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10 septembre 2025
PAR MEDHI BA
QUAND WADE JOUE AVEC LE FEU
Par ses provocations réitérées, Wade espère manifestement pousser les autorités à la faute, en le faisant convoquer par la police - Dans le camp présidentiel, l’on connaît trop le roué nonagénaire pour tomber à pieds joints dans le piège tendu
Appelant à un autodafé du matériel électoral et à un boycott de l’élection, l’ex-président Abdoulaye Wade est bien seul à préconiser la politique de la terre brûlée. Au soir du 24 février, il pourrait s’y brûler les ailes…
Depuis son retour au Sénégal, le 7 février, à quelques jours de la présidentielle, Abdoulaye Wade fait feu de tout bois, manifestant une fascination pour les flammes et les déflagrations que son champ lexical, ouvertement incendiaire, reflète à chaque intervention.
Dans une vidéo enregistrée à son domicile versaillais, en région parisienne, diffusée à la veille de son come-back, l’ex-président sénégalais (2000-2012) pronostiquait ainsi une « explosion » prochaine parmi ses compatriotes, dont il attribuait la responsabilité à son successeur – et ancien Premier ministre – , Macky Sall : « Je voudrais rappeler que le [peuple] sénégalais est un peuple pacifique. Mais il peut être violent… très violent ».
Remède de grand-mère
Et « Gorgui » [« le Vieux », en wolof] de se livrer à de sombres prédictions : « Rappelez-vous ce qui s’est passé en Côte d’Ivoire, avec plus de 3 000 morts ; au Burundi, avec plus de 2000 morts ; en Guinée, avec 150 morts ; au Togo, avec entre 400 et 500 morts ; au Kenya, au Nigeria et en RDC… S’imaginer que ce qui est arrivé ailleurs ne peut pas arriver au Sénégal procède d’une touchante naïveté. »
Pour éviter à son pays l’apocalypse, « Mame Boye » [Grand-Père] prescrivait un remède de grand-mère : rendre impossible « cette élection qui n’est qu’un instrument de confiscation du pouvoir ». Et d’ajouter, avec sagesse, que son mot d’ordre était « pacifique » et que « tout resterait dans les limites de la légalité ».
« Brûlez-les ! »
Le lendemain soir, le décor a changé, de même que le ton. À la permanence nationale du Parti démocratique sénégalais (PDS), à Dakar, Abdoulaye Wade précise son plan d’action : « Vos cartes d’électeurs, c’est de la fraude ! Il faut les brûler et éviter de les utiliser. Brûlez celles de vos familles ! », lance-t-il aux partisans venus l’accueillir. « Les listes électorales qui se trouvent au niveau des bureaux de vote, c’est aussi de la fraude. À partir de samedi, rendez vous dans les bureaux où il y aura des bulletins de vote. Sortez ces bulletins, brûlez-les, afin qu’on organise d’autres élections », ajoute-t-il.
Sa promesse de la veille – paix et légalité – a fait long feu. Pour l’ancien opposant historique devenu président, en l’absence du candidat officiel du PDS à l’élection – son propre fils Karim, dont la candidature a été invalidée par le Conseil constitutionnel – , un seul programme est désormais à l’ordre du jour : l’autodafé électoral.
L’acte III survient quelques jours plus tard, au même endroit, à l’occasion d’un comité directeur du PDS ouvert à la presse. Cette fois, Abdoulaye Wade apporte une précision méthodologique – et juridique : « Nous décidons de nous attaquer aux bureaux de vote pour qu’il n’y ait pas d’élection. Il suffit de prendre un peu d’essence pour brûler la liste des électeurs. Et ce n’est pas un délit. Ce sont des bulletins de fraude, qui participent à un système de fraude. C’est le devoir des citoyens de les détruire. »
Pousser les autorités à la faute
Aussi spectaculaires puissent-ils paraître, les propos du patriarche de la vie politique sénégalaise n’ont, pour l’heure, provoqué aucune étincelle dans le pays. Dans le camp présidentiel, l’on connaît trop le roué nonagénaire pour tomber à pieds joints dans le piège tendu. Par ses provocations réitérées, Abdoulaye Wade espère manifestement pousser les autorités à la faute, en le faisant convoquer par la police, par exemple. Du ministre de l’Intérieur, Aly Ngouille Ndiaye, au porte-parole du gouvernement, Seydou Guèye, les principaux ténors du gouvernement ont donc rappelé posément, au cours des derniers jours, ces deux évidences : l’élection se tiendra comme prévu le 24 février ; l’appel à l’insurrection est puni par la loi.
Plus préoccupant pour Abdoulaye Wade – qui cherche manifestement à ressusciter la période où, opposant emblématique au régime socialiste, il pouvait, d’une phrase, lancer ses troupes à l’assaut du Palais de la République – est ce constat : ni ses alliés de l’opposition ni la société civile ne sont prêts à lui fournir briquet ou allumettes afin de mettre en œuvre son dessein pyromane.
Si aucun d’entre eux ne le formule frontalement, en raison du respect dû à ce personnage qui aura marqué l’histoire politique du pays depuis un demi-siècle, pas plus Idrissa Seck qu’Ousmane Sonko, El Hadji Issa Sall ou Madické Niang n’ont l’intention de boycotter l’élection, encore moins d’appeler leurs sympathisants à brûler le matériel électoral. Quant à Y en a marre et aux grandes organisations de la société civile, leur message est clair : « Ce sont les “vieilleries” du Vieux. Demander aux Sénégalais de brûler leurs cartes parce que son fils n’est pas candidat, il n’y a qu’Abdoulaye Wade pour dire une chose pareille », résume Fadel Barro, de Y en a marre, appelant ses compatriotes à se rendre aux urnes massivement.
Fauteuil vide
Quant aux citoyens actifs sur les réseaux sociaux, ils savourent leur victoire : avoir permis, en quelques tweets insistants, qu’un débat entre les candidats du premier tour – sauf Macky Sall – soient prêts à jouer le jeu du #SunuDébat. Pour eux non plus, pas question de brûler leur carte d’électeur.
Si nul ne sait qui sortira vainqueur du scrutin au soir du premier ou du second tour, il est plus aisé de prédire qui risque de s’y brûler les ailes. En persistant dans la stratégie du fauteuil vide – pour la première fois depuis 1978, le PDS n’a pas de candidat à la présidentielle, et il n’en soutient aucun – et en prônant un boycott incendiaire du scrutin, ce qu’il reste du parti créé par Abdoulaye Wade minimise ses chances de tirer profit de la présidentielle, après sept années de traversée du désert.
LES PATRIOTES ONT MIS LA MAIN A LA POCHE
La logistique occupe une place importante dans une campagne électorale. Pour sillonner le pays, il faut se doter d’un parc automobile suffisant et résistant.
A cela, s’ajoutent les dépenses liées à la restauration et au carburant. Ce qui nécessite des moyens financiers gigantesques. Dans la coalition «Sonko Président», de nombreux militants ont fait preuve d’élan patriotisme et de solidarité en mettant la main à la proche pour contribuer aux dépenses de la campagne.
