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7 juillet 2025
par Jean Christophe Senghor
DÉCOLONISATION, ÉVITONS LE MANICHÉISME
EXCLUSIF SENEPLUS - Le passé colonial du Sénégal participe à sa construction tout comme l’histoire des royaumes du Walo, du Cayor, du Baol, qui ont eu leurs heures de gloire mais aussi des heures sombres où l’esclavage était communément pratiqué
La mort atroce de George Floyd aux États-Unis – dont chacun a pu voir en différé les images épouvantables – a suscité une réprobation quasi universelle. De leur côté, les bavures policières françaises ont également montré les errements injustifiables de ceux qui brutalisent sans raison au lieu de protéger. Au Sénégal, les réseaux sociaux se sont enflammés jusqu’à la caricature – et les média ont repris en choeur – autour de l’idée de mettre à bas la statue du général Faidherbe à Saint-Louis sous prétexte qu’il avait été le gouverneur de la puissance coloniale et qu’il avait à ce titre « tué plus de 20 000 sénégalais en huit mois » ainsi que le rappelle le Professeur Iba Der Thiam. C’est donc à 83 ans que cet éminent universitaire, agrégé d’histoire et titulaire d’un doctorat, ministre de l’Éducation nationale de 1983 à 1988, semble découvrir les horreurs de la colonisation et des guerres de conquête 1 !
Toute conquête militaire pour le pouvoir qu’il soit politique ou religieux entraine la mortvd’innocents. La stratégie de la terreur fut, hélas, également pratiquée par le chef tidiane El Hadj Omar Tall dans sa conquête du royaume bambara de Ségou ou contre l’empire peul du Macina. Et ce n’est pas le colon français qui mit à mort le grand chef de l’empire toucouleur mais les Peuls qui venaient d’assiéger Hamdallahi et qui poursuivirent El Hadj Omar jusqu’à sa mort par asphyxie dans les falaises de Bandiagara. Il faut relire, à ce sujet, Amadou Hampaté Ba dont le grand-père avait été enrôlé sous la bannière du chef toucouleur.
Ces précisions apportées et au risque d’aller à contre-courant, on pourrait considérer aujourd’hui que le Sénégal moderne fonde ses bases sur trois personnages majeurs : le général Faidherbe, son ennemi El Hadj Oumar Tall dont la force et le courage ont été justement célébrés, « un grand homme parmi les grands » selon la belle formule de Samba Dieng et son autre ennemi, Lat Dior Diop, 28e damel du Cayor2, vainqueur de la célèbre bataille de Ngol Ngol en 1863.
Le passé colonial du Sénégal fait partie intégrante de son histoire et participe à la construction du pays tout comme l’histoire des royaumes du Walo, du Cayor, du Baol, du Sine et du Saloum qui ont eu leurs heures de gloire mais aussi des heures sombres où l’esclavage était communément pratiqué à l’issue de guerres fratricides 3.
Le général Faidherbe4 a protégé l’islam – contre l’avis de l’Eglise catholique – en ouvrant des écoles laïques où les jeunes africains musulmans pouvaient apprendre le français tout en étant assurés du respect de leurs convictions religieuses. A ce titre, il sera d’ailleurs accusé par la presse cléricale de « livrer le Sénégal aux marabouts ». Par ailleurs, il favorisera les « mariages à la mode du pays », lui-même donnant l’exemple en contractant une union avec une jeune fille du Khasso, Doucounda Sidibé qui sera la mère de son fils Louis, mort à 24 ans de la fièvre jaune et dont on voit encore la pierre tombale dans le cimetière de Saint-Louis.
Vouloir aujourd’hui effacer le passé colonial est un non-sens ! C’est comme si les Français décidaient de raser tous les monuments gallo-romains sous prétexte qu’ils ont été construits par la puissance coloniale romaine5 ! Faudra-t-il au Sénégal faire table rase du passé et détruire tout ce que l’administration coloniale a construit jusqu’en 1960 ? Il faut savoir raison garder !
Le Pr Iba Der Thiam se souviendra qu’on a débaptisé le lycée Van Vollenhoven qui rappelait trop la puissance coloniale pour lui donner le nom – mérité – de Lamine Gueye. Mais sait-on que ce gouverneur général de l’A.O.F. oeuvra plus en faveur des tirailleurs sénégalais que le député Blaise Diagne ? Lorsque Clémenceau réclama en 1917 un second contingent de tirailleurs, il s’y opposa fortement d’abord en juillet puis dans une seconde lettre en septembre dans laquelle il écrivit : « Je vous supplie, Monsieur le ministre, de ne pas donner l'ordre de procéder à de nouveaux recrutements de troupes noires. Vous mettriez ce pays à feu et à sang. Vous le ruineriez complètement et ce, sans aucun résultat. Nous sommes allés non seulement au-delà de ce qui était sage, mais au-delà de ce qu'il était possible de demander à ce pays ». Clémenceau n’en tint pas compte et chargea le député Blaise Diagne de la sale besogne. Outré, Van Vollenhoven démissionna le 17 janvier 1918 et alla se faire tuer sur le champ de bataille le 20
juillet. Aujourd’hui, on a donné le nom de Blaise Diagne au nouvel aéroport et on a complètement oublié Van Vollenhoven aux qualités humaines avérées !
Dans son ouvrage récent, Sortir de l’impasse coloniale, Philippe San Marco nous appelle à la sagesse : « Pour s’apaiser et construire un avenir commun, mieux vaudrait ne rien oublier mais ne rien caricaturer non plus. Comprendre, non pour rejouer un passé qui doit nous laisser passer si l’on veut avancer. »
1 On peut se demander d’ailleurs aujourd’hui pourquoi il n’a pas usé de sa qualité de ministre pour mettre à bas cette « vilaine » statue !
