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27 juillet 2025
par l'éditorialiste de seneplus, bacary domingo mané
LE PARAPLUIE XX DU PRÉSIDENT SALL
EXCLUSIF SENEPLUS - Au lieu de crever l’abcès, Macky a laissé se développer la gangrène - Des scandales à répétition, mais avec des traitements à géométrie variable - La vulnérabilité du pays est critique
Bacary Domingo Mané de SenePlus |
Publication 25/11/2019
Il est écrit en lettres d’or sur les étoiles, les prévisions météo l’ont annoncé, la nature l’a réalisé, le ciel surchargé, a finalement produit une averse de scandales qui a arrosé tout le Sénégal. Cette pluie a entraîné, certes, certains bandits à col blanc dans ses flots vertigineux vers Rebeuss, mais épargné d’autres, appartenant au cercle restreint «apériste» ou Faye-Sall. Le parapluie XX du président a protégé des gouttes de représailles judiciaires des prédateurs de deniers publics, épinglés par des mécanismes étatiques de contrôle.
Pourtant, dans son tout premier discours à la nation, du 3 avril 2012, le président Macky avait su entretenir la flamme du rêve, allumée dans une campagne où son positionnement était des plus convaincants. Lorsqu’il déclarait sans ambages : «À tous ceux qui assument une part de responsabilité dans la gestion des deniers public, je tiens à préciser que je ne protégerai personne. Je dis bien personne !» Et d’ajouter : «J'engage fermement le gouvernement à ne point déroger à cette règle».
Ces mots avaient réconforté tous les déçus des douze ans de gestion calamiteuse de Me Wade. Des choix politiques, parfois hasardeux, avaient démoli les piliers, certes chancelants, de certaines de nos valeurs. L’argent est déifié, la corruption est érigée en mode de conduite, le vol et le pillage des deniers publics, ne causent plus de remords ou regrets, puisqu’un certain laxisme étatique a fini de faire croire que «l’argent public, c’est l’argent de personne !».
Le plus cocasse, est que les rares pilleurs de deniers publics, ayant séjourné à Rebeuss - mais bénéficiant d’une liberté provisoire perpétuelle - ont qualifié, sous l’inspiration certes, du diable, leur incarcération d’épreuve imposée par la volonté divine. Diantre !
Dans cette ambiance de décomposition avancée du tissu social, résultant de comportements irresponsables d’individus qui se croient tout permis, et surtout encouragés par une culture d’impunité entretenue par un système bien ancré, l’engagement de Macky de ne «protéger personne» ne peut que retentir dans les oreilles de tous ces Sénégalais qui ont, ne serait-ce qu’une once de sens du bien public.
Mais force est de constater que les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs. Les mange-mil opèrent, certains allant jusqu’à fabriquer de faux billets de banque. Les abonnés à la richesse rapide (Rirap), ont eux, choisi, sans coup férir, la voie de la drogue dure. Les deniers publics sont déviés dans des comptes personnels… et cela, en toute impunité.
Le premier des Sénégalais, avait déclaré dans son discours du 31 décembre 2012, que «dans l’exercice de toute mission de service public, personne ne peut se soustraire de l’obligation de transparence et de rendre compte». En ne perdant pas de vue que «toute dynamique de changement dérange ; parce qu’elle ébranle des certitudes, parce qu’elle bouscule des habitudes établies et, que, pour certains, elle remet en cause des acquis et des privilèges indus». Il poursuit : «Mais rien ne me détournera de l’objectif de bonne gouvernance. Par conséquent, toutes les procédures engagées en matière d’audits et d’enquêtes sur des ressources et biens mal acquis seront rigoureusement menées jusqu’à leur terme. Et la justice suivra son cours».
La pratique montre le contraire. Au lieu de crever l’abcès, Macky Sall a laissé se développer la gangrène. Des scandales à répétition, mais avec des traitements à géométrie variable. Le chef de l’Etat a choisi délibérément de mettre les dossiers des proches sous le coude. La création de l’Office National Anti-corruption (Ofnac) «pour traduire en actes notre aspiration commune à une gestion saine, soucieuse de la sauvegarde de l’intérêt public», la réforme de la Cour des Comptes «pour renforcer son indépendance et ses moyens d’intervention» et l’instruction donnée à l’Inspection générale d’Etat de publier un rapport annuel sur l’état de la gouvernance publique, toutes ces mesures semblent se heurter à une gestion plus soucieuse de réélection que d’émergence.
Le second ou le deuxième mandat (l’avenir corrigera notre niveau de langue) du président Sall a démarré par une série de scandales dont le dernier (?) est la multiplication de faux billets de banque. Mais le constat est que des membres de l’Apr ou de Benno Bokk Yakaar cités dans des affaires ne sont nullement inquiétés. Mieux, certains ont bénéficié de promotion. Le parapluie XX du président Sall constitue un abri de luxe, pour les bandits à col blanc, sous cette pluie diluvienne d’infamie qui met en danger la République.
Quand l’argent public est dévié de sa trajectoire, les ayant-droits sont parfois tentés de combler le manque par des méthodes qui volent à l’humain sa dignité. Le détournement de deniers publics creuse le fossé de la pauvreté et insuffle dans les cœurs des laissés-pour-compte la haine et la rancœur à l’égard d’une bande de pilleurs et du système qui les protège. Il dynamite les fondements de la société, secrète le manque
de confiance chez les jeunes, exposés aux vents d’influences extérieures. La vulnérabilité du pays semble atteindre le seuil critique.
Si le président Sall n’avait pas échoué à mettre en place un Etat de droit dont «la finalité était de garantir la sacralité du bien public», comme il en avait exprimé le vœu, le mal n’aurait peut-être pas pris cette ampleur. Sa responsabilité pleine et entière est engagée dans la pente glissante qui risque de projeter le pays dans le vide. Mais la solution existe, elle est juste logée au cœur du problème.
Elle fait partie des premières personnes vivant avec un handicap à se lancer dans le mannequinat au Sénégal.
Soutenue par sa fille, elle travaille jour et nuit pour réaliser ses rêves.
Selon elle, le handicap ne devrait en aucun cas être synonyme de passivité.
Joviale et pleine de vie, Yama Ndiaye a raconté son parcours et ses motivations à Alassane Dia.
L'ANCIEN, CE PILIER DE LA SOCIÉTÉ AFRICAINE OUBLIÉ
Le Sénégal est souvent cité en exemple pour ses mesures en faveur des personnes âgées. Aujourd’hui, cette population de 9 % à 11 % de Sénégalais souffre de l'urbanisation et de la nucléarisation des familles avec un recul des solidarités
Le Monde Afrique |
Marie Lechapelays |
Publication 25/11/2019
En 2006, le pays a lancé un programme d’assurance-maladie universelle. Mais dans un pays non préparé au vieillissement de sa population, l’initiative a vite montré ses limites.