Qui veut aller loin ménage sa monture, dit l’adage ! En cette période de campagne électorale, les cinq candidats à la présidentielle du 24 février 2019 sillonnent le Sénégal des profondeurs, à travers des routes cabossées et autres pistes de production poussiéreuses. Le parcours n’est pas de tout repos. Pour s’engager dans cette voie, il faut de la logistique. -delà de jouer un rôle important, elle s’avère même déterminante. Dans la coalition «Sonko Président», l’on peut dire que cet aspect a été tardivement pris en compte. Ce qui explique le démarrage poussif et tumultueux de la campagne du candidat Ousmane Sonko.
En effet, au deuxième jour de la campagne, un problème de bus a cloué jusqu’à 17 heures à Dakar les journalistes qui devaient rallier depuis 9 heures le bassin arachidier. Conséquence : la couverture médiatique de cet évènement a été ratée. Durant la première semaine de campagne, certains véhicules du cortège ne pouvaient pas supporter les longues distances. D’où de nombreuses pannes constatées sur certaines voitures, lorsque le leader de Pastef revenait à Dakar pour rencontrer Me Abdoulaye Wade. Le déplacement de l’ancien inspecteur des Impôts et Domaines a été donc une occasion pour les responsables de «Sonko Président» de procéder au renforcement du parc automobile, avant d’engager la seconde phase de la campagne électorale. Cette fois-ci, des véhicules tout terrain, prêts pour l’aventure, sont mobilisés. Pour déployer cette logistique, cela a nécessité des moyens considérables. D’autant qu’il a fallu faire face à des dépenses exorbitantes et mobiliser des dizaines de millions ! Mais selon le chargé du protocole, Djibril Guèye Ndiaye, ces charges ont été allégées grâce aux contributions des patriotes à travers le pays et dans la diaspora.
LES PATRIOTES AU SERVICE DE SONKO PRESIDENT
De l’avis de M. Ndiaye, de nombreux militants ont mis à la disposition de la coalition leurs véhicules et pris en location d’autres véhicules pour participer à la campagne. C’est le cas de ce ressortissant Sénégalais établi à l’étranger et qui préfère rester dans l’anonymat. En plus de son véhicule et de son chauffeur, il en a loué un autre pour les mettre à la disposition de son ami Ousmane Sonko. Malgré ces contributions, les dépenses ne manquent pas. Entre la consommation en carburant de la vingtaine de véhicules du cortège, la location de trois minibus pour la presse et une partie de la délégation, le logement et la nourriture, la note reste très salée. En effet, il faut régulièrement casquer fort. De plus, ajoute le patron du protocole de la coalition «Sonko Président», le parc automobile constitué de 4X4, de et de L200 consomme de l’essence. Même si M. Ndiaye n'est pas en mesure de chiffrer le montant exact des dépenses, un peu d'arithmétique permet d’avoir une certaine idée sur les dépenses consenties en termes de logistique. En effet, Ousmane Sonko et sa coalition vont dépenser environ 30 millions FCFA pendant la campagne électorale entre les dépenses de carburant, la restauration et la location de certains véhicules.
PLUS DE 15 MILLIONS EN CARBURANT
S’agissant de la location des trois minibus, le prix varie entre 100.000 FCFA et 125.000 FCFA par jour. Si l’on retient en moyenne le montant de 100.000 FCFA par minibus, la location d’un bus le temps de la campagne revient à 2,1 millions FCFA. Ce qui fait 6,3 millions FCFA pour les trois minibus. Cependant, c’est dans la consommation de carburant que les dépenses flambent. En effet, de l’avis de Djibril Gueye Ndiaye, les véhicules du cortège consomment entre 1300 1500 litres de carburant toutes les 48 heures. Cela dépend, dit-il, de la distance parcourue, mais aussi de la climatisation des véhicules en cette période de chaleur. En numéraire, cette consommation est évaluée à 800.000 FCFA tous les jours. Ce qui revient à un peu plus de 16 millions FCFA, les dépenses en carburant le temps de la campagne électorale. Une facture qui pouvait, pourtant, être plus salée n’eut été la contribution des patriotes.
DES MAISONS A LA PLACE DES HOTELS
Concernant le camion de sonorisation, seul le carburant est pris en charge par la coalition. Il s’avère en effet que le propriétaire du camion est un responsable du parti et très engagé dans l'organisation. En plus de la sonorisation, il est le premier sur les lieux des meetings et le dernier à lever l’encre puisqu’il participe personnellement à l'installation du podium qui lui appartient également. Dans cet élan de solidarité, les responsables de la coalition dans les différentes régions se sentent également concernés et font tout pour alléger les dépenses en mettant, le plus souvent, des logements à la disposition de la délégation. «En ce qui concerne le logement, les militants patriotes ont voulu accaparer le leader ainsi que sa délégation. C’est pourquoi, c’est eux-mêmes qui trouvent les logements avant l’arrivée du cortège de la coalition .Il s'agit de maisons mises à la disposition de la délégation, le temps d’un séjour dans une localité. Même si toutes les commodités ne sont pas réunies, ils font tout pour que notre séjour soit agréable», indique le patron du protocole qui ne manque pas de s’excuser auprès de certains membres de la délégation, notamment la presse. Car, dit-il, leur souhait était de loger toute la délégation dans des hôtels.
300.000 à 1.000.000 FCFA EN APPUI FINANCIER AUX RESPONSABLES LOCAUX
Quid de la restauration ! Ce sont également les responsables locaux qui sont mis à contribution. N’empêche, les responsables de la coalition n’hésitent pas à mettre la main à la poche pour les appuyer. L’appui financier dépend de la taille qui accueille la délégation. Et le montant varie entre 300.000 et 500.000 FCFA, indique le patron du protocole. Cet appui, ajoute Djibril Gueye Ndiaye, peut aller jusqu’à un million FCFA. Si cet appui financier tourne en moyenne autour de 400.000 FCFA par jour, la coalition aura décaissé pour la restauration 8,4 millions FCFA. En définitive, entre l’approvisionnement en carburant, la location de véhicules et la restauration, le candidat Ousmane Sonko et sa coalition auront dépensé environs 30 millions FCFA.
