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28 juillet 2025
LA RÉGION DE KEDOUGOU HÔTE DE L’ÉDITION 2025 DE LA JOURNÉE MONDIALE DE LA POPULATION
Pour la première fois depuis son érection en une région administrative en 2008, Kédougou va abriter la journée mondiale de la population qui sera célébrée le 11 juillet prochain.
A l’instar de la communauté internationale, le Sénégal célèbre le 11 juillet la journée mondiale de la population. Placée sous le thème : « Autonomiser les jeunes en vue d'avoir des ménages favorables à la capture du dividende Démographique, pour un Sénégal équitable et prospère », la présente édition se tiendra à Kédougou. Ainsi, en prélude à cette manifestation, la direction générale du développement du capital humain a organisé une journée d'échange et de partage avec l'Association des Journalistes en Santé, Population et Développement (AJSPD). Il s’agit de permettre aux hommes des médias de s’approprier de la thématique proposée à cette présente édition.
Pour la première fois depuis son érection en une région administrative en 2008, Kédougou va abriter la journée mondiale de la population qui sera célébrée le 11 juillet prochain. Ce sera un moment fort de sensibilisation et d'échanges sur des questions de population et développement, qui offre l'opportunité d'examiner les problèmes de population et de proposer des solutions.
Lors de cette rencontre avec la presse, Dr Assane Ndiaye, Directeur général du développement du capital humain, au ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération, a expliqué les raisons liées au choix de Kédougou comme hôte de l’évènement par le comité national de pilotage.
Selon lui, comparée aux treize régions du Sénégal qui ont eu à organiser, « Kédougou n’a jamais organisé cette JMP. Donc, pour réparer cette injustice, on s’est dit, on va prendre Kédougou. »
L’autre raison liée à ce choix, c’est la démographie. D’après Abou Ba, chef de division à la direction générale du développement du capital humain, « Les indicateurs macroéconomiques sont au rouge. Si nous prenons le taux de pauvreté calculé lors du dernier RGPH, Kédougou est à 61,9% avec Tambacounda juste derrière Sédhiou. Cela veut dire que la pauvreté est dans les régions sud-est. Elles sont toutes audessus de 60%. »
Concernant le taux de chômage, la région est à 61,9%, alors que le niveau national est dans l'ordre de 37,8%. D’ailleurs, selon les chiffres du dernier RGPH, ce chômage des ados et jeunes qui ne sont ni à l'école, ni en formation, ni en emploi, ces jeunes-là âgés de 15-24 ans, au niveau national, est de 46,8% tandis que Kédougou engrange 59,8%
De la même manière, lorsque l’on parle de fécondité, la région est au-dessus de la moyenne nationale, car lorsque la fécondité au niveau nationale est de 4, 2%, Kédougou est en revanche à 5,2 %. S’agissant des personnes âgées de 10-19 ans, selon le dernier RGPH, le niveau de fécondité des ados et jeunes est élevé à 26,6% à Kédougou. Par ailleurs, revenant sur les raisons du choix porté sur le thème : « Autonomiser les jeunes en vue d'avoir des ménages favorables à la capture du Dividende Démographique, pour un Sénégal équitable et prospère », Dr Abou Ba explique que « le thème est d’abord choisi par le siège. Mais chaque pays va adapter le thème en tenant compte de ses réalités socioculturelles. Donc, avec le comité national de pilotage, on a essayé de tropicaliser le thème. »
« Autre chose, ils ont vu que la fécondité est en train de baisser drastiquement dans le monde, menaçant l’extinction d’autres races », a-t-il poursuivi. C’est dans ce cadre, souligne le chef de division à la direction générale du développement du capital humain qu’« on va privilégier de travailler sur le développement du capital humain. Cette jeunesse-là, on va en faire des opportunités de développement pour capter maintenant le dividende démographique », a-t-il conclu.
MBODIENE, LABORATOIRE D’UN DEVELOPPEMENT INCLUSIF ET ECOLOGIQUE
La future station touristique de Mbodiène, appelée à devenir un pilier du secteur touristique sénégalais, a officiellement vu le lancement de ses travaux ce lundi, lors d’une cérémonie présidée par le sous-préfet de Sessène, Richard Biram Faye.
La future station touristique de Mbodiène, appelée à devenir un pilier du secteur touristique sénégalais, a officiellement vu le lancement de ses travaux ce lundi, lors d’une cérémonie présidée par le sous-préfet de Sessène, Richard Biram Faye. En présence des autorités administratives, des représentants de l’État, de partenaires privés et d’acteurs locaux, l’événement marque une étape clé dans la stratégie nationale de développement touristique.
Placé sous le signe de la concertation et de l’engagement collectif, ce lancement a rappelé l’ambition de faire de Mbodiène un exemple de tourisme intégré, respectueux de l’environnement et inclusif sur le plan social.
LES AUTORITES LOCALES APPELLENT A L’ADHESION DES POPULATIONS
Dans une atmosphère empreinte de solennité, le chef du village a ouvert la cérémonie par des prières, saluant la démarche participative du projet et l’implication de la Sapco. Le maire a, pour sa part, exhorté les populations à accompagner cette dynamique, en plaidant pour que les anciens habitants et exploitants soient pleinement associés aux bénéfices économiques et sociaux attendus.
SABLUX MISE SUR UN TOURISME NOUVELLE GENERATION
Partenaire stratégique, l’entreprise Sablux, déjà active à Pointe-Sarène et dans la Cité Ampéa, entend faire de Mbodiène une vitrine du tourisme moderne. Son projet inclut : promenade commerciale, zones résidentielles, parc naturel, équipements professionnels et espaces de loisirs. Une ambition multiforme pour transformer durablement la Petite Côte.
SAPCO ET CDC UNIES AUTOUR D’UNE VISION STRUCTURANTE
Côté institutions, la SAPCO, par la voix de son directeur général Serigne Mamadou, a dévoilé les grandes lignes du programme : 504 hectares à aménager, 3 000 chambres d’hôtels, 2 000 logements résidentiels, des équipements sportifs et un parc aquatique. Objectif : faire de Mbodiène la troisième grande station touristique du pays, après Saly et Pointe Sarène, dans une logique de durabilité et d’ancrage territorial. La CDC, représentée par son directeur général Fadilou Keita, a insisté sur la nécessité d’une gouvernance inclusive et équitable, avec une implication active de toutes les franges de la population pour garantir la justice territoriale.
