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27 juillet 2025
EN FRANCE, REPRISE DES CONTRÔLES AU FACIÈS
Derrière les contrôles anti-migrants des 18 et 19 juin dans les gares se cache une stratégie politique assumée. Jeune Afrique épingle Bruno Retailleau qui "surjoue l'ordre sans la morale" au mépris de la légalité et des principes d'égalité
(SenePlus) - Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a orchestré une vaste opération de contrôles d'identité dans les gares françaises les 18 et 19 juin, déployant 4 000 policiers pour interpeller des "clandestins". Une initiative que dénonce fermement le journaliste Mathieu Olivier dans un éditorial de Jeune Afrique, qualifiant ces contrôles de "manifestement illégaux" et pointant du doigt leur caractère discriminatoire.
Dès le mardi 17 juin, des affiches d'alerte avaient fleuri aux abords de la gare du Nord à Paris : "Attention ! Risque de rafle de personnes sans papiers. Prenez les transports le moins possible", rapporte Mathieu Olivier. Le journaliste s'interroge avec ironie : "Car qui d'autre que des individus d'origine majoritairement maghrébine et subsaharienne auront été les cibles de la dernière initiative du ministre français de l'Intérieur ?"
L'utilisation du terme "rafle" par les observateurs n'est pas anodine. Selon Mathieu Olivier, ce mot "renvoie aux pires heures de l'histoire de la police française, à une époque pas si lointaine que certains voudraient réhabiliter". Le journaliste estime que ce vocabulaire n'est pas "galvaudé" au vu des méthodes employées.
La critique porte sur les critères de sélection lors de ces contrôles. "Un Blanc avait-il autant de chances qu'un Noir de se voir exiger la présentation de ses papiers ? Évidemment non", tranche l'éditorialiste de JA. Il dénonce ainsi "la rupture de l'égalité – en l'occurrence celle des 'chances' d'être contrôlé par la police" dans un pays où l'égalité figure pourtant "au fronton des mairies au côté de la liberté et de la fraternité".
Ces contrôles au faciès violent pourtant la législation française. Mathieu Olivier rappelle qu'un contrôle d'identité est considéré comme discriminatoire dès lors qu'il est "réalisé selon des critères liés à des caractéristiques physiques associées à une origine réelle ou supposée, sans aucune justification objective préalable", selon un arrêt de la Cour de cassation de 2016. Le Conseil constitutionnel a également précisé le 24 janvier 2017 que "la mise en œuvre des contrôles doit s'opérer en se fondant exclusivement sur des critères excluant toute discrimination".
Bruno Retailleau semble faire fi de ces garde-fous juridiques, lui qui "affirmait en 2024 que l'État de droit n'était 'ni intangible ni sacré'", selon le journaliste de Jeune Afrique. L'éditorialiste brosse le portrait d'un ministre "tout-puissant" qui "profite de la faiblesse du Premier ministre François Bayrou et des conséquences de la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron en 2024".
Une stratégie politique assumée
Mathieu Olivier analyse cette opération comme une manœuvre électoraliste en vue de la présidentielle de 2027. Il présente Bruno Retailleau comme "l'ancien numéro deux du Puy-du-Fou – ce parc à thèmes développé avec Philippe de Villiers et dont les deux hommes ont fait un symbole d'une culture française blanche et chrétienne fantasmée" qui "surjoue l'ordre sans la morale".
Le ministre justifie son action par un objectif "dissuasif", dans un contexte où "les tentatives de départ [de migrants] vers le Royaume-Uni depuis les côtes françaises sont en forte progression depuis le début de l'année". Mais pour l'éditorialiste, cette rhétorique mélange tout : "Sans-papiers installés en France, réfugiés de guerre, migrants économiques… Tout se confond dans l'amalgame de cette croisade."
Cette stratégie n'est pas nouvelle dans le paysage politique français. Mathieu Olivier établit un parallèle avec Nicolas Sarkozy qui "fit de la fermeture du centre de Sangatte en 2000 un tremplin". Il accuse le "patron des Républicains" de vouloir "utiliser les réfugiés des côtes de la Manche et de la mer du Nord comme des marchepieds".
L'éditorialiste rappelle que ces réfugiés sont "à l'heure actuelle, en grande majorité syriens, afghans, ou iraniens" et que la France, "signataire de la convention de 1951 relative au statut des réfugiés, a adhéré au principe de non refoulement, selon lequel un individu ne devrait pas être renvoyé dans un pays où sa vie ou sa liberté sont gravement menacées".
Mathieu Olivier dresse un bilan sévère de cette opération, qu'il qualifie de "dévastatrice". D'abord "individuellement, pour ces milliers de personnes contrôlées les 18 et 19 juin au nom d'un amalgame illégal et immoral entre leur couleur de peau, leur origine supposée et une présumée absence de papiers". Ensuite "collectivement pour un pays, la France, qui mériterait mieux qu'une classe politique faisant la promotion de la suspicion au détriment du vivre ensemble".
Que cette opération soit un "vaste coup de communication politique" ou une véritable politique migratoire, l'éditorialiste de Jeune Afrique y voit les prémices d'une campagne présidentielle qui "s'annonce des plus nauséabondes", sur le modèle de celle "d'Éric Zemmour en 2022".
MARCHÉ D’ARMEMENT DE 45,3 MILLIARDS FCFA : UN CONTRAT SOUS MACKY SALL AU CŒUR D’UNE ENQUÊTE JUDICIAIRE
Le procureur Alioune Abdoulaye Sylla a saisi la Division des investigations criminelles (DIC) afin de faire la lumière sur les conditions d’attribution de ce marché, entaché de soupçons de détournement de deniers publics et de blanchiment de capitaux.
Un contrat d’armement d’un montant de 45,3 milliards de FCFA, conclu sous la présidence de Macky Sall, fait désormais l’objet d’une enquête ouverte par le parquet financier. Le procureur Alioune Abdoulaye Sylla a saisi la Division des investigations criminelles (DIC) afin de faire la lumière sur les conditions d’attribution de ce marché, entaché de soupçons de détournement de deniers publics et de blanchiment de capitaux.
Ce marché, attribué le 30 décembre 2021 à la société Lavie Commercial Brokers-SUARL, avait déjà suscité de vives polémiques en raison des nombreuses zones d’ombre entourant le prestataire et les modalités d’exécution. Selon le quotidien Libération, un audit a relevé des anomalies sur la qualité et la quantité du matériel livré. Plus grave encore, un rapport de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) transmis au parquet met en évidence des irrégularités majeures.
Lavie Commercial Brokers-SUARL, créée à Dakar six semaines avant la signature du contrat, était représentée par David Benzaquen, proche de l’ex-marchand d’armes israélien Gaby Peretz. Le numéro de téléphone de la société renvoyait à un courtier nigérien controversé, Aboubacar Hima, alias « Petit Boubé », déjà cité dans d’autres affaires sensibles.
