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10 août 2025
LA DIFFICILE GESTION DES QUAIS DE PÊCHE
A l’instar de certains quais de pêche du Sénégal, ceux de Rufisque situé à Ndeppé et de Kafountine dans la commune éponyme sont confrontés à d’énormes difficultés. Des problèmes liés à l’environnement, l’assainissement, l’érosion côtière et l’insécurité
Comme à l’accoutumée, les alentours du quai de Kafountine sont noirs de monde. Entre les dizaines de voitures et la cohorte de vendeuses assises par terre à la devanture, au milieu de la foule, c’est au sortir d’une intense bousculade que l’on franchit le portail du quai de pêche. Sur les lieux, le tintamarre est à son comble, en cet après-midi. Entre les piliers de l’imposant bâtiment construit en 2009, sont amassés les commerçants. Clients et mareyeurs s’affairent au beau milieu des eaux pestilentielles. Niché au bord de la façade maritime la plus importante de la Casamance dans le département de Bignona à 471 km de Dakar, le poumon économique de la région de Ziguinchor est dans un état d’insalubrité alarmant et chronique. Les fuites d’eaux poissonneuses qui suintent des camions frigorifiques dessinent des arabesques malodorantes sur le sol. L’odeur nauséabonde agresse les narines. Les fuites d’essence des camions frigorifiques mélangées aux eaux poissonneuses noircissent les eaux qui se déversent directement dans la mer, creusant une fosse juste au-dessous de la marche qui mène vers le grand Bleu. Abdoulaye Kâ, un jeune mareyeur, la trentaine consommée, déplore l’état du quai, car ne répondant plus aux normes hygiéniques. «Nous ne pouvons plus vivre et travailler dans ces conditions. Parce que le quai est d’une saleté répugnante.» Juste à ses côtés, une montagne de thons blancs fraichement pêchés des eaux est exposée sur le sol. Les mareyeurs sont obligés de chercher des bâches pour étaler leur produit, à défaut de les exposer à même le sol. Debout dans des bottes jaunes de mareyeur qui lui arrive à hauteur de tibia, Assane Guèye, un mareyeur qui habite Yoff, charge les caisses de poissons à l’aide d’une pelle. Ses camarades et lui forment un groupe chargé de déposer les caisses de poissons dans les camions. Le tout dans un mouvement d’ensemble parfaitement synchronisé. Ils chantent en chœur, les pieds trempés dans les eaux nauséabondes du quai. Tous déplorent l’insalubrité qui sévit dans leur lieu de travail.
Sur la berge, des sachets en plastique et les tasses de café-Touba vides, retenus par les filets des pêcheurs, laissent le quai dans un piteux état. Une situation qui met en rogne Fatou Sagna. La vendeuse de poisson sec, native de la commune et mère de trois enfants, est nostalgique des belles périodes où le quai était un havre de paix. «Il faisait bon commercer dans cet endroit et il y avait une très bonne organisation. Mais, aujourd’hui, faute de tables, nous sommes obligés d’étaler nos produits à même le sol. Cela repousse la clientèle et nos portefeuilles en pâtissent», regrette-t-elle en balayant d’un regard las le quai de pêche qui a fini de se muer en un dépotoir d’ordures.
Interpellé par nos soins, le président du service de pêche, Oumar Ndiaye, précise qu’un acte de sous-concession d’une durée de 10 ans renouvelable lie la mairie et les acteurs du (Gie) interprofessionnel. De ce fait, les acteurs sont chargés du nettoyage du quai et la mairie est censée enlever les ordures. «Mais la mairie ne respecte pas sa part du contrat. Nous avons une équipe qui fait un excellent travail de nettoyage. Mais l’enlèvement des ordures revient à la mairie. Le problème majeur que rencontre le quai, c’est l’aménagement de l’espace», fustige-t-il. L’Etat du Sénégal, à travers son département de Pêche, a signé un acte de concession et de sous-concession de 30 ans avec les mairies. Pour ne pas politiser la gestion du quai, la mairie signe, à son tour, un contrat de 10 ans avec les acteurs, notamment le Gie interprofessionnel avec un droit de regard de l’Administration. «Parce que la pêche n’est pas une compétence transférée. L’Etat a consenti de grands efforts d’aménagement pour les quais de pêche de Mbour et Joal. Mais à Kafountine, le chantier reste énorme», soutient le président du service de pêche, Oumar Ndiaye.
La vétusté du quai, un handicap majeur pour les camions frigorifiques
En atteste la soixantaine de camions frigorifiques venus d’horizons divers en attente d’un stationnement que la vétusté du quai rend presque impossible. Au minimum, plus de 70 camions stationnent par jours à Kafountine. Construit en 2009, le bâtiment n’a plus la capacité pour les accueillir. Ibrahima Coly, président du Groupement d’intérêt économique (Gie) interprofessionnel, par ailleurs gestionnaire du quai de pêche de Kafountine, réclame un quai à la hauteur de Kafountine qui, selon lui, est le poumon économique de la région de Ziguinchor. «Le quai a été construit en 2009. A l’époque, une dizaine de camions frigorifiques y stationnaient. Mais aujourd’hui, nous enregistrons plus d’une soixantaine de camions. Le bâtiment est vétuste et ne peut contenir tous ces camions. Par conséquent, les camions sont obligés de stationner en dehors du quai», déplore-t-il.
«L’espace de débarquement du quai est menacé par l’avancée de la mer»
La façade maritime la plus importante de la Casamance ne tient plus. L’érosion côtière est en train d’avaler les belles plages de la commune de Kafountine. Les acteurs de la pêche, sous la conduite de leur président Ibrahima Coly, s’inquiètent de cette avancée de la mer. Parce que les pêcheurs ont d’énormes difficultés pour accoster leurs pirogues. «Le grand problème de Kafountine aujourd’hui reste l’avancée de la mer. Nous n’avons pas où accoster nos pirogues. L’espace de débarquement au sein du quai est vraiment menacé par cette avancée», alerte le président du quai de pêche de Kafountine. Pour rappel, plus de 570 pirogues, toutes nationalités confondues, accostent à Kafountine par campagne. Et faute d’espaces, les pêcheurs sont obligés de remonter leurs pirogues jusqu’aux campements réservés aux sites touristiques. Une situation qui pousse certains acteurs du tourisme à se révolter contre ces pêcheurs qui accostent sur leurs plages. Jules Bassène est un guide touristique. Dreadlocks bien entretenus, il peste : «Les pêcheurs sont en train de polluer nos belles plages parce qu’ils accostent ici avec leur matériel de pêche. Nous avons un tourisme balnéaire donc si les acteurs du milieu ne réagissent pas, nous risquons de perdre nos plages.» Et leur business.