2 Comme tout chef guerrier, Lat Dior « ne fait pas dans la dentelle » lorsqu’il attaque et détruit le village de Mbacké en 1862. Il se convertira à l’Islam quelque temps plus tard à la demande de l’almamy Maba Diakhou, marabout toucouleur, chef des musulmans de la région du Rip.
3 Le 1er février 1861, Macodou Fall, damel du Cayor, s’engage à ne plus vendre comme esclaves aucun étranger ni aucun de ses sujets.
4 S’il tue – nul ne peut le nier – le général Faidherbe signe et respecte des accords avec les rois vaincus ; tel Dioukha Samballa, roi de Kayes, qui reçoit 5 000 francs pour l’achat du terrain qui servira à construire le fort de Médine et 1 200 francs de cadeaux par an.
5 Imagine-t-on détruire le magnifique arc de Germanicus à Saintes (Charente-Maritime) sous le prétexte qu’il a été construit à la gloire de l’empereur Tibère sous l’occupation romaine ?
VIDEO
LE FRONT «DOYNA» MIS EN PLACE POUR PORTER LE COMBAT
Arriérés de salaire, licenciements arbitraires, une justice aux ordres des exploiteurs et voleurs, décisions de justice non appliquée, spoliations foncières et démolitions de maisons sont entre autres les points contre lesquels lutte le front Doyna
Arriérés de salaire, licenciements arbitraires, une justice aux ordres des exploiteurs et voleurs, décisions de justice non appliquée, spoliations foncières et démolitions de maisons sont entre autres les points contre lesquels lutte le front multi-luttes Doyna qui regroupe une dizaine de mouvements citoyens.
Parmi les membres du Front, on peut citer le mouvement citoyen Reendo Bosséa, le Collectif des travailleurs de Pcci, le Frapp France Dégage, le Collectif des victimes de démolition de maisons de Gadaye. Le collectif affiche sa détermination à faire face à ce deux poids deux mesures qui consiste à ne pas toucher les occupants illégaux du littoral et à casser illégalement les maisons de pauvres citoyens.
A ce propos, les membres de Doyna rappellent qu’après la démolition de leurs 253 maisons en 2013, les victimes de démolition de maisons de Gadaye avaient traduit le promoteur Babacar Fall en justice. Ce dernier avait écopé de 6 mois de prison ferme, une contrainte par corps au maximum, et une amende de plusieurs millions de francs. «Mais M. Fall n’a jamais été inquiété. Pire, l’Etat du Sénégal qui avait promis de restituer leurs maisons aux victimes dès que la justice aurait vidé le dossier tarde à réagir», se désole le Front. C’est pourquoi, renseignent Guy Marius Sagna et ses camarades dans un communiqué, les victimes vont entamer une grève de la faim le 22 juin prochain sur le site où les maisons ont été démolies. Sur un autre dossier, le front fustige la spoliation de 300 hectares des terres du village de Ballabougou, dans la commune de Nguéniène, au profit d’une entreprise espagnole Produmel.
En plus de cela, l’Etat du Sénégal a déclassé la forêt classée de Ballabougou sur 1 160 ha, en violation de l’article 31 du décret 2019-110 du 16 janvier 2019 portant application de la loi 2018-25 du 12 novembre 2018 portant code forestier. Désarmée face à cette situation, l’Union des jeunes réformistes de la zone Nord dénonce l’accaparement des terres pastorales dans la commune de Nguèniène. Elle demande que la lumière soit faite sur les terres en cours d’exploitation.
Selon le Collectif des riverains de Ndoss Guéréo, en octobre 2018, le Président Macky Sall autorisait par décret le déclassement et l’immatriculation de 16 ha sur la zone maritime et fluviale protégée de la lagune de Guéréo et l’immatriculation de 23 ha de son domaine national pour les attribuer par voie de bail au Groupe Decameron (Hôtel Baobab) en invoquant le motif d’utilité publique».
Ces décrets, de l’avis du Collectif, violent les droits des propriétaires qui y résident. «La raison d’utilité publique est invoquée pour justifier l’expropriation au bénéfice du Groupe Decameron qui est une entité privée. Ces décrets n’ont pas fait l’objet d’une délibération municipale et aucune enquête n’a été conduite à Sindia», disent les membres du Collectif des riverains de Ndoss Guéréo qui craignent l’expropriation des terrains des paysans et la privatisation de la lagune au profit du Groupe Decameron.
Dans la même veine, le mouvement citoyen «Reendo Bossea» qui regroupe 4 communes (Oré Fondé, Agnam, Thilogne et Dabia) dénonce la signature de convention de financement entre le Gic de Bosséa, une entreprise dirigée par le maire de Dabia Yaya Abdoul Kane et Owac Engereng Compagnie (Italie) sur un projet estimé à 700 milliards FCFA sous forme d’un contrat Bot pour une durée de plus de quarante ans, sans l’implication de la population. «Compte tenu de la violation des règles et procédures de la transparence, d’une gouvernance démocratique, inclusive, participative et le manque d’information à la population et les correspondances adressées le 17 février 2020 aux représentants de l’Etat et aux différents maires qui sont toujours sans réponse, Reendo Bosséa exige les copies de délibération du projet pour chaque commune», indique le front multi-luttes Doyna qui, par ailleurs, demande à l’Etat de mettre fin aux agissements du promoteur Sylla et de ses acolytes dans le quartier de Terme Nord à Ouakam. Mieux, le Collectif réclame une extension du quartier sur l’assiette foncière de la zone aéroportuaire allant jusqu’au hangar des pèlerins.
