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27 août 2025
PAR VIEUX AIDARA
FAUSSES ANALYSES D'UNE FAUSSE VICTOIRE
Ceux qui depuis hier font des analyses du scrutin du 24 février 2019 en omettant des faits qui auraient nécessité l'ouverture d'une enquête judiciaire dans tout pays normal, sont juste malhonnêtes
Je vais certainement apparaitre comme mauvais perdant mais je l’assume car ceux qui depuis hier font des analyses du scrutin du 24 février 2019 en omettant des faits qui auraient nécessité l'ouverture d'une enquête judiciaire dans tout pays normal, sont juste malhonnêtes.
Une analyse de personnes supposées êtres des intellectuels si elle se veut honnête, ne peut ignorer au moins ces 05 faits majeurs qui démontrent clairement que la sincérité de ce scrutin du 24 février 2019 a été entaché.
1- Des centaines de milliers de sénégalais ont été empêchés de voter par défaut de carte d’électeur, le ministre de l'intérieur les a estimé à au moins près de 300.000 et une ONG comme le GRADEC considère que c'est plus.
2- Des centaines de milliers de sénégalais détenteurs de la carte d’électeur et qui ont pu être identifiés lors du parrainage sur les listing de l’opposition ont été empêchés de voter car déplacés de bureaux ou de centres de votes entre janvier 2019 et la remise du fichier à l’opposition en février 2019.
3- Des centaines de milliers de sénégalais ont été empêchés de voter car bien que détenteurs de la carte d’électeur, ils étaient absents des listes d'émargement dans les bureaux de vote.
4-Le procureur de la République aurait dû immédiatement avant la proclamation des résultats provisoires ouvrir une enquête face aux vidéos d’enfants qui votaient, diffusées sur les réseaux sociaux le jour du vote car on en ignore leur nombre exact.
Au moins une explication aurait dû être donné par le ministre de l'Intérieur face aux centaines de milliers de duplicata de cartes d’électeur qui ont été éditées jusqu’à la veille du scrutin à la DAF et dont on ignore le nombre surtout que des milliers de personnes affirment que d'autres auraient voté à leur place.
5- Tous les procès verbaux ne comportant pas la signature de mandataires identifiés de l’opposition et de la CENA auraient dû être annulés par la CNRV car les lieux de vote auraient dû êtres identifiés longtemps à l’avance mais seul le candidat sortant avait cette information.
Faire donc une analyse en ignorant tous ces faits et dire que tout s'est bien passé est à mon avis, faire preuve d'une malhonnêteté inouïe. Comme le dit fort justement une personne pour laquelle j’éprouve énormément de respect dans son approche intellectuelle, « il serait bien pour ce pays que la confusion s’estompe afin que l’on trouve les voies et moyens d’arriver à un changement pour le Sénégal » .
PAR NIOXOR TINE
UNE VICTOIRE EN TROMPE L’ŒIL
POINT DE MIRE SENEPLUS - Dès le départ, ces élections ont été plombées par la farouche volonté du président sortant de rempiler coûte que coûte, selon la célèbre maxime, qui veut que la fin justifie les moyens
En participant massivement aux élections présidentielles du 24 février 2019, le peuple sénégalais a une nouvelle fois réaffirmé sa préférence pour les procédures démocratiques dans la marche de la République.
S’il n’est évidemment pas concevable de se féliciter de la poursuite du pillage économique et de la domination culturelle de notre pays, à travers l’auto-reconduction du président Macky Sall, on peut, tout au moins, prendre acte de sa réélection. Le peuple sénégalais vient, une nouvelle fois, de perdre une bataille, dans la longue guerre, qui l’oppose aux tenants du statu quo néocolonial. C’est pourquoi, on peut dire, que le lourd contentieux, qui oppose les citoyens sénégalais et le régime actuel, dépasse le cadre électoral et relève plutôt du rétablissement des normes démocratiques mises à mal par le régime de Macky.
UN RECUL DÉMOCRATIQUE PATENT
Tous les observateurs sérieux peuvent attester de régressions démocratiques majeures survenues depuis le début de la deuxième alternance, interrompant ainsi une progression continue des acquis démocratiques, depuis la loi de trois courants de Senghor, jusqu’à la réalisation de deux alternances, sans oublier le multipartisme intégral et le pluralisme médiatique. Cela s’est manifesté par une gouvernance autoritaire marquée par des emprisonnements arbitraires d’opposants politiques, la restriction des libertés d’expression et de manifestations. En outre, la liberté de presse a été dévoyée, avec l’aide d’anciens professionnels de la presse reconvertis dans la politique, par la corruption ou l’intimidation. Il en a résulté l’asphyxie de la presse indépendante et le développement d’une presse aux ordres, superficielle, adepte de la propagande mensongère, ou de la propension à divertir le peuple sénégalais sur des épiphénomènes et édulcorant les grands enjeux économiques et sociopolitiques de la Nation.
LES VÉRITABLES ENJEUX ÉLECTORAUX OCCULTÉS
L’analyse sommaire des dernières élections présidentielles a pu montrer des phénomènes inquiétants comme le vote affectif avec de fortes connotations ethnique et confrérique, avec des risques pour la cohésion nationale. Par contre, on a occulté les enjeux fondamentaux de toute vie politique digne de ce nom comme la souveraineté nationale, l’indépendance économique, la répartition équitable des richesses nationales, la justice sociale, la redevabilité, la responsabilisation citoyenne...etc. En lieu et place, les électeurs ont eu droit à des chapelets de promesses n’engageant que les personnes assez naïves pour y croire.
La vieille garde politique a toujours cherché à réduire les rendez-vous électoraux, qui rythment la vie de la Nation, à un cirque électoral devant leur permettre d’accéder à des positions de pouvoir, pour orienter les politiques publiques nationales dans le sens de leurs intérêts étroits de classe ou de caste.
C’est dire, qu’on ne saurait réduire l’enjeu de l’élection, qui vient de s’achever, à un bilan matériel, si mirifique qu’il puisse être ! Cela, d’autant plus que de nouvelles ressources pétrolières et gazières viennent d’être découvertes dans notre pays et que le clan présidentiel est déjà cité dans d’obscures transactions avec les majors pétrolières.
UN PROCESSUS ÉLECTORAL TRONQUÉ
Il faut dire, que, dès le départ, ces élections ont été plombées par la farouche volonté du président sortant de rempiler coûte que coûte, selon la célèbre maxime, qui veut que la fin justifie les moyens. Cela s’est traduit, d’abord par l’élimination de rivaux potentiels, arbitrairement emprisonnés ou exilés. Il y a eu aussi la gestion unilatérale du processus électoral, qui a abouti à la remise en cause du code consensuel de 1992, avec le vote d’une loi constitutionnelle 2018-14 du 11 mai 2018, instituant le parrainage citoyen. L’entêtement à maintenir un militant de l’APR au poste de ministre de l’Intérieur peut s’expliquer à posteriori, par l’opacité, qui a entouré le fichier électoral ainsi que la distribution des cartes d’électeurs, sans oublier les changements de bureaux de vote de certains électeurs, les votes multiples dus à la mauvaise qualité de l’encre indélébile...etc.
UN SCRUTIN APAISÉ MAIS INIQUE
Avec un fidèle aux commandes du processus électoral, il ne restait plus au président sortant, tablant sur de solides bastions au Nord, à l’Est et au centre du pays, qu’à enrayer les velléités de vote protestataire des grandes villes.
Si à Touba et à Thiès, il s’est heurté à des barrières subjectives insurmontables, entre une hostilité marquée à son endroit ou une bienveillance démesurée à l’endroit d’Idrissa Seck, à Dakar il a réussi sinon à infléchir le vote en sa faveur, tout au moins à atténuer la portée électorale de la défiance à son égard.