QUAI DE PÊCHE NDEPPE DE RUFISQUE : «En l’état actuel des choses, si rien n’est fait, le quai risque de disparaître»
Sur la route qui mène vers le quai de pêche de Rufisque, une longue file de camions frigorifiques stationnés obstrue quasiment le passage. Des véhicules d’où s’échappe une eau puante qui se déverse sur la chaussée. Difficile pour les piétons de mettre les pieds sur cette chaussée complètement couverte de cette eau rougeâtre mélangée aux crottes des chevaux qui assurent le transport des clients et des personnes qui s’activent sur le site. L’exiguïté des lieux ne permet pas de contenir les nombreux véhicules qui font la navette entre Rufisque et les autres régions du pays. A l’intérieur, le décor est écœurant, avec des tas d’ordures un peu partout. La route qui jouxte les lieux se trouve au-dessus du quai. Une sorte de pente qui transforme le quai en un bassin durant chaque hivernage. A cela, s’ajoutent les restes des poissons qui dégagent une odeur nauséabonde. Le réseau d’assainissement qui date des années 80 ne fonctionne presque plus. Seule une conduite qui se déverse sur la mer reste sur ce réseau dont les autres tuyaux sont totalement bouchés par des ordures de toutes sortes. Faute de curage, le trop plein d’eau ajoutée aux eaux maritimes se déversent sur le quai. Un environnement repoussant qui n’empêche pas aux acteurs du quai de faire leur travail. Un quai qui grouille de monde à toutes les heures de la journée. Difficile de trouver une poubelle ou un bac à ordures pour ses nombreux pêcheurs, mareyeurs et vendeurs. Les toilettes publiques ne sont plus fonctionnelles depuis belle lurette. Pour se soulager, les acteurs sont obligés de squatter les maisons environnantes ou de se cacher derrière les grosses pierres de la digue de protection. Et pourtant, la salubrité du marché est du ressort de la mairie. L’assertion est d’Ibrahima Mar, président du comité de gestion. «Sur le contrat, c’est la mairie qui doit s’occuper du nettoiement, de l’éclairage public et de la sécurité. Mais, elle ne s’acquitte pas de ses charges, malgré ses 20%. C’est le comité de gestion qui est obligé d’endosser ces charges de même que les factures d’eau et d’électricité», se désole-t-il. A Rufisque, la gestion du quai se fait en toute collégialité avec le président, le comptable représentant du maire, et le chef du service départemental des pêches. «Les ressources proviennent des tickets imposés aux piroguiers, aux véhicules, aux charretiers, aux vendeurs et aux étalagistes établis au niveau du quai. A la fin du mois, on comptabilise les recettes avant de payer les salaires et on fait le dispatching conformément aux textes qui régissent le contrat de sous-concession», souligne le président du comité de gestion. Selon lui, les 20% sont alloués à la mairie, 50% pour le fonds de réserve, 20% pour le fonds de formation et 10% pour le Gie. «Nous avons en charge les salaires de 9 collecteurs et 1 comptable au-delà des rémunérations des membres du comité.»
L’avancée de la mer, l’autre problème
Autre problème soulevé, l’avancée de la mer. A Rufisque, elle demeure une réalité et n’épargne pas l’infrastructure. L’affaissement de la partie Est du quai est visible et accentue l’érosion côtière. Pour les responsables du site, si des solutions ne sont pas trouvées, le quai risque de disparaître. L’éclairage public est aussi inexistant. Une situation qui accentue l’insécurité sur le site. Pourtant, ce ne sont pas des démarches qui manquent auprès des autorités pour la modernisation du quai. «Nous avons énuméré tous les problèmes du site dans un mémorandum que nous avons remis au ministre de tutelle, à l’ancien maire de la ville et au président du Conseil départemental», révèle Ibrahima Mar, président du comité de gestion. A l’en croire, le ministre de la Pêche et de l’économie maritime a procédé à une visite technique du quai. Selon lui, la position stratégique du quai permet son extension et sa modernisation. «Nous avons un plan d’eau calme, il suffit d’une étude sérieuse pour dépasser notre statut de quai de débarquement et aller vers un véritable Port de pêche comme en Mauritanie», défend le responsable des lieux. En attendant, le problème reste entier.
L’UA APPELLE AU RESPECT DE LA SOUVERAINETÉ DE L’UKRAINE
Dans une déclaration commune, Macky Sall et Moussa Faki Mahamat ’’expriment leur extrême préoccupation face à la très grave et dangereuse situation créée en Ukraine’
Le président en exercice de l’Union africaine et le président de la Commission de l’UA appellent ’’au respect impératif du droit international, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale de l’Ukraine’’ et exhortent ’’les deux parties à l’instauration immédiate d’un cessez le feu et à l’ouverture sans délai de négociations politiques’’.
Dans une déclaration commune, Macky Sall et Moussa Faki Mahamat ’’expriment leur extrême préoccupation face à la très grave et dangereuse situation créée en Ukraine’’.
’’Ils appellent la fédération de Russie et tout autre acteur régional ou international au respect impératif du droit international, de l’intégrité territoriale et de la souveraineté nationale de l’Ukraine’’, lit-on dans ce communiqué publié sur le site de l’UA.
Macky Sall et Moussa Faki Mahamat ’’exhortent les deux parties à l’instauration immédiate d’un cessez le feu et à l’ouverture sans délai de négociations politiques sous l’égide des Nations Unies, afin de préserver le monde des conséquences d’un conflit planétaire, pour la paix et la stabilité dans les relations internationales au service de tous les peuples du monde’’.
La Russie a déclenché jeudi tôt le matin une opération militaire d’envergure en Ukraine, suscitant une vague de condamnations en occident.
MOCTAR SOURANG QUITTE LA COORDINATION DU FRN POUR LE CONSEIL MUNICIPAL DE TOUBA
Aux lendemains des élections locales et territoriales, nous nous devons d'en dresser le bilan : nous n’avons pas su tirer les leçons des scrutins antérieurs - COMMUNIQUÉ
SenePlus publie ci-dessous, le communiqué de Moctar Sourang, annonçant la fin de ses activités en qualité de coordonnateur du FNR. Le président de l'UNP devrait intégrer le conseil municipal de Touba sur proposition du Khalife Général des Mourides, Serigne Mountakha Mbaké.
"Depuis plus de deux (2) ans, nous avons été chargé de coordonner le Front national de résistance (FNR) en notre qualité de Président de l’UNP. Aujourd'hui, on peut considérer que cette mission est arrivée à son terme. C’est l’occasion de remercier tous les partis membres du FNR qui nous ont fait confiance et nous ont manifesté leur solidarité et leur disponibilité. Ensemble, nous avons pu engager des batailles et obtenu des résultats qui restent, certes, à consolider et à élargir. Déjà, ces acquis ne manqueront pas d’impacter l’évolution de notre démocratie. Nous avons pu relever des défis en mobilisant l’opinion sur des questions essentielles, tout en renforçant les liens entre les forces de l’Opposition. Cependant, la participation des partis et coalitions de l’Opposition aux élections locales a montré qu’il reste encore beaucoup d’obstacles à lever, des sacrifices encore à consentir pour atteindre les objectifs que le FNR s’est assignés.
