SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
30 juillet 2025
"C'EST AU CONTINENT AFRICAIN D'NVENTER SA VILLE DE DEMAIN"
Impliqué dans de nombreux projets de villes nouvelles dans plusieurs pays africains, Pierre Goudiaby Atepa observe favorablement le projet des deux pôles urbains au sein de la capitale – à Diamniadio et aux abords du lac Rose – souhaité par Macky Sall
L’architecte Pierre Goudiaby Atepa a assisté à chaque étape de l’hérésie urbanistique de Dakar. Impliqué dans de nombreux projets de villes nouvelles dans plusieurs pays africains, il observe favorablement le projet des deux pôles urbains au sein de la capitale sénégalaise – à Diamniadio et aux abords du lac Rose – souhaité par Macky Sall.
Depuis ses jeunes années dans les ruelles de la Médina – commune du centre de la capitale où ce Casamançais de naissance a grandi –, Dakar est devenue méconnaissable, dévorée par la frénésie immobilière, les embouteillages et la pollution. L’architecte Pierre Goudiaby Atepa, 72 ans, a assisté à chaque étape de cette hérésie urbanistique. Il confie regretter aujourd’hui l’époque de Senghor, « lorsque la hauteur des bâtiments à Fann-Résidences [où il habite] était limitée strictement » et que le littoral de la Corniche-Ouest n’avait pas encore été bradé au profit d’intérêts privés.
Impliqué lui-même dans plusieurs projets de villes nouvelles dans différents pays du continent, cet architecte-conseiller des princes, businessman aux affaires florissantes et ancien président de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) observe favorablement le projet, cher à Macky Sall, de ranimer une capitale à bout de souffle en faisant émerger deux pôles urbains à l’embouchure de la presqu’île du Cap-Vert, à Diamniadio et aux abords du lac Rose. « Dakar mérite d’être revue et corrigée », résume-t-il. Au-delà d’un réflexe de survie face à l’explosion démographique et urbanistique, Pierre Goudiaby Atepa veut voir dans la construction de cette génération de « villes intelligentes » une occasion pour l’Afrique d’inventer ce que sera, demain, une cité moderne.
Jeune Afrique : À quand remonte le projet de désengorger Dakar en créant une ville nouvelle et de faire de l’agglomération une métropole moderne ?
Pierre Goudiaby Atepa : Le constat de l’engorgement de Dakar est ancien. Depuis les indépendances, la population des capitales africaines double en moyenne tous les vingt-cinq ans. Lors de son premier mandat, le président Abdoulaye Wade, dont j’ai été le conseiller spécial, avait donc envisagé de créer un pôle urbain au lac Rose. Je pourrais vous en montrer les plans : il y avait une ville médicale, une ville universitaire… et même un Bollywood sénégalais ! Le projet avait été finalisé et adopté sur le papier, mais les travaux n’ont jamais démarré.
Macky Sall, lui, est passé à l’acte…
Macky Sall aura eu le mérite de se lancer dans l’aventure. Peu après son élection, de très bonne foi, il a souhaité poursuivre ce projet. Il m’avait même convié à l’accompagner lors de deux voyages officiels dans le Golfe, notamment pour concrétiser des partenariats avec des investisseurs qataris.
Lui et son équipe ont finalement choisi de privilégier Diamniadio pour mener ce projet à bien. Mais celui d’un deuxième pôle urbain, au lac Rose, n’a pas été abandonné pour autant. On y trouve d’ailleurs un cadre plus accueillant, en bordure de l’océan et, surtout, le sol y est plus favorable que celui de Diamniadio, composé d’argile gonflante.
Diamniadio se veut une « ville intelligente ». Qu’est-ce que cela signifie ?
Une ville intelligente sait tirer profit des nouvelles technologies pour réguler la circulation, l’assainissement, l’aménagement global… Elle repose sur la conception de services urbains performants, qui peuvent s’adapter en temps réel et sur le long terme à l’évolution des besoins des collectivités, des citoyens et de l’économie. C’est aussi une ville qui respecte l’environnement en mettant en valeur les espaces verts.
Diamniadio est encore un vaste chantier, où seuls quelques quartiers et bâtiments sont déjà opérationnels. À quelle échéance estimez-vous qu’elle deviendra une ville à part entière ?
« Nouveau venu, qui cherches Rome en Rome, / Et rien de Rome en Rome n’aperçois », écrivait du Bellay… Aujourd’hui, il est encore trop tôt pour apercevoir Diamniadio, car nous en sommes au début du projet. Mais je veux croire que ses concepteurs feront prochainement émerger le cœur de ville, qui n’existe pas encore. C’est cela qui permettra de garantir l’épanouissement des habitants et évitera à Diamniadio d’être une simple cité-dortoir. Les tissus d’une ville se forment sur le long terme. On raisonne en décennies, pas en années. Au moins peut-on d’ores et déjà constater un début d’exécution.
Votre cabinet est impliqué dans la conception de projets du même type en Sierra Leone et en Guinée équatoriale. Comment les États les financent-ils ?
En grande partie par la valorisation du foncier. Lorsque vous décidez de délocaliser le gouvernement en un même lieu – un peu sur le modèle de la cité ministérielle à Bamako –, les germes du financement de votre ville nouvelle commencent à apparaître.
Par exemple, dans une zone de 10 000 ha où le mètre carré coûtait 20 euros, le foncier est multiplié par dix dès que le gouvernement y déménage, et, dix ans plus tard, par cent. C’est à partir de cela que l’on peut structurer le financement de ces infrastructures.
Pourtant le cœur d’une vraie ville ne saurait se limiter aux ministères…
Les ministères sont un appât. C’est à partir de là que l’on peut construire des logements pour les fonctionnaires, puis des services publics, des universités, des centres commerciaux, un quartier d’affaires, des lieux de loisirs, etc.
Dakar s’est étendue de manière anarchique. Elle est saturée de constructions, encombrée et polluée. Comment éviter qu’un tel scénario ne se reproduise à Diamniadio ?
Tout est question de volonté politique. Les autorités devront manifester une réelle intransigeance dans l’application des règlements d’urbanisme. Vous connaissez mon combat pour la préservation du littoral sur la Corniche-Ouest, où le domaine public maritime s’est transformé peu à peu en domaine privé maritime.
Il faudra éviter qu’à Diamniadio, comme au lac Rose, n’importe qui puisse faire n’importe quoi, n’importe où et n’importe comment.
L’explosion du prix du foncier, que vous présentez comme un moteur de croissance, n’ouvre-t-elle pas la porte à une spéculation extrême, qui se traduira par nombre de passe-droits et contribuera à reproduire le phénomène que vous dénoncez à Dakar ?
Dans notre métier, la rigueur est essentielle. Regardez l’éboulement qui s’est produit à Bafoussam, au Cameroun, en octobre : plus de 60 morts ! C’est parce que les gens n’ont pas respecté les règlements selon lesquels, sur un flanc de X degrés, on ne peut être autorisé à construire qu’en prenant des dispositions spécifiques. Quand on laisse des gens faire de la spéculation sauvage, la catastrophe n’est jamais loin.
Je suis convaincu que Dakar demeurera la capitale, pour plusieurs raisons. D’abord, des symboles forts s’y trouvent : deux grandes mosquées, la cathédrale, le palais présidentiel, le Parlement, etc. Diamniadio sera sans doute une ville plus orientée vers l’économie, et Lac Rose, une ville plus touristique, avec peut-être des quartiers résidentiels huppés.
Pour que Diamniadio puisse remplir ses objectifs, l’amélioration des transports interurbains est essentielle. Comment appréciez-vous les projets du train express régional (TER), déjà bien avancé, et du bus rapid transit (BRT), qui vient tout juste d’être lancé ?
Ce sont des projets pertinents car l’un des problèmes majeurs de Dakar, c’est l’absence de fluidité du transport urbain. Or une ville ne peut aspirer au statut de ville intelligente si elle est incapable de réguler ses transports. Un bémol toutefois concernant le TER : le coût du projet me semble exorbitant.