Au-delà de l’apport hypothétique des transhumants socialistes, dont certains, orphelins de leur mentor emprisonné, se projettent déjà vers les prochaines locales, c’est surtout le duo redoutable constitué par le ministre des finances et la première dame qui auront joué un rôle décisif pour la réélection d’un président de la République. Lors de leurs tournées dans plusieurs communes de la capitale, ils ont octroyé de généreuses subventions aux imams et autres notables porteurs de voix, effectué des milliers d’opérations de transferts monétaires au profit d’individualités, sans oublier les T-shirts et les kits repas. D’autres membres du clan présidentiel (les maires de Pikine et Guédiawaye ainsi que le beau-père à Rufisque) ont utilisé le même modèle dans les autres départements. Tout cela a permis au candidat Macky Sall, contrairement aux attentes, d’engranger une courte victoire dans la Région de Dakar, où on lui prédisait une débâcle électorale.
UNE RECONDUCTION LÉGALE MAIS ILLÉGITIME
Macky Sall aura donc usé de toutes les opportunités qu’offre la fonction d’hyperprésident dans une république bananière pour se faire réélire, depuis l’instrumentalisation des institutions jusqu’au débauchage de transhumants, en passant par la corruption électorale. En effet, jamais l’argent n’aura joué un aussi grand rôle durant une élection, dans notre pays. Certains parlent d’un budget de dix milliards de nos francs, sans que l’on sache exactement si les ressources proviennent des caisses noires ou de dessous de tables obtenus lors de la signatures de contrats léonins avec les compagnies pétrolières.
Il faut déplorer la complicité de certains alliés du président, muets sur toutes les dérives de sa gouvernance calamiteuse, car désireux de continuer à profiter des délices du pouvoir, mais aussi regretter les calculs politiciens de certains opposants, préférant élire un président entamant son dernier mandat plutôt qu’un nouveau qui pourrait rester dix longues années au pouvoir.
UNE CRISE POLITIQUE EXACERBÉE
Notre pays vit depuis plusieurs années, une crise politique due au leadership despotique du président Sall, ainsi qu’à sa propension à instrumentaliser les Institutions et à manipuler le processus électoral. C’est sous ce rapport que l’accentuation de la crise entre acteurs politiques, au sortir de cette dernière présidentielle, semble n’être qu’un juste retour de bâton pour le patron de la Coalition Benno Bokk Yakaar, pour l’ensemble de son œuvre, pardon de ses forfaits.
Néanmoins, ce mandat, du fait même, qu’il est le dernier auquel le président Macky Sall a droit, porte les germes d’une instabilité politique pour au moins deux raisons :
L’autorité de Macky Sall va être mise à mal par des appétits présidentialistes de certains de ses compagnons, qui vont apparaître au sein de la méga-coalition remettant en cause sa cohésion, mais plus grave au sein du parti APR, toujours pas structuré
Les mesures d’austérité des officines financières impérialistes, gelées pour cause de réélection du candidat Sall, vont désormais entrer en vigueur, avec toutes les conséquences sociales catastrophiques que l’on sait
CHANGER DE POLITIQUE POUR ÉVITER LE CHAOS
Face à l’instabilité politique prévisible, il serait suicidaire pour le président Macky Sall de poursuivre sa gouvernance dictatoriale, qui a fini de saper notre commun vouloir de vie commune et pourrait rendre notre pays plus vulnérable face aux menaces sécuritaires. Il a encore la possibilité de dépoussiérer les recommandations de la CNRI et de rétablir le dialogue politique pour revenir à un consensus sur les questions électorales et institutionnelles.
Quant aux hommes politiques de l’Opposition, leurs égos surdimensionnés et leur boulimie pouvoiriste, les ont empêché de s’unir autour de l’essentiel et ont facilité le hold-up électoral perpétré par la Coalition présidentielle. On peut également leur reprocher le manque de clarté de leurs positions sur la domination économique exercée par l’ancienne puissance coloniale et le déficit de solidarité avec les luttes syndicales et populaires.
Il faut saluer le fait que, dans cette médiocrité politique ambiante, soit apparue une nouvelle force politique portée par de jeunes patriotes, qui a fait un score électoral plus qu’honorable, sans trafic d’influence ni achat de conscience.
Le candidat Ousmane Sonko et son parti PASTEF doivent poursuivre leur travail d’implantation et renforcer leur formation politique. Le rôle de veille, d’alerte et de dénonciation des méfaits du pouvoir ne doit plus être du seul ressort du secrétaire général, mais devenir l’affaire de toutes les instances du parti.
Enfin, aucun changement réel ne s’opérera dans notre pays si les forces de progrès ne trouvent pas les voies et moyens d’impliquer les travailleurs et les paysans pauvres dans la lutte pour l’approfondissement de la démocratie et l’émancipation sociale.
LES URNES CONFIRMENT L'ÉMERGENCE DE SONKO
Carton plein en basse Casamance, il talonne Idrissa Seck à Dakar et dans les grandes banlieues comme Pikine, Guédiawaye et Rufisque avec un score de 20% sur toute la région - Il est présent partout dans le pays
Avec un score de 15,67 % au niveau national, Ousmane Sonko est la révélation de ce scrutin.
Carton plein en basse Casamance, Ousmane Sonko remporte les trois départements de la région de Ziguinchor. Il talonne Idrissa Seck à Dakar et dans les grandes banlieues comme Pikine, Guédiawaye et Rufisque avec un score de 20% sur toute la région. Il est présent partout dans le pays.
Tout comme Macky Sall, il bénéficie de la forte participation, qui s'élève à plus de 66%, bien supérieure à celle de 2012. De nombreux électeurs opposés à la politique menée par le président sortant ont décidé de le faire savoir dans les urnes.
Candidat anti-système, Ousmane Sonko emporte le vote contestataire et recueille l’adhésion des jeunes. « Il y a un message à décrypter. Une soif d’autre chose, un rejet des politiciens et un besoin de solution notamment sur la question du chômage des jeunes », affirme un analyste qui rappelle toutefois que cette présidentielle s’est tenue dans un contexte particulier, sans Khalifa Sall, sans Karim Wade, après l’exclusion des recalés du parrainage. « Combien aurait-il fait et combien auraient fait Idrissa Seck et Macky Sall, si toutes ces personnalités n’avaient pas été écartées? », s’interroge-t-il.
Quelle sera maintenant la stratégie d’Ousmane Sonko ? Comment va-t-il gérer dans le temps cette entrée fracassante ? Le système ne risque-t-il pas de le phagocyter ? Cheminera-t-il aux côtés d’Idrissa Seck ?
« Avec Idrissa Seck, on s’est rencontré à un carrefour, nous avons un combat commun mais après chacun suivra sa route », affirme Boubacar Camara, superviseur général de sa campagne. « Ousmane Sonko ne fait que commencer, assure-t-il. Il deviendra incontournable ».
CHEIKH LAMANE DIOP
WADE ET SON BOYCOTT DE LA PRESIDENTIELLE : LE COUP D'ECLAT DE TROP ?
Au demeurant, la lutte pour s'assurer les conditions d'un respect scrupuleux du choix de l'électeur afin que son choix au fond de l'urne soit respecté, est une donnée normale en démocratie. Ça a été le combat de toute une vie de l'opposant Abdoulaye Wade
Des élections locales de 1976 à ce jour, des citoyens sénégalais ont accordé leurs suffrages au père-fondateur du Parti démocratique sénégalais (PDS). Certains ont beaucoup souffert de leur proximité avec lui ou de leur engagement militant à ses côtés, s'il n'en ont été tout bonnement les martyrs. Au terme de 26 ans (moins les années passées dans les gouvernements de Abdou Diouf en 91 et 95), Me Abdoulaye Wade a atteint le graal politique en mars 2000 en accédant à la magistrature suprême par la volonté du peuple sénégalais.