Tout au long de notre mission de coordonnateur du FNR, nous avons côtoyé des leaders de qualité, des personnes engagées toujours au service de leur pays et de ses populations.
Comme coordonnateur du FRN, nous avons souhaité un large front et une meilleure organisation des forces constituantes autour d’axes programmatiques et de stratégies électorales. Nous nous sommes investis pour faciliter les convergences.
Aux lendemains des élections locales et territoriales, nous nous devons d'en dresser le bilan. En attendant, un enseignement s'impose : nous n’avons pas su tirer les leçons des scrutins antérieurs. Une dispersion des forces politiques membres du FRN a occasionné la perte de nombreuses communes, alors à notre portée. Toutefois, plus qu'une symbolique, nos victoires ont été magnifiques.
Nous félicitons toutes les listes gagnantes et espérons des retrouvailles meilleures lors des prochaines échéances électorales. Du reste, nous ne manquerons pas de faire des suggestions en ce sens aux différents Leaders concernés. Aussi, nous tenons à informer l’Opinion que le Khalife Général des Mourides, Serigne Mountakha Mbaké, a bien voulu désigner ma modeste personne pour faire partie de la liste des talibés devant le représenter au Conseil municipal de la ville Sainte de Touba. Nous renouvelons toute notre gratitude au Khalif Général pour cette marque de confiance. Plus qu'un honneur, c'est une opportunité qu’il nous donne de demeurer à son service.
Nous poursuivrons inlassablement notre combat de toujours pour plus de Démocratie et de Justice sociale, gages de la Paix et du Développement pour notre pays et le peuple sénégalais."
À BANGUI, ON REMERCIE LES RUSSES D'AVOIR SAUVÉ LA CENTRAFRIQUE
Les gens brandissaient Mercredi des banderoles et des pancartes proclamant notamment: "Les Centrafricains avec la Russie", ou bien encore "La Russie sauvera le Donbass de la guerre"
Au pied d'une statue figurant des combattants russes qui protègent une femme et ses enfant, une centaine de personnes ont participé à Bangui à une cérémonie d'hommage de l'armée pour dire "merci" aux paramilitaires russes qui combattent les rebelles à ses côtés d'avoir "sauvé" la Centrafrique.
Le "monument des Russes", comme le nomment les Banguissois, trône sur une place en terre battue en plein coeur de la capitale, près de l'université, où une centaine de personnes de tous âges sont venus mercredi agiter des drapeaux russes et centrafricains devant des soldats d'une unité d'élite au garde-à-vous et de personnalités proches du pouvoir.
Face à une rébellion menaçante il y a plus d'un an, le président Faustin Archange Touadéra avait appelé Moscou à la rescousse de son armée démunie et mal entraînée et des centaines de paramilitaires russes étaient venus s'ajouter à de nombreux autres présents depuis trois ans.En quelques mois, ils avaient repoussé les groupes armés qui occupaient alors deux tiers du pays et récupéré la grande majorité du territoire.
Mais au prix de nombreuses violations des Droits humains par des "mercenaires" de la compagnie russe de sécurité privée Wagner selon l'ONU, de "massacres" et d'"exécution" de civils ont accusé la France et les Etats-Unis mardi.
Inauguré en grande pompe en décembre par le président Touadéra en "hommage aux forces armées et aux combattants russes", la statue ne porte aucune inscription.Moscou ne reconnaît avoir dépêché en Centrafrique depuis quatre ans que des "instructeurs non armés" pour former ses soldats.
Les gens brandissaient des banderoles et des pancartes proclamant notamment: "Les Centrafricains avec la Russie", ou bien encore "La Russie sauvera le Donbass de la guerre", en référence à ce territoire séparatiste pro-russe de l'est de l'Ukraine, dont l'indépendance autoproclamée lundi a été reconnue immédiatement par Moscou et dont la protection a été invoquée par le président Vladimir Poutine pour déclencher jeudi une attaque contre Kiev.
- "Massacres" -
"Les Russes sont venus et ont fait un travail remarquable pour libérer le peuple centrafricain", s'enthousiasme Blaise-Didacien Kossimatchi, membre de la Plate-Forme de la Galaxie Nationale, une des associations qui organisaient l'hommage et qui vilipendent régulièrement la France, l'ancienne puissance coloniale, et l'ONU.
"Les Russes ont toujours été là, de notre côté", renchérit Yefi Kezza, membre de Galaxie Nationale mais aussi du Mouvement Coeurs Unis (MCU), le parti au pouvoir de M. Touadéra.
Plusieurs manifestants arboraient des t-shirts estampillés "Je suis Wagner".
Les hommes du 6e bataillon d’Infanterie territoriale, une unité d'élite des Forces armées centrafricaines (FACA) qui a combattu les rebelles aux côtés des paramilitaires russes, se sont ensuite alignés au garde-à-vous à l'entame de l’hymne national centrafricain.Leur commandant a déposé une gerbe au pied de la statue en hommage aux "Défenseurs de la Patrie".
Aucun des diplomates ou cadres des paramilitaires russes qui assistent d'ordinaire à ces cérémonies n'était visible.
"La paix que les FACA et les Russes nous ont apportée, c’est véritablement la paix de Dieu", lance un homme au micro, acclamé par la foule.
"Ce qui nous intéresse, c’est d’avoir la vraie paix, il faut que les Russes donnent encore un coup de main à la Centrafrique", plaide aussi Nelson Ezechiel Yangelema, étudiant en première année de faculté de Science.
Mardi, la France et les Etats-Unis ont accusé pour la première fois au Conseil de sécurité de l'ONU les "mercenaires de Wagner" d'avoir "massacré" et "exécuté" des dizaines de civils en janvier.Ce qu'une diplomate russe a aussitôt démenti, accusant Paris et Washington de tenter de "discréditer" les "spécialistes" russes présents en Centrafrique.
En 2021, un groupe d'experts de l'ONU avait déjà dénoncé des exactions commises contre des civils par les FACA et leurs alliés russes, évoquant des "violations des droits humains".
LA RUSSIE ENVAHIT L'UKRAINE
Vladimir Poutine a lancé jeudi une invasion de l'Ukraine, avec frappes aériennes et entrée de forces terrestres y compris en direction de la capitale Kiev, faisant dès les premières heures des dizaines de morts, selon les autorités ukrainiennes
Vladimir Poutine a lancé jeudi une invasion de l'Ukraine, avec frappes aériennes et entrée de forces terrestres y compris en direction de la capitale Kiev, faisant dès les premières heures des dizaines de morts, selon les autorités ukrainiennes.
L'attaque a déclenché un tollé dans la communauté internationale, notamment côté occidental, avec des réunions d'urgence prévues dans plusieurs pays: les 27 membres de l'Union européenne se réunissaient jeudi après-midi en sommet à Bruxelles, tandis que l'Otan convoquait un sommet en visioconférence pour vendredi.
Le président russe a donné le signal des hostilités jeudi à l'aube, après avoir reconnu lundi l'indépendance de territoires séparatistes ukrainiens du Donbass, puis fait valider mardi une intervention militaire par le Parlement russe.
