Le célèbre artiste –peintre Zulu Mbaye est un homme de conviction qui n’a pas l’habitude de mâcher ses mots. Nous l’avons rencontré pour échanger sur la vie culturelle de notre pays. Avec une bonne dose de lucidité et beaucoup de discernement, il a répondu avec une rare franchise à nos questions. Entretien avec un « rebelle » qui s’assume
En 2017, l’année a été déclarée culturelle l’avez-vous ressentie en tant que créateur?
Du tout ! Pas du tout ! Nous nous attendions plutôt à un sursaut. A un coup de pouce qui serait donné aux artistes. Mais là, il faut mettre un peu la pédale douce.... On peut dire qu’il y a certaines avancées pour ce qui est du cinéma. Ce sont des avancées un peu timides, mais quand même, il faut y penser pour le développer. Il y a d’autres disciplines artistiques telles que la musique, parce que n’oublions pas que le Prix du Président de la République pour les Arts est allé à un musicien. On peut en parler parce que je déplore que l’on donne à certains artistes sénégalais des primes ou qu’on leur fasse faire des concours. Parce qu’ils ont un autre mérite. Un Baba Maal, Youssou Ndour, Ismaël Lo, Souleymane Faye ou Cheikh Lo, on les honore ! Donc cela m’a étonné que quelqu’un comme Baba Maal puisse présenter un dossier pour prendre part à ce genre de compétition. Qu’on nous dise exactement ce qui s’est passée (gros éclats de rire !). Cependant, on voit quelques balbutiements au niveau du cinéma que je viens de citer, mais aussi au niveau du théâtre qui bouge beaucoup. C’est également valable pour d’autres disciplines. Mais les arts plastiques ont été royalement ignorés. Quand on sait que le Sénégal est un pays de culture reconnu à travers le monde entier et que nous avons la Biennale des Arts « Contemporains » entre guillemets africains, car c’est toujours discutable. Cet intitulé, je l’ai toujours soulevé. Nous avons organisé le premier Festival des Arts Nègres. Je ne le dis pas pour l’Afrique, mais j’ai fait beaucoup de pays à travers le monde. Nous sommes un pays où il y a un village des Arts. Donc il s’agit d’un espace, un outil, un instrument qui pouvait booster et donner beaucoup plus de visibilité à cet art africain. Parce que ce village étant à Dakar où s’organise aussi la Biennale. Mais je dois aussi le dire, depuis que nous avons un ministre de la Culture en la personne de quelqu’un que j’ai connu au Village des Arts. Je l’avais connu par les médias, mais surtout au Village des Arts où il venait manger, discuter, échanger avec les artistes. Mais depuis qu’il a été nommé ministre de la Culture, on a perdu notre ami. On sait d’où ça vient et je ne suis pas quelqu’un qui mâche ses mots. Parce qu’entre nous et le ministre de la Culture, il y a la Direction des Arts. C’est une direction qui est contre le Village des Arts. Celui qui est là-bas a combattu le Village des Arts. Et je pèse bien mes mots. Parce que dans ce pays il y a des choses tellement gênantes. Quand on nomme quelqu‘un à un poste au lieu de se mettre dans la posture de quelqu’un pour servir, il en fait une arme de bataille. Il brise ou plutôt il essaye de briser des gens que l’on ne pourra jamais, jamais, jamais briser (il se répète trois fois). Le village des Arts, cet instrument que le monde entier nous envie, je demande solennellement à l’Etat sénégalais de voir son importance et d’apprécier ce que ce Village des Arts peut apporter de culturel à travers le monde et de bénéfices pour le Sénégal. Malheureusement, nous n’avons jamais vu l’ombre du ministre de la Culture. Et c’est très regrettable. Voilà, je crois que même s’il y a des contraintes de temps et d’espace pour cet entretien il faut bien dire les choses importantes à mes yeux.
Vous avez un peu anticipé sur la question de la Biennale. Le budget a été relevé mais les problèmes subsistent encore. Qu’est ce qui l’explique ?
Je pense que le problème de la Biennale, ce n’est pas un problème de budget. Mais c’est un problème de vision. Où veut-on mener l’art africain ? Que devons- nous présenter au monde et qui serait appelé art africain et que nous proposerons au monde ? C’est cela la vraie question au lieu de nous mettre à songer à copier, à plagier comme si nous n’avion pas de génie chez nous. Le génie africain est bien réel. Prenons le cas de Pablo Picasso. Avant sa rencontre avec l’art negro africain, il était dans un autre monde pictural et cela a fait un bouleversement mondial. Aujourd’hui, le monde est malade, inanimé, déchiré et l’Afrique a quelque chose à lui proposer. Nous sommes malades et le monde culturel est pauvre, mort inanimé. Il faut que les hommes de culture, les artistes se lèvent et proposent des choses. Nous sommes des êtres créatifs et ce monde nous l’avons bâti jusqu’à aujourd’hui. Mais pourquoi vouloir standardiser une seule pensée, une pensée unique et que tous les autres te suivent ? Nous, nous avons des choses à proposer au monde. Il faut que la Biennale invite les artistes et les intellectuels africains à s’approprier de cet outil de développement. Une plateforme qu’on envie partout à travers le monde. Mais nous nous arrêtons à faire des événements de prestige. On a eu un budget de cinq cent millions qu’on a amené à un milliard. Après combien de billets d’avions a-ton achetés ? Combien de bouteilles de champagne ? Combien de chambres d’hôtel ? Non il faut arrêter quoi !
Donc c’est pour cela que vous êtes contre sa composition avec son comité de sélection ?
Mais oui ! Depuis l’édition de 2016, je ne me retrouve pas dans le comité. Parce que moi, je ne suis pas là pour occuper de la place.
Surtout pas ! La gérance de la culture revient à des administratifs. Nous, nous sommes des acteurs. Leur rôle, c’est de nous accompagner, de nous demander où est-ce que nous voulons aller ? Le problème n’est pas de faire le festin des peintres. Nous leur demandons de nous ouvrir cette voie pour que nous passions cette passerelle. On ne leur demande pas de venir au Village des Arts qui est un espace de dé- confiscation, un espace de liberté. Mais dire que vous allez voir que je suis né dans un camp militaire alors que l’on est Directeur des Arts, je trouve cela vraiment inquiétant.
Quel devrait être à votre avis le profil du prochain Ministre de la Culture ?
