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10 octobre 2025
"LE DISCOURS FRANÇAIS ENVERS L'AFRIQUE EST HYPOCRITE"
Alain Mabanckou dont les «Huit Leçons sur l’Afrique» sortent ce mercredi en librairie, lutte contre les idées reçues sur la production littéraire et culturelle africaine. Pas convaincu par la fin annoncée du FCFA, il milite pour une indépendance monétaire
Libération |
Catherine Calvet et Maria Malagardis |
Publication 08/01/2020
L’écrivain, dont les «Huit Leçons sur l’Afrique» données au Collège de France sortent ce mercredi en librairie, lutte sans relâche contre les idées reçues, notamment sur la production littéraire et culturelle de ce qu’il nomme le «continent de la langue française». Pas vraiment convaincu par la fin annoncée du franc CFA, il milite pour une indépendance monétaire.
Sa leçon inaugurale au Collège de France, en mars 2016, lui avait valu une standing ovation dans un tonnerre d’applaudissements comme l’amphitéâtre Marguerite-de-Navarre n’en avait peut-être jamais connu. Talentueux écrivain d’origine congolaise, auteur de près d’une dizaine de romans et âgé de 53 ans, Alain Mabanckou a apporté un indéniable souffle de fraîcheur et d’humour dans l’enceinte de cette vénérable institution. Cette année-là, il fut le premier écrivain à occuper la chaire de création artistique. Du haut de son perchoir, il sut aussi offrir aux connaissances littéraires de l’Afrique contemporaine la tribune qu’elles méritaient depuis longtemps. Ces «Leçons» sortent ce mercredi en librairie, enrichies de textes plus polémiques prononcés par l’auteur, avec notamment une lettre assez piquante destinée à Emmanuel Macron. Car ce romancier, qui enseigne la littérature à l’université de Los Angeles, est depuis toujours un auteur engagé. C’est aussi ce qui ressort du Dictionnaire enjoué des cultures africaines, coécrit avec l’écrivain franco-djiboutien Abdourahman Waberi et publié en décembre. Les deux livres se complètent, élargissent le débat sur l’Afrique et font tomber pas mal d’idées reçues. Ils offrent des réponses efficaces pour combattre la xénophobie et le racisme qui gangrènent les sociétés européennes recroquevillées dans l’ignorance de ce continent, si proche et toujours si méconnu. Rencontre avec un intellectuel joyeux et combatif, dans un Paris en grève, juste avant son départ pour Los Angeles.
Vos deux derniers ouvrages offrent un panorama unique de l’histoire et de la culture du continent africain, reste-t-il à ce point méconnu en France ?
L’Afrique reste méconnue car elle est encore définie par un catalogue de préjugés. Pour s’en débarrasser, il faut en quelque sorte casser la coque de l’arachide pour en extraire le fruit véritable. Jusqu’à présent, on nous a offert des arachides avariées qui ne donnent aucun fruit. C’est aux Africains eux-mêmes de casser cette coque et de planter de nouvelles graines. C’est de cette façon qu’on luttera contre les préjugés. Et c’est effectivement la ligne éditoriale de ces deux ouvrages.
Dans l’ouvrage reprenant vos «leçons» au collège de France, vous citez abondamment la littérature coloniale. Pourquoi est-ce si important ?
Lire cette littérature, c’est le meilleur moyen de comprendre la pensée occidentale qui a mené à la colonisation. On y retrouve déjà les stéréotypes actuels. L’Afrique y apparaît ainsi toujours comme un territoire de ténèbres, peuplée de sauvages auxquels il faut apporter la lumière civilisatrice. Comme si des civilisations n’avaient pas existé en Afrique avant l’arrivée des Européens. Il y a eu pourtant des empires, des universités, une littérature orale très riche, des sociétés bien structurées. Comme celle du royaume du Rwanda. Avant l’arrivée des Blancs, Hutus et Tutsis n’étaient pas des ethnies mais des catégorisations sociales. C’est le colonisateur qui va racialiser ces groupes sociaux, en imposant une carte d’identité «ethnique». Et parce qu’il ne pouvait s’expliquer la sophistication de la société rwandaise, il va décréter que les Tutsis sont une race supérieure dont les origines sont judéo-chrétiennes, et qu’ils auraient ainsi échappé à la malédiction de Cham, celle qui a toujours permis d’inférioriser les peuples noirs. C’est en partie ce discours qui va mener un siècle plus tard au génocide des Tutsis, considérés comme des étrangers dans leur propre pays. Et c’est pour éviter ces manipulations qu’il est important pour les Africains de lire toutes les théories raciales développées en Europe au XIXe siècle, comme celles d’Arthur de Gobineau (1816-1882) dans son Essai sur l’inégalité des races humaines.
La littérature africaine serait née de cette production coloniale ?
La littérature francophone africaine est la fille adultérine de la littérature française. Elle s’est développée en réaction à la figure de l’Africain dans la littérature coloniale : celle du sauvage, qui s’exprime par onomatopées. On le sait, l’histoire de la chasse est toujours écrite par les chasseurs. Même Jean de La Fontaine s’en amuse dans le Lion abattu par l’homme. Les écrivains africains ont ressenti le besoin de parler en leur nom, et de porter eux aussi un regard sur les Occidentaux. Mais aujourd’hui, la littérature africaine ne doit plus se contenter d’être une réaction, une vengeance contre la colonisation.
Cette tendance du face-à-face avec les blancs est encore très présente...
C’est une nouvelle forme d’aliénation. Nous ne devons pas rester dans cette éternelle comparaison avec le Blanc, ce monde binaire et manichéen. Personne n’a de virginité historique. Nous, les Africains, nous avons aussi vendu des esclaves, nous avons aussi commis un génocide au Rwanda ! Reste que de toute façon, le nerf de la guerre, c’est l’économie. C’est celui qui domine économiquement qui détermine les termes du débat. On le voit bien lorsque les Européens se plaignent de la domination de la culture américaine, et ne font que souligner combien les Etats-Unis ont les moyens économiques d’imposer leur idéologie au reste du monde.
Il faut maîtriser son économie pour regagner son expression propre ?
Oui, c’est pour cela que nous devons en finir avec le franc CFA. Mais aujourd’hui, la réforme annoncée en décembre est cosmétique : on fait disparaître le nom «CFA» qui rappelle trop la colonisation, tout en gardant l’emprise économique. Certes, les réserves monétaires des pays africains ne seront plus conservées pour moitié au sein du Trésor public français. Mais l’ancienne puissance coloniale n’en restera pas moins la garante de la nouvelle monnaie appelée à remplacer le CFA. L’emprise reste la même. Avec la réforme annoncée par Macron et par le président ivoirien à Abidjan, on n’est pas sorti de la dépendance.
N’était-ce pas justement un peu maladroit que l’annonce de l’abandon du CFA soit faite par le président ivoirien Alassane Ouattara et le président Emmanuel Macron ?