AFFAIRES PCCI ET AFUB
D’emblée, le collectif dit prendre à témoin l’opinion publique face à ce qui apparaît comme un flagrant déni de justice. En effet, regrette le front, après deux ans de saga judiciaire, le collectifdes145 ex-employés de Pcci n’ont pas jusqu’à présent recouvré leurs 14 mois d’arriérés de salaire. Une situation, indique la note parvenue à notre rédaction, qui leur fait croire que le sort des 145 citoyens grugés de leur droit le plus élémentaire par les entreprises comme la Sonatel et Pcci n’interpelle pas l’Etat du Sénégal. En outre, les étudiants victimes d’escroquerie de Afup Canada ayant gagné leur procès, le front multi luttes Doyna demande que la décision de justice en leur faveur soit respectée par le paiement à chacun des 200 étudiants victimes de 1 million de FCFA de dommage et intérêts.
Par ailleurs, les travailleurs de la société ABS, dont les contrats sont toujours en cours, exigent que l’Etat du Sénégal, devenu propriétaire de ABS et de AHS depuis 2016 après jugement par la Crei, leur verse leurs 48 mois de salaires, leurs indemnités de licenciement et leur redéploiement dans d’autres secteurs d’activités.
SIX INDIVIDUS ARRETES APRES DES AFFRONTEMENTS AVEC LA POLICE A DIOURBEL
Les populations du quartier Keur Gou Mack, dans la commune de Diourbel, sont entrées dans une grosse colère mercredi soir et ont affronté la police venue maintenir l’ordre pour le dépistage de la famille d’un patient de 70 ans, mort de Covid-19.
Les populations du quartier Keur Gou Mack, dans la commune de Diourbel, sont entrées dans une grosse colère mercredi soir et ont affronté la police venue maintenir l’ordre pour le dépistage de la famille d’un patient de 70 ans, mort de Covid-19. Six parmi les manifestants ont été arrêtés et devront être présentés au procureur de la république, ce vendredi.
Il y a deux jours, le préfet de Diourbel déplorait la réticence de certaines populations qui ne croient pas du tout à l’existence de la Covid-19. Mais les derniers évènements enregistrés dans la nuit du mercredi 17 au jeudi 18 juin 2020 semblent conforter cette thèse du préfet. Sur les vingt-deux décès de Covid-19 enregistrés dans la région, deux ont été répertoriés dans la commune de Diourbel.
Justement ces deux patients habitent le quartier Keur Gou Mack où les éléments du commandant Ousmane Diop sont allés prêter main forte aux autorités pour le dépistage des membres de la famille de l’un des patients décédés et qui était âgé de soixante-dix ans. Seulement, les proches du défunt, qui ne voyaient pas les choses de cette manière, ont réservé un accueil mouvementé aux flics et aux personnels de santé. Lorsqu’ils sont arrivés sur les lieux, les limiers ont eu droit à des jets de pierres et autres projectiles de la part des riverains qui s’étaient passé le mot. Ce qui a déclenché de violents affrontements qui ont duré toute la nuit.
Toutefois, les éléments du commissariat central de Diourbel ont fini par avoir le dessus, et le calme est revenu sur les lieux au petit matin. Au finish, six parmi les jeunes du quartier ont été interpellés, arrêtés et placés en garde à vue. Hier, ces derniers ont été entendus et auditionnés. Et ce, malgré de nombreuses interventions de dignitaires religieux qui ont usé de tous les moyens pour étouffer l’affaire et faire libérer les jeunes. Ces derniers qui seront présentés au procureur près le tribunal de grande instance de Diourbel, ce vendredi, risquent d’être inculpés d’outrage à agents dans l’exercice de leurs fonctions, voie de fait et violence sur des agents de la force publique. Ils devraient faire l’objet de mandat de dépôt aujourd’hui, à moins que la pression exercée par les religieux pour les faire libérer ne finisse par payer.
ABDOULAYE DAOUDA DIALLO FAIT LE POINT DES DECAISSEMENTS
Selon le ministre des Finances et du Budget, le financement du Programme de résilience économique et sociale (PRES) connaît un niveau d’exécution d’un montant de 332,13 milliards par rapport aux dépenses décaissables qui s’élèvent à 526,3 milliards FCFA
Le ministre des Finances et du budget, Abdoulaye Daouda Diallo, a organisé, hier, une rencontre avec le Conseil national du patronat (Cnp). Une occasion pour ses services de faire le point sur le niveau d’exécution financière du programme de résilience économique et sociale (Pres). A les en croire, le Pres connaît un niveau d’exécution de 332,13 milliards Fcfa.
En effet, à en croire les services du Ministère des Finances et du Budget, le financement du Programme de résilience économique et sociale (PRES) connaît un niveau d’exécution d’un montant de 332,13 milliards par rapport aux dépenses décaissables qui s’élèvent à 526,3 milliards FCFA. Soit un taux d’exécution de 63,1% à la date du 17 juin 2020. Les mêmes services indiquent hier, en marge de cette rencontre avec le Conseil national du patronat (CNP), que le montant Relatif aux «paiements dus aux fournisseurs de l’Etat» est estimé à 302 milliards FCFA.
Abdoulaye Daouda Diallo de souligner que ledit montant se répartit en 200 milliards FCFA d’obligations impayées au titre des années antérieures à 2019, d’engagements en cours d’un montant de 102 milliards FCFA. S’agissant des obligations impayées, le Ministre indique qu’un montant de 121,960 milliards FCFA a été payé, soit un taux d’exécution de 61%. «Le reliquat étant prévu dans la Loi des Finances Rectificative (LFR) pour l’année 2020, les dispositions sont prises pour son paiement conformément au chronogramme d’exécution technique et financière» , affirme-t-il. Quant aux 102 milliards FCFA inscrits dans le budget initial, il informe que les paiements sont de l’ordre de 81,6 milliards FCFA, soit un taux d’exécution de 80%.