Le continent de la jeunesse n’est pas épargné par le vieillissement de sa population. Le nombre de seniors devrait quadrupler d’ici à 2050, pour représenter 9 % des 2,4 milliards d’Africains (plus de la moitié aura moins de 25 ans), selon l’Institut national d’études démographiques (INED). Et pour l’instant, peu d’attention leur est portée.
En Afrique de l’Ouest, le Sénégal est souvent cité en exemple pour les mesures prises en faveur des personnes âgées. Comme dans la plupart des sociétés africaines, le « vieux » a une place bien particulière dans le tissu de la société et dans l’imaginaire collectif. L’expression wolof (langue locale) « Mag matna bayyi ci réew » le rappelle : « La personne âgée est le pilier de la société. »
Mais aujourd’hui, cette population qui représente entre 9 % et 11 % des Sénégalais et dont le nombre doit tripler d’ici à 2050, souffre de l’« urbanisation et de la nucléarisation des familles qui entraînent un recul des solidarités »,explique Sadio Ba Gning, enseignante-chercheuse en sociologie à l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis, spécialiste des questions liées au vieillissement.
Une déchéance sociale et un isolement doublés d’une précarité économique. Dans un pays où l’économie est à 80 % informelle, seuls 30 % des plus de 60 ans touchent une retraite et peuvent bénéficier du système de protection sociale. En 2006, conscient de cette situation, l’Etat lance le plan Sésame, un programme d’assurance-maladie universelle qui instaure la gratuité des soins pour les personnes âgées dans les centres de santé et hôpitaux publics. Cette politique « a eu des effets positifs notables en termes de recours aux services de santé pour les personnes âgées et de diagnostic de leurs maladies, en particulier chroniques », notaient un ensemble de chercheurs dans un article de la revue Santé publique, publié en 2016.
Pathologies chroniques
Mais « en observant la façon dont on les prend en charge, le rideau tombe », souligne la sociologue sénégalaise. L’initiative a vite montré ses limites. D’abord parce que ce plan a été «mis en place sans financements préalables », avec un budget limité à 1 milliard de francs CFA (1,5 million d’euros). « Au début, certains établisse ments de santé ont joué le jeu en avançant les frais, mais à un mo ment, cela n’a plus été possible », indique Sadio Ba Gning. L’hôpital principal de Dakar a luimême arrêté en 2017, n’avançant plus que les simples consultations, peu coûteuses. Autre critique : la liste des médi caments accessibles gratuitement ne reflète pas les maux des per sonnes âgées au Sénégal. Au cen tre médicosocial de l’Institution de prévoyance retraite du Séné gal (Ipres) à Dakar, centre natio nal de référence gérontologique qui reçoit quelque 60 000 pa tients par an, les deux tiers souf frent de pathologies chroniques, comme le diabète et l’hyperten sion. Les remèdes ? Onéreux et non pris en charge.
« Le système de santé n’est pas préparé au vieillissement de la po pulation, il est urgent de l’antici per », admet Elhadji Malick Sou gou, chef de la division de la pro motion des personnes âgées à la direction nationale de l’action so ciale du ministère de la santé. Dans la capitale, seules deux structures accueillent spécifique ment les seniors. Dans l’une d’el les, au centre de gériatrie d’Oua kam, des dizaines de personnes fatiguées font du coudeàcoude dès le début de la matinée. «Les capacités d’accueil manquent : le centre est petit et nous n’avons que sept lits », raconte le Dr Fatou Fall Diop, la directrice qui, avec son équipe d’une dizaine de méde cins, accueille plus de soixante patients par jour.
Et les spécialistes manquent. Seuls cinq gériatres sont inscrits sur le tableau de l’ordre des méde cins du pays, tous concentrés dans la capitale. « Il n’y avait même pas de formation en gériatrie au Sénégal quand je faisais mes études », se souvient Fatou Fall Diop. Ellemême est allée se spécialiser à Brest, à l’époque. Face à cette pénurie, l’université CheikhAntaDiop de Dakar a ouvert, en 2012, des formations en gériatrie et gérontologie. Les premiers bénéficiaires commen cent tout juste à être déployés dans le pays.
Face à l’insuffisance des services publics, de plus en plus de struc tures privées proposent des aides à domicile. « Ces services connais sent un succès impressionnant », souligne Elhadji Malick Sougou, convaincu qu’ils vont se démulti plier à grande vitesse. Une néces sité pour des « personnes dépen dantes, de moins en moins prises en charge par les familles ».
Les financements publics man quant cruellement pour s’occuper de la santé fragile des aînés – le budget pour la santé représente 5 % du produit intérieur brut (PIB), contre un objectif de 9 % fixé par l’Organisation mondiale de la santé –, l’Etat tente plutôt de les maintenir en activité. Le Projet d’appui à la promotion des aînés (PAPA), par exemple, permet d’ac compagner des personnes âgées dans le développement d’activi tés génératrices de revenus. L’ob jectif, éviter que le « pilier de la société » n’en devienne le fardeau.
KAËL, UN QUOTIDIEN ORDINAIRE AVANT LA JOURNÉE NATIONALE DE L’ÉLEVAGE
Kaël, commune-hôte de l’édition 2019 de la Journée nationale de l’élevage, dans le département de Bambey (centre), présente un tableau des problèmes partagés par les collectivités territoriales
Kaël, commune-hôte de l’édition 2019 de la Journée nationale de l’élevage, dans le département de Bambey (centre), présente un tableau des problèmes partagés par les collectivités territoriales, dont la plupart manquent de ressources à investir dans les infrastructures sociales de base, en dépit de toutes les promesses de l’Acte 3 de la décentralisation, la réforme des collectivités territoriales mise en œuvre depuis décembre 2013.
‘’Promotion des cultures fourragères et amélioration génétique du cheptel, créneaux porteurs pour l’emploi des jeunes et des femmes’’, thème de la Journée nationale de l’élevage prévu le 28 novembre prochain, semble être un thème choisi exprès pour Kaël.
Les principales activités de cet ancien canton polarisant aujourd’hui 42 villages tournent autour de l’élevage, l’agriculture demeurant secondaire dans cette commune rurale logée au cœur du Baol, entre Mbacké, sa limite nord, Ndioumane et Touba Mboul, au sud, Madina et Darou Salam à l’est, Ndioumane et Dendèye-Gouygui à l’ouest.
La seule infrastructure routière menant à Kaël, sur une distance de 15 km à partir de Mbacké, la capitale départementale, est un tronçon infesté de nids de poule que le voyageur peut ensuite prolonger jusqu’à Kaffrine.
Les habitants de Kaël sont des éleveurs peuls dont les activités agricoles leur permettent à peine de produire 1 à 2 tonnes d’arachide par cultivateur, dans une zone autrefois considérée comme un des bastions arachidiers du Sénégal, relève El Hadji Ba, son maire.
