La décision française de suspendre les opérations conjointes avec l'armée malienne impacte sévèrement les déjà faibles capacités d'un partenaire crucial dans la lutte antijihadiste, avec l'objectif d'obtenir des engagements solides de leurs dirigeants, disent les analystes.
Dans les brousses du Nord et du centre du Mali, les soldats français de l'opération Barkhane, qui a pris en 2014 la relève de Serval déployée l'année précédente, opéraient jusqu'alors dans une large mesure main dans la main avec les soldats maliens.
C'était le cas en particulier lors d'opérations de plusieurs semaines engageant des milliers d'hommes, de Barkhane, de l'armée malienne ou de l'armée nationale selon le théâtre, et de la force régionale du G5 Sahel, contre les groupes armés affiliés à Al-Qaïda ou à l'organisation Etat islamique.
Ces opérations ne se traduisaient pas forcément par de lourdes pertes dans les rangs jihadistes.Mais elles permettaient de "mettre un coup de pied dans la fourmilière et de désorganiser l'ennemi qui doit bouger et prête alors le flanc" à des actions ciblées, explique une source militaire malienne.
La coopération allait bien au-delà, avec le soutien aérien à une armée malienne cruellement dépourvue, l'échange de renseignement et l'entraînement et le conseil, avec l'objectif constamment rappelé par Paris de faire monter en puissance l'armée malienne pour qu'elle puisse assumer seule la sécurité du pays.
Depuis jeudi soir, de grande lignes de cette coopération sont remises en cause, pour la première fois de manière aussi nette en huit années de collaboration.
- large dépendance -
Dix jours après un deuxième putsch en neuf mois, qui a fait du colonel Assimi Goïta le chef de cet Etat crucial pour la stabilité au Sahel, Paris a annoncé jeudi soir suspendre les opérations conjointes avec les forces maliennes.
Concrètement, les soldats de Barkhane "ne sortent plus de leurs bases" dans le Nord du Mali, dit un diplomate français à Bamako.
Les activités de la Task Force Takuba, composée d'unités de forces spéciales européennes et censée aider l'armée malienne à s'aguerrir, sont suspendues, a indiqué à l'AFP l'état-major français.Idem pour la coopération avec les éléments maliens de la force du G5 Sahel, et les actions de formation des soldats maliens, au tir ou à la lutte contre les mines artisanales.
Les soldats maliens, notoirement mal formés et mal équipés, dépendent largement des partenaires du Mali pour tenir des camps isolés dans un vaste pays.Des centaines d'entre eux ont été tués dans les offensives éclairs des jihadistes.
Au quotidien, le soutien français se traduit, dans les domaines logistique, par l'escorte aux relèves ou l'approvisionnement en eau, et militaire, par l'appui lors d'attaques et l'évacuation des blessés.
Sans la France, les opérations maliennes seront vraisemblablement "extrêmement réduites: protection de base, patrouilles en périphérie immédiate des camps, convoi logistique", dit Raphaël Bernard, ancien officier de Barkhane, "ils savent que c'est compliqué de manœuvrer contre les GAT (groupes armés terroristes) loin de leurs bases sans Barkhane ou Takuba".
- groupes insurrectionnels renforcés?-
En décembre, les soldats du camp isolé de Boulkessi avaient sollicité l'appui terrestre et aérien de Barkhane afin d'être relevés.
Dorénavant, ce soutien ne sera plus automatique et le soutien français dans des circonstances particulières sera examiné au cas par cas, dit un responsable français sous le couvert de l'anonymat.
Les mesures sont "temporaires" dans l'attente de "garanties" de la part des colonels maliens qu'ils rendront le pouvoir aux civils après des élections prévues en février 2022, a dit le ministère français des Armées.
Le chercheur malien Boubacar Ba envisage que, dans le camp des jihadistes, l'espace ouvert "donne des ailes aux groupes insurrectionnels qui se sentiraient renforcés par les différentes crises répétitives à Bamako et un éventuel abandon temporaire ou définitif de l'appui des forces Barkhane et Takuba".
L'hypothèse d'un retrait définitif de la France paraît pour l'heure "improbable", estime un ancien haut fonctionnaire retraité malien pour qui "l'annonce française est un message clair et direct" à l'adresse des militaires maliens pour obtenir des garanties.
Celles-ci, avance un chercheur sous couvert d'anonymat, pourraient porter autant sur la nomination d'un Premier ministre civil, qui semble acquise, que sur les décisions politiques bamakoises.
Les Français chercheraient à faire "pression pour que soit mis un terme à tout processus de négociation avec les jihadistes" et pour que la nomination pressentie de Choguel Kokalla Maïga au poste de Premier ministre "ne signifie pas le retour de (l'imam) Dicko", dit-il.
Mahmoud Dicko, imam au coeur de la lutte contre l'ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, n'a jamais caché sa volonté d'engager un dialogue avec les jihadistes pour le retour de la stabilité au Mali. MM.Maïga et Dicko sont réputés proches.
"L'annonce française pourrait permettre de clarifier les choses", d'un côté comme de l'autre sur "les réelles volontés de chacun", dit le haut fonctionnaire retraité.
par l'éditorialiste de seneplus, demba ndiaye
MALI, L’INSUPPORTABLE CHANTAGE FRANÇAIS
EXCLUSIF SENEPLUS - Les récentes sorties de Macron sur le Mali apparaissent pour ce qu’elles sont : les rapports modernes du maître et de l’esclave. Une preuve des chimères de la souveraineté des États africains
Les sorties du président français, Emmanuel Macron, notamment la dernière contre le Mali, apparaissent pour ce qu’elles sont : les rapports modernes du maître et de l’esclave. Une preuve irréfutable des chimères de la « souveraineté » des États africains. De l’absence de souveraineté malgré les hoquets ridicules de nos gouvernants à l’occasion.
« Des exigences et des lignes rouges ont été posées », murmure la CEDEAO vite reprise par le gouvernement français qui, on le subodore du reste, est derrière toutes les décisions et résolutions des « machins » africains que sont la CEDEAO et l’UA dans des situations pareilles. Le président français a donc la caution africaine (nègre), pour brandir le glaive, le sabre, de la soumission, de la dépendance. « Il revient aux autorités maliennes d’y répondre » sous peine de voir la France « suspendre, à titre conservatoire et temporaire, les opérations militaires conjointes avec les forces maliennes ainsi que les missions nationales de conseil à leur profit ».
Le locataire de l’Élysée se souvenant occasionnellement que son pays fut il y a une éternité, le pays de la Déclaration des droits de l’homme, «veut clairement exiger une transition inclusive qui doit s’achever dans neuf mois » et reste intransigeant quant au « caractère républicain de l’État malien ».
Évidemment, dans cette politique d’asservissement, les autorités françaises savent pouvoir compter sur leurs bras armés idéologiques : RFI et France 24. Surtout RFI qui de plus en plus se comporte comme l’infecte « radio des mille collines » rwandaise. À la différence qu’ici, au lieu d’appeler au meurtre, on appelle les peuples africains à se soumettre aux choix de Paris pour nos dirigeants, au nombre de mandats à faire, aux coups d’État acceptables et imposés, à ceux inacceptables aux yeux de la France. Pour ce faire, on lance sur les dirigeants l’artillerie lourde médiatique à longueur « d’éditions spéciales », d’« invités » et autres « Appels aux auditeurs ».
Mais en fait, la France et Macron ne sont aucunement responsables de la soumission et de l’asservissement volontaires de nos dirigeants. Il ne faut pas se tromper de cible encore moins d’adversaire : l’ennemi des peuples africains est intérieur d’abord, et seulement après, soutenu, entretenu, garrotté, par « Paris ». Parce que tout de même, ce sont les dirigeants africains qui sous-traitent la sécurité et l’intégrité de leur pays à l’ex-(toujours) puissance coloniale. Parce qu’à y regarder de près, on se rend compte que nos armées ont été formées principalement pour des guerres intérieures, contre leurs peuples. Au service des d’intrigues politiques : les coups d’État !