Le 24 février, jour de scrutin du 1er tour de l'élection presidentielle, le pape du sopi a décidé, de manière souveraine, de ne pas se rendre aux urnes. Par ce boycott, il n'entend pas participer à un scrutin dont les dès seraient déjà pipés. Il est aussi permis de penser, souverainement, que Me Wade, devrait, ne serait-ce que pour le symbole, si ses capacités physiques le lui permettent, d'aller glisser un bulletin dans l'urne, quelques soient ses états d'âme vis-à-vis des modalités et de l'organisation de l'élection.
Au demeurant, la lutte pour s'assurer les conditions d'un respect scrupuleux du choix de l'électeur afin que son choix au fond de l'urne soit respecté, est une donnée normale en démocratie. Ça a été le combat de toute une vie de l'opposant Abdoulaye Wade. Ainsi, le passage obligatoire par l'isoloir, la représentation des partis politiques à toutes les étapes du processus électoral, la mise en place d'un organisme indépendant chargé de superviser les élections (ONEL en 1998, CENA plus tard), etc., ont été des conquêtes démocratiques arrachées de haute lutte sous le leadership du Secrétaire général du PDS, principal parti d'opposition sous les régimes Senghor et Diouf.
Le coup d'éclat permanent
Arrivé au pouvoir en 2000, les choses ne se sont pas déroulées en fin de compte comme le voulait la nature. Si Abdou Diouf était le maitre du "je" sous son magistère, Abdoulaye Wade, "un opposant au pouvoir*" tenait de main de maitre l'agenda et l'animation politiques. C'est sous les 12 ans qu'a duré la première véritable alternance politique à la tête du pays que la Charte fondamentale du Sénégal a été le plus tripatouillée avec 14 révisions constitutionnelles; "déconsolidantes" pour la plupart, selon le néologisme popularisé par le professeur agrégé de droit constitutionnel Ismaïla Madior Fall, actuel Garde des Sceaux, Ministre de la Justice. A cette aune, l'imbroglio le plus polémique a été consécutif au sésame accordé au 3ème président de la République par le Conseil constitutionnel de briguer un 3ème mandat présidentiel.
Malgré l'avis contraire de la plupart des hommes de l'art, la clameur et les heurts populaires avec son lot de morts et de blessés, le président sortant était en fin de compte sur les startingblocks en 2012.
L'opposition de l'époque s'y résout et battit enfin campagne malgré quelques atermoiements. Et c'est le candidat Macky Sall qui avait le plus vite fait preuve de réalisme en allant battre campagne qui a pu amener son ancien patron politique en ballottage avant de le déloger du palais présidentiel, le 25 mars 2012, à l'issue du second tour de scrutin.
Ce ne serait point faire insulte à Me Wade, nonobstant son expérience politique encyclopédique, même du haut de ses 93 hivernages, de faire preuve, toutes proportions gardées, du même réalisme que son "héritier" de successeur, en faisant le constat de sagesse qu'il entacherait très difficilement cette élection présidentielle, encore moins empêcher sa tenue comme il en a récemment entretenu l'illusion.
Abdoulaye Wade, adepte du coup d'éclat permanent, ayant toujours abhorré la politique de la chaise vide, a pourtant déjà boycotté des élections: les locales de 1990. Les retombées politiques étaient dérisoires, voire même catastrophiques avec le charivari qu'on a connu aux élections locales de 1996. Au surplus, entre 1990 et 2019, il y a un abîme, au plan symbolique, tout comme en terme de contexte politique.
En ne se rendant pas aux urnes ce dimanche, Me Wade, peut au plus donner l'illusion de villipender un modèle craquelé d'une certaine démocratie sénégalaise. Toutefois, ses gérémiades et autres féroces dénonciations ne seront pas "de nature à entacher la nature du scrutin". Les nombreux observateurs de l'Union africaine (UA), de l'Union européenne (UE), ainsi que les observateurs de l'Eglise catholique sénégalaise, ne manqueront pas d'emboucher la même antienne pour valider l'élection. Surtout qu'il établi qu'au Sénégal où l'on vote depuis plus de 150 ans, on n'a pas de leçons de démocratie à recevoir d'ailleurs.
Au crépuscule d'une vie politique bien remplie, le président Abdoulaye Wade, dans son boycott actif, conçoit que ses partisans puissent voter pour les candidats Ousmane Sonko, Idrissa Seck ou El Hadji Issa Sall.
Retour d'ascenseur
Par un naturel parallélisme des formes, il pourrait tout aussi voter pour l'un de ses trois fils putatifs engagés la joute électorale.
Mais encore une fois, le plus important pour lui, reste d'aller aux urnes. Au plan symbolique, ce ne serait juste qu'un retour d'ascenceur au peuple sénégalais qui lui a beaucoup donné. Une sortie honorable qui serait à la hauteur de son prestigieux statut d'ancien président de la République.
* Abdou Latif Coulibaly. "Abdoulaye Wade, un opposant au pouvoir, l'alternance piégée". Edition Sentinelles.
Journaliste, Analyste politique
PAR MEDHI BA
LE JOUR OÙ WADE EST DEVENU ABSTENTIONNISTE
Pour l’opposition, l’élection présidentielle du 24 février s’est en partie jouée près de quatre ans plus tôt, lors d’un épisode quasiment oublié de l’affaire Karim Wade
Il avait appelé au boycott d'une élection qu'il estimait jouée d'avance, en l'absence de son fils Karim et de Khalifa Sall. Pourtant le taux de participation a été nettement plus élevé qu'en 2012. Une stratégie « kamikaze » forgée quatre ans plus tôt, au climax de l'affaire Karim Wade...
Ce qui avait conduit le patriarche de la scène politique sénégalaise à appeler au boycott d’une élection qu’il estimait « programmée par Macky Sall » et « déjà verrouillée ». De fait, son vieux rival l’a emporté sans vraiment combattre avec 58,27 % des suffrages.
D’autres se montrent plus sceptiques, voire critiques, estimant qu’Abdoulaye Wade est sans doute le principal perdant de l’élection. Avec un taux de participation de 66,23 % au premier tour (contre 51,5 % en 2012), n’a-t-il pas fait la preuve que sa voix, devenue chevrotante, ne portait plus ? Et de conclure – sans doute un peu vite, quand on connaît la résilience de « Gorgui » – à sa finitude politique.
Aux yeux du Parti démocratique sénégalais (PDS), sur lequel règne toujours le patriarche Abdoulaye Wade, qui l’a fondé en 1974, Karim Wade est un « prisonnier politique ». Soupçonné d’avoir amassé un trésor siphonné dans les caisses de l’État durant les deux mandats de son père, Karim Wade, accusé d’enrichissement illicite, est incarcéré à la maison d’arrêt de Rebeuss depuis avril 2013. Malgré les failles de l’instruction, au terme d’un procès épique qui aura duré sept mois, il risque jusqu’à dix années de prison.
Une quinzaine de jours plus tôt, faute de pouvoir influer sur le cours de la justice, Abdoulaye Wade a décidé de jouer son va-tout. Dans l’urgence, il a convoqué un congrès du PDS afin de désigner le candidat du parti libéral à la prochaine présidentielle. À l’époque, nul ne sait encore si elle se tiendra en 2017 – Macky Sall ayant initialement promis d’écourter son septennat à 5 ans – ou en 2019. Au fond, peu importe à Abdoulaye Wade, car sa motivation ne concerne que secondairement le scrutin à venir.
Prendre la CREI de court
En déclenchant cette procédure de désignation, l’ancien président a un objectif prioritaire : prendre de court la CREI, dont chacun devine, au vu du déroulement électrique des audiences, qu’elle s’apprête à condamner lourdement Karim Wade. En faisant de ce dernier le candidat officiel du PDS, Abdoulaye Wade entérine le statut de « prisonnier politique » de son propre fils.