Nous avons nous-mêmes fait des propositions visant à détruire certains bâtiments du centre-ville pour aménager des espaces verts et piétonniers. Mais là encore, il faut une volonté politique très forte, car le foncier y est tellement onéreux que les gens préfèrent poursuivre dans la voie de la spéculation. Aujourd’hui, on s’apprête à réserver des couloirs aux BRT. Mais quid des piétons ? À Dakar, rien n’a été prévu pour eux, si ce n’est sur la corniche.
Quelles expériences vous marquent le plus sur le continent en matière de villes nouvelles ?
J’ai été impressionné par certaines initiatives, très bien pensées, qui ont été menées au Maroc. On y a créé de petits pôles urbains très structurés, articulés avec le développement de nouvelles activités industrielles.
Derrière ce type de projets de villes nouvelles, nous avons la volonté, partagée par les chefs d’État concernés, de dessiner l’Afrique du futur. Notre ambition est d’esquisser le visage d’un continent qui, non seulement, regarde vers l’avenir, mais qui, surtout, donne le tempo de ce que demain sera. Le continent n’est pas condamné à être à la traîne, c’est à lui de montrer l’exemple de ce que doit être une cité moderne.
Cinq références d’Atepa
• Monument de la Renaissance africaine, à Dakar
• Siège de la BCEAO, à Dakar
• Siège de la Cedeao, à Lomé (Togo)
• Aéroport international de Banjul (Gambie)
• Place de la Nation, à N’Djamena (Tchad)
Capitales bis
En Sierra Leone, le groupe Atepa vient d’être retenu pour assurer la conception d’une extension de Freetown sur l’autre rive de l’estuaire. Le groupe, qui a par ailleurs conçu la ville de Malabo II, en Guinée équatoriale, espère que sera très prochainement officialisé le choix de sa conception d’une « annexe » de la capitale congolaise, Kinshasa. Déjà modélisé en 3D, le projet devrait être présenté avant la fin du mois de décembre au président, Félix Tshisekedi.
L’ETAT A SOLDE 48 MILLIARDS SUR UN TOTAL DE 50 MILLIARDS
Le ministre des Finances et du Budget a expliqué en détail hier, devant les députés, les sommes payées par le gouvernement du Sénégal aux enseignants en terme de rappels, validation et indemnités de logement
Le ministre des Finances et du Budget a expliqué en détail hier, devant les députés, les sommes payées par le gouvernement du Sénégal aux enseignants en terme de rappels, validation et indemnités de logement. D’après Abdoulaye Daouda Diallo, 48 milliards de francs CFA ont été épongés sur 50 milliards de francs CFA dus.
A la suite du ministre de l’Education nationale, c’est son collègue des Finances et du Budget, Abdoulaye Daouda Diallo, qui a pris la parole comme à chaque séance, pour faire l’état des lieux des paiements des rappels et autres dus aux enseignants.
D’après lui, la somme des rappels payés aux enseignants s’élève à 48 milliards de francs CFA sur un objectif de 50 milliards de francs CFA. « Nous sommes convaincus que nous allons atteindre les 50 milliards qui avaient fait l’objet d’un accord pour la régularisation, d’ici la fin de l’année 2019. Ces rappels sont répartis entre les intégrations pour 16 milliards 258 millions de francs CFA et qui concerne un effectif de 3 077 enseignants. Il y a les rappels de validation pour 4 milliards 263 millions de francs CFA pour 3 209 enseignants. Cette somme concerne les actes antérieurs au mois de février 2019. Un montant de 4 milliards de francs CFA de rappel d’avancement a été payé pour 4 277 enseignants et 13 milliards 740 millions de francs CFA au titre de divers rappels pour 17 771 enseignants », a précisé le ministre des Finances et du Budget. Il ajoute qu’il reste la mise en solde de 10 000 enseignants. Pour l’alignement et l’indemnité de logement qui était de 60 000 francs CFA, il a été porté à la somme de 100 000 francs CFA suite à des accords signés ensemble, soit 40 000 francs de plus.
SUR IMPOSITION SUR LES RAPPELS
Il soutient que cela devrait être séquencé et matérialisé avant le 1er octobre 2018 qui était de 3 milliards 700 millions de francs CFA pour les trois derniers mois de l’année 2018.Il précise qu’une deuxième augmentation de 10 000 francs CFA à partir de janvier 2019 a été prise sur le budget de 2019. La troisième augmentation qui sera de 15 000 francs CFA sera impactée dans le budget de 2020 à partir du 1er janvier de l’année prochaine pour un montant de 36 milliards 900 millions de francs CFA. Abdoulaye Daouda Diallo note que le montant total pour la hausse de l’indemnité de logement sera de 65 milliards 200 millions de francs CFA. « Ce qui va avoir un impact direct de 40 millions de francs CFA sur chaque salaire d’un enseignant.
Sur un nombre de 91 000 enseignants, le montant est bien sûr important », a dit le ministre. Sur la question des surimpositions, il soutient qu’en cas de rappel, la personne se rend compte qu’en vérité elle a été surimposée plus que ce qu’elle devait payer en impôts. « C’est juste une question de fiscalité. Quand j’ai reçu des syndicalistes de la santé, je leur avais dit qu’il fallait qu’ils comprennent que l’impôt est annuel et que même si on leur fait un rappel à la fin du mois d’octobre, nous estimons qu’ils doivent payer la totalité des impôts de l’année en cours. C’est vrai que cela peut sembler particulièrement répressif. Nous sommes en train de voir comment soumettre à votre autorisation un projet afin de résoudre ce problème », conclut-il.
YOUGA SOW SE PLAINT, BOUN DIONNE ENFONCE LE CLOU
25% du chiffre d’affaires de Sococim captes par l’Etat, le PDG de «Sococim industries» s’est plaint des taxes et autres redevances que l’Etat du Sénégal soutire à la cimenterie.
Hier, lors de la présentation du rapport ITIE 2018, le PDG de «Sococim industries» s’est plaint des taxes et autres redevances que l’Etat du Sénégal soutire à la cimenterie.
Une sortie qui a irrité le Secrétaire général de la Présidence de la République qui estime que ces ressources appartiennent au peuple sénégalais. Prenant la parole, le PDG de «Sococim Industries» a révélé, hier, que l’Etat du Sénégal capte 25% du chiffre d’affaires de la cimenterie à travers les taxes et autres redevances. «L’Etat gagne plus que les actionnaires de la société», s’est plaint Youga Sow qui déplore le fait que les sociétés minières soient taxées à tort de capter les ressources du pays. «Il faut une reconnaissance de notre contribution», a-t-il renchéri. Mais le ministre d’Etat et Secrétaire général de la Présidence de la République, Mahammad Boun Abdallah Dionne estime qu’il n’y a rien d’anormal dans cette situation. «Heureusement qu’il y a une telle contribution. 100 000 logements vont arriver sur le marché.
Et pour les financer, l’Etat a mis en place le Fonds de Garantie du Logement (Fogalop) pour que les Sénégalais puissent avoir accès facilement au crédit bancaire et accéder au logement. Tout cela est garanti par la taxe parafiscale retenue auprès des cimentiers. Cette taxe permet de financer ce programme», a expliqué Boun Dionne. Toujours sur ce prélèvement que Sococim juge exorbitant, l’ancien Premier ministre indique qu’il estt out à fait normal que l’Etat se rémunère mieux que les investisseurs. «Le ciment, c’est du calcaire. Ce sont des ressources qui appartiennent au peuple sénégalais. Il faudrait que le peuple se rétribue à hauteur de sa participation dans le ciment du pays. Le taux de 25% sur le chiffre d’affaires se comprend parce qu’il s’agit de notre calcaire», a-t-il soutenu à ce propos.