"J'ai pris la décision d'une opération militaire spéciale", a annoncé le maître du Kremlin dans une déclaration à la télévision avant 6H00 du matin (03H00 GMT). "Nous nous efforcerons d'arriver à une démilitarisation et une dénazification de l'Ukraine", a-t-il ajouté, assis à un bureau en bois sombre.
"Nous n'avons pas dans nos plans une occupation des territoires ukrainiens, nous ne comptons rien imposer par la force à personne", a-t-il assuré, appelant les militaires ukrainiens à "déposer les armes".
Il s'est justifié en répétant ses accusations, infondées, d'un "génocide" orchestré par Kiev dans les territoires séparatistes prorusses, et en arguant d'un appel à l'aide des séparatistes et de la politique selon lui agressive de l'Otan, qui instrumentaliserait l'Ukraine contre la Russie.
Le président russe recevait jeudi à Moscou le Premier ministre pakistanais Imran Khan.
- "Eliminer les nazis" -
Son porte-parole, Dmitri Peskov, a précisé à la mi-journée que "la durée (de l'opération) serait déterminée par ses résultats et sa pertinence".
L'attaque vise à éliminer les "nazis" qui, selon Moscou, sont à l'oeuvre en Ukraine. M. Peskov a refusé de répondre lorsqu'on lui a demandé si Moscou considérait le président ukrainien Volodymyr Zelensky comme un "nazi".
Le spectre de la Seconde Guerre mondiale était aussi brandi par Volodymyr Zelensky, qui a comparé l'invasion russe à l'offensive nazie de 1941 contre l'Ukraine, alors partie de l'Union soviétique.
Dès l'aube, juste après le discours de M. Poutine, une série d'explosions ont été entendues à Kiev, à Kramatorsk, ville de l'est qui sert de quartier-général à l'armée ukrainienne, à Kharkiv (est), deuxième ville du pays, à Odessa (sud), sur la mer Noire, et à Marioupol, principal port de l'est du pays.
Le président Zelensky a proclamé la loi martiale dans le pays, appelé ses concitoyens à "ne pas paniquer", avant d'annoncer la rupture des relations diplomatiques avec Moscou.
Vers 10H00 GMT, un membre de son équipe indiquait que "plus de 40 militaires ukrainiens avaient été tués, des dizaines blessés" et "près de 10 civils tués".
Les autorités de la région d'Odessa ont par ailleurs indiqué que 18 personnes avaient été tuées dans un village par des frappes, sans qu'on sache si ces victimes avaient été comptabilisées dans le bilan global.
Vers 12H00 GMT, l'offensive semblait viser directement Kiev: les autorités ukrainiennes ont indiqué que les forces terrestres russes avaient pénétré les environs de la capitale, et qu'un avion militaire ukrainien s'était écrasé dans la région avec 14 personnes à bord.
L'Ukraine, puis la Moldavie voisine ont fermé leur espace aérien pour l'aviation civile. Les vols ont été annulés depuis les aéroports des grandes villes du sud de la Russie, proches de l'Ukraine.
Moscou a fermé à la navigation la mer d'Azov, qui baigne l'Ukraine et la Russie.
- "Je lui avais dit de partir" -
A Kiev, dès l'aube, les habitants pris de court se pressaient dans le métro pour s'abriter ou tenter de quitter la ville.
"J'ai été réveillée par le bruit des bombes, j'ai fait des sacs et je me suis enfuie", a indiqué à l'AFP Maria Kachkoska, 29 ans, en état de choc, dans une des stations.
Des voitures remplies de familles fuyaient la capitale, le plus loin possible de la frontière russe, située à 400 km.
A Tchouhouïv, près de Kharkiv, une femme et son fils pleuraient un homme tué par un missile, une des premières victimes de cette attaque.
"Je lui avais dit de partir", répétait le fils, non loin du cratère creusé par le projectile entre deux immeubles de cinq étages.
"Je ne pensais pas qu'une telle chose puisse arriver, que cela arriverait de mon vivant", lançait plus loin Elena Kourilo, une éducatrice de 52 ans.
Sur les grandes routes de l'Est ukrainien, l'armée ukrainienne était partout. Un porte-parole de la défense civile a indiqué que les opérations d'évacuation de civils étaient entravées par des tirs d'artillerie nourris et des communications défaillantes.
L'armée russe a affirmé avoir détruit des bases aériennes et la défense anti-aérienne ukrainienne, tout en assurant ne cibler que les sites stratégiques.
Les deux camps faisaient des déclarations invérifiables: l'armée ukrainienne disait avoir tué "environ 50 occupants russes", et le porte-parole du ministère russe de la Défense affirmait que ses troupes gagnaient du terrain dans l'est du pays.
Dans les rues de Moscou, certains habitants exprimaient leur inquiétude, d'autres leur soutien à Vladimir Poutine.
"Ca ne me réjouit pas, je suis complètement inquiet", déclarait Nikita Grouschine, un manager de 34 ans, disant ne pas savoir "qui a raison ou tort".
"Je ne vais pas discuter un ordre du Commandant suprême, s'il pense que c'est nécessaire, c'est que ça doit être fait", déclarait de son côté Ivan, un ingénieur de 32 ans.
- "Attaque téméraire"
L'attaque russe, après des mois de tensions et d'efforts diplomatiques pour éviter une guerre, a suscité un torrent de condamnations internationales, notamment en Occident.
"Président Poutine, au nom de l'humanité, ramenez vos troupes en Russie!", a lancé le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, visiblement éprouvé, lors d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité dans la nuit.
Le président américain Joe Biden a dénoncé une "attaque injustifiée" qui provoquera "des souffrances et pertes de vies humaines". "Le monde exigera des comptes de la Russie", a-t-il promis. Il s'est entretenu tôt jeudi avec le président ukrainien, lui promettant son soutien.
Le dirigeant français Emmanuel Macron, président en exercice du Conseil de l'Union européenne, a appelé les Européens à l'"unité".
"Les dirigeants russes devront faire face à un isolement sans précédent", et au "plus sévère (train de sanctions) jamais mis en oeuvre" a assuré Josep Borrell, chef de la diplomatie de l'UE.
Le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg a condamné une "attaque téméraire et non provoquée" par la Russie.
Il a indiqué que l'Alliance atlantique avait activé "ses plans de défense" pour déployer des forces supplémentaires dans les pays alliés en Europe de l'est, mais souligné que l'Otan n'avait pas de troupes en Ukraine et "pas de plan" pour en déployer.
La Chine, qui entretient des relations étroites avec Moscou, a indiqué suivre "de près" la situation" et appelé à "la retenue de toutes les parties".
- Panique sur les marchés -
Cette attaque intervient huit ans après que Moscou a annexé la Crimée et parrainé la prise de contrôle de régions du Donbass par des séparatistes prorusses, déclenchant un conflit régional qui a fait plus de 14.000 morts.