PAR BABACAR DIOP BUUBA
DES ÉVOLUTIONS SOCIALISTE ET LIBERALE À L’ÉMERGENCE
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - Il faut un changement de modèle économique en supprimant les rentes, encourager la créativité, faciliter les échanges et développer le marché endogène
#Enjeux2019 - En 2018, notre association la PAALAE (Association Panafricaine pour l’Alphabétisation et la Formation des Adultes) a consacré sa semaine annuelle pour la Formation et la Solidarité à l’Education à l’économie. Ce fut un prétexte pour présenter par vision conférence, streaming en version bilingue (français - wolof) à nos partenaires, membres, sympathisants, jeunes et adultes : « Les fondements économiques et culturels d’un Etat Fédéral d’Afrique Noire « du grand intellectuel Cheikh Anta Diop. La traduction en wolof ayant été réalisée par son frère, Mustafaa Jóob, sous le titre : » Yi laltaay koom koom ak aada yi, ci Yaatal dunub Afrik gu ňuul »
- Du fédéralisme au nationalisme -
Nous avons tenu à mettre à la disposition du traducteur un autre texte sur l’élaboration du budget national produit par son ami, le doyen Aall Kane, un des premiers militants et dirigeants du Parti Africain pour l’Indépendance (PAI) et expert dans les domaines fonciers et fiscaux. L’objectif visé était de permettre d’échanger à la fois sur les questions théoriques et pratiques en matière d’économie politique.
Rappelons au passage les articulations du texte de C. A. Diop, il y a une introduction, le premier chapitre de la première partie est consacré à l’origine et l’histoire du monde noir, le deuxième à l’unité linguistique, le troisième à l’unité politique, le quatrième à la situation privilégiée de l’Afrique Occidentale, le chapitre V à la nouvelle stratégie, le chapitre VI au bicaméralisme.
La 2e partie à l’industrialisation de l’Afrique noire en tenant compte des ressources agricoles, minières, énergétiques, aux particularités des sous régions sans oublier les défis nouveaux (reboisement, infrastructures, transports, formation des cadres, des fonds d’investissements, de la recherche scientifique, pôles d’excellence). L’ouvrage se termine par des conclusions pratiques (sur les plans culturels, politiques et institutionnels, socio-économiques, sanitaires, éducationnels, etc. A travers ce programme on sent les idées, forces de l’intellectuel et de l’homme politique systématisées suite à son parcours au sein des Etudiants du Rassemblement Démocratique Africain (RDA).
On sait ce qu’il est advenu des projets fédéraux en Afrique dans les années 50 et 60
L’auteur n’a jamais renoncé à ses idées, même s’il s’est rabattu, en fin de compte, jusqu’à sa disparition physique (1986) plus dans son engagement dans le Rassemblement National Démocratique.
A la fin de l’exercice auquel ont participé des camarades africains et altermondialistes (surtout italiens) nous avions émis le souhait que ce type d’exercice soit fait sur l’œuvre de K. Nkrumah et sur l’agenda 2063 de l’Union Africaine, car nous sommes conscients que le grand défi auquel les intellectuels africains sont confrontés est d’assurer le dialogue fécond avec les populations africaines dans leurs langues : comme nous l’avions souligné dans un de nos texte : « les programmes éducationnelsau niveau du secteur formel comme non formel », les questions de l’unité nationale et africaine doivent trouver une place de choix (B. Diop, Propos d’un Africain sur l’antiquité, 2014, p. 325).
Cheikh Anta Diop a inspiré des générations d’intellectuels. Ainsi l’Association des Chercheurs Sénégalais lui a rendu hommage mérité en publiant le Forum qu’elle a organisé sur l’intégration africaine. Ainsi le professeur Makhtar Diouf a souligné que : « l’œuvre de Cheikh Anta Diop est un plaidoyer pour l’unité de l’Afrique ». Dans ce domaine, il fait véritablement figure de pionnier dans le monde francophone, le mouvement panafricaniste né dans la diaspora, au début du siècle (le XXe), est resté pour l’essentiel limité à la partie anglophone du continent avec le leader ghanéen Kwame Nkrumah « (cf le chercheur n°1, 1990).
Dans cette contribution remarquable, le Pr Makhtar Diouf revient sur le texte des Fondements et passa en revue les points forts et petites faiblesses qu’il convient de corriger pour avancer. Il est convaincu que C. Anta est un pionnier incontestable : « il a été le premier à poser l’intégration comme condition sine qua non du développement de l’Afrique, … ». Il préconisait de faire une expérience test à partir de l’Afrique de l’Ouest ». (op. cit. p.100). Le Pr Moustapha Kassé dans son ouvrage Intégration et Partenariat en Afrique, de l’UMOA au NEPAD, le plan OMEGA, (édition Silex, Nouvelles du Sud, 2003) souligne que « L’Afrique doit s’unir » pour survivre reprenant ainsi le titre de l’ouvrage du Dr Kwame Nkrumah daté de 1950 » (op. cit. p.14)
Notre camarade Demba Moussa Dembélé a publié en 2015 une « contribution à la déconstruction des théories conventionnelles sur le développement de l’Afrique (Samir Amin, Tendika Nkadawire, Dani Wadede Nabudere, Walter Rodney, Yash Tandon), Paris, Harmattan. Lors de la présentation de l’excellent travail, j’avais exprimé le souhait de plus longs développements sur Samir Amin Egypto-franco-sénégalais qui passe la majeure partie de sa vie au Sénégal et sur ses relations avec les leaders politiques et/ou intellectuels chercheurs avec Léopold Sédar Senghor, Abdoulaye Wade, Amadi Aly Dieng, Abdoulaye Bathily, Makhtar Diouf, Amath Dansokho, Pathé Diagne, René Dumont, etc.
Notre ami Dembus, animateur des Samedis de l’Economie à Dakar, a consacré le volume II des Actes aux articulations épistémologiques socio culturelles, politiques, monétaires, industrielles, avec une prise de compte des ressources naturelles, avec une ouverture sur le reste du monde.
L’occasion a été donnée au Pr Kassé de se prononcer sur « L’émergence : le Sénégal sortira alors de la crise des territoires en leur octroyant des nouvelles vocations et des projets. L’édification projetée, à l’horizon 2017, d’un pays émergent sers une illusion sans une politique industrielle robuste et audacieuse conduite par l’Etat actif et réactif en partenariat avec le secteur privé organiquement associé à sa réalisation et à sa gestion (op. cit. p.40)
- Du local au global -
Un autre grand défi est donc d’écrire les humanités à partir de l’Afrique (Felwin Sarr) et de penser le monde à partir de l’Afrique (Achille Mbembe). Il faut lire « Ecrire l’Afrique », Monde, Philippe Rey, Jimsaan, 2017 ; actes des Ateliers de la Pensée, du 28 au 31 Octobre 2016 à Saint-Louis où l’Institut des Etudes Avancées lancé par le Pr Babacar Fall, a permis le 3 Décembre 2018 au philosophe Djibril Samb de développer le thème « Saint-Louis du Sénégal, lieu d’excellence pour penser l’Afrique et le Monde »
Le groupe Initiative Afrique est d’avis que « pour traiter les grands problèmes qui se posent aux pays africains, en matière de sécurité mais aussi, d’éducation, de santé, d’infrastructures, de transport, etc., l’échelon national est de moins en moins pertinent. C’est encore plus vrai pour le développement d’entreprises locales de transformation comme l’agro-industrie notamment, qui offre les meilleures perspectives de création d’emplois pour la jeunesse. Le niveau régional apparait même comme le seul réaliste pour parvenir à une véritable émergence ».