MBODIENE, CATALYSEUR D’UN TOURISME EQUITABLE
Pensé comme un levier de repositionnement du Sénégal sur l’échiquier touristique régional et mondial, le projet repose sur trois piliers : modernité des infrastructures, équité sociale via l’inclusion des communautés locales, et innovation environnementale. Il ambitionne de conjuguer développement économique et respect du cadre de vie.
ENJEUX ET PERSPECTIVES
La réussite du projet dépendra autant de la qualité de sa réalisation que du respect des engagements pris sur les plans social et environnemental. Aménagements, création d’emplois locaux, protection des terres et accès équitable aux services publics sont au cœur des attentes. Mbodiène ne sera pas seulement un nouveau site touristique : il pourrait devenir un symbole de renouveau économique et de coopération réussie entre secteur public et acteurs privés.
L’APPEL A LA SERENITE DU FORUM DU JUSTICIABLE
Le Forum du Justiciable lance un appel au calme et, surtout, à la sérénité face à la grève d’une partie des agents de la justice, mais également aux nombreuses critiques, parfois virulentes, qui secouent depuis quelques temps la justice.
Dans un communiqué en date d’hier, mardi 8 juillet, le Forum du Justiciable lance un appel au calme et, surtout, à la sérénité face à la grève d’une partie des agents de la justice, mais également aux nombreuses critiques, parfois virulentes, qui secouent depuis quelques temps la justice.
«Nous invitons les travailleurs de la justice, ainsi que les autorités de tutelle, à préserver le fil du dialogue, car c’est de la discussion que jaillit la lumière. Un consensus équilibré, respectueux des revendications légitimes et des contraintes de l’Etat, est non seulement souhaitable, mais indispensable dans l’intérêt exclusif du Sénégal et des Sénégalais », a lancé dans un communiqué le Forum du Justiciable.
Babacar Ba trouve évident que « les conséquences de ce mouvement social pèsent sur l’ensemble de la société. Les soubassements de la grève sont connus et, pour beaucoup, légitimes. Mais l’intérêt supérieur de la justice exige que les parties prenantes explorent avec sincérité les voies de convergence. » C’est dans cet esprit que « Le Forum du Justiciable encourage donc les organisations syndicales et le ministère de la Justice à intensifier les échanges dans un esprit de responsabilité », souligne la source.
Par ailleurs, indique-t-on, « nous déplorons les critiques récurrentes dirigées contre la justice, notamment par certains acteurs politiques. Quelle que soit la gravité des critiques formulées, la justice ne doit pas être fragilisée. Elle constitue le dernier rempart de l’Etat de droit, le socle de notre vivre-ensemble démocratique, qu’il nous faut préserver à tout prix. »
De l’avis du Forum du justiciable, « La justice, comme toute œuvre humaine, est perfectible. Il nous appartient collectivement de contribuer à son amélioration continue. Mais cela ne peut se faire que dans un climat apaisé, loin des invectives, des pressions et des suspicions. » A cet égard, « La sérénité, en effet, est la condition première pour garantir l’impartialité des juges. Elle les protège des émotions et des interférences extérieures. Elle renforce la confiance des citoyens dans l’institution judiciaire », préconise-t-on.
Pour conclure, « Le Forum du Justiciable réaffirme son engagement pour une justice au service du peuple, rendue au nom du peuple et par le peuple, et rappelle avoir déjà transmis aux autorités compétentes ses propositions concrètes pour améliorer l’administration judiciaire », note le document.
UN TAUX DE REUSSITE DE 21,12% ENREGISTRÉ AU PREMIER TOUR DU BAC
Les résultats du premier tour du baccalauréat général sont connus depuis hier, mardi 8 juillet. Publiés par l’Office du Bac, ceux-ci confirment une tendance bien installée : celle d’un examen de plus en plus difficile à franchir pour une majorité d’élèves
L’Office du Bac a rendu publics, hier, les résultats du premier tour du baccalauréat général 2025. Sur 156.050 candidats ayant effectivement composé, seuls 32.961 sont admis d’office. Soit un taux de réussite de 21,12 %.
Les résultats du premier tour du baccalauréat général sont connus depuis hier, mardi 8 juillet. Publiés par l’Office du Bac, ceux-ci confirment une tendance bien installée : celle d’un examen de plus en plus difficile à franchir pour une majorité d’élèves. D’après les chiffres, 160.154 candidats étaient inscrits cette année, toutes séries confondues. 156.050 se sont effectivement présentés aux épreuves, et 32.961 ont été déclarés admis ; soit un taux de réussite global de 21,12 % au premier tour.
Autrement dit, près de 8 candidats sur 10 n’ont pas réussi à franchir cette première étape, et 48.751 d’entre eux sont renvoyés au second tour. Le reste, soit environ 74.000 élèves, est d’ores et déjà recalé sans appel.
Selon les chiffres de l’Office du Bac, les séries littéraires concentrent plus de 131.000 inscrits ; soit environ 82 % des effectifs. La série L’1 à elle seule regroupe 40.239 candidats, loin devant les séries scientifiques, dont la S2 (23.681 inscrits) et la S1 (578). « Ce déséquilibre ancien dans l’orientation scolaire se reflète aussi dans les résultats. Si la série S2 affiche 7.708 admis, la série L’1 en compte 4.285. Le taux de réussite est donc plus faible, malgré un nombre de candidats largement supérieur », explique l’Office du Bac.
« Ce choix massif pour les filières littéraires, souvent guidé par le manque d’orientation ou la perception erronée de la difficulté des matières scientifiques, limite les perspectives professionnelles des candidats, dans un pays qui a pourtant un besoin criant de profils techniques et scientifiques », a-t-on indiqué. Le document renseigne que « seulement 128 mentions Très Bien ont été décernées, tous profils confondus ». Les mentions Bien s’élèvent à 10.172, et les mentions Assez Bien à 6 .216 ; soit 7.516 mentions en tout.
« Sur les 32.961 admis durant ce premier tour, à peine 22% ont obtenu une mention, ce qui pose des questions sur la qualité générale des apprentissages, mais aussi sur les conditions d’encadrement et de préparation », a-t-on expliqué.
« Ce faible taux d’admission au premier tour met en lumière les difficultés systémiques du système éducatif sénégalais : surpopulation des classes, déficit d’enseignants qualifiés, inégalités territoriales d’accès aux ressources pédagogiques et le choix de l’orientation », lit-on dans la source. « Autant de failles qui rendent difficile la réussite de l’écrasante majorité des élèves, notamment dans les zones rurales », a-t-on soutenu.