Oui, malgré la sainte colère qu’on peut nourrir contre les injonctions humiliantes des autorités françaises en direction de nos dirigeants, il est clair que ces derniers sont les principaux responsables. Il ne faut donc pas se tromper de cible.
Il me semble que les vrais panafricanistes, les vrais « souverainistes » sont ceux qui veulent que l’Afrique défende l’Afrique, qu’elle ne sous-traite plus sa sécurité ; qu’elle professionnalise ses armées pour faire face à toutes les menaces, que les ressources africaines servent d’abord aux peuples africains ; qu’il n’y ait plus de « précarrés » et autres « dépendances privilégiées » ; que les dettes ne soient plus des chaînes d’esclaves, que ceux qui les détournent paient pénalement et pécuniairement.
Oui, c’est insupportable de voir nos chefs d’État continuer à demeurer les "toutous" de Paris ; que le continent reste soixante ans après, le énième département de la France ; que nos régimes politiques, nos futurs dirigeants, soient le fait du choix de la France. Que ses médias, notamment « sa voix », RFI soit le média préféré de nos dirigeants.
Bref, y’en a marre de cette soumission volontaire de nos dirigeants, voire de la grande majorité de nos élites politiques et/ou intellectuelles.Mais répétons-le pour les gens de mauvaise foi et autres répondeurs automatiques : Il ne s’agit pas de la France comme pays et des Français comme peuple, mais bien de l’impérialisme français ; de la mainmise du capital français sur nos économies ; du chantage de la présence (ou non) militaire française au Mali ou ailleurs. Parce qu’on n’a quand même pas oublié la responsabilité de l’État français dans le dynamitage de l’État libyen et l’assassinat de Kadhafi. De l’implosion de l’Irak suite aux mensonges éhontés des Américains sur l’existence d’armes chimiques dans ce pays.
Oui, vous avez dynamité toutes les digues qui retenaient les illuminés de la terre. Vous avez permis que se répandent les mouvements obscurantistes, haineux et violents dans les pays fragiles. Et par ricochets, dans vos capitales. Voilà pourquoi vous êtes au Mali et au Sahel. Vous n’avez rien à cirer de la démocratie en Afrique. Vos intérêts et votre sécurité intérieure d’abord. Et surtout.
A cause d’une urbanisation galopante, l’eau devient de plus en plus rare dans les Niayes et dans le département de Rufisque, menaçant l’agriculture familiale, dans ce bastion de l’horticulture au Sénégal
A cause d’une urbanisation galopante, l’eau devient de plus en plus rare dans les Niayes et dans le département de Rufisque, menaçant l’agriculture familiale, dans ce bastion de l’horticulture au Sénégal. C’était l’objet, le 1er juin dernier, des dialogues Cicodev autour de la politique de l’eau productive dans les Niayes.
Le grenier se vide. A cause de la raréfaction de l’eau et du foncier, ils sont nombreux les maraichers, établis dans la zone des Niayes, à abandonner leur activité principale. Laquelle, pendant longtemps, a constitué leur principale source de revenus. Pour renverser cette tendance, particulièrement dans le département de Rufisque, l’Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement a mobilisé, hier, les acteurs, publics comme privés, dans le cadre de la restitution, à travers les Dialogues Cicodev, d’une étude relative à la problématique de l’eau productive. Pour le directeur exécutif de l’organisation, l’enjeu fondamental de cette étude, c’est de trouver le juste équilibre entre le développement industriel et la vocation agricole de la zone.
Amadou Kanouté : ‘’Il est fondamental d’avoir une politique claire en matière de gestion de l’eau pour répondre de façon adéquate aux usages multiples de cette ressource par les populations. C’est justement l’objet de ces présents travaux qui permettent de réunir toutes les parties prenantes, d’échanger et de trouver des solutions consensuelles qui vont servir de bréviaire dans le cadre du plaidoyer’’.
L’eau se raréfie dans le département de Rufisque
Chez les ruraux, les propos sont unanimes. L’eau se raréfie de plus en plus dans le département de Rufisque qui concentre l’essentiel des terres agricoles de Dakar, avec sa superficie représentant 2/3 de la région. Agé de plus de 70 ans, Ddoudou Diop revient sur la lancinante question de la disponibilité et de l’accessibilité de l’eau dans la zone des Niayes. Il peste : ‘’Nous sommes fatigués. Avant, l’eau était juste à la surface. Par la suite, on a commencé à avoir des puits en ciment pour y accéder, mais, il suffisait de creuser entre 4 et 6 mètres. Mais de nos jours, on peut creuser jusqu’à 16 mètres sans trouver de l’eau. Ceux qui ont les moyens arrivent à mettre en place des forages, mais pour les petits producteurs des périmètres familiaux, c’est impossible. C’est une situation difficile et il faut y remédier’’.
Selon le sexagénaire qui vient de Mbawane dans la commune de Cayar, beaucoup d’agriculteurs ont ainsi abandonné leurs champs pour s’adonner à d’autres activités, à cause notamment de ce phénomène.
Dans la zone des niayes, l’eau n’est pas que rare. Quand elle est accessible pour certains, il y a son coût qui le rend hors de portée de certains producteurs. En effet, avec le recul de la nappe phréatique, les petits producteurs qui n’ont pas les moyens d’installer leurs propres forages ont recours aux installations de la SONES, mais le cout est jugé exorbitant et les quotas très minimes par rapport à leurs besoins. ‘’Les agriculteurs, soutient Monsieur Diop, peinent à accéder à ces installations. Avant, dans notre zone, il y avait plus de 300 membres qui avaient leur compteur. Après, parce qu’ils avaient des difficultés à honorer leurs factures, on a enlevé ces compteurs. Aujourd’hui, il y a juste 45 producteurs qui ont des compteurs. Il faut que l’Etat aide les petits agriculteurs à accéder aux branchements et à rendre supportable le coût’’.
Abondant dans le même sens, Serigne Mbacké Tine rouspète : ‘’Nous rencontrons beaucoup de difficultés. Nous peinons à arroser correctement nos surfaces, parce qu’on est limité par les quotas. Lesquels sont décidés par les services du ministère de l’Hydraulique. Nous avons assez de surfaces cultivables, mais on n’a pas de l’eau. Je pense qu’il faut que les forages de Beer Thialane et de Thiaroye soient carrément consacrés au maraichage’’. Et d’ajouter : ‘’L’eau est excessivement cher. Plus on consomme, plus le prix est cher. Et cela se répercute sur la compétitivité de nos produits. Des pays limitrophes et le Maroc nous concurrencent sérieusement, parce que l’eau y est beaucoup moins cher ; parfois même gratuit. Or, nous avons tous les atouts. Nous avons l’eau, nous avons un bon climat. On devrait être plus qu’autosuffisant en fruits et légumes. Mais les producteurs ne sont pas suffisamment soutenus’’.
L’abandon des petits producteurs profite aux spéculateurs fonciers
Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, l’abandon des petits producteurs de leurs périmètres profite surtout aux spéculateurs fonciers, aux conseils municipaux, entre autres. C’est le constat de Doudou Diop qui ne met pas de gants pour interpeller les maires et ceux qu’il désigne par ‘’les agriculteurs du dimanche’’. ‘’Ils sont toujours à l’affut et ils ont les moyens. Souvent ces agriculteurs qui n’ont plus les moyens de produire leur cèdent leurs champs, parfois à vils prix. Parfois, ce sont les maires qui reprennent les terres pour les morceler. Ce qui fait que l’activité agricole perd de plus en plus du terrain dans la zone des niayes’’.