Un homme qui aime la Culture. Mais il faut aussi une volonté politique. Ce pays possède un peu de pétrole, un peu de gaz, mais il n’a jamais autant brillé que par sa culture. S’il est connu de par le monde, c’est bien à travers sa culture. Car, comme le disait l’autre, la culture est au début et à la fin de tout développement. Il faut cesser d’ignorer notre identité négro africaine car c’est très beau. Nous avons ça de beau à proposer au monde. Arrêtons de fouler au pied notre identité. Il y a Tahhar Ben Jelloum qui disait dans un de ses livres « Autrefois, c’était les étrangers qui nous déshabillaient. Aujourd’hui, c’est nous qui nous déshabillons et jetons nos haillons dans les fosses de la honte ». Et c’est que nous sommes en train de vivre aujourd’hui. Il faut quelqu’un qui aime la culture avec des moyens conséquents pour pousser le secteur. Parce que nous en avons assez des fonctionnaires froids. Il faut avoir de la souplesse pour diriger la Culture. Encore une fois, nous ne sommes pas dans l’Armée.
Pensez-vous que les préoccupations culturelles ont été prises en compte par les différents candidats à l’élection présidentielle de dimanche dernier ?
Mais cela n’a jamais été la préoccupation d’un candidat ici. Vous savez, il faut reconnaitre que nous sommes en train de vivre au moyen âge à ce niveau. Les autres sont passés par là avant d’être la France, l’Allemagne ou les Etats Unis. Je suis un intellectuel. Je suis un citoyen. Je suis quelqu’un qui vit dans cette société sénégalaise. Je sais qu’il y a beaucoup de freins. Soit, c’est notre culture, soit notre pauvreté ou notre pauvreté matérielle. Vivons et essayons de sortir peu à peu de ce moyen, sinon des hommes comme moi vont « péter » les plombs. Ils vont se cogner la tête contre les murs alors que les choses ne vont pas bouger comme ça. Les choses ont leur trajectoire. Les choses se feront. Moi, je suis optimiste pour cela. Mais il y a le temps. Car tout ce que nous vivons là, ce n’est pas glorieux. Nous pouvons dépasser ça et pour de bon.
Vous avez tantôt parlé de pauvreté. Selon vous, qu’est ce qui explique l’attachement des zones les plus pauvres du pays au président sortant à la lueur des résultats sortis des urnes?
Je ne suis pas quelqu’un qui parle de politique politicienne et j’ai oublié de vous le dire au début de notre entretien. Pour moi, la politique telle qu’on la pratique ici, c’est trop peu pour moi. C’est pour cela que je n’ai jamais voté de ma vie. Je ne suis pas conquis par la politique politicienne. Je le dis parce que je ne cautionne pas et je ne participe pas à du théâtre. Je veux que les gens soient conscients de ce qu’ils font. Je considère le métier que je fais comme une religion et c’est comme si je commettais un péché en Islam. Il faut des hommes de foi qui font partie d’une société qu’ils veulent construire et développer. Moi, je n’ai pas vu un homme qui me tient ce discours, qui me parle de cette rupture qu’il faut. C’est comme un train avec la locomotive et les wagons. Si on ne fait pas l’effort de ce prix, de pousser, le wagon n’ira nulle part.
Il est question de retour des œuvres. Quelle est votre position sur ce sujet ?
Il ne faut surtout pas procéder de cette façon par rapport aux œuvres. Nous ne sommes pas prêts pour ça. Nous ne sommes pas préparés pour ça ! (il se répète). Il faut remercier ces missionnaires occidentaux qui nous ont préservé ces objets pour qu’on puisse les admirer aujourd’hui. Sinon, avec la bénédiction des religions que ce soit l’Islam ou le christianisme, ces objets auraient été des bois de chauffe. Maintenant, arrêtons la fausse fierté en clamant que nous allons ramener les œuvres etc. Non ! Nous n’avons pas besoin de gens en costume cravate avec ce genre de discours. Nous voulons voir clair. Je ne sais pas si on peut en parler… Mais voilà ! En 1981, j’ai accompagné un ministre de la Culture aux Etats Unis à New Orléans. Lui, il a fait trois jours et il m’a laissé là-bas avec l’expo sénégalaise. J’ai fait un mois et dix -sept jours. A notre retour, je parlais de mon voyage aux Etats Unis à un douanier sénégalais quelque part. Il me dit que le mois passé, à la même époque, le ministre de la Culture a fait passer deux malles avec beaucoup d’objets d’arts africains. Moi, j’ai vécu des choses. Quand on parle de musées, il faut savoir que ce sont des pièces qui coutent chers qui y sont exposés. Si nous n’avons pas des muséologues et des conservateurs conscients de la richesse de ce patrimoine que nous devons récupérer, cela ne va pas prospérer. On n’a pas de techniciens.
Si je vous comprends bien nous n’avons pas les moyens de sauvegarder ces œuvres ?
Tout à fait ! Mais j’essaye de positiver. Ils ont pris ces objets. Pour nous les rendre, ils nous rendent des miettes. Quelques pièces par ci, par là. Vraiment, il faut arrêter !
A vous suivre, le Musée ne répond pas aux préoccupations des artistes ?
Je dois dire que je n’ai jamais mis les pieds là-bas. Je veux bien qu’on me parle de Musée des Civilisations Noires, mais il y a d’autres préoccupations auxquelles moi je n’adhère pas du tout. Donc voilà.
Ce statut de rebelle qui vous colle à la peau, ne vous a-t-il pas desservi ?
Vous savez ce qui se passe aujourd’hui. Je peux le dire sas aucune fausse modestie. Je suis l’artiste sénégalais qui vend le plus cher. Je ne leur demande rien. Ils ne me demandent rien et je ne leur dois rien. Voilà ! Ceux qui veulent entretenir des relations de civilités avec moi, c’est bien. Mais pour les autres….Moi je sais que ce que j’ai fait pour ce pays -là et je l’ai fait pendant des années et des années. Ce qui n’est pas une mince affaire. J’ai été président de l’Association nationale des artistes sénégalais et j’ai amené beaucoup de jeunes artistes qui vivent en Europe aujourd’hui. Depuis deux ans, je suis le président du village des Arts. Le roi du Maroc est venu et durant deux jours, j’ai été son guide. Il a acheté quarante-quatre pièces pour des millions de francs. Après, les Marocains m’ont demandé d’être leur commissaire à une exposition à Rabat. Et j’ai amené pendant un mois cinq plasticiens sénégalais et deux écrivains dont Thierno Seydou Sall et Elimane Kane. Des actes comme ça, je sais que c’est ce que devrait faire le ministère de la culture. J’ai toujours fonctionné comme cela. Que je sois président de ceci ou cela, je suis un rassembleur. Je suis quelqu’un en qui les artistes ont confiance et c’est cela l’essentiel. Chaque fois que je suis dans une action, je vois l’adhésion de tous mes collègues.
Vous êtes donc contre les honneurs et les hommages posthumes ?
