SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
27 juillet 2025
FATOU SOW, DÉFRICHEUSE DU FÉMINISME AFRICAIN
A 79 ans, la sociologue sénégalaise n’a rien perdu de la fougue qui l’a toujours animée et dénonce plus que jamais les conservatismes culturels et les fondamentalismes religieux qui menacent les droits des femmes
Le Monde |
Séverine Kodjograndvaux |
Publication 30/11/2019
Fatou Sow est l’une de ces femmes de tête dont l’élégance altière et la grandeur de caractère compensent une taille qu’elle dit volontiers « petite ». La voix douce et le visage serein dissimulent mal une détermination que l’on devine sans faille. Et l’on peut imaginer sans peine que cette Sénégalaise de 79 ans n’a guère manqué de courage sa vie durant : elle a dû être animée d’une volonté de fer pour parvenir à s’imposer comme une sociologue féministe dans le milieu très masculin de la recherche. Fatou Sow est une pionnière.
Née en 1940 à Dakar dans une famille de lettrés originaire de Saint-Louis, elle est l’une des 2 femmes parmi 300 étudiants à entrer à l’université lorsque son pays devient indépendant, en 1960. Elle sera, se sou vientelle, « la seule femme membre du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique [Codesria] dès sa création en 1973» – elle y créera d’ailleurs le premier institut sur le genre, en 1994. « Elle a mené un combat d’envergure, salue, admiratif, l’historien Mamadou Diouf, directeur de l’Institut d’études africaines de l’université Columbia, à New York, et ancien direc teur du Conseil. Elle a produit une architecture conceptuelle africaine dans une problématique globale, et elle a été la première à rassembler les approches anglophone et francophone pour une étude féministe africaine. »
De la ruse, il en a fallu à Fatou Sow pour s’imposer. Après des études en France et aux Etats-Unis, où elle a dé couvert les women studies, celle qui a fait sa carrière au CNRS et à l’Institut fondamental d’Afrique noire, à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, a non seulement introduit les études féministes au Sénégal, mais elle a eu aussi, précise Mamadou Diouf, « une extraordinaire influence ces vingt dernières années sur les sciences sociales en Afrique ». Fatou Sow se souvient «En 1988, j’ai proposé à l’université un cours d’“études des femmes” car je sa vais que, si je l’appelais “féministe”, il serait rejeté. Peu avant, Awa Thiam, qui avait publié son livre La Parole aux Négresses, en 1979, avait proposé un enseignement d’“anthropologie des sexes” », dont l’intitulé avait choqué. Bien évidemment, il avait été refusé.»
Comme Awa Thiam, elle a ouvert tout un champ de recherches qui ne sera reconnu qu’au milieu des an nées 2000, avec la création du Laboratoire de recherche sur le genre et la science, dirigé par son homonyme Fatou Sow Sarr. «Ce qui m’a toujours importé, explique-t-elle, c’était de mener une critique féministe des sciences sociales en Afrique. Nous, les chercheu ses africaines, avons très tôt remis en question l’universalisme prétendu des féministes françaises ou américaines, avec lesquelles nous avons rompu, car elles étaient coloniales : elles étaient le produit de leur histoire, qu’elles n’avaient pas déconstruite. Elles parlaient du patriarcat, mais elles n’ont ja mais considéré la colonisation comme un vecteur d’inégalités. Or, la colonisation a eu des répercussions terrible ment négatives sur les droits des femmes et leur statut. Vouloir décoloniser le féminisme n’est pas nouveau!»
Une idée que reprend l’historienne et politologue Françoise Vergès, auteure de l’ouvrage Un féminisme décolonial (La Fabrique, 208 pages 12 euros). « Fatou Sow est extrêmement importante pour le féminisme africain et la recherche féministe en général, car elle a questionné l’universalisme abstrait du féminisme occidental. Elle a écrit sur les femmes musulmanes en Afrique de l’Ouest d’un point de vue féministe du Sud global. Elle est absolument à redécouvrir, surtout dans cette période de rivalité universitaire, où chacun et chacune veut être la première à... Elle est repré sentative de toute une génération féministe postindépendance qui aborde les questions du développement, des femmes, du genre, des sexualités, de la religion, mais dont les approches semblent “dépassées”. Cependant, ces féministes ont tou jours à nous apprendre. »
Paradoxalement, la chercheuse sénégalaise est relativement critique visàvis du féminisme décolonial, apparu il y a peu dans le paysage français. « Ce féminisme là nous a seulement permis de nous poser comme femmes racisées – terme que je déteste ! Or, en Afrique, moi, je ne relève pas d’une minorité visible. L’afroféminisme ou le “black feminism” ne sont valables que pour l’Occident, pas pour l’Afrique. En fait, ce discours féministe décolonial actuel a du pouvoir parce qu’il vient d’Occident. On l’écoute davantage qu’on ne prête attention à ce que disent et pen sent les féministes africaines. »
Autre point de désaccord : la question du voile. Alors que la militante Rokhaya Diallo défend la possibilité d’un féminisme voilé, Fatou Sow, musulmane et coordinatrice du réseau « Femmes sous lois musulma nes pour l’Afrique de l’Ouest», ne mâche pas ses mots. «Il n’y a pas de choix à porter le voile. C’est faux ! Le voile, c’est l’enfermement des femmes. Certaines féministes décoloniales en France en font aujourd’hui un symbole de résistance et de résilience des femmes, mais, en Egypte, dans les années 19201930, les femmes qui lut taient pour leur autonomie se sont battues contre le voile. La question est de savoir si j’ai besoin d’une identité musulmane et, si tant est que je la prenne, est-ce que c’est le voile qui va faire mon identité musulmane ? »
Première personnalité d’Afrique invitée à donner la conférence annuelle de l’Institut historique allemand (Paris), Fatou Sow refuse d’évoquer la question du genre et des fondamentalismes en Afrique. Une évidence pour Mamadou Diouf, qui lui reconnaît « le courage de dire ce que beaucoup n’osent aborder ». « Fatou Sow n’a pas peur de partir à l’assaut des citadelles religieuses et des citadelles patriarcales fondées sur les traditions africaines. »
La laïcité, une condition sine qua non
La sociologue constate, en effet, que les Africaines doivent faire face à différents fondamentalismes religieux (islamique ou chrétiens, notamment catholique et protestant) mais aussi culturels, qui entendent gérer et les corps et les âmes des femmes. «La manière de pratiquer l’islam en Afrique a changé. On assiste à une réarabisation de l’islam et à une réreligionisation, si je puis m’exprimer ainsi, de la culture sous l’influence des monarchies arabes et de leurs pétrodollars », dénonce celle pour qui la laïcité est une condition sine qua non du droit des femmes. Fatou Sow s’inscrit en faux contre le féminisme islamique qui, selon elle, «va chercher dans un texte vieux de quatorze siècles des manières de libérer les femmes aujourd’hui».