DAKAR, CARREFOUR DE SAVOIRS
La 20e édition de l’Association internationale pour la recherche interculturelle (Aric) s’est ouverte hier au Théâtre national Daniel Sorano, en présence de 227 participants venus d’Afrique et d’ailleurs.
La 20e édition de l’Association internationale pour la recherche interculturelle (Aric) s’est ouverte hier au Théâtre national Daniel Sorano, en présence de 227 participants venus d’Afrique et d’ailleurs. Une rencontre de quatre jours, organisée en partenariat avec l’Université Cheikh Anta Diop, pour explorer l’interculturel entre traditions, héritages, modernités et circulations.
Du 8 au 11 juillet 2025, Dakar accueille le monde de la recherche interculturelle. Le Théâtre national Daniel Sorano, lieu symbolique de rencontres artistiques et intellectuelles, sert d’écrin à la 20e édition du congrès de l’Association internationale pour la recherche interculturelle (Aric). Organisée en partenariat avec la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad), cette rencontre académique réunit 227 participants autour d’un thème majeur : « L’interculturel : entre traditions, héritages, modernités et circulations ».
Durant quatre jours, plus de 35 sessions et 15 symposiums rythmeront les échanges entre chercheurs, doctorants, professionnels et praticiens issus de diverses disciplines. Psychologie, histoire, géographie, communication, philosophie, linguistique ou encore études féminines et études du handicap.
Dakar, lieu-symbole du dialogue interculturel
« Ce congrès n’est pas qu’un lieu de réflexion théorique, mais aussi un espace de construction d’actions concrètes », a rappelé Rachid Oulahal, président de l’association, lors de la cérémonie d’ouverture. À l’en croire, l’Aric, fondée en 1986, organise un congrès tous les deux ans afin de croiser les regards scientifiques et professionnels sur les enjeux contemporains de l’interculturalité. Les travaux présentés donneront lieu à des publications scientifiques, mais aussi, ambitionne l’association, à la mise en œuvre de dispositifs favorisant une meilleure compréhension entre cultures. Un double objectif revendiqué : produire de la connaissance et inspirer des pratiques. « Les professionnels présents participent justement à cette volonté de rendre opérationnelles certaines propositions issues des débats », a ajouté l’enseignant-chercheur en psychologie interculturelle.
Le choix de Dakar n’est pas anodin. Ville de croisement, située à la pointe occidentale du continent africain, la capitale sénégalaise a toujours été un lieu de brassage, de dialogue et de mémoire. Le secrétaire d’État à la Culture, aux industries créatives et au patrimoine historique, Bakary Sarr, qui présidait la cérémonie d’ouverture, a salué cette symbolique forte qui entre dans le cadre de la Vision Sénégal 2050. « Dakar est le lieu de rencontre des vents du monde entier, une ville qui a accueilli toutes les sommités éprises de liberté », a-t-il déclaré.
Pour lui, l’interculturel est une voie incontournable vers un avenir apaisé : « Étudier, enseigner et promouvoir la culture de l’autre est un impératif si nous voulons taire les divergences qui minent la paix. Nous avons le devoir de léguer aux générations futures un monde en partage, fondé sur le respect, la fraternité et l’amour. »
L’interculturel comme pédagogie de la paix
Dans son adresse aux chercheurs, doctorants et professionnels présents, M. Sarr a souligné l’importance d’un engagement collectif à faire de la diversité un levier d’harmonie et non de tension.
Un idéal qui fait écho à la pensée de Léopold Sédar Senghor, dont l’influence imprègne encore les politiques culturelles du pays. Le fondateur de la Négritude défendait un humanisme de l’ouverture, où « l’enracinement dans ses propres valeurs allait de pair avec l’ouverture à l’universel ».
Pour le professeur Mamadou Bouna Timéra, doyen par intérim de la Faculté des Lettres et Sciences humaines de l’Ucad, l’interculturel n’est pas une simple notion académique, mais bien une pédagogie : « Une pédagogie de la tolérance, de la diversité et de la paix », a-t-il insisté. Et, cette rencontre, a-t-il souligné, est l’occasion de repenser les postures intellectuelles, d’articuler les apports disciplinaires dans une logique de croisement, et de promouvoir une approche décloisonnée des identités et des interactions humaines. « C’est en assumant nos individualités que nous pouvons construire un équilibre collectif », a-t-il ajouté, insistant sur l’importance de l’acceptation de l’autre dans sa différence.
Au-delà des sessions scientifiques, le congrès se veut donc aussi un moment d’inspiration. Les participants sont invités à réfléchir à des solutions concrètes pour améliorer la rencontre entre les cultures, à travers l’éducation, les arts, les médias ou encore les politiques publiques.
ABDOU KARIM NDOYE, L’ŒIL ET LA LIGNE DE FRONT
Conseiller spécial à la présidence, directeur artistique, commissaire de l’exposition Première Ligne, Abdou Karim Ndoye, 44 ans, incarne cette génération d’artistes qui ont fait de la photographie un outil d’engagement
Conseiller spécial à la présidence, directeur artistique, commissaire de l’exposition Première Ligne, Abdou Karim Ndoye, 44 ans, incarne cette génération d’artistes qui ont fait de la photographie un outil d’engagement. Portrait d’un homme discret, œil affûté et posture sereine, qui a réussi à mettre en lumière un mouvement longtemps tenu dans l’ombre.