Le ministre des Finances et du Budget M. Abdoulaye Daouda Diallo souligne par ailleurs, pour le volet fiscal, que tous les textes législatifs et réglementaires ont été pris. Et cela, selon lui, font l’objet de mise en œuvre, notamment la remise partielle de la dette fiscale des entreprises et personnes physiques, dit-il, dûment constatée et arrêtée à la date du 31 décembre 2019 pour un montant de 200 milliards de francs CFA. A cela s’ajoutent les 55 milliards F CFA d’impact budgétaire de renonciation et de report de paiement de divers impôts. D’autant plus, dira-t-il que «d’autres mesures fiscales sont dans le plan pour le remboursement des crédits de TVA dans des délais raccourcis pour remettre de la trésorerie aux entreprises». Il y a également, explique l’argentier de l’Etat, la déduction de leur futur résultat fiscal des dons effectués par les personnes et entreprises au Fonds FORCE-COVID-19. Il rassure à cet effet que plusieurs mesures ont été prises par l’Administration des Douanes pour soulager les entreprises. « C’est le cas notamment de l’admission en franchise des droits et taxes d’entrée à l’exclusion des prélèvements communautaires, l’étalement du délai de paiement de la TVA suspendue, la suspension du recouvrement de pénalités droits et taxes éludés et amendes, l’autorisation de mise à la consommation exceptionnelle au-delà du délai réglementaire sans paiement de l’intérêt de retard», explique en substance le ministre des Finances.
Avant d’affirmer qu’il n’existe aucune instance de paiement sur les dépenses liées à la COVID-19 du côté de la Direction générale du Trésor et de la Comptabilité publique, malgré, souligne-t-il, un contexte difficile pour la mobilisation des recettes».
Le ministre informe par ailleurs qu’un accord-cadre a été signé entre l’Etat et le secteur financier en mettant à leur disposition un montant de 200 milliards F CFA affectées dans le cadre d’un financement bancaire destiné aux entreprises. D’ailleurs, signale-t-il, ces lignes de crédit commencent à être utilisées. Et parallèlement à ce mécanisme, d’après lui, les clients de banques bénéficient de reports d’échéances de paiements pour un montant actuel de 135 milliards. «Une facilité, dira-t-il, qui permet aux entreprises de disposer de trésorerie.»
LES ENSEIGNANTS REJOIGNENT LES CLASSES EN COLERE
Le G7 n’est pas content du ministre de l’Education nationale. Il n’a pas apprécié que Mamadou Talla propose une date de reprise des cours validée par le gouvernement sans recueillir en dernier lieu leur avis.
La reprise des enseignements/apprentissages prévue le 25 juin prochain a été validée, mercredi dernier, en conseil des ministres. Cependant, les syndicalistes regroupés au sein du G7, furieux de la décision unilatérale du gouvernement, disent prendre acte et demandent au gouvernement d’assumer toutes ses responsabilités.
Le G7 n’est pas content du ministre de l’Education nationale. Il n’a pas apprécié que Mamadou Talla propose une date de reprise des cours validée par le gouvernement sans recueillir en dernier lieu leur avis.
Dans un communiqué parvenu à «L’As», le Directoire du Cusems a soutenu prendre acte de la décision «unilatérale» prise par les ministres en charge de l’éducation : le ministre de l’Education nationale (Men) et le ministre en charge de l’Emploi, de la Formation professionnelle et de l’Artisanat (Mefpa). Le Cusems dit regretter que les propositions lucides et pertinentes d’acteurs de premier plan aient été royalement ignorées.
A en croire Abdoulaye Ndoye et ses camarades, les consultations initiées par le Men procédaient juste d’une stratégie visant à faire croire à l’opinion que la décision finalement retenue est le fruit d’un large consensus. «Il n’en est rien», déplorent-ils. Toujours dans la note parvenue à la rédaction, les syndicalistes estiment que cette attitude «cavalière» ruine toute la sincérité du discours sur le partenariat développée par le Men et vide de sa substance l’appel à la mobilisation générale lancée lors du conseil des ministres. L’adage dit bien : «Ce que vous faites pour moi, sans moi, vous le faites contre moi», laissent entrevoir les membres du Cusems. Ils considèrent que le Men, le Mefpa et le Président qui ont pris cette décision en assumeront totalement et exclusivement toutes les conséquences. Aujourd’hui que la reprise est actée, le Cusems dit réitérer son exigence de l’opérationnalisation des protocoles sanitaires, pédagogiques et sociaux définis respectivement par le comité national de gestion des épidémies (Cnge), les techniciens du système éducatif et les partenaires sociaux. Le Cusems invite, en définitive, ses militants et sympathisants à rester vigilants et intraitables quant au strict respect de toutes les mesures annoncées pour garantir la sécurité de tous les acteurs.
ABDOU FATY, SELS/A : «IL SERAIT PRÉFÉRABLE D’ENVISAGER LA REPRISE AU MOIS DE SEPTEMBRE»
Quant au SG du Sels/A, Abdou Faty, joint au téléphone, il a tenu à clarifier que la date du 25 juin a été prise unilatéralement par le gouvernement du Sénégal sans concertation avec les partenaires sociaux. Revenant sur les faits, il rappelle que quand ils ont rencontré vendredi dernier le ministre Mamadou Talla, ce dernier leur avait assuré qu’il n’avait pas encore retenu de date et qu’il attendait leurs inputs. «A notre grande surprise, hier, le conseil des ministres a déterminé la date» ; s’étonne-til.