D’après la Centif, « Petit Boubé » avait également ouvert au Sénégal des comptes au nom de ses sociétés Technologie Service International (TSI) et Eurocockpit. Ces entités ont enregistré des mouvements financiers suspects : plus de 3 milliards de FCFA ont transité avant d’être transférés à l’étranger sous diverses formes. Le rapport évoque aussi des retraits en espèces non justifiés : en février 2023, près de 420 millions de FCFA ont été retirés par des individus identifiés, sans explication fournie.
Autre fait troublant : l’avance de 34 milliards de FCFA versée à Lavie Commercial Brokers-SUARL avant l’exécution du marché. Pour la Centif, ce flux massif de liquidités et les opérations suspectes observées pourraient dissimuler un système de pots-de-vin.
L’enquête de la DIC devra établir les responsabilités dans ce dossier qui met à nu les dérives potentielles dans la passation des marchés sensibles sous le couvert du secret défense.
KHAR MBAYE MADIAGA IRRADIE LE CENTRE-VILLE
Baptisé du nom de la grande cantatrice Khar Mbaye Madiaga, l’édifice, implanté au cœur de la ville, se veut un catalyseur de la production artistique et culturelle pour faire rayonner la ville, à l’image de la grande voix dont elle porte le nom.
La Maison des arts et de la culture de Rufisque, fruit de la coopération avec Nantes, a été inaugurée mercredi. Baptisé du nom de la grande cantatrice Khar Mbaye Madiaga, l’édifice, implanté au cœur de la ville, se veut un catalyseur de la production artistique et culturelle pour faire rayonner la ville, à l’image de la grande voix dont elle porte le nom.
A l’intersection Maurice Guèye (Bld)-Anta Madjigène Ndiaye/Anna Kingsley (rue), trône fièrement Khar Mbaye Madiaga, la majestueuse. L’imposant bâtiment faisant figure de Maison des arts et de la culture de Rufisque, baptisé du nom de la grande diva de la musique sénégalaise, a été inauguré mercredi avec faste. Erigée sur 4 niveaux et peinte en ocre avec des fresques bigarrées sorties de l’imagination fertile des peintres rufisquois Baba Anna Ndoye et Pape Mendez Niang, l’infrastructure dispose d’une salle de spectacle d’une capacité de 300 places, de deux salles pour la production et la pratique artistique, d’une bibliothèque, d’un espace de vernissage, ainsi que de 8 chambres de résidence. En tout, selon le service de communication de la mairie, il s’agit d’offrir à travers l’infrastructure, un nid d’éclosion aux arts visuels, à la musique, au patrimoine, aux arts plastiques, à l’artisanat et autres pour le développement de la culture dans la ville. Cette bâtisse a été réalisée dans le cadre du partenariat entre Rufisque et Nantes. «En décidant d’attribuer votre nom à cette belle maison qui parle à l’avenir avec des mots du passé, le Conseil municipal de la Ville de Rufisque pose un acte fort et juste pour rendre un hommage bien mérité à une dame d’exception qui a merveilleusement contribué au rayonnement de notre cité», a dit le maire Oumar Cissé, dans son allocution, lors de la cérémonie officielle. Une délégation nantaise, avec le Conseiller municipal Alassane Guissé, a participé à la cérémonie. «Par ce geste, les Rufisquois tiennent à ce que votre nom et votre voix au timbre d’or, véhicule de nos traditions de paix, de dialogue et d’interculturalité, continuent, pour l’éternité, à retentir aux oreilles des générations actuelles et futures», a poursuivi l’édile de la ville.
Une voix ! Pas que. Khar Mbaye Madiaga, de son nom à l’état civil Fatou Mbaye, a émerveillé aussi de par sa prestance scénique, la profondeur des thèmes abordés, l’accoutrement… «La beauté physique de Khar Mbaye est un message qui parle», a noté Pr Mbaye Thiam, évoquant le port vestimentaire de la cantatrice avec le foulard négligemment mis sur la tête, le tatouage à la bouche. «Elle est une gardienne des traditions et du patrimoine», dit-il, relevant que les chants de Khar Mbaye pénètrent «spirituellement et artistiquement». Il a encore loué sa fidélité, notamment son amour pour Serigne Babacar Sy et la Tijaniya en général. Pr Mamadou Diouf, vivant dans le même quartier que Khar Mbaye (Fass, dans la commune de Rufisque-Nord), est revenu sur quelques titres mythiques de la cantatrice, notamment Aya bimbang, Kaaro Yalla, pour renseigner sur l’ancrage et l’engagement de Madiaga à promouvoir les bonnes valeurs. Un répertoire riche et varié qui doit, selon lui, faire l’objet d’une attention particulière. C’est à cette dame née en 1938, pensionnaire de la Compagnie du Théâtre national Daniel Sorano à partir de 1964 et membre de l’Ensemble lyrique traditionnel du Sénégal entre 1970 et 1980, que la ville rend un hommage anthume à travers la Maison des arts et de la culture de Rufisque, située en face de la Route nationale
PAR Alioune Dione
L’ÉTAT-SYSTÈME TOUJOURS EN MARCHE
Depuis un an et deux mois, le Sénégal est devenu un État petit manège dirigé par des meneurs qui s’amusent avec la destinée de toute une nation. Plus on avance, plus l’incrédulité s’installe sur les principes de rectitude jadis promis
L’État-système décrié par le peuple sénégalais reste toujours en marche tant sur le plan des idées que sur le plan des actions et réactions. N’est-il pas un nouveau système qui se reconfigure sous la carapace d’un antisystème improductif et contraint à subir la réalité du pouvoir ? L’interrogation n’attend point de réponses car les mécanismes de gouvernance l’étayent avec clarté.
Depuis un an et deux mois, le Sénégal est devenu un État petit manège dirigé par des meneurs qui s’amusent avec la destinée de toute une nation. Plus on avance, plus l’incrédulité s’installe sur les principes de rectitude jadis promis et défendus. Depuis son avènement au pouvoir, le gouvernement s’inscrit dans une politique de dénonciation des actions de son prédécesseur sans réelle proposition de solutions. Une pratique connue de tous pour gagner du temps, mais elle ne peut continuer éternellement à masquer les insuffisances que traîne le gouvernement et l’opacité de sa gestion. Autant par les mots que les actes, ce nouveau gouvernement dit antisystème peine réellement à conduire la barque dans la bonne direction. Ces leaders dont la politique adoptée reste close et statique, incapables de s’ouvrir aux mouvements mondains, manquent réellement de vision pratique et pragmatique pour impulser le progrès. L’État, dans son hibernation pseudo-africaniste, décline ses intentions sans pour autant avoir un fil conducteur clair dans sa politique nationale et internationale.