D’abord, il y a le regard. Fixe, lent, habilement détourné du tumulte. Puis le corps : taille moyenne, dos droit, gestuelle sobre, mains posées sur les genoux. Le teint est noir profond, le sourire calme, toujours en coin. Abdou Karim Ndoye, artiste-photographe, ne cherche pas la lumière. Il la travaille. Il la dompte. Il la met en scène. À 44 ans, l’enfant de Rufisque est devenu l’un des artisans silencieux de l’iconographie politique contemporaine au Sénégal. L’œil dans le viseur, les pieds ancrés dans le réel, le conseiller spécial à la présidence a su cadrer la colère, choisir l’angle de l’engagement, ajuster la mise au point sur un peuple en marche. Rencontré au Musée des Civilisations noires, à l’occasion de son exposition Première Ligne, Karim se montre d’un calme désarmant. Quand il parle, il ne s’épanche pas. Il réfléchit. Il cherche les mots comme on cherche la bonne lumière. Ni trop crue, ni trop plate. Son nom apparaît rarement en haut de l’affiche. Pourtant, il est l’homme qui a façonné l’esthétique du parti Pastef et conçu, en 2018, la couverture du livre «Solutions» d’Ousmane Sonko. Une image sobre, tendue, où chaque choix chromatique, chaque typographie, semble dire : la rupture est une discipline. Il conçoit ensuite l’intégralité des visuels de la campagne Sonko Président en 2019, puis en 2024. « Le design politique, ce n’est pas faire joli. C’est donner forme à une idée. Faire sentir une vision, même sans les mots », dit-il, en paraverbal. Son style se reconnaît immédiatement : arrière-plans neutres, lumière naturelle, postures assumées. Pas de filtre. Pas d’effet. Juste l’essentiel. Les portraits qu’il signe sont d’une rare tension. Dans son exposition «Première Ligne», on y sent la fatigue, le feu, l’espoir. Des visages de luttes. Des corps debout. Comme dans les photos de Dorothea Lange, Walker Evans ou Malick Sidibé, il s’agit moins de fixer l’instant que de capturer une vérité sociale. Il photographie le tumulte en silence. À l’instar d’un James Nachtwey dans les zones de guerre, il cherche la vérité, pas la spectacularisation.
Le style Ndoye, l’élégance de la rupture
Turbulent mais ambitieux durant son adolescence, rien pourtant n’indiquait ce destin. Abdou Karim Ndoye voulait être architecte. Ou ingénieur en génie civil. Il rêvait de plans, de structures, de volumes. Mais on l’oriente en série littéraire après son Bfem. « Ça ne m’intéressait pas. J’ai arrêté », confie-t-il. Puis viennent les cours de comptabilité. Trois mois. Abandon. Une école de maintenance. Un an. Même verdict. « Mes parents ne comprenaient pas. » Fatou Fall, sa mère, confirme : « Un jour, j’ai été déçue quand il m’a avoué ne pas avoir passé un examen pour une formation en informatique. Personne ne savait ce qu’il voulait faire finalement. » Abdou répond : « Certes, je ne savais pas ce que je voulais, mais je savais au moins ce que je ne voulais pas », philosophe l’artiste, tout sourire. En réalité, il rêvait de métiers d’avenir. Le seul hic : il ne savait pas encore lesquels.
Finalement il opte pour les arts graphiques quelques années plus tard. Il fait carrière en tant que graphiste à l’agence Mc Cann Erickson durant 5 ans, puis à l’agence Caractère durant 7 ans. En 2017, l’affaire Khalifa Sall agit comme un déclencheur : « J’ai ressenti de l’acharnement. Je me suis dit que ce pays étouffait les voix dissidentes. Que personne n’avait plus le droit de s’opposer. »
Alors, c’est là qu’il découvre Ousmane Sonko. Ses interventions à l’Assemblée nationale l’impressionnent. « Il était percutant. On n’avait pas l’habitude », se remémore-t-il. Une conversation avec un ami de l’équipe de Khalifa Sall va tout faire basculer. « Je lui ai dit qu’il nous fallait un opposant crédible. Je pensais au président Sonko. Mais il était mal photographié, surtout concernant ses images publiées sur les réseaux sociaux », note le directeur artistique.
« Il fallait bien que quelqu’un garde la trace »
Porté par l’amour de son pays, Karim n’a jamais hésité à se rendre utile, notamment en mettant ses talents d’infographe autodidacte au service des autres. « Il avait commencé une formation en infographie, mais il a fini par l’arrêter après la première année : il n’en avait plus besoin. Il était déjà en avance sur le programme », confie sa mère, un brin admirative.
Ainsi, il devient rapidement la tête pensante des visuels officiels du Pastef. « J’ai toujours pensé que l’image peut ouvrir des possibles. Elle peut choquer, apaiser, rassembler. C’est un langage universel », dit-il. Il entre dans l’équipe en 2018, impose la rigueur, crée une charte graphique et met en place une discipline visuelle. Désormais, plus question de publier n’importe quelle photo ou d’utiliser n’importe quelle couleur. Il faut une ligne. Et, depuis avril 2025, il est commissaire de l’exposition Première Ligne, au Musée des Civilisations noires. Une galerie en clair-obscur du combat mené de 2014 à 2024.
De la naissance du Pastef à la victoire du fils de Ndiaganiao en tant que président de la République, le parcours y est retracé en images, de façon chronologique, de la révolte du 3 mars 2021 à l’arrivée au pouvoir. « Il fallait garder les traces. Documenter ce que d’autres voulaient effacer », glisse-t-il, gai comme un pinson. Au sein du Musée, Première Ligne s’ouvre comme un sas de mémoire. Des cimaises noires courent le long des murs, absorbant la lumière pour mieux la restituer sur les tirages grand format. Chaque photographie est encadrée avec sobriété : aucun éclat superflu, juste la netteté brute des instants volés à l’histoire. On y entre comme on entrerait dans un sanctuaire. Le silence, feutré, est seulement troublé par le froissement discret des pas des visiteurs.
Une esthétique de la transmission
À travers ses cadres, Ndoye réunit les générations, rassemble les voix éparses et donne au tumulte une narration. Chaque image est pensée comme un témoin. Lumière rasante, cadrages dynamiques, plans serrés. Une mémoire par les visages. Les corps jeunes y sont omniprésents. Regards durs, gestes décisifs, visages fendus d’espoir. « Cette exposition est un acte de mémoire. Mais aussi d’avertissement. Ceux qui tiennent aujourd’hui le pouvoir doivent s’en souvenir. Ils n’ont pas le droit à l’échec. Trop de sacrifices ont été consentis », explique-t-il, optimiste.