Ainsi, Abdou Faty estime que cette date ne les engage pas et qu’elle est de la responsabilité de l’Etat. «Ils ont rompu le partenariat. Maintenant, nous prenons acte. Nous exigeons que tous les gestes barrières soient respectés. Sinon nous demanderons à nos camarades de prendre leurs responsabilités et de ne pas officier», explique Monsieur Faty. Avant de préciser que s’il y a des difficultés (inondations, classes dévastées), les autorités seront désignées comme unique responsable. «En tant qu’agents, nous sommes censés être à nos postes conformément au décret qui est clair,. Par conséquent, nous prenons acte de cette décision et nous allons effectivement vers des enseignements/apprentissages tout en demandant à nos camarades de prendre toute leurs précautions, de ne pas se sacrifier et de se conformer au protocole sanitaire», affirme Abdou Faty. Il estime qu’en tant que technicien, vu l’environnement avec la stigmatisation, l’hivernage, les classes inondées et les enfants qui iront dans les champs, il serait préférable d’envisager la reprise au mois de septembre.
Ainsi, dit-il, les gens allaient travailler jusqu’à décembre, faire les évaluations et débuter l’année scolaire 2020-2021 en janvier. «Il est vrai qu’au mois de septembre, il y aura des écoles qui seront inondées parce qu’il y a des écoles à Dakar qui sont dans les bas-fonds et qui sont souvent inondées en fin d’hivernage. Sans oublier qu’il arrive que les populations vivant sous les eaux squattent souvent certaines écoles. Mais nous pensions que c’était le moindre mal et qu’on pourrait identifier d’autres bâtiments et commencer au mois de septembre », a-t-il déclaré.
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
UNE REPRISE DES CLASSES SUR LES CHAPEAUX DE ROUES
Qu’en sera-t-il des écoles qui, après quelques averses, n’auront rien à envier aux étangs que l’on trouve dans la forêt ? Qu’en sera-t-il des 6500 abris provisoires disséminés sur l’ensemble du territoire national ?
Après trois reprises ratées des enseignements et apprentissages, l’Etat semble enfin décidé à rouvrir, contre vents et marées, les écoles primaires, collèges et lycées le 25 juin prochain. Du moins pour les élèves de cm2, de 3e secondaire et de terminale. Mamadou Talla, le ministre de l’Education nationale, et son collègue de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, Dame Diop, rouvriront les écoles fermées depuis la première décade du mois de mars. Ainsi, le ministre Talla a dévoilé le nouveau calendrier retenu pour les examens de baccalauréat, Bfem et Cfee. Le Cfee et l’Entrée en sixième se dérouleront fixés à partir du 20 août prochain, le Bfem à partir du 14 septembre. Les sessions de remplacement sont prévues à partir du 15 octobre. Les épreuves anticipées de philosophie se tiendront le 12 août, le bac technique à partir du 31 août et le bac général à partir du 7 septembre. Les autres examens professionnels seront organisés du 3 au 30 août. La nouvelle année académique démarrera dans la première semaine du mois de novembre 2020.
Les syndicalistes et les partenaires sociaux, qui étaient en phase de réflexion, se disent surpris de la décision du ministre de l’Education nationale qui n’a pas tenu compte de leurs propositions. Alea jacta est. Les soldats de la craie seront de retour dans les classes même si le terrain n’est pas encore déminé, même si le climat demeure anxiogène. Dans ces conditions, il est à craindre, dès les premiers jours, de voir des établissements fermés mis en quatorzaine pour cause d’un enseignant ou d’un élève atteint du covid-19. Mais quelle est la solution prévue pour ces élèves qui perdront durant ces deux mois de cours au moins 14 jours ? Qu’en sera-t-il des établissements où le protocole sanitaire ne sera pas respecté totalement surtout que la logistique mise en place devra durer deux mois ? Qu’en sera-t-il des écoles qui, après quelques averses, n’auront rien à envier aux étangs que l’on trouve dans la forêt ? Qu’en sera-t-il des 6500 abris provisoires disséminés sur l’ensemble du territoire national surtout que l’hivernage s’est installé dans les zones sud et centre ?
Autant de questions dont les réponses n’ont pas été trouvées auprès des ministres concernés par la reprise. Certaines autorités de l’Education nationale soutiennent toujours avec naïveté qu’il y a des pays où il pleut 8 mois sur 12 et que, par conséquent, enseignants et élèves travaillent sous la pluie. Il faut préciser que dans ces pays, les autorités ont pris toutes les dispositions pour que la pluie ne soit pas un facteur rédhibitoire pouvant compromettre le travail à l’école.
Certes le Sénégal, à l’instar de tous les autres pays, traverse une situation exceptionnelle, mais cela ne doit pas être un prétexte pour imposer la reprise des cours dans des conditions pas encore claires. La conférence des gouvernements scolaires se désole d’être écartée des séances de réflexion auxquelles la tutelle avait convié acteurs et partenaires de l’école. Cette instance représentative des élèves n’exclut pas de s’opposer à la reprise d’autant plus que certains de ses membres des zones sud et centre, concernés par la reprise, ont déclaré ne plus être en mesure de retourner à l’école parce qu’ils doivent cultiver leurs champs qui les nourrissent et qui assurent leurs frais de scolarité. Quant aux élèves des classes intermédiaires, ils peuvent déjà entamer leurs vacances puisque le ministre cherche avec les acteurs comment faire pour décider de leur passage ou redoublement. Par ailleurs, il est prévu dans l’agenda scolaire de la rentrée du mois de novembre quelques semaines de consolidation pour combler le gap du 2e semestre que ces élèves n’effectueront pas. Il est clair que l’objectif du gouvernement, c’est de tout faire pour organiser les examens mais non de finir le programme scolaire.