C’était très maladroit. Cela aurait dû être une annonce faite par tous les chefs d’Etat concernés, ceux de l’Afrique de l’Ouest, puisque dans l’immédiat le CFA d’Afrique centrale reste en place. Cette annonce donne l’impression infantilisante que «papa» (la France) est rentré à la maison avec de bonnes nouvelles. Et pour qu’on ait l’impression que «maman» aussi a quand même son rôle à jouer, «papa et maman» l’annoncent ensemble. Mais le fond du problème, c’est que l’économie de ces pays continuera d’être décidée en France. Or, un Etat qui n’a pas sa propre monnaie reste dominé éternellement. Les Africains réaliseront vite que l’abandon du CFA n’est qu’une illusion. Un changement de nom pour une même monnaie. Comme si on mettait des vêtements tout neuf mais sans prendre de douche. Cela finit par se voir ou se sentir...
Pourquoi alors cette annonce sur le FCFA, soixante ans après les indépendances ?
Cette annonce ne fait que souligner combien, depuis 1945 et surtout après les indépendances des années 60, la dépendance économique et politique a été maintenue ! Mais si elle se détache complètement de l’Afrique, la France sait qu’elle perd énormément. Pas seulement en richesses et en matières premières. L’Afrique est le continent de la langue française, là où les locuteurs sont les plus nombreux. C’est cette région qui donne une dimension mondiale au français.
Faut-il en conclure que Macron a lui aussi échoué à changer la politique africaine de la France ?
La politique africaine de Macron est surtout bancale. Il s’exprime toujours depuis l’Afrique de l’Ouest. Que ce soit pour la restitution des œuvres d’art africain détenues dans les musées français ou pour changer le CFA. En principe pourtant, l’Afrique centrale est elle aussi concernée par le CFA. Mais impossible d’apparaître aux côtés des dictateurs: le président de la république démocratique du Congo, Sassou-Nguesso, le Camerounais Paul Biya ou le Gabonais Ali Bongo. Et du coup, l’Afrique centrale reste une sorte de «cœur des ténèbres» dont on évite de parler, et qui abrite pourtant les richesses les plus importantes. En réalité, l’Afrique centrale est l’épicentre de la Françafrique alors que l’Afrique de l’Ouest a connu dans l’ensemble une évolution plus démocratique.
Ces présidents d’Afrique centrale sont pourtant reçus à l’Élysée ?
L’Elysée prétend qu’on ne peut pas faire autrement car ils seraient des chefs d’Etat élus et reconnus... Mais, dans ce cas, pourquoi refuse-t-on de recevoir Kim Jong-un? La Corée du Nord est également un Etat reconnu, et son leader n’est pas plus mal élu que certains chefs d’Etat africains. Si on ne veut pas recevoir Kim Jong-un, c’est bien qu’on a une définition de la démocratie. Pourquoi ne s’applique-t-elle pas à l’Afrique ?
D’un autre côté, l’opinion publique française semble peu se mobiliser face aux dictatures africaines...
Nous en revenons aux fameux préjugés, à cette idée que la barbarie serait atavique chez les Africains. Du coup, c’est sous ce prisme qu’on interprète souvent les conflits en Afrique. Ils ne sont même pas présentés comme des guerres, mais comme des «affrontements inter-ethniques». Même le génocide de 1994 au Rwanda a longtemps été perçu par de nombreux commentateurs français comme une guerre ethnique, on refusait de voir qu’il s’agissait d’un génocide. Ce qui évitait aussi d’évoquer l’influence des colonisateurs dans l’émergence d’une idéologie raciste dans ce pays.
Selon vous, est-ce en réaction à ces compromissions que s’est développé un mouvement d’opinion anti-français en Afrique ?
Absolument, il est attisé par la France elle-même. Elle se présente comme le pays des droits de l’homme mais quand on y regarde de près, elle n’accompagne pas la démocratisation en Afrique. Prenez le Breton du gouvernement, comment s’appelle-t-il déjà ? Jean-Yves Le Drian ! Il s’affiche ouvertement avec Sassou Nguesso ! Ils sont amis. Le président français ne peut pas ignorer cette proximité d’un de ses ministres avec un chef d’Etat comme Sassou Nguesso ! Comment un discours en faveur de la démocratie peut-il être dès lors crédible? Le discours français est un discours hypocrite. Cela ne fait qu’accroître une certaine antipathie, non pas envers les Français, mais envers le gouvernement français.
La jeunesse africaine, pourtant très critique envers cette politique française, est aussi souvent désireuse de quitter l’Afrique pour la France...
Parce que la légende du départ et du retour demeure. Les nouvelles générations entretiennent encore cette légende du succès en France via les réseaux sociaux. Il suffit d’un selfie aux Champs-Elysées... Nous n’avons pas fait assez de pédagogie. Nous n’avons pas expliqué suffisamment que la vie était difficile en France, que même les Blancs souffrent. Ce discours reste souvent incompris. Si vous le tenez, vous passez pour un loser amer qui ne veut pas laisser aux autres l’opportunité d’essayer. L’immigré est souvent pris au piège de l’impossible retour qui serait l’aveu de son échec. Reste qu’aujourd’hui, la France a perdu de son attrait. Si je devais réécrire mon premier livre, Bleu Blanc Rouge publié en 1998, qui évoque les migrations africaines, j’emmènerais sûrement mon héros vers le Ca- nada ou les Etats Unis, pays perçus comme beaucoup plus accueillants, où l’on ne risque pas de vous demander vos papiers en permanence sous prétexte que vous êtes noir. Aujourd’hui, la France paraît plus fragile, économiquement mais aussi sur le plan identitaire. Les jeunes Africains francophones constatent aussi que la condition des anciens colonisés anglophones est meilleure que la leur. Les ex- colonies anglophones ont pour beaucoup acquis une autonomie financière. Même si leur monnaie est faible, elle leur appartient.
Voyez-vous des évolutions ?
La place grandissante des études africaines, même au Collège de France, est un signe positif. Même s’il y a encore des réactions de frilosité. Comme cette tribune récente dans l’Express qui s’inquiète de la place grandissante des études africaines post-coloniales. Il reste des résistances du côté d’une vieille France qui voudrait qu’on étudie toujours l’Afrique comme un empire.
"TRUMP A COMMIS UNE CONNERIE", L'ÉTRANGE RÉACTION DE LA PRÉSIDENCE MALIENNE SUR TWITTER
Après l’assassinat du général iranien Ghassem Soleimani par les Etats-Unis, un message a été publié par erreur sur le compte @PresidenceMali
En plus de faire craindre une guerre, l’assassinat du général iranien Ghassem Soleimani allait-il désigner un Etat d’Afrique au courroux de Donald Trump ? Un tweet de la présidence malienne a pu temporairement le laisser envisager, en parlant de « connerie » du président américain et en qualifiant les Etats-Unis d’« Etat voyou ». C’était avant que la présidence malienne dénonce un piratage… qui, en fait, n’en était pas un, mais la « malencontreuse erreur » d’un ancien communiquant de la présidence.