Écoutez ! Il faut aussi que les artistes arrêtent de penser que quand ils sont malades, c’est l’Etat qui doit les soigner. L’estime et la reconnaissance qu’on te doit, on te le doit de ton vivant. Mais au lieu de rester là et attendre la mort pour être célébré : non ! Moi je veux qu’à ma mort, les hommes de culture disent : « qu’il était des nôtres, il était de la famille ». Cela me suffit comme hommage. Je reçois des décorations de l’Etat sénégalais aussi. Parce que je suis chevalier de l’Ordre national du Mérite et je dis merci. Parce que sûrement aussi, je le mérite.
Votre rêve pour le Sénégal ?
Seulement d’un Sénégal de paix ! Parce que sans la paix, il ne peut rien avoir de bon et de constructif. Un Sénégal de paix d’abord et après pour le reste on va voir….
PAR SORO DIOP
LE TRIOMPHE DU VOTE UTILE
Il y a des défaites qui ne porteront pas la mémoire du peuple parce qu’elles n’ont pas pu épouser les couleurs du présent et su allumer les étincelles de l’avenir.
Il y a des défaites qui ne porteront pas la mémoire du peuple parce qu’elles n’ont pas pu épouser les couleurs du présent et su allumer les étincelles de l’avenir. Comme le triste communiqué des naufragés du scrutin du 24 février rejetant le verdict provisoire issu de procès-verbaux signés pourtant par leurs représentants dans les bureaux de vote. Par contre, certaines défaites portent la splendeur du courage, de l’honnêteté et, en démocratie, du respect et de l’estime de l’adversaire triomphant. Ce sont ces flammes qui auront manqué aux adversaires du Président Macky Sall, eux qui ont toujours été dans la sous-estimation et la mésestimation. Aujourd’hui comme hier. Exaltations des fanges sordides de l’ethnicité, du régionalisme et d’un nationalisme suranné. Concert d’injures et d’accusations qui font honte à la jungle. Polémiques gonflées heurtant les bonnes âmes sensibles. Déni systématique, presque systémique, de la réalité.
Enfumages et manipulations en plein régime. Suspicions traumatiques. Recours et secours aux faxe news parfois ridicules. Ce que confirment et sanctionnent aujourd’hui les résultats provisoires de la Commission nationale de recensement qui donnent le Président Macky Sall vainqueur au 1er tour avec 58,27%, c’est la mise sur le bûcher électoral, des assourdissants vuvuzelas des contributeurs-politiciens. Aujourd’hui au feu, les vacarmes des naufragés du parrainage ! Les tohu-bohus d’un néophyte politique porté par quelques abonnés des réseaux sociaux ! Les charivaris d’un futur retraité politique qui ne souvient des Sénégalais que lors d’un enjeu électoral ! Les tintamarres d’un candidat par procuration ! Les escobarderies d’un prétendant qui a eu le mérite de nous dilater la rate ! Pourtant, nous n’avions eu cesse d’attirer leur attention sur le réalisme des électeurs sénégalais. Leur capacité à décrypter, sous les fureurs et les clameurs politiques, les ambitions qui répondent à leur espoir, la flamme du futur qui les rassure, sous la parole qui est d’argent, le silence qui est d’or. Nous faisions remarquer que les Sénégalais ont toujours su voter utile. C’est ce vote utile qui aura été l’arme destructive qui congédie Idrissa Seck, (la candidature de trop ?
L’usure de la quête du fauteuil présidentiel) pour un retour au confort et au confortable Hôtel SaintJames de Paris. C’est ce vote utile qui sonne comme un avertissement au jeune Ousmane Sonko de refréner ses ardeurs et sa fougue de jeunesse moulées dans un langage frisant l’outrance et l’outrageant pour lui permettre de donner du temps…politique au temps…électoral. Qu’il descende un peu de l’estrade, éviter un toujours l’affiche. La photo. La capsule. Pourquoi donc le vote utile contre les voix futiles a profité au Président Macky Sall. Aucun candidat ne connaît mieux que lui le Sénégal profond et des profondeurs. C’est indéniable et la campagne électorale a été très révélatrice. Aucun Président de la République, écrivionsnous, n’a réussi autant de prouesses sur le plan des performances économiques, sur la mise en œuvre de politiques sociales (encore à amplifier) et sur la réalisation d’infrastructures de haute qualité. Sans compter, -cela compte dans notre culture, nos us et coutumes-, son image d’homme peu porté pour la parole inflammatoire mais vers la vertu de l’action silencieuse.
LE SACRE ELECTORAL
Cette efficacité silencieuse s’est aussi signalée, et il faut bien le souligner, à travers le travail des hommes de l’ombre sur qui avaient pesé auparavant tous les soupçons et toutes les suspicions. Qui ne sont jamais descendus du piédestal de leur devoir de réserve mais qui ont accompli un travail remarquable d’organisation de l’élection présidentielle. Parmi eux, le commissaire Thiendella Fall, Directeur général des élections, son équipe et de manière générale, l’Administration décentralisée. C’est trop demander que leur manifester ce devoir de reconnaissance ? Non ! Alors, chapeau ! Les résultats du scrutin qui consacrent le sacre électoral du Président Macky Sall ont montré et démontré qu’il ne suffit pas d’alerter à force de décibels médiatiques, de gesticuler et de gémir dans le désert du microcosme dakarois, sans convaincre le Sénégal des profondeurs par des programmes bien pensés et des projets de société enchanteurs qu’on remporte forcément une élection présidentielle. L’indignation, à elle seule, ne fait pas une politique. Elle ne conduit pas non plus au graal présidentiel. Pas comme ça ! Pas avec ça ! Pas par ça!!! Sinon, comme aujourd’hui, il ne restera plus à ses adeptes qu’à courir après le vent.
Maintenant qu’attendre du Président Macky Sall ? Un Président, non dans la posture d’un homme providentiel, mais qui fait le job. Ce job, il l’a bien entamé au cours de son dernier mandat. Un bilan encore inachevé mais qui porte la promesse des fleurs et des fruits lui a valu la confiance renouvelée de la grande majorité des Sénégalais. Avec l’ère du pétrole et du gaz qui s’ouvre, le Président Macky Sall a tous les atouts pour accélérer la cadence de l’émergence du Sénégal. Tous doivent participer à en faire une bénédiction et non une malédiction. Il est à nouveau le Président de tous les Sénégalais, de tout le Sénégal et pour tout le Sénégal, une fantastique démocratie qui a honoré sa réputation politique, un merveilleux peuple uni dans sa diversité ethnique, fort de son «métissage confrérique», dense dans son ferment intellectuel. Il lui faut l’audace de construire un Sénégal où chacun a sa place, même si comme dit le philosophe Robert Redeker, auteur du livre «Le Soldat impossible», «l’unanimisme est le signe de la mort de la démocratie». Il faut ouvrir de nouveaux chantiers pour élargir les boulevards de la bonne gouvernance, s’entourer d’hommes et des femmes que la construction de la patrie enflamme, que le combat pour l’émergence électrise.
LES DAKAROIS ASSOMMES !