Ainsi les autorités académiques, pour plus de cohérence, devraient procéder à un redimensionnement du programme, fixer les limites dans lesquelles se tiendront les évaluations pour éviter de perdre du temps sur des chapitres bâclés qui risquent de saturer les élèves. Cela permettra aux enseignants de bachoter pour préparer intensément les élèves dont l’unique objectif est de réussir à l’examen. Bien sûr au détriment du savoir.
par Siré Sy
QUAND LA COVID-19 MET À NU LE PSE (3/5)
EXCLUSIF SENEPLUS - Cette crise vient rappeler que le PSE est davantage obnubilé par la croissance que par le développement économique et le progrès social - PRÉSIDENT ET GESTION DE CRISE, ‘’QUAND L’HEURE EST GRAVE !’’
L'adage dit que c’est au pied du mur que l'on reconnaît le maître-maçon. Dans la même temporalité, c'est par et dans la gestion de crise(s) de magnitude ‘’secousse du régime’’ sur l'échelle d'une Nation-État, que l'on apprécie les choix, les décisions et le leadership d'un chef d'Etat dans sa fonction de président de la République.
Le Think Tank Africa WorldWide Group vous propose une toute nouvelle série du Feuilleton managérial : Président et Gestion de crise, ‘’quand l'heure est grave !’’, de cinq (5) épisodes, entièrement et exclusivement consacré au président Macky Sall.
Pour cette troisième épisode de ''Président et Gestion de crise ‘’quand l'heure est grave’’, quand la Covid-19 met à nu le PSE.
La Covid-19 a montré au président Macky Sall et au gouvernement du Sénégal, ce que vaut réellement le PSE (Plan Sénégal Émergent) sur le terrain, au-delà des slogans, des théories, et des déclarations d’intention. Au-delà de la gouvernance par le verbe et les effets d’annonce. En effet, après avoir bouclé la première phase (de 4 ans) du PSE, la Covid-19 est venue nous rappeler que le PSE était et faisait plus dans l'économisme (obnubilé par la croissance synthétique du PIB) que dans l'Économie (développement économique diffus et progrès social). Parce que le PSE marche sur une jambe (un Plan uni-jambe) parce que ne prenant presque pas, ni assez ni au mieux, l’autre versant de l'émergence, le versant social (emploi et santé).
Pourtant, depuis 2015, le Think Tank Africa WorldWide, n'a cessé d'alerter sur ce fait, en écrivant et en déclarant qu'à la moindre secousse, tout s'effondrerait comme un château de cartes. Comme nous ne sommes pas de l’APR, nous avons été taxés d’opposant encagoulé et de populiste. L’on est allé même jusqu'à nous dire de ‘’rentrer’’ au Maroc….
La Covid-19 vient confirmer, hélas, notre prédiction et le président Macky Sall vient de se rendre compte et cette pandémie vient de révéler, malgré tous ses efforts et ses slogans, du niveau de pauvreté, d'indigence des sénégalais et de la vulnérabilité de notre économie et de son système dont 80% repose sur l’informel. Sans compter, le rachitisme de nos structures médicales et de notre système de Santé en termes d'équipements et de plateaux médicaux. Bref, de notre système de Santé qui est malade et de l'urgence à se soigner au Sénégal.
Erreurs tactiques d'une stratégie de guerre
Dans sa gestion de la Covid-19, Macky Sall, n'a-t-il trop prêté son oreille à l’international ? Le président a-t-il pris peur des prédictions catastrophiques de l’OMS et de l’Occident ? Macky a-t-il paniqué, dans l’exercice ô combien délicat de la prise de décision au plus haut sommet, au point de décréter la guerre avant l'heure, alors qu'il fallait en appeler à une forte mobilisation sociale ? Ainsi, après trois mois de gestion de la Covid-19 et de mise en œuvre de la stratégie de guerre, force est de noter que sur le plan de la gouvernance, Macky a cherché un consensus politique alors qu’il fallait trouver un consensus communautaire.
Sur le plan de la communication du gouvernement sur la Covid-19, celle-ci a été plus une information vers les citoyens (donner le message) qu'une communication avec les populations et les communautés (tisser le lien et nourrir la relation). Sur le plan médical et sanitaire, le gouvernement a plus fait dans la stigmatisation des populations, en les voyant comme des prochaines victimes au lieu de les traiter comme des acteurs, les acteurs de leurs propres santé-sécurité. Sur le plan social, la manière et la distribution des vivres au Sénégal, se sont déroulées comme dans une situation d'aide alimentaire alors que nous sommes dans une crise humanitaire. En faisant exactement le contraire de comment il est largement admis de procéder sur le plan social en contexte de crise humanitaire. Il y a eu un enchaînement d’impairs que cause souvent, la panique et une mauvaise gestion de la peur, quand on prend des décisions dans l’affolement.
C’est à une véritable « révolution intérieure » que s’est livré cousin Baye Doudou dont la vie s’est du même coup transformée de fond en comble. De quasi ivrogne et mécréant qu’il était, il est sans transition devenu un pieux croyant
« Il y avait là, par malheur, un petit animalcule en bonnet carré… » ( Voltaire, « micromégas »)
J’ai beaucoup réfléchi au « cas » de cousin baye doudou et en un moment donné je me suis même demandé si ce n’était pas la peur du coronavirus qui lui avait un peu fêlé le timbre, le faisant basculer dans une sorte de crise mystique proche de la schizophrénie...mais les fréquentes visites que je lui ai rendues, et continue de lui rendre, m’ont convaincu du contraire « couse », m’a-t-il dit un jour, comme s’il avait lu dans mes pensées, « ...je ne suis pas fou dé ! Tu sais, les vrais fous sont ceux qui nient l’existence de dieu, et j’espère que tu n’en fais pas partie ! Mais cousin, tu te rends compte ! Comment un homme sain d’esprit peut-il ne pas croire en dieu et aux prophètes qu’il nous a envoyés, han ?!... » Pris de court, n’ayant pas d’argument à lui opposer ni de réponse à lui donner, j’ai préféré éluder la question et nous avons parlé d’autre chose… bien entendu lorsque je passe chez lui, baye doudou me tient toujours un sermon lénifiant, mais quand même cohérent, sur la nécessité pour chacun de se consacrer à la religion, seul moyen d’assurer le salut de notre âme ici-bas et dans l’au-delà. Selon lui. Selon lui c’est, par les temps qui courent, une nécessité plus que jamais cruciale. Je l’écoute toujours avec une attention polie et en aucune façon n’essaie de le contredire car je sais que cela ne servirait à rien, sinon peut-être seulement à créer un mur d’airain entre nous.