L’étonnement n’est pas mince, lundi 6 janvier après-midi, quand apparaît sur le compte Twitter de la présidence malienne un message déplorant que personne n’ait dit « à Trump qu’il a commis une connerie » en ordonnant l’assassinat du général Soleimani. M. Trump « précarise les fragiles équilibres, menace la paix mondiale et fait des USA un Etat voyou », accuse le texte. Celui-ci, abondamment reproduit sur les réseaux sociaux, a été effacé depuis lors.
Lundi soir, la présidence du Mali, dans un message « urgent » sur le même compte, affirme avoir été « momentanément piratée par des individus mal intentionnés ». Elle a ouvert des investigations « pour en démasquer les auteurs », dit-elle. Mais en fait de pirate à la solde de la République islamique, l’auteur n’est autre que l’ancien responsable de la communication du président Ibrahim Boubacar Keïta. Tiegoum Maïga s’est dénoncé lui-même, mardi, sur son propre compte Twitter : « Ni pirates ni hackers, une regrettable erreur de manipulation », a-t-il avoué.
Tiegoum Maïga, par ailleurs frère de l’ex-premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga, a été démis de ses fonctions en novembre. Mais, a-t-il expliqué, il a conservé l’accès au compte présidentiel, un oubli selon lui. Et en voulant donner son avis sur les affaires du monde lundi, il s’est trompé, sans « aucune volonté de nuisance ».
La communication des Etats-Unis a elle-même connu un rare cafouillage lundi, avec l’annonce, dans une lettre transmise par erreur, d’un retrait américain d’Irak, ensuite démentie.
texte collectif
FRANCE, SOUVIENS-TOI DU NAUFRAGE DE L'AFRIQUE
Il faut, cent ans plus tard, honorer la mémoire des 192 tirailleurs sénégalais qui étaient à bord de ce paquebot et espéraient rentrer chez eux après avoir mené une guerre qui n’était pas la leur
Jeune Afrique |
Karfa Diallo et Nicolas Michel |
Publication 08/01/2020
Il y a tout juste 100 ans, par une froide nuit de janvier, le paquebot Afrique coulait au large de Bordeaux dans une mer déchaînée. Parmi les quelques 600 passagers, 192 tirailleurs sénégalais qui rentraient chez eux après avoir servi la France durant le premier conflit mondial. Il n’y eut en tout qu’une trentaine de survivants. Une tragédie injustement oubliée.
Les faits sont documentés grâce au travail de Roland Mornet (La tragédie du paquebot Afrique, Geste Editions), mais ils ne sont guère connus, absents des livres d’histoire, comme gommés de la mémoire dans un pays qui, pourtant, aime se raconter.
Pour ceux qui n’en ont jamais entendu parler, résumons. L’Afrique est un paquebot mixte de la Compagnie des chargeurs réunis (CCR). Pendant toute la durée de la Première Guerre mondiale, il a assuré la liaison Bordeaux-Dakar. Décoré de la légion d’honneur le 20 janvier 1919, son capitaine est Antoine Le Dû, 43 ans, un homme aimé et expérimenté. Le 7 janvier 1920, le permis de navigation est renouvelé au paquebot après une série de réparations. A priori en état de prendre la mer, il largue les amarres deux jours plus tard, à 19 heures, et entame la descente de la Gironde depuis Bordeaux. À bord, un équipage de 135 hommes. Les blanchisseurs sont des « indigènes sujets français », tout comme les neuf « boys ».
Pour le reste des passagers, Roland Mornet avance un chiffre de 467 personnes. Le nombre de militaires blancs ayant embarqué pour rejoindre Saint-Louis du Sénégal, Brazzaville ou le Tchad est longtemps resté sujet à caution.
« La confusion est plus grande encore concernant les tirailleurs qui ne sont sénégalais que de nom, hors 34 à destination de Dakar, c’est à Conakry que doivent débarquer 72 autres, mais sont-ils tous pour autant Guinéens ? demande Mornet. Certains sont peut-être Maliens. 86 doivent être laissés au warf de Grand-Bassam devant Abidjan. Si vraisemblablement beaucoup sont ivoiriens, il peut s’y trouver des Voltaïques. Ces hommes ont combattu sur le front de Salonique et à Gallipoli, c’est la raison pour laquelle ils ont été démobilisés plus tardivement que leurs camarades ayant combattu sur le sol français, les redoutables nettoyeurs de tranchées, rescapés des tueries d’Argonne, d’Artois, de Verdun ou des Flandres… », écrit l’ancien capitaine.
Trente-quatre rescapés
Le temps est mauvais, les marins savent qu’au sortir du fleuve, ce sera pire. Le 10 janvier au matin, L’Afrique atteint la mer, déjà grosse. À 10 heures, le chef mécanicien demande au capitaine de ralentir l’allure en raison de la présence d’eau dans la chaufferie. Antoine Le Dû obtempère, tandis qu’on cherche l’origine de la fuite. Le temps forcit, les pompes fonctionnent jusqu’à ce que des résidus de combustion du charbon viennent boucher les tuyaux d’aspiration. Au soir du 10 janvier, le navire commence à donner de la bande. Vers minuit, le commandant décide de dérouter, mais virer de bord s’avère impossible par manque de vitesse.
Antoine Le Dû lance un appel au secours par télégraphie sans fil (TSF) le 11 janvier, à 7 heures du matin. Le Cèdre et La Victoire, deux remorqueurs basés à Rochefort, reçoivent l’ordre de se préparer, tandis que Le Ceylan, autre paquebot de la CCR, se déroute à 8 h 20 pour porter secours à L’Afrique.
Le paquebot, privé d’énergie électrique, dérive dans le noir. Le Ceylan, qui ne peut prendre le risque de toucher le plateau de Rochebonne, doit s’éloigner. Vers 22 heures, L’Afrique heurte le bateau-feu en acier indiquant le haut-fond. Une nouvelle voie d’eau s’ouvre dans sa coque. Peu après trois heures du matin, ce 12 janvier 1920, le navire pique de l’avant et sombre.
Le lendemain matin, le Ceylan récupère neuf membres d’équipage et treize Sénégalais sur un radeau. L’un d’eux, Mamadou N’Diaye, décédera peu après. Il n’y aura en tout que 34 rescapés.
Sacrifice imposé des soldats « indigènes »
Dans les journaux, une certaine émotion… qui s’estompe vite avec la victoire surprise de Paul Deschanel sur Georges Clemenceau à l’élection présidentielle. Bien entendu, une enquête est aussitôt diligentée auprès des survivants et des experts pour établir les causes du drame. Des demandes d’interpellation sont déposées à l’Assemblée nationale et mises à l’ordre du jour, le 18 mars 1920, débouchant sur de longs débats – en particulier sur la responsabilité de la CCR et sur celle de la société de classification Veritas.
Dans les années qui suivent, entre 1923 et 1930, la CCR sera plusieurs fois assignée en justice par les familles des passagers – définitivement déboutées en juillet 1931. Seules celles des membres d’équipage ont, vraisemblablement, été indemnisées. Le mystère entourant la première voie d’eau ne sera jamais élucidé. Pour Roland Mornet, elle serait le fait d’une épave « tueuse » non répertoriée de l’estuaire qui aurait percé la carène de L’Afrique.