Dans la même veine, Serigne Mbacké Tine rouspète également contre la boulimie de certains élus. Il déclare : ‘’Je pense qu’il urge de prendre des mesures dans la zones des Niayes, pour sauvegarder les terres agricoles. Il faut que l’Etat prenne ses responsabilités et arrête les maires qui font des lotissements à tort et à travers. Les zones agricoles, il faut les laisser aux activités agricoles. Cela doit être clair’’.
Gorgui Ciss, maire de Yenne : ‘’Il faut trouver le juste milieu’’
Accusés, les maires ne manquent pas d’arguments pour se défendre. Représentant le Conseil départemental de Rufisque à la cérémonie, Gorgui Ciss, par ailleurs maire de Yenne, rejette et soulève la responsabilité des producteurs. Il dit : ‘’Il faut noter que la plupart des terres dont vous parlez, ce sont les populations elles-mêmes, les agriculteurs notamment, qui font des morcellements et qui décident de les céder. La plupart des élus ne font que régulariser des situations de fait qui existent sur le terrain’’.
Aussi, soutient l’édile de Yenne, il y a aussi que la terre est une ressource non renouvelable non extensible ; alors que la population, elle, augmente sans cesse et a besoin de terrains à usage d’habitation. ‘’Et comme vous le savez, la superficie de la région de Dakar fait moins d’1% de la superficie du Sénégal. Et Rufisque constitue 2/3 de cette superficie. C’est pourquoi, il constitue le seul lieu d’accueil de la forte demande de parcelles à usage d’habitation. Il faut donc trouver le juste équilibre entre cette nécessité de satisfaire les demandes en logements et celle de préserver l’agriculture familiale au niveau des espaces dédiés’’.
Selon les participants, cette question est vitale pour l’agriculture familiale dans la zone des Niayes et particulièrement dans le département de Rufisque. Jusque-là, l’urbanisation a tendance à prendre le dessus sur l’agriculture. Et l’exemple le plus éloquent, c’est l’activité principale de reconversion pour nombre de désormais anciens agriculteurs. En effet, il résulte de l’étude que beaucoup de personnes qui cèdent leurs champs se reconvertissent dans la vente de matériaux de construction.
34 ARTISTES REPONDENT A L’APPEL «AUTREMENT»
La 13e édition du festival «Gorée Regards sur cours», est ouverte vendredi au centre socioculturel, Boubacar Joseph Ndiaye, en présence des autorités municipales de l’île, des artistes, en partenaires de l’Institut Français au Sénégal
La 13e édition du festival «Gorée Regards sur cours», ouverte vendredi au centre socioculturel, Boubacar Joseph Ndiaye, en présence des autorités municipales de l’île, des artistes, en partenaires de l’Institut Français au Sénégal, s’est articulée autour du thème : «Gorée autrement.»
Cette édition de Gorée Regards sur cours est différente des précédentes. Cette année, les organisateurs ont opté pour moins d’artistes qu’- habituellement en raison de la situation sanitaire. «On a visé cette année les artistes du Sénégal et de la sous-région pour qu’il n’y ait pas de soucis au niveau des arrivées», a expliqué Marina Ricou, présidente de l’association Gorée regards sur cours qui compte désormais parmi les évènements artistiques majeurs du Sénégal. Tout en restant fidèle à sa tradition, Gorée Regards sur cours était placée cette année sous le thème : «Gorée autrement.» Développant les grandes lignes de cette manifestation culturelle initiée depuis 2003, Marina Ricou affirme que le thème de cette 13e édition est vu sur un autre angle, qui est celui du 19e siècle. «Cet évènement amène les artistes à Gorée pour voir l’Ile sous un autre angle qui est l’angle du 19e siècle avec des festivités et un regard un peu plus joyeux. Et cette année, le thème c’est Gorée autrement, parce que, suite au Covid-19, l’année dernière tout avait été arrêté. La Biennale avait été aussi annulée. Et, on s’est dit que si cette année, on ne faisait rien, ça va nous reporter en 2023. Alors, on a monté tout ça en moins de 3 mois, ce qui est un record parce que d’habitude, on met 2 ans.» Durant ces trois jours (les 28, 29 et 30 mai 2021), une atmosphère festive a régné sur l’île, avec des fanfares, des acrobates et des animations tandis que des centaines de visiteurs parcouraient les ruelles à la découverte des cours de maisons où sont exposées les œuvres des artistes sélectionnés. «Cette année, j’ai invité 34 artistes pour cette 13e édition. Des jeunes qui n’ont jamais exposé à Regards sur cours, fraîchement sortis de l’école des arts», a-t-elle indiqué.
Pour sa treizième édition, Gorée s’est enrichie avec des partenariats dont l’Institut Français. Au-delà des expositions qu’il a présentées, le programme comprenait aussi une soirée Jésus Was Black, soirée des étoiles et une invitation au voyage par la chorale Petit Keur de l’Eglise Saint-Charles. Parmi les têtes d’affiche de cet évènement de renommée internationale, Djibril Dramé, artiste visuel, photographe, graffeur, Henry Sagna et bien d’autres jeunes artistes : Fatou Mandoye Mbengue, Amy Celestina Ndione et Aïssatou Ciss. «Pour la première fois, l’Institut Français a décidé de faire 2 choses en parallèle. La première, c’était la restitution de l’atelier de céramique qu’on a menée avec les jeunes filles de la Maison d’éducation de Mariama Ba organisé par le Ban Workshop (Ban qui signifie argile en Wolof). Et ensuite, on a monté une exposition ici dans la salle du centre socioculturel, Boubacar Joseph Ndiaye, avec le photographe sénégalais Djibril Dramé», a souligné Olivia Marsaud, directrice de la Galerie Le Manège et responsable Arts visuels de l’Institut Français du Sénégal.
«Dans les pas d’un Jésus Noir»
Djibril Dramé a passé plusieurs années à Los Angeles. Voilà pourquoi la langue anglaise sonne souvent dans les titres de ses séries photographiques. C’est le cas avec «Jésus was Black». Les Rastafaris, en pleine Jamaïque coloniale, dessinent le visage de Dieu, le représentent noir «Négus Christ» et font allégeance à l’Empereur d’Ethiopie. Un acte d’émancipation et de création, qui se retrouve ici, dans ce travail photographique de Djibril Dramé, a fait savoir Olivier Marsaud. Et d’ajouter que «le titre, Jésus était noir, et non pas Jésus est noir, sousentend qu’il est devenu blanc. En absence de descriptions et de représentations précises, la figure d’un Jésus blanc est une construction culturelle et historique». «Je me suis dit, c’est vrai, il se peut que Jésus ait été noir. J’ai voulu montrer, à travers cette figure sacrée, comment l’homme noir a été mis à l’écart et oublié de l’histoire», explique Djibril Dramé. Poursuivant ses propos, il précise : «Mes modèles, je les ai choisis grâce à la lumière que j’ai vue en eux. Je suis quelqu’un de très spirituel. Tous les quatre photos sont noires mais viennent d’environnements très différents. Yashua Shalom est américain mais pour moi, il ressemble à un Sénégalais. Il est venu en vacances au Sénégal et n’est jamais reparti. Baye Ndiaga Diouf vient de la banlieue de Diameguène Sicap Mbao qui est l’endroit où moimême, j’ai grandi, et où je me suis forgé. Fallou est né à New York et il est venu s’installer à Dakar. Un retour aux sources pour lui. Et Ibrahima est un jeune photographe de Thiès qui est souvent mon assistant sur des projets commerciaux. Sa principale qualité est d’être un olympien», a détaillé M. Dramé. Pas question, pour ce dernier, d’être dans la provocation. «J’ai habillé ces différents corps noirs du même vêtement léger, celui d’un berger, d’un homme aux semelles de vent, qui respecte la nature et ses semblables. C’est un marchand d’humanité et de partage, mais surtout de paix. La recherche de cette paix est au centre d’une grande partie de mon travail», dit-il. Les photographies respirent la quiétude mais aussi la détermination dans les regards. Peu d’éléments extérieurs troublent la neutralité des paysages, sauf sur celui où un bidon plastique rappelle l’humanité à la réalité. «Sur cette image, j’ai choisi de positionner Ibrahima en Messie pour la protection de notre bien commun, le littoral.» Pour le reste des photos accrochées au mur, les hommes semblent flotter au cœur des éléments : l’air, la terre et bien sûr, l’eau.