En effet, j’ai bien compris que mon cousin, engoncé dans ses habits neufs de dévot est absolument certain de détenir le monopole de la vérité. N’ayant pas cette prétention, je suis donc conscient que c’est à moi qu’il revient de faire l’effort d’être tolérant afin de sauvegarder notre relation à laquelle je tiens par-dessus tout. Evidemment son prêchi-prêcha n’a pas plus d’effet sur moi qu’une sonate de Mozart sur un masque dogon et ses belles paroles ne font guère mieux que tomber dans l’oreille d’un sourd.
Néanmoins, comme je l’ai dit, je reste poli et j’écoute avec curiosité et le même intérêt qu’un enfant porterait à des contes de fées les anecdotes imprégnées de merveilleux que me raconte baye doudou dont les talents de conteur ne cessent de m’étonner. par exemple j’ai écouté sans me lasser une seconde le récit du rêve qu’il a fait la veille de sa rupture définitive d’avec ce qu’il appelle à présent « les turpitudes de la vie ».
Cette nuit-là, me dit-il, il avait vu en rêve notre grand’mère Adja Ndèye sokhna K…, la mère de nos deux mamans qui sont en fait des sœurs jumelles. Elle lui était apparue toute de blanc vêtue, souriante et nimbée d’un halo de lumière.
Dans l’une de ses mains elle tenait un grand livre sur la couverture duquel étaient gravés des caractères arabes, tandis que de l’autre, elle lui faisait signe de la suivre. Mais juste à ce moment, une voix céleste avait retenti et notre grand’mère avait disparu comme par enchantement. Alors lui, baye doudou, s’était réveillé en sursaut, inondé de sueur et le cœur battant à tout rompre. Ce rêve singulier l’avait hanté toute la journée du lendemain et le soir même il s’était empressé d’aller faire un tour au « guétapan », histoire de décompresser et de se détendre un peu autour d’un verre avec ses habituels compagnons de beuverie. Quelle ne fut alors passa surprise en arrivant sur les lieux, de constater que les portes et les fenêtres du bar étaient hermétiquement closes. Sur la porte d’entrée principale était accroché un écriteau où l’on pouvait lire les mots suivants :
« Fermé pour cause de coronavirus »
Etonné et déçu, baye doudou avait alors rebroussé chemin et était rentré chez lui où il s’était enfermé dans sa chambre pour écouter la radio. C’est à ce moment qu’il apprit la nouvelle de la mort du célèbre musicien camerounais Manu Dibango de qui il était un fervent admirateur et dont il avait toujours aimé fredonner la fameux « Soul Makossa ».
Un déclic s’était alors produit dans le cerveau de mon « couse » qui avait senti comme un éclair traverser son esprit ! Le reste se passe de commentaire et je crois qu’il n’est pas besoin d’être mage ou sorcier pour deviner la suite. Mes conversations avec baye doudou ont maintenant une autre tournure, mais j’ai quand même réussi à m’y habituer en m’adaptant à la nouvelle donne. Parfois je suis passablement ahuri, ou même irrité, par ses propos et je l’écoute avec une sorte de fascination mêlée de scepticisme.
La dernière fois que je lui ai rendu visite, il a longuement disserté sur le sujet du coronavirus, arguant que ce redoutable petit animalcule n’est en réalité rien d’autre qu’une manifestation de la Toute- puissance divine, un avertissement adressé aux hommes afin qu’ils se repentent de leurs innombrables péchés et méfaits et qu’ils implorent le pardon de leur créateur. Il a particulièrement insisté sur la nécessité d’éduquer notre peuple qui, selon lui, souffre de trois grands maux : l’inconscience, l’indiscipline et l’ignorance. « Encore faudrait-il que les dirigeants de ce pays soient eux-mêmes des modèles de patriotismes, de compétence et d’honnêteté, que nos maigres ressources naturelles soient gérées avec parcimonie et que nous cessions de nous endetter pour enrichir une minorité. Le mensonge, la corruption, le faux, l’enrichissement illicite qui sont la gangrène de ce pays doivent être combattus avec la dernière énergie et punis avec la plus extrême sévérité » a martelé avec véhémence cousin baye doudou dont le bégaiement naturel s’est légèrement accentué. Il avait l’air d’un tribun et parlait d’un ton passionné dans ce langage châtié, et peut être même un peu recherché, des instituteurs de la vieille école. Quand il a eu fini sa diatribe vengeresse je n’ai pas pu m’empêcher de sourire, quelque peu amusé par sa fougue.
Mais au fond j’étais en parfait accord avec lui, et même d’avis que l’on devrait couper la tête à tous ceux qui commettent des crimes économiques ! Baye doudou m’a fait aussi remarquer, ce que je sais déjà, que le coronavirus n’épargne personne, qu’il frappe à l’aveuglette, sans distinction de race, de sexe, de religion ou de statut social et qu’en dépit de leurs moyens colossaux, de leur science avancée, de leur technologie sophistiquée, les pays les plus développés de la planète n’arrivent pas encore à le circonscrire et sont pris de panique face à son inexorable expansion. « C’est un mal que dieu a infligé à l’humanité et dont lui seul saura l’en délivrer » a-t-il conclu d’une voix vibrante d’exaltation. Les propos que m’a tenus mon cousin ce jour-là m’ont plongé dans un abîme de perplexité et je ne savais vraiment plus quoi penser de lui.