Paradoxalement, Dakar et sa banlieue n’ont pas connu une explosion de joie à l’annonce de la réélection du président Macky Sall.
« A vaincre sans péril on triomphe sans gloire ». Cette citation de Corneille pourrait s’appliquer à la victoire du candidat de la coalition de Benno Bok Yakar (Bby), le président Macky Sall, qui s’est vu créditer d’une majorité absolue de 58,27 % des suffrages exprimés dès le premier tour de la présidentielle du 24 février (c’est-à-dire dimanche) dernier.
Toujours est-il qu’en temps normal une élection ou réélection d’un président de la République avec une si belle et grande majorité, aurait dû provoquer une liesse populaire dans les rues et quartiers de la capitale. Comme dans toutes les grandes démocraties au soir d’un verdict électoral, des milliers de jeunes gens auraient dû sortir et envahir spontanément les rues de la capitale en chantant à la gloire du président élu. Et les concerts de klaxons, assourdir les populations le tour rythmé par des concerts de tambours et les mugissements de vuvuzelas ou coups de sifflets stridents.
Pendant ce temps, les quartiers et communes de la banlieue comme les Parcelles-Assainies, Pikine, Guédiawaye, Thiaroye, Keur-Massar regorgeant une forte population électorale, devaient constituer des lieux de convergence pour hommes, femmes, jeunes et enfants, sifflets à la bouche et drapeaux mais aussi portraits de leur candidat en main pour chanter et danser. Hélas, rien de tout cela hier !
Paradoxalement, Dakar et sa banlieue n’ont pas connu une explosion de joie à l’annonce de la réélection du président Macky Sall. Une réélection considérée comme une douloureuse sentence par les habitants d’une capitale qui ont donné la victoire dimanche dernier aux candidats de l’opposition. D’où les signes de tristesse et de déception qui se lisaient sur les visages assommés des Dakarois. La défaite est en général toujours amère, elle est d’autant plus douloureuse que la conviction d’aller au second tour et de gagner la présidentielle 2019 était forte du côté de l’opposition. Une défaite et une colère sourde que l’autorité a semblé avoir bien comprises pour avoir très tôt quadrillé Dakar par d’imposants chars de combat de la police et de la gendarmerie.
Mieux, les forces de l’ordre se sont pré positionnées sur les différents carrefours sensibles et stratégiques pour parer à toutes velléités de contestation et déstabilisation de nature à se transformer en une guérilla urbaine. On a connu plus joyeuse atmosphère de réélection assurément ! Il est vrai que le président Macky Sall a remporté la présidentielle. Il a gagné et vraiment gagné ! Une seule fausse note, le fait que les partisans de la coalition de Bby n’ont pas bruyamment fêté cette réélection, ne serait-ce que pour légitimer les 58,27. Et détendre l’atmosphère de deuil… électoral. Mais attention, nous parlons de fête « spontanée », ce qui ne s’est pas produit hier. Quant à venir après organiser une gigantesque cérémonie d’investiture, ça c’est autre chose !
«LE SÉNÉGAL, LA CÔTE D’IVOIRE, LE CAMEROUN ET L’EGYPTE SONT FAVORIS DE LA CAN 2019»
A l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations Égypte 2019, le sélectionneur du Maroc revient pour cafonline.com sur l’état de forme de son équipe. et parle des favoris
A l’approche de la Coupe d’Afrique des Nations Égypte 2019, le sélectionneur du Maroc revient pour cafonline.com sur l’état de forme de son équipe. Les Lions de l’Atlas, déjà qualifiés, affronteront le Malawi lors de la dernière journée des éliminatoires avant un match de gala contre l’Argentine à Tanger
Le mois de février a toujours une saveur particulière pour vous puisqu’il correspond aux titres gagnées en 2012 avec la Zambie et la Côte d’Ivoire en 2015. Quels souvenirs gardezvous de ces deux titres ?
“Ce sont des souvenirs gravés à jamais dans mon cœur ! C’est indescriptible. Il faut le vivre. Je n’aurais jamais pensé travailler sur le contient africain et c’est grâce à Claude Leroy. Y a aussi un petit facteur chance dont j’ai bénéficié. ”
Quel est votre état d’esprit après ce troisième trophée d’entraîneur de l’année décerné par la CAF ?
“C’est un honneur puisque c’est la troisième fois que je l’obtiens depuis 2008, lorsque je suis devenu entraîneur principal. En dix ans, c’est exceptionnel ! C’est aussi la reconnaissance du travail collectif car je travaille avec des adjoints de grande qualité et des fédérations qui m’ont donné des moyens de travailler. Au Maroc, j’ai beaucoup de gens qui travaillent pour moi. Il faut savoir déléguer. Il faut aussi sans cesse se remettre en question. Ce qui motive un entraîneur, c’est d’aller chercher des titres.”
Vous avez récemment assisté à la Coupe d’Asie des Nations remportée par le Qatar. Quelles sont vos impressions ?
“J’ai été agréablement surpris par leur équipe même s’il y a des joueurs naturalisés. Il y a surtout un travail fait par des Espagnols depuis quelques années. Le Qatar prépare sa coupe du monde en 2022 depuis longtemps et ce trophée obtenu face au Japon est significatif.”
Pensez-vous toujours que l’Egypte et le Sénégal sont les favoris de cette CAN 2019 ?
“En faisant preuve d’humilité, c’est très difficile de gagner une CAN et je sais de quoi je parle. Statistiquement, les amoureux du football savent que l’Egypte c’est un grand pays. Encore plus quand on peut compter sur Mohamed Sala. Et encore plus à domicile avec un fort soutien populaire. Cela va être très difficile pour tous leurs adversaires. Quelle équipe possède aujourd’hui des qualités individuelles comme le Sénégal de Sadio Mané ou Koulibaly ? N’oublions pas aussi la Côte d’Ivoire de Nicolas Pépé et Serge Aurier, les champions en titre camerounais ou le Nigeria. Je préfère ne pas m’enflammer pour le Maroc et faire tomber les adversaires sur le terrain.”
Le lieu du stage de préparation pour la CAN 2019 est-il arrêté?
“La fédération royale marocaine est en train de construire un centre technique national magnifique. C’est exceptionnel en qualité ! Sera-t-il fini à temps d’ici juin ? Je l’espère et pour le moment nous planifions notre préparation à Rabat. Sinon, on trouvera un plan B mais ce n’est pas d’actualité.”
Déjà qualifié, le Maroc affronte le Malawi lors de la dernière journée des éliminatoires de la CAN 2019. Qu’attendez-vousvous de cette rencontre ?
“Cela va permettre de voir certains joueurs qui n’ont pas beaucoup porté le maillot de l’équipe nationale. Sans compter l’Argentine, c’est le dernier rendez-vous officiel avant la préparation de la CAN au mois de juin. C’est important aussi de récolter des points pour le classement FIFA. C’est toujours difficile d’évoluer au Malawi.”