«En fait, le féminisme islamique a été créé par des femmes qui vivent dans un système où l’islam est une religion d’Etat et où, si elles veulent se battre, elles ne peuvent le faire qu’à l’intérieur du Coran, comme en Iran ou en Arabie saoudite. C’est une stratégie. »
Fatou Sow se démarque également de certaines sociologues africaines qui, comme la Nigériane Oyeronke Oyewumi, récusent la différence homme/femme, qui serait occidentale et ne correspondrait pas aux catégories sociales opérantes en Afrique. Elle ne croit pas non plus, comme la juriste sénégalaise Fatou Kiné Camara ou l’écrivaine et chercheuse Catherine Acholonu, que la maternité et le matriarcat peuvent être les bases d’un pouvoir féminin africain. « Le matriarcat n’est pas le pouvoir aux femmes. Ce système dit juste qu’à travers notre fonction utérine nous transmettons le pouvoir et les biens aux hommes, insiste-t-elle. On entend souvent dire en Afrique que le féminisme est une importation occidentale et ne vient pas de nos traditions africaines. Mais je n’en veux pas, de ces valeurs traditionnelles, si elles me réduisent à ma fonction utérine ! Je veux des valeurs africaines que l’on repense pour que nous ayons un projet de société qui nous inclut afin que nous puissions participer au politique, mais en le transformant. Il ne s’agit pas d’être une femme politique comme un homme politique. »
par Samuel Gontier
ET SOUDAIN, LES CHAÎNES D'INFO DÉCOUVRIRENT L'EXISTENCE D'UN PAYS NOMMÉ MALI
Pour que BFMTV et ses concurrentes daignent parler de pays comme Haïti ou le Mali, il faut que des Français y meurent. Alors, elles ouvrent grand leurs plateaux à des géopolitologues d’opérette et à des spécialistes en hélicologie
Telerama |
Samuel Gontier |
Publication 30/11/2019
« Les grands titres de l’actualité ce soir,annonce Bruce Toussaint lundi dernier. Avec ce couple de Français tué par balles à Port-au-Prince, en Haïti. Ils étaient sur place pour adopter un enfant. On a assez peu d’informations sur le déroulement de ce drame. » Ah bon ? BFMTV n’a pas de correspondant sur place ? N’a pas dépêché d’envoyé spécial ? A défaut, fions-nous à l’expertise d’un « éditorialiste relations internationales », Patrick Sauce : « C’est une histoire absolument terrible pour cette famille et pour le petit village de Saint-Martin d’Ardèche. » Parce qu’en Haïti, tout va bien… Quoique : « Le couple avait atterri à Port-au-Prince et on connaît tous le chaos politique qui y règne. » Comment ça, « on connaît tous » ? Ce « on » ne doit pas regarder BFMTV. Car, depuis plus d’un an qu’Haïti s’enfonce dans la crise, je n’ai pas souvenir d’en avoir entendu parler sur la chaîne info.
Le spécialiste des relations internationales appuie son analyse sur une seule source, l’Agence française de l’adoption.« Il faut savoir qu’il y a peu près 14 000 couples en France qui attendent de pouvoir adopter et ça devient de plus en plus difficile. On parle d’Haïti mais il y a deux autres pays qui sont très concernés par la filière d’adoption entre l’étranger et la France, c’est le Mali, on connaît la situation au Mali… »Encore un « on » qui ne regarde pas BFMTV, où la « situation au Mali » n’est évoquée que pour vanter l’efficacité et la bravoure de nos soldats lors de reportages embedded avec l’armée. « … Et le Burkina Faso qui commence à être sacrément gangréné par la violence. » Première nouvelle. En résumé, la vie de 28 000 Français est en danger à cause de la mystérieuse « violence » qui gangrène des pays sans intérêt, le sort de leurs habitants nous étant parfaitement indifférent.
« Il faut rappeler ce qui se passe en Haïti, insiste toutefois Bruce Toussaint. Le pays est secoué par des violences, des troubles… » « Il n’y a plus d’État, le président est aux abonnés absents. » Hum… Jovenel Moïse n’est pas vraiment aux abonnés absents, au contraire, il s’accroche au pouvoir avec le soutien des Etats-Unis. Il évite simplement d’apparaître en public pour s’épargner d’être lynché par une population révoltée… Si « on » souhaite connaître « la situation » en Haïti, « on » lira plutôt cet article très complet de France 24 (gratuit) ou le récent reportage de Mediapart (payant). Ou « on » souhaitera que des Français meurent plus souvent dans ce pays… ainsi qu’au Mali.
Le lendemain matin, parmi les « titres de l’actualité » figure en bonne place l’ouverture de la campagne d’hiver des Restos du cœur. A 9h48, le présentateur Thomas Misrachi congédie Patrice Blanc, le président de l’association. « Merci d’avoir répondu en direct à nos questions sur BFMTV… C’est une information qui vient de nous parvenir et c’est l’information de la matinée. » Et même de la journée.
« Treize militaires français de la force Barkhane ont trouvé la mort au Mali dans une collision entre deux hélicoptères, révèle Thomas Misrachi. Annonce de l’Elysée il y a quelques instants à peine. » A peine quelques instants, ça se compte en millièmes de seconde. « On va revenir évidemment en détail sur ces informations qui viennent de nous parvenir. » Même si nous n’avons aucun détail à vous fournir. « Anne Saurat-Dubois, que sait-on précisément ? » Précisément rien. « Et, encore une fois, cette information vient de nous parvenir. » C’est ce que l’on sait le plus précisément. La journaliste s’applique donc à lire le communiqué de l’Elysée.
Thomas Misrachi rappelle le contexte : « L’armée française est très active au Mali et notamment dans le Nord du pays, à la frontière algérienne, aux alentours de Tessalit. » Raté. Le présentateur a dû rester coincé en 2013. Depuis, les groupes djihadistes se sont étendus jusque dans le Sud du pays et même au Burkina Faso. « On découvre cette information avec vous. » On n’en sait pas plus que vous mais « tout ce que l’on sait, on va vous le dire dans les minutes qui viennent ». Promis, on vous dira tout ce qu’on ne sait pas. En attendant, on va meubler.
« C’est une nouvelle terrible, treize militaires français n’ont jamais été tués en même temps dans cette région. » La prochaine fois, merci de les occire un par un, ce sera moins terrible. « On va revenir sur ce que dit précisément le chef de l’État. » C’est-à-dire relire précisément le communiqué de l’Elysée. « On vous redit que le mode de communication n’est pas anodin, redit la journaliste, c’est annoncé directement par le palais de l’Elysée. » Ça vaut le coup de le re-redire : « Encore une fois, c’est directement par le palais de l’Elysée qu’on a appris cette nouvelle il y a quelques minutes. » A peine. Tiens, et si on le re-re-redisait ? « Le président de la République qui annonce donc personnellement et directement la mort de treize militaires. » Depuis le palais de l’Elysée, si j’ai bien suivi. « Et puis cette émotion qui transparaît dans ce communiqué. » Pour l’instant, c’est tout ce que l’on sait précisément.
Thomas Misrachi répète : « Que s’est-il passé précisément ? » Nous n’en savons toujours rien mais voici « les toutes dernières informations. Treize militaires ont trouvé la mort dans un accident d’hélicoptère ». Ces toutes dernières ressemblent aux toutes premières informations. « C’est l’Elysée en personne, Emmanuel Macron, qui via un communiqué, a annoncé cette terrible nouvelle. » Rappelons que ce mode de communication n’est pas anodin. Enfin, après un quart d’heure de remplissage, un expert vient au secours des journalistes. « Bonjour général Dominique Trinquand, votre première réaction sur BFMTV à ce drame. Qu’est-ce qui peut provoquer une telle collision ? » L’ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU formule quelques hypothèses avant de conclure : « Je n’ai pas les détails précis, ce que je vous dis, ce sont des généralités. » Tant qu’elles permettent d’occuper l’antenne…
« Sait-on quel type d’hélicoptères sont utilisés ? », demande Thomas Misrachi. Voilà une excellente question d’actualité qui va permettre de meubler. Au point que, l’après-midi, Pierre Kupferman y consacre sa chronique éco. « Pierre, avec vous, on va parler de deux hélicoptères de l’armée de terre qui sont impliqués dans cette fameuse collision. » « Ils sont très différents. Le Tigre est produit par Airbus et destiné au combat. La flotte de l’armée de terre comprenait en juillet dernier soixante-six hélicoptères Tigre. » Il en reste donc soixante-cinq.« Ce sont des appareils assez coûteux. Le coût estimé d’un Tigre, c’est entre 28 et 36 millions d’euros. » Ce n’est pas donné.
