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3 juillet 2025
par Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla
PAUVRETÉ DU DÉBAT PARLEMENTAIRE FRANÇAIS SUR LE FCFA
La commission des finances de l’Assemblée nationale a examiné le 9 septembre la réforme annoncée du franc CFA. Mais ses membres ne semblent décidément pas disposer de toutes les informations et compétences nécessaires pour comprendre cet enjeu monétaire
Fanny Pigeaud et Ndongo Samba Sylla |
Publication 09/10/2020
La commission des finances de l’Assemblée nationale a examiné le 9 septembre la réforme annoncée du franc CFA d’Afrique de l’Ouest. Mais ses membres ne semblent décidément pas disposer de toutes les informations et compétences nécessaires pour comprendre cet enjeu monétaire crucial.
Le 9 septembre, la commission des finances de l’Assemblée nationale française a évoqué le franc CFA d’Afrique de l’Ouest et la réforme le concernant. Il s’agissait pour elle d’examiner « le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de coopération entre le gouvernement de la République française et les gouvernements des États membres de l’Union monétaire ouest-africaine » et de donner un avis. La même commission avait auparavant auditionné, le 12 février, un représentant du Trésor français et un technicien de la Banque de France.
Il faut lire le compte-rendu de cette séance pour mesurer la pauvreté du débat mené au sein des instances démocratiques françaises sur cet enjeu monétaire crucial.
Plaidoyer pro CFA et silence sur les questions qui fâchent
On notera pour commencer que le député préalablement désigné « rapporteur pour avis » se livre à un bel exercice de plaidoyer pour le franc CFA et sa réforme. Il suit ainsi la ligne du gouvernement français, avançant les habituels arguments fallacieux sur les bénéfices supposés du franc CFA, le rôle « désintéressé » de la France, l’attachement des Africains à cette monnaie coloniale, etc. Nous avons déjà eu l’occasion d'analyser tous ces aspects.
Le rapporteur note que la réforme, décidée en décembre 2019, est intervenue « sur l’initiative, en particulier, du président de la Côte d’Ivoire – M. Ouattara – et du Président de la République française ». Ce qui confirme les présomptions de la plupart des observateurs – le discours officiel tendait jusque-là à laisser croire que l’initiative venait de tous les chefs d’État de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).
En écoutant le député-rapporteur, on n’est guère rassuré à propos de la prétendue indépendance politique de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO). Selon lui, les agents de la BCEAO, qu’il dit avoir rencontrés personnellement, seraient attachés à la parité fixe avec l’euro et à la « garantie française ». Ils s’inquiéteraient par ailleurs du fait que « les banques françaises [soient] moins présentes proportionnellement en Afrique qu’elles ne l’étaient par le passé ». Est-ce le rôle de la BCEAO de se soucier du déclin des parts de marché des banques françaises en zone UEMOA ?
Certains des députés présents ont soulevé des préoccupations importantes : le détachement du franc CFA de l’euro, le risque que la réforme du franc CFA n’enterre le projet de monnaie unique pour les quinze pays de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le fait que la coopération monétaire entre la France et l’UEMOA n’ait toujours pas permis à cette dernière de pouvoir fabriquer elle-même ses billets de banque et ses pièces de monnaie, le fait que cette coopération monétaire soit en elle-même un anachronisme qui entrave l’indépendance monétaire des pays africains, etc. Autant de questions qui n’ont pas eu de réponses.
De cette séance de travail de la Commission des Finances, on retiendra plusieurs points.
Avenir incertain du franc CFA à réformer
L’avenir du franc CFA devant être rebaptisé eco est décidément incertain. « Il n’y a aucune date pour l’entrée en vigueur de la nouvelle monnaie » ; « Il y a une incertitude sur la date » ; « Le calendrier est sensiblement décalé – entre 2023 et 2025 selon certains, je ne saurais dire » ; « L’approbation de l’accord est le préalable à la diffusion de la nouvelle monnaie, pour laquelle aucune date précise n’a d’ailleurs été avancée », a expliqué le rapporteur.
Après avoir vendu à ceux qui voulaient bien les entendre l’idée que le franc CFA est désormais une histoire passée, les autorités françaises font mine de découvrir que le processus pourrait (s’il arrive à son terme) être long, notamment parce qu’il faudra imprimer de nouveaux billets. Sur cet aspect, un député rappelle que « les banques centrales des zones franc CFA sont les principaux clients de la Banque de France, hors zone euro, pour la fabrication de billets. Celle-ci représente, par exemple, plus de 50 % de l’activité de l’imprimerie de Chamalières. »
Des députés peu informés et peu compétents
Les députés français ne disposent pas des informations et compétences nécessaires pour saisir la totalité des enjeux entourant le franc CFA. Un député semble même patauger totalement lorsqu’il demande : « À la suite de cet accord, le Tchad et le Niger n’auront plus la même monnaie, n’est-ce pas ? Le fait pour les pays du G5 Sahel d’avoir des monnaies différentes ne sera-t-il pas une source de complexité supplémentaire pour le fonctionnement de l’alliance ? » Le Tchad et le Niger utilisent déjà et depuis fort longtemps chacun une monnaie différente, même si ces deux monnaies fonctionnent sur le même principe et ont le même acronyme CFA.
Les députés présents n’ont pas relevé plusieurs erreurs du rapporteur. Ce dernier a par exemple soutenu que la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC) « utilise elle aussi un franc de la communauté financière africaine, le franc CFA d’Afrique de l’Est ». La référence à l’Afrique de l’Est au lieu de l’Afrique centrale est sans doute un lapsus. Toutefois, le rapporteur doit savoir que le franc CFA en Afrique de l’Ouest se nomme « franc de la communauté financière africaine », tandis que le franc CFA de l’Afrique centrale est le « franc de la coopération financière en Afrique centrale ».
Les élus sont également restés passifs devant d’autres imprécisions et affirmations douteuses. « L’inflation est très faible dans cette zone, ce qui rend possibles les transactions », leur a-t-il été notamment expliqué. Ceci voudrait-il dire qu’il n’y a pas de transactions commerciales dans les pays africains où l’inflation est plus forte ?
Autre exemple : « L’existence d’une zone monétaire qui fédère ces pays […] leur permet d’avoir une activité commerciale ». Cela signifierait-il qu’il ne peut y avoir d’activité commerciale entre pays qui ne partagent pas la même monnaie ? La réponse est négative, bien entendu. S’il s’agit plutôt de souligner que le partage d’une même monnaie favorise le commerce intra-zone, le propos n’a pas davantage de validité, surtout en ce qui concerne les pays de la zone franc. Malgré 75 ans de partage d’une même monnaie, le commerce entre les six pays de la CEMAC tourne en effet autour de seulement 5 % de leur commerce extérieur..
Il a été en outre affirmé que la zone UEMOA ne présente pas de « singularité » car de nombreux pays africains auraient eux aussi opté pour un régime de de change fixe. Un rapport récent du FMI datant d’août 2020 montre pourtant que les quinze pays africains de la zone franc, le Cap-Vert et Sao Tomé et Principe sont les seuls pays africains dont le taux de change est fixe (conventional peg dans le langage du FMI) et, qui plus est, avec l’euro. Autrement dit, pour rendre compte du choix d’un pays africain d’arrimer sa monnaie à l’euro, il faut regarder du côté du legs colonial plutôt que du côté de la logique économique stricto sensu.
Une réforme qui ne changera rien !
La réforme ne changera rien fondamentalement à la relation de domination monétaire qui existe entre la France et les pays qui utilisent le franc CFA en Afrique de l’Ouest (on le savait déjà). Le rapporteur l’a fait remarquer : « Je le répète, l’essentiel est conservé du point de vue monétaire et économique ». Il a enchaîné pour préciser : « L’évolution est légitime, elle est demandée et n’est en rien cosmétique. » Comment affirmer une chose et son contraire en deux phrases…
Répétons-le : mettre fin à ce système de colonialisme monétaire qu'est le franc CFA suppose l’abolition de l’accord de coopération monétaire entre la France et les pays de l’UEMOA (idem pour les pays de la CEMAC), au lieu de son renouvellement.