L’épave gît aujourd’hui par 45 mètres de fond au nord du plateau de Rochebonne. La France, ingrate, a oublié les passagers de L’Afrique et le sacrifice imposé de ses soldats « indigènes ». En mémoire du drame, la Côte d’Ivoire a émis un timbre, en 1990. Mornet a lui-même bataillé pour l’installation d’une stèle, aux Sables-d’Olonne, en mémoire des naufragés, où leur mémoire sera honorée les 11 et 12 janvier prochain. Il en existerait une autre dans le cimetière de Conakry, à la mémoire des tirailleurs.
Mémoire
Est-ce suffisant ? Non. Dans cette tragédie, le destin des tirailleurs sénégalais qui rentraient chez eux interroge un pan complexe de l’histoire de France, puissance coloniale qui s’accapara les richesses et les chairs d’un continent. Les héros africains qui disparurent en cette nuit de janvier 1920, tout comme les rares qui survécurent, ont des noms. Lai Sako, Gore N’Diaye, Birame Sassoune, Amadou Diop… et nous n’écrirons pas « etc » : nous attendons que la France, par la voix de son président peut-être, prononce officiellement leurs noms, à haute et intelligible voix. Nous avons une dette envers eux.
Interpellé en 2016 par l’association Mémoires & Partages, qui a réalisé la seule exposition sur le naufrage et lancé un « plaidoyer pour les tirailleurs naufragés », le président François Hollande avait transmis le dossier à Jean-Marc Todeschini, Secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire. Depuis, le silence est pesant et il n’y a plus de Secrétaire d’État chargé des anciens combattants et de la mémoire.
Le vivre-ensemble n’est pourtant possible qu’en retrouvant la mémoire de certains moments de notre passé. L’occasion se présente aujourd’hui, 100 ans plus tard. La France et les États africains ont en ce sens une obligation. Les 192 tirailleurs attendent depuis trop longtemps.
Karfa Sira Diallo, auteur, fondateur de Mémoires & Partages
Nicolas Michel, journaliste, romancier
UN ENFANT DÉCÈDE DANS LE TRAIN D'ATTERRISSAGE D'UN VOL ABIDJAN-PARIS
La compagnie aérienne française confirme la mort d'un « passager clandestin » sans préciser son âge, et déplore un « drame humain »
Il aurait « une dizaine d'années », selon l'Agence France-Presse. Il a été retrouvé tôt ce mercredi 8 janvier, à l'aéroport de Roissy, dans le train d'atterrissage d'un Boeing 777 d'Air France en provenance d'Abidjan, en Côte d'Ivoire. Une enquête.
La compagnie aérienne française confirme la mort d'un « passager clandestin » sans préciser son âge, et déplore un « drame humain ». Le corps sans vie d'un enfant a été retrouvé mercredi matin dans le puits du train d'atterrissage d'un avion d'Air France, qui arrivait à Roissy-Charles de Gaulle, près de Paris, en provenance d'Abidjan. L'appareil, un Boeing 777, avait décollé la veille.
« Au-delà du drame humain, cela indique une faille de sécurité majeure à l'aéroport d'Abidjan », a déclaré dans les colonnes de l'Agence France-Presse une source sécuritaire ivoirienne. Cette personne se demande comment un enfant d'une dizaine d'années a pu accéder à un avion, voire s'il a bénéficié de complicité. En France, une enquête est ouverte. Elle est menée par la gendarmerie des transports aériens de l'aéroport Charles de Gaulle.
Ces dernières années, plusieurs personnes, et notamment des adolescents en provenance de pays africains, ont été retrouvés morts de froid, ou tragiquement écrasés dans des soutes de train d'atterrissage. Il faut rappeler que les températures descendent à -50°C entre 9 000 et 10 000 mètres d'altitude. Les logements de train d'atterrissage ne sont ni chauffés, ni pressurisés.
par Jean-Pierre Corréa
RÉPUBLIQUE, FLONFLONS ET GAUDRIOLE
Voir les noms de nos présidents, ministres, DG, mêlés à des soirées où se dandinent des personnages dont certains finissent dans les pages infâmantes des faits divers judiciaires ne donne pas l’exemple d’une nation au travail
Comment connaître par cœur la liste des ministres de notre gouvernement et leurs fonctions ? Il suffit de suivre les annonces de soirées folkloriques et musicales et autres foureuls pour savoir quels sont nos ministres et quels ministères ils occupent. Toutes les semaines, leurs noms sont criés sur les ondes des radios pour annoncer qu’ils patronnent une soirée, l’anniversaire d’une improbable carrière ou un grand baloche. Faut croire qu’ils n’ont que ça à faire. Nous qui croyions que le chef de l’État avait dit «stop» aux fêtes en tous genres et en tous temps, pour que ce pays travaille enfin… Mais c’est sans compter avec notre propension à attirer les mouches avec du miel.
Il est véritablement inconvenant que tout l’aéropage déjà pléthorique de notre gouvernement soit crié, hurlé jusqu’à l’indécence sur les ondes des radios, défilant sur nos écrans dégoulinant de gaudrioles et de vulgarités, pour annoncer une fête où nous sommes certains de voir jetés des millions en billets neufs, par les temps qui courent parfois faux, et de façon souvent vulgaire, au nez et à la barbe d’abord des impôts et de bien des sénégalais qui tirent le diable par la queue, quand il trouvent le diable d’ailleurs. Du président de la République, en passant par son épouse, tous les ministres sont convoqués à ces agapes inutiles où leur «concours» est demandé et souvent obtenu à travers des grasses enveloppes apportées par les attachés de cabinet ou leurs épouses et ce, en grandes pompes et sans contrôle de quelque Dage de ministère que ce soit. Véritablement, voir les noms de nos présidents, ministres, DG, mêlés à des soirées où se dandinent toutes sortes de personnages et parfois les plus douteux, dont certains finissent souvent dans les pages infâmantes des faits divers judiciaires, n’est proprement pas distingué et ne donne pas l’exemple d’une nation au travail. Ce n’est pas aux institutions de sponsoriser des khawarés et ce n’est pas à notre président de la République et à son épouse de payer les dépenses de ces «anniversaires bidon» d’artistes qui ne vendent que des centaines de cassettes au Sénégal.
Sinon, il nous est loisible de penser que notre gouvernement est le premier des entertainers et le plus bel exemple de ce qu’on peut appeler des ambianceurs de basse-cour... Stoppez ce folklore monsieur le président. Pour que le Sénégal se mette au boulot et ses ministres au travail et plus sur la scène du grand Théâtre ou de Sorano. Ce n’est pas là qu’on les attend. Monsieur le président, que vous et votre épouse donnent l’exemple en refusant d’être mêlés à de telles annonces publicitaires, aux côtés des Wally Seck, Assane Ndiaye et autres Titi et Kiné Lam, la liste n’est pas exhaustive, hélas....
C’est notre vœu de Nouvel An.
Par Pape NDIAYE
SÉNÉGALAIS, LAVEZ-VOUS !