Il faut un changement de modèle économique en supprimant les rentes, encourager la créativité, faciliter les échanges et développer le marché endogène. Il faut régler les urgences sécuritaires environnementales, culturelles, sociales et éducatives.
Cinq mesures sont préconisées :
simplifier l’architecture de l’intégration ;
développer une vision stratégique endogène et réaliste ;
favoriser une appropriation démocratique de cette stratégie
poursuivre un objectif de justice sociale et de solidarité
assurer la crédibilité de l’institution régionale par trois exigences (qualité des ressources humaines, le leadership des compétences reconnu, marketing des actions menées) (groupe initiative Afrique Intégration ou désintégration, Harmattan, Côte d’Ivoire)
Des intellectuels chercheurs experts et militants africains ont produit un rapport alternatif sur l’Afrique, un rapport produit pour l’Afrique et par l’Afrique (numéro 0 publié en 2018) et ont délimité cinq axes :
l’Afrique dans l’abstraction conceptuelle aux réalités diverses
pensées africaines : d’hier à aujourd’hui ;
pouvoirs et légitimité : quelles articulations alternatives en Afriques ?
Souveraineté transformationnelles et facteurs souhaitables : quelle Afrique en devenir ?
Mesures, indicateurs, indices : Quelles alternatives
L’indice de Mesure du Progrès Africain est à diffuser, à améliorer, à mettre en œuvre.
En attendant au Sénégal, le gouvernement du président Macky en est à la réflexion pour une phase II (améliorée ou rectifiée en articulation avec le Plan Sénégal Emergent (PSE))
A quelques encablures de la présidentielle du 24 février 2019, l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie décèle les tares de l’économie (cf Walf du 5-6 janvier 2019, 13 bis p.5). Des intellectuels et experts continuent de démonter les mécanismes, arnaques et supercheries de la dette et de l’aide (Walf déjà cité).
En attendant, au terme de leur 54e session ordinaire tenue le 22 décembre 2018, la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO a recommandé aux différentes parties prenantes du processus d’institution d’une monnaie unique, à finaliser les études d’impact de ce projet (Soleil du 26 Décembre 2018, p.10)
Le camp présidentiel vient de produire « sa réponse par l’action » éd. Harmattan 2019. Le déficit budgétaire est passé de 6,7 % en 2011 à 3, 7% en 2017, pendant que le budget lui-même est passé de moins 2 300 milliards en 2012 à plus de 3 200 milliards en 2017, soit une hausse de plus de 50% en 5 ans. La croissance est actuellement parmi les plus importants (cf Obs des 19 et 20 janvier 2019).
La plateforme des acteurs non étatiques a produit un rapport d’évaluation citoyenne de la mise en œuvre du plan Sénégal Emergent en novembre 2017. Elle a formulé des recommandations pertinentes :
Au titre de la transformation structurelle de l’économie
Au titre du développement du capital humain
Au titre de la gouvernance
- Qui croire ? -
En tout cas dans le classement de l’Institut de l’Emergence coordonné par Moubarak Lo, le Sénégal occupe le 12e rang sur 45 pays en Afrique en 2016. Il se classe dans la catégorie des pays potentiellement émergents. Notre compatriote expert et politique averti, en bon njaambur njaambur, donc d’une grande finesse, s’est prononcé sur les articulations entre la politique et l’économie. Le bilan du président Diouf, disons-le sur le plan analytique, n’était pas mauvais. Il était même assez bon », l’expert souligne : l’interaction entre bilan, perspectives et le jeu des autres acteurs (cf Walf des 19 et 20 janvier 2019, p.2)
- La piste des Assises Nationales -
Les Assises Nationales (2008-2009) ont eu l’intelligence d’articuler la gouvernance économique et environnementale, le rôle de la diaspora organisée au développement économique, la politique extérieure et l’intégration africaine. Les candidats à l’élection présidentielle devraient se prononcer sur les bilans, tracer des perspectives pour les transitions nécessaires
Pour terminer rappelons que 2018 a été une année de commémoration des évènements de Mai 68, révolution sociale non achevée, dont certains ferments ont été trouvés dans la crise à la tête de l’Etat en 1962 (victoire du socialisme poétique à la senghorienne sur le socialisme autogestionnaire diayiste) et dont les prolongements se sont fait sentir lors des affrontements socio politiques de 1988, un moment du long duel entre Diouf et Wade. 1968, 1988, 2018, certains esprits éclairés soulèvent la fatalité du chiffre 8 dans l’histoire du Sénégal. Doit-on céder à l’irrationnel ou tout simplement reconnaitre que les cycles économiques Kondratiev (en moyenne 58 ans), Juglar (10 ans en moyenne), Kitchen (2 ans en moyenne), peuvent être appliqués au Sénégal ?
Les prochains bilans vont intégrer les bienfaits et/ou méfaits de l’exploitation du gaz, du pétrole du zircon, ressources signalées depuis le premier gouvernement du Sénégal indépendant par le président Dia en 1960. Que de retard et de tournants manqués !
Mohamed Dia expert financier basé aux USA est d’avis que « Le Sénégal n’est pas à l’abri d’une banqueroute financière. Il a jugé le bilan économique des sept ans du régime décevant avec une note de 8 sur 20, mettant en cause l’inachèvement de la première phase du Plan Sénégal Emergent (PSE), conformément à l’engagement du président Macky Sall ». L’expert financier a prédit une rentrée en récession de l’économie durant la période 2019-2024, tout cela dû à un niveau d’endettement à la perception de l’instrumentalisation de la justice. Comme la première phase du PSE n’est pas achevée, la seconde ne viendra pas. Ainsi les investisseurs privés nationaux et étrangers ne viendront pas. Le train express régional (TER), les dépenses somptueuses et même le taux de croissance de 7,11% de croissance dont on nous parle et qui ne va jamais franchir la barre des deux chiffres parce que tout cela résulte des investissements en infrastructures, des milliards que nous avons enterrés. « Et si les investissements ne viennent pas, c’est la chute libre qui va arriver durant période entre 2019 à 2024, la récession va s’installer » (Sud quotidien n°7706 du 28 Janvier 2019, p.2)
De son côté le Premier ministre Mahamed Boun Abdallah Dionne lors de la clôture de la 3e conférence Internationale sur l’Emergence, tenue les 17, 18 et 19 Janvier 2019 à Dakar, a souligné que le référentiel de la politique économique et sociale du Sénégal à l’horizon 2035, articulé autour du PSE sur le moyen et long terme, est bon.
« Nous sommes partis d’une économie reposant sur le secteur primaire pour en faire une économie avancée émergente, mais dans la durabilité ». Il a invité le secteur privé national et international à prendre le relais dans les grands projets structurants » (Sud quotidien du 21 Janvier 2019, p.10)
En tout état de cause, les historiens adeptes de la longue durée savent que l’asynchronisme est un phénomène observable et observé : les rythmes de l’économie, de la politique et de la culture ne sont pas synchrones.