Kaël n’est de même jusque-là pas très tournée vers la culture fourragère, une activité qui n’existe ici qu’à une échelle très petite, sans commune mesure avec le niveau auquel les pouvoirs publics espèrent voir cette commune atteindre dans cette activité, ajoute l’édile.
Du fait du potentiel important de la commune en matière d’élevage, le vol de bétail est par contre récurrent dans cette contrée, ce qui justifie l’implantation d’un poste de gendarmerie pour mieux lutter contre ce phénomène.
À l’image de toutes les autres communes sénégalaises nées des flancs de l’Acte 3 de la décentralisation, Kaël se trouve confrontée au manque de ressources pour financer ses investissements et les infrastructures de base indispensables pour le bien-être des populations.
‘’A part les projets très locaux et les fonds de concours, nous n’avons aucun projet d’envergure dans notre commune’’ qui ne dispose selon le maire que d’une enveloppe de 16 millions de francs CFA pour réfectionner une classe, raccorder un village au réseau hydraulique, aménager un terrain pour les jeunes, etc.
L’essentiel des ressources déjà ‘’très maigres’’ de cette ancienne communauté rurale venait de la taxe rurale désormais remplacée par le minimum fiscal, avec l’entrée en vigueur de l’Acte 3 de la décentralisation.
‘’Quand on est une commune, on ne parle plus de taxe rurale’’, un impôt dont s’acquittaient les populations dans le contexte des anciennes communautés rurales, chaque personne contribuant ‘’entre 900 et 1000 francs CFA. Depuis qu’il y a l’acte 3, on ne parle plus de taxe rurale mais de minimum fiscal’’, souligne l’édile de Kaël.
L’acte 3 de la décentralisation est une réforme consacrant la communalisation universelle. Elle vise par ailleurs à organiser le Sénégal ‘’en territoires viables, compétitifs et porteurs de développement durable à l’horizon 2022’’, selon le chef de l’Etat Macky Sall.
Malgré toutes les difficultés auxquelles elle se trouve confrontée, la commune de Kaël parvient à faire des aménagements budgétaires pour faire face à ses missions prioritaires notamment en matière d’éducation et de santé.
’’Nous avons dans la commune de Kaël 6 écoles élémentaires dont 4 ont été construites sous notre magistère de 2009 à maintenant. On a un collège d’enseignement aussi’’, a indiqué El Hadj Bâ selon qui Kaël compte aussi se doter d’un lycée à court et moyen terme.
Dans le même esprit, la commune a entrepris de faire un maillage sanitaire de son territoire à travers la construction de cases de santé en vue d’améliorer l’offre de soins au bénéfice en particulier des populations des villages un peu plus éloignés du chef-lieu de la commune, selon M. Bâ.
Il a signalé que le poste de santé dont dispose la commune avait été construit avec l’appui d’une société d’assurance.
Concernant le volet hydraulique, l’édile note avec satisfaction que sa commune a atteint un taux de 95 % en matière d’adduction d’eau. Son forage d’une capacité de 700 mètres cube date de 1982, la commune souhaite être approvisionné en eau de meilleure qualité.
L’accès à l’électricité reste par contre un gros problème dans cette commune peu électrifiée, selon son maire.
Dans le but de répondre par ailleurs à la demande de ses fils, la commune de Kaël envisage de faire un lotissement pour mieux faciliter leur retour au bercail.
‘’Nous avons fait un lotissement en 2009 et nous comptons en faire un second bientôt avec des zones de pâturage, des zones d’habitation et des zones de cultures. On est obligé de gérer les trois zones’’, a-t-il annoncé.
La zone de pâturage devrait ainsi permettre une meilleure coexistence entre les éleveurs et agriculteurs.
Malgré le manque de moyens et les difficultés rencontrées par la commune pour trouver des partenaires prêts à financer ses investissements, les autorités municipales refusent de baisser les bras.
Pour ce faire, elles comptent sur le dynamisme des femmes en particulier à travers les associations de développement pour renverser la tendance par la multiplication d’activités génératrices de revenus.
‘’Les dames se sont érigées en groupements pour travailler pour le développement de la commune et il en existe beaucoup’’, affirme Assane Ka, premier adjoint du maire.
Selon M. Ka, par ailleurs président du CLCOP (cadre local de concertation des organisations de producteurs), une très grande partie de la gente féminine peut se prévaloir de capacités nécessaires en matière de transformation de céréales et de lait.
Ces femmes qui se battent comme des ‘’lionnes’’ ont pu gagner des ressources importantes à travers les fonds revolving (crédit permanent remboursé automatiquement au fur et à mesure que le particulier rembourse son emprunt). ’’Elles travaillent, elles transforment, et je crois qu’elles sont sur la bonne voie et elles ont une fortune qui leur permettra de mener beaucoup d’activités’’, a-t-il dit.
Ce dynamisme se trouve pourtant freiné par l’enclavement de la commune de Kaël, une difficulté supplémentaire pour le développement de ses activités en matière d’agriculture et d’élevage.
’’Par exemple, pour écouler leurs marchandises, leur bétail, nos parents se déplacent vers Tip, Mbacké ou Touba pour régler ces problèmes’’, souligne le premier adjoint du maire de Kaël.
LE SÉNÉGAL OFFRE UN PASSEPORT DIPLOMATIQUE À ACHILLE MBEMBE
Le document de voyage de couleur bleue a été remis au philisophe camerounais lors de son récent séjour à Dakar, à la grande fierté de ses compatriotes camerouanais
Cameroon-Info.Net |
Pierre Arnaud NTCHAPDA |
Publication 25/11/2019
L’intellectuel vient de séjourner à Dakar. Il devrait ainsi éviter les contrecoups des tracasseries liées au renouvellement de son passeport ordinaire camerounais.