L’espace de débats réservé au mouvement libre, au désordre créateur et aux contestations génératrices se réduit aux querelles de bornes fontaines. Notre vision sociale semble n’avoir qu’une seule dimension, celle de la conformité car toute dissidence est vue comme une souillure aux « porojet ». Mot que la nation entière sait prononcer mais nul n’en trouve jusque-là son sens pratique pour impulser le développement. La posture de nos gouvernants est une posture plutôt d’agents réactionnaires que de planificateurs d’actions. Des réactions infantiles qui montrent, en tout, une stérilité politique de nos gouvernants face aux problématiques publiques. D’ailleurs, le changement de posture sur plusieurs promesses de droiture pose aujourd’hui la question sur les principes de bonne gouvernance tant promis. La réduction du train de vie de l’État semble n’être qu’un conte de fées. En conséquence, pour préserver la face d’une fabrique sociale en faux raccord, le gouvernement, dans sa posture opposante, joue contre le salut national.
La rupture systémique, symbole d’une déconstruction et d’une démystification des pratiques nébuleuses de l’ancien régime, doit céder la place à la reconstruction nationale qui ne peut se faire que par l’action, seule solution face à la lassitude. Le dilatoire et la lenteur dans le chemin de la croissance économique remettent en question le souverainisme prôné qui est marqué par l’isolement et l’hermétisme de nos institutions au niveau international. L’aspiration à la souveraineté est un idéal pour tout peuple, mais elle ne se décline pas en mots, elle se construit dans le temps avec un travail acharné et sans répit, loin de la dépendance économique et des discordances improvisées. Étant vrai que le développement n’est pas exclusivement une résultante du progrès d’ordre matériel, nécessité exige que l’État investisse sur la citoyenneté positive. D’autant plus que toute cette jeunesse à la force et à l’ardeur patriotique avec comme mission centrale l’idolâtrie peut servir autrement à assainir, cultiver, sécuriser et développer le pays. Elle peut être formée, encadrée et financée pour remplir au moins une fonction utile à la nation. Aucune nation ne peut prétendre mener sa politique dans l’autarcie et dans l’acrimonie de ses dirigeants. Diriger requiert de dompter les émotions car un État n’est pas un foyer, puisque chaque décision prise a un impact sur des milliers d’acteurs aux positions et intérêts différents.
DES SÉNÉGALAIS D'AMÉRIQUE INTERPELLENT DAKAR
La section new-yorkaise du parti Jëf Liggëeyal Askan Wi tire la sonnette d'alarme et exige des explications du gouvernement sénégalais après l'inscription du pays sur une liste noire américaine
La section new-yorkaise du parti Jëf Liggëeyal Askan Wi tire la sonnette d'alarme et exige des explications du gouvernement sénégalais après l'inscription du pays sur une liste noire américaine. Dans le communiqué ci-dessous parvenu à notre rédaction, la diaspora dénonce une mesure aux "conséquences diplomatiques et humaines potentiellement graves".
"La Délégation de la Diaspora du Parti JËF LIGGËEYAL ASKAN WI – Section de New York exprime sa profonde inquiétude à la suite de l’annonce selon laquelle le Sénégal a été inscrit sur une liste noire par l’administration américaine. Cette mesure, aux conséquences diplomatiques, sociales et humaines potentiellement graves, porte atteinte à l’image de notre pays et à la dignité de ses ressortissants.
Cette inscription fait peser une menace directe sur les Sénégalais vivant à l’étranger, en particulier aux États-Unis, où une partie importante de la diaspora contribue activement à l’économie nationale par les transferts financiers, l’investissement et la coopération intellectuelle.
Dans cet esprit, la Délégation de New York du Parti JËF LIGGËEYAL ASKAN WI :
1. Exige du gouvernement sénégalais une communication claire, transparente et documentée sur les raisons de cette mesure américaine ;
2. Interpelle les autorités diplomatiques à entamer immédiatement un dialogue formel avec Washington, avec l’objectif de restaurer la confiance et d’initier un plan de sortie rapide ;
3. Réaffirme son engagement total pour un Sénégal respecté, crédible et protecteur de tous ses citoyens, où qu’ils soient.
La diaspora, et particulièrement celle établie aux États-Unis, n’est pas une variable d’ajustement, mais un acteur stratégique du développement national. Elle exige le respect, la transparence et la protection effective de ses droits."
Par Bachir FOFANA
AVEU D’INCOMPETENCE SYSTEMIQUE
Le premier niveau de respect pour un dirigeant, c’est le leadership doublé de compétence et d’éthique, et il mérite respect.Le contraire, c’est l’incompétence qui rime avec arrogance, populisme, démagogie, affabulation, et le corollaire, c’est la défiance
«Allez dire aux hommes politiques qu’ils enlèvent nos noms dans leur business. On a tout compris. Ils nous utilisent comme des chameaux dans des conditions qu’on déplore. Ils nous mènent souvent en bateau vers des destinations qu’on ignore. Ils allument le feu, ils l’activent. Et après, ils viennent jouer aux pompiers. On a tout compris.»
L’auteur de cette belle chanson a été reçu par le Premier ministre Ousmane Sonko, à qui nous sommes tenté de retourner cet opus qui a bercé les Africains au début des années 2000. Oui, Ousmane, on a tout compris après vous avoir lu dans le communiqué du Conseil des ministres de ce 18 juin 2025.
Dans ledit communiqué, le chef du gouvernement, «abordant le second point relatif à la qualité de la représentation des administrations publiques dans les organes délibérants des entités du secteur parapublic, (…) a mis l’accent sur l’importance des fonctions essentielles dans l’offre de services publics de qualité, l’exécution de missions d’intérêt général, la création d’emplois et la régulation dans des domaines prioritaires» d’abord. Ousmane Sonko semble ensuite déplorer «des manquements graves, récurrents et contraires aux règles de transparence et de bonne gouvernance préjudiciables à la qualité du service public dans la gestion de ces structures : la non-tenue des pré-conseils sur des questions stratégiques, l’absence de compte rendu systématique, l’archivage défaillant de la documentation, le non-respect de la durée de validité des mandats des administrateurs et la mauvaise qualité de la représentation due notamment au profil inadéquat de certains administrateurs». Et fort de ce constat, il a enfin «demandé aux ministres de procéder, sans délai, à la régularisation de la composition des organes délibérants, surtout dans le contexte actuel marqué par plusieurs changements institutionnels». Non sans demander d’«apporter un soin particulier au choix de ces représentants dans les organes délibérants, dans le respect des dispositions pertinentes du décret n°2025-670 du 29 avril 2025 fixant les règles de fonctionnement de l’organe délibérant des entités du secteur parapublic».