La désignation d’un candidat à la présidentielle est donc organisée à la hâte. Mais les dés sont pipés. Parmi les principaux cadres du parti, plusieurs font connaître leur ambition de concourir. C’est notamment le cas du président du groupe parlementaire Libéraux et démocrates, Modou Diagne Fada, de l’ancien Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye ou de l’ex-porte-parole de la présidence, Serigne Mbacké Ndiaye.
Une primaire jouée d’avance
Mais en coulisses, comme l’admettent à l’époque, sous couvert d’anonymat, certains des candidats, « Gorgui » use de son autorité morale pour les dissuader d’aller au bout. Le PDS, dit-il, doit s’unir derrière son fils, victime d’une cabale judiciaire qu’il estime orchestrée au Palais de la République.
Les uns après les autres, les candidats sérieux se désistent donc. Le 21 mars, seul un quatuor de seconds couteaux brigue les suffrages des grands électeurs du PDS, dans le cadre d’une primaire jouée d’avance.
L’issue du vote est conforme aux pronostics : Karim Wade est déclaré vainqueur avec 257 voix sur 268 votants. Deux jours plus tard, c’est donc le candidat du parti libéral à la présidentielle qui sera condamné à six années de prison et 138 milliards de francs CFA d’amende – et pas seulement le fils de l’ancien président.
Dès ce mois de mars 2015 émerge le leitmotiv auquel se sont accrochés depuis Abdoulaye Wade et ses lieutenants. « Il n’existe pas de plan B pour le Parti démocratique sénégalais. Nous irons à l’élection présidentielle avec le candidat qui a été investi par ce congrès », assure alors Babacar Gaye, le porte-parole du PDS.
Ainsi est née la stratégie – kamikaze ? – du « Karim ou rien », qui a valu au PDS, ce 24 février, de ne compter aucun candidat dans la course à la présidence, pour la première fois de son histoire. Cramponné depuis quatre ans à ce mot d’ordre, Abdoulaye Wade avait annoncé à ses partisans, début février, que lui-même s’abstiendrait d’aller voter, les appelant à faire de même.
Ralliements à Macky Sall
Parmi ceux qui désavouaient à l’époque, en silence, ce congrès taillé sur mesures pour Karim Wade, un certain nombre ont depuis quitté le PDS, avant de se rallier sur le tard à Macky Sall. C’est notamment le cas de Souleymane Ndéné Ndiaye, Modou Diagne Fada ou Serigne Mbacké Ndiaye.
Quant à Babacar Gaye, toujours porte-parole du PDS, il s’est désolidarisé in extremis de la ligne prônée depuis 2015 par son parti. À la veille du scrutin, tout en se disant « écartelé », en raison de sa fidélité à Abdoulaye Wade, il a décidé de s’aligner sur la position arrêtée fin janvier par la fédération départementale de Kaffrine, appelant à voter pour l’un des deux candidats issus des rangs du PDS: Idrissa Seck ou Madické Niang.
VIDEO
NOUS NE SOMMES PAS UNE RÉPUBLIQUE
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Nous devons revoir l’omnipotence du président - Chaque fois qu’il y a un nouveau président, il y a de nouveaux riches - Mame Adama Gueye prône une refonte du mode de gouvernance
Madeleine Diallo et Mamadou Sène |
Publication 01/03/2019
#Enjeux2019 - Au lendemain de la publication des résultats provisoires du scrutin du 24 février 2019 donnant au président sortant Macky Sall une large victoire dès le premier tour, le pays doit maintenant faire face à ses enjeux. Des enjeux qui interpellent tout le monde, selon Mame Adama Guèye qui a accordé cet entretien exclusif à www. Seneplus.com.
‘’Ces enjeux interpellent tout le monde. Les acteurs politiques, les opérateurs économiques, la presse, les citoyens, parce que beaucoup d’entre nous s’inscrivent dans une logique de contournement permanent. On n'essaye même plus de faire les choses dans les règles’’, a déploré l’avocat qui plaide pour une refondation de la société et le rétablissement de la normalité républicaine. Il insiste : ‘’nous avons les atours d’une République. Mais nous n’avons pas une véritable République. Il faut remettre en cause l’omnipotence du président pour avoir une justice qui joue son triple rôle de régulation sociale, économique et politique’’.
Mame Adama Guèye reconnait que la transition pacifique d’une alternance à une autre, notée au Sénégal est une bonne chose. Mais il reste convaincu qu’elle ne se déroule pas dans le respect des règles d’une démocratie majeure. ‘’La dévolution civilisée du pouvoir comme nous avons l’habitude de le faire est une bonne chose mais il reste beaucoup à faire. Par exemple, il est totalement inéquitable qu’un pouvoir en place puisse disposer des dizaines de milliards pour aller à des élections. On n’a aucune règle qui régit les dépenses électorales. Il faut tout faire pour avoir un plafond des dépenses et que son dépassement soit sanctionné’’, plaide-t-il.
Sur les questions économiques, le constat est alarmant d’après l'avocat. ‘’ Pourquoi chaque président qui arrive crée ses hommes d’affaires ? A chaque fois qu’il y a un nouveau chef d'Etat, il y a de nouveaux milliardaires qui sortent de terre’’, s’insurge-t-il. ‘’Pis ce sont des gens qui n’avaient aucune activité économique dans les secteurs dans lesquels ont leur donne des opportunités colossales. Aujourd’hui les plus grands marchés de BTP pendant le septennat de Macky Sall ont été confiés à des novices qui n’avaient aucune expérience, au détriment des entreprises présentes des dizaines d’années dont la compétence est indiscutable au Sénégal et en Afrique. On les prive de ces marchés parce qu’ils ne sont pas en connivence avec le système. Ceux à qui ont donne ces marchés sont soit des amis, soit des parents du couple présidentiel. C’est le cas du Building administratif, l’université Amadou Makhtar Mbow, de la sphère ministérielle et de l’assainissement de Diamniadio, le port de Bargny. ….et autres’’, relève-t-il, ajoutant que quand un président arrive, il crée ses propres hommes d’affaires. Ce qui, à ses dires, est souvent une manière de détourner de l’argent.
Sur le plan politique l'invité de SenePlus se réjouit de l’arrivée d'une nouvelle vague d’hommes symbolisés par Ousmane Sonko, Issa Sall, Ibrahima Deme, etc. Toutefois, il prévient : ‘’ J’espère qu'ils ne se laisseront pas phagocyter par le mécanisme, l’écosystème politique. Et je suis sûr que même les ‘’autres’’ changeront ou disparaitront’’, a-t-il conclut.
Voir l'entretien complet en vidéo.
PAR CHEIKH OMAR DIALLO
MACKY FERA UN QUINQUENNAT INÉDIT DE TROIS ANS
EXCLUSIF SENEPLUS - Reconduit pour un second et dernier mandat de cinq ans, vous vivrez immanquablement ce qu’on appelle en droit constitutionnel et en science politique, le « syndrome du canard boiteux »
Le premier jour de son élection, tout élu pense à sa réélection. Mais le premier jour d’une réélection, il pense à son successeur.
Monsieur le Président de la République, dans sa majorité, une satisfaisante masse, le peuple sénégalais vous a réélu pour un second et dernier mandat de cinq ans. In concreto, vous effectuerez un quinquennat de… trois ans. Indubitablement, à mi-mandat entre 2022 et 2023, dans votre camp, tout comme dans celui de l’opposition, la lutte pour votre succession sera à la fois débridée, prématurée et vive. Amis, alliés, obligés, affidés et adversaires seront-ils dans le présent que vous vivrez déjà au passé ? Prépareront-ils le futur proche que où vous n’aurez plus d’avenir ? Echafauderont-ils des schémas tels que vous sortirez de leur plan ? En résumé, votre apogée électorale pourra également s’avérer votre déclin politique. Ce sera alors le début de la fin et la fin du début. En vérité, vous aurez l’illusion du pouvoir, la réalité du pouvoir leur reviendra.