Le Sénégal est-il prêt pour le « bokkisme » (démocratie participative et redistributive) et le tabaxandoo (construire ensemble) ? Si oui, ce sera la voie ouverte pour la solidarité véritable, la paix et le développement durables. Bien entendu, il faudra tenir compte des bilans et recommandations élaborés au sein de la CEDEAO, de l’Union Africaine, des Nations Unies et prêter particulièrement attention aux expériences de triangulation réussies dans les zones frontalières en matière d’industrialisation (ONUDI), d’éducation et de sciences et cultures (UNESCO), de développement social (PNUD), sanitaire (OMS).
Babacar Buuba Diop est universitaire, professeur titulaire de classe exceptionnelle en Histoire ancienne. Ancien médiateur à l’Ucad (1982 à 2016), il a coordonné le travail de la commission Gouvernance sociale des Assises Nationales Politiques, Economiques et Sociales. Il a été également Président de la Fédération de l’Education et de la Recherche (FEDER) et Vice-Président du Conseil International d’Education des Adultes (ICAE).
Tênk ci walaf
Koom koom ci Senegaal
Boolo bokk mbaa jiiroo, ku mën sa moroom daan ?
At mii nu génn, sunu mbootaay biy, yëngatu ci likkale njàngum mag ni ak gu gone yi, sumb na waxtaan ci xam xamu koom koom. Woo nan ci sunuy xarit ak amdi jàmm. Yakk nan tekki bi sunu mbokk Mustafaa Jóob def ci téere bi magam, Seex Anta Joob, bindoon, maanaam : » Yi laltaay koom koom ak aada , yi ci yaatal dunub Afrik gu nuul »
Fexe nan ba tekki keyit yi sunu mag Aala Kan bind ci bidse réew mi, maanaam gafaka réew mi, ni mu bindoo. Jarinoo itam gëstu yu bare yu doomii reew gëstu ci mbiri koom, ňu tudd Mustafaa Kase, Maxtar Juuf, Demba Muusaa Dembele. Reew mi ci Afrik la ne, te reewi Afrik, yi kenn me nula demal boppam. Ni mosa jiite réew xam nan ko, am na lu nu def ngir bana wéet, waaye lu tax yokkute, màgg ak soppi bi nuy woote amagul.
Ci loolu la lawax yi wara tontu, leeral nu nuy likkale, yëkëti gox yi, réew mi, indi seen keem kattan baAfrik siggi, taxaw temm, jëm kanam, faj aajo nit ni. Li am solo moodi mbokk tigi, tabaxandoo reew mi, ci jàmm ak caytu mu baax
Baabakar Jóob Buuba
PAR ABDOU KARIM GUEYE
DE LA POLÉMIQUE SUR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 – La nécessité de consacrer la pratique des opinions « divergentes », c’est-à-dire permettre que la décision rendue par les juges constitutionnels reflète la diversité des opinions peut être convoquée aux débats
#Enjeux2019 - A la lecture de la décision publiée par le conseil constitutionnel, à la suite de plusieurs recours introduits à l’occasion du fameux parrainage, je me suis rendu compte à quel point les modes de fonctionnement d’une telle institution et son approche rédactionnelle sont conservateurs : des considérants qui consacrent une unanimité formelle peu crédible et suspecte. Au-delà du legs colonial et au terme d’une large exploration des pratiques et des législations internationales, un juriste ou un adepte de la science politique qui s’y adonnerait peut conclure qu’il faut changer le système. Mais le mal peut être durable, à moins que les soubresauts politiques et les mouvements sociaux ne poussent les dirigeants à innover, à penser et à élaborer autrement. C’est tout le drame de certaines élites qui recopient un droit très conservateur sans aucune innovation, dans tant de domaines comme ceux relatifs au fonctionnement des conseils constitutionnels, à l’encadrement du processus électoral, etc. Et quand ils copient, ils édulcorent les nouveaux systèmes qu’ils accouchent de leur véritable substance, notamment démocratique. De tels choix posent l’équation des modalités de la transmission du savoir qui font intérioriser « le droit français » sans ouvrir les perspectives d’un enseignement du droit comparé intensif. Ils traduisent une aliénation, si ce n’est une prime à la facilité, de politiques qui n’entendent pas aller aussi loin que certains modèles fondateurs. Il y a aussi le problème de la langue qui fait qu’on ne va pas chercher ailleurs. En fait, le système doit être revu. Il faut des intellectuels à la pensée critique qui lisent encore…
Prenez une décision de la cour suprême des Etats-Unis, laquelle est le pendant du conseil constitutionnel. Elle comporte, entre autres, les deux parties suivantes :
une première partie qui annonce la décision (main opinion) retenue par les juges ; celle-ci détaille les fondements rationnels et les arguments (the rational) de la décision prise à la majorité des juges ;
une deuxième partie qui explique les opinions divergentes (dissident opinions) de juges en « désaccord » sur les conclusions qui sont alors détaillées et explicitées avec des arguments d’une densité intellectuelle remarquable.
Il existe d’autres variantes d’opinions comme les opinions concordantes, plurielles, etc. Cela mérite une autre étude non entamée dans le cadre de cet article.
Au Sénégal, et dans plusieurs pays francophones, la signature apposée au bas de la décision donne l’apparence d’une unanimité. Cela arrange tous les juges y compris ceux contre, se taisent, cèdent, etc. La décision comporte des considérants déclinés à la queue leu leu ; finalement, l’argumentation est sèche, manque de perspective philosophique, de fondements rationnels, de réflexion critique, de leçons juridiques et de perspectives léguées aux générations actuelles et futures. Ce n’est pas le cas de ces décisions mémorables qui ont permis à la cour suprême des Etats-Unis de participer au façonnement de l’évolution de la société américaine en matière de droit des minorités, de ségrégation, d’égalité, de diversité, etc.