Beaucoup redoutent qu'elle mène au plus grave conflit en Europe depuis 1945. L'attaque "met en danger la vie d'innombrables innocents" et "remet en cause la paix" en Europe, a notamment estimé jeudi le chancelier allemand Olaf Scholz.
M. Poutine a averti ceux "qui tenteraient d'interférer": "Ils doivent savoir que la réponse de la Russie sera immédiate et entraînera des conséquences que vous n'avez encore jamais connues".
L'invasion a provoqué la panique sur les marchés mondiaux, faisant plonger les bourses et s'enflammer les matières premières, pétrole et gaz en tête.
Le pétrole a dépassé les 100 dollars le baril, pour la première fois en plus de sept ans.
La Bourse de Moscou a plongé de plus de 30% et le rouble a touché un plus bas historique face au dollar, avant l'intervention de la banque centrale du pays.
Les Etats-Unis devaient déposer jeudi un projet de résolution sur la table du Conseil de sécurité de l'ONU condamnant la Russie pour cette "guerre".
MEMORIALES, PAR ELGAS
FÉRAL BENGA, AN ZÉRO DE L’HOMOPHOBIE AU SÉNÉGAL
EXCLUSIF SENEPLUS - Le roman national sénégalais se voulait pourtant formel : la société sénégalaise tolérait l’homosexualité. Elle l’avait même admise, sinon protégée, dans le voile d’une pudeur nationale qui avait été vite érigée en légende sacrée
Figure de la scène artistique française des années 30, Féral Benga s’est imposé comme une icône dans Les Folies nègres de Paris. Une vie brève et une douleur tenace pourtant, celle de sa rupture avec sa famille.
Le roman national sénégalais se voulait pourtant formel : la société sénégalaise tolérait l’homosexualité. Elle l’avait même admise, sinon protégée, dans le voile d’une pudeur nationale qui avait été vite érigée en légende sacrée. Et il s’en est trouvé des professeurs voire défenseurs de cette lecture historique inclusive, vantant presque un âge d’or d’une cohabitation harmonieuse et pacifique intersexe, intergenre, intersexualité. Vieux sages dépositaires de la mémoire orale, chercheurs, intellectuels enclins à faire reluire le passé, témoins nostalgiques, simples quidams, jusqu’à quelques marabouts du deuxième cercle : tous avaient permis au catéchisme de cette hospitalité gayfriendly de prospérer. Les anecdotes pleuvent alors sur ces tailleurs, cuisiniers des cérémonies, danseurs, dont les « vices » étaient admis.
Genèse d’une légende
Androgynes, maniérés, efféminés ou excentriques, on conçut alors une image presque mythifiée de l’homosexuel sénégalais. Amis des femmes, sinon confidents, éléments du folklore des raouts féminins (danses, conciliabules, salons privés…), mariés pour satisfaire la morale, au besoin amants cachés d’hommes ou de femmes. Le portrait s’étire. L’image qui s’en forme est celle d’homosexuels inoffensifs, désexualisés, quasi-eunuques. Transformés en quasi-éléments de régulation sociale, amuseurs d’utilité publique multiple, que tout le monde tolérait. Aussi loin qu’on remonte dans l’étymologie du mot « goorjigeen », au-delà même de l’agencement ou la fusion des deux mots, on semble trouver une origine dans cette féminisation de la masculinité. Féminisation qui, en elle-même, ne suscitait point le dégoût. Tant que l’homosexuel n’était pas viril, il n’y avait point de péril en la demeure.
On s’applique depuis lors, cécité et amnésie partielles aidant, à faire émerger un mythe. Toujours selon la même légende, sophistiquée, c’est bien plus tard que le « mal » serait arrivé. Dérivant d’abord du droit colonial importé, et de son attirail homophobe. Puis plus tard renforcé par des légalisations occidentales du mariage gay, qui devaient fatalement être imposées aux sociétés africaines, dans une néo-colonisation des mœurs. Si on résume, havre de paix pendant longtemps, sans soubresaut homophobe, le Sénégal le serait devenu pour s’ériger en remparts contre les dépravations occidentales, leur arrogance injonctive, somme toute en défense de ses valeurs locales et religieuses. Bouquet final, périodiquement, les artères de Dakar et de province noircissent de monde pour chasser cette malédiction nouvelle, prêchant la criminalisation devant la mollesse de la pénalisation, et ce dans une ardeur de la dénonciation qui rendrait envieuse les autres causes nationales. Voici pour le décor premier. Mais en fut-il toujours ainsi au Sénégal ? Ce n’est pas si sûr, au risque de contrarier la narration officielle. Les archives sont comme les faits : elles sont têtues, parfois ironiques voire carrément moqueuses. En voici un exemple.
L’exil fondateur et la gloire
Les registres de l’état civil colonial de l’année 1906, colonne naissance, font figurer en bonne place deux hommes. L’un est connu, il s’agit de Léopold Sédar Senghor. L’autre ne l’est que des intéressés, c’est François Benga. Les deux viennent de familles prospères, faisant affaire avec les colons. Familles francisées, ouvertes sur l’extérieur, dotées de patrimoines divers, financiers et comme culturels. Mères sérères pour les deux. Le parallèle s’arrête là. François Benga est d’ascendance léboue du côté paternel, et si Senghor est issu d’un mariage légitime, François lui, bien que descendant d’une lignée noble et aisée, traine très vite le fardeau d’une naissance sans bénédiction : celle d’un enfant non désiré. Tous les deux sont des enfants de cette période métissée, de cohabitation coloniale, où le vernis français vient couvrir des réalités traditionnelles, avec des heurts ou conflits plus ou moins marqués. Les deux natifs de 1906 vivront pourtant deux opprobres de nature différente. L’un pour ses idées et sa romance Française, l’autre pour une vie dissolue, libre, tant sexuellement qu’artistiquement. Deux destins qui auront pour terre de salut de refuge comme de damnation : la France et sa capitale Paris.
Tous les deux y débarquent dans les années 20 pour des motifs différents. Senghor en 28 pour des études, et Benga en 1923, accompagnant son père pour un séjour festif, de découvertes des splendeurs parisiennes. Dès qu’il y pose le pied, François Benga, danseur précoce et passionné, est ébloui. Il s’échappe et fuit, goutte à la folie nègre qui s’empare du Paris d’alors. Le danseur ne manque pas de surprendre, et chaque rencontre lui ouvre un peu plus la voie vers cette vie d’artiste. François devient Féral, et assez rapidement une icône. Sa vie, sa trajectoire, le symbole qu’il représente, tout son destin est merveilleusement retracé dans une remarquable note de Nathalie Coutelet, « Féral Benga - De la danse nègre à la chorégraphie africaine ». Les articles s’en suivent. Dans ce Paris de Joséphine Baker, enfiévré par une effervescence et une certaine négrophilie voyeuriste, Féral Benga a tout pour plaire et figer les admirations. Visage pictural, corps svelte et athlétique, érotisme dans le mouvement, regard lascif, un sens du rythme et de la tenue sur scène, font vite de lui la coqueluche du tout Paris. Il séduit, impressionne, conquiert, et son aura s’épanouit. Pour ce danseur sans les codes classiques, le souffle énergique de son originalité importe des rythmes et des savoir-faire hors du commun, un peu d’ailleurs et d’exotisme qui font de lui et de ses prestations un curieux cocktail. Si cette gloire a valu à Féral Benga une reconnaissance comme un des précurseurs d’une esthétique moderne de la danse, et a attiré sur lui les lumières de la capitale, une sphère de sa vie reste pourtant dans l’ombre : celle de son divorce avec sa famille.