«A Gorée, c’est l’union qui fait la force»
Parallèlement à ses travaux qui répondent, selon elle, au thème de cette année, Aïssatou Ciss, 28 ans, photographe, présente 4 photos qui se complètent. «La première photo parle un peu de cet avis qu’on peut avoir dans la vie, les questions qui se posent, l’identité, la liberté. Il y a Ramadan, qui est un portrait qui raconte un peu l’histoire d’un garçon qui vit une présence et une absence.» Après, on a L’identité mondiale qui parle un peu du Covid car, ici à Gorée, c’est une petite communauté. Donc le Covid était un peu le moment pour les gens de se réunir et se soutenir mutuellement. Enfin, on a Résistance, un thème sur le Covid qui s’inscrit sur la même série qu’identité mondiale, raconte-t-elle. Elle a décidé de mettre son art au service de sa communauté. «A Gorée, l’union fait la force. Donc j’ai voulu montrer ce côté», a-t-elle ajouté.
«Relation entre l’homme et la nature»
De l’autre côté, Fatou Mandoye Mbengue, issue de la promotion 1998 de l’Ecole nationale des beaux-arts de Dakar, est native de Bargny. Bouleversée par des moments difficiles de son existence, elle s’est lancée dans l’art. «Dès mon plus jeune âge, je me suis passionnée pour les dessins, les couleurs et la nature. Mon travail consiste à faire des séries de bain pour créer une relation entre l’homme et la nature. Alors, j’ai décidé de transformer ces tourbillons en œuvres d’art.»
Par Oumar MBOUP
L’HOMOSEXUALITE, QUESTION DE LIBERTE ET QUESTION D’INTERDICTION AU SENEGAL ?
Il n’est pas sans doute inutile de rappeler, comme le dit Paul Valéry, que «la liberté, c’est un de ces détestables mots qui ont plus de valeur que de sens, qui chantent plus qu’ils ne parlent».
Il n’est pas sans doute inutile de rappeler, comme le dit Paul Valéry, que «la liberté, c’est un de ces détestables mots qui ont plus de valeur que de sens, qui chantent plus qu’ils ne parlent». S’il en est ainsi, et je pense qu’il en est ainsi, c’est parce que la liberté est un concept qui fascine, subjugue et fait recette.
Le pauvre, le riche, le religieux, l’athée, bref tout être humain réclame sa liberté, simplement parce qu’il ne peut pas être sans être libre. Ou plus exactement, l’humain n’est vraiment humain qu’à condition qu’il soit libre, libre de penser, libre de s’exprimer, libre de circuler et libre de choisir son avenir. Les considérations qui précèdent soulignent que la notion de liberté s’oppose à l’esclavage, à la servitude et à tout acte ou toute parole qui attentent à l’intégrité physique et morale de l’individu.
C’est en cela que le mot liberté (du latin liber, «celui qui n’est pas esclave») semble d’abord se définir par opposition à l’idée de «contrainte» et de «servitude». Et je ne prétends pas qu’il soit possible de vivre la liberté telle que l’exprime son sens étymologique, du seul fait qu’elle laisse entendre ceci : faire tout ce que l’on veut, quand on le veut et où on le veut. Une telle liberté ferait face aux libertés. Et ce face-àface occasionnera un conflit permanent, un état de guerre de tous contre tous (Hobbes). Une fois que l’on a dit cela qui répond à la fois à un ordre définitionnel et humain, pris ici au sens générique du terme, l’on peut se demander si la liberté, en tant que donnée caractérisant l’homme, est une illusion sous nos cieux. Pour le dire autrement, on en est où avec la question de la liberté humaine au Sénégal ?
Si ces questions se posent, c’est parce qu’elles s’imposent, surtout dans un Sénégal où la question de l’homosexualité est devenue aporétique, donc irrésolue. Mieux, elle suscite un débat sans cesse rebondissant sur fond d’une menace, d’une violence envers une minorité d’individus vivant au Sénégal et appartenant à la communauté sénégalaise. Notre intention, on peut l’énoncer dès le départ, n’est pas de faire l’apologie de l’homosexualité, encore moins de rejeter la thèse admise par la majorité des Sénégalais, qui est celle de refuser la légalisation de celle-ci. Il s’agit, pour notre part, de nous demander s’il faut réprimander, condamner avec violence et lancer une fatwa contre des homosexuels.
On ne cessera de le dire, nos valeurs culturelles et religieuses ne sont pas compatibles avec une telle pratique. Pour cette raison, la promotion de l’homosexualité est formellement interdite au Sénégal. Il n’est toléré à aucun Sénégalais de pratiquer l’homosexualité, estime-t-on, parce qu’elle souillera notre pays et détournera les jeunes vers la débauche. Mais ce qui est en jeu ici, c’est qu’en condamnant l’homosexualité, on condamne la liberté, ou du moins des libertés. N’est-ce pas que la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas aux autres ? Ne sommes-nous pas en train de refuser la liberté aux autres, et ceci au nom de notre liberté ? Tout porte à le croire, d’autant plus qu’évoquer l’homosexualité ou la prononcer est signe de transgression de nos valeurs culturelles et religieuses.
Certainement, celles-ci sont parvenues à leur aboutissement, à leur plus haut degré de perfection. Il n’est pas inutile de rappeler ici que nous ne sommes pas prisonniers de nos valeurs, nous en sommes plutôt les acteurs. Or se perdre dans ses valeurs, c’est s’aliéner, s’oublier ou plus précisément se dégrader, voire désintégrer sa personne. Levons une contradiction tout de suite : on ne peut pas, au nom de valeurs humaines, condamner des humains.
Toute valeur est certes relative, elle correspond de ce fait aux réalités culturelles d’un pays, d’une communauté et d’une société, mais elle ne peut être dirigée contre un être humain. L’emploi du terme être humain, à la place de l’homosexuel, recouvre ici un sens fondamental, car ce que l’on ne peut enlever chez l’homme, c’est son appartenance à l’humanité : ce éidos, dont parle Husserl, une fois que l’on aura procédé à une réduction eidétique, dépouillé l’être de tout ce qui en lui ne l’empêcherait pas d’être humain, c’est-à-dire son nom, sa religion, sa culture, son identité etc. De cette dernière remarque s’ensuit nécessairement qu’on ne saurait sortir hors de notre humanité une personne quelle qu’elle soit. Condamnons tout ce qui est contraire à notre humanité : racisme, xénophobie, esclavage, génocide, violence, barbarie…
De tout cela, il est nécessaire de prendre pleinement conscience que ce n’est pas par la violence ou par le mépris que nous arriverons à dépasser le débat sur l’homosexualité, parce qu’il y a des Sénégalais, de vrais Sénégalais qui la vivent et la pratiquent. De ce fait, notre posture ne devrait pas être de les bannir, parce que ce faisant, nous bannissons une partie de nous-mêmes. Or une telle démarche ne me paraît pas être pertinente. L’on devrait poser les bonnes questions, avoir une bonne démarche, si l’on ne veut pas sacrifier le peu qui nous reste de la liberté. Le Sénégal ne doit pas être un tombeau des libertés. On doit réguler, organiser et introduire de la cohérence dans tout ce qui semble bousculer nos valeurs culturelles et religieuses.