- La crainte de réformer : la facilité des arguments -
En réalité, très souvent, on fait semblant de réformer, de transformer quitte à utiliser tous les slogans à la mode. Au vu de ce qui vient de se passer au Sénégal, la nécessité de consacrer la pratique des opinions « divergentes », permettre à ce que la décision rendue par les juges constitutionnels reflète la diversité des opinions peut être convoquée aux débats. C’est vrai, les perspectives d’une telle réforme avait choqué le doyen Vedel comme en atteste ces observations de l’époque : « " [...] À qui voudrait porter malheur au Conseil j'offre deux recettes infaillibles : la première serait de confier au Conseil l'élection de son président [...]. L'autre recette, celle de l'admission des opinions dissidentes, serait encore plus foudroyante. Le premier effet, dans un pays qui n'en a pas la tradition [1], serait de présenter aux citoyens au lieu d'une Cour de justice, un spectacle qui aurait sa place à la télévision entre le "Face à face" et la "Roue de la fortune". Le second serait de nous valoir des décisions et des opinions en forme de longues plaidoiries pour des procès entre membres du Conseil. Le troisième – et non le moindre – serait de priver le Conseil de la patiente élaboration du consensus qui préside à un grand nombre de décisions. Elle serait sacrifiée au désir sportif bien humain – et bien français – de signer en son nom l'exploit du jour [...]. » Cette opinion qui date des années 2000 n’est pas universelle. En somme, ce débat a existé en France, consacrant une réticence à évoluer vers de nouvelles perspectives [2]. Dans un tel univers, la lecture des décisions rendues ne permet pas de cerner ce que les différents juges, « majoritaires » et « minoritaires, ont pensé et pourquoi. Pourtant, rien ne prouve que dans le secret de leurs bureaux ou de leurs « âmes et consciences » qu’il y ait eu une unanimité. Contrairement à ce modèle, à la lecture des décisions de la cour suprême américaine, on constate que celles-ci sont passionnantes, reflètent très souvent des débats de très haute facture qui auront marqué toute une génération de juristes, de politiques et qui ont permis à la société américaine d’être ce qu’elle est aujourd’hui. Dès lors, le modèle sénégalais ou français n’est pas universel. Plusieurs études que nous citons dans cet article démontrent qu’il est même minoritaire dans plusieurs espaces et continents. En outre, on peut relever que si la fonction de ces juges n’impacte pas la société, ceux-ci ne méritent pas le qualificatif de « sages ». En outre, la véritable sagesse commence souvent par l’écoute des différences.
- Avantages et inconvénients d’un nouveau modèle –
Des travaux comme ceux de Rosa Raffaelli[3] ont permis de discuter des avantages et des inconvénients liés à la pratique des opinions divergentes que d’autres appellent « opinions individuelles », « opinions différentes », « opinions séparées », « distinctes », etc. Les arguments pour ou contre un nouveau modèle ne manquent pas :
« pour ses détracteurs, une perte présumée de légitimité à laquelle les partisans de la méthode des opinions dissidentes opposent une plus grande légitimité sociale et citoyenne ainsi qu’une plus grande confiance des justiciables et des citoyens ;
une atteinte à l’indépendance à laquelle pourtant d’autres arguments contraires opposent que la vraie indépendance se trouve dans le courage d’exprimer des opinions divergentes qui poussent tout un chacun à exceller et à affuter ses arguments,
la surenchère médiatique crainte par les détracteurs que certains trouvent utile comme étant l’expression d’une société démocratique, vivante et plurielle et le levier d’une plus grande transparence consistant à informer…
Au total, Laura et Nicolas[4] ont attiré l’attention « …qu’il serait illusoire de croire que la décision de justice est réellement l’expression d’une seule volonté unique. L’unanimité absolue n’existe pas plus chez les magistrats que chez leurs concitoyens. Rationnellement, il est impensable qu’un ensemble de 7 à 9 juges ne connaisse aucune divergence d’opinion ». Evoluer nous semble une nécessité.
Par ailleurs, il arrive souvent que divers intellectuels plaident pour un système qu’ils ont appris à l’université, osant même arguer du caractère universel de ce qui n’est qu’une contingence historique, géographique, nationale, linguistique, coloniale ou autre. Ainsi, une étude comme celle de Rosa RAFFAELLI démontre qu’en Europe, seuls 7 Etats dont la France et la Belgique appliquaient ce système fondé sur le consensus sans que l’on puisse y défendre des opinions individuelles et divergentes des uns et des autres. L’étude recense 25 autres pays où c’était le contraire pour conclure : « On ne peut plus de toute évidence considérer que l’adoption d’opinions individuelles constitue une exception à la règle généralement admise du secret des votes individuels, comme cela était retenu dans ce contexte» et qu’au vu des constats, on ne peut plus se cacher derrière ces arguments traditionnellement relatifs à la culture juridique et aux rôles des conseils constitutionnels selon les pays, des menaces contre le paradigme de la collégialité et de la collaboration comme une nécessité et un contre-argument.
Parfois, la dissidence est plus louable que le silence coupable. De même, la connaissance d’une pluralité de modèles libère, ouvre les yeux et consacre l’humilité. Mais la liberté, comme la démocratie d’ailleurs, est un mouvement qui a besoin de héros, de leaders, comme Mandela, Bamba, Martin Luther King, Gandhi, et dans le cas de la cour suprême des Etats-Unis, de juges comme le brillant John Marshall. On est alors au cœur d’un autre enjeu : l’indépendance de ce genre d’institution. Mais, à cet égard, les textes ne suffisent pas pour rendre une institution ou des juges indépendants. L’indépendance se conquiert, y compris par les juges eux-mêmes, par les penseurs, les citoyens, les créateurs, etc. Si au cours de l’affaire Marbury v. Madison, le Juge, Chief Justice John Marshall de la cour suprême des Etats-Unis n’avait pas pris ses responsabilités et confirmé le principe juridique du contrôle juridictionnel et la capacité de la Cour suprême à limiter le pouvoir du Congrès en déclarant la législation inconstitutionnelle, cette cour ne serait probablement pas ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Ce Juge rappellera que lorsque « les actes » du Congrès sont contraires à la Constitution (a fortiori ceux de l’exécutif), ils ne sont pas des lois et ne s’imposent pas aux tribunaux ; qu’en outre, la responsabilité première du pouvoir judiciaire est de faire respecter la Constitution et que si deux lois entraient en conflit, il incombait au juge de décider quelle loi s'appliquerait en l’espèce. Cette cour a donc arraché son indépendance à l’occasion de certaines affaires… Cela requiert selon Evan Hughes, un ancien juge de cette même cour, d’apprendre à libérer sa pensée, à dire non à ce que d’autres consacrent comme étant vrai et qui ne l’est pas. Mais il faut alors des élites qui ne cherchent pas à s’assujettir à un modèle, ni à assujettir leurs pensées et leurs valeurs, prêtes à apprendre et à raisonner en termes de bonnes et meilleures pratiques.
Au total, selon la recherche[5], « Le système français (qui semble avoir inspiré le Sénégal) consacre un conseil constitutionnel peu indépendant, qui se censure, malgré les réformes introduites et tendant à instaurer une sorte de veto du parlement lors des nominations. » Pour certains chercheurs, « la publication des opinions divergentes et/ou individuelles pourrait accroître la transparence et atténuer toutes ces inquiétudes des gens en général, voire des politiques en particulier. » Au demeurant, certaines instances internationales se sont largement appropriées ce modèle de la diversité des opinions ; c’est ce que consacre l’article 74 paragraphe 2 du règlement de Cour Européenne des Droits de l’Homme en ces termes : « Tout juge qui a pris part à l’examen d’une affaire a le droit de joindre à l’arrêt soit l’exposé de son opinion séparée, concordante ou dissidente, soit une simple déclaration de dissentiment. »
« Tout ce qui est dissimulé est suspect » Le courage de la divergence et de la « dissidence » n’est pas en soi un défaut, contrairement aux arguments des gens autocrates ou peu démocrates. Là où l’élégance démocratique a atteint un certain niveau, la démocratie signifie aussi que la minorité a des droits à l’expression, certes, à formaliser. C’est ce que rappelle Ruth Bader Ginsbing : il n’y a rien de mieux qu’une dissidence affirmée pour amener l’auteur d’une décision majoritaire à affiner, à clarifier » ses arguments, à argumenter… C’est vrai, très souvent, les hauts fonctionnaires et cadres, énarques comme moi, avons été formés autrement et formatés par une idéologie de la distance, à la culture qui veut que « « Le président propose, le Congrès dispose, les Agences imposent ». Et, probablement, cette culture existe au niveau de certains pans de la justice. Dès lors, la réforme peut être difficile… Il y a aussi une autre vérité : il n’y a pas de vraies réformes sans de vrais réformateurs, ni de modernisation sans des gens modernes. Modernisation et modernité, nouveau management public, nouvelle gouvernance, de véritables enjeux souvent occultés !
