SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
27 juillet 2025
par Bosse Ndoye
FERDINAND COLY-SÉNÉGAL, VERS UNE FIN DE MATCH AMÈRE ?
Si elle devait survenir, la renonciation du vice-champion d’Afrique 2002 à sa nationalité – pour des raisons de (in)justice - ferait non seulement le tour de la planète mais porterait un sacré coup à l’image du Sénégal dans le monde
Loin des stades de football, c'est sur le terrain administratif que semble se jouer présentement le match, à l’issue incertaine, opposant Ferdinand Coly à ce qui pourrait être son futur ex-pays. En effet, l'ancien capitaine des lions dit avoir entrepris les démarches nécessaires pour renoncer à sa citoyenneté sénégalaise. La raison avancée : la lenteur des procédures judiciaires dans le contentieux qui l’oppose à Saliou Samb, le président du Stade de Mbour, qu’il accuse de l’avoir escroqué plusieurs millions.
Cette sortie médiatique fracassante de l’ancien lensois constitue-t-elle des cris d’orfraie d'un citoyen désespérément perdu dans les dédales des atermoiements de la justice de son pays ; ou est-elle juste un habile coup de communication visant à mettre une certaine pression sur les autorités judiciaires et politiques du pays – puisque la séparation des pouvoirs y est une chimère -, afin qu’elles se penchent plus rapidement sur son dossier. Car, si elle devait survenir, la renonciation du vice-champion d’Afrique 2002 à sa nationalité – pour des raisons de (in)justice - ferait non seulement le tour de la planète mais porterait un sacré coup à l’image du Sénégal dans le monde. Sans mentionner les réticences qu’elle pourrait engendrer entre autres, chez nombre de nos compatriotes vivant à l’étranger et désireux d’investir dans le pays et les binationaux qui seraient tentés de répondre à l’appel de l’équipe nationale de football.
En tout état de cause, cette situation doit pousser tout un chacun dans le pays, les autorités politiques en premier, à jeter un regard très critique sur le fonctionnement de notre système judiciaire. Ce regard est d’autant plus nécessaire au moment où se tient le procès du double meurtre de Médinatoul Salam marqué surtout par l’absence de « l’autorité morale » des Thiantacounes pour des raisons médicales. Ce qui n’est pas nouveau parce que les questions de santé ont été souvent servies comme alibi par quelques gros bonnets pour se soustraire à la justice, éviter la prison ou obtenir une liberté provisoire après avoir été incarcérés. Qui ne se souvient pas de ces phrases chocs et alarmantes : « Bibo Bourgi pisse du sang’’ ; ‘’Baïla Wane court un risque de mort subite’’ ; » Cheikh Béthio Thioune patient âgé de 76 ans aux antécédents : cardiovasculaires, hypertension artériel et fibrillation auriculaire récidivante, AVC ischémique avec transformation hémorragique sous anti vitamine K (AVK), maladie des petits vaisseaux, néo plagie en rémission sous chimiothérapie. Taïb Socé Souffre de diabète ; Thione Seck souffre d’un diabète qui a atteint ses reins…[1]’’. Pourtant une fois libérées, ces personnes commencent à vaquer à leurs occupations comme si de rien n’était. Pendant ce temps, nombre de nos « pauvres concitoyens », qui n’ont ni leur notoriété encore moins leurs réseaux de relations, croupissent en silence dans les prisons du pays pendant de longues années pour parfois des délits ou crimes qu’ils n’ont pas commis. Sans oublier les longues périodes de détention préventive. C’est dire à quel point le cri du cœur de Ferdinand Coly peut être compréhensible quel que soit ce qui le sous-tend. Car la justice au Sénégal, à maintes reprises, tarde non seulement à être rendue mais n’est pas souvent très bien rendue.
Dès lors, s’il est un domaine où le fast track - expression à la mode dans le pays - devrait être vite appliqué très sagement, ce serait bien celui de la justice. Même s’il peut y avoir des cas plus complexes dont le traitement demande beaucoup plus de temps.
Dans son livre, Afrique, notre avenir, Jacques Godfrain raconte qu’un président africain lui a dit un jour : "Pour avoir une économie saine, je préfère un bon ministre de justice à un bon ministre des finances. Sans les garanties judiciaires un pays ne peut pas se développer[2]." L’auteur de cette phrase ne croyait pas si bien dire. Car en plus d’être le fondement du contrat social liant les citoyens d’un pays, la justice est un terreau où pousse une économie prospère. Il suffit juste de regarder les pays les plus développés de la planète pour en avoir le cœur net. Dans un pays où règne une bonne justice sociale les investisseurs, locaux comme internationaux, sont prêts à se lancer dans de multiples projets parce que ne craignant pas d’être lésés et les richesses profitent équitablement à ceux qui y vivent. Imaginez que les milliards détournés sans conséquence dans les affaire Prodac, Mamour Diallo, Coud soient investis pour l’emploi des jeunes dans le pays. Le taux de chômage chuterait à coup sûr. Mais on est loin du compte ! La sortie de Ferdinand Coly a eu au moins le mérite de faire parler du fonctionnement de la justice dans le pays.
Après cette campagne victorieuse, il y a eu les promotions qui ont récompensé les premiers transhumants - Celui qui a fait campagne avec les véhicules de la poste se retrouve à la Lonase, endroit le plus "cash" de notre République dispendieuse
Les images que nous renvoient les violences politiques sont trompeuses. Elles nous laissent accroire que les combats que se livrent nos politiciens et les coups qu'ils se portent, sont siglés des oriflammes de leurs partis respectifs. Que nenni ! Les plus grandes violences qui ont jalonné notre histoire politique ont eu lieu du temps de la défunte et senghorienne UPS, parti on ne peut plus unique qui régnait sur le Sénégal. Leur chef, Léopold Sédar Senghor persuadait ses partisans de se livrer à une lutte sans merci, qui eut des conséquences funestes, avec des campagnes électorales constellées de drames et d'assassinats sordides. Les places étaient rares et préserver son territoire électoral nécessitait d'avoir un sens et un art de la guerre aiguisés par les ambitions.
De fait, du PS à l'APR en passant par le PDS, rien dans les méthodes n'a changé. Plus on veut être près du chef lors de la distribution des bonbons, plus on emprunte aux arguments violents. Et les coups bas sont plus mortels que les coupe-coupe. En tête du hit-parade des armes utilisées, mysticisme et dénigrements contre des camarades de partis sont légion. Et tout est fait pour créer les conditions d'un psychodrame permanent qui anime la vie de nos partis politiques. C'est le règne du dividendisme, qui veut que l'on réclame son dû au prorata du combat que l'on a mené auprès du grand manitou, qui a droit de vie et de mort sur les fonctions souvent accordées selon le seul critère de la proximité avec le "propriétaire" du parti. Cela a donné des nominations loufoques que la charité chrétienne me recommande de ne pas citer dans ces lignes. Quoique, je ne résiste pas à évoquer la nomination à la tête du BSDA de l'auteur de l'unique chanson de son pauvre répertoire, qui était à la gloire du président Macky Sall.
Qui ne se souvient pas des consignes du chef de l'État à ses directeurs généraux, qui devaient en échange "mouiller le maillot" pour les combats politiques futurs. En creux, cela avait l'air d'une permission assumée d'user des moyens de leurs sociétés pour faire gagner le parti. D'ailleurs, les récompenses sont tonitruantes. Celui qui a fait campagne avec les véhicules de la poste se retrouve à la Lonase, endroit le plus "cash" de notre République dispendieuse. J'arrête de cafter.
Après cette campagne victorieuse, il y a eu les promotions qui ont récompensé les premiers transhumants. Et celles qui ont décoré les plus ardents organisateurs de meetings. Et puis il y a les remplacements de ceux qui n'ont pas assez mobilisé, qui n'ont pas élu domicile dans la permanence du parti, mais surtout ceux qui ont été limogés pour "délit de compétence avérée", parce qu'ils s'étaient plus engagés dans la durée de leurs missions, celles-ci exigeant vision et objectifs à long terme. Comment peut-on avoir dégagé un criminologue qui avait mis sur pieds un vrai travail autour d'une problématique cruciale qui a pour nom LA SECURITE DES CITOYENS. Maître Khaly Niang a certes eu des difficultés à assoir son projet qui était nouveau, mais qui avait besoin de se dérouler dans la durée et la constance, parce que relevant d'un profond changement de paradigmes et de comportements. Le Dr Papa Khaly Niang a d’abord pensé que « la formation des citoyens aux bons comportements devait être mise en vigueur afin que ceux-ci soient capables d’assurer leur sécurité eux-mêmes face aux problèmes de sécurité. Ces derniers selon lui, sont si importants qu’ils sont aujourd’hui au centre du développement, notamment la sécurité de proximité qui constitue un levier incontournable sur lequel les collectivités territoriales peuvent s’appuyer pour élaborer des stratégies de développement ». Avec lui, le Sénégal a montré la voie : « beaucoup de pays environnants viennent s’imprégner du modèle sénégalais en matière de gouvernance sécuritaire de proximité », témoigne-t-il.