Dire non à l’homosexualité ne doit pas signifier dire non à l’humanité des autres, parce que personne n’aimerait qu’on lui ôte la sienne. On peut conclure par ces mots : ce n’est pas aujourd’hui que la question de l’homosexualité sera définitivement résolue au Sénégal, simplement elle est une question de liberté, et comme telle, on l’avait dit au départ en évoquant Paul Valéry, elle est un de ces détestables mots qui ont plus de valeur que de sens, qui chantent plus qu’il ne parle. Bien vrai que le rêve secret de tout Sénégalais est de mettre fin à ce débat, sous l’impulsion sans doute d’un instinct de mort (je pastiche G. Gusdorf), mais soyons-en conscients, nous ne sommes pas encore parvenus à son épilogue.
Oumar MBOUP
Professeur de Philosophie au lycée scientifique d’excellence de Diourbel
MENDY ET KOULIBALY DANS LE ONZE-TYPE DE FRANCE FOOTBALL
Le grand magazine français, France Football, a dévoilé ce jeudi 3 mai, son onze-type des meilleurs joueurs africains de la saison 2020/2021. Le Sénégal est bien représenté par deux internationaux.
Le grand magazine français, France Football, a dévoilé ce jeudi 3 mai, son onze-type des meilleurs joueurs africains de la saison 2020/2021. Le Sénégal est bien représenté par deux internationaux.
L’un d’entre eux a eu l’opportunité de montrer au monde entier son brillantissime talent notamment en Ligue des Champions, pour l’autre ce n’est qu’une habitude.
En effet, Edouard Mendy, arrivé à l’intersaison à Chelsea pour 25 M d’euros en provenance de Rennes, s’était illustré tout au long de la saison avec Chelsea. Le portier international sénégalais de 29 ans a fait des étoiles dans son club depuis son arrivée en provenance du Stade Rennais.
Durant cette saison, «Edou» a disputé 44 matchs (toutes compétitions confondues) sous le maillot de Chelsea, signé 25 clean-sheets et remporté par la même occasion la Ligue des Champions devant City de Mahrez et Guardiola.
Titulaire inamovible, puisqu’il s’est imposé devant Kepa sans bruit, il a multiplié les clean-sheets en Premier League. L’international sénégalais est du coup devenu le deuxième gardien africain sacré après le Zimbabwéen Bruce Grobelaar en 1984. Et il est un favori en puissance pour le titre de joueur africain de l’année. Quid de Kalidou Koulibaly ?
Même s’il a connu une saison assez mitigée sur le plan collectif avec notamment une élimination au stade des 16es de finale d’Europa League, le défenseur central de 29 ans, pisté par plusieurs écuries, fait généralement le bonheur du Napoli et se montre en leader d’effectif. Au cours de l’exercice 2020-2021, Koulibaly a disputé 37 matchs (toutes compétitions confondues) et inscrit un but.
MANE, UNE PREMIERE ABSENCE DEPUIS 4 ANS
S’il n’a pas remporté de titre avec le Napoli, le défenseur central sénégalais continue d’être l’une des valeurs sûres de la Serie A à son poste, à bientôt trente ans. Le moment est peut-être venu pour lui d’aller voir ailleurs, après sept saisons à Naples. A noter que Sadio Mané est le grand absent de ce onze.
Une première fois depuis quatre ans
Le onze-type France Football
Gardien : Edouard Mendy (SG, Chelsea).
Défenseurs : Reinildo (MOZ, Lille), Tapsoba (BFA, Leverkusen), Koulibaly (SG, Naples), Hakimi (MAR, Inter Milan).
Attaquants : Salah (EGY, Liverpool), En-Nesyri (MAR, Sevilla Fc), Mahrez (ALG, Manchester City)
«SABOTAGE» ET CRAINTE D’UNE «ANNEE BLANCHE», LE GOUVERNEMENT INDEXE
L‘intersyndicale des Personnels d’enseignants et de recherches, les personnels d’appui technique et de service et la Conférence des présidents d’amicales de l’Université Iba Der Thiam de Thiès ont décrété un plan d’actions commun.
Cheikh CAMARA, Correspondant permanent à Thiès |
Publication 04/06/2021
L’Intersyndicale (SAES, SUDES, STESU, SATUC), la Conférence des Présidents des Amicales d’étudiants et le personnel de l’Université Iba Der Thiam (UIDT) de Thiès, ont décrété, ce jeudi 3 juin 2021, une grève de 48 heures pour exiger l’accélération des travaux des chantiers à l’arrêt depuis plusieurs années et de meilleures conditions d’études et de travail. Les étudiants parlent de «sabotage», craignent une «année blanche» et indexent le « gouvernement ».
Du fait du « non-respect des engagements fermes pour la reprise et la livraison des chantiers dans les meilleurs délais », l‘intersyndicale des Personnels d’enseignants et de recherches, les personnels d’appui technique et de service et la Conférence des présidents d’amicales de l’Université Iba Der Thiam (Uidt) de Thiès ont décrété un plan d’actions commun. Une reprise des mouvements d’humeur survenue après un bref temps d’accalmie, donc un calme précaire, au campus de la Cité du Rail, avec la levée du mot d’ordre de la dernière grève par la communauté universitaire. Les grévistes, qui en ont ras-le-bol, expliquent qu’« à la suite de la récente forte mobilisation de la communauté, nous avions reçu, de la part des autorités, des engagements fermes pour la reprise et la livraison des chantiers dans les meilleurs délais.
Après un mois de suspension de notre plan d’actions, nous sommes au regret de constater que les engagements pris n’ont pas été respectés. Pire, de nouvelles propositions d’occupation des locaux en l’état nous sont faites, alors que le cahier des charges, qui a permis d’attribuer ce marché de construction, est loin d’être satisfait ». L‘intersyndicale des Personnels d’enseignants et de recherches, des personnels d’appui technique et de service et la Conférence des présidents d’amicales de l’Uidt de Thiès, qui se sont mobilisées pour un seul combat, « l’achèvement, la finition, l’équipement et la livraison sans délai des chantiers de l’Université de Thiès », tiennent les autorités pour « seules responsables de toutes les conséquences qui découleraient de la mise en œuvre de leur plan d’actions ». Et d’appeler « tous les camarades à la mobilisation pour la lutte autour de ce point essentiel à la survie de notre université ».
C’est face au mutisme de l’Etat devant leur plan d’actions pour réclamer l’achèvement desdits chantiers mis à l’arrêt depuis plusieurs années pour seulement une enveloppe de six milliards FCFA, que la communauté universitaire de Thiès se décide d’en découdre avec les autorités jusqu’à obtenir gain de cause.
Dr Mamadou Tandiang, secrétaire général du Saes au campus de l’université de Thiès, explique : « les étudiants nous parviennent des quatre coins du Sénégal, ils sont là et vivent dans des conditions déplorables par rapport à la vie sociale. Aussi sur le plan pédagogique, on a du mal à organiser les cours. Il y a des étudiants qui sont la depuis deux mois mais peinent à démarrer les enseignements. On a en assez de cette solution de colmatage, on ne plus fonctionner comme ca, il faut des actions concrètes ». La communauté universitaire de Thiès s’offusque du fait que « depuis sa création en 2007, le Campus de Thiès, qui, après Cheikh Anta Diop de Dakar, accueillent le plus d’étudiants, n’existe que de nom. L’UIDT est oubliée volontairement dans le programme de construction d’infrastructures universitaires. Elle manque de tout et doit être construite et équipée ».