Par ailleurs, le ministre d’Etat Secrétaire général de la Présidence de la République a profité de son discours pour répondre aussi à Abdoul Maliky Bousso, vice-président de la coalition «Publiez ce que vous payez (Pcqvp)» au Sénégal. Celui-ci avait présenté les Industries Chimiques du Sénégal (ICS) comme un anti-modèle en matière de gouvernance extractive en déplorant le préjudice subi du fait de son installation par les populations et l’environnement. « Il faut faire de sorte que le modèle ICS ne se reproduise jamais en optimisant les profits et en minorant les effets négatifs de l’exploitation de ces ressources extractives», a déclaré Monsieur Bousso. Dans son discours, Boun Dionne a tenu à relativiser les propos du vice-président de la coalition «Publiez ce que vous payez».
Et c’est pour dire que toutes les PME et PMI thiessoises spécialistes du secteur industrie et du génie électrique ont eu à vivre de cette sous-traitance des ICS. «Cette société donnait aux entreprises thiessoises 100 milliards Fcfa de sous-traitance», a-t-il indiqué.
LA CHRONIQUE HEBDO D'ELGAS
LE PARTIR EN SCÈNE
EXCLUSIF SENEPLUS - Partir reste curieusement le mirage non seulement de ceux qui n’ont rien mais souvent aussi de ceux qui ont tout - la construction des imaginaires qui célèbrent le « rester chez soi », est un cuisant échec - INVENTAIRE DES IDOLES
« L’homme n’a pas de racines, il a des pieds. » S. Rushdie
Quand Ibra italien [i]se présente aux familles sénégalaises à l’orée des années 2000, c’est alors un grand gaillard, taquin et bavard, ivre de sa certitude et bardé de privilèges. Sourire du séducteur, entrain du dragueur, culot de l’assurance, il a tout dans sa taille haute, et son allure racée. Il a même, outre le visage émacié, ce détail minuscule dans l’œil par lequel on reconnaît, sinon le parvenu, à tout le moins le nouveau riche ou celui qui feint de l’être. Il dégaine l’argent facilement, cristallise les regards souvent conquis, corrompt les femmes déjà attroupées à son cou, et suscite auprès de la masse populaire ce mélange d’envie, de jalousie et de défiance qui fait le propre du rapport aux mythes. La suite on la connaît. Entré avec fracas et éclat dans les postes de télévision sénégalais, Ibra italien, en sortira la queue basse, défait, démasqué, et avec lui tout le symbole de cette mythologie de l’immigration et ses grands mensonges, habilement empaquetés dans l’enveloppe de l’apparence. Déshabillé et ramené à sa condition, c’est un clown triste, les poches trouées qui filtrent le vent de la mauvaise fortune, et diffuse le parfum malodorant du mensonge. Les deux temps de l’immigration capturés par la caméra de Cheikh Tidiane Diop et exécutés par la brillante troupe Daaray Kocc, offraient un petit panorama sur l’antichambre de l’immigration, celle que les récits enjoliveurs parviennent souvent à cacher. Le téléfilm, moment fondateur dans le dire populaire national, s’inscrivait en réalité dans une longue liste, voire tradition, dans l’art sénégalais, où la destitution de la mythologie de l’immigration providentielle a toujours été au cœur des intérêts, cependant que dans la population ces alarmes, ces préventions, se heurtaient à l’indifférence, et l’insensibilité du désir du Partir.
Chez Fatou Diome, le Partir avait d’abord pris les traits d’un jeune sereer. Madické rêvait de Maldini. Le ventre de l’Atlantique, pompe frénétique du désir, et énergie inépuisable du rêve, aspirait de jeunes hommes, dont la romancière nous contait l’insensée gourmandise. Dans un second opus ensuite et indirectement, Celles qui attendent, romançait différemment les déchirures du partir, entre autres tableaux des rapports cachotiers des amants séparés par l’immigration, cette emprise du muñ que l’on inculque aux femmes sénégalaises comme condition de leur délivrance. La litanie des trahisons admises au nom du pacte de la prospérité à venir frémissait sous la plume de la féministe. Abass Ndione, lui, donne à son regard des couleurs plus chaleureuses. C’est un voyage, quasi-chorale, d’hommes à l’amitié raffermie par une condition unique, et désarmés face aux aléas de la providence. Et l’on se rappelle que ce fut dans les mêmes conditions qu’une bonne partie de l’immigration de la vallée du fleuve se produisit pour achever son périple près des boucles de la Seine dans les années 60. La chorale est aussi mise en scène dans un roman récent de Mbougar Sarr, Silence du cœur,72 destins qui rythment un roman dans une terre d’accueil sicilienne, où l’auteur donne à voir la douleur de l’attente, l’incertitude, et les rêves déchus qui muent potentiellement en violence. De même, dans le Mbëk-mi Abass Ndione jette la bouteille à la mer, la fortune des embarqués sera toute autre. Les péripéties du voyage que narre l’auteur, avec cette nudité fragile des hommes qui se découvre quand l’odeur du trépas rôde, donne à la fois au Partir ces accents d’héroïsme et de folie. Avec le rôle qu’incarne Mbissine Diop, sa silhouette frêle et son raffinement inné, Sembène, dès son premier long métrage La Noirede, prenait prétexte d’un fait divers, pour administrer avec le filtre délicat de la caméra, ses leçons sociales. Cap ensuite sur Mandabi, où un transfert d’argent, campait déjà, le nœud et l’intrigue de la vie sociale. Nombreux, seront les livres, films, pièces de théâtre, chansons, où seront chantés les mises en garde, et les lendemains d’immigration qui déchantent. Il y a à parier que le message a été entendu. Rien d’autre ne semble être fait à part cet accusé de réception national.
Mieux que l’art, la légende populaire, et son pieux enfant, la morale, psalmodiaient l’irrévérence à l’immigration. Têtu, le partir reste, avec les accents de l’impétueux « pian » burkinabè. Des côtes appauvries où le poisson ne voltige plus dans les filets des pêcheurs, ça part. Des terres assoiffées où la semence ne remplit plus la pitance quotidienne, ça part. Dans le repas de famille à Nguet Ndar, la mère de famille encourage son fils à Partir pour féconder le rêve de prospérité. Du bréviaire national du courage, émerge ce goût de l’aventure par lequel l’homme sénégalais taille sa réputation de l’effort, ça incite au partir. Des aéroports neufs ou vieux, où claque aux nez des charretiers envieux l’odeur bourgeoise, ça part. Partir reste le réflexe très humain du nomade mais hélas, aussi, du banni, du nié. La pause que le sédentaire s’offre, avec l’envie, toujours chaude et accrochée, de refouler, un jour, sa terre. Ce partir, condition de l’homme et de la bête en quête de pâturages, d’horizons, de changements, a la noblesse du génie de l’Homme toujours renouvelé. S’il a encore le choix, Partir est pour l’homme le goût des autres, du partage, de la découverte. Mais s’il est l’ultime recours, ravagé par la désespérance, il a tout de la fuite. La violence symbolique du départ contraint, même serti de rêve, est douleur intérieure. Violence que l’habit fastueux du retour et son grand mensonge tentent vainement de voiler.
On apprend au passage une mauvaise nouvelle, à travers la démographie comme science : plus les gens s’enrichissent, plus ils ont la tentation de partir. Les fortunés partent pour se faire soigner, les intellectuels pour se faire couronner, d’autres nantis y rapatrient leur fortune et y expédient leurs enfants… Partir reste donc curieusement le mirage non seulement de ceux qui n’ont rien mais souvent aussi de ceux qui ont tout. Face à ce constat, on voit bien que la construction des imaginaires qui célèbrent le « rester chez soi », est un cuisant échec. Tout bonnement parce qu’un imaginaire ne s’énonce pas, il se bâtit à partir de constructions tangibles. Jamais la destination Afrique n’a autant été mise en valeur par une narration qui romance jusqu’à la vérité, et jamais les périls de l’immigration n’ont été aussi nombreux, comme le récent drame des 63 migrants morts au large de la Mauritanie nous le rappelle douloureusement. Une vérité difficile à entendre découle de tout ceci : c’est que tous les immigrés restent les mêmes dans la quête d’ailleurs. La volonté de partir brave ainsi toutes les alarmes, et tient tête à tous les récits. De quoi revenir urgemment à la seule question qui compte et qui conditionne tout, la possibilité d’un rêve local, qui questionne immanquablement la responsabilité des pouvoirs en place.