"Nous avons besoin d’une prise de conscience pour savoir définitivement que rien d’important et de solide, ne pourra se faire sans la sécurité au niveau global et au niveau de la proximité’’, a-t-il ajouté. Ainsi, en l’absence de la police municipale, les ASP pouvaient suppléer le maire dans certaines tâches. Les résultats commençaient à affleurer. Tout repart de zéro avec le cortège d'embauches souvent caractérisées par les proximités partisanes.
Certains éjectés heureusement ont leurs vécus et leurs métiers. Ils s'en remettront, regagnant leurs maisons qu'ils possédaient avant leurs nominations. Sans rancune et forts de leurs compétences.
Que leur vie soit belle. Ils n'auront qu'à remettre l'ouvrage sur le métier. En toute élégance. Avec toujours le désir d'écrire et de partager ce à quoi ils n'ont jamais cessé de croire. Notre sécurité attendra. Tant que le remplaçant suce ses bonbons… Et vogue la galère.
par Jean-Baptiste Placca
POUVOIR SANS FIN, UN PIÈGE SANS FIN
Il est trop facile, lorsque l’on est au pouvoir, avec les moyens qui en découlent, de se référer au peuple pour justifier un changement des règles du jeu, afin de se ménager la possibilité de perdurer
Il est trop facile, lorsque l’on est au pouvoir, avec les moyens qui en découlent, de se référer au peuple pour justifier un changement des règles du jeu, afin de se ménager la possibilité de perdurer. Car l’éternité, en enfer, est invivable à un point tel que ne peuvent deviner ceux qui monopolisent le paradis…
La question d'un potentiel troisième mandat pour Alpha Condé. Ce débat mobilise aujourd’hui l’opinion en Guinée et il s’est transporté, cette semaine, sur la scène continentale, avec les interviews, sur RFI, de l’ancien Premier ministre Sidya Touré et de Rachid Ndiaye, conseiller spécial du président Condé. Mais d’où vient cette impression de dialogue de sourds qui persiste, après avoir écouté l’opposant puis le représentant du pouvoir ?
En fait, c’est pire qu’un dialogue de sourds. Ce sont des monologues parallèles, dans lesquels chaque camp est tellement enfermé dans sa logique qu'il n’y a aucune chance de les voir un jour tomber d’accord. Il n'est point besoin d'être un oiseau de mauvais augure pour craindre le pire, dans ces conditions, pour la Guinée. Etaler, comme ils l’ont fait, leurs divergences devant tant d’auditeurs, c’est un peu comme transporter le linge sale de la Guinée sur la place publique continentale. Mais, pour ne pas le laver, hélas ! Et ici, en l’occurrence, il faut juste constater qu’il ne reste plus au peuple guinéen qu’à prier tous ses dieux, pour que ce débat malsain ne vienne embraser la prochaine présidentielle, et le pays avec.
Pourquoi serait-il malsain, en démocratie, de débattre d’un éventuel troisième mandat ?
Parce que tous savent que c’est une source de conflits aux conséquences incontrôlables. L’argumentation du peuple souverain, libre de décider s’il veut ou non une présidence à vie est un peu spécieuse. Car il est toujours facile, lorsque l’on est installé au pouvoir, avec les moyens qui en découlent et les attributs qui vont avec, de se référer au peuple pour justifier un changement des règles du jeu, afin de se ménager la possibilité de perdurer.
En privé, de plus en plus d’observateurs avisés de la vie politique continentale confessent craindre le retour à la mode des coups d’Etat dans notre Afrique francophone. Il est souvent de bon ton de feindre d’ignorer que les conditions déterminantes de nombreux putschs sont créées par les pouvoirs en place eux-mêmes. Dans une démocratie, lorsque les diverses sensibilités, la population, en viennent à manquer d’espace de respiration, les putschistes virtuels jubilent. Il est donc suicidaire, lorsque l’on est aux affaires, de manipuler les textes et la loi pour restreindre les libertés des adversaires. De tout temps, les coups d’Etat ont été perpétrés par des militaires qui estimaient devoir réparer quelques injustices. C’est d’ailleurs pourquoi, plus souvent que ne veulent se l’avouer les démocrates, les putschs sont accueillis comme un mal nécessaire, et les putschistes, parfois, comme des libérateurs. Bien sûr que certains, à leur tour, se muent en bourreaux. Mais un coup d’Etat ne tombe jamais par hasard sur un pays.
Mais un troisième mandat peut aussi bien être la règle…
Sauf que celui qui demande un troisième après deux, trouvera toujours des raisons pour justifier la demande d'un quatrième, après trois. C’est comme si, au football, le match était arbitré par une des deux équipes qui s’affrontent – ce qui est déjà une anomalie, et qu’à la 85e minute, cette équipe, juge et partie, décidait de faire jouer une mi-temps supplémentaire, sous prétexte qu’elle aurait besoin de cent vingt minutes pour réussir les prouesses dont elle n’a pas été capable en quatre-vingt dix minutes.
La construction d’une nation est, par définition, une œuvre sans fin. Prétendre vouloir achever un chantier perpétuel avant de quitter le pouvoir, c’est vouloir s’accrocher à perpétuité au pouvoir. Le bon président est celui qui peut dire à son successeur : « Voici ce que j’ai achevé ; voilà les chantiers à parachever ; et ceux à initier pour le futur ». Vous ajoutez votre part à l’édifice, et l’histoire jugera.
La limitation à deux du mandat présidentiel peut donc réellement éviter aux nations des crises graves ?
Absolument ! Même les oppositions les plus radicales se consolent à l’idée que, de gré ou de force, après le second mandat, ils en auront fini avec le sortant. Mais ruser pour changer les règles, c’est priver la population et l’opposition de cet espace de respiration qui, comme le disait l’ancien Premier ministre Sidya Touré, permet d’éviter qu’une seule personne ne confisque l’avenir de 12 millions de Guinéens. Le problème, avec ceux qui sont au pouvoir, est qu’ils s’imaginent rarement le sentiment de rejet qu’ils peuvent inspirer à leurs adversaires et, parfois, à la population. L’éternité, en enfer, est invivable à un point que ne devinent pas ceux qui monopolisent le paradis. Et lorsque l’on a eu la chance d’être reconduit une fois par son peuple, partir, au terme du second mandat, est à la fois un acte de courage et de dignité.
Par Modou Mamoune FAYE
DES TÉLÉS SANS VISION
Les chaînes de télévision sénégalaises ont de sérieux problèmes de contenu - C’est à croire qu’elles n’ont pas de chargés de programmes.
Du matin au soir, on n’y passe presque que des divertissements : clips musicaux saccadés, talk-shows délirants, séries à l’eau de rose, débats soporifiques, et j’en oublie. Vous allez sans doute dire que j’exagère et qu’il ne faut pas mettre toutes les télés dans un même sac… cathodique, mais le problème est que rares sont celles qui font des efforts pour se démarquer des autres, avoir leur propre identité visuelle et programmatique. Pour les besoins de cette chronique, j’ai passé une bonne partie de la semaine à suivre les émissions du paysage audiovisuel sénégalais. J’avoue que j’en suis sorti totalement abasourdi et quelque peu groggy.
Le premier constat est que la plupart de nos chaînes (à quelques rares exceptions près) évoluent dans le vase clos de leurs studios dont elles sortent rarement. Leur ronronnement soporifique laisse pantois tout téléspectateur doté d’un minimum d’esprit critique. Les programmes commencent par des émissions matinales dans lesquelles les animatrices (je ne suis pas misogyne, mais ce sont elles qu’on voit plus que les animateurs) rivalisent de tenues hyper colorées, de peaux dépigmentées et de faux cheveux qui les font ressembler à des poupées Barbie tropicalisées. Puis, un peu plus tard en fin de matinée, commencent les talkshows avec des hommes et femmes un peu plus âgés et au discours trop moralisateur. Dès la fin de ces émissions, commence une longue diffusion de clips musicaux et de divertissements de toutes sortes.