Désigner des boucs émissaires et ne pas assumer ses responsabilités
Oui, on a tout compris. Car le diagnostic que pose Ousmane Sonko est bien connu des démarches des populistes : c’est désigner des boucs émissaires et ne pas assumer ses responsabilités. C’est une stratégie qui consiste à désigner une personne, un groupe ou une entité comme responsable d’un problème ou d’une situation négative. Procéder ainsi permet de détourner l’attention de la véritable cause du problème, créer un sentiment d’unité contre un ennemi commun désigné souvent à tort et éviter de prendre ses responsabilités.
En effet, Sonko est la traduction expérimentale de la culture de l’irresponsabilité qui caractérise les populistes. Quand il est accusé de viol, c’est un complot ourdi par Macky Sall, le Général Moussa Fall, Antoine Diome et le procureur Serigne Bassirou Guèye. Quand il accuse Mame Mbaye Niang d’avoir détourné 29 milliards du Prodac, on ne doit pas le poursuivre parce qu’il incarne l’espoir de tout un peuple.
Curieusement, Sonko n’est jamais responsable
Avec Sonko, il est le chef de tout. Il valide les nominations, les dépenses d’investissement en dépouillant le ministre en charge des Finances de sa prérogative, les recrutements. La chanson que Talla Sylla avait dédiée au Président Abdoulaye Wade qui conduit la voiture, encaisse les paiements, répare les pneus, pourrait être réadaptée, et elle irait comme un gant à Ousmane Sonko, le Premier ministre «Super Fort».
Nous avons tous entendu le président de la République dire en public qu’il a nommé Mabouba Diagne ministre de l’Agriculture, de l’élevage et de la souveraineté alimentaire sans l’avoir jamais rencontré. Il dira même que la première fois qu’il lui a serré la main, c’était en Conseil des ministres. Mabouba a-t-il été proposé à Diomaye par Sonko ou par un djinn ? Et que dire de Ousmane Diagne ou Jean-Baptiste Tine ? N’est-ce pas Sonko lui-même qui fera part à l’opinion qu’ils sont ministres sur sa proposition ? Notre Premier ministre est capable d’humilier publiquement les hommes qu’il a luimême choisis pour amadouer des voix discordantes et préserver son image.
Mais curieusement, Sonko n’est jamais responsable. Ce n’est jamais de sa faute. Rejeter la faute sur les autres pour préserver son immunité sympathique de la part de ses partisans et préserver le mythe du sauveur construit sur les ruines du mensonge, et faire croire qu’il n’y est pour rien par rapport à la panne économique gigantesque qui touche le pays est l’objectif de ce coup de com’ qu’autre chose. Sonko, c’est peutêtre le seul politicien qui, en échouant, réussit à se présenter comme victime. N’a-t-on pas tous lu sa prose sur Facebook après la publication de la décision du Conseil constitutionnel qui a retaillé sa loi interprétative de la loi d’amnistie de Macky Sall ? Il disait, entre autres : «Je me serais bien gardé de me prononcer sur la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi dite «interprétative», si les résidus d’opposition sénégalaise ne s’étaient pas précipités, dans une tentative désespérée de récupération politicienne, de conclure à un revers juridique du Groupe parlementaire Pastef-Les Patriotes. Il en est tout autrement, car cette décision conforte la démarche et les objectifs poursuivis par la proposition de loi interprétative…»
«Quand Boubou pose, c’est Boubou qui sort»
Il n’est pas responsable de l’échec de la campagne agricole. La situation du Port n’est pas de sa faute, alors qu’il a choisi le chef de la sécurité de Pastef pour en faire le Directeur général du poumon économique du Sénégal. On ne donne pas l’infrastructure de Télédiffusion du Sénégal à une stagiaire qui préfère signer un contrat avec un privé malien plutôt que de faire confiance à l’expertise du Groupe Excaf, opérateur historique du secteur des médias. On ne confie pas la présidence du Conseil d’administration de Sorano à une artiste dont la carrière a été aussi brève qu’un feu de paille. On ne saurait espérer des résultats quand ceux que tu nommes aux postes de Pca n’ont jamais travaillé et ne savent pas lire un bilan comptable, ni des états financiers. «L’incompétence, quand elle devient systémique, interroge d’abord celui qui choisit. Si les représentants dans les organes publics sont si mal formés, si peu efficaces, si peu rigoureux… alors que dire de celui qui les a nommés ou les a maintenus en poste ? Peut-on dénoncer le naufrage sans regarder le capitaine ?», écrit mon ami Thierno Diop, qui ajoute : «La vérité est simple : on ne peut pas vouloir la réforme et pratiquer l’entre-soi. On ne peut pas promettre la compétence et recycler les camarades. On ne peut pas prétendre gouverner autrement… en gouvernant exactement comme avant. Quand on distribue les postes sur des critères d’allégeance et non d’expertise, il ne faut pas s’étonner que la machine se grippe. La rupture ne se décrète pas. Elle s’incarne. Et elle commence par le haut.»
En effet, peut-on pointer la responsabilité des joueurs de football sans interroger les qualités de l’entraîneur, sa philosophie de jeu, le management de son équipe, la gestion de son groupe, ses choix tactiques, entre autres ? De même, quand on confie le volant d’une Mercedes à un conducteur de moto Jakarta, il peut le déplacer dans tous les sens, mais il ne pourrait jamais le conduire à bon port.
Des joueurs de Navétanes qui jouent pour la première fois en Champions League, on ne peut que s’attendre à de tels comportements. «Ce n’est pas une chose de peu d’importance pour un prince que le choix de ses ministres, qui sont bons ou mauvais selon qu’il est plus ou moins sage lui-même. Aussi, quand on veut apprécier sa capacité, c’est d’abord par les personnes qui l’entourent que l’on en juge», disait Machiavel.
En 2018, un «cadre de Pastef» était invité sur l’émission «Remue-ménage» de Rfm pour échanger sur l’idéologie politique. Le bonhomme était incapable de définir la ligne de conduite de sa formation politique, tellement alambiqué dans ses explications que mon ami Abdou Khadre Lô s’est fendu d’un post sur sa page Facebook pour dire : «Si c’est Pastef, il faut vraiment en désespérer.» Pour se justifier, le militant pastéfien se fendit d’un texte sur sa page Facebook soutenant que «l’émission portait sur l’idéologie et la formation des militants dans les partis politiques. Les aléas médiatiques ont fait que je n’ai pas eu le temps d’exposer l’idéologie de Pastef telle que traitée dans ses statuts et le débat que cela pourrait susciter sur les plans scientifique et politique». L’homme est aujourd’hui ministre-conseiller à la présidence de la République. Et il fait partie des «4000 cadres» de Pastef.
J’ai une fois dit à un ami photographe : «Ta prise n’est pas belle.» Sa réponse a été des plus sarcastiques : «Quand Boubou pose, c’est Boubou qui sort.» Le premier niveau de respect pour un dirigeant, c’est le leadership doublé de compétence et d’éthique, et il mérite respect. Le contraire, c’est l’incompétence qui rime avec arrogance, populisme, démagogie, affabulation, et le corollaire, c’est la défiance. Et on a des hommes de détails à la place des hommes d’Etat.