Il faut bien comprendre que le seul argument censé « légitimer » l’ingérence française dans les affaires monétaires de ses anciennes colonies est son statut de « garant » financier. Or ce statut a toujours été putatif et le restera. Le rapporteur indique lui-même que la « garantie » française n’a pas été activée depuis 1994 (pour être plus précis, il faudrait dire qu’elle n’a pas été activée « au moins » depuis 1994, date de la dévaluation du franc CFA, une mesure consécutive, justement, au refus de la France d’activer sa « garantie »). « La garantie offerte est donc certes très forte, mais elle n’est pas utilisée car, traditionnellement, la BCEAO, installée à Dakar, est très prudente », ajoute-t-il (sans stipuler que la « prudence » de la BCEAO est le résultat de règles très strictes imposées par le système CFA). Pour rassurer ses pairs, le rapporteur continue en annonçant : « Le pari est fait qu’il en ira de même à l’avenir ».
Voilà qui est bien dit : un « garant » de long terme qui ne garantit rien, qui ne prévoit pas d’honorer sa promesse dans le futur, mais qui pourtant insiste pour signer et faire signer une « convention de garantie » ! Et à ce raisonnement qui défie toute logique est ajouté le supposé argument-massue selon lequel : « Croyez-moi, les pays de l’UEMOA sont très attachés à la garantie de la France. »
Conclusion : il est naïf de penser qu’un débat démocratique réel et informé sur la question du franc CFA aura lieu dans un futur proche au sein du parlement français. Les parlements des pays de l’UEMOA pourront-ils changer la donne ? Force est de constater qu’ils se sont jusqu’à présent complu dans le mutisme.
Ci-dessous quelques réponses du ministère français de l’Économie et des Finances à des questions que nous lui avons posées au cours du mois de septembre 2020 :
1- Quand le projet de loi sur cette question, adopté en mai par le gouvernement français, doit-il être soumis aux députés ?
Le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de coopération signé le 21 décembre 2019 entre les huit États membres de l’UEMOA et la France est en cours d’examen à l’Assemblée nationale depuis le 22 mai 2020. La commission des affaires étrangères a nommé M. Jean-François Mbaye rapporteur. M. Marc Le Fur, membre de la commission des finances, est rapporteur pour avis. Après examen par les commissions des affaires étrangères et des finances, le texte devrait être discuté en séance publique le jeudi 1er octobre 2020.
2- Qu'en est-il de la ratification des pays de l’UEMOA ?
La ratification par chacun des huit États membres de l’UEMOA est un acte souverain relevant de chacun des États, suivant leurs règles constitutionnelles propres.
3- Le président Ouattara a déclaré cette semaine que le franc CFA resterait en vigueur encore au moins trois ou cinq ans. Pourquoi le CFA ne sera plus renommé eco avant 3-5 ans ? Que s'est-il passé ?
Le changement de nom de la monnaie, ses modalités et son calendrier, relèvent exclusivement des attributions souveraines de l’UEMOA, en accord avec la feuille de route révisée de la monnaie unique de la CEDEAO. La France n’est pas partie à ce processus.
4- Où en est-on actuellement pour ce qui concerne la gestion des réserves de change ? La BCEAO est-elle toujours obligée de laisser la moitié de ses réserves auprès du Trésor français ? Quelles mesures d'accompagnement ont été (ou seront) prises sur ce plan ? Quel est le montant des réserves de la BCEAO actuellement auprès du Trésor français ?
La convention de garantie, texte d’application du nouvel accord de coopération monétaire signé le 21 décembre dernier, est en cours de finalisation avec la BCEAO et devrait être signée avant la fin de l’année 2020.
Avant même de signer l’accord, la France a déjà mis en œuvre un certain nombre de mesures : par exemple, ses représentants s’abstiennent désormais de siéger au sein des instances de gouvernance technique. Un avenant à la convention de compte d’opérations actuelle devrait être signé en même temps que la future convention de garantie et permettra d’abaisser le taux de centralisation des réserves – aujourd’hui de 50% – à 0% avant la ratification du nouvel accord de coopération monétaire. Le niveau total des réserves de change de la BCEAO s’établit à fin mars 2020 à env. 15,6 Mds EUR d’après la BCEAO. Une fois l’accord finalisé, la BCEAO décidera des réserves de change qu’elle souhaite conserver auprès du Trésor français.
Hawa Ba directrice pays 0siwa et Alassane Diawara ancien journaliste au quaotidien national le Soleil analysent la violence policière et le bras de entre l'union des magistrats du Sénégal et le ministre de la justice.
Par Makhily Gassama
LA MULÂTRESSE SOLITUDE BIENTÔT STATUFFIÉE À PARIS
La mairie de Paris a décidé d’ériger un monument représentant la mythique combattante contre le système esclavagiste - La Casamançaise appartenait à l’univers de ces êtres doubles, éclatés entre deux mondes
La mairie de Paris a décidé d’ériger un monument représentant la mythique combattante contre le système esclavagiste, connue sous le nom de « Solitude ». Une fois n’est pas coutume. Ce 26 septembre, "La maire Anne Hidalgo a inauguré dans le 17e arrondissement un jardin portant le nom de la mulâtresse Solitude, un geste symbolique très fort", informe la presse locale. Cependant, nous dit Makhily Gassama, « ce beau geste de la maire de Paris n’affectera en rien, en Afrique, notre détermination à lutter contre les symboles de l’héroïsme « colonial » français, qui souillent nos places publiques et nos principales voies de circulation ». Qui est la mulâtresse Solitude ? Elle constitue une figure qui subjugue à la fois l’historien et l’homme d’art ; voilà pourquoi le remarquable roman d’André Schwartz-Bart, « La mulâtresse Solitude», est plus qu’une œuvre romanesque ; c’est une reconstitution historique de la vie de l’héroïne africaine, que la ville de Paris a voulu honorer. Ce texte critique de Makhily Gassama ci-dessous sur l’œuvre d’André Schwartz-Bart, permet d’avoir une certaine idée de la grandeur du personnage historique que fut cette femme d’exception, originaire de Casamance.
Nous nous en allons dans la nuit Nous marchons dans les ténèbres Dans la douleur et dans la mort.
Les cent millions d’hommes et de femmes arrachés violemment à la terre africaine eussent pu, à juste titre, déclamer ces vers apparemment surréalistes, pourtant réels, que chante un personnage de La mulâtresse Solitude, loin de sa patrie. Et les propos eussent pu être légitimement les leurs.
Publié en 1972 chez seuil, ce roman est à lire et à relire, à méditer au moment où les révisionnistes se reprennent du service pour consolider la mondialisation et l’affreux néo-libéralisme au détriment du développement de l’Afrique; il est à relire dans cette étouffante ambiance afro-pessimiste, créée et entretenue par certains milieux en Occident, forts de l’appui des intellectuels et hauts cadres africains, friands de distinctions venues de l’ancien colonisateur, et forts aussi du comportement dévastateur de la plupart des gouvernants africains. Ce roman est l’œuvre d’un grand militant des droits humains. « Ce livre, nous dit l’éditeur, est le premier d’un cycle qui se déroule de 1760 à nos jours. Le volume précédent, Un plat de porc aux bananes vertes, publié sous la signature d’André et Simone Schwartz Bart, en constituait le prélude ».
La promesse n’a pas été tenue – hélas ! - pour des raisons certainement indépendantes de la volonté des auteurs . La mulâtresse Solitude d’André Schwartz Bart, romancier français d’origine juive polonaise, décédé le 30 septembre 2006, est l’histoire tragique d’une mulâtresse, d’une femme diola de la Casamance, capturée par les trafiquants d’esclaves alors qu’elle était toute frémissante de jeunesse et de beauté. Qui la viola et lui fit donner naissance à Rosalie, qui sera plus tard connue sous le nom de solitude ? Un négrier inconnu. Le mystérieux hyménée d’une nuit sans nom, auquel notre héroïne devait la vie, eut lieu à bord d’un bateau négrier, qui acheminait une cargaison de chair humaine vers la Guadeloupe.
Enfant, elle est surnommée « deux âmes » ; adolescente, elle porta le nom de « solitude ». Nous y reviendrons. Il s’agit d’une reconstitution historique ; d’où la précision des dates et des lieux où s’était déroulée l’action. La mère de notre héroïne, Bayangumay, est née en 1750 « dans un paysage calme et compliqué de delta, en une contrée où se mêlaient les eaux claires d’un fleuve, les eaux vertes d’un océan, les eaux noires d’un marigot – et où l’âme était encore immortelle, dit-on ».