Après les journaux télévisés de fin d’après-midi, les comiques prennent le relais avec leur humour à deux balles qui ne font rire que ceux qui s’ennuient à mort chez eux. Et après tout cela, nos télés enchaînent avec les séries qui vont de « Wiri Wiri » à « Pod et Marichou » en passant par « Idoles », « Maîtresse d’un homme marié » ou « Mbettel ». Dans la quasi-totalité des émissions télés sénégalaises, on parle de tout et de rien : du dernier buzz médiatique d’un chanteur ou d’une chanteuse à la mode, des rivalités dans les couples, de la lancinante question du maraboutage dans les familles polygames, et j’en oublie. Le divertissement, ou entertainment comme disent les anglo-saxons, semble avoir pris le dessus sur les programmes. Il est vrai que cet aspect fait partie intégrante du petit écran depuis que John Reith, premier directeur de la Bbc, l’a conceptualisé au début des années 1920 en parlant des trois objectifs de la télé : l’information, l’éducation et le divertissement. Cependant, ce concept est totalement dévoyé de nos jours, surtout dans notre pays où, depuis la libéralisation de la télévision et l’apparition des chaînes privées au début des années 2000, le paysage audiovisuel est devenu un véritable capharnaüm. On a l’impression que les propriétaires de ces médias ont mis les charrues avant les bœufs en créant d’abord des télévisions avant de penser au contenu. Des télévisions sans vision, en quelque sorte.
A notre avis, ce puissant outil n’est pas un joujou à mettre entre les mains du premier businessman venu. En effet, depuis sa naissance, en 1920, la télévision est perçue comme ayant un grand pouvoir d’influence, de persuasion et de manipulation, bref, un instrument qui pourrait servir d’outil de propagande pour orienter l’opinion publique et peser sur ses décisions. Certains médiologues parlent de télécratie ou plus généralement de médiacratie pour reprendre le terme de François Henri de Virieu, célèbre animateur français de l’émission « L’heure de vérité », dans un livre paru au début des années 1990. La toute-puissance de ce médium, devenu omniprésent, a tendance à remplacer l’institution familiale, socle de nos sociétés, mais qui s’effiloche de jour en jour face à la démission de bon nombre de parents.
Dans la plupart des familles, les enfants passent une bonne partie de la journée devant le petit écran. Et leurs cerveaux, qui n’ont pas encore la capacité d’analyse et de discernement, ont tendance à mimer tout ce qu’ils voient. Face à l’effritement de plus en plus constaté de l’éthique, de la morale, en somme, des valeurs qui sont le fondement de toute société consciente de son devenir, les programmes télévisuels et leurs effets pervers font des ravages dont les conséquences seront certainement perceptibles d’ici quelques années. Nos télés, prises dans la frénésie d’une course à l’audimat, ne s’embarrassent pas de la qualité du contenu de leurs programmes. L’essentiel est de faire des profits, quels qu’en soient les moyens.
L’information spectacle est devenue la norme ; on vend les émissions comme on vend n’importe quel bien de grande consommation. Des marques de produits sont exposées sans gêne sur les plateaux, de la pub est maladroitement glissée entre les scènes des séries, des prétendus guérisseurs envahissent les plateaux et y vendent leur camelote supposée soigner toutes les maladies possibles et imaginables. Tout cela fait rarement réagir le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) dont les membres se contentent de balancer de timides communiqués de presse et des avis trimestriels que les patrons jettent à la poubelle. Des patrons qui ont sans doute bien assimilé cette phrase de Patrick Le Lay, l’ancien patron de Tf1 qui, en 2004, avouait sans ambages : « Nos émissions ont pour vocation de rendre le téléspectateur disponible, de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c'est du temps de cerveau humain disponible ». Pourtant, si les responsables de nos télévisions faisaient l’effort de demander à leurs reporters de sortir du confort de leurs plateaux, ils auraient pu montrer aux téléspectateurs de très belles choses.
A Dakar et dans les régions de l’intérieur du pays, il y a plein d’histoires à raconter, de zones à découvrir, de personnages à donner en exemple et de patrimoine à valoriser. Mais non, on se contente de plastronner sous les sunlights des studios, se gargarisant de belles paroles qui ne veulent rien dire et buvant les pseudo-analyses de journalistes qui n’ont jamais fait un grand reportage de leur vie, qui ne sont jamais sortis de leurs studios, mais qui se sont autoproclamés « experts en tout », même s’ils n’ont pas encore totalisé dix ans de carrière ! Pendant ce temps, ce sont les télévisions étrangères qui viennent réaliser chez nous de superbes documentaires, à l’image de ceux qui passent, depuis quelques semaines, sur la chaîne Voyage et où l’on montre les belles plages du littoral sénégalais, de Kayar à Dakar en passant par Saint-Louis et son parc aux oiseaux du Djoudj. Dans cette série intitulée « Les sentinelles de l’Afrique », on raconte la triste histoire de Yayou Bayam Diouf, une brave femme de Thiaroye-sur-Mer, en banlieue dakaroise, qui a perdu son unique fils dans le naufrage d’une embarcation en partance pour l’Europe, mais qui se bat pour défendre les pêcheurs et protéger son environnement. On y partage le quotidien des femmes des îles du Saloum qui, inlassablement, prennent le chemin des mangroves pour y récolter des huîtres et gagner dignement leur vie. On y découvre le talent de la couturière saint-louisienne Rama Diaw dont les belles créations n’ont rien à envier aux collections occidentales. On fait une plongée dans les dures conditions de vie des pêcheurs de Kayar qui voient leurs ressources halieutiques s’épuiser avec l’exploitation de nos mers par des chalutiers étrangers. Bref, toute une galerie de portraits et de reportages qu’auraient bien pu réaliser nos télévisions si elles avaient fait un tout petit effort d’investigations.
LE GROUPE PARLEMENTAIRE «BENNO BOKK YAAKAAR» CONVOQUE LUNDI
Pour le Président du groupe parlementaire de la majorité «Benno Bokk Yaakaar» , le poste de Premier ministre est une station d’appoint au Président de la République, et sa suppression n’affecte nullement le bon fonctionnement des institutions.
Les députés membres du groupe parlementaire « Benno Bokk Yaakaar » (Bby) sont convoqués, lundi. Cette réunion, qui se tient en prélude à la séance plénière du samedi 04 mai prochain sur la révision constitutionnelle, permettra aux parlementaires de la majorité de mieux articuler leurs positions
Le président du groupe parlementaire de la coalition «Benno Bokk Yaakaar» (Bby) a convoqué ses collègues députés membres de la majorité pour une consultation, le lundi 29 avril. Cette réunion sera une occasion pour les parlementaires de la majorité d’harmoniser leurs positions avant la séance plénière convoquée le samedi 04 mai par le Président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, en vue d’examiner le projet de loi constitutionnelle sur la suppression du poste de Premier ministre. Aymérou Gningue explique que cette réunion a pour objectif de prendre moins de risque en étouffant éventuellement toute velléité de fronde dans l’œuf et d’éviter une quelconque surprise, samedi prochain, lors de l'examen du projet de loi constitutionnelle. Car, il se dit que certains députés de la majorité et des collaborateurs du Chef de l'Etat pourraient naviguer à contre-courant. Mais, le Président du groupe parlementaire de «Benno Bokk Yaakaar» rassure sur cette réforme constitutionnelle : Aymérou Gningue table au moins sur 115 députés pour le vote du projet de loi. Il est persuadé que le projet de loi passera «comme lettre à la poste».
D’après lui, seuls 88 députés suffisent pour valider ladite réforme. A cet effet, le Bureau de l’Assemblée nationale s’est réuni, jeudi dernier, pour fixer l’agenda de ladite réforme. Par ailleurs, M. Gningue a souligné que cette réforme n’affaiblit pas pour autant l’Assemblée nationale, puisque les députés vont continuer à poser des questions d’actualité, écrites ou orales aux ministres qui viendront défendre la politique gouvernementale dans les domaines qui sont les leurs. Il le croit d’autant plus que le référendum de 2016 a introduit, entre autres avancées, le contrôle des politiques publiques par l’Assemblée.