« Le deuxième hélicoptère, le Cougar, est beaucoup plus ancien. L’armée de terre en possédait vingt-trois en juillet 2019. » A 20 millions d’euros pièce. Ce terrible drame va donc coûter une bonne cinquantaine de millions d’euros aux contribuables. « C’est évidemment un hasard mais Airbus a annoncé hier avoir signé avec l’armée un contrat de maintenance de ces Cougar. » « Nos hélicoptères sont mal entretenus ? » « On ne sait pas ce qui est à l’origine de la collision. » Mais n’écartons pas l’hypothèse d’un défaut de maintenance. « Ce qui est certain, c’est que l’armée ne dispose pas de moyens financiers suffisants pour avoir à sa disposition tous ses hélicoptères. A elle seule, la maintenance des Tigre coûte 90 millions par an. » A ce prix-là, j’espère que celui qui s’est crashé était bien assuré. « Et vous avez seulement un hélicoptère sur trois qui peut être utilisé. »Scandaleux. Il faudrait ouvrir une cagnotte en ligne pour assurer la maintenance de nos hélicoptères de combat.
Sur CNews, Jean-Claude Dassier interroge Christian Prouteau, fondateur du GIGN, ce qui en fait un spécialiste en Sahel et en hélicologie : « Y a pas de dispositif anti-collision ? » Même pas d’airbags ? « Non, parce que quand on fait du pilotage en zone sensible, l’anti-collision vous fait repérer. » « Oui, bien sûr. » Evidemment. C’est pourquoi les Tigre sont aussi dépourvus de klaxon.
Revoici le général à la retraite, Dominique Trinquand : « Dans toute cette région d'Afrique, tout le monde attend que la France intervienne. » Laurence Ferrari appuie : « C’est ça le problème, tout le monde attend que la France intervienne. » Sur CNews. Car, sur place, l’opération Barkhane est sévèrement critiquée par les populations. Début novembre avait lieu à Bamako une manifestation dont le mot d’ordre était « A bas la France ! », avec des slogans comme « Stop au génocide de la France au Mali », « La France, un Etat terroriste ». Et ce n’était pas la première : en 2017 déjà, à Kidal, les manifestants scandaient « Barkhane, dégage ! »Plusieurs fois, des drapeaux français furent brûlés, sans que cela n’émeuve les chaînes info, pourtant promptes à diffuser la combustion de drapeaux américains à Téhéran ou à Gaza. CNews et ses concurrentes étaient absorbés par des sujets bien plus préoccupants comme le voile, les casseurs, l’islam, les inondations, les black blocs, le voile, l’islam, le grand débat, les casseurs, le voile, l’islam…
L’historien Jean Garrigues offre le recul du temps long : « La France n’est pas une puissance comme les autres en Afrique, surtout en Afrique occidentale. Elle a une histoire politique et symbolique. C’est une puissance qui a toujours porté un certain nombre de valeurs et d’idéaux. » De valeurs colonialistes, d’idéaux impérialistes.
Jean-Claude Dassier livre son analyse : « Si j’ai bien compris, on est là-bas pour bloquer les djihadistes pour leur éviter de passer la Méditerranée et s’égayer n’importe où et faire des attentats. » N’y voyez pas une vision simpliste, elle est partagée par les spécialistes de toutes les chaînes. Ainsi de l’expert géopolitique de CNews, Harold Hyman : « L’Afghanistan et le Sahel sont très semblables. Si on n’y reste pas, on aura plus de terrorisme en Europe. »
Après avoir sévi sur BFMTV et CNews, voici le général Trinquand sur LCI. Et revoici la région du Liptako, où a eu lieu l’accident d’hélicoptère, figurée par un inquiétant disque rouge de quelques centaines de kimomètres de diamètre. Vincent Hervouët déplore : « L’ensemble du Mali désormais est contaminé. » Etonnant. Cela fait six ans que toutes les télés vantent à longueur de reportages embarqués avec l’armée la bravoure de nos soldats et l’efficacité de l’opération Barkhane. D’ailleurs, si la force des Nations Unies au Mali (la Minusma) avait connu pas loin de deux cents morts, si les Forces armées du Mali avaient subi des attaques causant des dizaines de victimes (voir ici ou là ou là), on vous en aurait parlé sur les chaînes info.
« Vincent, votre parti pris », propose David Pujadas peu après. Il est intitulé « L’Afrique aux Africains ». L’éditorialiste déplore l’hécatombe dont sont victimes les soldats français dans des pays dont la France n’a rien à faire. « Il y a eu plus de deux cent vingt morts dans les opérations extérieures depuis le début de la Ve République. La plupart étaient en Afrique et, à chaque fois, il y avait une bonne raison de mourir sur place. » Ah bon, lesquelles ? « Ils ne sont jamais morts pour rien. » C’est rassurant. Vincent Hervouët aurait fait merveille pendant la Grande Guerre : « Gloire et honneur aux soldats qui ont fait le sacrifice de leur vie, qui est le sacrifice suprême et qui est une belle mort. » Mourir à 20 ans dans un accident d’hélicoptère, en voilà une belle mort.
« La France a dit en 1990 qu’elle n’était plus le gendarme de l’Afrique, rappelle Vincent Hervouët. Si l’armée intervient autant en Afrique, c’est parce que les armées locales sont incapables de le faire par elles-mêmes. A quelques exceptions près, les armées de l’Afrique de l’Ouest sont des armées de parade mal formées qui rackettent les populations. Les exceptions : la Mauritanie ou le Tchad, où vous avez des présidents qui sont à la tête d’ethnies batailleuses et ardentes au combat. » Vive les ethnies batailleuses ! Et leurs chefs ardents au combat qui imposent de saines dictatures (Idriss Déby dirige le Tchad depuis bientôt trente ans ; en Mauritanie, Mohamed Oul Abdel Aziz, parvenu au pouvoir par un coup d’État, a récemment fait élire son dauphin en excluant les observateurs internationaux).
« Il faut former les armées africaines, prône Vincent Hervouët. Au risque d’ailleurs, les élites politiques n’étant pas à la hauteur, que ces armées que l’on forgera, ces militaires, soient tentés de régenter le pays. Mais il faut des armées de qualité. » Pour assurer la stabilité de la région, rien ne vaut des dictatures sanguinaires et corrompues… qui renforceront l’attrait des groupes djihadistes auprès des populations réprimées et délaissées.
Pendant ce temps, BFMTV fait confiance à l’expertise de Michèle Alliot-Marie, illustrée par les très belles images de propagande de l’ECPAD : « La France est trop facilement accusée de néo-colonialisme quand elle intervient dans un pays africain. » C’est vraiment trop facile. Trop facile aussi, avec des invités de cette qualité, de remplir l’antenne toute entière dédiée au « drame » du Mali de 9h48 à minuit. Il semble que BFMTV ait fait sien le précepte de Fox News : une seule info par jour. Pour ne pas surcharger le cerveau du téléspectateur. Résultat, des heures de suppositions et de déblatérations en plateau. Comme disait Marc-Olivier Fogiel aux Echos dans un entretien originellement titré « La première mission de BFMTV, c’est le news, pas le commentaire » : « La singularité de BFMTV, c’est vraiment le news. Cela n’est pas si simple car cela a un coût de fabriquer de l’information, de multiplier les reportages sur le terrain ». En Haïti, au Mali, etc. Et d’ajouter : « Les concurrentes se focalisent plus sur des débats avec des invités en plateau. » Ça n’arriverait pas sur BFMTV.
Sur le plateau de BFMTV comme sur tous les autres, on se désole du manque d’implication de l’Union européenne aux côtés de la France. Alain Duhamel fournit une explication : « La différence entre la France et les autres pays, c’est que la France a un système présidentiel et que le président peut engager des forces. En Allemagne, il faut qu’une commission vote, que le Bundestag soit d’accord. » Maudite démocratie parlementaire.
par Joël Té-Léssia Assoko
L'ÉMERGENCE POUR UNE POIGNÉE DE DOLLARS
La récente controverse sur l’appartenance – ou non – du Sénégal à la catégorie des pays pauvres ou à celle des « pays à revenu intermédiaire » est banalement vaine
Jeune Afrique |
Joël Té-Léssia Assoko |
Publication 30/11/2019
À en croire les statistiques de la Banque mondiale, actualisées le 1er juillet, le revenu national brut par habitant au Sénégal est passé de 950 dollars américains pour l’année 2017 à 1 410 dollars en 2018. Assez pour que le ministère des Finances et du Budget s’enorgueillisse : « Le Sénégal ne fait pas partie des 34 pays à faible revenu mais appartient plutôt à la catégorie des 47 pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. »
Être ou ne pas être un « pays à faible revenu »
Cette « mise au point » technocratiquement correcte du ministère d’Abdoulaye Daouda Diallo vient en réponse à la polémique lancée à la mi-juin par une partie de la presse locale sur le « basculement » du Sénégal dans le peloton des « pays pauvres ». Un point technique : le revenu national brut (RNB) correspond à l’addition de la production économique locale (PIB) et des revenus nets perçus de l’étranger (salaires, propriétés, subventions etc.).