Les étudiants font remarquer que « l’université de Thiès qui peine à prendre forme depuis 2007 parce qu’ayant un gros déficit d’infrastructures, est constituée d’environ une vingtaine de bâtiments en location éparpillés à travers les quatre coins de la cité du rail, ce qui coute à l’Etat et au Rectorat, au moins, plus d’une centaine de millions de FCFA par an. Prés de 40% du budget de l’université vont dans les payements d’immeubles ».
LE SAMES EN GREVE DE 24 HEURES POUR RECLAMER LA FIN DU CONTRAT AVEC POLIMED
Le fonctionnement de L’Eps 1 de Mbour a été sérieusement affecté hier par la grève de la section locale du SAMES.
Etienne Ndiaye (Correspondant permanent à Mbour) |
Publication 04/06/2021
Le fonctionnement de L’Eps 1 de Mbour a été sérieusement affecté hier par la grève de la section locale du SAMES. Après l’expiration le 30 mai dernier de leur préavis de grève, Dr Khoudoss Mama et ses camarades, appuyés par le niveau régional, sont passés à la vitesse supérieure dans ce conflit qui les oppose au centre d’imagerie médicale Polimed dont ils dénoncent la gestion « calamiteuse ». Le Sames local prévient que si la situation n’est pas décantée, il compte se radicaliser.
Hier, jeudi 3 juin, seules les urgences ont été prises en charge à l’Hôpital de Grand Mbour. Cette situation a entraîné beaucoup de difficultés pour les patients. En grève de 24 heures après l’expiration le 30 mai dernier de son préavis de grève, la section Sames locale dénonce vigoureusement la gestion du centre Polimed qui est lié à l’Eps 1 de Mbour depuis 2015 par une convention. En effet depuis un mois, le 30 avril 2021 plus exactement, les syndicalistes avaient déposé un préavis de grève auprès de la direction de l’Etablissement public de Mbour pour dénoncer la gestion « calamiteuse » du centre d’imagerie médicale Polimed, censée assurer depuis 2015 et ce jusqu’en 2022 toutes les prestations dans ladite spécialité, au terme d’un contrat liant les deux parties, mais regrettent les médecins, aucune avancée n’a été notée dans ce dossier depuis lors. « Devant l’absence d’avancées notoires et concrètes dans le règlement de ces problèmes, malgré des efforts et l’administration de l’EPS 1, le Sames observe 24h de grève ce jeudi 03 juin afin de dénoncer ces manquements et d’attirer l’attention des plus hautes autorités sur la souffrance qu’endurent les usagers, le personnel médical, paramédical et soutien de l’’EPS1 et la population générale à cause de Polimed » a martelé Docteur Khoudoss Mama, secrétaire général de la section locale du Sames.
«L’Eps 1 de Mbour ne peut pas continuer d’être la vache laitière de Polimed »
La section locale du Sames accuse en effet la direction du centre Polimed de «déchirer le contrat» qui le lie à l’hôpital. « Il était convenu que durant les sept (7) ans de contrat tout allait se passer à merveille, malheureusement, la direction de Polimed y a installé une cogestion de sorte qu’aujourd’hui, c’est un amateur qui gère le centre » a déploré Dr Khoudoss Mama, secrétaire général de la section. « L’Eps 1 de Mbour ne peut continuer d’être la vache laitière du centre Polimed qui foule du pied le cahier des charges », enchaîne Dr Mama.
D’ailleurs, dénonce Dr Abdou Karim Diop, la mammographie est en panne depuis belle lurette mais jusque-là, elle n’a pas été réparée. Ceci a causé un désagrément aux patients qui sont obligés d’aller jusqu’à Thiès ou Fatick pour bénéficier de ce type de service, mentionne-t-il. Le fait que « l’autorité du chef de service de la radiologie dont les prérogatives ont été usurpées par le gestionnaire sur un ordre écrit du président de Polimed soit bafouée causant ainsi un désordre dans l’organisation du travail au grand désarroi des malades et des médecins prescripteurs », a été vigoureusement dénoncé.
Pour les médecins, aussi bien les travailleurs que la population, souffrent. Ils rappellent qu’après le dépôt du préavis, la direction de l’Hôpital a tenté de résoudre la situation en s’adressant à la direction de Polimed mais cette dernière n’a fait signe d’aucune flexibilité. A cause de tous ces impairs, le bureau régional du SAMES venu en renfort, par la voix de son Secrétaire général Dr Malick Badiane, assène que si le dialogue n’est pas la voie de solution, le syndicat va hausser le ton car il n’est pas imaginable d’avoir un seul centre d’imagerie pour Mbour surtout lorsque le service rendu pose problème. «On ne peut pas prendre un gestionnaire qui va superviser des médecins, c’est impossible. Il n’est pas question que l’hôpital continue d’alimenter les fonds de Polimed. Le gestionnaire nommé par la direction du centre d’imagerie ne peut être un supérieur des médecins» fulmine Dr Badiane.
Pour le Sames, cette grève n’est qu’un signe d’avertissement car si la direction de Polimed ne fait pas marche arrière, ce combat sera un long feuilleton parce que « l’EPS ne peut pas continuer d’être la vache laitière du centre Polimed qui foule du pied le cahier des charges ».
AUX CÔTÉS DE DIAGNA, LA RÉPUBLIQUE COMPATISSANTE
Homme de réseaux, globe-trotter de luxe, ami des puissants qu’il tutoie, et aussi des humbles qu’il soulage par sa prodigalité, Mamadou Diagna Ndiaye compte. En témoigne l'élan de sympathie qui a déferlé vers lui depuis l’annonce du décès de son frère
Homme de réseaux — sans doute le Sénégalais le plus réseauté —homme du monde, globe-trotter de luxe, ami des puissants, qu’il tutoie, et aussi des humbles, qu’il soulage par sa prodigalité, Mamadou Diagna Ndiaye compte dans ce pays. Et à travers le monde. A preuve, s’il était encore besoin de le prouver, par l’extraordinaire élan de sympathie qui a déferlé vers lui depuis l’annonce du décès de son frère cadet, Souleymane.
Pour témoigner à l’homme Diagna Ndiaye leur compassion, tous les pans de notre pays — et aussi les représentations diplomatiques ! — se sont mis en branle. Œcuménique, rassembleur, mécène, philanthrope, médiateur, Diagna a des relations dans tous les milieux. Qui le lui ont bien rendu en la triste circonstance du décès de son jeune frère Jules, qui fut un cadre à la Lonase.
A tout seigneur tout honneur le Gouvernement, qui a dépêché à la levée du corps une très forte délégation dirigée par le ministre de l’Economie et du Plan, Amadou Hott, qui a prononcé un discours particulièrement émouvant au nom du président de la République.
A Saint-Louis où a eu lieu l’enterrement, c’est comme si toute la vieille ville tricentenaire, et ancienne capitale du Sénégal, avait décidé d’observer une journée « ville morte » pour mieux compatir à la douleur de son illustre fils, Diagna, et de sa famille. En tout cas, aussi bien la mosquée que le cimetière étaient noirs de monde, jamais, sans doute, de mémoire de « Ndar-Ndar », la capitale de la beauté et de l’élégance n’ayant accueilli autant de monde pour un enterrement. Fait rare, les khalifes généraux des Tidianes et des Mourides s’étaient fait représenter à un très haut niveau, les Sy côtoyant les Mbacké.