Pour le Président du groupe parlementaire de la majorité «Benno Bokk Yaakaar» , le poste de Premier ministre est une station d’appoint au Président de la République, et sa suppression n’affecte nullement le bon fonctionnement des institutions de la République. La réforme va surtout apporter plus de célérité dans le traitement des dossiers. Les députés de la majorité vont, par conséquent, l’adopter, conclut-il.
DAKAR-PLATEAU RESPIRE, MECANOS ET AMBULANTS RECLAMENT DES SITES
L’opération de désencombrement lancée par les autorités a changé le visage de Dakar-Plateau au grand bonheur des riverains.
Mais, des ambulants et des mécaniciens demandent des sites dédiés répondant aux normes pour exercer leurs activités en toute légalité.
Le contraste est saisissant. Des rues libérées des carcasses de voiture, des garages de mécaniciens fermés, les alentours de l’Assemblée nationale offrent ainsi un nouveau visage. Pour cause, les artères menant à cette institution ont été débarrassées des épaves et autres objets encombrants. En effet, il y a deux jours, le nouveau ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique, Abdou Karim Fofana, en compagnie du maire de la ville de Dakar et du préfet de Dakar-Plateau, a participé à l’opération de désencombrement ayant débarrassé la ville des épaves de voiture qui «ralentissent la circulation».
Les gargotières qui avaient élu domicile devant l’Assemblée nationale ont été également déguerpies. Les autorités veulent donner un autre visage à la capitale sénégalaise. Un groupe de mécaniciens, les habits tachetés d’huile de moteur, discutent sur la question devant la station-service sise à quelques pas du rond-point. Ils font face à leur ancien garage transformé en parking et où sont immobilisées des voitures neuves. A notre approche, ils se taisent, puis reprennent le débat. Ils affirment n’être pas concernés par l’opération. « Il n’y a jamais eu de garage mécanique par ici », lance l’un d’eux, la quarantaine bien sonnée. « La voiture a été prise ici par les agents de la municipalité », dit-il en pointant le rez-de-chaussée de l’immeuble qui abrite la Banque nationale pour le développement économique (Bnde). « Elle avait juste une panne d’essence », précise le mécano qui ne veut apparemment pas se prononcer sur la question.
A une vingtaine de mètres, Khadim Samb, cigarette à la main, discute avec son ami Nar, un mécanicien comme lui. Sans détour, il estime que ces opérations ne sont pas une première et ne vont certainement pas s’arrêter là tant que des solutions pérennes ne sont pas proposées aux personnes impactées. «Nous ne sommes pas contre le désencombrement, mais nous aimerions qu’on nous propose un autre endroit pour exercer notre activité», affirme Khadim. Ce mécanicien opérant à la place Soweto depuis 1992 propose que l’ancien Palais de justice du Cap Manuel soit affecté aux mécaniciens qui évoluent au centre-ville. «Ce bâtiment est laissé aux voyous alors qu’on pourrait en faire un bon usage et régler la question de l’occupation de l’espace», dit-il. Son ami renchérit : «pourtant, ils sont les premiers à venir nous chercher lorsqu’ils sont en panne. Il est donc impensable qu’ils nous recasent à Diamniadio, car nos clients seront les premiers à en souffrir». D’après Nar, le nouveau site réservé aux mécaniciens se trouverait effectivement au Pôle urbain de Diamniadio.
La grogne des ambulants
A quelques encablures de la place Soweto, à l’avenue Emile Bandiane, l’effervescence est à son comble avec la musique distillée par les haut-parleurs. Dans la longue rangée d’étals, Khadim Thiam tient une échoppe où il écoule des caleçons et autres sous-vêtements d’homme. Porteparole des marchands ambulants des environs, il assure qu’ils n’ont pas été informés de l’opération de déguerpissement. Mais, ils sont conscients de ce qui les attend. «J’ai été arrêté à deux reprise pour occupation anarchique de la voie publique et ma marchandise saisie. Le préfet ne nous a pas encore consultés, mais à travers les images que nous voyons à la télévision, nous nous attendons, à tout moment, à une descente», déclare le jeune homme. Originaire de Touba, il avoue que le déguerpissement est normal parce qu’ils occupent cet espace dans l’illégalité, mais c’est parce qu’ils n’ont pas le choix. Le vendeur soutient qu’ils essaient juste de gagner leur vie. « Nous avons tous un métier. Je suis cordonnier de formation. La vie est chère, on paie tout. Si je pouvais exercer mes activités à Touba, j’y resterais, mais je ne peux pas le faire», se défend-il. Pour montrer sa bonne volonté, Khadim Thiam souscrit à toute initiative de recasement des marchands ambulants dans un nouveau marché de la municipalité de Dakar-Plateau. «Je ne demande qu’à me régulariser», lâche-t-il. Sur la même allée, Kébé Bob, la cinquantaine, attend le bus 46 devant l’ancien bâtiment du Service d’hygiène. Elle pense que pour mettre un terme à l’occupation anarchique de la voie publique, l’Etat doit organiser des assises nationales pour instituer un cadre légal du commerce et des activités des mécaniciens, cordonniers et autres. «J’ai été dernièrement à Nouakchott. Les marchés ont été rasés et reconstruits de sorte que les vendeurs n’occupent pas l’espace public. Idem pour les mécaniciens. Ils ont tous leurs endroits spécifiques. Déguerpir n’est pas la solution, l’Etat gagnerait à mieux comprendre ses populations», dit-elle. Son bus venant de s’arrêter, Kébé s’y engoufre. A quelques mètres de là, la fumée s’échappe toujours de l’immeuble Scrupuldos noirci par les flammes qui l’ont ravagé la veille.
Par Dr. Abdoulaye TAYE
L’INVENTION POLITIQUE FONDE LE MÉRITE DU POLITIQUE FACE AU TECHNOCRATE
Les technocrates froids n’ayant aucun compte à rendre aux électeurs ont envahi le terrain de l’innovation politique déserté par les hommes politiques - Les peuples sont devenus les otages des modèles et des systèmes des économistes
Les technocrates froids n’ayant aucun compte à rendre aux électeurs ont envahi le terrain de l’innovation politique déserté par les hommes politiques. Le Fmi et ses experts nous ont servi dans les années 80 des plans d’austérité qui n’ont réussi qu’à nous précipiter dans le marasme économique et social. La loi 1973, adoptée par Georges Pompidou, ancien cadre de la Banque Rothschild, supprimait aux profits de spéculateurs privés la planche à billet.
Le bannissement de cette pratique de création monétaire longtemps à succès a conduit à des déficits budgétaires qui se traduisent par une réduction drastique des dépenses sociales préconisée par nos « valeureux » technocrates comme unique solution. La création monétaire désormais soumise aux lois et règles du marché comme le travail, les biens et les services va plonger tous nos états dans une anémie provoquée par un endettement excessif.
L’ultralibéralisme vient ainsi de consacrer la défaite de l’Etat face au capital. Une démocratie d’experts qui soumet la politique à l’économie vient d’être définitivement installée. De toutes les révolutions sociales (1789, 1848 et 1917) de l’histoire contemporaine, l’économie a été constamment au service de la politique. L’esprit politique, place l’économie au service de la politique tandis que l’esprit technocrate met la politique au service de l’économie. Le politique soumet les moyens aux objectifs tandis que le technocrate soumet les objectifs aux moyens. Il incombe aux politiques de fixer les moyens en les soumettant aux objectifs sociaux et économiques du régime et aux experts de les formuler techniquement et de les exécuter. De nos jours, la pratique politique dominée par les technocrates ordonne le contraire.
L’expertocratie qui soumet les objectifs aux moyens a pris le dessus sur l’invention politique qui fonde le mérite du politique face au technocrate. Les peuples sont devenus les otages des modèles et des systèmes des économistes et des technocrates. Les sociétés humaines reposent sur des mécanismes culturels, sociologiques et mentaux qui déterminent leur dynamisme fondé sur la satisfaction de leurs besoins matériels et moraux. La réalité est un ensemble de mécanismes et de dynamismes complexes. Les scientifiques procèdent dans leur processus d’appropriation, de maîtrise et de transformation de la réalité par des modélisations.