Que retenir de la « Cleaning day » ou la Journée nationale de nettoiement lancée le président Macky Sall ? 60 ans après l’indépendance, le Sénégal en quête d’hygiène et de propreté
Que retenir de la « Cleaning day » ou la Journée nationale de nettoiement lancée le président de la République Macky Sall ? D’abord, il nous plait de saluer cette initiative du chef de l’Etat procédant de sa volonté politique de débarrasser Dakar ainsi que les villes de l’intérieur de notre pays de leurs dépôts sauvages et autres ordures qui jonchent leurs rues et trottoirs.
L’initiative d’une telle journée de « Set-setal » est aussi salutaire au vu des nuées de papiers et de tasses en plastique qui échouent dans les caniveaux. Si ce ne sont pas les mégots de cigarettes et sachets d’eau qui tapissent les trottoirs. Malgré la mise en place d’une Unité de coordination de la gestion des déchets solides (Ucg) ayant mission de rendre la capitale propre, Dakar est sale. Vraiment sale, mal «siwilisée » ! Le constat est d’autant plus qu’amer qu’il intervient 60 ans après l’indépendance de notre pays. Soixante ans après que les « Toubabs » de France nous aient quitté officiellement après nous avoir légués des notions d’hygiène et de propreté. C’est-à-dire appris à être propres !
La preuve par l’actuel Service national d’Hygiène, qui est l’un des plus vieux corps de la République puisqu’ayant été créé à l’époque de l’Afrique Occidentale française (Aof). Et si la France-mère nous a légués le Service national d’hygiène après l’avoir spécialement créé pour nous, c’était assurément pour que nous prenions soin de nous, nous « indigènes ». C’est aussi ce qui expliquait la création de la première décharge publique (1950) implantée dans la banlieue dakaroise, notamment à Yeumbeul. Puis il y en a eu une autre après l’indépendance, à Yarakh, près de l’ancienne Sotiba.
La décharge de Yeumbeul, ouverte bien avant Mbeubeuss (1968) et communément appelée « Mbalitou-toubab » avait été créée par les soldats français du camp de la Marine abritant les stations de radio-télécommunications des forces françaises du Cap-Vert. Dans ce lot d’ordures, les canettes de bière et les mégots de cigarettes « Gauloises » que les bidasses français jetaient dans les avenues William Ponty et de Gambetta. Aujourd’hui, dans les mêmes artères, ce qui jonche majoritairement le décor, ce sont des tasses de café « Touba », des épluchures de « khaal » (pastèque) et autres « mboussou ndokh ».
A cet égard, les colons français avaient compris très tôt et tenu à faire comprendre à nos ancêtres que l’hygiène et la propreté constituent une branche très importante de la médecine à travers la prévention des maladies dans le but de favoriser la santé et le bien-être des populations. A l’époque, lorsque nous étions enfants, on se souvient de la peur bleue que ces agents du Service d’hygiène inspiraient à nos braves mamans. Lesquelles se dépêchaient de nettoyer les cours et les devantures des maisons, mais aussi de récurer les canaris afin qu’aucune saleté ou larve n’y traîne.
Hélas, le Service d’Hygiène est devenu le corps paramilitaire le plus « marginalisé » par les gouvernements post-indépendance alors qu’en matière de salubrité, il devait être la pierre angulaire de la mise en œuvre des politiques et programmes de lutte contre l’insalubrité publique. Les choses n’ont d’ailleurs pas changé sous le magistère du président Macky Sall puisque Abdou Karim Fofana, l’actuel responsable du secteur, est plus ministre de l’Urbanisme et Logement que de l’Hygiène publique. Sauf quand il s’agit de mener des opérations de déguerpissement des rues de Dakar. Et même dans ces cas, il se présente aux commandes des Caterpillar de l’Urbanisme. Pas avec des outils pour nettoyer les écuries d’Augias de la capitale !
Toujours est-il que l’opération « Coup de balai » ou « Grand ménage » menée par le Président Macky Sall, le temps d’un week-end, a eu le mérite de transformer toutes les institutions (ministères, gouvernances, préfectures et mairies) en services d’hygiène. Sans se faire prier, certains ministres, gouverneurs et préfets épaulés par des responsables politiques de la mouvance présidentielle (Benno) ont fait preuve de zèle et de prosélytisme au point de détourner le « Cleaning day » de son objectif premier c’est-à-dire pousser les citoyens à s’enraciner dans la culture de l’hygiène et de la propreté. Et nettoyer leur propre environnement. Ce, à l’exception de nos frères et compatriotes Diolas considérés comme l’ethnie la plus propre et la plus hygiénique du Sénégal comme l’attestent les belles rues de Ziguinchor et les magnifiques plages du Cap Skirring. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que la majorité des maîtres d’hôtel et cuisiniers du Palais sous les régimes des présidents Senghor, Diouf, Wade et Macky sont originaires du Sud.
Tape à l’œil
Il est vrai qu’en matière de décentralisation d’événements comme la « Journée nationale de nettoiement », les gouverneurs, préfets et sous-préfets jouent un très important rôle de relais entre l’Administration centrale (Dakar) et les localités de l’intérieur du pays afin de veiller au respect de l’exécution des lois et autres programmes à l’image du « Setsetal ». Mais ce qui est déplorable, c’est le folklore politique et l’aspect festif dans lesquels ils ont lancé le premier coup de balai dans leurs circonscriptions respectives. Par exemple, les autorités politiques et administratives de Thiès ont plus cherché à taper dans l’œil du président de la République qu’à nettoyer les avenues, rues et places publiques de la capitale du Rail ! Car le gouverneur Mouhamadou Moustapha Ndao, le préfet Fodé Fall et le maire Talla Sylla se sont distingués à leur manière pour tenter de donner corps et âme à la « Cleaning day » de Sa Majesté Macky II. Comme pour dire que chaque mouvement de brouette ou coup de pelle effectué par le président Macky Sall depuis son jardin public de Mermoz (Dakar) où il n’y avait pratiquement rien à nettoyer, avait sa réplique à la Place de France (Thiès) pour être applaudi par les militants thiessois.
Pire, les responsables l’Unité de coordination et de gestion des déchets solides (Ucg) se sont approvisionnés en matériels (brouettes, pelles, balais) auprès des quincailleries grossistes des rues Galandou Diouf et Tolbiac pour soutenir et instrumentaliser la journée « Sénégal zéro déchet ». Pendant ce temps, nombreux sont les citoyens n’appartenant à aucune obédience politique qui se sont terrés chez eux en fustigeant ce qu’ils qualifient de « Set-setal » politique. Tous les observateurs vous le diront, aussi bien à Thiès qu’à Saint-Louis, Kaolack et Fatick, certains ministres et responsables politiques à popularité réduite ont essayé de compenser leur handicap par un activisme débordant.
Pour y parvenir, ils se sont armés de pelles le temps d’une prise d’images par les caméras de télévisions pour faire du bluff et du buzz, et le tour était joué ! Pendant ce temps, les journaliers agents de l’Ucg n’ont pas encore perçu leur salaire du mois de décembre 2019. Et paradoxalement, leur situation sociale se détériore au moment où le président de la République procédait au lancement de la « Cleaning day » alors qu’ils sont censés rendre Dakar propre.