Pour les jeunes, le photographe espère transmettre autre chose : le courage, la patience, la générosité, des valeurs à apprendre. « Sonko a su faire place à Diomaye. Très généreux. Il faut parfois savoir reculer pour faire avancer l’idée. » Et puis, une leçon ultime : « Tout est possible. Diomaye est passé de la prison à la présidence en dix jours. Donc il faut croire en ses rêves, se battre pour ses convictions. » Oui. Il faut le dire. Si ça, ce n’est pas une mise au point de l’Histoire…
Mais au-delà de l’image, il y a l’homme. Résilient, droit, enraciné. « À Rufisque, je l’ai vu à l’œuvre bien avant le Pastef. Il portait déjà le combat pour l’environnement, pour la dignité urbaine. Il fait partie des précurseurs du Setal suñu réew », confie Dieynaba Wone, conseillère spéciale du président de la République. Et d’ajouter : « Karim est un roc. Modèle de constance. Il ne cède ni à l’échec ni au doute. Il incarne cette force tranquille qui rend les victoires possibles. » Sa mère, Fatou Fall, corrobore : « Karim est une belle âme. À Rufisque, il mobilisait les jeunes autour d’actions de reboisement, convaincu que chaque arbre planté était un geste d’espoir. Certains, intrigués par son influence grandissante, pensaient qu’il convoitait le fauteuil de maire. En réalité, il n’en était rien. Il agissait simplement dans un domaine qui le passionnait profondément. »
CES IDENTITÉS REMPLIES DE SENS ET DE MYTHES
Un prénom raconte une histoire. Il est la première note dans la vie d’un enfant, le définit et le caractérise. Mais derrière cette dénomination se cache tout un mythe, selon les ethnies, car elle en dit plus que ce qu’elle veut montrer
Un prénom raconte une histoire. Il est la première note dans la vie d’un enfant, le définit et le caractérise. Mais derrière cette dénomination se cache tout un mythe, selon les ethnies, car elle en dit plus que ce qu’elle veut montrer. Au-delà de permettre de faire la distinction entre un tel et un tel, le nom constitue l’identité de chacun de ses membres du Peul au Sérère en passant par le Wolof et le Diola. Les religions révélées ont aussi joué leur partition dans le choix de ces dénominations souvent si singulières.
« Quel est ton nom ? », demande le surveillant en le fouettant sans pitié, et l’esclave de répondre : « Mon nom est Kunta Kinte », les pieds et les mains attachés. Le fouet s’abat de nouveau sur lui, jusqu’à ce qu’il dise que son nom est Toby et non Kunta Kinte. Cette scène de l’épisode 1 de la mini-série sur l’esclavage Roots (Racines), sortie dans les années 1970, montre l’attachement de Kunta Kinte à son nom de naissance. Cela reflète son appartenance ethnique et ses origines, dont il n’était pas prêt à se départir pour adopter le nom Toby, choisi par son maître. C’est ce qu’a aussi voulu montrer feu Abass Diao dans son mémoire d’études publié à l’École nationale supérieure des bibliothèques en France, dans les années 80, sur l’étude des noms sénégalais. Le prénom est, d’après l’auteur, un signe d’appartenance ethnique. De ce fait, il remplit différentes fonctions. Il y a, selon lui, tout un symbolisme autour de la grossesse de la femme, de la naissance et autour du nom donné à l’enfant. Cela explique les choix des prénoms que l’on retrouve uniquement dans une ethnie bien donnée et dans un contexte précis.
Talisman contre la faucheuse
Bougouma (je ne t’aime pas), Amul Yakaar (sans espoir), Ken Bugul (personne n’aime), Biti Loxo (l’extérieur de la main), Yadikoon (tu étais venu) ou encore Sagar (tissu sans valeur) sont autant de prénoms qui, à première vue, font sourire et peuvent même susciter des moqueries, car inhabituels, voire rares. Mais le prénom est un boubou qu’on peut difficilement enlever. Malgré leur singularité, ils revêtent un sens particulier. Ndeye Codou Fall Diop explique que ces dénominations ont la même source. L’enseignante en écriture wolof au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) renseigne que ces noms sont donnés à des personnes dont la mère accouche et que son enfant meurt de façon répétée ou perd des enfants en bas âge. Les prénoms dits « yaradaal » sont toujours présents dans la société wolof et sont des noms conjuratoires attribués à des enfants pour éviter leur mort précoce, dans un contexte familial de décès juvéniles à répétition.
Les anthroponymes antinomiques sont présents chez les Pulaar et sont destinés à « vaincre » la mort. « Nous avons des prénoms tels que Tekkere, assimilé à un morceau de tissu sans valeur, ou encore Ndoondi, qui veut dire cendre », affirme Papa Ali Diallo, spécialiste en sciences du langage. Il peut y avoir une motivation à l’antinomie pour décrédibiliser en apparence l’enfant et le dévaloriser. Mais cela représente, selon le linguiste, une stratégie pour assurer sa survie.
Les Sérères ont aussi des prénoms ayant trait à la mort comme Gaskel, Honan ou encore Nioowi. « On exorcise la mort en l’intégrant dans le nom du nouveau-né, pour tromper les forces de la mort », explique Sobel Dione, un adepte de la culture sérère aux textes très lus sur le réseau Facebook.
Felwine Sarr, Mouhamed Mbougar Sarr ou encore Léopold Sédar Senghor sont des noms familiers, et les personnes qui les portent ont brillé par leur intelligence. Mais derrière ces figures se cachent des anthroponymes lourds de sens. Felwine désigne celui qui est aimé de tout le monde, Sédar pour celui qui n’aura jamais honte, et Mbougar qui signifie celui qu’on n’aime pas. Ils tracent dès la naissance la trajectoire des bambins et influent sur leur vie. Dans la culture sérère, ces noms sont très répandus, d’après Sobel Dione. Le passionné de la culture sérère soutient que le prénom et le nom sont constitutifs de la personne dans cette ethnie. Il est plus qu’un signe, il est une figuration symbolique de la personne. « Le prénom situe l’individu dans le groupe, il représente le corps, l’âme, le totem », fait savoir ce dernier. Sobel Dione cite comme exemples des noms comme Ngor, qui veut dire le vrai homme, Sobel, qui signifie celui qui précède tout, Fakhane pour désigner la gentille, la tendre, Mossane, qui signifie la belle, ou encore Ñokhor, le bagarreur.
L’attribution du prénom intervient entre un et six ans chez les Diolas, d’après les explications de Paul Diédhiou. L’anthropologue de formation renseigne que cette singularité se traduit par le fait que, par le prénom, on peut appréhender les notions d’enfer, de paradis et de réincarnation. Ceci renvoie également à la singularité du prénom diola, qui « meurt » (kukét) avec la personne qui le porte si toutefois cette dernière décède à la fleur de son âge. « C’est un sacrilège que de nommer une personne qui meurt jeune. C’est pour cette raison que l’on prend la précaution de prénommer les enfants entre un et six ans », relève-t-il.