Ni le ministère des Finances ni ses détracteurs n’ont jugé utile d’expliquer la soudaine progression des revenus nationaux en un an (+ 48 %). Ni même l’intérêt – sauf vanité nationale évidemment – de cette « admission au sein des pays à revenu intermédiaire », pour reprendre une formule consacrée.
Dans les faits, la hausse observée tient essentiellement à un changement de « l’année de base » utilisée pour l’élaboration des statistiques nationales, qui a été actualisée de 1999 à 2014, en mai 2018, par l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Ces mises à jour sont courantes et intègrent l’amélioration des méthodologies statistiques et une meilleure prise en compte de l’économie réelle (nouveaux secteurs, nouveaux outils de production, etc.). À titre d’illustration : que représentait le mobile money dans l’économie sénégalaise en 1999 ?
Le rebasementde l’an dernier a entraîné un rehaussement de 30 % de la taille estimée de l’économie du Sénégal, comme le rappelait un rapport du FMI de juillet 2018. Et s’est traduit – croissance économique aidant – par la progression du revenu par habitant documentée dans les nouvelles statistiques de la Banque mondiale, mises à jour ce mois-ci.
Le Sénégal quitte donc la funeste catégorie des « pays à faible revenu », comme le Mali, Haïti et le Tchad, pour rejoindre la plus « prestigieuse » sphère occupée par la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Kenya, le Nigeria et le Maroc parmi les « pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure ». Qu’importe que dans cette catégorie fourre-tout figurent également le Soudan, Djibouti, la Cisjordanie, la Papouasie-Nouvelle-Guinée, Kiribati, El Salvador, au même titre que l’Inde et le Pakistan, tous disposant d’un RNB par habitant compris entre 1 026 et 3 995 dollars.
D’ailleurs, faut-il rappeler que le Sénégal faisait déjà partie entre 2009 et 2014 de cette cohorte avant de « redevenir » un pays pauvre entre 2015 et 2017, donc. Enfin, faut-il noter que la Banque mondiale, elle-même, n’utilise « les classifications des revenus qu’à des fins d’analyse », sauf dans les seuls cas des pays à revenu élevé ? Depuis 1986, le Sénégal a changé quatre fois de catégorie de revenus et de catégorie opérationnelle dans la classification de l’institution multilatérale, sans aucune conséquence perceptible sur le type de financements approuvés en faveur de Dakar.
Concrètement quelle différence notable existe-t-il entre le Sénégal de 2014 et celui de 2018 ? Le pays était-il vraiment dans la « même division » que la Somalie et le Liberia il y a trois ans et boxerait-il aujourd’hui dans la même catégorie que l’Égypte ou la Tunisie ? Poser ces questions, c’est déjà y répondre.
Une évaluation étrange
Ces mises à jour statistiques ne sont certainement pas inutiles. Elles donnent une image plus honnête et claire de l’économie d’un pays. Elles peuvent réduire le coût de financement de l’État : toutes choses égales par ailleurs, une hausse statistique du PIB entraîne une réduction du taux d’endettement, ce qui peut rassurer les marchés financiers. Selon la banque d’affaires Renaissance Capital, le reclassement de l’an dernier va réduire le ratio dette publique/PIB de un quart à 46 %.
En revanche, les recettes fiscales devraient statistiquement reculer également de un quart à 16 % du PIB. Ce qui reste « encore mieux que beaucoup de pays en Afrique subsaharienne », rappelle la banque. Mais se hausser du col ou se lamenter pour quelques dollars en plus ou en moins dans une colonne, sur un seul indicateur, est une manière particulièrement étrange d’évaluer l’importance d’un pays. Il y a quelques années, le PIB du Nigeria a quasiment doublé à la suite d’une révision statistique, celui du Ghana, augmenté de deux tiers. Pour quelles conséquences dans la vie quotidienne des populations ?
En même temps que le Sénégal, le Zimbabwe est aussi devenu, au début de juillet, « un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure », le RNB par habitant ayant bondi de 91 % en un an, soit plus que l’ascension enregistrée au Sénégal. Logiquement, il ne manquerait plus que Dakar se mette à envier Harare…
Joël Té-Léssia Assoko est journaliste économique à Jeune Afrique et ancien chef d'édition de Jeune Afrique Business+. Ivoirien, diplômé de Paris-Dauphine et de Sciences-Po Paris, il suit le secteur de la finance en Afrique.
POURQUOI SADIO MANÉ MÉRITE LE BALLON D’OR
Le scénario préétabli pour cette récompense se résumerait en un duel Messi-VVD, avec Ronaldo en outsider. Mais ce serait enterrer vivant un homme qui a rythmé cette année par des éclairs de génie, une régularité folle dans la performance
So Foot |
MATHIEU ROLLINGER |
Publication 30/11/2019
Lundi au théâtre du Châtelet, le Ballon d’or 2019 sera attribué au meilleur footballeur de l’année selon 180 journalistes internationaux. Parmi les outsiders dans l’obtention du prestigieux trophée, Sadio Mané peut être le candidat idéal pour ceux qui ont commencé leur carrière comme porteur d'eau avant de briller dès que la route s'élève.
« Si vous donnez le Ballon d’or au meilleur joueur de cette génération, donnez-le toujours à Lionel Messi. S’ils le donnent au meilleur joueur de la saison dernière, c’est Virgil van Dijk. » Aussi censés soient-ils, ces mots ne sont pas prononcés par un homme sans intérêt. Car Jürgen Klopp a une paroisse à défendre. Une paroisse couleur rouge qu’il a hissée jusque sur le toit de l’Europe. Pourtant, dans sa mission, l’Allemand a oublié qu’il avait d’autres ouailles sous sa protection, dont une n’étant pas la moindre : Sadio Mané.
Le coach de Liverpool n’est pas à le seul à être à blâmer, car il n’est pas le seul à faire du Sénégalais un personnage secondaire de cette cérémonie de remise du Ballon d’or. Le scénario préétabli se résumerait en un duel Messi—VVD, avec Cristiano Ronaldo en éternel outsider. Mais ce serait enterrer vivant un homme qui a rythmé cette année de foot par des éclairs de génie, une régularité folle dans la performance et une attitude irréprochable. Comme si dans Le Bon, la Brute et le Truand, on avait zappé un quatrième larron. Alors pourquoi pas le Brillant ?
Le tapis de Sadio
Pourtant, Sadio Mané doit aujourd’hui savoir que l’oubli n’est pas une fatalité. Il peut être une chance, il peut être une grâce, il peut être une arme, il peut même être un talent. Souvent, l’ailier de Liverpool sait d’ailleurs profiter de ces errements pour faire trembler les filets. Pas moins de 22 fois la saison dernière en Premier League pour s’offrir le titre de co-meilleur buteur aux côtés de deux autres stars africaines : Pierre-Emerick Aubameyang et Mohamed Salah. Le gamin de Bambali sait aussi qu’il n’a pas besoin d’être sur le devant de la scène pour finir par s’imposer. La preuve dans la distribution des rôles du côté d’Anfield. Si Mo Salah a été rapidement propulsé « Prince d’Égypte » , que Bobby Firmino a ébloui le tableau de ses dents blanches, les Scousers ont mis un peu plus de temps pour comprendre que Sadio pouvait être autre chose que le troisième pied du tabouret.