Et nous voilà, donc, race d’immigrés. Fortunes diverses, mais tronc commun. Partir, bien souvent, et quoique nous en fûmes prévenus à renfort de films, de livres, de légende sociale, signe notre impuissance. Voilà sans doute pourquoi ceux qui partent, dans l’excitation et l’inconfort de leur position, sont enclins à donner de si nombreuses leçons. Un complexe d’infériorité immédiat fonde son pendant de supériorité pour l’origine. Le goût de la rive atteinte efface de la mémoire gustative l’acide bain qu’ils ont quitté. Partir, c’est se décolorer et mourir avec l’espoir, tenace, mais si maigre, d’une renaissance au berceau.
[i] Téléfilm sénégalais du début des années 2000 qui revenait sur les mensonges de l’immigration
En un sens, la capitale est bien un miroir de concentration du Sénégal, où se reflètent le meilleur et le pire du pays - Tous les visages de Dakar m’intéressent, à défaut de me plaire
Jeune Afrique |
Mohamed Mbougar Sarr |
Publication 11/12/2019
Longtemps, j’ai tiré un certain orgueil à dire : « Je ne suis pas de Dakar. » Mon état civil avait beau prétendre que j’y étais venu au monde, mes attaches géographiques, les mythologies de mon enfance, mon éclosion à la vie sénégalaise, tout cela conspira à révoquer la primauté de mon lieu de naissance.
J’ai toujours vécu au Sénégal en provincial et, comme tel, me suis inscrit, construit, contre la grande capitale : son prestige, le snobisme de la plupart de ses habitants, qui ne me semblaient rien connaître du Sénégal au-delà de Pikine et de Guédiawaye [banlieues de la ville], l’arrogant récit qui la confondait au pays entier – même ceux qui vivaient dans les autres régions vous disaient en plaisantant à moitié, lorsque vous alliez à Dakar : « Transmets mes salutations à ceux du Sénégal ! »
Les secrets de la ville
Cette ville a toujours été pour moi une ville de passage, et bien qu’il m’arrive encore d’exalter avec une fierté rebelle ma non-dakarité, j’aime de plus en plus y séjourner. Chaque visite m’en révèle un aspect, un territoire, un secret, une légende urbaine, une cicatrice. Dakar s’effeuille avec lenteur sous mes yeux, et je tire mon plaisir – un plaisir de voyeur – d’ignorer ce que la prochaine pièce, tombée, me révélera. Je ne la vois que par intermittence, par éclipses et éclats, comme si la capitale était elle-même l’un des nombreux génies qui la protègent. J’aime cette manière de (mé-)connaître Dakar : en étranger.
Je ne veux ni l’idéaliser ni donner d’elle la seule image (d’Épinal) de la ville-mythe, figée dans son étreinte éternelle avec l’Atlantique, pétrie de culture, raffinée, hospitalière, parcourue par ses innocents (vraiment ?) symboles colorés que sont les karapitt [déformation de « cars rapides » : moyens de transport urbain aux prix très accessibles].
Elle est peut-être tout cela dans une certaine mesure, mais je ne suis aveugle ni à l’extraordinaire pression démographique, ni aux jeunes talibés délaissés et menacés, ni à la radicalité des contrastes urbains, ni à l’anarchie architecturale, ni aux patentes inégalités sociales, ni aux visages de la misère, ni à la saleté, ni à la pollution atmosphérique et sonore. Je vois, sens, subis tout cela chaque fois que j’y viens ; et peu à peu, une idée que je réfutais jadis s’impose à moi : en un sens, Dakar est bien un miroir de concentration du Sénégal, où se reflètent le meilleur et le pire du pays.
Entre bas-fond miséreux et jet-set
Tous les visages de Dakar m’intéressent, à défaut de me plaire. Je connais les salles les plus feutrées du Plateau (des jardins de l’Institut français à ceux du palais de la République), suis invité aux endroits dits « in » ou « on », côtoie les sociétés les plus cultivées selon une certaine vision de la culture (colloques universitaires, expositions, rencontres littéraires, représentations théâtrales, etc.), me mêle à l’occasion à la jet-set et à l’élite (bourgeoise, culturelle, mondaine). Privilèges ambigus de la vie d’écrivain.
Mais cette même vocation me donne un attrait viscéral pour le « out », le « off », les tanganas [gargotes], les marchés populeux, quelques bas-fonds misérables et tristes et si humains pourtant, les électriques sabars de quartier [séances de danses au son des tam-tams] aux scènes inavouables, l’ordinaire tragicomique des saynètes et des palabres de rue. La facilité consisterait à dire que tout cela dit une autre ville ; mais non : c’est la même.
Au cours de ma vie, j’ai eu une seule fois l’envie irrépressible d’être à Dakar, de faire corps avec la ville et ses habitants. C’était le 23 juin 2011. Une grande partie du peuple était dans la rue pour s’opposer à une révision abusive de la Constitution. J’ai vu ce jour-là que la cité n’était pas que bercée par le tranquille roulis de l’océan : il y avait aussi en elle une énergie rageuse et déterminée, qui transcendait tous les contrastes pour leur donner le seul visage de la révolte.
C’est cette énergie-là que je recherche : les lieux où Dakar se désencombre de son propre mythe pour faire circuler une pure et fraternelle énergie humaine et politique qui en constitue le génie véritable. Ces lieux existent. Cherchez-les. Créez-les.
Mohamed Mbougar Sarr est écrivain, auteur de La Cale (Prix Stéphane-Hessel), Terre Ceinte, Silence du Choeur (prix Ahmadou-Kourouma, Grand prix du roman métis3).
par Mehdi Ba
DAKAR, D'ÉMILE À MACKY
Si les responsables politiques de tous bords semblent s’accommoder de l’ambition présidentielle de désengorger la ville capitale, certains urbanistes pointent quelques inquiétudes
Combien de Sénégalais se souviennent-ils d’Émile Pinet-Laprade ? Combien savent-ils que ce colonel français du génie est officiellement le fondateur de leur capitale ?
Nous sommes en 1858 lorsque cet ancien gouverneur élabore un premier plan cadastral de Dakar, avant de lancer les travaux de construction du phare des Mamelles, puis du port. Dix ans plus tôt, la presqu’île du Cap-Vert n’était encore qu’un coin de brousse parsemé de quelques cases. Les villes importantes du pays étaient alors Saint-Louis, au Nord, qui deviendra la capitale de l’Afrique-Occidentale française (AOF) en 1895, Rufisque, florissante grâce au commerce de l’arachide, et Gorée, confetti insulaire situé au large de Dakar.
De ville nouvelle à mégalopole surpeuplée
Ironie du sort : lorsque les familles mulâtres de Gorée, elles aussi versées dans le commerce de l’arachide, s’y sentirent trop à l’étroit, elles réclamèrent d’aménager Dakar à la façon d’une annexe : une ville nouvelle surgie de la brousse et des dunes. « Dakar est toujours très calme, il est même triste. Peu de maisons, peu d’habitants, peu de commerces et pas d’industrie », écrivait un administrateur colonial en 1878.
Pourtant, l’essor de la presqu’île va rapidement donner le tournis. En 1887, Ndakaru (son nom wolof) n’abrite encore que 8 700 personnes. En 1909, ils sont 25 000. En 1960, les voilà 300 000. Et en 2000, ce qui est devenu entre-temps l’agglomération dakaroise totalise 2,2 millions d’habitants. Ils sont aujourd’hui 3,6 millions.
En une quinzaine de décennies, ce losange de terre exigu, encadré par l’Atlantique, est devenu une mégapole surpeuplée où la boulimie immobilière s’est infiltrée dans la moindre parcelle de terrain disponible et où un afflux ininterrompu de migrants intérieurs aggrave chaque jour le cancer urbain dont Dakar est affligé.