C’est un Achille Mbembe fier qui a présenté son passeport diplomatique sénégalais le 21 novembre 2019 sur les réseaux sociaux. Le document de voyage de couleur bleue lui a été remis lors de son récent séjour à Dakar. Cette action du gouvernement sénégalais suscite la fierté chez certains intellectuels camerounais. A l’instar du journaliste Jean-François Channon. Le directeur de publication du quotidien Le Messager écrit sur Internet : « Voilà. Quand vous ne reconnaissez pas la valeur de cet homme, Achille Mbembe, l'un des intellectuels africains les plus influents dans le monde, eh beh les autres le reconnaissent. Et c'est bien ainsi. Et nous serons là dans là dans nos petits vals entrain d'adorer des figures irréalistes et un homme de plus en plus déclinant que nous voulons déifier. Les autres voient en Achille Mbembe comme hier en Fabien Eboussi Boulaga, Mongo Béti des figures qu'ils nous envient. Dommage. Le Sénégal est un grand pays qui sait attirer les valeurs. Achille a donc un passeport diplomatique. Au Cameroun les diplômés organiques du système Biya, les élites incompétente et corrompue vous diront que "et puis?" Aka. Restez avec votre dictature là. Ailleurs les gens travaillent en Afrique et avancent. »
Entre autres avantages que pourrait procurer à l’historien et philosophe camerounais son nouveau document de voyage, il y a la facilitation de ses déplacements que l’on sait nombreux. Son passeport diplomatique éviterait à l’intellectuel la longue attente qu’occasionne chaque renouvellement de son passeport camerounais (parfois jusqu’à 6 mois). Des tracasseries qu’il décrivait dans le texte ci-dessous publié le 8 février 2018 :
PASSEPORT ET FARDEAU DE LA NATIONALITÉ
Je rentre de ce pas de Pretoria. Je m'etais rendu aupres du Haut Commissariat du Cameroun en Afrique du Sud dans le but de deposer une demande de renouvellement de mon passeport.
L'histoire du passeport au Cameroun, tout comme celle de la carte d'identite, restent a ecrire. Mon tout premier passeport, c'est au tout début des années 1980 que je l'obtins. Etudiant à l'époque, je militais au sein de la Jeunesse Etudiante Catholique (JEC). Avec deux autres collègues (dont l'abbe Jean-Louis Akpa), je devais me rendre a Dar-es-Salam (Tanzanie) pour y prendre part à une réunion panafricaine des mouvements JEC.
C'est d'ailleurs à Dar-es-Salam que je rencontrai Jean-Marc Ela pour la toute première fois. Avec Mgr Peter Sarpong du Ghana, il avait été choisi comme le théologien de la conference. A l'occasion, il proposa une puissante reflexion sur le thème: "De l'assistance a la liberation: les taches de l'Eglise en milieu africain" qui fit, quelques mois plus tard, l'objet d'une publication dans "Foi et developpement", le bulletin du Centre Lebret a Paris. C'est également à l'occasion de ce voyage que nous rencontrames Julius Nyerere. Il nous recut dans son palais, a la verite un batiment blanc, datant de l'epoque coloniale et situe non loin de l'Ocean indien.
A l'époque, obtenir un passeport signifiait que l'on était en odeur de sainteté au regard du regime en place, celui de M. Ahmadou Ahidjo. La demande de passeport avait été facilitée par les services de la Procure catholique de l'archidiocese de Yaoundé. C'est elle qui s'occupa également de l'obtention des visas. J'ai encore sous mes yeux une photocopie de ce document délivré par 'La Republique Unie du Cameroun', avec la signature du Commissaire à l'Emi-Immigration, Etoa Antoine Marie.
En ces temps-la, tout Camerounais desirant voyager a l'etranger avait besoin d'un "visa de sortie" en bonne et due forme. Le document constituait un élément du dispositif de controle que le pouvoir politique cherchait à exercer sur les citoyens.
Au regard de la loi, la liberte d'aller et de venir n'etait qu'une fiction. Du reste, durant une grande partie de mon enfance et de mon adolescence, du moins dans l'ancienne région de la Sanaga Maritime, le commandement apparaissait de facon privilegiee sous trois signatures terrifiantes - le releve d'impot, la carte d'identite et le laissez-passer.
Le Haut Commissariat du Cameroun a Pretoria est un lieu tout a fait paisible. On est recu correctement, et les fonctionnaires s'efforcent d'exercer leur metier avec professionalisme et courtoisie - ce qui, dans l'habitus du pays (un melange d'esbrouffe, d'informelle convivialite, d'hilarite et de brutalite), est plutot surprenant.
Une bonne partie du personnel du Haut Commissariat vient du Cameroun occidental (anglophone). En realite, ils sont tous bilingues et s'expriment parfaitement dans les deux langues officielles.
Ce matin, il n'y avait pas grand monde dans le petit hall d'entree - quelques demandeurs de visas, et surtout des concitoyens cherchant à renouveler leurs passeports.
Contrairement à certains Etats africains qui octroient des passeports a leurs ressortissants dans leurs consulats à l'étranger, tous les documents officiels en relation avec l'identification des Camerounais doivent être acheminés à Yaounde. Ceci provoque évidemment d'interminables délais. La bonne volonté des agents et leur professionalisme ne suffisent manifestement pas.
On compte au minimum 125 000 Camerounais établis en Afrique du Sud. Ils ont besoin d'actes de naissance, d'actes de mariage, de cartes d'identites, de passeports qu'il faut sans cesse renouveler puisque les Camerounais ont besoin de visas dans presque tous les pays du monde, etc... Toutes les conditions sont donc réunies pour une activite consulaire intense, voire financierement profitable.
Imaginez un instant. Pour un passeport de plus de 40 pages, 25% de plus. Pour un service express, 50% de frais supplementaires. La qualité du service serait améliorée. L'Etat bénéficierait d'amples revenus. Le consulat pourrait à la limite s'autofinancer.
Le personnel, tres devoue, s'efforce de repondre a ces besoins et de gerer les attentes. Mais il ne constitue qu'un petit bout d'une lourde chaine aussi impersonnelle que distante.
Et donc ce matin, il s'avere que le renouvellement du passeport risque d'etre, une fois de plus, un long chemin de croix. La derniere fois, j';ai du attendre six mois. Et encore, je ne vous dis pas tout ...
Pour l'instant, peu importent les urgences. Apparemment, la machine est a court de "cartons"... et de ... timbres fiscaux.
Comment se fait-il qu'un Etat souverain, en plein XXIe siecle, soit en manque de passeports et de timbres fiscaux ?
Tout ca, m'explique-t-on, est "fabrique à l'étranger".
Plus de cinquante ans apres la decolonisation !
DES CAMPS DE L'ONU PRIS POUR CIBLE PAR DES MANIFESTANTS APRES UN MASSACRE DE CIVILS
Des centaines de manifestants se sont soulevés en RD Congo pour protester contre "l'inaction" de l'armée congolaise et des Casques bleus onusiens après le massacre, dans la nuit de dimanche à lundi, de huit civils à Béni, dans l'est du pays.
Des centaines de manifestants se sont soulevés en RD Congo pour protester contre "l'inaction" de l'armée congolaise et des Casques bleus onusiens après le massacre, dans la nuit de dimanche à lundi, de huit civils à Béni, dans l'est du pays. La mairie et deux camps de l'ONU ont été attaqués.
Les forces de sécurité congolaises tiraient à balles réelles, lundi 25 novembre dans la matinée, à Beni, dans l'est de la République démocratique du Congo (RD Congo), pour contenir des manifestants qui ont attaqué deux camps des Nations unies, a constaté un correspondant de l'AFP.