Au demeurant, vous serez le premier chef d’Etat à organiser une présidentielle sans y être candidat, électeur vous ne serez plus éligible. Naguère maître du jeu politique, vous n’en serez plus qu’un arbitre électoral. De la posture enviée d’acteur de premier plan, vous passerez simple spectateur. Premier président dont la fin d’exercice sera officiellement connue de tous, théoriquement le 1er avril 2024, vous serez, en outre, le premier homme politique à quitter le pouvoir sans défaite électorale. Léopold Sédar Senghor a transmis le pouvoir à Abdou Diouf par une fine broderie constitutionnelle. Abdou Diouf et Abdoulaye Wade ont été défaits par la voie des urnes. Enfin, premier à organiser des élections législatives à quelques mois de la fin de votre dernier mandat ; paradoxalement, c’est à ce moment que commencera votre déclin progressif.
SYNDROME DU CANARD BOITEUX
Monsieur le Président de la République, le schéma institutionnel et politique qui se présente au lendemain de votre réélection est inédit à tout point de vue. Reconduit pour un second et dernier mandat de cinq ans, vous vivrez immanquablement ce qu’on appelle en droit constitutionnel et en science politique, le « syndrome du canard boiteux ». The lame duck period. Cette expression anglo-saxonne signifie qu’avant le terme définitif de ce dernier mandat, vous serez un président désincarné et affaibli. Par la force des choses démocratiques, vous serez seul en plein marché électoral. Dès poitron-minet, c’est votre coalition qui préfacera votre départ avant l’heure. Les ambitions y seront fortes, tenaces et légitimes. Dans votre camp, il y aura forcément plusieurs camps. L’opposition actera le crépuscule de ce magistère en ne faisant plus de vous son centre d’intérêt. Plutôt que de chercher à vous abattre, elle convoitera votre place. Les parlementaires quitteront la Chambre d’applaudissements pour entrer dans celle des positionnements. Les maires ne vous seront plus affidés, ils iront plutôt s’affilier aux candidats à la présidentielle. Les médias d’ici et d’ailleurs ne s’intéresseront à vous que pour connaître votre choix intime sur les probables présidentiables.
PROBABLE COHABITATION
Parce que d’abord, une élection présidentielle se prépare deux ou trois ans à l’avance, les logiques politiques et médiatiques hâteront votre fin de règne. Parce qu’ensuite n’ayant plus d’avenir, vous serez un homme du passé. Parce qu’enfin, l’ouverture de la pré-campagne présidentielle coïncide avec le temps des législatives prévues pour 2022, un choix cornélien se présentera à vous. Sous ce rapport, il y aura deux cas : soit le peuple vous accorde une majorité parlementaire alors que vous êtes presqu’au bout de votre mandat, - une manière de vous rendre hommage - soit il donne sa confiance à l’opposition pour préparer l’avenir et, dans ce cas, nous serons en présence d’une cohabitation politique. L’arrivée d’une nouvelle majorité parlementaire hostile à votre politique entraînera un désaccord inédit au sein de l’Exécutif. Alors que toutes les forces devront se rassembler pour relever les grands défis du Plan Sénégal Emergent 2, elles se défieront et se neutraliseront comme en toute période de cohabitation. Dans ce cas de figure, l’harmonie entre les majorités ne sera plus la norme. Il y aura une crise de légitimité : un conflit entre le législatif et l’exécutif, une coexistence de deux légitimités concurrentes. C’est à ce niveau que s’ouvrira l’outre aux vents : allez donc demander à un Premier ministre issu d’une liste opposée à la politique du Chef de l’Etat de conduire une politique qu’il dénonce ! Résultat : il y aurait un désaccord inédit entre les deux têtes de l’Etat. L’exemple le plus achevé de la dyarchie et de l’anarchie au sommet de l’Etat. Fatalement, ce sera un tremblement de terre institutionnel. Une crise sans précédent au Sénégal ? A Dieu ne plaise ! A moins que vous ne décidiez d’un alignement du temps présidentiel avec celui du législatif en vue d’harmoniser les deux calendriers en optant pour une dissolution de l’Assemblée nationale. Là encore, rien ne garantit une nouvelle majorité parlementaire.
Monsieur le Président de la République, à mi-mandat, à l’image de Yayi Boni, Elen Johnson Sirleaf, ou encore François Hollande, Georges W. Bush et Barack Obama, vous assisterez à la diminution graduelle de votre influence politique et institutionnelle. Toute l’attention des observateurs et commentateurs de la vie politique sera rivée sur une pré-campagne sans précédent, pleine de rebondissements et de reniements. Vos Premiers ministres, vos ministres à fort potentiel électoral, vos directeurs généraux, vos lieutenants de la coalition présidentielle voudront, à juste raison, s’émanciper. C’est ainsi qu’à mi-mandat, les intentions présidentielles naîtront au grand jour. Les alliances et les mésalliances domineront l’actualité. La plupart des alliés et obligés partiront avant terme. Les petits meurtres entre amis et les grandes trahisons entre copains feront les choux gras de la presse. Votre palais sera déserté. La fin de votre magistère se limitera à une sorte de figuration.
IMPOSSIBILITE D’UN TROISIÈME MANDAT
Et à ceux qui professent secrètement un troisième mandat, le débat est clos pour trois raisons. Primo sur plan juridique, la question a été réglée par le nouvel article 27 de la Constitution. Il est précisé à l’article 27 que « la durée du mandat du président de la République est de cinq ans. Nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs ». Cette disposition est d’une clarté indiscutable. Elle a définitivement "sanctuarisé" le mandat présidentiel. Mieux, l’on peut évoquer "la clause d’éternité", en référence au Droit constitutionnel allemand. Le verrouillage du mandat présidentiel est devenu une "clause d’intangibilité absolue" au Sénégal. Vous savez, il arrive que les motivations d’une loi soient plus importantes que la loi elle-même. Secundo, sur le plan personnel, Macky Sall a déjà délibéré avec sa propre conscience démocratique : il a publiquement affirmé le 31 décembre 2018 qu’il ne briguera pas un troisième mandat. Tercio du point de vue de l’acceptation populaire, allez dire au peuple que le premier mandat n’est pas comptabilisé parce que cette précision a été omise dans les dispositions transitoires ; elles-mêmes supprimées lors du référendum.
Pour rappel, les années romantiques de la démocratie sans alternance sous Senghor et Diouf, où l’on pouvait rester 20 ans au pouvoir sont à ranger dans le musée des antiquités démocratiques. Wade en a fait les frais. En dépit de la recevabilité de sa candidature par le Conseil constitutionnel, le peuple sénégalais a dit non à un troisième mandat. Par conséquent, cette question n’est plus à l’ordre du jour.
Ainsi donc, Monsieur le Président, vous fermerez la page la plus héroïque, la plus palpitante et la plus noble de votre vie. Vous confesserez quelques regrets et pleurerez en secret le mépris d’un bilan par endroits élogieux et controversé ailleurs. Le déclin sera pour vous une épreuve de vérité. A votre couchant, vous n’aurez plus grand monde autour de vous. Jeune retraité de la vie politique, à 62 ans, sans avenir, l’histoire retiendra que n’étant pas fait pour des défaites électorales, le temps politique vous a défait. Pour terminer, une petite interrogation : avez-vous déjà commencé à penser, ne serait-ce que subrepticement, à votre successeur ?