Aujourd’hui, comme par un jeu de poupées russes, c’est donc la presqu’île asphyxiée qui a besoin, à son tour, de se trouver un exutoire. L’ambition est ancienne, mais c’est Macky Sall qui, tout juste élu, a donné en 2014 le premier coup de pioche à ce projet visant à faire surgir de terre, à Diamniadio et au lac Rose, deux pôles urbains destinés à désengorger la capitale. Si le second est encore virtuel, la construction du premier avance à vitesse grand V.
Grand-œuvre consensuel
Une fois n’est pas coutume : dans un pays habitué aux joutes épiques entre l’opposition et la majorité, le grand-œuvre apparaît consensuel. Même si le coût du train express régional (TER) est controversé – 656 milliards de F CFA, soit environ 1 milliard d’euros, pour le premier tronçon de 36 km –, les responsables politiques de tous bords semblent globalement s’accommoder de l’ambition présidentielle.
Dans le milieu des urbanistes, certaines voix pointent toutefois quelques inquiétudes. Les unes s’étonnent de la rentabilité trop faible des investissements à Diamniadio pour les promoteurs privés, craignant que ce constat paralyse une partie des programmes immobiliers au cœur du projet. D’autres déplorent l’installation de ces deux vastes chantiers dans la région de Dakar, au risque de perpétuer l’extrême concentration des infrastructures et de l’activité économique dans cette zone géographique étroite, au détriment du reste du pays.
Mais, surtout, les observateurs s’interrogent sur la recette – présumée magique – qui permettra à Macky Sall d’éviter de reproduire les manquements du passé, lesquels ont suscité à Dakar un chaos urbain, qui, malgré les bonnes intentions affichées, ne cesse de s’amplifier.
Mehdi Ba est rédacteur en chef du site internet de J.A. Anciennement correspondant à Dakar, il continue de couvrir l'actualité sénégalaise et ouest-africaine (Mauritanie, Gambie, Guinée-Bissau, Mali), et plus ponctuellement le Rwanda et le Burundi.
LES TRAVAILLEURS DE LA NSTS PLONGES DANS LE CALVAIRE
Après 15 ans d’arrêt, la visite du Président Macky Sall à la Nouvelle Société Textile du Sénégal (NSTS), lors du Conseil des Ministres décentralisé à Thiès, dans le cadre du processus de relance de l’entreprise, avait suscité de réels espoirs.
Après la relance des activités de la Nouvelle Société Textile du Sénégal (NSTS), des centaines de familles avaient retrouvé le sourire. mais, même si la direction a acquis un matériel de haute technologie, l’usine est encore à l’arrêt, faute de fonds de roulement. Et une telle situation découle, selon les travailleurs qui vivent encore le calvaire, du fait que le contentieux entre la NSTS et l’Etat n’ait pas encore été vidé, pour permettre à l’entreprise d’avoir les fonds nécessaires à une relance définitive.
Après 15 ans d’arrêt, la visite du Président Macky Sall à la Nouvelle Société Textile du Sénégal (NSTS), lors du Conseil des Ministres décentralisé à Thiès, dans le cadre du processus de relance de l’entreprise, avait suscité de réels espoirs. D’ailleurs les promesses du Président Macky Sall s’étaient concrétisées et c’est ainsi que les activités de l’usine avaient bel et bien repris. Mais aujourd’hui, c’est encore le silence dans l’usine, faute de fonds de roulement. Selon les travailleurs, il urge maintenant d’accompagner davantage les efforts de la volonté de la direction, pour aller dans le sens de la pérennisation des acquis.
Selon Lamine Ndiaye, travailleur à la NSTS, avant même d’accéder à la Magistrature Suprême, le Président Macky Sall avait exprimé la volonté de relancer les activités et il l’avait encore clairement exprimée lors de la campagne électorale qui a produit l’alternance. C’est après, dit-il, qu’il a commencé à instruire son gouvernement à tout mettre en œuvre pour la reprise des activités de la NSTS. Et pour atteindre cet objectif, il fallait d’abord vider le contentieux qui existe entre l’Etat du Sénégal et la NSTS. C’est parce que l’Etat avait retiré la NSTS de la location gérance de Kaolack et de Louga alors que des investissements y avaient été faits, dans l’ordre de 10 milliards de F Cfa.
Le dossier est pendant devant la justice, mais les autorités ont demandé à ce qu’une solution à l’amiable soit trouvée. Il ajoute : « Depuis lors, c’est toujours la longue attente. Evidemment, il y a eu des évolutions car le président de la République avait donné des instructions pour que les titres détenus par la Banque Nationale de Développement Economique (BNDE) soient remis à la NSTS, ce qui a été déjà fait. Mais des instructions avaient également été données pour que le contentieux soit vidé, et des experts ont été commis pour procéder effectivement à des évaluations. C’est ainsi que promesse a été donnée de verser cet argent, mais jusqu’à présent, on ne voit rien. Or c’est cet argent qui devrait permettre la réalisation de la seconde phase de l’investissement ». De l’avis de Lamine Ndiaye, ce qui est curieux, c’est qu’il y a un net déphasage entre la volonté clairement exprimée par le président de la République et l’attitude des autorités étatiques et locales.
L’illustration en est donnée à ses yeux, lors du panel organisé à Thiès, par le Groupe d’Informations Républicain (GIR), dans le cadre de la vulgarisation des réalisations du président de la République. Selon lui, une délégation des travailleurs est allée prendre part à ce panel. Il ajoute pour s’en désoler : « Nous avons constaté que les Thiessois n’ont pas répondu à l’appel, malgré la présence de 4 Ministres de la République, de Directeurs généraux, du Maire de la Ville de Thiès. Pis encore, tous les pénalistes ont parlé des réalisations du président de la République dans la région de Thiès, en passant totalement sous silence celles qu’il a faites au niveau de la NSTS.
A cette occasion, Talla Sylla, Maire de Thiès, a magnifié les réalisations du président de la République au niveau de la région, mais sans citer une seule fois la NSTS. Il en est de même pour les Ministres Omar Youm, Augustin Tine, Dame Diop, du député Abdou Mbow, natif de Thiès, qui n’ont jamais parlé de la NSTS, ni dans la ville, ni au niveau de l’Assemblée Nationale ».
Pour Lamine Ndiaye, aujourd’hui, on ne peut pas parler d’industrialisation, de reprise de l’emploi, sans parler du textile qui est l’un des secteurs les plus pourvoyeurs d’emplois. Et la NSTS est une entreprise qui peut démarrer avec 500 emplois et atteindre rapidement le millier dans la seconde phase. Selon lui, il faut que les travailleurs sachent quel est le sort réservé à la NSTS, au moment où les clients convergent de partout, notamment les Guinéens, les Burkinabé, les Togolais et les Manufactures Sénégalaises des Arts Décoratifs (MSAD) qui cherchent à faire passer une commande de 50 millions de Fcfa, depuis 6 mois. « Nous allons nous battre pour que cet investissement soit réalisé afin que Thiès puisse revivre, ce qui est impossible sans le textile », ajoute Lamine Ndiaye.
Pour sa part, Mouhamadou Wone, électricien de l’usine, affirme qu’avec la réhabilitation de la FTT, le Directeur Général Ibrahima Macodou Fall a pu décrocher une nouvelle dotation, avec des machines de dernière génération, notamment la R20, qui est actuellement la machine la plus moderne dans la filature. Selon lui, la NSTS a acquis cette machine moderne en 2015 alors que le Maroc ne l’a eue qu’en 2017. Il renseigne d’ailleurs que la direction, dans son engagement de faire de la NSTS un outil moderne et performant, a acquis une deuxième R20, qui n’est même pas encore montée.