Les qualificatifs des prénoms sont aussi retrouvés chez les Pulaars, avec des anthroponymes honorifiques tels que Ceernopour dire savant/enseignant, Elimaan pour dire imam. Selon les explications de Pape Ali Diallo, il existe dans ce même registre des appellations telles que Malaado, désignant celui qui est béni, Mawɗo, signifiant homme mûr, Cellu pour celui qui est en bonne santé, entre autres.
Gora pour brave homme, Serigne désignant savant, Gorgui signifiant homme mûr, Soxna pour désigner une épouse ou encore Magatte pour femme ou homme mûr sont autant de noms qualificatifs retrouvés chez les Wolofs.
Le prénom se basant sur un des traits de l’enfant est retrouvé également chez les Diolas. À titre d’exemple, Paul Diédhiou cite des noms tels que Djalissa, qui désigne un enfant chétif, Djamissa, qui signifie chétive pour une enfant, Akodji pour désigner le vilain ou encore Anatolediakaw pour la vilaine.
« Un des critères pour déterminer le moment à partir duquel on attribue un prénom à un enfant est la marche », explique Paul Diédhiou. L’enseignant-chercheur à l’Université Assane Seck de Ziguinchor relève que, lorsqu’un enfant sait réellement marcher ou courir, il peut se voir attribuer un prénom. Ainsi, jusqu’à ce stade, le bambin ne porte pas de prénom.
JOUR ET PERIODE DE NAISSANCE : UN TEMPS FAVORABLE AU CHOIX DU PRENOM
Le jour et la période de naissance sont aussi importants dans le choix des prénoms à travers les ethnies. Sobel Dione explique que chez les Sérères, au cours de la cérémonie du « Bat » (baptême), le prénom fait exister socialement le bébé. C’est en principe la sœur du père qui donne le prénom à l’enfant. Elle peut choisir un nom dans la famille paternelle, mais les circonstances de la naissance peuvent orienter vers un autre. C’est la raison pour laquelle on retrouve chez cette ethnie des prénoms comme Téning, qui équivaut à lundi, Khémesse, qui renvoie à jeudi, Dibor à dimanche, Latyr désignant celui qui est né mardi.
« Il y a des noms chez les Pulaars choisis pour décrire un état physique chez l’enfant ou au moment où il est né », renseigne Pape Ali Diallo. Juulde pour un enfant né le jour de la Tabaski, Korka évoque un enfant né dans le mois de ramadan, Lamaraana pour un enfant né le mois de ramadan, ou encore Saajo pour désigner un enfant né juste après des jumeaux, sont autant d’exemples.
Les prénoms tels qu’Aldiouma (vendredi), Tabaski, Gamou, Touba sont autant d’appellations en rapport avec les circonstances de naissance retrouvées chez les Wolofs.
Le rapport avec les liens familiaux
Le premier arrivé est souvent le premier servi, et l’ordre d’arrivée des enfants n’est pas une exception. Dans la culture pulaar, il y a des prénoms généalogiques, car les prénoms respectent chez les Pulaars une certaine typologie. Ceux-ci sont attribués en fonction de l’ordre de naissance du côté de la mère.
« Par rapport à la fratrie, l’aîné doit s’appeler traditionnellement Dikko, le suivant Samba, le troisième Demba, etc. Chez les femmes, on a l’aînée qui s’appelle Dikko ou Saara, ensuite Kumba, Demmo, Penda, Daado, ainsi de suite », a expliqué Pape Ali Diallo.
Les jumeaux s’appellent Subboo et Gunndoo, qu’ils soient des filles ou des garçons. Celui qui suit la venue au monde des jumeaux s’appelle Saajo, sans distinction de sexe.
Les Pulaars constituent, selon Papa Ali Diallo, une société dans laquelle la filiation se fait par les mâles, cela après l’avènement de l’islam. C’est donc au père que revient le droit de choisir un dénominatif pour le nouveau-né, mais celui-ci est suivi de celui du père. Il y a donc une juxtaposition du prénom de l’enfant et de celui du père. « Cela caractérise une sorte d’identité nominale. On s’identifie d’abord par rapport à son père », précise le linguiste. Il permet aussi, selon ses explications, de faire la distinction entre des enfants ayant le même prénom. Cette juxtaposition du prénom intervient dans certains cas où une femme pulaar se marie avec un homme qui n’est pas pulaar. La famille maternelle peut ajouter le nom de la mère lors du baptême de l’enfant, pour s’approprier le nouveau-né, explique Papa Ali Diallo.
Les prénoms varient selon le rang au sein de la famille du côté des Sérères. Sobel Dione liste entre autres Mame Koorpour le grand-père, Mame Ndew pour la grand-mère, Makane pour l’aînée des jumelles, Ndébane désigne la cadette des jumelles, Ngormack pour l’aîné des jumeaux et Ngor Ndép pour désigner le cadet des jumeaux.
Un enfant peut porter le prénom de son père biologique chez les Diolas, mais à condition d’y associer le terme ampa pour les garçons ou agno pour les filles. « On dira ainsi Ampasabeuly, fils de Sabeuly, Agnosidiock, la fille de Sidiock », étaye Paul Diédhiou. L’enfant peut également porter le prénom de son grand-père pour les garçons, Ampasibakouty, et de sa grand-mère pour les filles, Ajowbuyonah.
INFLUENCE DES RELIGIONS ABRAHAMIQUES: LES NOMS TRADITIONNELS EN PERTE DE VITESSE
« Les prénoms sérères commencent à disparaître à cause des religions abrahamiques », constate Sobel Dione. Ce dernier soutient que cela a eu une influence dans le choix des dénominations. Il prône le maintien des prénoms des « ancêtres ». Le passionné de langues africaines va plus loin en affirmant que ces religions ont la même origine, mais que pourtant, chacun des peuples a soigneusement maintenu l’essentiel de son identité.
« Nous pouvons nous apercevoir qu’un prénom musulman ou chrétien n’existe pas ; ce qui existe, ce sont des prénoms propres à chaque peuple selon les coutumes, la culture, l’histoire », estime-t-il, comme pour prôner un retour à la source.
L’islam a joué un rôle important dans le choix des prénoms pulaars. « La religion musulmane interdit de donner à l’enfant certains noms dévalorisants, de mécréants, d’animaux ou de Satan, des objets ou choses immorales. Certains prénoms ont donc été abandonnés pour d’autres », a fait savoir Pape Ali Diallo. Il explique que malgré cela, les Pulaars ont essayé de garder certains noms traditionnels. « Ils ont essayé de traduire certains noms, comme Yakhya, qui est l’équivalent de Wourib », confie-t-il.