Les modèles issus de ces procédés intellectuels affichent des taux d’applicabilité qui déterminent leur pertinence et leur efficacité. La relation de la réalité au modèle se caractérise par ses performances interprétatives et productives du réel. Nos systèmes politico-économiques actuels sont régentés par un modèle macroéconomique et un modèle politico-démocratique. Ces deux modèles montrent aujourd’hui leurs limites du point de vue de leurs impacts négatifs sur les conditions de vie des peuples et partant se révèlent comme vieux, inadaptés et dépassés.
Le chômage, la pauvreté, le sous-développement, les crises économiques, les crises politiques sont autant de phénomènes qui nous rappellent les insuffisances de plus en plus évidentes de ces images intellectuelles que nos experts ont de la réalité. Le rôle du politique est d’ajuster ces vues de l’esprit pour les adapter à la société et à nos besoins en tant qu’êtres humains. Le modèle politique et démocratique en vigueur repose sur un système électoral et un Etat de droit. L’enjeu démocratique est un Etat social qui découle dans un jeu électoral de l’interaction entre les aspirations du peuple et le capital. Cette interaction se manifeste dans une contradiction où l’expert et le politique se partagent les rôles en défendant des intérêts différents. Le politique élu par le peuple, doit rendre compte au peuple. Il ne peut et ne doit qu’imaginer des stratégies qui lui permettent de concilier les intérêts du peuple et du capital.
L’expert, lui, n’est intéressé que par l’efficacité du capital qui légitime sa profession et son professionnalisme. Il se trouve que l’efficacité du capital est, sous plusieurs angles, en contradiction avec le progrès social attendu par les populations. La baisse des impôts sur le capital et la réduction des dépenses de l’Etat constituent ses solutions préférées. La lutte entre les intérêts du capital et du peuple se joue dans une modalité électorale sous la forme d’une contradiction démocratique. L’histoire des régimes politiques se confond à l’histoire des batailles et des acquis démocratiques qui se cristallisent sous une forme de gouvernement. La demande démocratique a alimenté le moteur des transformations des systèmes socio-politiques ainsi que des systèmes socio-économiques. Le visage de toutes les révolutions religieuses, sociales, économiques et politiques se caractérise par la demande démocratique.
Les révolutions démocratiques se sont manifestées d’abord par une demande d’égalité entre les hommes puis par une demande d’égalité des conditions sociales. Les opprimés demandent aux oppresseurs la reconnaissance du droit d’être leur semblable. Les contradictions exprimées par les rapports sociaux entre maitre et esclave, noble et serf, noir et blanc et enfin bourgeois et prolétaire sont stigmatisées par les revendications d’égalité au cours de l’histoire. La révolution du droit à légalité commence ainsi par la croisade contre les privilèges attribués par le statut social, le rang social, la race, la naissance ou le sang pour culminer aujourd’hui en un combat contre les inégalités sociales et économiques. Le droit de se nourrir, de se loger, de se vêtir, de se soigner, de s’instruire dans la dignité fonde la revendication à une distribution des opportunités et des possibilités associée à une redistribution des revenus équitable. L’égalité comme rapport social évolue maintenant en une égalité comme répartition équitable des revenus. Le modèle basé sur la bourse de sécurité familiale et la couverture maladie universelle est une innovation politique démocratique majeure qu’aucun technocrate ne peut et ne veut imaginer. Seul le politique est habilité. Son élargissement progressif puis sa généralisation à toutes les couches de la société associée à son approfondissement par l’augmentation des allocations aux bénéficiaires le projettent comme un outil efficace de réduction des inégalités sociales et économiques dans un contexte marqué par les défis de la globalisation. On peut le concevoir comme une nouvelle approche de la demande d’égalité fondée sur une protection de tous contre les risques et les accidents sociaux inhérents à la mondialisation.
En résumé, tous les problèmes des sociétés et de l’humanité sont essentiellement des problèmes politiques. L’activité politique est au cœur de l’évolution historique du monde. Aucune société humaine et humanisée ne peut exister sans organisation politique. L’acteur politique représente une espèce nécessaire qui mérite respect et considération. La politique est un art et une mystique. Il nous faut revenir aux fondamentaux de l’engagement, de l’éthique et du leadership politique.
Le politique doit se réhabiliter. Il doit se réconcilier avec sa mission et son rôle en prenant la place qui lui convient dans le processus de transformation de la société. Il ne peut le réaliser ni par une rhétorique, ni par un marketing politique basé sur la protestation, la contestation, la dénonciation, le nationalisme ou le patriotisme. Il doit conquérir sa place et sa légitimité par une inventivité qui lui confère une compétence fondée sur un pouvoir incontestable de transformation et de créativité. Il doit ajuster et réajuster les recettes du technocrate en les orientant dans le sens du progrès social qui demeure l’essence et le devenir de la société et de l’humanité. Le politique apprend plus que dans les livres, il apprend par l’expérience. La légitimité politique s’acquiert par une proximité, une écoute et une réponse satisfaisante aux besoins exprimés par les populations. La légitimité du politique prend sa source dans l’élection et se confirme par une légitimité démocratique qui prend son origine dans la satisfaction des préoccupations des populations.
La légitimité professionnelle du technocrate dépourvue de légitimité politique s’oppose au réalisme politique qui lui permet de réagir à la demande démocratique. L’expert s’occupe du management opérationnel des projets et des programmes tandis que le politique incarne leur management stratégique et leur orientation sociale et démocratique. Le politique coordonne le travail de son cabinet, oriente la stratégie et décide tandis que le technocrate opérationnalise et exécute. Autant il n’est pas nécessaire pour un président de la république d’être un technocrate, autant il n’est pas nécessaire pour un ministre d’être un technocrate. Il résulte de toutes ces raisons qu’un gouvernement éminemment politique est plus rassurant pour les citoyens qu’un gouvernement technocratique.
Dr. Abdoulaye Taye est Enseignant-chercheur à l’Université Alioune Diop de Bambey, Initiateur du projet Rbg-Amo
PAPE DIOP PEINT POUR EXORCISER SES DEMONS
Après un séjour en Europe, au tout début des années 2000, il a été rapatrié, car considéré comme malade mental. Depuis, il erre dans les rues de son quartier dakarois de la Médina et peint sur tout ce qui lui tombe entre les mains
Pape Diop n’est pas un artiste comme les autres. Après un séjour en Europe, au tout début des années 2000, il a été rapatrié, car considéré comme malade mental. Depuis, il erre dans les rues de son quartier dakarois de la Médina et peint sur tout ce qui lui tombe entre les mains. Son exposition intitulée « Hors-norme » est à voir au Pavillon de l’Institut français jusqu’au 15 mai.
Dans les rues et ruelles du quartier dakarois de la Médina, Pape Diop erre comme une âme en peine, l’air hagard, le look dépenaillé et parle souvent tout seul. Ses voisins disent qu’il est atteint de maladie mentale. Il traîne sa folie en bandoulière, pour parler d’une manière plus triviale, et vit dans sa bulle, dans un univers fait de couleurs et de personnages mythiques. A l’image de Vincent Van Gogh, Jean-Michel Basquiat, Paul Gaughin et de tant d’autres artistes « maudits » ou incompris ayant sombré dans les méandres obscurs d’une vie qui ne leur a pas fait de cadeaux, Pape Diop est en quête perpétuelle de la perfection. Il peint d’une manière compulsive, presque obsessionnelle, et dessine sur tout ce qui lui tombe entre les mains : le macadam, les murs, de petites planches de bois récupérées chez les menuisiers du coin, les façades des boutiques, les portes des maisons… En guise de matériaux, il utilise des morceaux de cuir, des mégots de cigarette, des chaussures usées, des tasses de café…, pour réaliser des œuvres où le symbolisme religieux prédomine, avec des figures bien connues des Sénégalais : le fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, son disciple Cheikh Ibra Fall ou le marabout tidjane Serigne Babacar Sy. « Je peins, donc je suis. »
Telle semble être la devise de cet artiste iconoclaste dont la création précède la réflexion, comme l’explique le texte du catalogue de son exposition intitulée « Hors norme », visible jusqu’au 15 mai 2019 au Pavillon de l’Institut français de Dakar. L’histoire de Pape Diop est singulière, douloureuse. C’est celle d’un jeune sénégalais parti faire fortune en Europe, mais qui en est revenu complètement traumatisé. Au tout début des années 2000, il a été rapatrié après que la folie s’est emparée de son âme. Depuis cette date, il erre à travers les rues et ruelles de sa Médina natale, marginalisé par les siens et vivant pratiquement « sans domicile fixe ».