Suffisant pour qu’il affirme que la NSTS est actuellement la filature la plus moderne de l’Afrique et que si aujourd’hui elle avait reçu 2 000 à 3 000 tonnes de coton, elle serait capable de procéder aussitôt à la transformation. Il ajoute : « Notre problème, c’est d’être dans une usine capable de fonctionner, mais qui n’a pas de matière première. Le président de la République a beaucoup fait, mais il ne doit pas s’arrêter en si bon chemin. L’usine est fonctionnelle et il suffit de mettre à disposition un fonds de roulement pour assurer le redémarrage. Le Directeur général a même fait l’impossible pour que l’usine marche et le président de la République doit le soutenir encore, après avoir consenti d’immenses efforts qui ont permis de rouvrir les portes, avec 150 nouveaux travailleurs. »
REFUGIES MAURITANIENS AU SENEGAL, 30 ANS DE VIE CONTRASTEE
Entre 1989 et 1991, un conflit oppose deux pays riverains : le Sénégal et la mauritanie.
Entre 1989 et 1991, un conflit oppose deux pays riverains : le Sénégal et la mauritanie. Cette crise s'est soldéepar la rupture de leurs relations diplomatiques pendant plusieurs années,desmilliersde réfugiésde part et d'autre, sans compter les répercussionsnonnégligeables sur la politique intérieure des deux Etats. Elle a marqué durablementles relations entre les différentes communautés vivant de part et d’autre du fleuve Sénégal. Trente ans après, «L’AS» effectue un billet retour sur le lieu de départ de ces évènements et suit ses ramifications le long des frontières. De Dakar à Nouakchott en passant par Bakel, matam, Podor et Dagana, les réfugiés mauritaniens au Sénégal souffrent au quotidien de cette situation. Les derniers recensements font état de 14.114 réfugiés mauritaniens au Sénégal. Le flou autour de leur statut etlesdifficultésd’accès à des documents administratifs en font une proie facile pourdespoliticiensqui veulent tirerprofitde leur sort. Plusde troisdécennies après ledéclenchementde cette crise,lesblessures peinent à se cicatriser. Enquête réalisée grâce au Fonds d’appui pour le journalisme d’investigation.
«Pourquoi vous vous intéressez à ce sujet ? Cette histoire est derrière nous», nous lance avec légèreté le Préfet de Bakel, Ibrahima Mbaye, assis sur un banc dans le hall du vieux fort de l’époque coloniale abritant la Préfecture; avant d’ajouter que ces gens-là (Ndlr : les réfugiés) n’ont plus aucun problème. «Ils se sont bien intégrés. Cette histoire appartient au passé. Il n’y a rien à enquêter ici. Tout est en ordre. Certains sont retournés chez eux, ceux qui veulent rester sont en train d’être naturalisés sénégalais», précise le représentant de l’Etat. Une manière de nous éconduire subtilement, en ce début de soirée du 23 octobre 2019, parce que ne voulant pas s’épancher sur le sujet. Toutefois, au bout de quelques échanges, le Préfet avoue son exaspération devant le comportement des réfugiés mauritaniens. «Il faut noter qu’ils ne sont pas très coopératifs ; d’ailleurs, les recenser, c’est tout un problème. Si ce n’est pas pour de l’aide ou de l’assistance, il est extrêmement difficile de les rassembler. Même pour leurs documents d’identité, ils ne jugent pas nécessaires de venir les récupérer. Il y a un tas de cartes de réfugiés qui dorment dans nos tiroirs. On leur avait offert l’opportunité de rentrer en Mauritanie, mais ils ne veulent pas. Si cela ne dépendait que d’eux, ils seraient restés là en continuant de bénéficier de l’assistance du Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés (HCR)», vocifère-t-il.
Cette perception du Préfet de Bakel traduit la lassitude des autorités sénégalaises, mauritaniennes ainsi que du HCR devant ce problème qui paraît insoluble. Un accord tripartite signé le 12 novembre 2007 à Nouakchott par les ministres de l’Intérieur du Sénégal et de la Mauritanie, Me Ousmane Ngom et Yall Zakaria Alassane et le représentant du HCR, Didier Laye avait pour but de garantir aux réfugiés leur retour dans leur terroir et leur réinsertion dans la vie économique et sociale sans discrimination. Pour le pays d’origine, la Mauritanie, il incombait, dans la mesure du possible, de réintégrer dans les différentes sphères de la Fonction publique nationale ceux qui y occupaient des emplois réguliers avant leur départ en exil, et l'égale jouissance de tous les droits attachés à la citoyenneté mauritanienne tels qu'ils sont consacrés par le droit mauritanien. De son côté, le Sénégal, pays d’asile, s’était engagé à offrir aux réfugiés qui renonceraient au programme de rapatriement le droit de résidence au Sénégal et une plus large intégration dans la société sénégalaise. Le Gouvernement sénégalais s'était engagé en vertu de sa législation en matière d'état-civil, à émettre les actes d'état-civil et judiciaires auxquels les réfugiés auraient droit. Enfin, le HCR était chargé de rechercher activement des solutions durables en faveur des réfugiés mauritaniens qui n'opteraient pas pour le rapatriement. A cet égard, le HCR devait coopérer étroitement avec le Gouvernement sénégalais, pour fournir l'assistance nécessaire aux réfugiés qui opteraient pour l'accès à la nationalité sénégalaise, en application du code de la nationalité en vigueur au Sénégal.
SENTIMENT D’ABANDON
Mais cet accord tripartite sera un échec. De nombreux réfugiés déplorent le manque de diligence des autorités dans la gestion de leur dossier. D’autres disent être laissés à eux-mêmes sans aide, ni assistance. A vrai dire, depuis le premier rapatriement, le HCR n’apporte plus d’assistance sociale et sanitaire aux réfugiés. Pour s’en rendre compte, cap sur «Samba Yidé» et sur «Samba Niamé», deux camps de réfugiés situés respectivement à 15 et 17 km de Bakel. Dans le premier village qui compte 41 familles de réfugiés, Haby Diallo la doyenne gère les deux jardins que le HCR leur avait octroyés et aménagés en 1989. Soixante dames y travaillent quotidiennement et font du maraîchage toute l’année. Ainsi, les différentes variétés de laitue, le chou, la carotte, le navet, le gombo, la pastèque leur assurent des revenus pour faciliter leur subsistance.
Toutefois, il s’est avéré que la pompe solaire ne marche plus aujourd’hui et les faibles bénéfices issus de cette activité ne permettent pas de la réparer. Assise sous un arbre en face du jardin, elle nous montre la clôture en barbelés de fer qui manque de céder au moindre coup de vent. «Vous voyez! Cette barrière ne peut plus empêcher les chèvres de pénétrer dans le jardin», lâche-t-elle. D’ailleurs, depuis deux ans, les femmes ne cultivent que pendant la saison sèche faute de motopompe. Le puits de 24 mètres de profondeur qui servait à l’arrosage s’assèche de plus en plus. Haby Diallo déplore le fait que depuis l’aménagement de l’espace agricole, le HCR n’y ait plus jamais remis les pieds. A deux kilomètres de là, au bord de la route, se trouve un autre camp de réfugiés avec 86 foyers regroupés dans un petit périmètre. Ils viennent pratiquement tous des régions mauritaniennes d’Assaba ou de Guidimakha d’où ils ont été déportés. Le chef de site, vieux Djigo, se désole que le HCR ne vienne plus à leur rescousse. «Notre école a été construite par le HCR. Aujourd’hui, elle accueille 116 enfants. Mais le mur de l’école s’est effondré depuis un mois. On l’a signalé au HCR qui est resté sourd à notre doléance», regrette-t-il. Ajouté à cela, un réel problème de santé pour les réfugiés qui n’ont pas accès au service sanitaire.
En dehors du poste de santé construit par le HCR à «Samba Yidé», les réfugiés n’ont pas les mêmes opportunités que les Sénégalais quant à l’accès au service sanitaire de base. Encore que dans ce poste de santé, c’est le chef de site Alhousseynou Dia qui y officie en tant qu’aide-soignant alors qu’il n’est pas formé à la base pour ça. La structure sanitaire manque de tout. Elle est sans eau, sans électricité et sans médicaments. Une seule infirmière fait le travail, assistée par Alhousseynou Dia et une matrone. «Dans les sites, il y a de nombreux malades, des AVC, des personnes qui ont vraiment besoin d’être soignées. Il n’y a pas de volet santé pour les réfugiés mauritaniens au niveau du HCR», révèle le coordonnateur des réfugiés de la vallée du fleuve Sénégal de Saint-Louis à Bakel, Thierno Sow.