PAR Oumar Ndiaye et Shanhui Zhang
AU-DELÀ DES INFRASTRUCTURES, LES HOMMES ET FEMMES DOIVENT ÊTRE LES PONTS DE LA RELATION SÉNÉGAL-CHINE
EXCLUSIF SENEPLUS - Il faudra pour les nouvelles autorités sénégalaises porteuses d’un nouvel « Agenda de transformation » d’arrimer la coopération chinoise sur leurs préoccupations et priorités pour arriver à leurs objectifs de développement
Oumar Ndiaye et Shanhui Zhang |
Publication 21/06/2025
Les actes sont symboliques et emblématiques de la teneur et profondeur des relations entre le Sénégal et la Chine. Pour sa première visite d’État, le président Sénégalais Bassirou Diomaye Faye a choisi la Chine comme destination, en marge de la 9ème édition du Forum sur la coopération Chine-Afrique (FOCAC), qui s’est tenue en septembre 2024 à Beijing. Son Premier ministre Ousmane Sonko aussi pour sa première sortie hors du continent africain se rendra en Chine du 22 au 27 juin 2025. Ses deux déplacements de ceux qui sont à la tête du Sénégal depuis avril 2024 montrent clairement la place et le poids qu’occupe la Chine dans les partenariats politiques et économiques du Sénégal. Il est à rappeler que depuis 2016, la relation entre le Sénégal et la Chine a été élevée au rang de Partenariat stratégique global, avec une convergence de vues sur la plupart des questions internationales d’intérêt commun et aussi une co-présidence pendant six ans (2018-2024) du FOCAC. Avec un portefeuille de projets très varié allant de la santé, à l’économie en passant par l’hydraulique, la Chine a aidé le Sénégal à avoir cette dernière décennie un tissu infrastructurel et culturel très dense. Le partenariat sénégalo-chinois a été à la base d’importantes réalisations parmi lesquelles le parc industriel de Diamniadio dont la seconde phase est en cours de réalisation, les autoroutes Ila Touba , Thiès-Mbour-AIBD et celle en construction Mbour-Fatick-Kaolack ; la réalisation de plus 251 forages dans le cadre du volet hydraulique de la phase 3 du Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC) ; l’aménagement hydro-électrique de Gouina; l’Arène nationale de lutte ; la réhabilitation du barrage d’Affiniam ; l’équipement de la Brigade Nationale des Sapeurs-Pompiers ; la construction du Pont de Foundiougne Nelson Mandela ; la construction du Grand Théâtre National ; la réalisation de l’Hôpital pour Enfants de Diamniadio ; l’Institut Confucius de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar; les phases I et II du réseau national de l’intranet gouvernemental; le data center de Dakar; le Musée des Civilisations noires; l’acquisition de 406 minibus et de 235 bus en faveur de Dakar-Dem-Dikk ; la rénovation et l’agrandissement du réseau de distribution de l’électricité à Dakar ; la réhabilitation des 11 stades régionaux et du stade LSS.
A ce titre, lors de son voyage en Chine, le sénégalais Bassirou Diomaye Faye et son homologue chinois Xi Jinping ont supervisé la signature de plusieurs accords de partenariat dont l’un porte sur l’assistance technique sur les Jeux Olympiques de la Jeunesse au Sénégal de 2026 avec la rénovation de plusieurs sites sportifs comme le stade Iba Mar Diop, celui de LSS étant déjà terminé. La capitale chinoise Beijing a la particularité d’avoir accueilli les Jeux Olympiques d’été (2008) et ceux d’hiver (2022), d’où son surnom de « double ville olympique ». Une expérience que la Chine va partager avec le Sénégal qui est le premier pays africain à accueillir une compétition d’une telle envergure planétaire. Au-delà des ports, aéroports, routes, stades, forages qui portent aujourd’hui l’empreinte de cette coopération exemplaire, ce sont les hommes et les femmes qui doivent être les ponts de cette relation avec ainsi plus d’investissement dans le capital humain par plus de formations, de partages d’expérience et de connaissance, d’échanges culturels…
Il faudra aussi pour les nouvelles autorités sénégalaises porteuses d’un nouvel « Agenda de transformation » qu’elles veulent implémenter avec leur référentiel d’arrimer la coopération chinoise sur leurs préoccupations et priorités pour arriver à leurs objectifs de développement. A ce titre, la nouvelle réorientation prise par l’économie chinoise peut être une opportunité. La Chine mise aujourd’hui sur de nouveaux secteurs émergents comme le Numérique, le Développement vert, l’Intelligence artificielle, etc pour son développement économique de qualité. Ainsi des convergences peuvent être trouvées surtout le Numérique sur lequel les nouvelles autorités sénégalaises comptent beaucoup avec leur « New Deal technologique » de par une digitalisation des procédures administratives et l’émergence d’une vraie économie numérique. Les infrastructures numériques constituent désormais un pilier essentiel de la modernisation au Sénégal. La Chine a joué un rôle central dans cette transformation digitale, notamment à travers le projet « Sénégal Intelligent », financé et mis en œuvre par des entreprises chinoises. Cette initiative a permis d’optimiser les réseaux haut débit et de dynamiser l’économie numérique.
Un autre exemple marquant est le Centre national de données, inauguré en 2020, qui témoigne de l’expertise chinoise en matière de gestion sécurisée des données publiques. Ces infrastructures soutiennent également des secteurs clés tels que : la santé (déploiement de la e-médecine) et l’éducation (développement de plateformes d’apprentissage en ligne). C’est aussi le cas pour la construction du parc industriel de Diamniadio. Inspiré du modèle des zones économiques spéciales chinoises, le parc industriel de Diamniadio associe capitaux chinois et savoir-faire local. Ce projet a généré des milliers d’emplois et attiré des investissements dans des secteurs stratégiques : transformation agroalimentaire et fabrication de matériaux de construction. En parallèle, des formations techniques dispensées par des experts chinois permettent de préparer une main-d’œuvre qualifiée, répondant aux besoins des industries locales. La coopération est aussi notable dans le domaine des énergies renouvelables. La Chine soutient activement la transition énergétique du Sénégal, notamment à travers des projets solaires. La centrale photovoltaïque de Bokhol, par exemple, fournit une électricité propre à plus de 200, 000 foyers. En 2024, les deux pays ont renforcé leur collaboration avec un partenariat visant à développer des microréseaux solaires dans les zones rurales, intégrant des solutions de stockage d’énergie et de smart grids. La coopération sino-sénégalaise, fondée sur le principe « gagnant-gagnant », illustre parfaitement comment le transfert de savoir-faire et les investissements ciblés peuvent stimuler un développement durable. Alors que le Sénégal aspire à devenir un hub technologique en Afrique de l’Ouest, la Chine demeure un partenaire incontournable pour concrétiser cette ambition.