La presse marocaine annonce comme acquise l’absence d’éléments comme Noussair Mazraoui, Achraf Hakimi, Youssef En-Nesyri et Hamza Mendyl, qui seraient mis à disposition de la sélection U23 pour la confrontation décisive face à la RDC. Vous confirmez ?
“On va faire un dernier point avec le sélectionneur des U23 et le DTN. Mais je ne les laisserai pas tous à dispositions contrairement à ce qui a pu être dit prématurément. Je prends les décisions sportifs et si je ne parle pas, il faut considérer que ce n’est pas officiel.”
Est-ce que Yunis Abdelhamid, auteur d’une belle saison avec Reims pourrait être appelé?
“On va faire un dernier point avec le sélectionneur des U23 et le DTN. Mais je ne les laisserai pas tous à dispositions contrairement à ce qui a pu être dit prématurément. Je prends les décisions sportifs et si je ne parle pas, il faut considérer que ce n’est pas officiel.”
Est-ce que Yunis Abdelhamid, auteur d’une belle saison avec Reims pourrait être appelé?
“Je l’ai eu récemment au téléphone et l’ai félicité pour l’excellente saison qu’il effectue. C’est un garçon qui réussit à s’imposer malgré le passage de la Ligue 2à la Ligue 1. Non seulement il est titulaire mais il est devenu une pièce maîtresse de cette équipe de Reims. Bravo à lui, il sera un apport précieux pour le Maroc.”
Autre bon point pour le football marocain : Oussama Idrissi jouera pour les Lions de l’Atlas
“Ma plus grosse satisfaction est d’avoir rencontré un joueur très professionnel lors de notre dernier stage. J’ai été impressionné par sa rigueur et son sens du collectif. Il a beaucoup de qualités et devrait évoluer dans un club encore plus important qu’actuellement. C’est une très bonne nouvelle ! A lui de s’imposer maintenant.”
Que pensez-vous de l’expatriation en Chine d’El Kayoubi ?
“Il y a de plus en plus de très bons joueurs en Chine. Déjà lors de mon passage en 2002, en tant qu’adjoint, il y avait déjà un certain niveau. Ce n’est pas facile de s’imposer là-bas avec la règle des 3 joueurs étrangers par équipe. Regardez comment Gervinho fait une saison magnifique aujourd’hui à Parme. Il ne s’est pas endormi en Chine, il faut être compétitif et Kayoubi va progresser. Cette expérience va lui servir dans son évolution. Le problème de Kayoubi aujourd’hui c’est plutôt la concurrence avec la saison remarquable du jeune Youssef En-Nesyri, locomotive des attaquants au Maroc.”
Qu’attendez-vous du match de gala contre l’Argentine à Tanger?
“Il va falloir faire les mêmes prestations que contre le Portugal et l’Espagne au Mondial 2018. Si on est à notre niveau, on peut rivaliser. Tout en sachant qu’ils ont un extraterrestre nommé Lionel Messi qui tout faire changer. C’est un match exceptionnel dans une carrière et pour le Maroc. Je suis sûr que les joueurs seront tous motivés.”
CAFONLINE.COM
LE BILAN PASSE DE 4 A 5 GENDARMES TUES
Hamidou Wone, un des gendarmes blessés qui était dans le coma, a finalement rendu l’âme à l’hôpital Principal de Dakar où il était admis depuis ce choc brutal.
Le bilan des victimes de l’accident d’un pick-up de la Gendarmerie assurant le jalonnement du convoi du candidat Macky Sall, durant la campagne de la présidentielle sur l’axe Kolda-Sédhiou, passe de 4 à 5 morts désormais. Hamidou Wone, un des gendarmes blessés qui était dans le coma, a finalement rendu l’âme à l’hôpital Principal de Dakar où il était admis depuis ce choc brutal.
Le dimanche 10 février 2019, de retour de Kolda, un pick-up de la Gendarmerie a fait plusieurs tonneaux sur la route, avant de se retrouver dans le décor, à hauteur du village de Bougnadou (Sédhiou). Selon des témoins, le conducteur de la voiture qui voulait éviter un camion frigorifique en a perdu le contrôle.
4 éléments ont perdu la vie sur le coup. Il s’agit des gendarmes Mamadou Bâ, Abdoulaye Mboup, Waly Sarr et Amidou Diouf. La levée du corps de ces 4 agents a eu lieu le 13 février dernier à la Caserne Samba Déry Diallo de Dakar, suivi de leur inhumation dans leurs localités d’origine. 10 autres gendarmes s’en sont sortis avec des blessures dont certains, grièvement atteints, ont été évacués sur Dakar.
«ON S’ATTENDAIT DAVANTAGE A UN SCORE PLUS ETRIQUE»
Mais 59% me parait un taux énorme. Cela est peut-être lié au fait que dans les zones qu’il a eu à mettre dans son giron, Macky Sall a eu des écarts très gros comme par exemple au Fouta et à Fatick.
«Le débat sur le premier tour et le second tour vient d’être tranché avec la publication des résultats provisoires. Ce débat est derrière nous. Le candidat Idrissa Seck qui est classé deuxième vient de parler d’une confiscation de la volonté populaire à travers les résultats qui ont été publiés par la Commission nationale de recensement des votes.
Par contre, il dit qu’il ne fera pas recours. A partir de ce moment-là, il sera peut-être difficile d’avoir les éléments de preuve d’une confiscation de vote. Parce que c’est uniquement avec la saisine du Conseil constitutionnel, même si on peut lui reconnaitre le droit de ne pas avoir confiance au Conseil constitutionnel, c’est ce seul recours qui permettrait de voir sur la base des éléments de preuve qui siéent s’il y a eu confiscation. Sans quoi, il sera difficile d’avoir la thèse d’une confiscation. Je constate en tant qu’observateur que l’écart est trop grand avec presque 59% de l’électorat. D’autant plus grand que l’opposition avait réussi à faire basculer dans son escarcelle des zones à fort électorat comme ce fut le cas d’Idrissa Seck dans la région de Diourbel. On s’est rendu compte que le département de Thiès est retombé dans les mains d’Idrissa Seck même si à l’arrivée, il perd la région. Ousmane Sonko, pour sa part, a fait une razzia dans toute la région Sud. Ceci pouvait laisser entrevoir, même en cas de victoire de Macky Sall au premier tour, un écart moins grand. Mais 59% me parait un taux énorme. Cela est peut-être lié au fait que dans les zones qu’il a eu à mettre dans son giron, Macky Sall a eu des écarts très gros comme par exemple au Fouta et à Fatick. Tout comme également dans le centre du pays à Kaffrine et à Kaolack. Ces écarts peuvent expliquer la différence énorme au plan national. En tant qu’observateur, c’est vraiment cela qui m’intrigue un peu. Comment a-t-il pu gagner avec autant d’écart ? Ce qui ne veut pas dire encore une fois qu’il ne peut pas gagner au premier tour. On s’attendait davantage à un score plus étriqué ».