C’était à cette vénérée terre des Ancêtres qu’elle fut arrachée pour se retrouver dans un bateau négrier dont elle ignorait la destination. Ainsi du XVe au XIXe siècle, plus de cent millions d’hommes et de femmes, pour la plupart des adolescents, des hommes et femmes solidement bâtis, furent arrachés de force à l’affection des leurs, guidés vers de sombres ports. depuis le jour où « le prince Henri ordonna que ses caravelles allassent, armées, pour la paix et pour la guerre, au pays de Guinée où les gens sont extrêmement noirs », depuis le jour où Vasco de Gama écrivit : « nous cherchons des Chrétiens et des épices », depuis ces jours-là, le fléau le plus meurtrier, le crime le plus abominable contre l’humanité tant par sa cruauté que par le nombre des victimes, que par sa durée, s’abattit, telle une nuée de sauterelles, sur le continent africain ; et, comme dit notre illustre historien Joseph Ki-Zerbo, « ce fut le grand passage vers le tonneau sans fond du marché américain »ii . Les marchands européens se groupaient au sein des compagnies aux dimensions de plus en plus importantes pour réduire à l’esclavage des êtres dont le tort – semblait-il – était de posséder des qualités comme l’endurance et d’avoir été militairement faibles.
Ces hommes et femmes étaient échangés contre de la pacotille. dès qu’ils franchissaient la passerelle les conduisant dans l’obscur fond du navire, ils cessaient, aux yeux des trafiquants et à leurs propres yeux, d’appartenir à l’humanité, à l’humaine condition : ils devenaient une espèce d’êtres intermédiaires entre l’homme et l’animal dans le meilleur des cas ou, dans le pire, entre l’animal et le minéral. Le théologien David Boullier n’écrivait-il pas dans son Essai philosophique sur l’âme des bêtes que « les singes paraissent avoir plus d’esprit que les Nègres, leurs compatriotes »iii. En tenant compte de tels préjugés soigneusement entretenus, dont les répercussions continuent de peser sur nos relations avec le monde occidental, on comprend pourquoi il était fréquent de séparer des êtres intimement unis : l’homme de la femme, la mère de l’enfant, le frère de la sœur… Ainsi solitude fut séparée de sa mère. C’est l’atmosphère dans laquelle vivaient ces hommes et femmes marqués, comme des animaux, « au fer rouge sur la poitrine, la fesse ou le sein, aux initiales du propriétaire », que le talentueux romancier, André Schwartz Bart, essaie de restituer dans La mulâtresse Solitude. L’auteur nous apprend qu’ « à la naissance de Bayangumay [la mère de notre héroïne], la grande ville des bords du fleuve, lieu d’ombre et de luxe, de tranquillité, portait encore le nom de Sigi : Assieds-toi. Mais depuis qu’on y embarquait des esclaves, elle n’était plus connue que sous le nom de Sigi-Thyor : « Assieds-toi et pleure ». En dépit de toutes les précautions prises, en dépit de leur connaissance de la forêt, des marais si peu accessibles, en dépit de leur courage physique et moral, de leur goût immodéré pour la liberté, les diolas ne parvinrent pas à échapper au mal du siècle. Ni les forêts, ni les marais, ni les palissades épineuses qui entouraient désormais les concessions, ni les vagissements de l’enfant, ni les sanglots de la mère n’empêchaient ce terrible microbe d’accomplir son immense œuvre de destruction.
La scène, dans laquelle André Schwartz Bart nous dépeint la capture de Bayangumay, constitue incontestablement une remarquable réussite littéraire : un merveilleux morceau d’anthologie ! devant ce tableau pittoresque et réaliste, nous sentons vibrer les fibres de notre cœur. A vrai dire, André Schwartz Bart n’est pas seulement un romancier d’une sensibilité assurément très délicate ; c’est aussi, à n’en pas douter, un grand humaniste qui sent le mal le secouer dans la chair. La malheureuse mère de notre héroïne « ne s’était jamais acclimatée au pays. En moins de quelques années, cette toute jeune négritte, presque une enfant, était devenue l’une de ces horribles vieilles aux yeux vides, qui sont la plaie des plantations ».
Sa fille portait le beau nom de Rosalie, mais comme ses yeux étaient de couleurs différentes, on l’appelait « deux âmes ». séparée de sa mère, elle se recroquevilla dans une solitude bouleversante et était devenue, come dirait notre romancier Ferdinand Oyono, « la chose qui obéit ». Agissait elle ?
Oui, mais seulement pour exécuter des ordres. Pensait-elle ? Oui, mais ses pensées sont des rêves, volatiles, qui rendaient ses pas si légers sur cette terre maudite à laquelle elle se sentait étrangère, des pas si légers qu’elle donnait l’impression de vouloir se détacher à jamais de ce monde. Rien ne semblait plus réussir à l’émouvoir, car son regard était tout accaparé par un monde si différent de celui-ci, un monde dont sa maman savait narrer les émouvantes beautés, un monde humain, bref le monde des hommes, comme disent les Mandings. Aucune relation entre sa vie intérieure, happée par l’Afrique, et ses activités quotidiennes, dictées par le maître du jour.
Sans volonté manifeste, c’était comme un rocher qui se meut au gré des vagues. On l’appelait désormais « solitude ». En effet, « vers l’âge de douze ans, la petite fille de Bayangumay tourna en Zombi-cornes. En ce temps-là, disent les vieux conteurs créoles, la malédiction était sur le dos du nègre et le talonnait sans arrêt ; on se couchait avec son esprit pour se réveiller chien, crapaud de mares ou Zombi, comme aujourd’hui l’on se réveille avec un cheveu blanc […] ; il y avait une grande variété d’Ombres dans les îles à sucre : nègres morts animés par magie, nègres vivants qui avaient chu dans un corps de bête et d’autres, d’autres encore, dont l’âme était Zombi-cornes. Ils avançaient comme des bœufs de labour et leur tâche accomplie, s’arrêtaient tout d’une pièce : ils restaient là, debout comme des bœufs de labour. Les Zombi-cornes étaient tout simplement des personnes que leur âme avait abandonnées ; ils demeuraient vivants, mais l’âme n’y était plus ».
Solitude appartenait à l’univers de ces êtres doubles, éclatés entre deux mondes. L’Africain Maïmouna, un personnage singulier et attachant, n’apparaît malheureusement qu’à la 116ème page de ce roman de 139 pages ! son détachement surprenant dans un monde fait de souffrances, des cris des agonisants, de l’absence de mémoire et de toute échelle de valeurs – en somme un être « vidé » - font de lui un personnage énigmatique qui rejoint, guidé par une fierté discrète, les personnages mythiques d’Albert Camus : Maïmouna était lié à son jardin comme Sisyphe à son rocher.
Les événements se précipitent dans les dernières pages du roman. Comme, plus tard, l’héroïne diola, Aline Sitoé Diatta de Casamance, solitude devint le grand phénomène du jour. Vivante, elle semblait déjà appartenir à l’Histoire. Une foule enthousiaste la suivit dans la forêt, se battit farouchement contre les maîtres, défiant la mort dans leur marche « triomphale ». Il existe des circonstances privilégiées qui nous enseignent la grandeur surhumaine de la foi religieuse. Ainsi, en pleine bataille – la dernière – on voyait des « couples entrelacés, des personnes humaines qui se donnaient l’accolade, se serraient la main en disant : à tout à l’heure au ciel, mon frère ! »
Capturée par l’ennemi, solitude sera exécutée le 19 novembre 1802 après avoir donné naissance à un enfant. si elle n’avait pas été exécutée dès sa capture, c’était uniquement pour sauver la vie à son enfant, un nouvel esclave qui consolera le maître de la perte de la mère. Ce sont les descendants de ces braves gens que nous rencontrons parfois dans les rues de nos villes débraillées : plongés dans un immense rêve intérieur qui les ronge continuellement, ils semblent murmurer des mots qui nous sont étrangers… Ils reviennent sur la terre de leurs ancêtres avec un cœur presque semblable au nôtre, les yeux rivés sur des horizons qui sont les nôtres, mais ils reviennent plus lucides, plus déterminés dans l’action que nous ne le sommes. Ce sont les hommes et femmes de la diaspora, les hommes et femmes de la Grande dispersion. On les éparpilla à travers le monde comme des produits exotiques. Quand ils parlent ou écrivent tantôt on dirait qu’ils prient comme prient les moines, tantôt on dirait qu’ils hurlent comme savent hurler les êtres arrachés à l’affection des êtres les plus chers. devant le sinistre spectacle de nos échecs depuis les « Indépendances » des pays africains, devant les désastres honteux de la Françafrique, devant notre insupportable complexe de dépendance, nous avons certainement besoin de leur assistance, de partager leurs expériences, de nous inspirer de certaines de leurs vertus forgées dans la souffrance et le labeur, car la volonté de domination d’autres hommes a voulu que nous répondions tous au triste rendez-vous de l’Histoire : eux, déportés ; nous, colonisés.