S’il est déjà impossible de tenir debout sans, il s’est en plus révélé comme le plus solide après une année haletante ayant vu les Reds devenir les plus beaux dauphins de l’histoire d’Angleterre, et poursuivre sur leur élan cette saison pour mettre fin à 30 ans de disette. Avant ça, il fallait bien que quelqu’un fasse tomber le Bayern Munich pour que Divock Origi puisse entrer dans la légende face au Barça. De même, le penalty concédé par Moussa Sissoko en finale de Ligue des champions ne s’est pas fait tout seul. Et la Supercoupe d'Europe ne serait pas à Liverpool à l’heure actuelle non plus. Tant de tours de magie que Sadio a pu réaliser avec une astuce d’illusionniste chevronné : attirer l’attention sur d’autres éléments pour mieux réapparaître.
Saga Africa
Ainsi, ce lundi, Sadio Mané pourrait tout simplement créer la surprise. Et qu’importe s’il a manqué un brin d’énergie au capitaine des Lions de la Téranga pour ajouter à son tableau de chasse une Coupe d'Afrique des nations. L’ancien Messin a aussi l’occasion de réparer une autre forme d’injustice : celle de voir la cérémonie oublier de récompenser le moindre joueur africain lors des 24 dernières années.
En 1995, le Ballon d’or changeait ses critères d’attribution : pour la première fois, un joueur de n’importe quelle nationalité jouant dans un club européen pouvait alors prétendre au titre. Un honneur, réservé jusqu’alors aux seuls joueurs européens, dont George Weah sera le premier Africain à profiter... mais aussi le dernier. Depuis, Didier Drogba, Samuel Eto’o, Michael Essien, Yaya Touré ou Fredéric Kanouté ont tous été snobés par le jury. Celui-ci ne peut décemment pas empêcher ce continent d’entamer seulement une lignée, quand certains joueurs auront bientôt besoin de plusieurs mains pour compter leurs trophées. Avec un poil de lucidité cette fois-ci, l’oubli peut parfois être une évidence.
L'OPÉRATION BARKHANE SERT-ELLE À PROTÉGER LES MINES D'URANIUM FRANÇAISES AU SAHEL ?
La présence des militaires français dans la région ne serait-elle pas plus liée à la défense des intérêts économiques, qu'à la lutte armée contre les groupes jihadistes ?
Ils sont "morts pour la France". Treize soldats français engagés dans l'opération Barkhane ont été tués au Mali dans la collision accidentelle de leurs deux hélicoptères de combat, lundi 25 novembre. Dans son live, franceinfo a reçu de nombreux commentaires s'interrogeant sur la raison réelle du déploiement des troupes françaises au Sahel. Leur présence dans la région ne serait-elle pas plus liée à la défense des intérêts économiques français, à commencer par les mines d'uranium d'Orano au Niger, qu'à la lutte armée contre les groupes jihadistes ?
"Pas un objectif premier" mais "un effet induit"
Le groupe Orano (ex-Cogema puis Areva), est présent depuis un demi-siècle au Niger, l'un des pays les plus pauvres de la planète, tout en étant le quatrième producteur mondial d'uranium. Le groupe y exploite deux mines dans le Nord-Ouest du pays, près d'Arlit : la première à ciel ouvert, la seconde souterraine. Un troisième site doit voir le jour à Imouraren, à 80 km plus au sud, mais le chantier est à l'arrêt depuis 2015. Le géant français possède également des mines au Canada et au Kazakhstan, mais le minerai nigérien représente un tiers de sa production totale.
L'opération Barkhane, quant à elle, est principalement déployée dans le Nord du Mali. Elle a pris le relais en 2014 de l'opération Serval, lancée un an plus tôt afin d'empêcher les jihadistes de prendre le contrôle du pays et de sa capitale, Bamako. Et depuis cinq ans, les 4 500 militaires français déployés dans la bande sahélo-saharienne se sont engagés dans une "opération de contre-guérilla" de longue haleine, explique Joseph Henrotin, politologue spécialiste des questions de défense et rédacteur en chef de la revue Défense et Sécurité internationale.
Les mines d'Arlit ne sont toutefois pas dans la zone actuellement la plus exposée à la menace jihadiste, selon Caroline Roussy, chercheuse à l'Iris et spécialiste de l'Afrique de l'Ouest. "Le cadre de déploiement est beaucoup plus centré sur le Mali et le Burkina Faso, même s'il y a une surveillance importante de la zone dite des trois frontières", à cheval sur ces deux pays et le Niger [à l'est], fait valoir l'experte. "Et même si la menace est transterritoriale, avec des groupes jihadistes très mobiles qui s'affranchissent des frontières et se déplacent d'un territoire à un autre, le Niger n'est pas aussi touché", observe-t-elle. Le "risque d'extension" est certes bien réel, mais il est plutôt porté "vers le Togo, le Bénin et le Sénégal [au sud du Mali et du Burkina pour les deux premiers, à l'ouest pour le troisième]".
Une opération militaire sert plusieurs objectifsà court, moyen et long termes, rappellede son côté Joseph Henrotin. L'objectif initial de l'opération Barkhane, c'est l'élimination des groupes jihadistes. Au-delà de ces visées purement sécuritaires, l'objectif à moyen terme, c'est de recréer de l'Etat dans la zone. Et les Etats étant préservés, les liens économiques fonctionnent mieux. Des Etats en situation de paix sont aptes à être prospères, à commercer, le champ économique y est ouvert", développe le politologue. Indirectement, l'opération Barkhane protège donc bien les intérêts des entreprises françaises. Mais "ce n'est pas l'objectif premier, c'est un effet induit", insiste-t-il.
"Pas de protection active" autour des mines
La force Barkhane dispose d'un important point d'appui permanentà Niamey, la capitale du Niger, à 1 200 km environ au sud-ouest d'Arlit. "L'aéroport sert de base aux avions de chasse et aux drones français", précise Joseph Henrotin. Les militaires français ont également installé une base avancée temporaire à Aguelal, dans le massif de l'Aïr, à 80 km seulement à l'est d'Arlit.
La base d'Aguelal serait suffisamment proche des mines d'Arlit pour envisager une riposte rapide en cas de besoin. Pour autant, "on ne peut pas dire qu'il y a une protection active avec des soldats de Barkhane déployés autour des mines", estime Joseph Henrotin. "Areva [Orano] a tout ce qui lui faut sur place pour assurer sa sécurité et les forces nigériennes portent un regard attentif à la sécurité de ces sites, parce que le Niger lui-même n'a pas intérêt à perdre l'activité des mines et les revenus qui en sortent."
"ll y a des privés qui font ça très bien"
"Si des intérêts français sont directement menacés, on va intervenir militairement dans le coin, explique l'ancien colonel Michel Goya, spécialiste de l'histoire militaire qui livre ses analyses sur les conflits contemporains sur son blog, La voie de l'épée. On a par exemple engagé notre marine dans le golfe Persique pour protéger nos pétroliers lorsqu'ils étaient menacés par les Iraniens."
"Mais pour garder des installations, on n'a pas besoin de militaires français, et pas forcément de forces spéciales, il y a des privés qui font ça très bien", poursuit l'ancien officier. Par ailleurs, les intérêts économiques dans la région sont à relativiser. "Au Sahel, une fois qu'on a sorti l'uranium des mines du Nord du Niger, il faut chercher bien loin les intérêts économiques français qu'on peut vouloir défendre, et en particulier au Mali, même s'il y a bien sûr des ressortissants et des entreprises françaises", ajoute Michel Goya.
Imaginer que des intérêts économiques présideraient aux destinées des militaires français qui risquent leur vie au Sahel est donc "un fantasme", assure Michel Goya. Pour Caroline Roussy, c'est même "une théorie du complot aberrante" et "pas à la hauteur de l'engagement des soldats français". "Ça fournit une explication rationnelle à bon compte, mais la réalité est souvent plus compliquée que ça", abonde Joseph Henrotin.