Cheikh Omar Diallo est Docteur en Science Politique, Expert en Communication et Directeur de l’Ecole d’Art Oratoire
«IL NE FAUT SURTOUT PAS PROCEDER AU RAPATRIEMENT DES ŒUVRES…»
Le célèbre artiste –peintre Zulu Mbaye est un homme de conviction qui n’a pas l’habitude de mâcher ses mots. Nous l’avons rencontré pour échanger sur la vie culturelle de notre pays. Avec une bonne dose de lucidité et beaucoup de discernement, il a répondu avec une rare franchise à nos questions. Entretien avec un « rebelle » qui s’assume
En 2017, l’année a été déclarée culturelle l’avez-vous ressentie en tant que créateur?
Du tout ! Pas du tout ! Nous nous attendions plutôt à un sursaut. A un coup de pouce qui serait donné aux artistes. Mais là, il faut mettre un peu la pédale douce.... On peut dire qu’il y a certaines avancées pour ce qui est du cinéma. Ce sont des avancées un peu timides, mais quand même, il faut y penser pour le développer. Il y a d’autres disciplines artistiques telles que la musique, parce que n’oublions pas que le Prix du Président de la République pour les Arts est allé à un musicien. On peut en parler parce que je déplore que l’on donne à certains artistes sénégalais des primes ou qu’on leur fasse faire des concours. Parce qu’ils ont un autre mérite. Un Baba Maal, Youssou Ndour, Ismaël Lo, Souleymane Faye ou Cheikh Lo, on les honore ! Donc cela m’a étonné que quelqu’un comme Baba Maal puisse présenter un dossier pour prendre part à ce genre de compétition. Qu’on nous dise exactement ce qui s’est passée (gros éclats de rire !). Cependant, on voit quelques balbutiements au niveau du cinéma que je viens de citer, mais aussi au niveau du théâtre qui bouge beaucoup. C’est également valable pour d’autres disciplines. Mais les arts plastiques ont été royalement ignorés. Quand on sait que le Sénégal est un pays de culture reconnu à travers le monde entier et que nous avons la Biennale des Arts « Contemporains » entre guillemets africains, car c’est toujours discutable. Cet intitulé, je l’ai toujours soulevé. Nous avons organisé le premier Festival des Arts Nègres. Je ne le dis pas pour l’Afrique, mais j’ai fait beaucoup de pays à travers le monde. Nous sommes un pays où il y a un village des Arts. Donc il s’agit d’un espace, un outil, un instrument qui pouvait booster et donner beaucoup plus de visibilité à cet art africain. Parce que ce village étant à Dakar où s’organise aussi la Biennale. Mais je dois aussi le dire, depuis que nous avons un ministre de la Culture en la personne de quelqu’un que j’ai connu au Village des Arts. Je l’avais connu par les médias, mais surtout au Village des Arts où il venait manger, discuter, échanger avec les artistes. Mais depuis qu’il a été nommé ministre de la Culture, on a perdu notre ami. On sait d’où ça vient et je ne suis pas quelqu’un qui mâche ses mots. Parce qu’entre nous et le ministre de la Culture, il y a la Direction des Arts. C’est une direction qui est contre le Village des Arts. Celui qui est là-bas a combattu le Village des Arts. Et je pèse bien mes mots. Parce que dans ce pays il y a des choses tellement gênantes. Quand on nomme quelqu‘un à un poste au lieu de se mettre dans la posture de quelqu’un pour servir, il en fait une arme de bataille. Il brise ou plutôt il essaye de briser des gens que l’on ne pourra jamais, jamais, jamais briser (il se répète trois fois). Le village des Arts, cet instrument que le monde entier nous envie, je demande solennellement à l’Etat sénégalais de voir son importance et d’apprécier ce que ce Village des Arts peut apporter de culturel à travers le monde et de bénéfices pour le Sénégal. Malheureusement, nous n’avons jamais vu l’ombre du ministre de la Culture. Et c’est très regrettable. Voilà, je crois que même s’il y a des contraintes de temps et d’espace pour cet entretien il faut bien dire les choses importantes à mes yeux.
Vous avez un peu anticipé sur la question de la Biennale. Le budget a été relevé mais les problèmes subsistent encore. Qu’est ce qui l’explique ?
Je pense que le problème de la Biennale, ce n’est pas un problème de budget. Mais c’est un problème de vision. Où veut-on mener l’art africain ? Que devons- nous présenter au monde et qui serait appelé art africain et que nous proposerons au monde ? C’est cela la vraie question au lieu de nous mettre à songer à copier, à plagier comme si nous n’avion pas de génie chez nous. Le génie africain est bien réel. Prenons le cas de Pablo Picasso. Avant sa rencontre avec l’art negro africain, il était dans un autre monde pictural et cela a fait un bouleversement mondial. Aujourd’hui, le monde est malade, inanimé, déchiré et l’Afrique a quelque chose à lui proposer. Nous sommes malades et le monde culturel est pauvre, mort inanimé. Il faut que les hommes de culture, les artistes se lèvent et proposent des choses. Nous sommes des êtres créatifs et ce monde nous l’avons bâti jusqu’à aujourd’hui. Mais pourquoi vouloir standardiser une seule pensée, une pensée unique et que tous les autres te suivent ? Nous, nous avons des choses à proposer au monde. Il faut que la Biennale invite les artistes et les intellectuels africains à s’approprier de cet outil de développement. Une plateforme qu’on envie partout à travers le monde. Mais nous nous arrêtons à faire des événements de prestige. On a eu un budget de cinq cent millions qu’on a amené à un milliard. Après combien de billets d’avions a-ton achetés ? Combien de bouteilles de champagne ? Combien de chambres d’hôtel ? Non il faut arrêter quoi !
Donc c’est pour cela que vous êtes contre sa composition avec son comité de sélection ?
Mais oui ! Depuis l’édition de 2016, je ne me retrouve pas dans le comité. Parce que moi, je ne suis pas là pour occuper de la place.
Surtout pas ! La gérance de la culture revient à des administratifs. Nous, nous sommes des acteurs. Leur rôle, c’est de nous accompagner, de nous demander où est-ce que nous voulons aller ? Le problème n’est pas de faire le festin des peintres. Nous leur demandons de nous ouvrir cette voie pour que nous passions cette passerelle. On ne leur demande pas de venir au Village des Arts qui est un espace de dé- confiscation, un espace de liberté. Mais dire que vous allez voir que je suis né dans un camp militaire alors que l’on est Directeur des Arts, je trouve cela vraiment inquiétant.
Quel devrait être à votre avis le profil du prochain Ministre de la Culture ?
Un homme qui aime la Culture. Mais il faut aussi une volonté politique. Ce pays possède un peu de pétrole, un peu de gaz, mais il n’a jamais autant brillé que par sa culture. S’il est connu de par le monde, c’est bien à travers sa culture. Car, comme le disait l’autre, la culture est au début et à la fin de tout développement. Il faut cesser d’ignorer notre identité négro africaine car c’est très beau. Nous avons ça de beau à proposer au monde. Arrêtons de fouler au pied notre identité. Il y a Tahhar Ben Jelloum qui disait dans un de ses livres « Autrefois, c’était les étrangers qui nous déshabillaient. Aujourd’hui, c’est nous qui nous déshabillons et jetons nos haillons dans les fosses de la honte ». Et c’est que nous sommes en train de vivre aujourd’hui. Il faut quelqu’un qui aime la culture avec des moyens conséquents pour pousser le secteur. Parce que nous en avons assez des fonctionnaires froids. Il faut avoir de la souplesse pour diriger la Culture. Encore une fois, nous ne sommes pas dans l’Armée.
Pensez-vous que les préoccupations culturelles ont été prises en compte par les différents candidats à l’élection présidentielle de dimanche dernier ?