Les Wolofs ont aussi subi l’influence des prénoms amenés par les religions révélées. Ndeye Codou Fall Diop explique qu’il y a eu un mix entre les prénoms dits « ceddo » et ceux tirés de la religion. Elle prend l’exemple des personnes qui se convertissent tout en gardant leur nom « ceddo », ou se retrouvent avec deux appellations. « Nous pouvons prendre l’exemple de noms comme Birima, qui est l’équivalent d’Ibrahima, ou encore Bakary, qui est l’équivalent de Babacar, valables dans la religion », fait savoir l’enseignante en écriture wolof au Cesti.
Les religions révélées ont donné naissance à certaines homonymies. Des musulmans peuvent se retrouver avec des prénoms chrétiens, et vice-versa. C’est dû, selon Mame Guimar Diop, administratrice du groupe Léppi mbooru Wolof – Histoire générale des Wolofs, à une longue cohabitation entre chrétiens et musulmans dans les quatre communes, à des liens de parenté, au brassage et aux relations matrimoniales entre ces Wolofs. Comme quoi, le nom n’est pas propre à une communauté (tuur dëkul fen !).
L’influence des religions révélées est réelle chez les Diolas, note Paul Diédhiou. À l’exception du culte de la circoncision, beaucoup de cultes ont disparu, et les prénoms traditionnels sont souvent relégués au second plan, constate-t-il.
Tel un boulet
« Chaque année, au début des cours, certains de mes camarades s’étonnaient d’entendre un nom qui sonne si féminin être porté par un garçon », telle est la situation vécue par Aby Kane Diallo Sow. Il est même arrivé que des profs, en faisant l’appel, s’esclaffent en découvrant le visage derrière ce prénom. Ce jeune homme de 28 ans a dû, durant toute sa scolarité, revenir sur ce patronyme si singulier.
« Il a fallu toujours que je donne des explications sur mes origines pulaars. C’est très répandu chez nous », se rappelle-t-il. Malgré cet état de fait, l’étudiant en journalisme prend cela avec philosophie et y voit une occasion de parler de ses origines pulaars.
Le spécialiste de la culture pulaar, Pape Ali Diallo, explique qu’à part des prénoms liés à l’ordre de naissance, il n’y a pas de noms propres spécifiques à un sexe. Les hommes comme les femmes peuvent les porter, mais ils sont circonstanciels et c’est en fonction de facteurs socio-culturels.
Madame Ndiaye a toujours eu du mal avec son prénom. Tel un fardeau, cela a longtemps pesé sur ses frêles épaules de petite fille. Devenue épouse et mère de deux enfants, elle se souvient encore des moqueries dont elle a fait l’objet au cours de son enfance. Un jour, elle est même allée parler à son père pour comprendre le choix d’un tel prénom.
« Mon père voulait m’appeler Oumy. Mais il m’a appelée Bougouma pour rendre hommage à sa sœur qui a beaucoup fait pour lui », révèle la jeune femme. Ce nom, qui partait d’une bonne intention, est devenu un fardeau pour Bougouma. Elle décide, après mûres réflexions, de changer son prénom pour Oumy. Mais elle va essuyer un niet catégorique de son père.
Cependant, cela ne change en rien la volonté de la mère de famille de se départir de ce nom de baptême. Au cours de sa vie, Oumy a été l’appellation qu’elle a longtemps portée au détriment de Bougouma. « Je ne peux certes pas changer mon appellation, mais j’ai opté pour Oumy, et c’est ce nom qui est resté au fil du temps », avoue-t-elle.
Le sens de la responsabilité
« Tur dafa diss », le nom est lourd à porter. Cette citation d’un proverbe wolof renseigne sur la tâche qu’attend celui ou celle qui porte un prénom. C’est le cas des prénoms tirés de la religion. Gina Marie Suzanne Batista a hérité des prénoms de deux importantes figures féminines de la religion chrétienne.
« Marie est d’abord la mère de Jésus-Christ, et Suzanne est l’une des femmes ayant secouru Jésus dans la douleur quand tout le monde le reniait et qu’il portait sa croix », a fait savoir la jeune femme. Ces prénoms lui inspirent à faire le bien, à donner sa vie à Dieu et à aimer son prochain.
« Le nom Abdourahmane signifie en arabe le serviteur du Miséricordieux. Rahman fait partie des 99 noms d’Allah, qui signifie miséricordieux », explique Abdourahmane Ndiaye. Ce dernier connaît l’histoire de son prénom sur le bout des doigts et se dit fier de le porter. Il a pour homonyme Abdou Rahman ibn Awf, un des dix compagnons du Prophète (PSL) à qui il avait promis le paradis de son vivant.
« Ce prénom m’incite à servir le Tout-Puissant, m’encourage à redoubler d’efforts dans la dévotion, à faire attention pour ne pas dévier du droit chemin et à mériter ce nom choisi par mes parents », estime-t-il.
IMAM MAKHTAR NDIAYE, PRÊCHEUR « L’être humain est sacré, on doit lui choisir un joli nom »
Les prénoms traditionnels choisis dans le but de protéger l’enfant selon les différentes ethnies sont fustigés par l’islam, d’après l’imam Makhtar Ndiaye
« L’être humain est sacré, par conséquent on doit lui choisir un joli nom », renseigne-t-il. La religion musulmane préconise donc de donner des noms à l’image de ceux du Prophète (PSL) et de ses compagnons.
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REVUE DE LA PRESSE SENEGALAISE DU MERCREDI 9 JUILLET 2025
L’actualité de ce mercredi est dominée par une vive polémique autour du CNRA (Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel), les remous politiques liés à l’opposition, un regain de mobilisation de la société civile, et une riche actualité sportive
L’actualité nationale de ce mercredi est dominée par une vive polémique autour du CNRA (Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel), les remous politiques liés à l’opposition, un regain de mobilisation de la société civile, et une riche actualité sportive. Tour d’horizon des principaux titres de la presse sénégalaise.
CNRA ET LIBERTE D’EXPRESSION : LA SOCIETE CIVILE MONTE AU CRENEAU
Le Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA) cristallise toutes les tensions. Plusieurs quotidiens rapportent une véritable levée de boucliers contre cette institution accusée de parti pris et d'instrumentalisation.
Le journal Direct News titre sans détour : « Tirs groupés contre le CNRA », illustrant une fronde coordonnée contre la régulation jugée partiale de l’espace médiatique.