Oumar Ndiaye est journaliste-chef du Desk International du journal Le Soleil, diplômé de l’Université Renmin of China de Beijing.
Shanhui Zhang est présentatrice–Commentatrice à CGTN Français, chercheuse au Center For China & Globalization.
BAÏDY AGNE, L'HOMME QUI VEUT RÉINVENTER LE CAPITALISME AFRICAIN
Qui est cet homme discret à la tête du patronat africain ? L'ingénieur devenu magnat des affaires, accède à la présidence de Business Africa avec des idées qui bousculent les conventions. Portrait d'un capitaine d'industrie pas comme les autres
(SenePlus) - Ingénieur de formation devenu l'un des patrons les plus influents du continent, Baïdy Agne vient de franchir une étape décisive dans sa carrière. Le président du Conseil national du patronat (CNP) du Sénégal a récemment été désigné à la tête de Business Africa, la principale organisation patronale du continent. Une nomination qui place ce défenseur d'un "capitalisme africain assumé" au cœur des enjeux économiques continentaux.
Basée à Nairobi, Business Africa regroupe 41 organisations nationales représentatives du secteur privé africain et jouit d'une reconnaissance internationale auprès de l'Union africaine, de l'Union européenne, des Nations unies et du G20, rapporte le magazine panafricain. À ce poste stratégique, Baïdy Agne entend "améliorer durablement le climat des affaires sur le continent, favoriser l'intégration financière, accélérer les partenariats publics-privés et promouvoir la paix", tout en inscrivant son mandat "dans les grandes transitions numériques, énergétiques et environnementales".
Le parcours de Baïdy Agne illustre parfaitement la trajectoire d'une élite africaine formée à l'international mais enracinée localement. Diplômé en génie électrique de l'École supérieure d'ingénieurs de Marseille, titulaire d'une maîtrise en sciences physiques de l'Université Pierre-et-Marie-Curie et d'un MBA de l'Université Tulane en Louisiane, il a "commencé sa carrière comme ingénieur avant de gravir les échelons jusqu'à devenir un acteur central du monde patronal africain", selon Jeune Afrique.
Depuis 2003, il préside le CNP du Sénégal, qu'il a profondément transformé. Sous sa direction, cette organisation s'est "professionnalisée, renforçant sa participation au dialogue social et à la concertation économique". L'une de ses innovations marquantes reste la création du label RSE-CNP, qui "pousse les entreprises à intégrer des critères de responsabilité sociale : transparence, formation continue, sécurité au travail, inclusion, impact communautaire", note le magazine.
Cette approche lui a valu de devenir "un interlocuteur incontournable des gouvernements sénégalais successifs", faisant de lui le véritable "Monsieur entreprises" du Sénégal, comme le qualifie Jeune Afrique.
Derrière l'homme public se cache un entrepreneur avisé. Baïdy Agne "dirige ou détient des parts dans plusieurs entreprises sénégalaises : TVS (transport maritime et logistique), I-Cons (BTP et ingénierie), Ndar Energies (services pétroliers), en plus d'activités dans l'immobilier", révèle le portrait. Cette diversification sectorielle nourrit sa vision d'un "capitalisme africain assumé, productif et enraciné, misant sur une préférence nationale intelligente dans les commandes publiques et les marchés stratégiques".
Son engagement dépasse le cadre strictement économique. Président de la Fédération sénégalaise de golf et vice-président du Comité national olympique et sportif sénégalais, il figure parmi "les architectes de l'organisation des Jeux olympiques de la jeunesse 2026 à Dakar, les premiers sur le sol africain". Pour lui, le sport constitue "un puissant vecteur d'influence, de cohésion nationale et de diplomatie économique".
Panafricanisme économique et positions controversées
Baïdy Agne se revendique comme un "panafricaniste économique" qui "place l'intégration économique au cœur de son mandat". Son objectif affiché consiste à "transformer les entreprises africaines en moteurs de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), en facilitant les co-investissements et en renforçant la capacité d'export des PME locales". Comme il aime à le répéter : "Ce qui est bon pour l'entreprise est bon pour l'émergence de l'Afrique."
Cette vision s'accompagne de positions parfois à contre-courant. Contrairement aux discours souverainistes ambiants, il assume son "attachement au franc CFA". "Nous devons être fiers d'avoir une monnaie stable, avec une inflation maîtrisée", déclarait-il récemment selon Jeune Afrique. Sur les relations avec la France, il adopte un ton mesuré : "Au niveau du secteur privé, nous n'avons pas de problème. En revanche, on peut lire une volonté claire des Africains à être un peu plus souverains (...). Donc, peut-être qu'il faut revisiter les relations", confiait-il en 2023.
Lucide sur les défis à venir, le nouveau patron de Business Africa tire la sonnette d'alarme concernant l'impact des nouvelles technologies. Il "estime que plus de 60% des entreprises africaines devront se transformer dans les dix à vingt prochaines années" face à "l'incidence de l'intelligence artificielle, de la robotisation et de la numérisation sur l'emploi".
Pour relever ce défi, il "milite pour une réforme urgente des systèmes éducatifs et une stratégie continentale en matière de numérique, centrée sur l'adaptation des jeunes et des PME", rapporte Jeune Afrique.
Son profil international - il "manie aussi bien le réseautage à Abidjan qu'à Addis-Abeba, Genève ou Dubaï" - et sa capacité à "faire entendre la voix des patrons africains dans les forums multilatéraux (OIT, OCDE, UA, BAD)" constituent des atouts précieux pour porter cette vision transformatrice.
Avec sa nomination à la tête de Business Africa, Baïdy Agne dispose désormais d'une plateforme continentale pour concrétiser sa vision d'un capitalisme africain moderne, intégré et technologiquement avancé. Un défi de taille dans un contexte où l'Afrique doit inventer son propre modèle de développement économique.
Par Alpha Amadou Sy
DE L’IDEOLOGIE SOUS-JACENTE A UNE CERTAINE LECTURE DE LA DEFAITE DES THREE LIONS DEVANT LES LIONS DU SENEGAL
Sans doute, l’espace du jeu et, plus singulièrement, celui du football est l'un des champs où la rationalité a du mal à s’accommoder avec la passion.
Sans doute, l’espace du jeu et, plus singulièrement, celui du football est l'un des champs où la rationalité a du mal à s’accommoder avec la passion.
Des facteurs, aussi complexes que variés, allant de la chance à la forme physique, de l’opportunisme à l’opportunité, du sens de la créativité à la culture tactique, s’imbriquent pour sanctionner un match par un résultat qui, parfois, laisse coi plus d’un expert du ballon rond.