Abdou Karim Gueye est Inspecteur général d’Etat à la retraite, ancien Directeur de l’Enam. Il a été expert international détaché auprès du Gouvernement Djiboutien, pour aider ce pays à créer une Inspection générale d’Etat, qu’il dirigera par la suite pendant 5 ans (de 2003 à 2008). Secrétaire exécutif du Forum des Inspections générales d’Etat d’Afrique et Institutions assimilées pendant 7 ans, Abdou Karim Gueye est auteur de plusieurs ouvrages et articles sur le management public, les réformes administratives et de l’Etat, la gouvernance publique, entre autres.
[1] Un éternel contre-argument critiqué plus loin…
[2] La transposition des opinions dissidentes en France est-elle souhaitable? " Contre " : le point de vue de deux anciens membres du Conseil constitutionnel. François LUCHAIRE, Georges VEDEL. Cahiers su conseil constitutionnel N° 8 (Dossier : Débat sur les opinions dissidentes). Juillet 2000.
[3] … dans un article intitulé « Opinions divergentes au sein des cours suprêmes des Etats membres, Etude, Pétition, 2012, Direction générale des Politiques internes. Département thématique »
[4] «Les vertus des opinions divergentes. Opportunités de permettre l’expression d’opinions divergentes »,
[5] Constitutional Judicial Behavior: Exploring the Determinants of the Decisions of the French Constitutional Council. Espinosa, Romain. Review of Law & Economics, Volume 13, Issue 2
PAR UMAR NJAAY
LE CENTRE ET LA PÉRIPHÉRIE
Il faudra pour le prochain président, équilibrer les dynamiques territoriales du pays pour que trois circonscriptions électorales ne puissent pas à l’avenir, décider seules, de celui qui en prend les rênes
De mes cours de Relations internationales, j'en ai retenu une théorie, qui m’a beaucoup marqué. Celle marxiste qui parlait de la dépendance ou du centre et la périphérie. La théorie du centre-périphérie est relativement simple à comprendre. En très gros résumé, c’est la théorie, qui peut être appliquée au niveau national ou international des relations, qui explique le sous-développement des périphéries au bénéfice du développement accentué des centres…
Aujourd’hui avec ces élections présidentielles, c’est la théorie du centre et de la périphérie qui permet de comprendre la carte électorale. Une carte essentiellement centrée vers l’ouest du pays qui pendant longtemps a représenté plus de la moitié des électeurs du Sénégal. De 52 %, le pourcentage de l’axe Dakar-Thiès-Diourbel est passé à 47 %. Mais malgré cette diminution de son poids électoral, ces zones restent toujours des « swings states » au sens américain. C'est-à-dire des circonscriptions électorales qui font office de pivots. Donc capables de faire balancer l’issue des élections……
Cette position de pivot de ces zones résulte selon moi de l’échec de la politique d’aménagement territorial du pays depuis les indépendances. Je ne peux pas comprendre que ces zones surtout Dakar, qui a une portion du territoire national , accueille près du tiers de la population sénégalaise….
Il faudra pour le prochain président du Sénégal, équilibrer les dynamiques territoriales du pays pour que trois circonscriptions électorales du pays ne puissent pas à l’avenir, décider seules, de celui va prendre les rênes de ce pays…..
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LA CYBER-SÉCURITÉ, PARENT PAUVRE DE LA POLITIQUE SÉCURITAIRE AFRICAINE
Selon Omar Arouna, seulement 20% des États du continent disposent d'une législation en la matière alors que 3,5 milliards sont perdus chaque année à cause de ce phénomène
Omar Arouna, ancien ambassadeur du Bénin aux États-Unis et directeur général de l'US Africa Cyber-security, analyse les défis économiques , politiques et de souveraineté de la cyber-sécurité en Afrique, sur le plateau d'Africa24.
Si le Tribunal avait suivi les réquisitions du Parquet, Modou Ngom allait passer les 10 années à venir derrière les barreaux. Heureusement pour lui, le Tribunal n’a trouvé aucun motif de condamnation contre sa personne. Il a été tout simplement renvoyé des fins de la poursuite.
Les accusations portées contre Modou Ngom n’ont pas pesé lourd pour entraîner sa condamnation. Pourtant, le Parquet avait requis à son encontre 10 ans de prison ferme. Heureusement, il a bénéficié d’une relaxe. Il comparaissait pour viol sur personne vulnérable sur le plan psychique. Les faits se sont produits à Yeumbeul. Ce jour-là, une dame l’avait aperçu en train d’entraîner la victime dans un bâtiment en construction. Mais comme elle sait que cette femme mariée ne jouit pas de toutes ses facultés mentales, elle l’a interpellée pour savoir où elle allait. Mais la victime l’a envoyée se promener en lui faisant savoir que ce ne sont pas ses ognons. C’est ainsi que le témoin a demandé aux tailleurs qui travaillent dans les alentours de venir à sa rescousse. Quand ils sont venus après quelques instants dans le bâtiment, ils ont trouvé la victime dans une mauvaise posture. Mais le jeune garçon était introuvable. Ils ont fouillé le bâtiment sans succès. C’est au moment où ils s’apprêtaient à repartir que le mis en cause est sorti du bâtiment avec un air innocent. Mais il sera vite démasqué par la dame qui l’avait vu conduire la victime dans l’immeuble. Selon les déclarations de ce témoin, il portait un chapeau rouge. Interpellé par un des tailleurs, il a nié les faits. Mais il sera trahi par les traces de sperme. Quant à la femme, elle a reconnu avoir eu une conjonction sexuelle avec Modou Ngom avec son consentement. Elle avouait qu’elle n’était pas à son coup d’essai. Elle se donnait souvent un rendez-vous avec ce mécanicien pour une partie de sexe. Le mari de la femme qui était à la barre a révélé qu’il a eu 5 enfants avec cette dernière. Mais depuis qu’elle a commencé à présenter des signes de démence, il a n’a plus entretenu avec elle des rapports sexuels. Et cela remonte à 2003, soutient-il, à la barre avant de fondre en larmes. Devant la barre, Modou Ngom a tout botté en touche. Il dit être interpellé par les policiers dans son garage alors qu’il était dans un véhicule. Il nie avec la dernière énergie avoir entretenu des rapports sexuels avec la victime. Le Parquet qui est convaincu de culpabilité a requis 10 ans ferme. Des arguments rejetés par l’avocat de la défense. «La victime n’a pas été pénétrée, ni par violence ni par surprise», dit l’avocat. Selon la robe noire, le témoin n’a pas vu son client en plein acte. Il ne l’a croisé que dans le bâtiment. Il n’a fait que raconter ce qui lui a été raconté, ajoute-t-il, en plaidant sa relaxe. Il a été suivi par le Tribunal qui a renvoyé le jeune mécanicien des fins de la poursuite.