Mais cela n’a jamais été la préoccupation d’un candidat ici. Vous savez, il faut reconnaitre que nous sommes en train de vivre au moyen âge à ce niveau. Les autres sont passés par là avant d’être la France, l’Allemagne ou les Etats Unis. Je suis un intellectuel. Je suis un citoyen. Je suis quelqu’un qui vit dans cette société sénégalaise. Je sais qu’il y a beaucoup de freins. Soit, c’est notre culture, soit notre pauvreté ou notre pauvreté matérielle. Vivons et essayons de sortir peu à peu de ce moyen, sinon des hommes comme moi vont « péter » les plombs. Ils vont se cogner la tête contre les murs alors que les choses ne vont pas bouger comme ça. Les choses ont leur trajectoire. Les choses se feront. Moi, je suis optimiste pour cela. Mais il y a le temps. Car tout ce que nous vivons là, ce n’est pas glorieux. Nous pouvons dépasser ça et pour de bon.
Vous avez tantôt parlé de pauvreté. Selon vous, qu’est ce qui explique l’attachement des zones les plus pauvres du pays au président sortant à la lueur des résultats sortis des urnes?
Je ne suis pas quelqu’un qui parle de politique politicienne et j’ai oublié de vous le dire au début de notre entretien. Pour moi, la politique telle qu’on la pratique ici, c’est trop peu pour moi. C’est pour cela que je n’ai jamais voté de ma vie. Je ne suis pas conquis par la politique politicienne. Je le dis parce que je ne cautionne pas et je ne participe pas à du théâtre. Je veux que les gens soient conscients de ce qu’ils font. Je considère le métier que je fais comme une religion et c’est comme si je commettais un péché en Islam. Il faut des hommes de foi qui font partie d’une société qu’ils veulent construire et développer. Moi, je n’ai pas vu un homme qui me tient ce discours, qui me parle de cette rupture qu’il faut. C’est comme un train avec la locomotive et les wagons. Si on ne fait pas l’effort de ce prix, de pousser, le wagon n’ira nulle part.
Il est question de retour des œuvres. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Il ne faut surtout pas procéder de cette façon par rapport aux œuvres. Nous ne sommes pas prêts pour ça. Nous ne sommes pas préparés pour ça ! (il se répète). Il faut remercier ces missionnaires occidentaux qui nous ont préservé ces objets pour qu’on puisse les admirer aujourd’hui. Sinon, avec la bénédiction des religions que ce soit l’Islam ou le christianisme, ces objets auraient été des bois de chauffe. Maintenant, arrêtons la fausse fierté en clamant que nous allons ramener les œuvres etc. Non ! Nous n’avons pas besoin de gens en costume cravate avec ce genre de discours. Nous voulons voir clair. Je ne sais pas si on peut en parler… Mais voilà ! En 1981, j’ai accompagné un ministre de la Culture aux Etats Unis à New Orléans. Lui, il a fait trois jours et il m’a laissé là-bas avec l’expo sénégalaise. J’ai fait un mois et dix -sept jours. A notre retour, je parlais de mon voyage aux Etats Unis à un douanier sénégalais quelque part. Il me dit que le mois passé, à la même époque, le ministre de la Culture a fait passer deux malles avec beaucoup d’objets d’arts africains. Moi, j’ai vécu des choses. Quand on parle de musées, il faut savoir que ce sont des pièces qui coutent chers qui y sont exposés. Si nous n’avons pas des muséologues et des conservateurs conscients de la richesse de ce patrimoine que nous devons récupérer, cela ne va pas prospérer. On n’a pas de techniciens.
Si je vous comprends bien nous n’avons pas les moyens de sauvegarder ces œuvres ?
Tout à fait ! Mais j’essaye de positiver. Ils ont pris ces objets. Pour nous les rendre, ils nous rendent des miettes. Quelques pièces par ci, par là. Vraiment, il faut arrêter !
A vous suivre, le Musée ne répond pas aux préoccupations des artistes ?
Je dois dire que je n’ai jamais mis les pieds là-bas. Je veux bien qu’on me parle de Musée des Civilisations Noires, mais il y a d’autres préoccupations auxquelles moi je n’adhère pas du tout. Donc voilà.
Ce statut de rebelle qui vous colle à la peau, ne vous a-t-il pas desservi ?
Vous savez ce qui se passe aujourd’hui. Je peux le dire sas aucune fausse modestie. Je suis l’artiste sénégalais qui vend le plus cher. Je ne leur demande rien. Ils ne me demandent rien et je ne leur dois rien. Voilà ! Ceux qui veulent entretenir des relations de civilités avec moi, c’est bien. Mais pour les autres….Moi je sais que ce que j’ai fait pour ce pays -là et je l’ai fait pendant des années et des années. Ce qui n’est pas une mince affaire. J’ai été président de l’Association nationale des artistes sénégalais et j’ai amené beaucoup de jeunes artistes qui vivent en Europe aujourd’hui. Depuis deux ans, je suis le président du village des Arts. Le roi du Maroc est venu et durant deux jours, j’ai été son guide. Il a acheté quarante-quatre pièces pour des millions de francs. Après, les Marocains m’ont demandé d’être leur commissaire à une exposition à Rabat. Et j’ai amené pendant un mois cinq plasticiens sénégalais et deux écrivains dont Thierno Seydou Sall et Elimane Kane. Des actes comme ça, je sais que c’est ce que devrait faire le ministère de la culture. J’ai toujours fonctionné comme cela. Que je sois président de ceci ou cela, je suis un rassembleur. Je suis quelqu’un en qui les artistes ont confiance et c’est cela l’essentiel. Chaque fois que je suis dans une action, je vois l’adhésion de tous mes collègues.
Vous êtes donc contre les honneurs et les hommages posthumes ?
Écoutez ! Il faut aussi que les artistes arrêtent de penser que quand ils sont malades, c’est l’Etat qui doit les soigner. L’estime et la reconnaissance qu’on te doit, on te le doit de ton vivant. Mais au lieu de rester là et attendre la mort pour être célébré : non ! Moi je veux qu’à ma mort, les hommes de culture disent : « qu’il était des nôtres, il était de la famille ». Cela me suffit comme hommage. Je reçois des décorations de l’Etat sénégalais aussi. Parce que je suis chevalier de l’Ordre national du Mérite et je dis merci. Parce que sûrement aussi, je le mérite.
Votre rêve pour le Sénégal ?
Seulement d’un Sénégal de paix ! Parce que sans la paix, il ne peut rien avoir de bon et de constructif. Un Sénégal de paix d’abord et après pour le reste on va voir….
PAR SORO DIOP
LE TRIOMPHE DU VOTE UTILE
Il y a des défaites qui ne porteront pas la mémoire du peuple parce qu’elles n’ont pas pu épouser les couleurs du présent et su allumer les étincelles de l’avenir.
Il y a des défaites qui ne porteront pas la mémoire du peuple parce qu’elles n’ont pas pu épouser les couleurs du présent et su allumer les étincelles de l’avenir. Comme le triste communiqué des naufragés du scrutin du 24 février rejetant le verdict provisoire issu de procès-verbaux signés pourtant par leurs représentants dans les bureaux de vote. Par contre, certaines défaites portent la splendeur du courage, de l’honnêteté et, en démocratie, du respect et de l’estime de l’adversaire triomphant. Ce sont ces flammes qui auront manqué aux adversaires du Président Macky Sall, eux qui ont toujours été dans la sous-estimation et la mésestimation. Aujourd’hui comme hier. Exaltations des fanges sordides de l’ethnicité, du régionalisme et d’un nationalisme suranné. Concert d’injures et d’accusations qui font honte à la jungle. Polémiques gonflées heurtant les bonnes âmes sensibles. Déni systématique, presque systémique, de la réalité.