La police et l'armée congolaise ont ouvert le feu à proximité des camps de l'ONU, visiblement pour tenter de disperser des centaines de manifestants en colère après un nouveau massacre dans la nuit de huit civils à Beni attribué au groupe armé des Forces démocratiques alliées (ADF).
Deux policiers ont été blessés et saignaient abondamment, a constaté le correspondant de l'AFP. De même source, deux hélicoptères des Nations unies survolaient Beni. Deux autres hélicoptères de l'ONU se sont brièvement posés dans l'un des deux camps attaqués, avant de repartir et des manifestants sont parvenus à envahir l’un des deux camps.
"Des manifestants ont cassé des murs d'enceinte d'un de nos bureaux. Des maisons du personnel des Nations unies ont été attaquées et vandalisées", a détaillé une porte-parole de la Monusco, évoquant des tirs en réponse de la police et de l'armée congolaises.
Avant de s'attaquer aux camps onusiens, proches l'un de l'autre, les habitants en colère ont mis le feu à l'autre bout de la ville à la mairie de Beni, qui a été partiellement incendiée, selon le correspondant de l'AFP.
"L'inaction" de l'armée congolaise et des Casques bleus dénoncée par les habitants
Les habitants de Beni dénoncent depuis jeudi "l'inaction" de l'armée congolaise et des Casques bleus face aux tueries à répétition attribuées aux ADF dans la région. Un manifestant a été tué samedi par la police.
Huit personnes ont été massacrées dans la nuit de dimanche à lundi à Beni, ont indiqué plusieurs sources. Au total, 77 civils ont été tués depuis le 5 novembre à Beni et ses environs (Nord-Kivu), d'après les dernières statistiques du baromètre sécuritaire du Kivu du Groupe d'Étude du Congo (GEC).
Il s'agit, d'après les experts, de représailles des ADF après les opérations militaires annoncées contre leurs bases le 30 octobre par l'armée congolaise. Celle-ci a lancé ses opérations contre le groupe de manière unilatérale, sans demander le renfort des Casques bleus de la Monusco.
À l'origine, les ADF sont des rebelles ougandais musulmans hostiles au président Yoweri Museveni, qui se sont repliés dans l'est de l'actuelle RD Congo, en 1995.
« CE SONT LES ÉLITES POLITIQUES QUI ONT FAILLI »
La jeunesse et la lecture, sa famille et la musique, la politique et le politique, le sort des « doomu jitlé » dans son village de Niodior... Felwine Sarr, auteur d'Afrotopia se livre dans cet entretien
Véritable touche-à-tout, Felwine Sarr sait aussi parler de politique, de lecture, de musique, de sport ou encore (un peu) de football. Dans cet entretien réalisé en marge du tournage du Jury du Dimanche auquel il était invité, l’auteur d’Afrotopia une autre partie de lui, de sa famille, de ses tentations politiques...
Felwine, la triste actualité du décès de Colette Senghor, veuve de Léopold Sédar Senghor, a fait ressurgir un vieux débat, celui du transfert de la tombe l’ancien président de la République de Dakar vers Joal. Par ricochet, quelqu’un comme Alioune Tine en a profité pour demander également celui de la tombe de l’héroïne Aline Sitoë Diatta de Tombouctou (Mali) à son Kabrousse natal. Quelle importance peuvent avoir de tels mouvements dans la représentation populaire ?
« Quand ce sont de figures historiques comme Aline Sitoé Diatta, qui est une figure de la résistance en Casamance, qui est morte jeune, et dont le corps est à Tombouctou, je comprends parfaitement le sens patrimonial et historique que c’est de le ramener à Kabrousse. Que cela puisse être un lieu de mémoire, un sanctuaire, qu’on puisse construire un récit autour de ça, etc. Quand ce sont des personnages bien qu’importants, historiques, mais dont la question a été réglée par la famille - je pense que la famille Senghor a discuté en interne et a décidé puisqu’il y avait eu un débat quand le président est décédé, est-ce qu’on va l’amener à Joal ou le laisser à Dakar, l’enterrer à Bel Air, à côté de son fils Philippe, et pour des raisons qui leur appartiennent ? -, je pense qu’on devrait aussi respecter les raisons de la famille et comprendre aussi que c’est important, que c’est intime.
La question, c’est : où est la différence entre la part de l’histoire, (celle) de la société, et du privé. Quand est-ce qu’on doit considérer que ces affaires doivent d’abord être réglées par le cercle intime ou qu’elles dépassent ce cercle intime et sont un enjeu national ? C’est une question qui n’est pas simple. Il y a beaucoup de penseurs, d’historiens, de philosophes, de figures dont les corps ont été enterrés quelque part et la Nation a voulu les patrimonialiser, et les restes ont été déplacés dans un panthéon un peu plus tard parce que c’était devenu des figures de la Nation. C’est une question qui n’est certainement pas simple. Mais moi, je suis d’avis que l’on écoute le souhait des proches, et des intimes dans un premier temps ».
Lors de l’édition 2019 des "Ateliers de la pensée", que vous avez organisés à Dakar, il y eut une présence remarquée de jeunes lycéens au moment où l’on constate de plus en plus le déficit d’intérêt que la recherche et la lecture constituent pour les jeunes et même pour les élites. On en vient même à se demander s’il n’y a pas une certaine faillite de nos élites intellectuelles dans la recherche et la production qui auraient pu avoir pour conséquence d’attirer les plus jeunes vers la lecture et de s’approprier cette production locale ?
« Oui, je pense qu’on peut toujours faire mieux que ce que nous faisons. Mais je pense aussi que nous les intellectuels, on est souvent accusé très lourdement de tous les maux de la société. Je pense que ce sont les élites politiques qui ont failli. Les élites politiques peuvent mettre en place une politique du livre adéquate. Combien de bibliothèques existent dans le pays ? Il n’y a même pas de bibliothèque nationale. Combien de médiathèques ? Quand vous habitez un quartier, si vous avez un désir de lire, vous allez où ? Quand vous habitez au Plateau, vous allez au Centre culturel français ou au Centre culturel américain. Où sont les bibliothèques municipales, nationales ? Il y a la concurrence des nouveaux médias, l’écran, le digital… Il y a toute une offre culturelle là-dessus. On peut aussi réfléchir à des formats où on va les rejoindre dans les formats qui les intéressent, et les amener à la lecture, dans leurs formats à eux.