i André Schwartz Bart, au cours d’un déjeuner à Paris, m’avait parlé de ce projet. J’ai été tellement fasciné par La mulâtresse Solitude, que j’ai invité l’auteur à donner un cours sur son œuvre à l’Université des Mutants de Gorée au sénégal. Il accepta, mais en fut finalement empêché.
ii Joseph Ki-Zerbo, Histoire de l’Afrique noire, Librairie A. Hatier, Paris, 1973. Voir en particulier le chapitre intitulé « Les premiers contacts avec les Européens et la traite des Noirs du XVe au XIXe siècle », pp. 205-226. Dire qu’il existe actuellement des intellectuels africains, des historiens en l’occurrence, qui dénoncent ce qu’ils appellent prétentieusement « la victimisation » devant les crimes les plus abominables de l’histoire : 4 siècles de traite négrière (sans comptabiliser la longue et pénible traite des Noirs commises par les Arabes), 3 siècles de colonisation ! Quelle aberration ! J’approuve, avec fermeté, les combats que continuent de mener les Juifs pour le respect de la mémoire même si la tragédie dont ils étaient victimes ne s’est étendue que sur quelques années. iii Cité par J. Ki-Zerbo, id.
REPORT DE LA CAMPAGNE DE RECRUTEMENT 2021
L’état-major général des armées a annoncé le report à janvier prochain de la campagne de recrutement du contingent 2021, une décision prise en raison des perturbations causées par la pandémie de Covid-19.
Kaolack, 9 oct (APS) - L’état-major général des armées a annoncé le report à janvier prochain de la campagne de recrutement du contingent 2021, une décision prise en raison des perturbations causées par la pandémie de Covid-19.
‘’Initialement prévue pour le mois d’octobre, la campagne de recrutement du contingent 2021 est reportée au mois de janvier 2021’’, lit-on dans un communiqué parvenu à l’APS.
Le texte précise que ‘’la date du 1er novembre est retenue pour le démarrage de la formation de la troisième fraction du contingent 2020 à Dakar-Bango’’.
Cette formation concerne les volontaires déjà sélectionnés pour cette fraction et un effectif complémentaire dont les listes seront affichées au bureau de garnison de la zone militaire numéro 3.
‘’Les informations complémentaires seront disponibles à temps utile et feront l’objet d’un communiqué ultérieur’’, conclut le communiqué.
CREATION D’UNE ALLOCATION SPECIALE DE RETRAITE A LEUR PROFIT
Macky Sall sauve les enseignants du supérieur de la précarité post-retraite
Le président de la République Macky Sall a décidé d’octroyer une allocation spéciale de retraite aux enseignants chercheurs titulaires des Universités. Il a pris un décret dans ce sens en date du 23 septembre dernier. A travers cet acte, le chef de l’Etat sauve ainsi les enseignants du supérieur de la précarité dans laquelle ils étaient plongés au moment de jouir de leur droit à des pensions de retraite.
Le débat a fait rage. Et la revendication était une des préoccupations du syndicat autonome des enseignants du supérieur (SAES). La précarité était devenue une véritable angoisse pour les enseignants du supérieur au moment de jouir d’une retraite méritée après de brillantes carrières dans nos universités. Ces têtes bien faites chargées d’inculquer le savoir à nos étudiants perdaient près de 72 % de leurs salaires qui sont structurés très souvent en indemnités. On comprend dès lors que le SAES avait fait de la valorisation des pensions de retraite des enseignants, une priorité dans son combat pour l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants du supérieur. Un combat porté par la totalité des enseignants de nos universités. Il était d’autant plus actuel que, selon les projections du secrétaire général du SAES, Malick Fall, environ 107 enseignants devaient partir à la retraite en 2018. En 2019, ils étaient 163 à être dans ce cas. Un nombre qui devait grimper à 481 à l’orée de 2025.
D’une manière générale, dans les prochaines années, presque 500 enseignants du supérieur vont partir à la retraite. Soixante pour cent d’entre eux sont des enseignants de rang magistral qui sont habilités à encadrer les mémoires de master, les thèses de doctorat selon les normes du Cames. « Nous avons vu des collègues, de très grandes sommités, tomber dans un dénuement total après leur départ à la retraite. Je ne vais pas citer de noms. Mais je vais donner des indices. Aujourd’hui, vous ne pouvez pas prendre 10 algébristes sans citer son nom. Il a dirigé des structures au niveau de l’université. Cette sommité, à la retraite, en sandales, prenait des Ndiaga Ndiaye. Alors que ce Monsieur, à l’époque, quand le président Senghor partait en mission, il l’avait toujours dans sa délégation. Il y en a qui se sont retrouvés avec le quart de leur salaire. En réalité, la majeure partie de nos salaires est basée sur des indemnités qui ne sont pas prises en compte dans l’assiette de retraite. Nous avons remarqué qu’à 5 ans de la retraite, les collègues manifestaient des déprimes et des signes d’énervement. Parce que ce sont des situations de stress qui sont extrêmement intenses. Ce qui fait que beaucoup de nos collègues sont décédés.
C’est pour dire que c’est une situation qui était extrêmement difficile et douloureuse. Il s’y ajoutait qu’on avait des difficultés avec la prise en charge médicale. Ce qui a exacerbé beaucoup plus notre requête, c’est le cas du professeur Abdou Karim Thioune de l’Inseps (paix à son âme). C’est ce qui a favorisé cette prise de conscience sur la prise en charge médicale. Nous avons entamé la lutte en adoptant une stratégie qui consistait surtout à entretenir le dialogue qui a abouti à la signature d’un protocole d’accord ce 15 mars 2018 » soulignait dans les colonnes du Témoin, le 24 avril 2018, dans une interview, le SG du SAES, Malick Fall.
Un combat de la dignité gagné
Le SAES avait pu lors de négociations avec l’Etat obtenir des accords sur ce point concernant la revalorisation des pensions de retraite des enseignants. Ces accords stipulaient, entre autres, l’autonomisation du Fonds national de retraite (Fnr), la mise en place d’un second pilier (retraite complémentaire) et d’un nouveau processus de suivi et de pilotage du système de retraite. Ils avaient été en effet déjà validés par les services techniques du ministère de l’Economie et des Finances. depuis le 23 septembre dernier, date de la signature du décret présidentiel, Malick Fall SG du SAES et ses camarades peuvent afficher le sourire et envisager de partir à la retraite dans une perspective moins angoissante.
En effet, le décret dont le Témoin a obtenu copie indique en son article premier qu’« il est créé au profit des enseignants et chercheurs titulaires des Universités une allocation spéciale de retraite imputable sur le budget général de l’Etat ». L’article 2 dit que « l’allocation spéciale de retraite est servie aux enseignants et chercheurs titulaires des Universités admis à la retraite à partir du 1er janvier 2018, titulaires du Fonds national de retraites et bénéficiaires d’une pension de retraite concédée suivant les conditions prévues par la loi n° 81-52 du 10 juillet 1981 portant Code des Pensions civiles et militaires de Retraites, modifiée ». L’art 3 ajoute que « l’allocation spéciale de retraite est égale à la différence entre la pension de retraite du FNR et le montant correspondant à 70 % de la dernière rémunération nette d’impôt pour les retraités de 2018 et 2019, à 80 % de la dernière rémunération nette d’impôt pour ceux de 2020 et 2021, à 85 % de la dernière rémunération nette d’impôt pour ceux à la retraite à compter du 01 er janvier 2022 ».