VIDEO
GUY MARIUS SAGNA MANIFESTE DEVANT LE PALAIS DE LA REPUBLIQUE
Lassitude des populations ? Mauvaise communication ? Ou nouvelle stratégie de lutte adoptée par les leaders du mouvement ? Quoi qu’il en en soit, Guy Marius Sagna et Dr Bacacar Diop des Fds ont tenu leur promesse de braver l’interdit du préfet
Marche de protestation contre le cout de l’électricité
Les manifestants contre la hausse du prix de l’électricité qui devait débuter leur marche à l’Obélisque ont semé les forces de l’ordre pour faire une excursion au Palais de la République. Autrement dit, l’impressionnant dispositif sécuritaire déployé à la Place de la Nation (ex Place de l’Obélisque) pour faire capoter la dynamique de Guy Marius Sagna et Cie n’aura servi à rien.
A la Place de la Nation (ex-Obélisque), c’était un jour comme tous les autres. Une grande marque y a érigé des tentes pour faire la promotion de ses téléphones dans une ambiance des grandes fêtes. Le seul détail intrigant, c’est la présence des forces de l’ordre comme le fait remarquer ce chauffeur de taxi : «Loufi Khéw tay, taak der beuri nanie fi dé !» (Qu’est-ce qui se passe ? Il y a beaucoup d’hommes de tenue aujourd’hui). En effet, les rondpoint de la Bceao, des Allées Centenaire ainsi que la grande Place de la Nation sont quadrillés par gendarmes prêts à découdre avec les manifestants qui tenteraient de défier l’ordre public. Sauf que leurs habituels protagonistes ne sont pas au rendez-vous. Pas un seul manifestant n’est présent sur les lieux, poussant même certains gendarmes à discuter. A la Place de l’Obélisque, les gens circulent normalement, les magasins sont ouverts et les commerçants discutent avec les clients dans une atmosphère détendue. Aucun sentiment de peur quant à d’éventuelles échauffourées n’habitent les gens.
LE SPECTACLE SE PASSAIT DEVANT LES GRILLES DU PALAIS PRESIDENTIEL….
Lassitude des populations ? Mauvaise communication ? Ou nouvelle stratégie de lutte adoptée par les leaders du mouvement ? Quoi qu’il en en soit, Guy Marius Sagna et Dr Bacacar Diop des Fds ont tenu leur promesse de braver l’interdit du préfet. Guidant les membres des organisations comme Gilets Rouges, Nittu Deg, Front pour une Révolution Anti impérialiste Populaire et Panafricaine (Frapp) France Dégage, Diop et Sagna marché de la Place de l’indépendance jusqu’aux grilles du Palais Présidentiel pour dénoncer la hausse du prix du pétrole, malgré l’interdiction formelle du préfet. Scandant «courant bi dafa cher», «Macky Sall dictateur» et à la tête d’une poignée d’acolytes déterminés, Babacar Diop et Guy Marius Sagna ont reussi visiblement une prouesse en atteignant les grilles du Palais de la République où il ont étés arrêtés par des gendarmes manifestement surpris par la rapidité de leur incursion. Ces derniers ont du désespérément lancer des grenades lacrymogènes sur les journalistes en vue de les disperser.
Par ailleurs en plus de Guy Marius Sagna qui a été conduit à l’intérieur du Palais et de Dr Babacar Diop, sept autres manifestants ont été arrêtés. «Nous lançons un appel solennel à la population plus particulièrement aux organisations des droits de l’homme pour qu’elles suivent scrupuleusement la suite de cette affaire», ont martelé les activistes dans le communiqué du mouvement avant de se vanter : «Conformément à l’article 8 de la Constitution qui garantit à chaque citoyen le droit de manifester, nos organisations ont marché pacifiquement vers le Palais Présidentiel».
LES PETITES ASTUCES DE L’ADMINISTRATION DENICHEES
Dans son rapport de 2017, publié jeudi dernier, l’Autorité de Régulation de Marchés Publics (Armp) a révélé de nombreuses incongruités dans les procédures de passation des marchés publics
Dans son rapport de 2017, publié jeudi dernier, l’Autorité de Régulation de Marchés Publics (Armp) a révélé de nombreuses incongruités dans les procédures de passation des marchés publics. une occasion pour l’organe de contrôle de dénicher certaines astuces utilisées par l’Administration pour contourner les règles établies.
Ils sont nombreux, les établissements administratifs et autres départements ministériels épinglés par l’Autorité de régulation des marchés publics (Armp) dans son rapport de 2017 rendu public jeudi dernier. Pour la plupart, ce sont les mêmes astuces utilisées pour contourner ou violer les procédures de passation des marchés publics. Après une lecture approfondie du document des missions de vérification, «L’As» est en mesure de révéler certaines techniques utilisées par les agents de l’Administration en complicité avec certains soumissionnaires pour attribuer les marchés à des personnes connues à l’avance. Mais également, des stratagèmes de certains départements ministériels pour épuiser à leur guise les budgets qui leur sont affectés. Prenant l’exemple du ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2017, il est relevé dans les observations générales du cabinet «Business system Consulting goup» qui a effectué le travail d’audit qu’un nombre important de marchés passés par Demande de renseignement de prix à compétition restreinte (DRP-CR) ou par Demande de renseignement de prix simple (DRP-S) à quelques jours de la date limite de clôture des engagements indiqués par lettre circulaire du ministère de l’Economie des Finances et du Plan portant clôture des opérations budgétaires de la gestion 2017. «Ces marchés ont été pour la plupart attribués pour des montants soient rigoureusement identiques aux reliquats sur les lignes budgétaires concernées avant les engagements en objets ou à des montants légèrement en dessous desdits reliquats », lit-on dans la note du cabinet. Poursuivant, il indique que cette pratique vise à consommer intégralement les montants budgétés pour que les soldes ne soient pas reversés en fonds libres. Une illustration d’une mauvaise planification des achats d’un manque d’efficacité dans la mise en œuvre des processus d’acquisition, précise le cabinet Business system Consulting Group. Il s’y ajoute, dit-il, que des signes de collusion ont été identifiés dans plusieurs DRP-CR et de DRP-S en violation des principes de transparence et de saine lise en concurrence des candidats.
LES MINISTRES DES SPORTS ET DE L’EDUCATION NATIONALE PRIS DANS LEURS MANŒUVRES
Pour ce qui est du ministère de l’Education nationale (MEN), de nombreux manquements ont été également relevés. Il en est ainsi du projet de réfection, d’aménagement de locaux du MEN attribuée à Saphir Groupe pour un montant de 17.700.000 Fcfa TTC. «L’examen du dossier nous a permis de constater que toutes les factures se ressemblent avec les mêmes fautes aux mêmes endroits (décoraif (décoratif) ; étagaires (étagères) ; lammelles (lamelles)). Les offres sont présentées de la même manière par les soumissionnaires laissant entrevoir qu’elles ont été produites par la même source ou par des sources liées. Ce qui dénote une collusion entre fournisseurs, en violation du principe de transparence des procédures édicté par l’article 24 nouveau du COA. » Toujours concernant le MEN, il a été révélé que des soumissionnaires ont eu à se déclare avec le même numéro de téléphone ; sans compter des sociétés gérées par les mêmes personnes. En ce qui concerne le ministère des Sports, le cabinet Grant Thornton qui a procédé au travail de vérification a attiré l’attention sur l’organisation d’un séminaire sur «l’économie des loisirs» attribué à la société «MA & LENA» pour un montant de quatre millions neuf cent quatre-vingt-dix-sept mille trois cents (4 997 300) francs CFA TTC. Toutefois ce qui parait bizarre pour le cabinet c’est que toutes les offres sont présentées de la même manière et prévoient deux (02) pause-café alors que les Tdrs en indiquent une (01) seule. – Aussi, le détail du KIT des participants est le même sur toutes les factures alors qu’il n’a pas été indiqué sur les Tdrs. Toujours aux ministères des Sports, le cabinet s’est focalisé sur l’organisation d’un autre séminaire sur les marchés publics attribué à la société MORA MULTISERVICES pour un montant de trois millions quatre cent quarante-cinq six cents (3 445 600)francs CFA TTC. Le cabinet a pu conclure après contrôle que les domaines d’activités des entreprises présélectionnées n’ont rien à voir avec l’organisation d’atelier ou de séminaire, en violation des dispositions de l’article 3 de l’Arrêté 00107 du 7 janvier 2015 relatif aux modalités de mise en œuvre des procédures de DRP pris en application de l’article 78 du code des marchés publics. Enfin, le cabinet s’est focalisé sur l’avenant n°1 au marché d’Acquisition d’équipements sportifs a été souscrit avec MORA MULTISERVICES pour un montant de 13 637 850 F CFA TTC. A en croire le cabinet, la revue du dossier a permis de relever que la livraison des fournitures a eu lieu le 5 décembre 2017 soit avant même l’immatriculation du marché par la DCMP qui est intervenue le 12 décembre 2017.