Pour exorciser ses démons, il n’arrête pas de peindre et accroche ses œuvres sur les arbres, les comptoirs des boutiques, les échoppes des artisans et toutes sortes de lieux qui sont pour lui autant de galeries à ciel ouvert.
PLUS DE 2 000 TABLEAUX EN DEUX ANS
Lors du vernissage de son exposition, le 17 avril dernier, à l’Institut français, Pape Diop n’était pas présent pour expliquer la quintessence de son travail. Il n’aime sans doute pas les mondanités. Son discours quelque peu incohérent et son apparence iconoclaste allaient détonner dans ce lieu fréquenté par les bien-pensants. A sa place, son curateur Mamadou Boye Diallo dit Modboye était là pour essayer de décortiquer les œuvres et l’itinéraire artistique de celui qu’il suit depuis des années. « Je connais Pape Diop depuis mon adolescence. Au début des années 2000, dans les rues de la Médina où j’ai grandi et où je jouais au football, je le voyais souvent peindre sur les murs et le macadam », se souvient-il. Plus tard, il a appris que cet artiste marginal n’est pas un autodidacte car il a fréquenté les Beaux-arts de Dakar avant son exil en Europe. « A son retour dans son quartier natal de la Médina, il a été marginalisé, stigmatisé et dormait dans la rue. Au début, je le suivais de loin, mais depuis quatre ans, j’ai commencé à le côtoyer, à m’intéresser à son art et à collectionner les œuvres qu’il dessine sur des contreplaqués et autres objets », raconte Modboye. En le fréquentant, il remarque qu’il dessinait avec frénésie et en deux ans seulement, il a collectionné plus de 2 000 tableaux de Pape Diop. « Rien qu’en une journée, je peux en ramasser plus d’une vingtaine.
Après avoir dessiné ses œuvres, il les jette, les expose dans la rue ou les offre aux passants. Ce qui m’a le plus fasciné chez lui, c’est sa matière de travailler. Il n’a pas de quoi acheter des matériaux, mais son obsession de peindre le pousse à utiliser de l’huile de moteur, des restes de café, du charbon de bois ou des piles d’où il extrait des produits noirs. En guise de pinceau, il utilise des mégots de cigarette», poursuit-il. C’est de là qu’est parti un long processus de collection qui a abouti à une exposition en 2016 aux Céramiques Almadies, puis en 2018 durant la Biennale de Dakar, dans un coin de la maison familiale de Modboye, lors d’un évènement intitulé « Dakar brut ». C’était sa première exposition individuelle. Pape Diop fait partie de ceux qu’on appelle les artistes bruts et qui, contrairement aux artistes classiques, dont la carrière est étroitement liée aux galeries, aux fluctuations du marché et aux critiques, gardent jalousement leur liberté de création et ne s’embarrassent pas de principes académiques. Cet art a été conceptualisé par le plasticien français Jean Dubuffet dans les années 1940. « A l’époque, de nombreuses personnes revenaient de la Seconde Guerre mondiale complètement traumatisées par ce qu’elles ont vécu et étaient prises d’une obsession de dessiner pour exorciser leurs démons intérieurs », explique Modboye. En Europe et aux Etats-Unis, des galeries et des musées se sont même spécialisés dans l’art brut. « A force de côtoyer Pape Diop, je me suis dit : pourquoi ne pas le promouvoir et montrer au public toutes ses représentations de saints hommes tels que Cheikh Ahmadou Bamba et El Hadj Malick Sy qui sont autant de symboles de la religion et de la culture sénégalaises », nous confie-t-il. Son protégé est en pleine immersion dans une démarche spirituelle intemporelle qui nous plonge dans l’infini de notre âme.
A travers ses tableaux, Pape Diop, issu d’une famille adepte de la confrérie tidjane et très tôt imprégné de la réalité religieuse, est comme fasciné par l’image du fondateur du mouridisme, Cheikh Ahmadou Bamba, dont il raconte le fameux exil au Gabon avec des représentations de bateaux voguant sur des flots tumultueux ou de lions apprivoisés par le saint homme. « Ses œuvres ne sont pas à vendre et nous allons continuer à les collectionner pour en avoir au moins dix mille. Nous espérons bien, un jour, les exposer au Musée des civilisations noires de Dakar ou ailleurs dans le monde », souhaite Modboye. Quant à Pape Diop, même s’il est taraudé par les effets de la maladie mentale, il est bien conscient de son talent. Il s’investit pleinement dans son art, qui est l’essence de sa vie de bohème, mais n’est pas pour autant à la recherche de gloire comme ces professionnels qui signent leurs œuvres et les revendent à des prix exorbitants.
« YAATAL ART », UN CONCEPT ORIGINAL
Au début, ce n’était pas facile de l’approcher, mais au fur et à mesure, Modboye a senti que Pape Diop a besoin de parler avec d’autres personnes et de se sentir intégré dans la société. « D’aucuns me conseillent de l’extirper de la rue pour l’interner dans un centre psychiatrique, mais est-ce judicieux de mettre entre quatre murs quelqu’un qui a perdu la raison depuis 16 ans et qui a longuement vécu dehors ? », se demande-t-il. Pour le moment, il l’observe peindre et le suit dans ses pérégrinations artistiques à travers la Médina et sur la corniche dakaroise où il slalome dangereusement entre les voitures filant à vive allure. Lorsqu’il a appris que ses œuvres sont exposées à l’Institut français, Pape Diop a juste esquissé un sourire. Retranché dans son monde bien à lui, il suit tout cela avec distance et a à peine jeté un œil sur le catalogue où figurent quelques-unes de ses œuvres. « L’argent ne l’intéresse pas, mais à chaque fois que je le vois, je lui donne quelque chose afin qu’il règle quelques besoins. A mon avis, ce serait génial de créer une fondation à son nom pour aider d’autres malades mentaux comme lui en les internant dans des structures spécialisées », propose Modboye. Lui-même est initiateur, en 2010, de « Yaatal Art » (élargir l’art), une association d’action culturelle, sociale, artistique et touristique dont l’objectif est de décloisonner l’art en le mettant en contact direct avec le grand public. « En 1914, nos grands-parents qui habitaient au Plateau avaient été déplacés par les colons français vers la Médina lors de la fameuse épidémie de peste. Le nouveau quartier était alors devenu un ghetto. En créant « Yataal Art » et un musée à ciel ouvert inauguré en 2014, nous voulons rompre avec cette image de ghetto », indique-t-il. Des artistes étrangers, régulièrement invités, viennent embellir les murs et façades des maisons. « Nous exposons dans les demeures traditionnelles dont certaines datent de 1914 ou de 1935.
Les populations locales n’ont pas accès à l’art des grands musées et galeries fréquentés par les élites intellectuelles et financières. Nous avons donc décidé de décentraliser les évènements culturels, de les amener jusque dans les quartiers et, inversement, d’emmener des gens marginalisés comme Pape Diop dans les grandes institutions d’art », ajoute Modboye. De la rue 23 jusqu’à la rue 31, en passant par la rue 6, des façades sont repeintes. Une frénésie créatrice qui attire de nombreux touristes venus d’un peu partout pour admirer les fresques murales. « Nous en avons réalisées 85, sans compter celles de Pape Diop, et les artistes viennent de la France, de l’Allemagne, de la Palestine, du Burkina et bien sûr du Sénégal. C’est une forme de démocratisation de l’art », se réjouit-il. La Médina est connue pour être le lieu de naissance ou de résidence de nombreux artistes. Ce vieux quartier de la capitale est un vivier de talents et Modboye et ses amis ne font que continuer l’œuvre de leurs devanciers comme le grand percussionniste Doudou Ndiaye Rose, le chanteur Youssou Ndour, les plasticiens Kré Mbaye, Babacar Traoré…. Dans le futur, ils espèrent bien que leurs cadets reprendront le flambeau afin de perpétuer le legs artistique..