PERSPECTIVE DES ELECTIONS LOCALES
« Je sais que la majorité politique en tant qu’entité, a des ambitions locales qui peuvent expliquer des tiraillements et même des votes-sanction. Maintenant, pour ce qui est des autres coalitions de l’opposition, il faut voir quel sera le sort qui leur sera réservé. Ousmane Sonko a pu drainer autour de sa candidature Pierre Goudiaby Atépa, Boubacar Camara, Bruno Derneville. Mais est-ce qu’ils vont rester dans cette dynamique lors des élections locales? Cela reste à prouver. D’un autre côté, Idrissa Seck a réussi à rassembler autour de lui une large coalition constituée par 17 recalés de la candidature à la candidature à la présidentielle. Mais est-ce que ces gens vont continuer à cheminer avec lui en perspective des élections locales ? Est-ce qu’ils ne voudront pas, par le biais de leur parti, se présenter à ces élections locales ? Donc, c’est très difficile pour l’instant de se prononcer sur la reconfiguration qu’on aura d’ici les élections locales parce que la situation actuelle pourrait ne pas être figée ».
«IL EST ABSOLUMENT NECESSAIRE D’ENCADRER LES POUVOIRS EXORBITANTS DU PRESIDENT»
Alioune Tine revient aussi sur les chantiers attendus du Président Sall mais aussi sur la percée du président du Pastef, Ousmane Sonko, candidat malheureux à la présidentielle.
Dans cet entretien, le fondateur d’Africajom Center par ailleurs directeur d’Amnesty International en Afrique de l’Ouest analyse la victoire du Président Macky Sall au premier tour, lors du scrutin du 24 février dernier. Alioune Tine revient aussi sur les chantiers attendus du Président Sall mais aussi sur la percée du président du Pastef, Ousmane Sonko, candidat malheureux à la présidentielle.
Comment analysez-vous la victoire de Macky Sall, dès le premier tour ?
Plusieurs facteurs expliquent la victoire de Macky Sall au premier tour. D’abord, sa forte motivation politique de gagner cette élection au premier tour était pratiquement une obsession politique pour lui comme pour beaucoup de présidents africains qui, au cours de leurs premiers mandats, rêvent d’un coup K.O. En 2007, c’était le cas du Président Abdoulaye Wade dont il a bien retenu la leçon en tant que Premier ministre et Directeur de campagne. Ensuite, il a pensé de façon très méthodique sa stratégie et il s’est donné les moyens juridiques, politiques, institutionnels et financiers de la mettre en œuvre sans état d’âme. Sur le plan juridique, avec une Assemblée nationale acquise, il a modifié le Code électoral et fait adopter la loi sur le parrainage. Il a pu neutraliser par la Justice deux adversaires redoutables, l’ancien ministre d’Etat Karim Wade et l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall. Enfin, il a affiché de façon spectaculaire son bilan sur les infrastructures et sur les mesures sociales. La démocratie sénégalaise, les libertés fondamentales et les droits de l’homme en ont ressenti les contrecoups. Pour cela, faut-il cependant le considérer comme un génie politique ? Il n’a pas également lésiné sur les moyens pour attirer vers lui les transhumants dotés d’une clientèle politique, sans compter d’autres segments de la société dont les plus influents sont les marabouts, les imams et les évêques. Notez enfin une campagne à l’américaine.
Quels sont les chantiers attendus de Macky Sall sur le plan démocratique, de la justice, de la gestion transparente ?
C’est la réforme des institutions qui est une urgence depuis l’élaboration du Pacte Républicain en 2006, les Assises nationales en 2009 et la CNRI en 2012. Car, les aspirations profondes des Sénégalais pour des changements effectifs s’étaient exprimées de façon claire et massive contre la réforme institutionnelle autorisant un troisième mandat pour le président Wade. Il est évident que tout le monde attendait du président de la République des réformes structurelles qui seraient une véritable rupture par rapport au système politique institué par Senghor depuis 1963. Nul mieux que Macky Sall aujourd’hui, dans le cadre de son deuxième et dernier mandat, n’est mieux placé pour mettre en œuvre des réformes capables de moderniser et de faire évoluer de façon sensible la démocratie et les institutions de la République, pour le Sénégal, mais également pour le continent et la planète en quête d’un deuxième souffle démocratique. Réformer d’abord l’institution présidentielle avec l’hyper-présidentialisme macrocéphale et anthropophage qui bouffe et assujettit toutes les institutions. Il est donc absolument nécessaire d’encadrer les pouvoirs exorbitants du président de la République et de mettre un terme à l’Etat-Parti avec un président de la République, chef d’Etat et chef de parti. Il faut également que le président de la République avec ses pouvoirs, soit responsable sur le plan politique et pénal comme c’est le cas dans les grandes démocraties. Réformer ensuite la Justice avec le respect scrupuleux de l’indépendance et du principe de l’inamovibilité des juges du siège, mettre fin à la participation de l’Exécutif au sein du Conseil supérieur de la magistrature, émanciper le Procureur de la République des fourches caudines du Garde de Sceaux, ministre de la Justice, supprimer le Conseil constitutionnel qui ne répond plus à sa fonction et, à la place, créer une Cour constitutionnelle. Depuis le 23 Juin 2011, les Sénégalais ont rendu obsolète le type de Parlement et d’institutions que nous avons encore aujourd’hui avec des Parlementaires qui ne sont pas au service du peuple et de l’intérêt général mais, au service exclusif du président de la République. Il faut consacrer un mode de désignation des députés qui favorise le lien et la redevabilité entre le député et les citoyens, garantir une meilleure représentation des jeunes, des femmes et des personnes vivant avec un handicap. Renforcer l’indépendance et l’efficacité des Autorités administratives Indépendantes, recruter leurs principaux responsables par appel à candidatures et les déconnecter totalement de l’autorité présidentielle. Procéder à la rationalisation des partis politiques et promouvoir l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité au cœur de la politique. II faut aussi mettre la question de l’accès à l’information et la transparence et la redevabilité de la gestion de deniers publics dans tous les domaines de la vie politique, économique, sociale et institutionnelle. Mais fondamentalement, replacer le citoyen sénégalais au cœur des préoccupations de la gouvernance, du développement durable, de l’Etat de droit, de la démocratie et des droits humains. Ce qu’il faut faire, c’est un grand débat post-électoral.
Qu’est-ce qui expliquerait la percée d’Ousmane Sonko?