En criant à l’antinomie, certains agents de l’Ucg ont profité de la présence de Mme Marieme Faye Sall sur le théâtre des opérations de… « Set-sétal » pour dénoncer le non-paiement de leurs salaires. « Oui, mes collègues et moi avons rencontré la Première dame à Mermoz pour qu’elle soit notre émissaire auprès du président de la République. Car on a du mal à comprendre comment le chef de l’Etat peut-il lancer une journée de propreté alors que les agents censés balayer les rues ne sont pas encore payés. Faute de salaires, nous n’avons même pas célébré les fêtes de fin d’année » nous révèle en pleurnichant un technicien de surface de l’Ucg.
Une belle initiative du Président !
Malgré le tintamarre médiatique et l’instrumentalisation politique autour de cette journée, il faut quand même magnifier et saluer l’initiative du président Macky Sall dans sa volonté de désengorger la ville de Dakar et la rendre propre. Et le succès pouvait être plus éclatant, l’œuvre plus valorisante si la journée avait connu une forte mobilisation citoyenne. Une mobilisation spontanée allant de l’action individuelle d’abord, ensuite collective, puis organisationnelle voire institutionnelle sous l’égide du ministère l’Urbanisme et l’Hygiène publique obligeant le Président de la république à descendre sur le terrain pour la pérennisation. Comme ce fut le cas dans les années 90 du temps des opérations « Set-setal » nées sous l’impulsion des quêtes financières et des animations folkloriques (foural) des associations sportives et culturelles (Asc) de quartiers évoluant au sein du mouvement navetanes.
A cette époque-là, sur l’ensemble du territoire national, les jeunes des Asc s’étaient levés spontanément pour nettoyer et embellir leurs quartiers. Cet engagement civique sur fond de mobilisation citoyenne sans précédent avait poussé le président Abdou Diouf à soutenir l’action de ces jeunes par le biais du ministre de la Jeunesse et des Sports, Abdoulaye Makhtar Diop. Un ministre très populaire à l’époque au point d’être surnommé « Makhou-foural » puisqu’il sillonnait nuitamment les quartiers du Sénégal pour y présider des « foural » ou bals populaires.
Seulement en initiant une telle journée dans le but de faire Dakar une ville propre, vivante et accueillante, une ville ordonnée surtout, le président Macky Sall avait dû oublier que les Sénégalais que nous sommes n’ont aucune culture de la propreté et de l’hygiène. Il vrai qu’en lançant les « Cleaning days », il a plusieurs fois répété que l’embellissement, la décoration, le désengorgement et la propreté d’une ville sont l’affaire de tous ! En écoutant attentivement le président de la République, il est désormais impérieux pour chaque Sénégalais de s’approprier la propreté, le désengorgement et l’embellissement des jardins publics pour une révolution du cadre de vie. Des messages en boucle qu’il a souhaité faire passer à travers l’événement. Mais autant multiplier les campagnes du genre : lavez-vous, nettoyez-vous, aménagez-vous, désengorgez-vous et « propretez-vous », il en restera toujours quelque chose ! Ne vous offusquez surtout pas, c’est la triste réalité.
A l’école de la propreté et de l’hygiène…
Dans certains pays comme le Rwanda, le Japon, l’Australie, le Kenya, la Chine, les Etats-Unis, la France, l’Angleterre etc. la propreté et l’hygiène ne se décrètent pas ! Elles font pratiquement partie des us et coutumes. D’autres pays les ont intégrées dans l’éducation de base pour les inculquer aux enfants dès le bas âge. C’est pour cela qu’il existe certaines villes comme Kigali, Sydney, Tokyo et Nairobi où l’on vit dans le respect absolu de la propreté et de l’hygiène. Et rien que le fait de se racler la gorge dans un restaurant peut vous conduire vers la peine de…mort. Alors qu’en pleine ville de Sandaga (Dakar), l’urineur sauvage épinglé ne trouve rien de mieux à faire que de s’en prendre aux empêcheurs d’uriner en public histoire de les sommer à circuler ! C’est aux citoyens de cette capitale nommée Dakar que le président Macky Sall veut imposer chaque mois la culture ou l’apprentissage de la propreté et de l’hygiène publique. Une vaste perspective assurément !
SADIO MANÉ NE RENTRERA PAS À DAKAR
Sadio Mané ne sera pas à Dakar. L’attaquant sénégalais sacré Ballon d’or africain 2019, hier en Egypte, rentre finalement à Liverpool. L’avion affrété par son club est parti du Caire pour se poser à Liverpool.
Sadio Mané ne sera pas à Dakar. L’attaquant sénégalais sacré Ballon d’or africain 2019, hier en Egypte, rentre finalement à Liverpool. L’avion affrété par son club est parti du Caire pour se poser à Liverpool.
Selon les explications de son staff, le jet privé n’a pas obtenu l’autorisation d’atterrir à Tunis, contraignant l’avion à rallier Liverpool. Mais, des sources qui requièrent l’anonymat, soufflent que le joueur n’a jamais obtenu l’autorisation de son club pour venir à Dakar. La cérémonie de "Sargal" (Hommage), prévue à Dakar avait été organisée par des proches de Mané, une structure dénommée "SM 10", basée à Dakar, en collaboration avec son équipementier, "New Balance".
Lesquels cherchaient à convaincre le club à lui accorder la permission de venir à Dakar. Les raisons avancées par Liverpool : la faveur n’avait pas été accordée à Salah, vainqueur du trophée en 2018. De plus, Mané, est en pleine saison.
Sadio Mané, était attendu à Dakar, ce mercredi à 15 heures. Un accueil populaire et une cérémonie d’hommage, présidée par le chef de l’Etat, étaient prévus, cet après-midi, au Musée des civilisations noires.
«NOUS SOMMES INDISPENSABLES A L’OPERATION ZERO DECHET»
Le Syndicat des travailleurs du nettoiement exige plus de considération dans le cadre de l’opération « zéro déchet ». Selon son secrétaire général, Madani Sy, cette ambition présidentielle ne peut se réaliser sans eux.
Le Syndicat des travailleurs du nettoiement exige plus de considération dans le cadre de l’opération « zéro déchet ». Selon son secrétaire général, Madani Sy, cette ambition présidentielle ne peut se réaliser sans eux.
« Tout ce qui est fait pour toi, sans toi, est fait contre toi ». Un cri du cœur lancé par le secrétaire général du Syndicat des travailleurs du nettoiement à l’endroit du gouvernement. Une alerte pour dénoncer l’indifférence notoire de l’Etat envers les travailleurs de ce secteur sans qui l’ambition du Président de faire du Sénégal un pays avec zéro déchet serait vaine. C’est pourquoi, Madani Sy exige que l’on accorde plus de considération aux agents du secteur du nettoiement. « Avant de parler de valorisation de déchets, il faut d’abord la valorisation des agents du nettoiement. Qu’on les mette dans des conditions de performance. Il nous faut des moyens, des salaires décents. Malheureusement, aujourd’hui, les travailleurs sont dans des conditions misérables », s’indigne M. Sy.