LA SOCIÉTÉ CIVILE BRÛLE LE PROJET DE MACKY
Le projet de loi portant suppression du poste de Premier ministre n’enchante guère la société civile sénégalaise qui juge unilatérale la démarche entreprise par le chef de l’Etat
La décision prise par le président Macky Sall de supprimer, de manière cavalière, le poste de premier ministre de l’architecture institutionnelle du Sénégal, est fortement déplorée par les membres de la Société civile. De l’avis de Seydi Gassama, directeur exécutif d’Amnesty international/Section Sénégal, «la réforme aurait dû d’abord faire l’objet de discussions ou de concertations». Avant de rappeler : «le président, dans son discours à la nation, a annoncé sa volonté de dialoguer avec la classe politique et toutes les forces vives de la nation». Pour lui, cette réforme ne doit pas se traduire par une concentration de pouvoirs au palais. «Il ne faut pas que le palais devienne le lieu où tout se décide, où tout se fait. il faut éviter que Boun Dionne devienne un Jean colin bis. Parce que Boun Dionne ne sera plus premier ministre, mais il sera certainement plus puissant à la présidence que quand il était à la primature. Beaucoup de gens, dans son parti, considèrent que ce poste est un tremplin pour la présidence de la république. En supprimant ce poste, il supprime cette idée ou il compte retarder la guerre de succession», indique-t-il. En outre, M. Gassama estime que «le président a manqué l’occasion de donner une consistance au dialogue qu’il veut entreprendre avec l’opposition, la Société civile, les forces vives de la nation». Un autre acteur majeur de la Société civile, Valdiodio ndiaye, coordonnateur de «Sunu élection», déplore lui aussi la démarche cavalière du chef de l’état. «Supprimer comme ça, de manière unilatérale, quelques articles de la constitution, forcément, ça va impacter sur le fonctionnement de l’état. Et en conséquence, nous savons tous quel était le rôle du premier ministre. le premier ministre, c’est lui qui était chargé de l’animation de l’action gouvernementale. Maintenant, si ce poste est supprimé, ça va impacter également sur les relations entre les pouvoirs exécutif et législatif», souligne M. Ndiaye.
Seydi Gassama : «Le Président a manqué l’occasion de donner une consistance au dialogue»
Et de renchérir : «donc, sur ce rapport-là, il n’y aura plus de responsabilité du gouvernement devant le parlement. il n’y aura également plus cette possibilité qui était offerte à l’assemblée de pouvoir introduire une motion de censure contre le gouvernement. Donc, l’un dans l’autre, il est évident qu’en termes de constat, ces changements sont des changements majeurs. Maintenant, est-ce que l’argumentaire qui a été avancé, qui consiste à revoir le fonctionnement des institutions, au nom du principe de la diligence dans l’exécution des actions de l’état, justifie cette suppression ? là, on sera obligé d’observer pour voir ce que ça va donner». Valdiodio ndiaye pense qu’il était important d’en discuter avec l’ensemble des acteurs politiques, «parce que l’opposition représente 42% des suffrages». Du côté des «Y en a marristes», c’est «Kilifeu» qui est monté en première ligne pour asséner ses vérités. «Avec Macky Sall, on prie le bon dieu qu’il fasse ses 5 ans et qu’il quitte le pouvoir. Qu’est-ce que vous voulez qu’on fasse ? Macky Sall fait tout ce qu’il veut et personne ne dit rien. Nous sommes toujours dans notre rôle d’alerte et de veille, mais on dirait que les Sénégalais ne comprennent pas. Juste un exemple : lorsque nous avons sorti notre single ‘Saï-saï’, il y a des hypocrites qui nous ont traités de tous les noms d’oiseau, alors qu’on ne faisait qu’alerter le peuple, leur dire : ‘attention. le jour où vous allez donner un second mandat à Macky Sall, il va montrer sa vraie nature’», martèle-t-il.
«Kilifeu» : «Tôt ou tard, la bulle va se dégonfler, et ce jour-là, ça peut déborder»
Le rappeur du groupe «Keurgui» d’enchaîner : «personne ne nous a pris au sérieux. Des gens ont dit que nous sommes impolis. Maintenant, nous sommes des artistes et on dépend de notre art pour vivre. là, actuellement, nous sommes en studio. On revient de voyage aux États-Unis. On essaye de jouer notre partition pour le développement du pays. Maintenant, on les laisse avec Macky Sall, d’autant plus qu’ils disent que le peuple l’a élu à 63%». Toutefois, «Kilifeu» ne compte pas abdiquer : «l’heure n’est plus à la radote. il faut agir. Mais, nous seuls, on ne peut pas tout faire. Je pense que les Sénégalais n’en ont pas encore marre. le jour où ils en auront marre, ils sortiront en masse pour dire : ‘ça suffit’. Que chacun et chacune prennent ses responsabilités. a notre retour de voyage, nous avons croisé beaucoup de marchands ambulants qui criaient leur désarroi. et si toutes ces forces frustrées faisaient un bloc pour sortir en masse dans la rue pour montrer qu’elles sont fatiguées. Mais, chacun veut rester dans son coin et dire : ‘Oui y en a marre doit parler, il doit agir’. alors que quand on parle, on nous insulte après. ah, à un moment donné, il faut dire stop et laisser comme tout le monde. et ça nous permet de travailler aussi, car on ne dépend ni de Macky, ni de l’etat, pour vivre». très en verve, le «Y en a marriste» enfonce le clou : «la presse honnête a fait son travail, personne n’a réagi. des gens honnêtes ont alerté, personne n’a voulu rien entendre. On laisse Macky faire ce qu’il veut, personne ne réagit. Or, les gens ne connaissent pas Macky, c’est quelqu’un qui aime le pouvoir. S’il pouvait se multiplier en 50 hommes, il ne nommerait personne à un poste. ‘dafa beug nek bur di bum, di bumi’. Sinon, comment comprendre la décision de supprimer le poste de premier ministre ? Pour ne rendre compte à personne. il fait tout ce qu’il veut, ça ne passera pas. Je suis sûr qu’un jour, et ça arriver tôt ou tard, la bulle va se dégonfler. Et ce jour-là, ça peut déborder».
AbdourahMane SOW, coordonnateur de la COS/M23 : «Macky Sall revêt sa gestion du manteau de la dictature»
la commission Orientation et Stratégies du Mouvement du 23 juin (cOS/M23) dénonce, par la voix de son coordonnateur, la démarche du chef de l’état dans sa volonté de procéder à la suppression du poste de premier ministre. «Le président de la république, Macky Sall, a, de manière surprenante et unilatérale, décidé de la suppression du poste de premier ministre, dans l’architecture gouvernementale du Sénégal. Une décision qui, dans sa mise en œuvre, engendrera, évidemment, de profonds changements dans les relations entre les institutions de ce pays, au-delà des réformes conséquentes à cette volonté politique, par des révisions de la constitution du Sénégal», indique Abdourahmane Sow. Avant d’ajouter : «encore une décision cavalière et politique, qui pose une fois de plus, la question de la bonne foi quant à l’appel au dialogue du président de la république à l’endroit des acteurs politiques et de la Société civile».
Pour M. Sow, «une décision aussi importante, du point de vue de son impact constitutionnel sur la marche du pays, devrait être précédée de concertations et de consultations avec l’opposition, pour asseoir les bases du dialogue pour le renforcement des acquis démocratiques et républicains». Même si le leader de la COS/M23 reconnaître «les prorogatives constitutionnelles du président de la république dans ses rapports avec le premier ministre, notamment en l’article 49 de la constitution du Sénégal». A l’en croire, le président Sall pouvait saisir cette occasion pour poser les jalons du dialogue national, «par l’implication de l’opposition dans des décisions aussi importantes». «Même si le mode ‘Fast-Track’ est évoqué pour lever les lenteurs administratives et accélérer la cadence pour des résultats probants, nous estimons que les risques d’un régime hyper présidentiel avec la concentration de tous les pouvoirs dans les seules mains du président de la république, fait froid au dos. Néanmoins, force est de reconnaître que «le premier ministre Boun Abdallah n’est point Mamadou dia», soutient-il. En tout cas, la COS/M23 dénonce «cette manière cavalière, érigée en règle par Macky Sall, consistant à revêtir sa gestion du manteau de la dictature». M. Sow recommande «le respect des principes d’ouverture, de concertation et de dialogue, pour éviter au Sénégal de sombrer, à cause de désirs inassouvis de pouvoir, dans la politique politicienne». Par ailleurs, il considère que «la Société civile sénégalaise doit assumer ses responsabilités par des positions claires et bien définies, dans le strict intérêt du Sénégal».