A mon avis, il y a deux choses qui expliquent la percée d’Ousmane Sonko. La première, Ousmane Sonko incarne symboliquement la représentation que la jeunesse se fait du «héros», du «guerrier» de par sa jeunesse, son courage politique et les valeurs qu’il défend, d’intégrité morale et de foi en Dieu, mais aussi en tant que victime d’attaques ciblées et répétées qui ont abouti à sa radiation de la Fonction publique qui, loin de le desservir, a suscité au contraire beaucoup de sympathie auprès de l’opinion publique sénégalaise. La deuxième, c’est la construction continue et progressive de son image par le réajustement de son discours, la diversité de son équipe de gestion formée de gens venant de tous les horizons et de tous bords. Mais le plus déterminant, c’est le soutien passionné de la jeunesse sénégalaise et de la diaspora. Il faut aussi ajouter à cela, la production intellectuelle (Sonko Solutions), ses critiques souvent pointues sur le pétrole, la corruption mais aussi les ripostes des militants et des hiérarques du pouvoir qui ont fini par en faire « l’ennemi politique n°1 ».
TOUT LES PV ONT ETE ADOPTES PAR CONSENSUS PAR TOUTE LA COMMISSION
Serigne Mbaye Thiam, plénipotentiaire du candidat Macky Sall
«Je voudrais d’abord indiquer que nos travaux se sont déroulés dans une bonne ambiance faite de respect et de courtoisie en présence des trois magistrats de la Cour d’appel, de la Commission électorale nationale autonome (Cena), des représentants de tous les candidats, sauf la représentante de la coalition Idy2019.
Elle a assisté au début des travaux, mais pas à nos travaux aujourd’hui. Il y a aussi des observateurs nationaux et internationaux. Tous les procès-verbaux issus des 45 départements nationaux et de 8 circonscriptions électorales étrangères ont été examinés. Ces Pv ont été validés sans contestation. A aucun moment durant nos travaux, les magistrats n’ont eu à se retirer pour délibérer. Tous les Pv ont été adoptés et validés par consensus par toute la commission.
En même temps qu’on examinait les Pv départementaux, on indiquait les candidats qui étaient présents, le nombre de suffrages et toutes les données du Pv sans aucune contestation de quelque candidat que ce soit. Et en même temps aussi, on projetait les résultats par bureau de vote et par département à l’écran. C’est dire que nos travaux se sont déroulés dans d’excellentes conditions et les résultats sont conformes aux procès-verbaux des commissions départementales qui n’ont enregistré aucune contestation de la part des représentants des candidats dans ces commissions départementales.
En tant que représentants du candidat Macky Sall, nous nous réjouissons du score qui traduit la confiance des Sénégalais vis-à-vis du travail qui a été fait. Je fais observer au deuxième tour de 2012, le Président Macky Sall avait été élu avec 1 900 000 électeurs. Aujourd’hui, il est élu par 2 500 000 Sénégalais. Le taux d’augmentation du nombre d’électeurs sur le Président Sall est bien supérieur au taux d’augmentation de la population du Sénégal dans cette période. Ce qui veut dire que c’est une confiance accrue des Sénégalais vis-à-vis du Président Macky Sall.»
Par Abdoulaye THIAM
LES SEPT CLÉS DE MACKY II
Le parrainage, la politique de la chaise vide de l’opposition, le boycott de Me Wade, l’exil de Karim et la condamnation de Khalifa Sall, l’absence du PS et du PDS, l’effet PUDC et transhumance ciblée ont été les facteurs clés de la victoire de Macky SALL
Macky Sall a été réélu, président de la République du Sénégal, pour un nouveau mandat de cinq ans, avec 58,27 % des suffrages valablement exprimés, selon les résultats publiés hier, jeudi 28 février, par le président de la Commission nationale de recensement des votes (CNRV), le juge Demba Kandji. Une victoire contestée par les quatre candidats de l’opposition qui soutiennent que le «candidat sortant a confisqué la volonté du peuple souverain». Mais, au-delà de cette contestation, on peut dire qu’une telle victoire était prévisible au regard de différents faits
Le parrainage, un filtre mortel
Après le désordre électoral noté lors des Législatives du 30 juillet 2017, des joutes «sauvées» par le Conseil Constitutionnel, en violant selon certains le code électoral -qui oblige l’électeur à prendre toutes les listes-, le régime a introduit le parrainage. Un filtre nécessaire contre toute candidature fantaisiste, mais qui s’est avéré mortel pour beaucoup d’entre eux. Sur les 27 candidatures déclarées, seules cinq seront au finish validées.
On croyait alors que la «révolte» des recalés qui ont pour l’essentiel, décidé de soutenir la coalition Idy2019, allait faire mouche. Hélas ! Les Sénégalais en ont décidé autrement.
Mieux, la limitation des candidats à cinq grâce au parrainage, a évité la dispersion des suffrages. Ce qui a permis à Macky Sall de faire le carton plein en remportant 40 départements sur les 45 que compte le pays. Mieux, partout où le candidat de BBY a été battu, il a réussi à terminer à la deuxième place. Sa seule fausse note a été le cas de Mbacké. Visiblement, l’effet escompté avec la candidature de Madické Niang n’a pas porté ses fruits. Ce département «allergique» à la politique de Macky Sall s’est rangé derrière Idrissa Seck et a snobé le candidat MadickéPrésident qui est le seul parmi les cinq candidats à avoir perdu la commune dans laquelle, il a voté.
La politique de la chaise vide de l’opposition
Les différents boycotts de la table des négociations, par des membres de l’opposition, à tort ou à raison, ont ouvert un grand boulevard au régime de Macky Sall. La politique de la chaise vide et les différentes bouderies ont permis à Macky Sall de dérouler seul, pour imposer finalement ses lois que l’opposition a été contrainte de suivre, à défaut d’être déclarée forclose. Particulièrement sur le parrainage et surtout son mode opératoire. La preuve par le nombre de doublons qui ont fini par plomber les ardeurs de certains. Certes, le Chef de l’Etat a eu à faire du forcing dans certains cas, notamment le référendum. Mais, l’absence de dialogue et le dialogue quasi impossible entre les deux camps, a été un facteur aussi déterminant sur l’adoption de certains textes de lois sans discussions.
Le boycott de Me Wade
Abdoulaye Wade, nonobstant son âge, est apparu comme le 6ème candidat de cette Présidentielle. Mais, le refus du Pape du Sopi de donner une consigne de vote a plus favoriser Macky Sall et davantage fragilisé les candidats de l’opposition. Il ne pouvait faire autrement. Obsédé par l’élection de son fils à la Magistrature suprême, Me Wade, dont le candidat a été recalé, gagnerait plus à voir une victoire de Macky Sall que d’envoyer un Ousmane Sonko ou un Idrissa Seck à la Magistrature suprême.