Le cas échéant, se formulent des commentaires qui au-delà de leur apparente banalité, reproduisent dans le monde sportif la hiérarchie des humanités. Dans cette configuration, l’attente des grandes nations du football est de voir leurs adversaires des zones périphériques déployer juste un effort suffisamment généreux pour imprimer à la rencontre cette frayeur qui garantit sa saveur.
Dans ce scenario, l’équipe, venant du Sud, aura crânement joué son rôle en poussant ses résistances jusqu’ aux ultimes minutes avant de subir la correctionnelle. Cette disposition d’esprit, qui n’a sans doute pas intégré ce précieux enseignement du philosophe allemand, Nietzche, selon lequel ce n’est pas le doute mais la certitude qui rend fou, explique la déraison qui prévaut chaque fois qu’une « grande nation du football » se fait avoir par des adversaires de calibre négligeable.
À ce sujet, le Mondial asiatique de 2002 nous offre deux illustrations dignes d’intérêt. La première est ce tsunami qui a frappé le monde du football avec la victoire « d’insignifiants » Lions du Sénégal en match d’ouverture. Cette défaite, aux accents surréalistes, était d’autant plus traumatisante que même les commentateurs les plus sérieux ne donnaient la moindre chance aux « Africains ». Et la certitude de la victoire ne faisait aucun doute car la plupart des joueurs évoluaient dans la ligue française où ils jouaient les seconds rôles. Significative à ce sujet était la situation déplorable du gardien de but sénégalais, Tony Sylva. Il restait désespérément le numéro 2 de l’équipe de Monaco, devant Barthez, le portier des Bleus !
La traumatisante défaite des hommes de Roger Lemerre devant l’équipe entrainée par l’illustre inconnu, le Français Bruno Metsu, avait donné à certains le sentiment qu’une main invisible avait scellé le sort de cette rencontre. Aussi, laissaient-ils entendre que le but de Pape Buuba Diop « était bizarre ». Euphémisme ne saurait être plus explicite pour insinuer l’implication mystique des...marabouts d’Afrique !
La seconde illustration est la défaite « inattendue » de l’Italie, plusieurs fois championne du monde et devant la « faible équipe de la Corée. En plus des récriminations récurrentes sur l’arbitrage, l’acharnement contre Ahn Jung-hwan qui aurait commis le crime d’empêcher Squadra azzurra de franchir le cap des huitièmes de final, a débordé l’anecdotique pour renseigner sur toute l’incongruence du jugement ethnocentriste. N’y allant pas avec le dos de la cuiller, le président l’AC Perugia dont il était sociétaire écrira sans coup férir : « Je n’ai pas l’intention de payer le salaire de quelqu’un qui a ruiné le football italien… Quand il est arrivé, c’était une brebis égarée qui n’avait même pas de quoi se payer un sandwich, il est devenu riche sans fournir de prestations exceptionnelles». Ainsi, au lieu de saluer en toute sportivité la performance de son joueur qui a marqué le but en or après avoir raté un penalty dans le même match il a pris le parti de le poursuivre pour délit de...patriotisme. Héros dans son propre pays pour l’avoir qualifié pour la première fois de son histoire, il sera pour cette même raison l’objet d’une chasse aux sorcières en Italie !
Pres d’un quart de siècle après le mondial asiatique, malgré la multiplication des rencontres sportives et la contribution des talentueux joueurs africains au rayonnement du football européen, l’imaginaire estampillé par la logique des échanges inégaux perdure. En attestent certains commentaires inspirés par la défaite sur leurs propres terres des Three Lions d’Angleterre face aux Lions du Sénégal.
Cette rencontre amicale sanctionnée par ce que la presse britannique a qualifié « d’humiliation » a suscité moult justifications. Ce faisant, l’on a épilogué sur les conditions physiques des joueurs, sur le caractère expérimental de la défense anglaise et sur le manque d’appropriation des nouvelles idées de Thomas Tuchel. Et pour couronner le tout : les Anglais auraient remporté le match si l’arbitre française, Stéphanie Frappart, n’avait pas pris la malencontreuse décision d’annuler le but égalisateur signé Jude Bellingham.
L’on pourrait faire observer que le coach sénégalais, Pape Thiaw, sans se présenter en victime expiatoire, n’en était pas moins lui aussi dans une phase de reconstruction de son équipe privée de Sadio Mané. Mais le plus fondamental est que, même conscients de leurs limites, les Anglais étaient convaincus qu’ils allaient délivrer juste un match d’exhibition. Pour preuve, ce propos de Bukayo Saka dont l’intérêt est qu’il est révélateur de tout un état d’esprit : « battre le Sénégal tout en continuant de garder notre cage inviolée !»
Au demeurant, au-delà de ces justifications, plus cocasse est cette réaction de Thomas Tuchel : « J ’ai pu entendre leur réaction. Je me suis demandé : « Est-ce que nous aurions célébré de la même manière ? Est-ce que j’aurais été le premier à foncer dans le vestiaire en hurlant ‘ENGLAND’ en frappant sur les murs ?... Ce n’est qu’un match amical… ».
Cet agacement de l’entraineur allemand des Anglais, ponctué d’un mépris que révèle le mot « hurler », édifie largement sur son ignorance des relations tumultueuses entre l’Occident et l’Afrique. Les Anglais n’auraient ni « hurlé » encore moins « foncé dans les « vestiaires » en cas de succès, car ce serait un nonévènement au regard du fait qu’aucune équipe africaine n’a jamais battu les Three Lions. Une maîtrise, même rudimentaire, de l’histoire lui aurait permis de comprendre pourquoi ces jeunes étaient vifs, si virevoltant avec un engagement jamais pris à défaut durant 90 bonnes minutes. Leur contentieux avec l’Occident semblait suffisamment consistant pour que le jeu soit d’un enjeu autrement plus complexe
Plus prosaïquement, un match contre une nation européenne déborde toujours la dimension sportive pour entrer dans le cadre de la lutte pour la reconnaissance. Pour preuve, au lendemain de de la victoire du Sénégal sur la Pologne en 2028, Aliou Cissé fera remarquer que ce succès avant bien moins de saveur que celui enregistré contre la France lors de la rencontre évoquée plus haut. Cette réaction de l’entraineur sénégalais traduit bien le ressenti d’un émigré dont le pays a été colonisé par la France !
La réalité de cette lutte pour la reconnaissance est telle que toute équipe africaine qui joue contre une européenne est ipso facto supportée par tout le continent.
Certes, l’Angleterre n’avait pas colonisé le Sénégal mais elle n’en était en pas moins une puissance occidentale qui a remporté toutes ses 21 rencontres avec un pays africain. Il s’y ajoute que non seulement elle avait empêché le Sénégal d’atteindre les quarts de final en 2022, mais elle avait brisé le rêve des Africains à accéder pour la première fois en demi-finale en sortant, en 1990, la belle équipe du Cameroun.