Même dans les formats classiques, je pense qu’il y a un déficit d’une politique infrastructurelle sérieuse pour mettre à la disposition du plus grand nombre un certain nombre de productions, et ces productions, elles existent. Elles sont des fois confidentielles ou mal éditées, on a du mal à les trouver mais elles existent. Lorsque vous creusez, vous vous rendez compte que les gens ont produit énormément de choses. Une fraction de cette production est mise en lumière parce qu’elle a été produite dans des maisons d’édition qui ont une aura, un bon réseau de distribution mais une grande fraction est là, dans les bibliothèques universitaires, dans des maisons d’édition, dans d’autres lieux… et qui n’est pas diffusée. Il y a un travail à faire pour diffuser ce qui existe. Ayant été libraire, il y a quelques années, j’ai bien vu que la production existait mais qu’elle était mal diffusée, qu’on n’y avait pas accès et il y avait un problème d’écosystème et d’écologie, pour disséminer tout ça. »
Vous avez évoqué les médias, mais nous avons ouï dire que vous n’aimez pas trop la télévision, que vous ne la regardez pas du tout. Est-ce vrai ? Et si oui, pourquoi ?
« Je n’ai pas de téléviseur et j’avais choisi comme option éducationnelle de ne pas avoir de télé pour mes enfants. Parce que je trouvais qu’il y avait une prépondérance de programmes qui n’étaient pas des programmes d’éveil, d’éducation. Et en plus, ça vous scotche pendant des heures et des heures devant beaucoup de divertissements. Bien sûr, le divertissement est important mais pas que. Et je trouve que la télé pourrait jouer un rôle beaucoup plus intéressant dans l’éducation et dans l’édification qu’elle ne le fait. J’ai choisi d’autres supports plutôt que la télé. »
Vous dites également que les intellectuels sont accusés de tous les maux dont souffre la société. Le constat est là aussi que beaucoup d’entre eux finissent par faire le grand saut vers le champ politique au point d’en arriver à se renier. A vos yeux, est-ce vraiment antinomique dans le contexte de nos sociétés ? Et d’un côté personnel, est-ce qu’il y a une fenêtre politique qui pourrait s’ouvrir un jour pour Felwine ? Est-il possible de vous voir faire ce saut ?
« (Léopold Sédar) Senghor était un intellectuel et un politique. Et je pense qu’il a été quand même un bon intellectuel et un bon politique. Aimé Césaire était un intellectuel et un politique. Je ne suis pas sûr qu’il ait été un extraordinaire politique, mais il a été un homme politique à l’Assemblée qui a été extraordinaire mais je ne suis pas sûr à Fort-de-France, le fait qu’il soit resté maire longtemps, était une bonne chose. Cheikh Anta Diop était un intellectuel et un politique, qui a réussi son œuvre intellectuelle, qui n’a pas accédé au pouvoir d’un point de vue politique. Cette tentation-là, elle existe, à un moment de se dire : "J’ai les idées, et je vais être du côté de la mise en œuvre." Je pense qu’elle est noble en cela, je distingue ceux-là des intellectuels qui vont aux mangeoires, ceux-là qui ne veulent pas transformer la société, mais qui veulent juste des postes, et des strapontins, et pour plaire au prince. Je distingue ceux-là de gens qui, dans l’histoire de la pensée, à un moment donné, ont estimé qu’ils devaient aller agir.
Pour l’instant, ce n’est du tout mon cas et rassurez-vous je ne compte pas rentrer dans un gouvernement présidentiel. Mais il m’arrive de penser que, peut-être, il faut que je travaille à un mouvement politique radical, alternatif, de gauche, humaniste, et qui agglomérerait beaucoup de gens et qui donnerait un souffle à cet engagement. L’engagement politique dans le sens noble du terme. Parce que pour moi le politique, il dépasse la politique. Pour moi, ce que je fais est déjà politique : Les idées, le travail que je fais. La question qui m’intéresse, c’est où est-ce que je suis utile ? Et pour l’instant, je me sens très utile dans l’espace où je suis. Et je ne le troquerai pour rien pour un espace où je ne me sentirai pas utile. Parce que ce serait un espace soi-disant gouvernemental. Donc, oui qui sait ? Mais ce n’est pas, pour l’heure, à l’ordre du jour. »
Vous êtes également de Niodior, un village sérère au cœur des magnifiques îles du Saloum, comme la brillante écrivaine Fatou Diome dont des propos sur le sort des « doomu jitlé » (qu’elle avait d’ailleurs mal traduit en « enfant illégitime ») tirés d’une interview avec Le Monde avaient suscité une vive polémique au sein de la communauté sérère de façon générale et chez les ressortissants de Niodior en particulier. Aviez-vous suivi ce débat et quel avis en a eu Felwine l’intellectuel et Felwine le Serer originaire de Niodior ?
« J’ai suivi le débat. Je pense que Fatou Diome, dans l’interview, a, au passage, rapidement dit : « Je remercie ma grand-mère, car sans elle, j’aurai pu être étouffée », etc. (Ndlr Ce qu’elle dit, entre autres passages : "…J’étais supposée être « l’enfant du péché ». Je dois la vie sauve à ma grand-mère maternelle, qui m’a accueillie au monde, dans tous les sens du terme. C’est elle qui a fait la sage-femme. Elle aurait pu m’étouffer à la naissance comme le voulait la tradition, mais elle a décidé de me laisser vivre et de m’élever.") Et les Niodiorois, les Niominkas (Ndlr : un groupe des Serers, principalement pêcheurs, qui vivent dans les îles et sur les côtes sénégalaises et gambiennes), l’ont pris comme une généralisation du propos à toute la communauté. Certains ont été offusqués parce qu’on aurait pu l’entendre comme quoi tous les enfants illégitimes sont étouffés, comme une pratique sociale, etc.
Ça pose toujours la question de la subjectivité du rapport de l’écrivain à sa propre histoire, et à la lecture de la communauté à une histoire individuelle. Je connais bien Fatou Diome, non seulement elle habite à Niodior mais elle est ma cousine germaine. Elle est de ma famille. Elle et moi avons grandi dans la même concession. Fatou Diome, sa mère est la petite sœur de mon père. Sa mère vient juste après mon père. Donc, sa grand-mère, celle qu’elle décrit, c’est aussi ma grand-mère. Donc, je connais bien son histoire individuelle. Il faut juste distinguer les deux. Et quand elle revient sur son histoire, elle parle de son histoire, et elle parle de sa lecture de son histoire. Il y a un processus de subjectivation de son histoire. Je pense qu’il ne faut pas considérer que ce qu’elle raconte, ce qui est valable pour elle, comment elle a vu sa propre, c’est ce qui a cours en pays sérère et ce n’y est pas une pratique sociale. Il faut donc distinguer le discours individuel et la pratique sociale. »
On reste dans ton cercle familial pour parler d’autres de ses membres peut-être moins connus que Fatou Diome et vous mais qui ont un parcours assez atypique. Comme Alibeta, Rhapsod, Majnun, Sahad… Qu’est-ce qui fait la particularité de cette famille qui baigne dans la culture, l’art et l’éducation ?