Une situation de précarité qui, selon lui, risque de compromettre le projet « zéro déchet » du gouvernement. En effet, selon le syndicaliste, ce sont les travailleurs qui constituent le « maillon le plus important de la chaine » destinée à rendre le pays propre. Or, estime-t-il, dans les conditions actuelles, cette volonté du pouvoir ne pourrait se réaliser. « Le budget du nettoiement est passé de 17 à 12 milliards, alors que la masse salariale des travailleurs du secteur ne dépasse pas les 3 milliards » renseigne M. Sy. Une façon de pointer le peu de considération dont sont l’objet les travailleurs qui « doivent être impliqués en amont. Ils doivent être impliqués dans les prises de décisions concernant leur secteur d’activité. Le capital humain est relégué au second plan. On ne doit pas nous considérer comme des ouvriers, alors que nous sommes incontournables quel que soit le dispositif mis en place » déclare-t-il. M. Sy invite é g a l e m e n t l’Etat à ne pas politiser cette opération qui doit transcender les chap e l l e s politiques pour être l’affaire de tous.
Sur l’engagement du ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène Publique, Abdou Karim Fofana, M. Sy pense que celui-ci a un programme p o l i t i q u e . « Nous sommes apolitiques, le « zéro déchet » ne doit pas être géré par des slogans ou des caravanes avec des militants qui viennent appuyer le ministre. Cela ne nous intéresse pas. Le ministère a mis en place le Comité national de l’hygiène publique sans l’implication des travailleurs. C’est une hérésie et ça ne nous honore pas !», déplore Madani Sy. Selon les travailleurs du secteur du nettoiement, la population produit plus de 2400 tonnes d’ordures par jour. Des chiffres qui font peur. Ce, alors que le déficit d’infrastructures augmente les dangers.
La population doit être impliquée davantage
A les en croire, il faut impliquer davantage les populations pour qu’elles comprennent enfin le danger de cette production massive de déchets. « Les p o p u l a t i o n s sont responsables, il faut l’implication de ces d e r n i è r e s puisque ce sont elles qui produisent les ordures » explique M. Sy. Ainsi, pour mettre un terme à tout cela, Madani Sy demande une participation plus massive de cette population. Et pour ce faire, un changement de comportement est nécessaire de son point de vue.
« Mbeubeuss, une bombe écologique »
Sur l’ambition du chef de l’Etat de faire de Dakar une ville comme Kigali en matière de propreté, M. Sy estime que c’est bien possible. « L’opération zéro déchet initiée par le président de la République est une très bonne chose et peut être réalisable, à condition d’être une « vision futuriste. Ce qui ne pourrait se faire sans un changement de paradigmes et de comportements, en améliorant tous les aspects et en créant des infrastructures qui répondent aux normes environnementales » souligne M. Sy. « Aujourd’hui personne ne veut cohabiter avec une décharge. L’Etat est physiquement et pénalement responsable. Il nous faut des infrastructures qui répondent aux normes environnementales. Mbeubeuss date depuis 1968. Cette décharge est devenue une bombe écologique et un danger pour les populations des alentours.
Dans mesure où elle est dans une zone poreuse, elle doit être clôturée afin d’éviter que les gens y entrent et en sortent comme ils veulent. Une décharge pareille, c’est révolu. Si on nous dit que Mbeubeuss va être réhabilitée, je ne vois pas comment. Il nous faut des usines de traitement, des déchèteries pour que les populations ne cohabitent avec ces nuisances-là. C’est à l’Etat de trouver les moyens pour combler ces manquements. C’est normal que ces populations marchent et elles ont le droit de dire non à ce danger qui les menace au quotidien. Nous sommes de tout cœur avec elles pour une meilleure prise en charge des déchets. Il faut une bonne communication entre les citoyens et les membres du gouvernement afin de trouver des solutions » conclut Madany Sy, le secrétaire général du Syndicat des travailleurs du nettoiement.
LA REGION DE ZIGUINCHOR, PARENT PAUVRE DES REALISATIONS DE L’ETAT EN 2019
La région de Ziguinchor n’a pas connu beaucoup de réalisations de la part du gouvernement durant l’année 2019.
Jean Diatta, Correspondant permanent Ziguinchor |
Publication 08/01/2020
La région de Ziguinchor n’a pas connu beaucoup de réalisations de la part du gouvernement durant l’année 2019. Pourtant, il y avait beaucoup d’attentes chez les populations et notamment dans le domaine des grandes infrastructures qui sont le soubassement du développement durable. Dans ce domaine précis, seul le projet de construction du port de pêche de Ziguinchor, au quartier Boudody, a connu un début d’exécution. Ce port qui fait partie du projet Orio ayant permis de financer le dragage du chenal du fleuve Casamance est en plein chantier aujourd’hui au grand bonheur des acteurs de la pêche de la région.
Quant aux grandes constructions de l’Université de Ziguinchor qui devaient sortir cette institution de son apparence de collège d’enseignement moyen, elles sont toujours à la traîne. Le ministre de l’Enseignement supérieur, venu récemment à Ziguinchor pour constater l’état d’avancement de ces chantiers, a promis qu’un budget supplémentaire sera dégagé pour leur achèvement. Mais, la plupart des observateurs restent pessimistes par rapport à cette promesse. Ils soulignent que depuis 2015, du temps de son prédécesseur Pr Mary Teuw Niane, c’est toujours le même discours qu’on entend au sujet de ces chantiers sans qu’il y ait eu des actes concrets. Au niveau de la ville de Ziguinchor, cependant, on a noté un début d’exécution du projet Promovilles qui va désenclaver plusieurs quartiers. De vieilles rues comme le boulevard Alpha, qui traverse le quartier de Lyndiane, sont en chantiers.
Du côté du quartier Kandialang, le plus grand boulevard est aussi en état de construction. Concernant les ponts de Ziguinchor, Tobor, Baïla ou Diouloulou, Diakène et Katakalouss qui croulent sous le poids de l’âge, on attend toujours le lancement des travaux de leur reconstruction. Un lancement promis par le président Macky Sall lors de sa dernière visite économique en Casamance au mois de novembre 2018. Récemment, le pont de Ziguinchor a été le théâtre d’un accident spectaculaire. Un camion chargé de marchandises, en provenance de la Gambie, en avait dégringolé et les garde-fous avaient cédé avant que le camion ne termine sa course dans le fleuve, faisant plusieurs morts parmi ses occupants. La construction du pont de Marsassoum, très attendue par l’ensemble de la population de la Casamance et dont les travaux avaient été lancés depuis plus d’un an par le président Macky Sall, n’a toujours pas débuté. Ce pont doit sortir une bonne partie de la région de Sédhiou de l’isolement.