La rémunération comprend la solde indiciaire, les augmentations et ajustements, le complément spécial de solde, l’indemnité de résidence, l’indemnité d’enseignement, l’indemnité de recherche-formation, l’indemnité de logement, la prime académique spéciale, la prime académique logement et les prestations familiales. L’art4 conclut que « l’enveloppe budgétaire supportant l’allocation spéciale est évaluée et inscrite chaque année dans la loi de finance initiale ». Ces dispositions permettent aux enseignants du supérieur de une pension de retraite élevée, sensiblement moins élevée que la rémunération qu’ils touchaient au cours des dernières années de leur carrière. De quoi leur permettre de garder leur dignité après des décennies de bons et loyaux services rendus à la Nation.
TOUBA, CARREFOUR DES ALLEGEANCES POLITICO-RELIGIEUSES
Toutes chapelles confondues, les leaders politiques nationaux n’ont pas été en reste dans la ruée vers la ville sainte de Touba lors de la célébration du Magal.
Toutes chapelles confondues, les leaders politiques nationaux n’ont pas été en reste dans la ruée vers la ville sainte de Touba lors de la célébration du Magal. Ce en dépit des fortes menaces liées à la propagation du coronavirus. Ainsi, plus que jamais, s’est révélée la dimension socio-politique de cette bousculade d’hommes politiques aux portes de la ville sainte, symbole d’un grenier électoral décisif lors des joutes. Analystes politiques et sociologue ont décrypté l’enjeu de cette ruée vers Touba.
De l’opposition comme du pouvoir, Touba a connu une ruée de leaders politiques à l’occasion de la célébration du Magal coïncidant cette année avec la pandémie de covid19, l’ennemi mortel favorisé par les rassemblements publics. Ce plus grand évènement religieux du pays — du moins de la communauté mouride — a été l’occasion pour les prétendants à la magistrature suprême ou aux hautes fonctions dans le pays, de s’afficher aux côtés du pouvoir mouride. Analyste politique, Assane Samb voit dans cette bousculade à Touba l’influence incontestable du pouvoir mouride sur la vie politique nationale.
A l’en croire, bien que la pandémie du coronavirus continue de faire ses ravages dans le pays, il est inconvenable, sous nos cieux, de voir un leader politique de grande envergure tourner le dos à un si grand évènement religieux. « L’enjeu est plus que religieux. Il est sociologique, culturel et surtout politique. Car, un si grand rassemblement constitue une aubaine pour l’homme politique qui cherche à gagner la sympathie de la haute hiérarchie maraboutique de cette ville sainte. Et, de façon plus générale, de la communauté mouride. C’est pourquoi, derrière les prétendues sollicitations de prières, on observe des signaux politiques posés par les uns et les autres au cours de cet évènement religieux », croit percevoir Assane Samb selon qui la haute hiérarchie mouride est incontournable dans la ‘real politik’ au Sénégal. Qu’en est- t-il de ces signaux politiques ? Le journaliste et observateur de la scène politique nationale analyse à ce niveau les derniers actes posés par le président Macky Sall dans la ville sainte. «Le chef de l’Etat y est allé en posant des actes forts qui ne peuvent pas laisser indifférente la communauté mouride qu’il cherche à convaincre par tous les moyens. D’abord, sa visite auprès du Khalife a été sanctionnée par une promesse de réaliser dans la ville sainte un hôpital moderne estimé à 30 milliards de francs. Puis, pour mettre les bouchées doubles, son gouvernement, par le biais du ministre de l’Intérieur, a brandi en public le document du titre foncier octroyé spécialement à Touba et remis au Khalife général des mourides » cite en exemple l’analyste politique qui voit par ailleurs, à travers ce geste, un brillant coup de com’ politique dans la conquête de l’électorat mouride.
Idy et Sonko, la course pour l’héritage politique de Wade à Touba
En ce qui concerne la posture des leaders de l’opposition au cours de ce grand rendez-vous populaire que constitue le Magal, M. Samb estime qu’ils sont en course pour essayer de profiter du grand vide engendré par le retrait de Wade de la scène politique. «Idrissa Seck, par exemple, est en train de bénéficier à Touba du retrait d’Abdoulaye Wade de l’action politique. C’est ailleurs ce qui lui avait permis de remporter une victoire éclatante lors de la dernière présidentielle dans cette ville, jadis fief électoral de Wade. Quant à Ousmane Sonko, il est en train de se conformer à la même logique. D’ailleurs, lui, sa stratégie est bien huilée. Surtout quand lui et sa délégation se rendent chez un influent guide de la communauté mouride, une audience dont les images donnent l’impression d’une sorte de cérémonie d’allégeance du leader de Pastef », explique Assane Samb.
Momar Thiam, expert en communication politique : « Le Magal de Touba est l’épicentre de la visibilité médiatique »
Selon Momar Thiam, docteur en communication et directeur de HEIC, une école de journalisme et de communication, les hommes politiques ont beaucoup à gagner et rien à perdre à faire le déplacement vers la ville sainte de Touba. Cela s’explique en grande partie, selon lui, par le fait que Touba est l’épicentre de la visibilité médiatique en période de Magal. « C’est le carrefour des hommes politiques qui veulent jouer sur leur visibilité parce que le Magal est un évènement avec une valeur ajoutée médiatique sans commune mesure au Sénégal. Et c’est un coup de projecteur repris par l’ensemble de la presse nationale et quelques fois celle internationale. Or, les hommes politiques de tous bords ont besoin de s’affirmer et de se faire voir à côté du Khalife général des mourides pour se valoriser » décrypte le docteur Momar Thiam. L’ancien conseiller en communication du président Abdoulaye Wade évoque un besoin de communication populaire de la part des leaders politiques. L’expert en com’ invoque l’approche des échéances locales comme autre raison de cette ruée de la classe politique vers la ville sainte. Momar Thiam : « On s’achemine vers des élections locales et on sait qu’à Touba, une ville symbolique, la bataille sera âpre. Ce d’autant plus que le pouvoir en place n’y a jamais gagné une élection. D’ailleurs, le président Macky Sall, en tant que chef de la majorité présidentielle, a déjà posé des actes politiques lors de ce Magal. Avec la présentation des documents qui attestent du statut spécial de Touba en tant que titre foncier, c’est l’électorat mouride qui est charmé », décortique l’ancien consul du sénégal à bordeaux. Il n’oublie pas de mentionner la réapparition soudaine de Idy qui était en hibernation, tandis que sonko courtise de plus en belle l’oligarchie mouride.
Moustapha Wone, sociologue : « Les hommes politiques cherchent à tirer profil de l’aura du pouvoir maraboutique »
Sociologue, Moustapha Wone estime que les hommes politiques cherchent à tirer profit de l’aura du pouvoir maraboutique. d’où, selon lui, la principale raison de leur attachement à celui-ci. « Dans chaque société, il y a le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel qui se partagent les individus. Et dans le cas du Sénégal, contrairement aux politiques, les confréries qui constituent le pouvoir spirituel bénéficient d’une admiration et d’un respect sans conteste vis-à-vis des populations voire leurs disciples. C’est pourquoi, les hommes politiques cherchent à tirer profil de l’aura du pouvoir maraboutique par tous les moyens » explique le sociologue Moustapha Wone dans son analyse de l’affluence massive de la classe politique dans les évènements religieux du pays. de vrais sociologues, ironise-t-il, pour déceler la maitrise de la mentalité collective dont font preuve les leaders politiques prêts à tout pour s’afficher auprès des hommes religieux surtout dans les moments de grande ferveur. «Au-delà de l’aspect électoral et de la récupération politique, c’est aussi une question d’image et d’appartenance qui se pose. Et au Sénégal, quoi qu’on puisse dire, généralement les gens évoluent toujours en fonction d’un groupe. Et le corporatisme confrérique est plus puissant que celui ethnique. C’est pourquoi, l’ayant compris, les hommes politiques, pour conquérir chacun d’entre ces groupes où confréries, se parent des habits de chaque groupe en fonction des circonstances. Et s’il s’agit de charmer la communauté mouride, les leaders politiques s’adonnent le plus souvent à l’acte d’allégeance qui est très symbolique aux yeux des disciples de Bamba », ajoute le sociologue pour faire comprendre les véritables motivations de la classe politique dans la course effrénée au «Illa Touba ».