La grande blessure
Le déchirement familial, la rupture sèche, restent une épaisse zone d’ombre. Elles font de l’enfant illégitime un adulte illégitime, coupable du péché irrémissible : la carrière qu’il embrasse ternit la notabilité de sa grande famille. Il est ainsi presqu’effacé de la mémoire familiale, puis nationale. Toute enquête sur cette phase de rejet se heurte à des voies sans issues, à des silences gênés. Cette part de sa vie, frivole, d’ivresse de la beauté du corps et des sens, a fondé sa réputation en France, mais a aussi frappé cette même réputation de malédiction dans son pays natal. Figure presque primale du rejet, de la déculturation, Féral Benga porte cette croix. Celle d’avoir été un des premiers à endurer à cette échelle le poison d’une homophobie à la fois latente et manifeste, dont l’expression souvent ultime est la répudiation sociale puis familiale. Si la note biographique de Coutelet ne s’attarde pas sur cet aspect, faute d’éléments parfaitement tangibles, les rares sources mobilisées attestent de cette séparation, principalement due à l’homosexualité et à son exposition. Peu avant sa mort, comme un dernier geste dans une quête de l’impossible absolution, Féral Benga se marie, à une femme. Un appel qui restera à jamais cri dans le désert.
Etablir une généalogie de l’expression de l’homophobie au Sénégal n’est pas tâche aisée. L’entreprise serait complexe avec un risque certain d’anachronisme. Aux faits et à leur inaliénabilité, se substituent très souvent plusieurs mythes, rumeurs, ragots, insinuations. En tout état de cause, si l’on ne se base que sur ces faits, ils sont assez peu équivoques. Il ne semble pas avoir existé une période dorée de la tolérance, il ne semble pas non plus avoir existé un havre dérangé par la modernité fatalement occidentale. Et ce, pour deux raisons. D’une part, l’interdit religieux est antérieur à l’interdit juridique. L’importation coloniale de la formalisation de cet interdit est une étape du rejet, pas sa cause. Et d’autre part, et c’est une hypothèse ouverte, le syncrétisme religieux étant un processus perpétuellement inachevé, il fut un temps où la religion ne régentait pas tout. La conversion était partielle avec des poches de résistance animistes. A mesure que la société gagnait en piété, sous la férule religieuse, à mesure de la globalisation, des flux migratoires, de la démocratisation des informations, d’une certaine mondialisation des mœurs, sans oublier les bascules géopolitiques, l’homophobie est devenue un enjeu fort, presque politique, de résistance. Elle se greffe à un rejet longtemps universel qui, avec des temporalités différentes, n’accorde pas la chronologie des peuples.
Aujourd’hui la mémoire française a fait une grande et belle place à Féral Benga, dans le même esprit qui a conduit Joséphine Baker au Panthéon. Mais la nuit noire dans laquelle il est plongé au Sénégal semble promise à l’éternité, comme s’il avait commis un crime par son orientation, sa sensibilité et sa beauté propre et singulière. S’il n’y a jamais eu quelques poches de tolérance, d’acceptation et de cohabitation heureuse, Féral Benga en fut exclu avec perte et fracas. Ainsi en-a-t-il été de nombreuses icones gays des années 70, 80, 90, voire 2000, dont les légendes ont été relatées par la presse à travers le petit bout de la lorgnette et la quête de sensationnalisme. Si le rejet et le ragot sont intemporels, reste à espérer que les Féral Benga de ce monde en sortent blessés mais grandis, dans la flamboyance et la grâce qu’on a tant admirées, et qu’on leur a tant reprochées.
LES AUGMENTATIONS DE SALAIRES ACCORDÉES AUX PERSONNELS DE L’AGRICULTURE ET DU TRAVAIL RAVIVENT LA COLÈRE DES ENSEIGNANTS
C’est scandaleux. On ne peut pas octroyer des indemnités à des agents de la Fonction publique alors que d’autres courent depuis des années pour la correction du système de rémunération
Alors que les agents des ministères du Travail et de l’Agriculture ont bénéficié de nouvelles indemnités (certes forfaitaires) atteignant dans certains cas jusqu’à 400.000 francs, les enseignants, qui exigent la correction du système de rémunération des agents de la Fonction publique, doutent des montants proposés par le Gouvernement qui promet de relever leurs lignes indemnitaires pour une enveloppe de 90 milliards de francs.
Le 10 janvier dernier, l’Etat signait un arrêté interministériel octroyant une indemnité de prise en charge agricole à des agents du ministère de l’Agriculture et de l’Equipement rural. Le même décret fixe également les modalités d’utilisation du fonds d’interventions dudit ministère. Les bénéficiaires seraient des agents sur qui reposent essentiellement le travail d’élaboration et de mise en œuvre des politiques du secteur pour l’atteinte des objectifs. D’où une augmentation sur les lignes indemnitaires allant de 100 000 à 300 000 francs pour les agents fonctionnaires et non fonctionnaires, là où les contractuels ont droit à une augmentation comprise entre 100 000 et 250 000 francs. Ce, pour une évolution de leurs conditions de rémunération, une amélioration de leurs conditions de travail et une meilleure prise en charge dans le secteur.
Tout comme les agents éligibles dans le secteur agricole, des travailleurs évoluant dans le secteur du Travail ont aussi bénéficié d’indemnités avec des montants allant jusqu’à 400 000 francs. Des montants qui viendront s’ajouter sur les salaires des inspecteurs du travail et de la sécurité sociale et ceux du personnel technique de hiérarchie A en service dans la direction générale. Pour les corps de contrôleurs et personnel technique assimilé de la hiérarchie A à la hiérarchie D, leur régime salarial a connu une hausse jusqu’à 250 000 francs. Sans compter les indemnités allouées à des travailleurs du ministère du Commerce et celui de la Fonction publique.
C’est scandaleux, selon Alioune Badara Sall
«C’est scandaleux. On ne peut pas octroyer des indemnités à des agents de la Fonction publique alors que d’autres courent depuis des années pour la correction du système de rémunération». C’est le coup de gueule de Alioune Badara Sall, enseignant et administrateur du Forum des enseignants et enseignantes du Sénégal.