Et de nos jours, les avancées dans le football africain sont telles que, au-delà de la lutte pour la reconnaissance, l’ambition est de rivaliser avec n’importe quelle nation. Partant, de profondes mutations sont en train d’ébranler bien des certitudes ! Et la Coupe du monde des clubs en cours pourrait en donner une parfaite illustration ! Ayant acquis une forte expérience dans les stades européens et dopés par les remarquables performances des pays comme le Cameroun, le Nigeria, le Ghana, le Sénégal et surtout le Maroc, les footballeurs du continent sont de plus en plus convaincus que la balle est ronde pour tout le monde.
Il se donne alors à lire que, en dépit des mirages et fantasmes qui enveloppent le monde du football, il reste profondément dans un univers dont il reproduit la quintessence des contradictions qui le structurent. Ainsi, les nations africaines, asiatiques comme sud-américaines sont confrontées à l’idéologie dominante qui charrie le complexe de supériorité. Et les réactions sur les champs sportifs, en général et sur les terrains de football, en particulier, pour être positives, ne sauraient suffire. La véritable reconnaissance, qui ruine toute forme de complexe, suppose un recentrage des priorités. Quand, dans une société, la frange la plus vive reste convaincue que le sport et l’émigration constituent les seules voies de salut, tout pari sur l’avenir est hypothéqué. L’impératif est de promouvoir l’éducation civique, de diffuser les arts et la science afin de créer les conditions d’une reprise en main de l’initiative historique. Seul cet impératif est à même de valoriser la confiance en soi en incitant du coup les Africains à, pour reprendre Ruellan, « valoriser ce qu’ils sont et ce qu’ils ont »
Alpha Amadou Sy
auteur, entre autres, de « La CAN 2019 : De l’accueil euphorique des Lions : lecture politique d’un fait polémique » Dakar », éditions l’harmattan, 2019.
UN DIAGNOSTIC PROFOND D’UN SECTEUR A BOUT DE SOUFFLE
Hier, vendredi 20 juin 2025, s’est déroulée la cérémonie de clôture des journées de concertations sur le secteur de la communication, organisées par le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique
Hier, vendredi 20 juin 2025, s’est déroulée la cérémonie de clôture des journées de concertations sur le secteur de la communication, organisées par le ministère de la Communication, des Télécommunications et du Numérique. Cet évènement, présidé par le Directeur de la Communication, Habibou Dia, au nom du ministre Alioune Sall, a été marqué la restitution des travaux de comités. Dans un document portant synthèse du rapport général, il a été noté plusieurs constats et défis pour lesquels des recommandations ont été formulées.
Ouvertes mercredi 18 juin 2025, les journées de concertations sur le secteur de la communication ont été clôturées hier, vendredi 20 juin, en présence de plusieurs autorités dont le ministre-conseiller, Coordonnateur de la Communication de la Présidence de la République, Cheikh Sakho Jimbira. Cet évènement a été marqué également par la restitution des travaux de comités. Dans un document portant synthèse du rapport général, les acteurs ont relevé plusieurs constats et défis tels que le financement et la viabilité économique des entreprises de presse, la régulation, l’éthique et les contenus, le droit de travail et la protection sociale, entre autres.
CONSTAT ET DEFIS A RELEVER
Concernant le premier constat, qui porte sur le financement et la viabilité économique des entreprises de presse, le rapport note une obsolescence et une absence de décret d'application des lois portant Code de la publicité (lois n°64-51 de 1964 et numéro 83-22- de 1983), entraînant une fuite de capitaux vers le numérique et les nouveaux acteurs. Il met à nu également une discrimination injuste des radios communautaires qui sont dans l'impossibilité de diffuser de la publicité, ce qui a quasiment aggravé lourdement, selon le document, leurs difficultés financières. En ce qui concerne, par ailleurs, la question sur la régulation, de l'éthique et contenus, le document a alerté sur l'urgence d'une réforme structurelle basée sur une législation adaptée et une régulation efficace. Les conclusions de ces concertations ont également permis de mettre en exergue, l'affaiblissement de l'éthique journalistique par la recherche du buzz, la monétisation rapide et la prolifération d'acteurs non régulés, notamment des influenceurs, des "chroniqueurs", et même des plateformes qui produisent du contenu sans formation ni ancrage éthique. Quant à la question liée au droit du travail et à la protection sociale, les acteurs ont noté un déficit d'application des dispositifs existants tels que la Convention collective, la protection sociale, l'absence de contrat de travail adéquat, les cotisations sociales qui ne sont pas reversées et la couverture maladie, les femmes journalistes confrontées à des discriminations et à l'absence de protection liée à la maternité.
RECOMMANDATIONS DES ACTEURS ET GAGES DE LA TUTELLE
Mais, au-delà de ces constats relevés, les acteurs ont formulé des recommandations pour chacun des constats. C’est ainsi, qu’au titre de la publicité, dont les lois de 1960 et de 1983 ne sont plus adaptées à la réalité actuelle, les acteurs ont fait part de leurs vœux, la création d’une autorité chargée de mettre en œuvre les règles destinées à la publicité. De leur côté, les acteurs des radios communautaires ont posé leurs doléances qui consiste à enlever la restriction sur la publicité afin de leur donner la chance d’avoir un modèle économique viable. Du point de vue de la régulation, bien que la loi portant Code la presse de 2017 l’avait déjà prévu, ils ont proposé mieux en demandant une nouvelle autorité qui va combiner à la fois le secteur de la presse et de la publicité, en tenant compte aussi des enjeux liés à l’Intelligence artificielle (IA) et aux évolutions numériques qui ne sont pas exclusives à la presse.
Dans la dimensions éthique et protection, il a été recommandé aux patrons de presse de permettre à leurs employés de disposer des formations tout au long de leur collaboration. En revanche, pour donner corps à toutes ces recommandations, les acteurs ont émis le souhait qu’un mécanisme de suivi-évaluation puisse être mis en place, avec un comité de suivi élargie, et une concertation qui sera annuelle et organisée par toutes les parties prenantes.
Saluant la qualité des échanges et la pertinence des diagnostiques posés, le Directeur de la Communication, Habibou Dia, qui a présidé la cérémonie de clôture, a tenu à rassurer les acteurs quant à l’aboutissement de ces recommandations. Il a, par ailleurs, souligné l’engagement du ministre à prendre en charge certains éléments notamment l’accompagnement et la mise à disposition et renforcer la Commission nationale de la carte de presse et le Comité pour le respect de l’éthique et de la déontologie (CORED), des instances de gouvernance qui, selon lui, doivent monter en puissance.
S’agissant de la problématique économique, Habibou Dia a promis de «renforcer les entreprises et leur permettre d’avoir une gouvernance économique avec un socle transparent qui permet aussi à l’Etat, dans le cadre de ses échanges avec le CDEPS, de mettre sur place un cadre de revue des conventions publicitaires.»