«LE POUVOIR DU PEUPLE DOIT ARRETER LE POUVOIR DICTATORIAL DE MACKY SALL»
Dans cet entretien, Dr Babacar Diop jette l’anathème sur le Président Sall et invite l’opposition à se réveiller pour poursuivre le combat.
Barka Isma BA (Vox Populi) |
Publication 27/04/2019
Les Sénégalais doivent empêcher le vote de la loi portant suppression du poste de Premier ministre en fermant les portes de l’Assemblée nationale, samedi prochain. C’est la conviction du Secrétaire général des Forces démocratiques du Sénégal (FDS). Dans cet entretien, Dr Babacar Diop jette l’anathème sur le Président Sall et invite l’opposition à se réveiller pour poursuivre le combat.
Les FDS, en synergie avec «Y en a marre» et Frapp France Dégage sont déterminés à faire barrage au projet de loi portant suppression du poste de Premier ministre qui sera examiné le 4 mai prochain par l'Assemblée nationale. Jusqu'où comptez-vous aller dans ce combat ?
FdS, «Y en a marre» et frapp France dégage ont mis un front de résistance pour alerter et demander au peuple de se mobiliser afin d’arrêter la réforme dangereuse de Macky Sall. Nous voulons demander à l’opposition de se réveiller pour retourner sur le terrain de la lutte et de la contestation populaires. Il n’y a que la lutte pour nous permettre de préserver nos acquis démocratiques, dangereusement menacés. Nous demandons aussi aux forces vives de rejoindre la présente lutte comme ce fut juin 2011. Le pouvoir arrête le pouvoir, a-t-on l’habitude de dire. le pouvoir du peuple doit donc arrêter le pouvoir dictatorial de Macky Sall qui, avec cette réforme, va avoir plus de pouvoir que le dictateur romain ou le monarque de droit divin. Constitutionnellement, Macky Sall a plus de pouvoir que césar, parce que le dictateur romain pouvait suspendre toutes les institutions, sauf le tribun de la plèbe qui était une magistrature sacrosainte. le tribun de la plèbe faisait office de contre-pouvoir devant le dictateur. Alors que Macky Sall a tous les pouvoirs, les pleins pouvoirs. l’article 52 est très dangereux. car il permet à Macky Sall de dissoudre l’assemblée nationale en situation de crise, contrairement à ce qui a été annoncé dans l’exposé des motifs. le gouvernement n’a pas dit la vérité aux Sénégalais. Avec cette constitution, il n’y a aucun contre-pouvoir devant la toute-puissance de Macky Sall. Il peut prendre toutes les mesures utiles au bon fonctionnement des institutions. C’est la porte ouverte à toutes les dérives. L’article 52 permet à Macky Sall demain de suspendre le parlement, suspendre le conseil constitutionnel et tous les ordres religieux. en vérité, avec cette constitution, Macky Sall peut, comme l’empereur romain caligula, élever son cheval au rang de sénateur dans le prochain Sénat qui est annoncé. C’est pour dire que les réformes de Macky Sall sont dangereuses. Elles menacent notre république et notre démocratie. C’est pourquoi, nous demandons à la société politique et à la société civile de construire une nouvelle synergie afin de faire barrage à cette réforme. Le peuple doit, le 4 mai prochain, fermer les portes de l’assemblée nationale, pour empêcher la tenue de la plénière.
Le Président Sall a, plusieurs fois, déclaré n'avoir pas l'ambition de briguer un troisième mandat. Mais le débat n'a pas encore connu son épilogue. Comment expliquez-vous cet état de fait ?
Je doute sérieusement de la bonne foi de Macky Sall. il avait la possibilité, depuis trois ans, de régler définitivement ce débat en introduisant une clause qui montre que son premier mandat fait partie du décompte des mandats, et il ne l’a pas fait. Il n’a pris aucun engagement solennel devant le peuple pour dire qu’il ne briguera pas un troisième mandat. Encore que, nous sommes tentés de demander ce que vaut la parole de Macky Sall. il est un adepte invétéré de l’idéologie du «Wax waxeet». les enfants héritent les folies de leurs parents, a-t-on l’habitude de dire. ce qui montre que nous risquons de vivre à nouveau 2012. en 2024, nous aurons le même problème. C’est pourquoi, nous demandons au peuple de se lever très tôt pour veiller sur sa constitution et sur les acquis démocratiques. La seule différence entre Macky Sall et Abdoulaye Wade est que Wade avait engagé ses réformes en fin de mandat, alors que Macky Sall engage ses réformes au début de son second mandat confisqué. Le peuple sénégalais est averti. L’opposition risque d’être surprise, si elle ne change pas de fusil d’épaule.
Un nouveau report des élections locales est agité depuis quelques jours. Quel commentaire en faites-vous ?
Le débat sur le report des élections locales, c’est vraiment ce qu’on appelle un faux débat. Nous demandons le respect strict du calendrier électoral. Nous nous opposerons à tout report des élections locales. En vérité, Macky Sall veut nous tendre un piège. il cherche à reporter les locales pour avoir des arguments de pouvoir reporter les législatives de 2022. le problème de Macky Sall, ce sont les élections législatives de 2022. il est conscient des risques qu’il court en 2022. Sa coalition commencera à s’effriter avec des alliés comme le Ps et l’Afp qui préparent 2024. Son parti commencera à se fissurer avec les ambitions présidentielles qui s’affirmeront à l’intérieur de l’apr. Tout son problème est de gérer cette véritable équation politique qui est devant lui. Et malheureusement, il ne compte que sur le tripatouillage constitutionnel et la manipulation des institutions pour satisfaire ses envies et ses angoisses. Nous avons à faire avec un homme dangereux qui ne reculera que devant le mur du peuple. Le peuple doit arrêter les dérives de Macky Sall.
Que pensez-vous de l'appel au dialogue de Macky Sall ?
Il y a des poignards dans cet appel au dialogue de Macky Sall. S’il était sincère, il consulterait la classe politique et la société civile avant d’engager des réformes constitutionnelles de cette ampleur et de cette profondeur qui modifient radicalement notre régime politique. Nous doutons de la sincérité de Macky Sall. C’est un homme englué dans la politique politicienne, mais il ne peut tromper personne. Même les gens de de son parti connaissent ses desseins cyniques. Chacun attend le bon moment pour dérouler son agenda. il y a beaucoup d’agendas cachés au sein de l’apr. Pour dialoguer avec Macky Sall, il y a des préalables. il faut d’abord la libération de tous les otages politiques. En d’autres termes, il n’y aura pas de dialogue tant que Khalifa Sall serait encore en prison. le dialogue doit se faire sous l’égide de l’union africaine et de la cedeao qui ont pour mission, entre autres, la prévention des conflits. Nous pensons que l’union africaine et la cedeao doivent proposer un médiateur consensuel accepté par tous les partis politiques qui dirigera le dialogue politique. Ensuite, ce médiateur doit aider la classe politique à s’entendre autour des termes de référence parmi lesquels, il y aura évidemment, la question électorale. Car au Sénégal, il faut refonder totalement le système électoral pour un système plus crédible. C’est la seule manière de sauver la paix civile dans ce pays. Autre élément important, avant de dialoguer, il faut que Macky Sall s’engage de manière solennelle à respecter les conclusions du dialogue. Il faut qu’il fasse comme Abdou Diouf en 1992, une seule virgule ne doit être changée des conclusions.
Depuis la Présidentielle, l'opposition semble avoir déserté le terrain, au moment où la majorité déroule. Que vous inspire cette situation ?
L’opposition est sortie groggy de la présidentielle. Je mesure la déception des candidats et de tous les militants de l’opposition. Nous sommes tous profondément déçus et frustrés. Parce que Macky Sall n’a pas gagné. Il a fait un coup de force, un holdup électoral. Mais ce n’est pas une raison d’abandonner le terrain de la mobilisation politique. Nous demandons à l’opposition de se réveiller et de reprendre la lutte. Nous devons le savoir, le combat sera long. Mais nous le gagnerons. Les peuples finissent toujours par triompher devant les tyrans et les oppresseurs. J’invite l’opposition à se réveiller. Je demande à Monsieur Idrissa Seck d’assumer son leadership au sein de l’opposition. il ne doit jamais oublier qu’il est arrivé deuxième, lors de la dernière présidentielle. Il doit avoir du respect pour les 900 000 Sénégalais qui ont voté pour lui. Il doit considérer que le combat ne fait que commencer. L’avenir commence dès à présent.