QUAND LE SOMMET DE LA REPUBLIQUE PREND LA FUITE
Force est de constater que le déballage par des responsables de haut rang de conversations privées dans l’espace public commence à devenir une norme sous l’ère Macky Sall
Depuis quelques jours, le feuilleton Ousmane Sonko-Mansour Faye tient en haleine les Sénégalais. Mais au-delà de cet épisode, force est de constater que le déballage par des responsables de haut rang de conversations privées dans l’espace public commence à devenir une norme sous l’ère Macky Sall. Une déliquescence qui remet en cause les valeurs de la République.
Certains responsables politiques se délectent du fait qu’une conversation privée entre le président de Pastef Ousmane Sonko et un de ses camarades de promotion à l’Ena, Cheikh Issa Sall, de surcroît magistrat, soit étalée sur la place publique. Le directeur général du quotidien national «Le Soleil», Yakham Mbaye, un récidiviste qui assume ses positions concernant l’étalage de conversations privées sur l’espace public, donnant les raisons de son acte, soutient en substance que le «camarade» Mansour Faye a été le seul à l’avoir épaulé lorsqu’il était en disgrâce auprès du Président Macky Sall. Magistrat de profession, Cheikh Issa Sall fait partie d’un corps où la retenue est presque une seconde nature. Sa sortie à charge contre son camarade de promotion a un goût d’inachevé. En tant que magistrat et membre de la Cour des comptes, il était attendu de lui qu’il condamne la fuite de sa conversation privée avec son camarade de promotion pour donner des gages d’objectivité au public.
DR MOUSSA DIAW, ENSEIGNANT EN SCIENCES POLITIQUES «IL Y A LIEU DE FAIRE UNE SELECTION, D’EPURER L’ESPACE POLITIQUE SENEGALAIS»
En outre, il faut rappeler que cette affaire n’est pas un cas isolé sous le règne du Président Macky Sall. Il y a quelques mois, le député Farba Ngom avait balancé en direct, lors d’un entretien dans un site, l’enregistrement d’une conversation entre le même Yakham Mbaye et le vice-président de l’Assemblée nationale Moustapha Cissé Lo. Dans cet élément audio, ce dernier abreuvait le Dg du «Soleil» d’injures qui avaient choqué plus d’un dans le pays. Pour Dr Moussa Diaw, enseignant en sciences politiques à l’Université Gaston Berger (Ugb) de Saint-Louis, il est déplorable que des responsables se prêtent à ce jeu. «On attendait de ces personnalités une capacité à réfléchir sur les enjeux économiques, sur des enjeux politiques et sur les difficultés des Sénégalais pour les sortir de l’ornière. Malheureusement, ils se livrent à un spectacle de bas niveau. Et cela ternit naturellement leur image auprès de l’opinion publique», souligne Dr Diaw.
Selon le politologue, Ousmane Sonko est un opposant qui interpelle souvent le gouvernement, le met devant ses responsabilités et formule des critiques et des propositions par rapport à sa gestion. «Par conséquent, ce qu’on attendait des responsables du régime, surtout des ministres, c’est de répondre aux préoccupations des populations», dit-il avant de mettre en exergue les erreurs de casting du Président Macky Sall sur le choix de ses collaborateurs. «Il y a des personnalités politiques qui ne remplissent pas leurs missions, qui n’ont pas la capacité, le savoir et le profil. On nomme des gens sans prendre en compte leur capacité même de diriger et leur trajectoire», se désole Dr Diaw.
A l’en croire, il y a lieu de faire une sélection, d’épurer l’espace politique sénégalais afin que des hommes responsables puissent gouverner. De l’avis de Dr Moussa Diaw, la stratégie politique consistant à rendre publiques les conversations privées des adversaires ne passera pas. «On est en démocratie et on ne peut pas empêcher aux gens de parler au niveau de l’espace politique, même au niveau des juridictions», fulmine-t-il en ajoutant que les responsables politiques qui font fuiter des conversations privées sont ridicules. «Ce sont des pratiques qui n’honorent pas la démocratie sénégalaise», s’indigne l’enseignant en sciences politiques.
LA GUERRE ELECTRIQUE ENTRE BANQUES ET OPERATEURS DE TELEPHONIE
Banques et opérateurs de téléphonie que l’on croyait jusqu’ici complémentaires se retrouvent paradoxalement sur un terrain où les acteurs rivalisent d’arguments.
Banques et opérateurs de téléphonie que l’on croyait jusqu’ici complémentaires se retrouvent paradoxalement sur un terrain où les acteurs rivalisent d’arguments. C’est le terrain de la monnaie électronique. Une bataille rude dans laquelle tous les coups semblent permis. Entre un leader titillé par des jeunes loups aux dents longues, des précurseurs à la traîne, le secteur de la monnaie électronique est en pleine ébullition au grand bonheur du client. Entre des tarifs de plus en plus bas, des offres les plus innovantes, le consommateur a presque l’embarras du choix….En attendant peut-être que la bulle explose ?
Selon M. Djibril Diallo, ancien directeur de Tigo Cash et actuel directeur général de Transferto, le Mobile Money est l’ensemble des services qui tournent autour de la monnaie électronique et qui utilisent le téléphone mobile comme outil principal de transaction pour le client. Aujourd’hui, même si la téléphonie reste leur cœur de métier, les opérateurs de télécommunications accordent une place de plus en plus importante au Mobile Money. Orange Money, Tigo Cash et, dans une moindre mesure, E-Money (expresso) ont envahi le marché de la monnaie électronique et ne cessent de grignoter des parts de marché.
Pour en profiter au maximum et en toute légalité, ils se sont entourés d’un maximum de garanties en obéissant à la lettre aux nouvelles règles fixées par la Bceao. «Pour opérer dans la zone Uemoa, la Bceao exige, désormais, que les opérateurs de télécommunications obtiennent un agrément d’Etablissement de Monnaie Electronique (EME), afin d’opérer leurs activités dans un cadre de responsabilité étendu», explique un document de la Bceao. C’est justement cette disposition qui a chamboulé le secteur. C’est ce que semble dire Alex Corenthin, formateur en informatique à l’Ecole supérieure polytechnique et directeur des systèmes d’information de l’Ucad. « Avec de tels avantages, les opérateurs de télécommunications titulaires d’une licence de monnaie électronique n’ont aucun avantage à prêter leurs infrastructures pour gérer des transactions concurrentes. Et ce sont ces nouveaux acteurs qui ont exacerbé la concurrence», analyse-t-il.
LA RIPOSTE DES BANQUES
Tel un vrai ring, les acteurs ont chacun ajouté une corde à son arc. Pendant que les opérateurs, en plus de leur cœur de métier, envahissaient le secteur de la monnaie électronique, les banques ne se laissaient pas faire. Aujourd’hui, elles ont presque toutes un département monnaie électronique. La Société générale a Yup, la Banque de Dakar SÛR, Wave est adossée à Ecobank…«L’agrément déjà obtenu donne aux banques la possibilité de se lancer dans la monnaie électronique sans faire une nouvelle demande. Là où l’opérateur de téléphonie qui veut faire du Mobile Money doit forcément souscrire à une demande d’agrément à la Banque centrale. C’est pourquoi il ne serait pas surprenant de voir d’autres banques faire leur entrée dans le secteur de la monnaie électronique», explique cet expert bancaire. Dans une interview accordée au quotidien national Le Soleil, Fatoumata Bah, directrice marketing de Yup, à la base, faisait une analyse qui en dit long sur le chamboulement du secteur. «Ce sont les opérateurs qui ont créé le Mobile Money. Donc, en quelque sorte, ce sont les banques qui les ont rejoints, mais avec des normes bancaires. Et vu que la réglementation se durcit, les opérateurs devront, à leur tour, se transformer pour se rapprocher du modèle bancaire», indique-t-elle
FAIBLE TAUX DE BANCARISATION, TAUX DE PENETRATION DU MOBILE : des niches pour les opérateurs
Aujourd’hui, même si le Sénégal compte plus d’une vingtaine d’institutions bancaires, force est de reconnaître que le taux de bancarisation reste relativement faible. C’est pourquoi Alex Corenthin estime que c’est une niche pour les opérateurs. En effet, avec un taux de pénétration de plus de 100%, le mobile est partout. «Aujourd’hui que les opérateurs de téléphonie ont l’agrément d’établissement de Monnaie Electronique (Eme) délivré par la Banque centrale et qu’ils sont dotés d’un fort taux de couverture, le Mobile money est un outil extraordinaire d’inclusion financière. Aussi, du fait de certaines exigences, les banques commerciales sontinaccessibles à une partie de la population, alors que le mobile, aujourd’hui, est dans tous les foyers. C’est ce qui a encouragé la création du M- paiement etles opérateurs s’en donnent à cœur joie. Le Mobile money est, sans nul doute, le meilleur moyen d’inclusion financière», analyse-t-il.