« La plupart de mes frères et sœurs sont d’excellents musiciens, ils sont brillants. Alibéta est un cinéaste et musicien. Il y a Majnun qui a joué hier, il a fait un super concert. J’ai une sœur qui est en France, qui s’appelle Taye. Il y a Sahad que les gens connaissent. Il y a Rhapsod... J’ai le plus grand bonheur d’appartenir à une famille de gens très créatifs et qui chacun dans son domaine développe une grande créativité. »
Mais d’où est venu le rapport si particulier de cette famille à la musique ?
« Mon père était un militaire, et moi, je suis l’aîné de la famille. C’est moi qui ai amené le virus de la musique dans la famille. Quand j’étais étudiant, je jouais de la guitare, et j’apprenais à mes frangins à jouer. A chaque fois que je venais en vacances, je leur apportais une guitare, et on passait l’été à jouer. Puis un jour, je me suis réveillé et ils avaient tous développé leur art, ils étaient tous devenus très forts. Ils avaient tous des univers distincts, et ils ont développé un projet et une carrière musicale vraiment remarquable. Je suis moi-même impressionné d’en voir autant, il y a l’unité, des thèmes qu’on partage ensemble, il y a de l’exigence, un amour du continent, un souci du continent qui est absolument là, un souci de nos cultures mais chacun a développé une esthétique qui lui est propre. Et c’est ça qui est intéressant. Vous allez voir Sahad, vous allez voir Alibeta, Taye ou Majnun, ce n’est pas le même concert. Vous allez voir Rhapsod, ce n’est pas le même registre. Il y a l’unité mais c’est totalement différent. Et ce que j’ai trouvé moi assez remarquable, c’est que chacun ait pu développer son art et le porter à un niveau très poussé de maitrise. Il y a quelque chose qui est assez énigmatique. »
Justement, quel regard portez-vous sur la musique sénégalaise ?
« Je trouve qu’elle est très créative, et qu’il y a, dans ce qu’on appelle l’underground, dans la scène alternative, beaucoup de choses très intéressantes. Le problème pour moi, c’est qu’il y ait eu la mainmise du ’’mbalax’’ sur tout et que le ’’mbalax’’, qui est intéressant, ait dominé largement et éclipsé toutes les autres formes de musiques alternatives y compris les musiques traditionnelles, diola, sérère, pular, baynouk… qui sont des tréfonds de richesse et de culture. Le Touré Kounda a beaucoup puisé dans ce patrimoine-là. Bien sûr, il n’a pas fait que puiser, il a retravaillé, réinvesti… Je trouve qu’il y a une grande richesse qui existe dans les cultures musicales du pays, qui est sous-exploitée. Mais je trouve également que la scène hip hop est intéressante, la scène qu’on appelle afro acoustique aussi l’est, et il y a des choses extraordinaires qui s’y font. Notre problème, c’est qu’on a un problème de label, de réseau de distribution, etc.
Un peu comme ce que vous disiez pour les livres ?
« Oui, exactement. Il y a une grande créativité, mais il manque des industries culturelles créatives qui mettraient en réseau tout ça et qui feraient en sorte que les artistes puissent vivre de leur art, qu’ils aient de vrais marchés, de vrais débouchés, une vraie scène, etc. »
On on connait Felwine l’économiste, l’enseignant, le philosophe, l’écrivain… On a parlé du Felwine musicien, Felwine le chercheur en histoire a occupé l’espace médiatique ces derniers jours… On vous sait touche à tout. Mais jusqu’à quel point ? Y a-t-il un Felwine sportif, pour boucler la boucle ?
« Je suis un maître d’arts martiaux. J’enseigne le karaté et je pratique ça depuis 30 ans. Et j’ai eu beaucoup de dojos. Le sport est très important pour moi. »
Ah ! Étonnez-nous encore. Il n’y a que les arts martiaux à votre arc de sportif ou il y en a d’autres que nous ignorons ?
« Je pratique principalement les arts martiaux, c’est ce que je fais depuis que j’ai 10 ou 12 ans. Et je n’ai pas arrêté. Mais j’étais athlète également, un coureur de fond. Quand j’avais 16 ans, j’avais remporté le semi-marathon à Dakar, le 22 Km. Donc, je couplais et les arts martiaux, et la course de fond. Ce sont deux pratiques que j’ai faites durant toute ma vie. J’en suis arrivé à être ceinture noire, enseignant des arts martiaux. Je continue à pratiquer. Le foot, je le regarde quand l’équipe du Sénégal joue la Coupe du monde ou la Coupe d’Afrique, je regarde. Je ne regarde pas la Champions League, je ne suis pas un mordu de foot. Bien sûr je regarde Sadio Mané de temps à autre, mais il n’y a que l’équipe nationale qui me met devant un téléviseur pendant des heures. D’ailleurs, est-ce que Sadio Mané a eu le Ballon d’Or ? Ou pas encore ? »
Ce sera le 2 décembre. Vous pensez qu’il pourrait l’avoir ?
« J’espère qu’il l’aura. Je pense qu’il doit l’avoir… Mais bon, ça ne dépend pas que de lui. D’ailleurs, lors du dernier vote, apparemment les Africains n’avaient pas beaucoup voté pour lui (Ndlr : référence faite au vote dévoilé pour le trophée Fifa The Best). »
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SÉNÉGAL VERT, HORIZON 2035
Premier documentaire environnemental sur le Sénégal, réalisé par de jeunes Sénégalais et 100% autofinancé. Le film retrace la situation environnementale du pays depuis les indépendances et alerte sur le péril déjà là - BANDE ANNONCE
Cela démarre en décembre 2018, lorsque le site d'information SenePlus, lance l'initiative #Enjeux2019. Il s’agissait en effet, de proposer à des personnes de la société civile, des experts ou tout simplement des personnes intéressées, d’écrire sur des thématiques sociétaux afin d'interpeller les candidats à la dernière élection présidentielle.
Mamadou Sakho, jeune activiste très actif dans la défense de la cause environnementale s’est donc prêté au jeu à travers son texte intitulé « Sénégal vert, horizon 2035 », un plaidoyer retraçant la situation environnementale du pays, des indépendances à nos jours, avec l’espoir que l’horizon 2035 qui est l'épilogue du plan de développement du président Macky Sall, prenne également en compte les aspects de protection de l’environnement. Même si le titre parle d’un Sénégal vert, il y a dans le texte, un focus sur Dakar que l’auteur justifie en ces termes :
MS : « Lorsque l’on parle d’un Sénégal vert, il serait effectivement plus juste de traiter l’ensemble du territoire mais Dakar reste la capitale et la vitrine du pays. Toute initiative prise en son sein serait de facto à appliquer sur l’ensemble du territoire ».
L’éditorial a bien évidemment fait son chemin avec la proposition d'un pacte pour l’environnement envoyé aux candidats de l’élection présidentielle de février 2019 ou encore un partage viral sur tweeter de la proposition de faire de l’ancien aéroport Leopold Sédar Senghor, un parc national protégé où l’on pourrait réintroduire des espèces animales et végétales, une sorte de « central parc » Dakarois.