LE MINISTERE DE LA SANTE ET LES DEPASSEMENTS BUDGETAIRES
Au ministère de la Santé, des constats spécifiques ont été soulevés en l’occurrence dans le marché relatif à la fourniture et l’installation de groupes électrogènes pour les structures sanitaires du Sénégal. Pour un budget estimé à 130 000 000 FCFA, le marché a été signé pour un montant de 137 899 284 FCFA soit un dépassement budgétaire de F CFA 7 899 284. «Nous n’avons pas eu connaissance de l’attestation d’existence de crédit pour la couverture de ce dépassement », précise le cabinet qui a effectué le travail de vérification. Pour ce qui est du marché relatif à la fourniture et installation de centrales d’oxygène mobiles clés en main au profit des structures sanitaires du MSAS : la livraison a été effectuée le 10 janvier 2018 soit près de 8 mois pour des délais fixés à 45 jours. De ce fait, à en croire le cabinet de vérification, il a été constaté un retard de 6 mois et demi devant ouvrir droit à des pénalités. «Cependant, nous n’avons reçu aucun document relatif à l’exécution financière (preuve de paiement). L’absence de ces preuves de paiement ne nous permet pas de nous assurer de l’application d’éventuelles pénalités en cas de retard de livraison conformément à l’article 135 du CMP », note-t-on dans le rapport 2017 de l’ARMP.
SNHLM EPINGLE POUR DEFAUT D’EXECUTION DE SES MARCHES
Au niveau de SNHLM, il est noté qu’il y a des marchés dont l’exécution n’a toujours pas démarré sans que les raisons ne soient communiquées. Selon le cabinet qui a effectué l’étude : «Il s’agit du : Marché relatif aux travaux de construction de 106 logements à SANDIARA pour les montants de 545 001 578 F CFA pour le lot 1 et 469 844 450 F CFA pour le lot 2 ; l’attribution provisoire a eu lieu le 27 avril 2018 et au moment de notre intervention le marché n’est pas encore signé. Aussi, le Marché N° T 1156/18 - DK relatif aux travaux de construction de 100 logements à TAMBA pour les montants de 551 169 653 F CFA pour le lot 1, 534 615 142 F CFA pour le lot 2, 441 833 922 F CFA pour le lot 3 et 486 688 877 F CFA pour le lot 4 ; le marché a été approuvé le 1er juin 2018 pour un délai d’exécution contractuel de huit mois. Au moment de notre intervention en novembre 2018, les travaux n’avaient pas encore démarré. Pour le Marché N° T 0093/18 - DK relatif aux travaux de construction de 08 logements à SOKONE pour un montant de 271 544 512 F CFA, l’ordre de service est daté du 5 mars 2018 pour un délai d’exécution de 6 mois soit, une réception théorique le 5 septembre 2018. Or, au moment de notre intervention, les travaux étaient toujours en cours et, aucune preuve de l’application des pénalités de retard ne nous a été communiquée. »
LE MINISTERE DE L’INTERIEUR CHAMPION DES ENTENTES DIRECTS
En définitive, pour le ministère de l’Intérieur, il est relevé de nombreux dysfonctionnements dans ses différents services. D’abord pour ce qui est de la Direction générale des élections (DGE), l’Acquisition de matériels informatiques, renseigne que les soumissionnaires «PENDA GROUP» et «DIALIBATOUL MOURAKHIB» ont la même boite postale. De plus, leurs factures pro forma et leurs lettres de soumission sont datées le 14/02/2017 avant même l'envoi des lettres d'invitation du 13/03/2017 aux candidats. Le même procédé a été utilisé pour la fourniture de consommables informatiques. Le plus inquiétant, la notification aux fournisseurs retenus et non retenus du 10/03/2017 est antérieure à l'ouverture des plis (21/03/2017) de même que le contrat signé le 27/02/2017. Toujours dans ses astuces pour violer le processus de passation des marchés, un autre service du ministère de l’Intérieur, en l’occurrence la Direction de l’Administration générale et de l’Equipement (DAGE) a été épinglé à travers sa demande de renseignement de prix DRP) sur la «Désinsectisation service des archives» qui s’est révélé douteuse avec des interrogations quant à l’existence de trois fournisseurs qui se sont manifestés. En effet, des incohérences ont été relevées sur les 3 factures pro forma présentées parmi lesquelles une même faute d’écriture sur toutes les trois factures pro forma présentées par les soumissionnaires. Le ministère de l’Intérieur fait partie par ailleurs des champions des ententes Directes fréquemment. En effet, «les ententes directes passées en revue durant la gestion 2017 se chiffrent à 8 880 027 956 F CFA.
L’urgence impérieuse invoquée dans la plupart des ententes directes n’est pas toujours de mise au vu des lenteurs relevées par la suite dans la procédure de passation et d’exécution», lit-on dans le rapport de l’ARMP. Pour ce qui est de la Direction générale des Elections, elle est épinglée dans l’Acquisition de bulletins de vote et de documents de propagande. Le Marché en question a été exécuté avant l’avis de la DCMP sur le projet de contrat. La Direction de l’Automatisation des Fichiers, quant à elle, est épinglée dans un Marché d’acquisition de véhicules avec l’Africaine de l’Automobile pour un montant de 112 000 000 F CFA. En l’espèce, le bon de livraison du 26/04/2017 est antérieur à l’approbation du contrat du 31/05/2017 et à la notification du 13/06/2017.
APRES L’INDUSTRIE, CHEIKH TALL DIOUM ENTRE DANS LE GRAND CERCLE DES ECRIVAINS
Et tout indique que Cheikh Tall Dioum a la bénédiction et la sympathie des muses ; car ses deux romans ouvrent la porte de l’espace littéraire à cinq autres aux allures autobiographiques, mais fondamentalement éducatifs et absolument pédagogiques.
Cheikh Tall Dioum avait été surnommé par la presse « le Golden boy », du fait de ses initiatives dans le domaine de la création d’unités de productions génératrices d’emplois. C’était dans les années 90. Près de deux décennies après, ce self made-man en a surpris plus d’un en s’installant, confortablement dans le grand, mais restreint cercle des écrivains. En atteste sa deuxième publication «Dans le brouillard» qui fait suite à «La danse du cerf-volant». Et tout indique que Cheikh Tall Dioum a la bénédiction et la sympathie des muses ; car ses deux romans ouvrent la porte de l’espace littéraire à cinq autres aux allures autobiographiques, mais fondamentalement éducatifs et absolument pédagogiques.
Cheikh Tall Dioum fut le premier Sénégalais à s’investir dans la grande industrie. Un secteur à l’époque sous le grand monopole de firmes et compagnies occidentales. Les archives étaient et sont toujours là. Audacieux, comme l’exige l’entreprenariat, entre autres critères de rayonnement, Cheikh Tall entrera dans l’actionnariat de multinationales. Ce qui lui avait permis d’être, encore, le premier Sénégalais à investir dans l’industrie culturelle, en rachetant le « Thiossane » des mains d’un Français. Il y installera le Dakar Loisirs Club (Dlc), qui produira de nouveaux jeunes talents, aujourd’hui ténors de la musique sénégalaise : deYoussou Ndour, qu’il a associé au projet du «Thiossane », en passant par Fallou Dieng, Salam Diallo, Alioune Mbaye Nder, Pape Diouf, Dj Awadi, Viviane Chédid, etc.