ABDOULAYE DAOUDA DIALLO DECLINE LES GRANDES LIGNES
Les grandes orientations de la loi de finances initiales pour l’année 2021 ont été présentées par le ministre des Finances et du Budget au gouvernement.
Les grandes orientations de la loi de finances initiales pour l’année 2021 ont été présentées par le ministre des Finances et du Budget au gouvernement. Les autorités ont porté leur choix sur la politique budgétaire keynésienne qui consiste à accroître les dépenses pour relancer la croissance. Pour se refaire une santé financière, le gouvernement envisage d’augmenter les recettes en instaurant de nouvelles mesures fiscales. Il est prévu une baisse de 4,1% des recettes fiscales, 2,9% des dons-projets et 93,13% des dons budgétaires. quant au déficit budget couplé au remboursement de la dette pour l’année 2021, il estimé à 1 363,2 milliards. L’innovation est l’entrée en vigueur du budget programme. Ainsi à partir du 1er janvier, les ministres seront des ordonnateurs principaux des crédits.
Le projet de loi de finances pour l’année 2021 présenté mercredi en conseil des ministres s’article autour du triptyque : Subir, Résister et Relancer l’économie. S’appuyant sur le Plan d’Actions Prioritaires Ajusté Accéléré (PAP) 2 A pour la relance de l’économie nationale, le ministère des Finances a pris en compte dans le budget 2021 les 5 initiatives majeures du plan Sénégal Emergent (PSE) et les trois programmes structurants à savoir le PUDC, le PUMA et Promovilles. Malgré les impacts négatifs de la covid-19, le gouvernement ne renonce pas à ses ambitions de porter haut la croissance économique qui est tombée à moins 1%.
Ainsi, à travers la Loi de Finances 2021, le gouvernement affiche son détermination de faire redémarrer le cycle de la croissance par une politique budgétaire keynésienne. En effet, cette nouvelle trouvaille des autorités comme l’indique Keynes, consiste à accroître ses dépenses pour relancer la croissance. Il s’agit de faire des investissements publics directs qui créeront de l’activité pour une multitude d’entreprises, les poussant elles-mêmes à investir. «Accroître les dépenses pour relancer la croissance en mettant l’accent sur les souverainetés alimentaire, sanitaire et pharmaceutique, avec un secteur privé national plus dynamique et comme cibles prioritaires le trident agriculture-élevage-pêche, la santé et l’industrialisation», a expliqué le ministre des Finances et du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo dans un document que détient «L’As». Aussi pour remplir les caisses de l’Etat frappés de plein fouet par la pandémie de covid-19, le gouvernement envisage d’augmenter les recettes en instaurant de nouvelles mesures fiscales pour sécuriser davantage les recettes, d’une part, et accompagner les entreprises du secteur privé pour une meilleure résilience, d’autre part.
LE GOUVERNEMENT ENVISAGE D’AUGMENTER LES RECETTES EN INSTAURANT DE NOUVELLES MESURES FISCALES
Selon le ministre Abdoulaye Daouda Diallo le budget est bâti sur l’hypothèse d’une maîtrise de la pandémie de la Covid-19. C’est la raison pour laquelle le gouvernement espère une amélioration significative des indicateurs macroéconomiques. «En effet, la croissance s’affiche à 5,2%. Le taux d’inflation est contenu à 1,7%. Arrêté à 3 226 milliards de FCFA en recettes et 3 969,9 milliards de FCFA en dépenses, le présent budget dégage un déficit de 5% du PIB, représentant 743,9 milliards de FCFA en valeur absolue», indique la même source. Par rapport au budget en cours, le projet de loi de finances 2021connaît une hausse de dépenses pour 260,9 milliards de FCFA, soit 7%.
LE GOUVERNEMENT ENVISAGE D’AUGMENTER LES RECETTES EN INSTAURANT DE NOUVELLES MESURES FISCALES
Selon le ministre Abdoulaye Daouda Diallo, le budget est bâti sur l’hypothèse d’une maîtrise de la pandémie de la Covid-19. C’est la raison pour laquelle, le gouvernement espère une amélioration significative des indicateurs macroéconomiques. «En effet, la croissance s’affiche à 5,2%. Le taux d’inflation est contenu à 1,7%. Arrêté à 3 226 milliards de FCFA en recettes et 3 969,9 milliards de FCFA en dépenses, le présent budget dégage un déficit de 5% du PIB, représentant 743,9 milliards de FCFA en valeur absolue», indique la même source. Par rapport au budget en cours, le projet de loi de finances 2021connait une hausse de dépenses pour 260,9 milliards de FCFA, soit 7%.
BAISSE DE 4,1% DES RECETTES FISCALES, 2,9% DES DOnS-PROJETS ET DE 93,13% DES DOnS BUDGéTAIRES
Dans le projet de LFI 2021, les recettes sont estimées à 3090 milliards FCFA contre 3 833,9 milliards de FCFA pour les dépenses. Cependant, certaines recettes budgétaires vont connaître une baisse par rapport à l’exercice en cours. Il s’agit notamment des recettes fiscales qui sont estimées à 2 564,5 milliards, soit une baisse de 4,1%, les dons-projets qui seront à 268 milliards en 2021, enregistrent une baisse de 2,9% ainsi que les dons budgétaires qui sont projetés à 64 milliards, soit une baisse de 93,13%. Par contre, le gouvernement pourrait compter sur les recettes non fiscales et les recettes exceptionnelles pour se refaire une bonne santé financière. Puisqu’on table sur 133,5 milliards de FCFA de recettes non fiscales, soit une hausse de 7,7% et 60 milliards pour les recettes exceptionnelles. Mais d’après le ministre des Finances et du Budget, cette baisse des recettes fiscales tient compte de la prudence dans la reprise des activités économiques. Toutefois, ajoute-on, «avec la mise en œuvre, depuis le 1er janvier 2020 de la Stratégie de Recettes à Moyen Terme (SRMT), même si celle-ci s’inscrit dans le temps long, il est attendu des mobilisations optimales de la part des administrations fiscale et douanière en pleine modernisation.
LE DEFICIT BUDGET COUPLE AU REMBOURSEMENT DE LA DETTE POUR L’ANNEE 2021, ESTIME A 1 363,2 MILLIARDS
Pour ce qui est des dépenses budgétaires, elles se déclinent en cinq volets. Il s’agit des charges financières de la dette publique (intérêts et commissions) qui s’élèvent à 327milliards de FCFA, contre 364,8 milliards de FCFA en 2020, soit une baisse de 37,8 milliards FCFA en valeur absolue et 10,4% en valeur relative. Cependant, selon le ministère des Finances, ce repli ne tient nullement compte des économies éventuelles qui seraient réalisées dans le cadre de l’Initiative de Suspension du Service de la Dette (ISDD) du G20. Quant aux dépenses de personnel, elles sont à 904,9 milliards de FCFA, contre 817,7 milliards en 2020, soit une progression de 10,7%, les dépenses d’acquisitions de biens et services et de transferts courants estimées à 1007 milliards de FCFA, contre 947,4 milliards en 2020, soit une hausse de 6,3%, les dépenses en capital sur ressources internes qui sont à 751 milliards de FCFA, contre 681,5 milliards en 2020, soit une hausse de 10,2% et les dépenses en capital sur ressources externes sont à 844 milliards de FCFA, contre 761,6 milliards en 2020, soit une progression de 82,4 milliards de FCFA et 10,8% en valeur relative. Les comptes spéciaux du Trésor sont projetés à 135,95 milliards de FCFA, restent invariables par rapport à la loi de finances initiale de 2020. Il est prévu 0,15 milliard pour le compte de commerce, 20,8 milliards pour le compte de prêt, 0,8 milliards pour le compte d’avance et 0,5 milliards pour le compte de garanties et avals. Par ailleurs, le ministère des Finances et du Budget informe que le déficit du budget couplé au remboursement de l’amortissement de la dette pour l’année 2021, serait de 1 363,2 milliards. Abdoulaye Daouda Diallo nourrit l’espoir de combler ce gap grâce «aux tirages au niveau des prêts projets (576,2 milliards de FCFA), des emprunts programmes (105 milliards de FCFA) et des autres emprunts (632 milliards de FCFA)». Il renseigne que le remboursement de la dette en capital se situerait à 619,3 milliards mais il intègre les bons de trésor de 50 milliards émis en 2020 et dont le remboursement est prévu en 2021. En somme, le ministre des Finances et du Budget tient à préciser que le projet de loi de finances 2021 intégrant l’amortissement de la dette publique, est arrêté à 4 589,15 milliards FCFA contre en 4 215,2 milliards FCFA en 2020, soit une hausse de 373,95 milliards FCFA en valeur absolue et de 8,9% en valeur relative.