De l’écrit au documentaire car un adage dit qu’une image vaut mille mots
Mamadou Sakho nous explique qu’il y avait selon lui une opportunité de passer de l’écrit à l’image et de se lancer dans un projet de documentaire, afin d’interpeller les Sénégalais sur la dégradation de l’environnement, ses causes, ses conséquences et les actions à mener pour la préserver. Très vite avec ses amis et des moyens limités, il a décidé de commencer le tournage.
Il dit être inspiré par la fameuse citation de John Fietzgerald Kennedy disant : "Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays."
Mamadou Sakho : Aujourd’hui l’environnement se dégrade et malgré mes petits moyens, j’ai voulu apporter ma pierre à l’édifice. On ne compte plus le nombre de maladies dues à la pollution de l’air, des arcs-en-ciel de sachets plastiques jonchent nos villes, la déforestation et le manque d’arbres perturbent les pluies, sans parler de la dégradation et de l’accaparement du littoral qui font de Dakar une presqu’île où il devient difficile de voir la mer. »
Des personnalités ont accepté de participer au documentaire, comme madame le maire de Dakar, Soham El Wardini ou encore le professeur Djiby Diakhaté qui donne un œil sociologique sur la situation environnementale du pays.
Une projection officielle est prévue en février 2020 lors de laquelle, les acteurs qui œuvrent pour des villes durables et notamment les jeunes startups seront mis en avant. Ensuite, une tournée nationale de projections et un programme sur différentes thématiques liées à l’environnement sera également organisée.
En attendant de voir le documentaire complet, voici donc le teaser qui nous montre ce qu’un jeune patriote et investi peut faire pour l’avancement de son pays.
OUMAR SARR RÉPLIQUE À WADE
L’Alliance Suqali Sopi estime que la note constatant la démission de fait d'Oumar Sarr est «nulle et non avenue» et que le secrétaire général du PDS n’en est pas l’auteur
L’Alliance suqali sopi a réagi à la note de Abdoulaye Wade qui considère que Oumar Sarr a démissionné de fait. Le mouvement estime qu’elle est «nulle et non avenue» et que le secrétaire général du Pds n’en est pas l’auteur. Me El Hadj Amadou Sall et Cie assument tous les actes posés par l’ancien secrétaire général adjoint du Pds et tirent sur Karim.
C’est une réplique à la sortie de Abdoulaye Wade qui considère que Oumar Sarr a démissionné de fait du Pds. L’Alliance suqali sopi juge d’abord la «note circulaire» du secrétaire général du Pds «nulle et non avenue» parce que «décousue, mal rédigée, comportant de graves fautes de syntaxe et de forme, massacrant les dispositions des statuts de notre part». Oumar Sarr et ses camarades frondeurs en concluent que cette note «ne peut émaner de Me Abdoulaye Wade, connu pour la finesse de ses propos et la justesse de son écriture». Point par point, le directoire provisoire de l’Alliance suqali sopi répond aux griefs soulevés par Me Wade. Sur sa participation à l’ouverture du dialogue national sans avoir eu l’autorisation du parti, le mouvement estime qu’«il est surtout heureux que le frère Oumar Sarr ait publiquement déclaré à cette séance d’ouverture qu’il n’engageait pas le parti. On ne peut donc lui reprocher ce qu’il n’a pas fait». Puis, le communiqué ayant sanctionné la réunion dudit mouvement samedi rappelle que l’Alliance suqali sopi a été «admise en tant que mouvement au Front de résistance nationale de l’opposition et y est représentée par Oumar Sarr ès qualité, comme y sont représentés des mouvements karimistes qui mènent leurs activités librement en se réunissant dans leurs sièges connus de tous».
De la même manière, ajoutent les frondeurs, il «mène ses activités et a décidé d’ouvrir une permanence nationale à Dakar, et des permanences secondaires le cas échéant». Toujours dans sa conviction que Wade n’est pas le rédacteur de cette note, le mouvement trouve que «l’effigie de Me Wade est du domaine public et ceux qui sont attachés à sa personne, comme les autres d’ailleurs, l’utilisent sans demander son autorisation». Et encore que, précisent-ils, «il n’a jamais été interdit à personne d’utiliser sa photo ou son effigie, les symboles et couleurs du Pds appartenant à tous ses militants, y compris nous qui en sommes d’authentiques».
«Les encagoulés pleurnichards font signer un acte illégal à Wade»
En somme, l’Alliance suqali sopi dit assumer tous les actes posés par Oumar Sarr et l’accompagne dans toutes les activités qu’il mène au nom de notre mouvement et n’entend pas «se laisser distraire par ceux qui n’ont plus le courage d’assumer leurs positions politiques en se mettant sous le manteau de Me Abdoulaye Wade qui, manifestement, ne peut plus s’opposer aux désirs de son fils Karim Wade». L’ancien coordonnateur nationale du Pds et ses hommes en rajoutent une couche d’ailleurs et sans doute une autre pique à Wade-fils : «Au moment même où le frère Abdoulaye Wade se réconcilie avec Macky Sall, dont on se souvient des propos qu’il a tenus à son égard, se réconcilie avec le frère Madické Niang et va au domicilie du frère Pape Diop pour lui présenter ses condoléances, les encagoulés pleurnichards lui font signer un acte illégal qu’ils ont rédigé à la hâte en faisant la preuve de leur totale ignorance des statuts et du règlement intérieur du Pds.»
L’Alliance suxali sopi, qui ne souhaiterait pas saisir la justice pour l’instant, avertir qu’elle «n’hésitera plus à agir si les cagoulards n’arrêtent pas de compromettre le secrétaire général national en l’impliquant dans des batailles qui ne sont plus les siennes». Selon ses animateurs, l’ancien Président doit «jouer le rôle qui est le sien, fondé sur une neutralité, gage de démocratie interne et de consolidation des acquis de notre parti dont l’objectif ultime est la reconquête du pouvoir et parachever le Sopi dans un Sénégal indépendant et prospère».
UN MAÎTRE CORANIQUE ARRÊTÉ À COKI
Khadim Guèye maltraitait des gamins à l’aide de chaines en fer
L’image, qui a fait le tour du monde, est insoutenable : un talibé enchaîné par son maitre. Mais, l’auteur de ces pratiques esclavagistes a été arrêté à Coki, samedi, pour mauvais traitements sur ses élèves à Ndiayène, un village proche de Coki.
Khadim Guèye maltraitait ces gamins à l’aide de chaines en fer. Le maître coranique et les parents des enfant sont été tous arrêtés par la gendarmerie. Cependant, on a appris que de fortes pressions seraient exercées sur la justice pour le
faire libérer.