Et pour cause, sauf retournement de situation, Macky Sall briguait son deuxième et dernier mandat. Alors qu’un Sonko ou Idy penserait certainement à se représenter en 2024. Mieux, l’actuel chef d’Etat, avait déjà déclaré qu’il n’était pas opposé à une loi d’amnistie générale. Histoire d’apaiser la tension qui règne dans le pays depuis la condamnation de Karim Wade et l’incarcération de Khalifa Ababacar Sall.
D’ailleurs, c’est dans ce sens qu’il faut comprendre le rétropédalage de Wade qui avait demandé à ses militants et aux jeunes sénégalais de brûler leur carte électeur et les bulletins de vote. Mieux, son surprenant séjour à Conakry où il a eu à rencontrer Alpha Condé cacherait également une telle démarche que Macky Sall serait appelée à effectuer une fois réélu.
Son boycott donc est savamment entretenu d’autant plus qu’il a aussi autorisé à certains de voter contre Macky Sall. Sans toutefois, juger nécessaire de soutenir le candidat qui avait plus de chance de mettre le chef de l’Etat sortant en ballotage : Idrissa Seck.
Résultats des courses : toutes les bastions du PDS sont tombées dans l’escarcelle de Macky Sall. Exceptée Mbacké.
L’exil de Karim et la condamnation de Khalifa Sall
Les absences de Karim Wade, candidat du PDS mais surtout de Khalifa Ababacar Sall ne sont pas non plus négligeables dans la victoire de Macky Sall au Premier tour. L’exemple de Dakar en est une parfaite illustration. Le candidat de BBY est arrivé en tête des suffrages sur les 19 commues d’arrondissement, démontrant que l’appel de l’ancien édile à soutenir Idrissa Seck n’a pas été suivi à la lettre. La transhumance de Moussa Sy aux Parcelles assainies, le refus de Bamba Fall de la Médina, de donner des consignes de vote, les réactions assez timides de Bathlémy Dias, le soutien de Banda Diop à Macky Sall, sont autant de facteurs qui ont fait basculer l’électorat de Takhawou Ndakarou dans l’escarcelle du candidat de Benno Bokk Yaakar.
L’absence du PS et du PDS
En 11 élections présidentielles, c’est la première fois dans l’histoire politique du Sénégal qu’on assiste à une élection sans les deux plus grands partis du pays. Ou du moins, c’est une première que le Parti socialiste (PS) et le Parti démocratique sénégalais (PDS) n’investissent pas un candidat issu de leur propre parti.
Le PDS de Me Wade dont la première participation à une Présidentielle remonte en 1978, a décidé cette année de porter son choix sur un candidat dont il savait inéligible aux yeux de la loi. Au delà de son exil forcé, voulu ou négocié, Karim Meïssa Wade a été victime d’une nouvelle disposition du code électoral qui stipule que «nul ne peut être éligible, s’il n’est électeur». Par conséquent, toutes les déclarations incendiaires consistant à dire que «si Karim n’est pas candidat, il n’y aura pas d’élection au Sénégal», n’étaient pas plus que de la politique politicienne. La suite est sans équivoque.
Quant au PS, en 11 élections, c’est la première fois que le parti fondé par Léopold Sédar Senghor ne désigne un candidat en son sein. Mais, contrairement au PDS qui a porté son choix sur un «mauvais» cheval, les Verts eux, ont décidé de s’arrimer au navire de Benno Bokk Yaakar et d’assister, voire faciliter l’emprisonnement d’un des leurs : Khalifa Sall.
L’effet PUDC
Mais au-delà de tous ces faits, il faut aussi reconnaître que le candidat sortant disposait d’une vision claire avec son Plan Sénégal Emergent (PSE). Un programme mais aussi, un bilan plus ou moins acceptable. Surtout son Programme d’urgence de développement communauté (PUDC) qui a fait des effets, dans le monde rural.
Même si des infrastructures comme Ila Touba, le pont de Farafégny n’ont pas pesé sur l’électorat de Mbacké et de Ziguinchor, force est de reconnaître, dans d’autres villes, villages et hameaux du pays, le programme est très apprécié.
TRANSHUMANCE CIBLEE
Au niveau des ralliements et autres transhumants, Macky Sall a aussi fait un tri, en débauchant des porteurs de voix. Même si certains n’ont donné de satisfécit, comme c’est le cas notamment à Ziguinchor avec le maire Abdoulaye Baldé, d’autres en revanche, ont pesé sur la balance. C’est le cas d’Aïssata Tall Sall à Podor ; Sada Ndiaye à Nguidjilone ; Modou Diagne Fada et Thierno Lô à Darou Mouthty ; Faboly Gaye à Kolda ; Ameth Fall Braya à Saint-Louis ; Moussa Sy aux Parcelles assainies entre autres.
LES SUFFRAGES EXPRIMÉS ET LE NOMBRE DE BULLETINS DANS LES URNES NE SONT PAS LES MÊMES
Cheikh Aliou Bèye, représentant du candidat Ousmane Sonko
«Je vais commencer par vous faire les observations que l’opposition a eu à faire par rapport aux résultats. Au vu des faits réels qui se sont produits lors de cette élection, et de tout ce que nous avons vu, c’est-à-dire la manière dont on a empêché à des citoyens de voter et sur beaucoup d’irrégularités, ce scrutin n’est ni sincère ni transparent. Nous tenions à être là parce que nous ne voulions pas faire la politique de la chaise vide.
Nous sommes là pour éclairer la lanterne des Sénégalais sur la manière dont le scrutin s’est déroulé. Sur tous les Pv qui sont arrivés au niveau du Tribunal, les suffrages exprimés et le nombre de bulletins trouvés dans les urnes ne sont pas les mêmes. C’est révélateur et c’est fondamental. Il faut que les Sénégalais soient au courant de ce qui s’est passé. Pour ce qui concerne les votants hors bureaux, nous sommes tombés dans une situation où les votants hors bureaux à Podor dépassent les 2 717 électeurs.
Il y a des zones où on a dépassé la barre de plus de 100 000 personnes qui n’ont pas pu voter. En Europe du Sud où nous les avons battus, les Pv ne sont pas arrivés. Il y a des Pv qui ne sont même pas intégrés dans les chiffres qu’ils ont donnés. C’est le cas de l’Italie, de la France et de l’Espagne. Dans la région de Matam, on a vu, dans le Kanel et en Gambie, que le nombre de votants dépassent de loin le nombre d’inscrits. Si nous n’étions pas là, nous ne pourrions pas vous le dire.
Il y a des gens qui veulent gérer l’obscurité. L’autre point est relatif aux bureaux de vote où personne n’a signé les Pv. Ici, nous avons traité des dossiers dans des conditions très difficiles. C’est pourquoi ‘’Sonko Président’’ tenait à être là pour montrer à la face du monde que ces résultats ne sont pas fiables.»