BUDGET-PROGRAMME : A COMPTER DU 1ER JANVIER LES MINISTRES SERONT DES ORDONNATEURS PRINCIPAUX DES CREDITS
La récession étant passée par là, le ministre des Finances et du Budget annonce le retour à l’orthodoxie budgétaire. Puisque, dit-il, «70% des dépenses internes de fonctionnement et d’investissements de l’Etat étaient en transfert mes collègues voudront bien demander à leurs services de se rapprocher de la Direction générale du Budget pour finaliser la répartition détaillée par nature économique des crédits reclassés des projets et programmes». Il informe que dans le projet de loi de finances 2021, les investissements exécutés par l’Etat se situent à environ 500 milliards FCFA alors qu’ils ne dépassaient guère 150 milliards FCFA les années antérieures. Abdoulaye Daouda Diallo annonce aussi le basculement du budget 2021 en mode programmes (Budget programmes). «Nous disposons d’une loi de finances en mode budget programme qu’il faut maintenant mettre en œuvre. Il s’agira de rendre effective la déconcentration de l’ordonnancement. A compter du 1er janvier prochain, les ministres seront des ordonnateurs principaux des crédits, des emplois et des matières de leurs départements. Vous aurez le pouvoir d’engager, liquider et mandater vous-mêmes les dépenses de vos ministères. C’est un changement historique», soutient M. Diallo. Seulement, les procédures seront encadrées pour éviter des dérapages. L’autre innovation majeure dans le projet de loi de finances 2021 porte sur l’institution, «de plafonds, par nature, pour l’ensemble des dépenses imputables sur les crédits transférés par l’Etat aux entités autonomes publiques, aux institutions de la République et aux services non personnalisés de l’administration publique». Il s’agit de soumettre les transferts effectués par l’Etat à des règles de spécialité précises. En particulier, précise-ton, pour les dépenses de personnel, il est institué des plafonds d’emplois par référence au quantum des crédits transférés par l’Etat et affectés par les entités bénéficiaires aux charges liées à la couverture de leur masse salariale.
RISQUE DE FAIRE BASCULER 40 MILLIONS D’AFRICAINS DANS LA PAUVRETE EXTREME
D’après la dernière analyse de l’économie régionale Africa’s Pulse, la pandémie risque de faire basculer 40 millions d’Africains dans l’extrême pauvreté, effaçant au moins cinq années de progrès dans la lutte contre la pauvreté
La croissance en Afrique subsaharienne devrait chuter à - 3,3% en 2020, entraînant la région dans sa première récession économique en 25 ans. D’après la dernière analyse de l’économie régionale Africa’s Pulse, la pandémie risque de faire basculer 40 millions d’Africains dans l’extrême pauvreté, effaçant au moins cinq années de progrès dans la lutte contre la pauvreté
«Tracer la voie de la relance économique.» Tel est l’intitulé du dernier rapport d’Africa’s Pulse parvenu hier à notre rédaction. Il renseigne que la pandémie de COVID-19 a gravement perturbé l’activité économique en Afrique subsaharienne, mettant en péril une décennie de progrès économique durement acquis. «L’activité économique dans la région devrait se contracter de 3,3%, confirmant la prévision selon laquelle l’Afrique subirait sa première récession en un quart de siècle en 2020», prévient Africa’s Pulse. Pis, selon le rapport, la COVID-19 pourrait faire basculer 40 millions de personnes dans la pauvreté extrême en Afrique, effaçant au moins cinq années de progrès dans la lutte contre ce fléau. De même, apprend-on, la COVID19 pourrait ralentir les progrès réalisés dans le développement du capital humain, car la fermeture des écoles affectera près de 253 millions d’élèves, entraînant potentiellement des pertes d’apprentissages.
«LE CHEMIN DE LA RELANCE ECONOMIQUE SERA LONG ET ESCARPE»
D’après toujours le rapport, la contraction économique due à la pandémie de COVID-19 va se propager dans l’ensemble des pays d’Afrique subsaharienne en 2020. En raison de la conjugaison des mesures de confinement et des retombées connexes de la récession mondiale, note-t-on, la croissance devrait ralentir dans toute la région. Même si la croissance a fortement chuté au second trimestre 2020 dans tous les pays, en particulier au Nigeria (6,1% en glissement annuel) et en Afrique du Sud (17,1%), force est de constater que l’activité des pays à faible intensité de ressources, dont la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Sénégal, ralentira sans se contracter, grâce à une croissance relativement plus robuste du secteur agricole. Tout compte fait, Africa’s Pulse estime que le chemin de la relance économique sera long et escarpé. «Il devra être pavé de politiques économiques saines. Les pays devront reconstituer leur espace budgétaire pour financer des programmes susceptibles de stimuler la reprise, d’améliorer la gestion de la dette et de lutter contre la corruption», préconise le rapport.
En attendant, il est prévu dans le document que le PIB réel de l’Afrique subsaharienne devrait remonter à 2,1% en 2021, toujours en dessous des 2,4% enregistrés en 2019 et inférieur à la croissance démographique. «Le PIB par habitant devrait se contracter de plus de 6,0%», ajoute-t-il avant de révéler que l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe devraient enregistrer une reprise d’activités légèrement plus fortes, avec une croissance projetée à 2,7% en moyenne en 2021, contre 1,3% en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. «La chute des recettes d’exportation, y compris celles provenant du tourisme international, a aggravé les impacts de la COVID-19. Dans le même temps, la réduction des envois de fonds de l’étranger, le ralentissement de l’investissement direct étranger et la baisse des flux de capitaux privés ont durci les contraintes extérieures, laissant les pays de la région confrontés à de graves problèmes d’endettement», lit-on dans le document.
LES REFORMES POUR RELANCER L’ACTIVITE ECONOMIQUE
Pour la relance, Africa’s Pulse propose des réformes pour améliorer l’accès à l’électricité, sa fiabilité et sa consommation. Aussi, le rapport indique-t-il que des réformes encourageant la contestabilité des marchés, le commerce extérieur et les investissements directs étrangers ainsi que la participation à des chaînes de valeur mondiales pourraient exposer des entreprises africaines à une compétition plus forte. Cependant, souligne-t-il, les décideurs de la région doivent promouvoir le développement de chaînes de valeur régionales tout en construisant les fondations et les capacités nécessaires à une participation continentale plus globale. «La ZLEC peut jouer un rôle important en réduisant les coûts de production associés aux barrières tarifaires et non tarifaires, et aux problèmes de facilitation des échanges », a-t-il précisé. Aussi préconise-t-il l’amélioration de la connectivité entre zones rurales et urbaines et entre zones côtières et intérieures ainsi que l’investissement dans les villes pour accroître la productivité agricole et permettre de réaffecter des ressources à des sites plus efficaces et créateurs d’emplois.
Egalement, Africa’s Pulse plaide pour la stimulation de la productivité agricole et l’amélioration des conditions de vie en zone rurale, y compris la sécurité alimentaire. Sans compter enfin, la planification des investissements dans les zones urbaines et rurales.