Enfumages et manipulations en plein régime. Suspicions traumatiques. Recours et secours aux faxe news parfois ridicules. Ce que confirment et sanctionnent aujourd’hui les résultats provisoires de la Commission nationale de recensement qui donnent le Président Macky Sall vainqueur au 1er tour avec 58,27%, c’est la mise sur le bûcher électoral, des assourdissants vuvuzelas des contributeurs-politiciens. Aujourd’hui au feu, les vacarmes des naufragés du parrainage ! Les tohu-bohus d’un néophyte politique porté par quelques abonnés des réseaux sociaux ! Les charivaris d’un futur retraité politique qui ne souvient des Sénégalais que lors d’un enjeu électoral ! Les tintamarres d’un candidat par procuration ! Les escobarderies d’un prétendant qui a eu le mérite de nous dilater la rate ! Pourtant, nous n’avions eu cesse d’attirer leur attention sur le réalisme des électeurs sénégalais. Leur capacité à décrypter, sous les fureurs et les clameurs politiques, les ambitions qui répondent à leur espoir, la flamme du futur qui les rassure, sous la parole qui est d’argent, le silence qui est d’or. Nous faisions remarquer que les Sénégalais ont toujours su voter utile. C’est ce vote utile qui aura été l’arme destructive qui congédie Idrissa Seck, (la candidature de trop ?
L’usure de la quête du fauteuil présidentiel) pour un retour au confort et au confortable Hôtel SaintJames de Paris. C’est ce vote utile qui sonne comme un avertissement au jeune Ousmane Sonko de refréner ses ardeurs et sa fougue de jeunesse moulées dans un langage frisant l’outrance et l’outrageant pour lui permettre de donner du temps…politique au temps…électoral. Qu’il descende un peu de l’estrade, éviter un toujours l’affiche. La photo. La capsule. Pourquoi donc le vote utile contre les voix futiles a profité au Président Macky Sall. Aucun candidat ne connaît mieux que lui le Sénégal profond et des profondeurs. C’est indéniable et la campagne électorale a été très révélatrice. Aucun Président de la République, écrivionsnous, n’a réussi autant de prouesses sur le plan des performances économiques, sur la mise en œuvre de politiques sociales (encore à amplifier) et sur la réalisation d’infrastructures de haute qualité. Sans compter, -cela compte dans notre culture, nos us et coutumes-, son image d’homme peu porté pour la parole inflammatoire mais vers la vertu de l’action silencieuse.
LE SACRE ELECTORAL
Cette efficacité silencieuse s’est aussi signalée, et il faut bien le souligner, à travers le travail des hommes de l’ombre sur qui avaient pesé auparavant tous les soupçons et toutes les suspicions. Qui ne sont jamais descendus du piédestal de leur devoir de réserve mais qui ont accompli un travail remarquable d’organisation de l’élection présidentielle. Parmi eux, le commissaire Thiendella Fall, Directeur général des élections, son équipe et de manière générale, l’Administration décentralisée. C’est trop demander que leur manifester ce devoir de reconnaissance ? Non ! Alors, chapeau ! Les résultats du scrutin qui consacrent le sacre électoral du Président Macky Sall ont montré et démontré qu’il ne suffit pas d’alerter à force de décibels médiatiques, de gesticuler et de gémir dans le désert du microcosme dakarois, sans convaincre le Sénégal des profondeurs par des programmes bien pensés et des projets de société enchanteurs qu’on remporte forcément une élection présidentielle. L’indignation, à elle seule, ne fait pas une politique. Elle ne conduit pas non plus au graal présidentiel. Pas comme ça ! Pas avec ça ! Pas par ça!!! Sinon, comme aujourd’hui, il ne restera plus à ses adeptes qu’à courir après le vent.
Maintenant qu’attendre du Président Macky Sall ? Un Président, non dans la posture d’un homme providentiel, mais qui fait le job. Ce job, il l’a bien entamé au cours de son dernier mandat. Un bilan encore inachevé mais qui porte la promesse des fleurs et des fruits lui a valu la confiance renouvelée de la grande majorité des Sénégalais. Avec l’ère du pétrole et du gaz qui s’ouvre, le Président Macky Sall a tous les atouts pour accélérer la cadence de l’émergence du Sénégal. Tous doivent participer à en faire une bénédiction et non une malédiction. Il est à nouveau le Président de tous les Sénégalais, de tout le Sénégal et pour tout le Sénégal, une fantastique démocratie qui a honoré sa réputation politique, un merveilleux peuple uni dans sa diversité ethnique, fort de son «métissage confrérique», dense dans son ferment intellectuel. Il lui faut l’audace de construire un Sénégal où chacun a sa place, même si comme dit le philosophe Robert Redeker, auteur du livre «Le Soldat impossible», «l’unanimisme est le signe de la mort de la démocratie». Il faut ouvrir de nouveaux chantiers pour élargir les boulevards de la bonne gouvernance, s’entourer d’hommes et des femmes que la construction de la patrie enflamme, que le combat pour l’émergence électrise.
LES DAKAROIS ASSOMMES !
Paradoxalement, Dakar et sa banlieue n’ont pas connu une explosion de joie à l’annonce de la réélection du président Macky Sall.
« A vaincre sans péril on triomphe sans gloire ». Cette citation de Corneille pourrait s’appliquer à la victoire du candidat de la coalition de Benno Bok Yakar (Bby), le président Macky Sall, qui s’est vu créditer d’une majorité absolue de 58,27 % des suffrages exprimés dès le premier tour de la présidentielle du 24 février (c’est-à-dire dimanche) dernier.
Toujours est-il qu’en temps normal une élection ou réélection d’un président de la République avec une si belle et grande majorité, aurait dû provoquer une liesse populaire dans les rues et quartiers de la capitale. Comme dans toutes les grandes démocraties au soir d’un verdict électoral, des milliers de jeunes gens auraient dû sortir et envahir spontanément les rues de la capitale en chantant à la gloire du président élu. Et les concerts de klaxons, assourdir les populations le tour rythmé par des concerts de tambours et les mugissements de vuvuzelas ou coups de sifflets stridents.
Pendant ce temps, les quartiers et communes de la banlieue comme les Parcelles-Assainies, Pikine, Guédiawaye, Thiaroye, Keur-Massar regorgeant une forte population électorale, devaient constituer des lieux de convergence pour hommes, femmes, jeunes et enfants, sifflets à la bouche et drapeaux mais aussi portraits de leur candidat en main pour chanter et danser. Hélas, rien de tout cela hier !
Paradoxalement, Dakar et sa banlieue n’ont pas connu une explosion de joie à l’annonce de la réélection du président Macky Sall. Une réélection considérée comme une douloureuse sentence par les habitants d’une capitale qui ont donné la victoire dimanche dernier aux candidats de l’opposition. D’où les signes de tristesse et de déception qui se lisaient sur les visages assommés des Dakarois. La défaite est en général toujours amère, elle est d’autant plus douloureuse que la conviction d’aller au second tour et de gagner la présidentielle 2019 était forte du côté de l’opposition. Une défaite et une colère sourde que l’autorité a semblé avoir bien comprises pour avoir très tôt quadrillé Dakar par d’imposants chars de combat de la police et de la gendarmerie.
Mieux, les forces de l’ordre se sont pré positionnées sur les différents carrefours sensibles et stratégiques pour parer à toutes velléités de contestation et déstabilisation de nature à se transformer en une guérilla urbaine. On a connu plus joyeuse atmosphère de réélection assurément ! Il est vrai que le président Macky Sall a remporté la présidentielle. Il a gagné et vraiment gagné ! Une seule fausse note, le fait que les partisans de la coalition de Bby n’ont pas bruyamment fêté cette réélection, ne serait-ce que pour légitimer les 58,27. Et détendre l’atmosphère de deuil… électoral. Mais attention, nous parlons de fête « spontanée », ce qui ne s’est pas produit hier. Quant à venir après organiser une gigantesque cérémonie d’investiture, ça c’est autre chose !