MARIÈME FAYE SALL S'Y MET
Lancement d’un mouvement pour la réélection de Macky Sall
Pour réélire le Président Macky Sall dès le premier tour, la Première dame mobilise ses troupes. Elle a officiellement lancé son mouvement dénommé «Marième et les réalisations de Macky pour mon avenir» (Marième Rema), sous la présidence de l’épouse du ministre de l’Intérieur, Ndèye Wilane Ndiaye.
Selon cette dernière, l’objectif est de se déployer dans le Sénégal des profondeurs à la quête des suffrages au profit du candidat de la majorité car, estime-t-elle, la réélection du candidat Macky Sall nécessite un «travail stratégique».
C’est pourquoi elle a exhorté tous les membres du mouvement à «rendre visible le bilan du septennat du Président Macky Sall». La présidente d’honneur de Marième Rema souligne que Macky Sall est «le meilleur candidat».
«C’est à nous de pousser les Sénégalais à faire un bon choix le 24 février prochain», a dit Mme Ndiaye. Pour cela, le mouvement compte se déployer, après l’étape de Thiès, dans les autres régions avec toujours en bandoulière les «réalisations phare» du Président Sall pour convaincre les citoyens.
Dans ce cadre, une présentation de ses réalisations a été faite devant un public venu des 14 régions du Sénégal à l’auditorium de l’Université de Thiès. Il s’agit notamment du Train express régional (Ter), de l’autoroute Ila Touba, de l’Aéroport international Blaise Diagne (Aibd), de l’autoroute Thiès-Dakar, des sphères ministérielles de Diamniadio, entre autres
PAR BOCAR SAKHO
WADE, EX MENEUR DE JEU
Aujourd’hui, Abdoulaye Wade est une pâle caricature du fringant et controversé opposant qu’il fut, celle d’un provocateur relativement inspiré, d’un démocrate engagé et d’un ex-président attaché aux valeurs républicaines
C’est un euphémisme : Me Abdoulaye Wade a eu un impact exceptionnel sur l’histoire de son pays. A 95 ans, il porte les habits de personnage adulé, mais son discours porte-t-il encore auprès de ses sympathisants, qui l’ont salué dans la rue après son retour ?
Dans une autre vie, il aurait été suivi par une foule déchaînée et acquise à sa cause. Cela a créé la «jeunesse malsaine», houspillée par Diouf en‘‘88’’. Celle-là même, qui remplissait le Parc à Mazout, le Boulevard du centenaire, pour chahuter le régime socialise.
Me Wade était le parrain de toute cette jeunesse désabusée, victime d’années blanche (88) ou invalide (93), de diplômés chômeurs. En 2019, Me Abdoulaye Wade a voulu dupliquer ces méthodes éculées pour contester le déroulement de la Présidentielle. La nouvelle fait d’autant plus de bruit qu’il n’est pas candidat à la présidence de la République. Seulement voilà : Il a voulu renouer avec la nature des liens du passé détruits par la modernité et l’évolution de notre système démocratique. Il a oublié que la foi aux grandes espérances politiques, qui enflammait les contestations publiques de l’époque, est révolue.
Portée par un autre contexte, cette «insurrection des consciences», qui appelait chacun à «faire sa part» de son temps dans la rue, a été «neutralisée» par deux alternances exemplaires. Qui montrent la vitalité de la démocratie sénégalaise, qui se nourrit souvent de peurs instillées par la classe politique.
En vérité, l’attitude du personnage et le contenu de son discours reflètent et révèlent un combat personnel : désabusé parla défaite de 2012, rétif au rationalisme politique actuel, Me Wade livre son baroud d’honneur tout en sachant qu’une autre voie est aménagée. Il faut l’admettre définitivement : Aujourd’hui, Me Wade est une pâle caricature du fringant et controversé opposant qu’il fut, celle d’un provocateur relativement inspiré, d’un démocrate engagé et d’un ex-président attaché aux valeurs républicaines.
ENTREZ DANS L'HISTOIRE !
Après deux finales perdues, les Lionceaux U20 jouent une 3e finale d’affilée de Can ce dimanche contre le Mali. Une occasion pour les «Dabo Boys» d’entrer dans l’histoire en remportant le premier trophée continental pour le foot sénégalais
Et si l’année 2019 était la bonne pour l’Equipe nationale U20 ? En tout cas, cette finale de Can - la 3e d’affilée pour les Lionceaux - de ce dimanche contre le Mali est lourd d’enjeu, car en cas de succès, les gamins de Youssouph Dabo vont entrer dans l’histoire du football sénégalais qui n’a jusqu’ici pas encore remporté de trophée continental au niveau de ses différentes catégories. Côté sénégalais, au niveau des stats, il n’y a pas photo. L’Equipe nationale U20 a fait un parcours sans faute dans cette Can avec 4 victoires en 4 matchs, 10 buts marqués, un seul encaissé, meilleure attaque, meilleure défense.
cDabo : «Ce sera un autre math»
Le sélectionneur Youssouph Daborefuse de s’enflammer. Selon le technicien, le match contre le Mali «sera différent parce que c’est une finale. Ce sera un autre match». «Nous les avions battus au premier match, mais j’avais dit que c’est une équipe qui ira loin dans cette compétition parce que je les ai vus jouer. Je connais la qualité de cette équipe. Ce sera une finale très difficile, une finale n’est jamais facile. Mais nous, on se prépare de notre côte. Ce qui est important, c’est ce que nous allons proposer. Maintenant, si les conséquences de notre travail nous amènent à remporter un titre, ce sera avec fierté et honneur.»
A l’image du Sénégal, le Mali n’a jamais remporté une Can U20. Par contre, les cadets maliens ont deux fois de suite brandi le trophée continental chez les U17 en 2015 et 2017. Et ce sont ces mêmes cadets maliens qui sont donc devenus de solides juniors. Comme quoi, la tâche ne sera pas facile pour les Lionceaux, surtout si on sait que ce sont les Maliens qui ont sorti le Nigeria qui était considéré comme l’un des grands favoris de cette Can. Comme pour dire que tous les ingrédients sont réunis ce dimanche à Niamey pour une finale de feu.