Aimant toujours défricher, si ce n’est une main invisible qui le pousse à innover, il fut, aussi, le premier de nos compatriotes à financer des programmes télévisuels bien sénégalais, avec la production d’émissions qui étaient des plus suivies : Diapason, Harmattan, etc. D’intenses moments de découvertes et de relaxe, après les cinq jours de travail dans la semaine. Décompresser participe à l’équilibre, même au-delà du genre humain. Riche de ces expériences, Cheikh Tall Dioum sera par la suite à l’origine de la création du premier grand groupe de presse de notre pays : Com 7, où sont passés, presque, les plus belles plumes et voix de notre patrie, devenues aujourd’hui des journalistes de référence, en plus innovateurs. Qui touche à l’huile de palme, en aura les mains teintées, voire la bouche.
Tirant des leçons du « Grand livre du monde », comme découvrait Descartes, et comprenant que pour avoir son ombre derrière soi il faut se mettre en face du soleil, le Golden boy a choisi l’an 2019 pour déposer ses expériences devant les yeux et pieds des générations actuelles et à venir, par le canal du large et succulent plat qu’est la littérature. N’est-elle pas l’aboutissement de toute œuvre humaine, le meilleur réceptacle qui traverse les temps, charriant des effluves qui mettent de l’eau aux bouches ? Son deuxième ouvrage, « Dans le brouillard » est sur les rayons des librairies, d’ici et d’ailleurs, depuis le mardi 26 Novembre de cette année. Un roman qui confirme et illustre que la grand Baobab a été d’abord gousse. Il fait suite à son premier, «La danse du cerf-volant », qui a été un grand succès littéraire, parce qu’épuisé après seulement deux semaines dans son installation sur les rayons des librairies. Ce n’est pas pour rien que la florissante et inspirée romancière avait préfacé l’instructive et captivante « danse du cerf-volant ».
« Le brouillard », c’est l’annonce de l’arrivée du soleil et de ses fils, les rayons, qui vont dissiper la brume ; pour éclairer des chemins tracés et balisés, comme l’a si bien préfacé Alioune Badara Bèye, le Président de l’Association des écrivains du Sénégal. « Dans le Brouillard » est un roman arrimé sur une autobiographie. Ce sont 457 pages tellement palpitantes qu’on ne sent pas le temps passer. Un ouvrage qui redonnera, très certainement, le goût de la lecture, que l’on commençait à perdre. Une planche de salut pour sauver la LMD (Licence, Maîtrise, Doctorat) que malmènent lutte, musique et danse.
UNE SERIE EN GESTATION SUR « LES AMOURS » ET « LES HAINES » DE LA COLONISATION FRANÇAISE AU SÉNÉGAL
"Black and White", lit-on dans le scénario, "est une saga romanesque qui raconte les passions d’une époque rythmée par les amours, les haines, les guerres…
Des journalistes sénégalais étaient sur le plateau de tournage de cette série consacrée à la colonisation française au Sénégal, à Gorée, une île située au large de Dakar où techniciens, acteurs, réalisateurs et producteurs se sont installés pour un mois, après avoir séjourné pendant autant de temps à Thiès (ouest) et durant deux jours à Dakar-Plateau. "J’ai décidé d’écrire une série qui raconte la colonisation française, le mépris pour le peuple sénégalais, à cette époque-là, et la décolonisation, jusqu’à l’élection de Léopold Sédar Senghor", a déclaré le producteur devant le public, considérant la colonisation comme "une violence contre les peuples".
"Black and White", lit-on dans le scénario, "est une saga romanesque qui raconte les passions d’une époque rythmée par les amours, les haines, les guerres… Colons et militants indépendantistes résistent ensemble ou s’affrontent jusqu’au 4 avril, jour de l’indépendance du Sénégal". Jacques Kirsner dit vouloir faire "un film pour montrer aux Français que la colonisation n’a pas été seulement quelque chose de formidable", une initiative du scénariste qu’encourage, selon lui, le travail de mémoire en cours d’exécution sur la période coloniale, à l’initiative de la France. "Il y a une reconnaissance en France, maintenant que les acteurs africains ne sont pas là seulement pour ouvrir les portes ou jouer les serveurs dans les cafés. Puisqu’il y a un mouvement vers l’égalité en France aujourd’hui, c’est possible d’en parler", a commenté Kirsner. "En France, il est actuellement très difficile de faire un film de fiction sur l’Algérie", affirme le scénariste français, laissant entendre que la sanglante guerre d’Algérie (1954-1962), à la fin de la colonisation menée par la France dans ce pays d’Afrique du Nord, en est la cause.
Au même moment, "des populations sénégalaises de l’époque avaient sur la colonisation un point de vue autre que celui qu’il y a actuellement en France", dit-il. Aujourd’hui, en France, ajoute Kirsner, "la mode [est] de dire : +La colonisation, ce n’était pas terrible, car on a construit des ports, des autoroutes, des hôpitaux+. Je ne crois pas que ce soit le cas". "La colonisation, c’est d’abord une conquête, et ensuite la soumission d’un peuple. Je voulais faire un film sur cette mémoire", a-t-il souligné. Le choix du Sénégal pour porter la colonisation à l’écran s’explique, selon lui, par son "amour pour ce pays et son peuple formidable, mais surtout parce que cette colonisation s’est terminée sans drame". "J’ai connu un de vos présidents qui m’avait dit: +Entre le Sénégal et la France, c’est une longue histoire d’amour+. Je ne sais pas si c’est vrai. Mais du côté français, je sais qu’il y a une estime pour le Sénégal", témoigne le producteur de cinéma de nationalité française. La trame de la série dont la première saison va compter quatre épisodes de 52 minutes explique le choix du réalisateur sénégalais Moussa Sène Absa pour la direction de l’équipe de tournage. "J’ai écrit cette série que j’ai proposée à France Télévisions, qui l’a acceptée. C’est un évènement, car cela n’a pas été toujours comme ça", a dit le scénariste français.
Il regrette que le Sénégal n’ait pas participé au financement du film dont le coût est estimé, selon lui, à quatre millions d’euros (environ 2,6 milliards de francs CFA). "C’est un financement 100% français, qui est dépensé à près de 90% au Sénégal. C’est la première fois que je tourne dans un pays étranger, avec des techniciens étrangers pour la majorité, et que le pays d’accueil ne participe pas au financement du film", a commenté Jacques Kirsner.
Des acteurs français jouent les rôles principaux : Marième Ndiaye (Fari Ciss dans la série) est une Franco-Sénégalaise, Olivier Chanteau (Alain de Bourbon), Laurent de Greville (Richard Favier),Isabelle Gelinas (Hélène Favier), entre autres, sont tous de nationalité française. Les techniciens sont des Sénégalais pour la plupart : l’actrice Rokhaya Niang fait ses premiers pas dans la mise en scène, aux côtés du chef-machiste Arona Camara, du caméraman et cadreur Jean Diouf, parmi d’autres.
La réalisatrice sénégalaise Angèle Diabang, de la société de production "Karoninka", est coproductrice de la série. Une deuxième saison de la série "Black and White" est prévue, sur le thème de la France Afrique, et une troisième sur "les jeunes Africains qui échouent sur les côtes européennes". "Il y a une résonnance entre ce qui s’est passé durant la colonisation et ce qui se passe actuellement entre l’Afrique et l’Europe", a souligné Jacques Kirsner. Moussa Sène Absa estime, pour sa part, que "beaucoup de jeunes ne connaissent pas l’histoire qui lie la France au Sénégal". "Il s’est passé des choses dans l’histoire, que l’on ne peut pas gommer.
Les jeunes ne connaissent pas cette histoire. Il y a eu des moments de violences, et des autorités traditionnelles se sont alliées à la France. D’autres se sont opposées à elle, etc. Il y a cette mémoire violente à apaiser", explique Sène Absa. "Black and White", "une série sur commande", doit être livrée en mai 2020, pour ensuite être programmée sur France 3 en septembre de la même année, selon Kirsner.