Mieux, il permettra de faire des raccourcis pour se rendre à Sédhiou ou à Kolda pour les habitants de la Basse Casamance. Seul le tronçon qui relie Marsassoum au croisement de Badiouré, qui doit être bitumé dans le cadre de ce projet, a été gratté. S’agissant de la route des Kalounayes, dans le département de Bignona, dont le début des travaux était prévu dans le courant 2019, rien n’est fait pour l’instant. Cette route est pourtant d’une importance capitale car devant relier trois communes rurales et créer un raccourci entre Marsassoum, Sédhiou et Ziguinchor. Du point de vue économique, elle pourrait jouer un grand rôle parce que les Kalounayes, qui n’ont été touchés qu’au début du conflit casamançais, regorgent de beaucoup de produits locaux.
L’arboriculture, l’élevage et la culture des céréales y sont très développés. Depuis quelques années, on y note également le développement de l’apiculture. Toujours dans le département de Bignona, l’achèvement du bitumage de la Boucle du Blouf, promis pour 2019, n’est toujours pas effectif. Il reste encore un tronçon de 15 kilomètres reliant Balingore à Bignona à bitumer. Il y a des tronçons également à reprendre car dégradés par endroits. D’ailleurs, beaucoup d’observateurs, jugeant les travaux très mal faits, estiment que cette route devrait être reprise de Bignona à Thionck-Essyl.
L’espoir du barrage d’Affiniam
Pour ce qui est des travaux de réhabilitation du barrage d’Affiniam, qui est l’une des plus grandes préoccupations des populations de la Basse Casamance, le ministre de l’Agriculture en a récemment lancé les travaux. C’était en présence de l’ambassadeur de Chine à Dakar. Ce barrage, réalisé dans les années 80 avec l’appui de la coopération chinoise sur une vallée d’environ 11000 hectares dont 5 000 envahis par la langue salée, avait pour objectif de relancer la riziculture dans cette contrée de la Casamance, menacée par les longs cycles de sécheresse qu’avait connus l’Afrique de l’Ouest dans les années 1970-80. Non seulement il devrait permettre d’irriguer des milliers d’hectares de parcelles rizicoles, mais aussi favoriser l’arboriculture et fournir de l’électricité plus tard. Mais à peine le projet avait-il commencé à fonctionner qu’il y a eu un arrêt avec des conséquences néfastes sur le plan économique et social. Le marigot de Bignona, sur lequel il avait été érigé, naguère très riche en poissons et huîtres, verra disparaître de façon progressive toutes ses ressources halieutiques.
Et même la mangrove a été décimée, laissant la place à des étendues nues. Ce qui a provoqué l’ire des populations riveraines qui étaient obligées de se tourner vers des poissonniers en provenance de Gambie pour se ravitailler en poissons à des prix parfois très élevés. Et l’essentiel du poisson vendu par ces Gambiens étaient des ‘’yaboys’’ (un poisson de basse qualité). Il arrivait même qu’il y ait des semaines de pénurie de poissons dans cette zone. Ce alors qu’avant la construction du barrage, avec la générosité de cet affluent du fleuve Casamance, il y avait une surabondance de poissons dans la zone. Beaucoup de familles pêchaient, elles-mêmes, leurs besoins en poissons.
Sur un autre plan, la langue salée que l’ouvrage était censé éradiquer ne cesse de gagner du terrain, engloutissant des centaines d’hectares de parcelles rizicoles au grand dam des populations. Depuis des décennies, ces populations font des plaidoyers pour amener les décideurs à diligenter la réhabilitation de ce barrage dont l’impact économique et social peut être énorme s’il fonctionne correctement…
ALIOUNE BADARA THIAM S’ENGAGE POUR LA PROMOTION DE LA DESTINATION SENEGAL
50 hectares pour construire une ville durable à Mbodiène, dénommée «Akon City» et qui sera composé de 60 villas dotées de ‘’commodités’’ et d’‘’installations modernes’’
Le chanteur américain Akon, Alioune Badara Thiam de son vrai nom, a signé mardi avec les autorités sénégalaises un accord de bail portant sur la construction d’une «cité futuriste’’ à Mbodiène, près de Mbour (ouest), un projet par lequel il s’engage à soutenir la promotion de l’activité touristique au Sénégal.
L’accord liant les deux parties a été signé par le chanteur et le ministre du Tourisme et des Transports aériens, au nom de la SAPCO, la Société d’aménagement et de promotion des côtes et zones touristiques du Sénégal. Cet accord de bail portant sur 50 hectares va permettre de construire une ville durable à Mbodiène, dénommée «Akon City» et qui sera composé de 60 villas dotées de ‘’commodités’’ et d’‘’installations modernes’’, une initiative appelée à traduire la vision du Sénégal émergent, selon le chanteur.
Ni lui ni le ministère du Tourisme et des Transports aériens n’ont donné aucun détail concernant le montage financier de ce projet. Le chanteur compte s’investir dans le secteur touristique sénégalais, avec la construction de cette «cité futuriste» devant être livrée dans un délai d’un an, en plus d’autres projets d’une «plus grande envergure», dont une «ville durable».
La construction de cette ville «prendra beaucoup plus de temps». «C’est un secteur dans lequel le Sénégal dispose de beaucoup d’atouts», a dit Akon après avoir visité le nouvel avion de la compagnie Air Sénégal à l’aéroport Blaise-Diagne de Diass (AIBD). Selon le ministre Alioune Sarr, chargé du Tourisme et des Transports aériens, cet investissement va accompagner le secteur touristique et le transport aérien, identifiés dans le Plan Sénégal émergent (PSE) comme des «porteurs de croissance». Akon, connu à travers le monde et suivi par des millions d’internautes à travers les réseaux sociaux, s’engage de son côté dans la promotion du tourisme au Sénégal et de «notre compagnie nationale», a dit M. Sarr, qui a fait visiter au chanteur le nouveau A330 Néo de la compagnie Air Sénégal. «Air Sénégal ouvrira une ligne sur les Etats Unis, et nous comptons nouer un partenariat avec Akon pour que la promotion [du tourisme sénégalais] sur le marché américain et des Caraïbes puisse être faite par cette personnalité qui est une référence sur le plan mondial», a souligné Alioune Sarr.
Selon ce dernier, l’AIBD, dont le nombre de passagers devrait être de deux millions 500 mille en fin 2019, cible pour 2020 «pas loin des trois millions de passagers». A l’annexe du ministère située à l’aéroport de Diass, Akon a eu droit à une présentation de l’initiative AIBD City Business, «un projet d’extension autour de l’aéroport, avec un centre de maintenance des avions (MRO), un centre de formation aux métiers aéronautiques et une ville aéroportuaire». «Dans les grands aéroports du monde, vous avez en permanence une ville où les hommes et les femmes travaillent tous les jours’’, a-t-il dit, donnant l’exemple de Roissy-Charles-deGaulle (France), où «plus de de 200 mille personnes travaillent chaque matin et rentrent chez eux tous les soirs».
Alioune Sarr, qui n’a donné aucune précision relative au montant de ces projets, a par ailleurs réitéré la volonté du gouvernement de construire et de réhabiliter 13 nouveaux aéroports. Selon lui, ce projet va démarrer avec l’aéroport de Saint-Louis, avant celui de Matam et Ourossogui, trois villes situées dans le nord du Sénégal.