Ce sont justement ces augmentations sectorielles tous azimuts qui ont déclenché la colère des enseignants qui demandent leur «part du gâteau». Ils exigent de l’Etat la matérialisation du point d’accord de 2018 relatif à la correction du traitement salarial des enseignants. Pour faire aboutir cette revendication essentielle à leurs yeux, les enseignants ont paralysé le système éducatif depuis plus de trois mois. Pour amener les syndicalistes à reprendre le chemin de l’école, le gouvernement a entamé des séries de négociations avec eux par le biais de leurs syndicats en formulant des propositions de sortie de crise. Elles concernent la défiscalisation de l’indemnité de logement, la revalorisation du point indiciaire de 5 %, le relèvement de l’indemnité de recherche documentaire et de surcharge horaire de 50 %, l’augmentation de la prime scolaire et celle de l’indemnité de contrôle et d’encadrement, l’indemnité d’enseignement de 50 à 60 % de la solde indiciaire et l’indemnité d’administration scolaire. Des augmentations allant de plus de 50 000 francs à plus de 200 000 francs selon les corps (Inspecteurs, professeurs, instituteurs), et qui seront étalés sur une durée de deux à trois ans.
Toutes ces libéralités accordées devaient coûter 69 milliards de francs aux finances publiques. Une somme revue à la hausse pour atteindre 90 milliards de francs, selon le ministre des Finances et du Budget. Des «chiffres erronés» dénoncés par les syndicalistes selon qui, «l’Etat s’est égaré dans sa forêt des chiffres». L’Etat avait proposé une augmentation de plus de 200 000 pour les inspecteurs, de 195 000 pour les PES (professeurs de l’enseignement secondaire), un peu plus de 175 000 aux PEM (professeurs de l’enseignement moyen), 142 000 aux Pcemg (professeurs de collèges d’enseignement moyen général), 73 000 pour les instituteurs et un peu moins de 60 000 pour les instituteurs adjoints. Des propositions rejetées par les syndicats qui jugent « insuffisante » l’offre du gouvernement. Ils avaient accepté une deuxième rencontre avec le gouvernement tout en maintenant le mot d’ordre de grève. Un peu plus de deux semaines plus tard, donc, le gouvernement a augmenté la mise jusqu’à 90 milliards de francs à payer en deux tranches pour tous les corps (inspecteurs, professeurs et instituteurs) et non imposable. Une augmentation qui ne prendra effet qu’à partir de fin mai. Ce que les enseignants refusent catégoriquement en demandant une «augmentation conséquente» et «à effet immédiat».
En effet, ils ne rejettent pas l’offre du gouvernement. Ils seraient juste des chats échaudés qui craignent l’eau froide. «Les secrétaires généraux ne doivent pas accepter cette première échéance du mois de mai proposée par le gouvernement. Plus grave, le gouvernement nous demande d’attendre le mois de mai après la loi de finance rectificative pour que ces indemnités puissent prendre effet. Les autres agents de la Fonction publique n’ont pas attendu une Loi de finance rectificative pour bénéficier d’une hausse de 150 000 à 400 000 francs. Aussi, je trouve que les montants proposés par le gouvernement sont dérisoires. Et puis on ne demande pas une augmentation, mais une correction du système de rémunération qui est très déséquilibré. Il n’est pas concevable que, dans la Fonction publique, des agents perçoivent deux, trois à quatre fois plus que les autres alors qu’ils sont de la même hiérarchie. Pourquoi les enseignants devraient-ils attendre? Cette stratégie du pourrissement doit cesser. La base veut l’immédiateté. Sinon, ce sera un échec qui va coûter cher au syndicalisme dans le secteur de l’éducation», a dit Alioune Badara Sall qui demande des augmentations «conséquentes, raisonnables» et «dans l’immédiat». «On ne veut pas d’échéance. L’idéal serait que cela soit en fin mars», a-t-il insisté.
M. Saliou Mbaye, secrétaire administratif adjoint départemental du Saemss de Tivaouane, lui, note «globalement» des avancées». «Ces augmentations salariales notées du côté du ministère de l’Agriculture sont forfaitaires alors que chez les enseignants, nous avons constaté que ce sont les indices du salaire de base qui ont été reconsidérés. Du coup, tous les autres accessoires du salaire vont connaître une certaine hausse. Et tel que je l’ai compris, ce sera le net à percevoir qui va également connaître une augmentation». Seulement, dit-il, il appartient à la base d’apprécier la suite à réserver à la grève.
«UNE DÉMARCHE NON PARTISANE EST LE MEILLEUR MOYEN D’ENGAGER UN DIALOGUE FRANC AVEC LA JEUNESSE»
Seybani Sougou, analyste politique, décrypte la rupture de confiance des jeunes avec Macky Sall et sa coalition « Benno Bokk Yaakaar ».
Seybani Sougou, analyste politique, décrypte la rupture de confiance des jeunes avec Macky Sall et sa coalition « Benno Bokk Yaakaar ». Une rupture constatée à l’occasion des élections locales du 23 janvier 2022 avec la belle percée de « Yewwi Askan Wi » dans quelques grandes villes du pays.
L’analyste relève que même si la coalition « Benno Bokk Yaakaar » est parvenue à maintenir sa suprématie dans certains départements, notamment les zones rurales, ces élections locales ont été marquées par un désaveu sans appel à l’égard du pouvoir. M. Seybani Sougou constate que dans les grands centres urbains comme Thiès, Dakar et sa périphérie en banlieue (Guédiawaye), il y a eu incontestablement un vote sanction. Une forte défiance des jeunes et particulièrement des primo-votants contre la majorité présidentielle. Lesdites grandes villes sont des localités stratégiques à fort enjeu électoral.
D’après le consultant, les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont profondément transformé le cadre de l’engagement politique et civique. « Internet, Facebook et Whatsapp offrent aux jeunes, qui vivent dans les centres urbains, des moyens d’expression radicalement différents des canaux classiques (télé, ou médias traditionnels). Pour les jeunes, la toile est devenue un puissant vecteur de mobilisation collective. Elle favorise une posture critique à l’égard du pouvoir sans filtre, ni censure », explique-t-il. Selon l’expert en marchés publics à Paris, l’un des enseignements majeurs du scrutin du 23 janvier dernier, c’est que les jeunes ont voulu adresser un message fort au régime. Ils ont exprimé un ras-le-bol, tout en soulignant que leurs nombreuses attentes et préoccupations exprimées, lors des manifestations de mars 2021, n’ont pas été prises en compte. « Vous ne nous avez ni compris ni entendus », semblent dire ces jeunes en faisant référence au discours du président Macky Sall prononcé au lendemain desdits événements.
Le sacre des « Lions », un état de grâce pour le régime de Macky Sall
Le Sénégal, insiste notre interlocuteur, est en train de vivre un moment d’unité nationale exceptionnelle et rare avec le sacre des « Lions ». « Tous les Sénégalais, dans un élan unanime, ont tu leurs divisions, transcendé les clivages politiques et vibré à l’unisson pour les Lions et le Sénégal. Cette période d’apaisement et de concorde nationale est équivalente à un état de grâce pour un régime qui vient d’être élu. Les jeunes Sénégalais ont prouvé qu’ils étaient capables de produire des émotions positives. C’est une jeunesse pacifique et pleine d’espoir qui a manifesté sa joie dans toutes les rues et dans toutes les contrées du Sénégal », décrypte M. Seybani Sougou.