Bien que n’ayant pas fait le déplacement, le khalife Serigne Babacar Sy Mansour était accroché au téléphone avec ses émissaires pour veiller à ce que tout se déroulât sans accroc. Le défunt ayant fait allégeance à Touba, la capitale du Mouridisme avait dépêché des dignitaires de premier plan pour assister à ses obsèques.
En l’absence du maire Mansour Faye retenu à Dakar, ses collaborateurs ont prononcé des discours pour rendre hommage au défunt et magnifier tout ce que Diagna a fait pour sa ville natale. A cette occasion, Mamadou Racine Sy, le président du syndicat des hôteliers, patron du King Fahd Palace et président du mouvement politique Alsar, a damé le pion à tout le monde du fait des largesses dont il a fait montre à l’endroit des responsables de la mosquée qui abritait la cérémonie.
Cousin de Diagna, Mamadou Racine Sy a été constamment présent à ses côtés, dépensant sans compter et multipliant les gestes de réconfort. Une présence qui est allée droit au cœur de l’administrateur du Groupe Mimran. Les enfants de l’ancien maire, M. Guillabert, ex-ambassadeur du Sénégal en France était au nombre des présents.
Un Bottin mondain !
Mais c’est surtout le lendemain, aux Hlm à Dakar, que Diagna a prouvé qu’il est homme du monde. Plutôt, c’est toute la République, dans ses diverses composantes, qui a tenu à lui manifester sa sympathie. Bien entendu, il est impossible de citer toutes les personnalités qui ont défilé au domicile du défunt. Toutes les colonnes de ce journal n’y suffiraient sans doute pas. En tout cas, la liste des personnalités présentes ressemblerait à s’y méprendre à un Bottin mondain.
Citons parmi elles, le directeur de cabinet du président de la République, le ministre d’Etat Mahmoud Saleh venu avec une délégation, mais aussi le discret François Collin, secrétaire général adjoint de la Présidence, le toutpuissant gouverneur de la BCEAO venu avec le vice-gouverneur nigérien et son directeur de cabinet, Abou Sy, fils du défunt khalife général des Tidianes, l’ « avocat du peuple », Me El Hadj Diouf, qui a remis un « diakhal » consistant au grand émerveillement de l’assistance recueillie, le milliardaire Baba Diao de Itoc et propriétaire de la banque Outarde dont le directeur général, justement, était aussi président. Baba Diao qui, lui aussi, a semé à tout vent des billets de banque ! Naturellement, la CBAO, banque dont Diagna est un administrateur, avait envoyé tout son staff, les autres banques comme la SGBS, la BICIS etc. n’étant pas en reste. D’une manière générale, tout le patronat a fait corps avec Diagna durant cette terrible épreuve, Baïdy Agne, président du CNP et son frère jumeau ayant battu le rappel des troupes, la CNES, l’organisation patronale rivale n’ayant pas voulu être en reste.
Tout comme Racine Sy, Baïdy n’a pas lâché d’une semelle Diagna durant toute la période ayant suivi le décès de Souleymane. Les patrons français comme Frank Bavard, Dg des Grands Moulins, société rachetée par le groupe américain Seaborg dont le président est lui aussi venu aux obsèques, et Sebastien Punturello, Dg de Canal Plus Sénégal dont Diagna est un administrateur, figuraient aux premières loges. La classe politique n’était pas en reste.
On l’a dit, l’Etat-Apr a témoigné une présence constante au grand-frère et à la famille du défunt — au sein de laquelle on notait la famille de l’ancien ministre des Finances Babacar Ba, artisan de la promotion des hommes d’affaires nationaux et beau-frère de Diagna —. Mais aussi bien la Majorité que l’Opposition étaient là. Ainsi, Aminata Mbengue Ndiaye, secrétaire générale du Parti socialiste (Ps) et présidente du Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct) est venue présenter ses condoléances comme l’a fait Malick Gako, leader du Grand Parti et ancien ministre, qui a passé toute la matinée sur place aux côtés d’Amadou Ba, l’ancien ministre des Finances. L’actuel chancelier de l’Echiquier, Abdoulaye Daouda Diallo, occupé à négocier avec succès l’Eurobonds de 538 milliards, ne cessait d’appeler Diagna.
Normal, du temps où il était ostracisé à la Lonase, l’un des seuls cadres à n’avoir jamais cessé de fréquenter son bureau, c’était justement le défunt, Souleymane Ndiaye. Cela, Abdoulaye Daouda Diallo ne l’a pas oublié.
Du côté de l’opposition, toujours, le Pr Abdoulaye Bathily a compati à la douleur qui frappe son parent Diagna puisque ce dernier a des racines dans le Boundou dont l’ancien leader de la LD est originaire. Bien entendu, les représentations diplomatiques ont aussi présenté leurs condoléances à l’image des ambassades de France, du Japon, des Etats-Unis d’Amérique et de l’Union européenne. Diagna a aussi reçu les condoléances de son cousin Makhtar Diop, président de la SFI (Société financière internationale), filiale de la Banque mondiale. Mentionnons aussi la présence du Grand Serigne de Dakar, Abdoulaye Makhtar Diop, qui a prononcé un très beau discours. Eh oui, circonstances obligent, les Ndiobène ont, pour une fois, rendu sincèrement hommage à un Ndiayène il est vrai particulièrement illustre. On aurait dû commencer par là : le mouvement sportif, dont Diagna est le patron en tant que président du CNOSS (Comité national olympique et sportif) s’est mobilisé au grand complet, les présidents de toutes les fédérations étant venus avec à leur tête le ministre des Sports, Matar Ba.
Bien évidemment, la presse dans toutes ses composantes a partagé le deuil de Diagna, à commencer par Madiambal Diagne qui a fait le déplacement à Saint-Louis, de Mamadou Oumar Ndiaye venu en compagnie d’Abou Abel Thiam, le président du Collège de l’ARTP, juste au moment où arrivait la fille du ministre des Affaires étrangères, Me Aïssata Tall Sall, elle-même annoncée, des patrons des principales entreprises de médias du pays. Mais on vous l’avait dit : toutes les pages de ce journal ne suffiraient pas pour mentionner le monde fou qui défile pour présenter ses condoléances à notre Diagna Ndiaye national et international pour ne pas dire planétaire depuis qu’il a perdu son frère…
EUROBONDS, AVIS DIVERGENTS D’ECONOMISTES
Idrissa Yaya Diandy, enseignant chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, et Kadialy Gassama, deux économistes, divergent sur la question des Eurobonds.
Idrissa Yaya Diandy, enseignant chercheur à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, et Kadialy Gassama, deux économistes, divergent sur la question des Eurobonds. « Le Témoin » a donc voulu confronter leurs points de vues sur l’Eurobond que vient de lancer notre pays. Lequel vient de réussir à lever sur le marché financier international 508 milliards de nos francs, avec un taux d’intérêt de moins de 6 % sur une maturité finale (durée, pour les non-initiés) de 16 ans. Alors que pour le premier nommé, l’universitaire Idrissa Yaya Diandy, « l’économie nationale sombre peu à peu dans le cercle vicieux de l’endettement qui sert à rembourser des dettes », le second économiste, membre du Parti socialiste, dit voir en ces Eurobonds une marque de confiance que la communauté financière internationale accorde aux perspectives économiques prometteuses du Sénégal, qui sera bientôt un émirat gazier et pétrolier ».
Notre pays, le Sénégal, s’est lancé depuis quelques années dans une opération accélérée de quête des fameux Eurobonds pour financer les différents secteurs de son économie. Une stratégie visant sans doute à bénéficier des taux d’intérêt très faibles dont jouissent des Etats à économie forte, une manière de lever des fonds sans soucis majeurs. Cependant, il est clair que ces emprunts n’emballent pas certains spécialistes des questions économiques qui dénoncent un endettement pour payer des dettes. D’autres de leurs collègues y voient au contraire, s’agissant plus particulièrement de notre pays, « la preuve de l’existence de bonnes perspectives économiques pour le Sénégal ». C’est le cas de l’économiste Kadialy Gassama.