REFUS DE RECONNAISSANCE DES CARTES DE REFUGIES
A cette galère, s’ajoutent les complications liées au refus de reconnaissance de leurs cartes de réfugiés. Dans une lettre adressée au ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique, la coordination des réfugiés mauritaniens au Sénégal s’est plainte contre les discriminations à la suite de la présentation de leurs cartes d’identité de réfugiés au Sénégal. Et malgré la lettre circulaire (N°004038/MINTSP/DAGAT/DL P) du 26 juin 2015 relative à la reconnaissance de la carte d’identité de refugié, des agents de l’Etat ou du secteur privé leur opposent des droits en refusant de façon systématique la carte de réfugié numérisée qui porte la signature du ministre de l’Intérieur sénégalais. «Le mercredi 25 septembre 2019, un jeune refugié mauritanien s’est présenté dans un commissariat pour légaliser sa carte d’identité de refugié valide jusqu’en 2023. Mais il se voit refuser un tel acte administratif. La police lui demande d’aller à son ambassade ou au Ministère des Affaires étrangères.» Ce que le coordonnateur des réfugiés mauritaniens, Aldiouma Cossokho, qualifie d’aberration, non sans revenir le lendemain pour intercéder et présenter au responsable de la police une copie de la lettre circulaire. Finalement, le commissaire lui a légalisé la copie de la carte d’identité après des remontrances. Au tribunal de grande instance de Pikine, même constat, on lui demande d’aller au tribunal hors classe de Dakar, malgré la présentation de la circulaire. Toutes ces complications et autres formes de discrimination font que le gens passent par des voies dérobées pour obtenir la carte d’identité sénégalaise et les services administratifs et bancaires. Même si ce n’est pas une raison, cela se comprend, selon le coordonnateur des réfugiés de Bakel, Demba Sané, qui estime que même pour recevoir de l’argent à la banque, des fois on leur refuse les cartes de réfugiés.Il estime que c’est souvent ceux quine sont pas vraiment pas conscients de l’illégalité d’un tel acte qui s’y adonnent. «Ils vont chercher la carte d’identité, profitant des audiences foraines. Mais ils ne savent pas que ces cartes ne suffisent pas pour acquérir la nationalité sénégalaise. Détenir une carte d’identité sénégalaise ne signifie pas être Sénégalais. Nous, ce qu’on veut, c’estla nationalité», explique Demba Sané.
LES REFUGIES PROIES FACILES DES POLITICIENS
Le fait de recourir illégalement à ces cartes d’identité nationale sénégalaise est un fait connu dans le milieu des réfugiés. Et souvent, ce sont les politiciens qui sont derrière cette fraude de documents d’identité. Ils profitent de leur vulnérabilité pour leur faciliter l’accès à une pièce d’identité en échange de leur vote lors d’élections. Le chef de site des réfugiés de Podor et non moins coordonnateur des réfugiés de la vallée de Bakel à Saint-Louis de dire qu’avec les politiciens, tout est possible. «Vous savez comment ça se passe. Ils vont faire des cartes aux gens pour les faire voter un peu partout», reconnaît il. Et aujourd’hui, cela a rattrapé beaucoup de réfugiés qui se plaignent de ne pas bénéficier des nouvelles cartes de réfugié. Il se trouve que les machines rejetaient systématiquement leur demande de carte de réfugié parce que tout simplement, elle a enregistré leurs empreintes pour les cartes d’identité nationale sénégalaise. «C’est la même machine qui confectionne les cartes d’identité sénégalaise et les cartes de réfugiés.» Mais pour régler cette question, une solution a été trouvée en accord avec les services du ministère de l’Intérieur. A en croire Thierno Sow, si un réfugié vient pour chercher une carte de réfugié, on écrase sa carte d’identité sénégalaise. A Ranéré, village situé dans la commune de Ndioum, vit Ibrahima Diallo, ancien soldat mauritanien, deuxième classe, avec ses deux femmes et ses dix enfants. Sur la question de la fraude sur le document d’identité, il révèle : «Il y a beaucoup de réfugiés qui ont une carte d’identité sénégalaise. Cette carte me permet de bien faire mon busines surtout dans mon rapport avec les institutions financières ; mais aussi de subir moins de tracasserie lors de mes déplacements.» Poursuivant, il brandit sa carte d’identité confectionné le 20/04/2017 au centre d’enregistrement de Podor avec comme lieu de naissance Ndioum. « Les politiciens viennent nous faire des cartes à la veille d’élections pour qu’on puisse voter pour eux. Ils savent qu’il y a plus de 4.000 réfugiés mauritaniens à Podor, et ils vont faire tout pour ne pas perdre ce potentiel électoral en passant par des canaux officieux», explique-t-il.
Selon lui, les politiciens et les services du ministère de l’Intérieur connaissent tous les contours de cette affaire. «D’Abdou Diouf à Macky Sall en passant par Abdoulaye Wade, tous les régimes qui sont passés se sont adonnés à cette mauvaise pratique ici au niveau de la vallée. Que ce soit sous Bocar Seck, Cheikh Oumar Hanne ou Kane Diallo.» A treize kilomètres de Sinthiou Bamambe, à Banghassi Djeghessi, Daouda Touré vit dans un hameau avec sa famille. Cet ancien militaire de l’armée mauritanienne, radié après la tentative de coupd’Etatde1987etdéporté en 1989, essaye de reconstruire une seconde vie. Il cultive sur un espace de 600 mètres carrés alloué par le chef du village divers produits : maïs, souna, niébé, pastèque, qu’il vend dans les «louma» (marchés hebdomadaires) des localités environnantes, notamment à Kanel et à Orkadiéré. Le sieur Touré s’est bien intégré et loue l’hospitalité sénégalaise. Lui aussi fait partie du lot des réfugiés qui, du fait de leur carte d’identité sénégalaise, ne peut pas avoir de carte de réfugié. A travers les audiences foraines, avec l’aide du chef de village de sa localité, il a pu s’inscrire et avoir une carte d’identité sénégalaise. A Diawara, dans le département de Bakel, c’est l’adjoint au maire Souleymane Bomou même qui avoue que dans leur politique de gestion des réfugiés, ils ont pu régulariser certaines familles de réfugiés à travers les audiences foraines.
LENTEURS DANS LA NATURALISATION
Le coordonnateur des réfugiés de Bakel, Demba Sané, estime qu’il y a un réel problème de documentation en ce qui concerne d’abord les cartes de réfugiés qui ne sont pas renouvelées pour beaucoup d’entre eux. «De 1989 à 2010, les réfugiés n’ont jamais obtenu de cartes de réfugiés. Ils circulaient avec des récépissés de dépôt pour une demande de carte d’identité de réfugié renouvelables chaque année à compter de la date de signature. C’est finalement en 2010 que les premières cartes ont été produites. Mais là aussi, la production au niveau de la DAF a pris énormément de temps. Certains sont restés deux ans après le dépôt pour avoir leur carte de réfugié. Et d’ailleurs, Monsieur Sané explique que ces cartes ne règlent pas définitivement le problème. En effet, déclare-t-il, les gens qui ne veulent plus retourner en Mauritanie comme lui doivent être naturalisés sénégalais. «J’ai déposé la demande de nationalité depuis 2017 et jusqu’à présent, les choses n’évoluent pas. Personnellement, je me dis que la volonté n’est pas là. Ce qui se dit dans les ateliers et autres réunions, les gens peinent à l’appliquer. Cela ne devrait pas traîner autant.» Puis il se rebiffe, l’amertume enveloppant son visage : «On a trop négligé les réfugiés mauritaniens. 30 ans, c’est trop ! Il y a des réfugiés qui, jusqu’au jour d’aujourd’hui, n’ont pour unique papier que des récépissés de dépôt qui ont expiré depuis belle lurette. Cela me fait mal qu’on fasse courir les réfugiés. C’est anormal. Pour moi, ce sont des choses que le HCR doit pouvoir régler rapidement même si ce n’est pas du tac au tac. Je suis en contact direct avec les gens de l’état-major particulier. On ne se sent pas à l’abandon, mais on sent une lenteur. C’est trop lent.» Pour les passeports, Monsieur Sané indique ne pas comprendre qu’il faille impérativement un hébergement ou une invitation pour pouvoir chercher un passeport de réfugié.
