques sont désormais difficiles à contrôler.
Promue par l’Oms, l’Organisation Mondiale de la Santé Animale (Oie) et la Fao, l’approche One Health (Seule Santé) favorise une meilleure gestion des maladies zoonotiques ou émergentes, car 60% des maladies infectieuses humaines connues et 75% des maladies émergentes ou ré-émergentes sont d’origine animale. 80% des agents pouvant avoir une utilisation bioterroriste potentiel sont des agents pathogènes zoonotiques, selon le haut conseil national de la sécurité mondiale. Cette initiative promeut une approche intégrée et holistique de la santé humaine, animale et environnementale pour une lutte efficace contre les maladies émergentes à risque pandémique. Cette gestion sanitaire collective implique donc une prise en compte des points de vue médicaux, vétérinaires, environnementaux et socio-économiques dans la gestion ou la prévention des risques sanitaires.
C’est dans ce sens que la secrétaire permanente duHaut Conseil de Sécurité Sanitaire Mondial One Health, Dr Adjaratou Ndiaye, estime que depuis 2017, le Sénégal a mis en place un cadre structurel de haut niveau. «Il faut noter qu’un virus peut faire le tour du monde à travers l’écosystème, l’environnement des animaux, des humains entre autres. Nous n’avons plus besoin d’aller loin pour comprendre que c’est possible, la pandémie à coronavirus a fini par le démontrer et on comprend maintenant qu’un problème sanitaire peut toujours avoir une dimension mondiale», souligne-t-il. Poursuivant, elle indique que la stratégie de One Healt prend en commun la santé animale, celle de l’environnement et des humaine. La particularité du Sénégal est d’ajouter la sécurité civile et celle publique.
Au delà de cela, il y a aussi la radioprotection de la sécurité nutritionnelle et alimentaire. «Après ce que le monde a vécu avec Ebola, Nous avons compris que la sécurité mondiale doit englober la sécurité sociale mais aussi prendre en compte le volet économique. La Covid-19 nous a fait comprendre également que l’approche communautaire est à prendre en compte. Quelle que soit la stratégie qu’on peut avoir, sans engagement communautaire, cela ne sert à rien pratiquement. L’implication de tous est important», soutient-elle.
Cependant, elle estime qu’ils vont réussir cette approche One Health le jour où une infirmière dans l’une des zones les plus reculées du Sénégal pourra poser des questions à une patiente qu’il reçoit en consultation concernant la santé animale et la santé environnementale. Et «Vice-versa, que l’expert en santé animale puisse renseigner sur la santé humaine aux éleveurs, surtout sur les zoonoses, les maladies qui se transmettent entre les humains et les animaux. Voilà entre autres les défis».