En effet, il se félicite du fait qu’en dépit du contexte sanitaire mondial, du covid 19 et du ralentissement économique subséquent, le Sénégal a réussi à lever sur le marché financier international plus de cinq cents milliards de FCFA au taux d’intérêt de 5,375% sur une maturité finale de16 ans. Mieux, souligne-t-il, notre pays aurait même pu obtenir un montant beaucoup plus élevée avec un taux de souscription de plus du quintuple des investisseurs internationaux. Ce qui traduit, aux yeux de l’économiste socialiste, un franc succès du Sénégal sur le marché financier international intervenant après l’émission d’obligations du Trésor. Le tout démontrant, selon Kadialy Gassama, « la confiance que la communauté économique internationale accorde aux perspectives économiques prometteuses du Sénégal qui sera bientôt un émirat gazier et pétrolier. Ce même si 68 % de la somme levée au titre des Eurobonds serviront à racheter une partie de la dette du Sénégal ».
A cette émissions d’obligations, commente notre interlocuteur, s’ajoutent la réallocation de droits de tirage spéciaux (Dts) à hauteur de 100 milliards de dollars, en plus d’un reprofilage de la dette globale de notre pays pour une relance plus vigoureuse des économies africaines affectées par le ralentissement de l’économie mondiale post covid19.
KADIALY GASSAMA, ÉCONOMISTE : «Ces Eurobonds démontrent la confiance que la communauté financière internationale accorde au Sénégal»
Toujours est-il que, selon l’économiste rufisquois, avec cette injection en cascade de liquidités réussie par les autorités de notre pays, « il y a de quoi espérer une reprise robuste de la croissance économique et un avenir prometteur pour nos économies africaines respectives ». Ce n’est pas tout puisque, commente encore Kadialy Gassama, la forte souscription d’investisseurs consécutive à l’émission d’obligations d’un pays sur le marché financier international « est un baromètre objectif pour apprécier la bonne tenue d’une économie avec des perspectives intéressantes ».
D’aucuns estiment que l’endettement est une mauvaise politique de relance économique mais Gassama pense le contraire et estime que, « jusqu’à un certain niveau, s’endetter, c’est s’enrichir, lorsque, notamment, l’endettement est utilisé pour financer le développement réel ». Poursuivant, il estime que les pays nantis peuvent aller jusqu’à 15 % voire 18 % de déficit budgétaire pour financer leur endettement, or, nous en sommes pour nos pays à moins de 5 % de déficit dans un contexte sanitaire défavorable.
Conclusion de l’économiste membre du Parti socialiste : « nous pouvons encore aller plus loin car, pour la relance de la machine économique permettant une bonne accumulation interne du capital, rien ne se perd et rien ne vaut l’endettement ». Par ailleurs, dit-il, en période de crise due à des variations exogènes (pandémie, guerre, catastrophes naturelles), l’intervention de l’Etat pour fouetter la machine économique et stimuler la croissance en insufflant de la liquidité, est une option qui a fait ses preuves dans le temps et dans l’espace.
« Jusqu’à un certain niveau, s’endetter, c’est s’enrichir, lorsque, notamment, l’endettement est utilisé pour financer le développement réel ».
L’unanimité n’est pas de ce monde, et fort heureusement d’ailleurs pour le pluralisme. Et il n’y a aucun domaine où il y ait un consensus entre les spécialistes sur quelque sujet que ce soit. C’est valable en économie où les théories sont nombreuses et souvent opposées. On ne s’étonnera donc pas de voir un économiste prendre le contrepied de Kadialy Gassama.
Selon Idrissa Yaya Diandy, enseignant chercheur à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, ce qu’il faut d’emblée savoir de ces Eurobonds, c’est qu’ils permettent aux pays de faire appel directement aux investisseurs privés sans passer par les banques ou les institutions internationales. Ce système est certes avantageux, en ce sens qu’il accorde une certaine flexibilité et autonomie dans l’utilisation des fonds, mais aussi il permet de faire face à des situations d’urgence comme c’est le cas actuellement dans notre pays. De plus, enseigne l’universitaire, pour la plupart des pays, le passage par le marché financier, en contournant les intermédiaires, permet d’avoir des conditions d’endettement très avantageuses, parfois avec des taux d’intérêt proches de zéro. Cependant, nuance-t-il, « ces avantages sont loin d’être valables pour les pays en développement qui sont mal notés par les agences de notation, car considérés comme risqués ».
IDRISSA YAYA DIANDY, ENSEIGNANTCHERCHEUR À L’UCAD :« Avec des taux d’intérêt élevés et des emprunts répétés, l’économie sénégalaise sombre peu à peu dans le cercle vicieux de l’endettement… »
En effet, pour le Sénégal, « les taux d’intérêt élevés amènent à se poser des questions sur la pertinence du recours, devenu fréquent (plus de 5 fois en à peine 10 ans), à ce mode de financement. Même si on note une baisse des taux (5,6 % contre 6,25 en 2017 et même 6,75% en 2018), cela rend très onéreux les remboursements, et au final l’économie sombre peu à peu dans le cercle vicieux de l’endettement ». Si l’on se fie aux explications de l’économiste à l’UCAD, il faut savoir que des taux d’intérêt de plus de 6 % sur 20, voire 30 ans, reviennent à rembourser 2 à 3 fois le montant initial de l’emprunt ! Selon Diandy, la conséquence des surendettements à des taux élevés est qu’une bonne partie des ressources engrangées sert à racheter les crédits antérieurs. Ce qui amène encore une fois, ajoute-t-il, à se questionner sur la soutenabilité de l’endettement. Décidément, cet économiste a vraiment du mal à avaler la pilule des Eurobonds qui sont à ses yeux « impertinents » au regard de leur destination mais aussi des taux d’intérêts appliqués. En effet, il soutient que « le Sénégal est arrivé encore une fois à un point tel que la dette sert principalement à éponger la dette, ce qui fait penser à un système de Ponzi, d’autant plus que, à travers diverses sorties contradictoires, mais convergentes, ces Eurobonds vont servir à restructurer la dette du Sénégal en rachetant une partie des Eurobonds précédemment émis et dont l’échéance est proche ».
« Le Sénégal est arrivé encore une fois à un point tel que la dette sert principalement à éponger la dette, ce qui réduit les possibilités d’investissement dans les secteurs prioritaires…»
Selon Diandy, le « reste » va servir à financer les programmes d’urgence, notamment le fameux plan en faveur de l’emploi et les projets gaziers. De son point de vue, tout cela montre combien l’endettement, lorsqu’il n’est pas utilisé à bon escient, peut peser sur les perspectives de développement économique et social. Il résume sa pensée en ces mots : « lorsque les ressources servent à rembourser principalement la dette, cela réduit les possibilités d’investissement dans les secteurs prioritaires tels que la santé, l’éducation, l’emploi, la recherche, etc. ».
En tout état de cause, pour clore ce chapitre, Idrissa Diandy se désole du fait que notre pays, malgré les mises en garde des experts en matière économique, « s’est encore jeté dans la gueule du loup en contractant encore une dette via les Eurobonds ». Quand est ce que notre cher pays va arrêter de s’endetter pour appauvrir les générations futures ? En attendant de trouver une réponse, notons seulement que le Sénégal, comme le souligne d’ailleurs Diandy, est maintenant un habitué des marchés financiers internationaux, étant donné qu’ « il a eu recours à ce type de financement régulièrement depuis 2009 ».