POUR REGLER DEFINITIVEMENT LA SITUATION DES REFUGIES : L’etat du Sénégal et le Hcr tablent sur une mobilisation de deux millions de dollars
Dans un rapport publié le 11 janvier 2019, le Comité National chargé de la gestion des Réfugiés, des Rapatriés et des Personnes Déplacées (CNRRPD) et le Haut-commissariat des réfugiés ont effectué un diagnostic de la situation avant de dresser une stratégie pluriannuelle multipartenaires. Il apparaît dans l’analyse de la situation que le cadre législatif présente quelques failles qu’il conviendrait de corriger. Aussi, il y a une absence de documentation requise pour accéder à l’intégration locale. Et la stratégie pluriannuelle 2019-2021 a pour objectif de remédier à tout ça par le renforcement du processus de détermination du statut de réfugié, et le renforcement du mécanisme (DAF et CNRRPD) de détention des documents. Aussi, la facilitation du rapatriement volontaire individuel dans la dignité et la sécurité ; l’aide à la réinstallation des réfugiés ayant besoin de protection spécifique (milieu urbain et rural) ; et la facilitation de l’acquisition de la nationalité. Tout ça pour un budget total de 1 966 287,82 USD. Et dans la matérialisation de ces solutions durables, le coordonnateur des réfugiés de la vallée, de Saint-Louis à Bakel, nous fait le point. «250 réfugiés mauritaniens veulent le rapatriement. Juste que pour cet aspect, la Mauritanie complique la tâche en exigeant que toutes les demandes soient formulées par le HCR au niveau des ambassades de Mauritanie aux Etats Unis ou au Qatar. Et pourtant, la Mauritanie a une ambassade à Dakar.
Pour l’intégration locale, c’est-à-dire la naturalisation, ceux qui sont pour cette option sont répartis ainsi qu’il suit : Saint-Louis 51 ; Podor 5152 ; Dagana 999 ; Kanel 3818 ; Matam 1906 ; Bakel 1332 ; Dakar 41 ; Mbour 4 ; Pikine 86 ; Guédiawaye 12 ; Thiès 7 ; Rufisque 23. Enfin, il y a ceux qui optent pour la carte de séjour : Podor 136 ; Dagana 25 ; Kanel 29 ; Matam 4 ; Bakel 2 ; Dakar 47 ; Rufisque 14 ; Thiès 10 ; Pikine 125 ; Guédiawaye 41.» Revenant sur la naturalisation, le processus a démarré et sur les 50 premiers introduits pour la phase test, seules 5 personnes ont pu avoir à ce jour leur nationalité sénégalaise. A en croire Thierno Sow, cette lenteur se justifie par le fait que beaucoup de services de l’Etat y interviennent. Sans compter le fait que c’est coûteux. Selon Monsieur Sow, dans ce processus, chaque réfugié coûte 100.000 francs CFA. «Il y a environ 9 500 cas de naturalisation. Le Sénégal à lui seul ne peut pas gérer ça. Il faut que les bailleurs de fonds s’y impliquent. D’ailleurs, ils disent être prêts à financer.»
Selon Monsieur Sow, ceux qui ne seront pas pris en compte à l’issue de ce processus des solutions durables en 2021 risquent d’être des apatrides. En définitive, il faut dire que les réfugiés, toutes nationalités confondues, sont au nombre de 14.349 dont 7.519 hommes et 6.830 femmes. Et ceux venant de la Mauritanie sont au nombre de 14.114 si l’on s’en tient au dernier recensement de 2018. Ces derniers sont éparpillés dans la vallée du fleuve Sénégal et à l’intérieur du pays. Qu’ils soient des réfugiés urbains comme ruraux, ils sont répartis comme suit : 5.408 réfugiés dans le département de Podor ; 1.335 à Bakel ; 98 à Dakar ; 219 à Pikine ; 60 à Guédiawaye, 4 à Mbour ; 47 à Rufisque ; 31 à Thiès, 51 à Saint-Louis ; 1 050 à Dagana ; 3 838 à Kanel et 1 953 à Matam. A préciser que dans la réalisation de cette production, les services du Comité National chargé de la gestion des Réfugiés, des Rapatriés et des Personnes Déplacées (CNRRPD) et du Haut commissariat des réfugiés ont été approchés sans que ces derniers ne daignent répondre à certaines de nos interpellations. Après être passé par les canaux officiels, nous avons attendu en vain leur réponse.
DÉCÈS DE SEYDINA ISSA KANE,
L’ancien Directeur général de la Senelec, sous le règne du président Wade, Seydina Issa Kane, est décédé, ce mardi, 10 décembre, un peu après 18h.
L’ancien Directeur général de la Senelec, sous le règne du président Wade, Seydina Issa Kane, est décédé, ce mardi, 10 décembre, un peu après 18h. Le défunt, qui dirigeait jusqu’ici le groupement central de l’organisation de l’Appel de Seydina Limamou Laye, à été dominé par une longue maladie.
Seydina Issa Kane, "Seydi Kane", pour les intimes, a été Ministre-Conseiller du Président Macky Sall, chargé des questions énergétiques. Son enterrement est prévu, ce mercredi à 15 heures, au cimetière de Cambérène.
CENTRALE À CHARBON DE BARGNY, UNE VICTOIRE QUI APPELLE UN AUTRE COMBAT
Comme annoncé il y a dix jours par Pape Mademba Bitèye, Directeur général de la SENELEC, face au Jury du Dimanche, le Sénégal ferme définitivement la page de la centrale à charbon de Bargny
Comme annoncé il y a dix jours par Pape Mademba Bitèye, Directeur général de la SENELEC, face au Jury du Dimanche, le Sénégal ferme définitivement la page de la centrale à charbon de Bargny ! L’annonce a été officialisée par le président de la République, Macky Sall, qui explique l’annulation du projet très controversé par la volonté de respecter les engagements du pays dans le cadre de l’Accord de Paris. Le Sénégal suit ainsi la voie tracée par le Kenya dont le Tribunal National de l’Environnement (NET) avait déjà annulé la licence accordée à AMU Power pour un autre projet similaire.
Il reste désormais à voir la solution transitoire qui sera adoptée par le Sénégal. Pour Mamadou Barry, Directeur exécutif de Action Solidaire International et combattant acharné contre l’installation de la centrale, il faut encore maintenir la pression sur les gouvernants et éviter le glissement vers un centrale à gaz... sur les cendre du projet abandonné. « Nous nous opposerons également à cette installation gazière car elle est susceptible d’avoir les mêmes effets néfastes sur le bien-être des habitants de Bargny, Sendou et Rufisque », insiste Barry.
C’est une deuxième grande victoire des populations locales qui ont toujours exprimé leur désaccord envers le projet d’installation de la centrale à charbon, après la prise de position manifeste du khalife général des Tidianes, Serigne Babacar Sy Mansour, en leur faveur, à l’occasion du précédent Gamou.
C’est aussi la victoire de plusieurs activistes qui pendant plus de cinq ans, ont fait sien ce combat contre l’installation de la centrale à charbon de Bargny, en pointant du doigt les énormes dégâts sur le plan écologique et sur la santé des populations que ce projet aurait impliqués.
De même, la Banque africaine de Développement a affirmé, il y a trois mois, qu’elle ne financerait plus un projet de centrale à charbon dans le continent, confirmant que l’Afrique s’engageait encore plus à tourner le dos aux combustibles fossiles.