Point Actu rapporte que « la société civile charge le pouvoir, la justice et le CNRA », dans un contexte de crispation généralisée.
Rewmi Quotidien indique que le CDEPS (Collectif des diffuseurs) dénonce une « instrumentalisation » du CNRA.
L'Info va plus loin en titrant : « Trois alternances, une même arme répressive », suggérant que la répression des médias et libertés persiste, peu importe le régime au pouvoir.
Le Quotidien, quant à lui, ironise sur la réaction du CNRA face à une publication sur les réseaux sociaux avec ce titre sarcastique : « Les sweet d’un tweet ».
Dans cette même veine, WalfQuotidien tire la sonnette d’alarme sur la démocratie en affirmant : « Libertés en danger ! », tandis que EnQuête résume la situation par un constat amer : « L’éternel recommencement ».
OPPOSITION ET GOUVERNANCE : BRAS DE FER INSTITUTIONNEL
Le climat politique reste tendu. Gueum Sa Bopp, mouvement de Bougane Gueye Dany, exige la démission du Premier ministre Ousmane Sonko, selon L’Évidence qui titre : « Gueum Sa Bopp exige la démission du PM Sonko ». Ce dernier est ciblé par une partie de la classe politique qui le considère comme clivant.
Dans Sud Quotidien, le ton est martial : « Les boucliers se lèvent », signalant un sursaut dans les rangs de l’opposition et de la société civile.
L’Info met aussi l’accent sur la continuité des méthodes de répression, malgré les changements de régime, en soulignant les arrestations ciblées et le contrôle des médias.
De son côté, Le Populaire s’intéresse à Badara Gadiaga, acteur politique qui revient au-devant de la scène dans ce contexte troublé. Il est présenté comme un homme d’ouverture pour certains, mais comme une carte du pouvoir pour d'autres.
L’Observateur révèle une affaire troublante au sein de l’armée : « Le CEMGA victime d’un imposteur dangereux ». Un homme se serait fait passer pour un proche du haut commandement militaire avant d’être démasqué.
DIPLOMATIE ET DEVELOPPEMENT : LE SENEGAL RENFORCE SES LIENS
Loin des querelles internes, certains journaux mettent en avant les efforts de développement et les relations internationales.
Le Soleil consacre sa une au potentiel touristique de la station balnéaire de Mbodiène avec ce titre optimiste : « Mbodiène, site balnéaire en devenir ».
Le Point salue la présence de Macky Sall aux côtés du président kényan William Ruto pour le lancement du Centre mondial pour l’adaptation, une structure censée renforcer la résilience climatique en Afrique.
L’Évidence se réjouit également du rapprochement diplomatique avec l’Égypte : « Le Sénégal et l’Égypte consolident leur coopération ».
Culture, société et hommage
Sur le plan social et culturel, Yoor-Yoor s’interroge sur le relâchement de l’autorité de l’État avec ce titre fort : « Pourquoi il faut restaurer l’autorité de l’État », dans un contexte marqué par les attaques contre les symboles de la République.
Le journal L’AS consacre sa une à Ousmane Diagne, disparu à l’occasion de la Tabaski : « Tabaski nous saisit Ousmane Diagne ». Un hommage à une figure du paysage social sénégalais.
SPORT : FIN DE SAISON, PREPARATION ET EMOTIONS
Dans l’arène sportive, la presse met l’accent sur les enjeux locaux et internationaux :
Record revient sur les ambitions des Lionnes du Sénégal, qui affrontent la redoutable Zambie en match préparatoire.
Stades constate une fin de parcours difficile pour le Jaraaf, titrant : « Le Jaraaf boucle par une défaite ».
Sunulamb se projette sur Dakar 2026 avec : « Le COJOJ fait le point par un média tour ».
Point Actu Sport analyse la demi-finale de Chelsea : « Chelsea brise le rêve de Fluminense et se hisse en finale ».
Enfin, Rewmi Sports rapporte une tragédie dans le monde du football : « Décès de Diogo Jota et de son frère », un drame qui secoue les amateurs du ballon rond.
CNRA, DE LA RÉGULATION À L’INTIMIDATION MÉDIATIQUE
Au lieu d’opposer des arguments à la critique, on préfère agiter le spectre de la “dignité des institutions” pour faire taire ceux qui posent les vraies questions. La démocratie ne se nourrit pas de silence ni de conformité imposée
Le dernier communiqué du Conseil national de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA), daté du 7 juillet 2025, sonne moins comme un rappel à l’ordre professionnel que comme une tentative à peine voilée de museler la presse indépendante. À travers sa mise en demeure adressée au Groupe Futurs Médias (GFM), c’est une certaine idée de la liberté d’expression qui vacille, une fois de plus, sous les coups d’une régulation de plus en plus politique.
Il ne s’agit pas ici de défendre l’injure ou la diffamation, que la loi encadre déjà. Il s’agit de refuser l’acharnement institutionnel contre les médias qui offrent encore un espace de contradiction, de débats critiques et de liberté de ton, dans un paysage audiovisuel progressivement domestiqué.
Faut-il rappeler que ceux qui, hier, dénonçaient avec virulence les dérives du pouvoir d’alors, s’illustrent aujourd’hui dans une intolérance systématique vis-à-vis des voix dissonantes ? Ce pouvoir, si prompt à critiquer hier, semble aujourd’hui incapable de répliquer autrement que par la menace, la sanction, ou le discrédit.
Au lieu d’opposer des arguments à la critique, on préfère agiter le spectre de la “dignité des institutions” pour faire taire ceux qui posent les vraies questions. La démocratie ne se nourrit pas de silence ni de conformité imposée ; elle grandit au contact du débat, parfois rugueux, mais toujours nécessaire.
Quand une émission comme Jakaarlo, connue pour sa diversité d’opinions et son ton libre, est régulièrement ciblée, ce n’est pas seulement une émission que l’on tente de suspendre, c’est une parole plurielle que l’on cherche à effacer.
Le CNRA, en se posant de plus en plus comme bras armé d’une majorité à la peau fine, s’éloigne dangereusement de sa mission de garant impartial du pluralisme médiatique. Les Sénégalais ne sont pas dupes. Derrière les faux-semblants de régulation, ils voient poindre les contours d’une dictature rampante, qui avance masquée, mais avance tout de même.
Il n’y a pas de démocratie sans presse libre. Et il n’y a pas de presse libre sous menace constante.