Un dialogue franc, ouvert et désintéressé avec la jeunesse, exigée
Selon lui, le climat actuel doit être l’occasion pour le régime de modifier radicalement sa politique, de mettre fin au népotisme, à la gabegie, à la prévarication des deniers publics par certains membres de la majorité. Mais aussi, de stopper les arrestations arbitraires d’opposants, tout en renforçant l’Etat de droit.
Ainsi, préconise Seybani Sougou, Macky Sall doit rétablir la démocratie pour tenter de récréer le lien perdu avec le peuple et sa jeunesse. Ce qui, à ce stade, est loin d’être gagné. « La décision urgente à prendre par Macky Sall pour décrisper la situation et qui a certainement motivé la mobilisation exceptionnelle des jeunes lors de ce scrutin, est de renoncer définitivement à une 3ème candidature qu’on lui prête à tort ou à raison. Macky Sall doit clarifier la situation et préparer sa sortie. Se mettre au-dessus de la mêlée et s’inscrire dans une démarche non partisane est le meilleur moyen d’engager un dialogue franc, ouvert et désintéressé avec la jeunesse. Celle-ci sera plus à l’écoute de ses propositions dans une telle posture », recommande l’analyste Seybani Sougou. D’après lui, comme elle l’avait fait en 2000 pour Wade, la jeunesse sénégalaise, à travers le signal des locales, a envie de fermer la parenthèse Macky Sall qui s’est amorcée en 2021 et dont le terme est en 2024. Macky Sall, conseille-t-il, doit décrypter le message pour quitter le pouvoir en paix et de façon apaisée.
L’EUPHORIE NÉE DU SACRE DES LIONS POURRAIT ÊTRE UNE AUBAINE POUR MACKY SALL
Abdou Khadre Sanoko, sociologue et diplômé en sciences politiques, a braqué son regard sur le déferlement de la jeunesse lors du sacre et de l’accueil réservé aux lions
Dr Abdou Khadre Sanoko, sociologue et diplômé en sciences politiques, a braqué son regard sur le déferlement de la jeunesse lors du sacre et de l’accueil réservé aux « Lions ». Le socio-politologue considère que la jeunesse a exprimé sa désapprobation holistique par rapport à tout ce qui a trait à la manière de gouverner d’un régime et d’une coalition qui s’appelle « Benno Bokk Yaakaar ». Commentant les résultats des élections territoriales, il estime que c’est comme si la jeunesse sénégalaise avait beaucoup plus promu des valeurs et sanctionné des manquements, des mauvais comportements et des antivaleurs.
Le sociologue dit avoir constaté que les jeunes, affichant un culte du refus, ont plus promu des valeurs et une notion d’engagement lors des élections territoriales qu’autre chose. L’élection de Barthélémy Diaz à Dakar et de Dr Babacar Diop à Thiès attesterait cela, à en croire Sanoko. Ils ont primé le goût de l’honneur, dérivant d’une croyance profonde à des principes et des valeurs. Cette consécration est née probablement de la fidélité de certains à Khalifa Ababacar Sall, leader de « Takhawou Dakar ». Une fidélité basée sur des idéaux. C’est cela, dit-il, qui aurait donné des résultats à Yoff, Dakar etc.
Ainsi, le sociologue a relevé le fait que les jeunes ont voulu sanctionner l’arrogance de Moussa Sy aux Parcelles Assainies et le nombrilisme d’Oumar Guèye à Sangalkam. « Ce n’est pas seulement la gouvernance de Macky Sall qui a été sanctionnée. Ils se sont attaqués à son système. Fondamentalement, les jeunes ont été très nombreux sur les listes. Et ce n’est pas seulement à Dakar. Mais aussi, dans les grandes villes telles que Thiès, Diourbel, Ziguinchor etc. Partout, dans les grandes villes, ils ont donné un signal fort au gouvernement de Macky Sall », insiste-til. Selon notre interlocuteur, toutefois, la victoire des « Lions » à la 33e Can a permis à Macky Sall de rétrécir le fossé qui le séparait de cette jeunesse. Aussi, devrait-il profiter de l’accueil des Lions pour matérialiser ce gain en termes d’images politiques. « Le destin a fini de sourire à Macky Sall. Avant le sacre des « Lions », il était loin derrière les leaders de « Yewwi Askan Wi ». Mais cette victoire lui a permis de recapitaliser ce qu’il avait perdu auparavant. S’il pouvait exploiter cette opportunité, il y gagnerait beaucoup », suggère Dr Abdou Khadre Sanoko.
Crise de confiance entre Macky Sall et la jeunesse
Le sociologue évoque une grave crise de confiance entre Macky Sall et la jeunesse. A l’en croire, les jeunes ont comme l’impression que leurs préoccupations ne sont pas prises en compte dans les programmes macro-économiques du pays. Leur espoir est un peu trahi. Les élections locales, soutientil, ont été une aubaine pour les jeunes afin de donner à Macky Sall un signal fort. « On aurait organisé ces derniers temps des marches, personne n’allait sortir. Mais c’est à lui de profiter de l’occasion. Hélas, nous constatons que les présidents africains n’ont pas l’habitude de reconnaître leurs défaillances et manquements. Ils doivent pourtant faire tout pour régler les problèmes des populations », exhorte-t-il. D’après le socio-politologue, il ne s’agit pas de résoudre tous les problèmes. Mais d’essayer d’apporter des réponses aux plus prégnants d’entre ceux-ci. Il reste d’avis que le président Sall devrait essayer de faire des efforts dans le discours et les méthodes et, surtout, faire le toilettage. « Tant qu’on s’attaque à la problématique, cela donnerait aux jeunes l’impression que les choses sont en train de bouger. Les Sénégalais s’agrippent plus à l’aspect qualitatif qu’à l’aspect quantitatif. Ils maîtrisent les rouages de la débrouillardise. Ce qui pose problème, c’est quand on a l’impression d’être nargués, que nous avons élu des gens qui n’ont aucune considération pour le peuple », regrette-t-il. Sur ce point, Abdou Khadre Sanoko estime que cette euphorie, née du sacre des « Lions », pourrait être une aubaine pour Macky Sall. Il devrait pouvoir rétablir la confiance avec sa jeunesse. Le changement de paradigme à ce niveau pourrait aider à résorber le gap de confiance, à créer la stabilité et encourager la frange juvénile à participer à l’effort de développement.
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L'ATTENTE AUTOUR DU PROCHAIN PREMIER MINISTRE À LA UNE DE LA REVUE DE L'ACTUALITE DE CE JEUDI SUR ZIK FM
Les titres parus ce jour abordent essentiellement les tergiversations du président Macky Sall à nommer son futur Premier ministre