Même si je continue de nourrir une réelle amitié et une sincère affection à son endroit, je ne cesse de me poser un tas de questions au sujet du spectaculaire changement de cap de cousin baye doudou. Mon scepticisme est d’autant plus grand que, depuis que je le connais, baye doudou n’a jamais manifesté le moindre signe de religiosité en ma présence. Lui et moi n’avons d’ailleurs jamais discuté des choses de la foi et je ne l’ai jamais vu faire la prière chez lui ni à la mosquée, sauf à l’occasion des fêtes de la Korité et de la Tabaski. Cela, me semblait-il, plus par conformisme social que par piété véritable. C’est ce côté apparemment libertin voire iconoclaste qui m’a toujours plu chez baye doudou. C’était aussi la pomme de discorde entre lui et Marianne qui est, elle, d’une piété exemplaire, tout comme leur fille mimi d’ailleurs. Pour moi qui suis depuis longtemps agnostique et libre penseur, il allait de soi que cousin baye doudou le fût également. Eh bien, non ! … je me suis planté sur toute la ligne comme le prouve le brusque virage qu’il vient d’opérer et qui crée en moi une sorte de malaise, un bizarre et diffus sentiment de trahison. De tout ce qui vient d’être relaté j’ai déduit qu’en réalité, dans les profondeurs du subconscient de mon cousin, dans les replis les plus secrets de sa psyché, ont toujours subsisté des croyances solidement ancrées et pour ainsi dire, indéracinables. Il aura suffi d’un rêve nocturne associé à deux faits accidentels pour les faire ressurgir de la manière la plus imprévisible et leur redonner toute leur force primitive, leur puissance originelle.
En un tournemain, elles ont radicalement transformée l’existence de cet homme et changé sa vision du monde de fond en comble. « nit dafa lëndëm »* proclame un adage bien de chez nous : la stupéfiante pirouette de mon cousin semble en confirmer la véracité.
Tel un lointain avatar de Janus, il avait deux visages dont je ne connaissais en fait que l’une des faces et dont l’autre vient de se révéler à moi !... ce matin encore, devant ma tasse de café fumant, j’ai longuement réfléchi à l’étrange métamorphose de baye doudou. Un trait d’humour m’a alors traversé l’esprit, me suggérant que pour ce qui le concerne, il serait peut-être plus indiqué d’employer ce mot de mon invention « coronamorphose » !
Ce drôle de néologisme m’a fait sourire et, dans mon for intérieur, je me suis dit que décidément les mystères de l’esprit humain sont aussi impénétrables que les voies du seigneur ! L’histoire de mon cousin baye doudou en est, me semble-t-il, la plus parfaite illustration. Mais n’est-elle pas aussi la preuve que le coronavirus ne provoque pas que des hécatombes et qu’il est peut-être même à l’origine de certains singuliers … « miracles » ?
Hypocrite lecteur mon semblable, mon frère, je te laisse le soin de répondre à cette délicate question !
* « l’homme est un être obscur »
FIN
Saint-Louis-du-Sénégal, Juin 2020
Par Ibou Dramé SYLLA
UN RECIT DE MA VIE A L’ECOLE
Les enseignants – ceux du cours maternel autant que ceux des universités – forment une armée noble aux exploits quotidiens, jamais chantés, jamais décorés. Armée toujours en marche, toujours vigilante
« Les enseignants – ceux du cours maternel autant que ceux des universités – forment une armée noble aux exploits quotidiens, jamais chantés, jamais décorés. Armée toujours en marche, toujours vigilante. Armée sans tambour, sans uniforme rutilant. Cette armée-là, déjouant pièges et embûches, plante partout le drapeau du savoir et de la vertu »
Mariama Ba, Une si longue lettre Je me veux très succinct pour ce qui va suivre. En fermant les yeux, en cette veille de la reprise des enseignements-apprentissages, je vois la figure de mon professeur de portugais de la classe de 2nde s2 du lycée Ibou Diallo de l’année scolaire 2006-2007 lisant à notre intention la lettre ouverte du Cusems. J’ai perdu l’exemplaire de cette poignante missive qui me fit verser des larmes. Plus de dix ans après, c’est en enseignant que je me rends compte que rien n’a changé, ou du moins pas grand-chose, dans la condition de traitement de ces soldats du savoir.
Etre enseignant, c’est une vocation, un sacerdoce. Senior Barry avait lu le texte en un mardi soir en faisant les cent pas entre les rangées. La démarche assurée, la voix de stentor et la gestuelle dont le balancement de la tête m’ont fait saisir la gravité de la situation. C’était pour la satisfaction de la plateforme revendicative que le collège de syndicats Cusems avait observé des jours de grève.
Le ministre Sourang, ne pouvant répondre aux attentes pourtant si raisonnables et légitimes de nos maitres, avait demandé, pour sauver l’année, que nous autres élèves soyons évalués pour passer en classe supérieure sur la base de la seule moyenne du premier semestre. Le monstre froid dont parlait Nietzsche venait de montrer que les enfants de la république seraient les agneaux du sacrifice au lieu d’ajuster les dépenses faramineuses de la classe politico-affairiste sur la santé et l’éducation. Ce fut pénible tant l‘incertitude avait gagné les esprits. Finalement, nos dignes et braves maîtres avaient reculé pour avoir compris que la bêtise avait élu domicile dans le cœur de nos gouvernants d’alors. En cette vieille de la reprise des cours suspendus pour protéger les élèves et enseignants de la covid-19, j’ai mesuré la portée de mon choix de suivre les pas de mes maîtres en devenant un des leurs. Travaillant pour semer la vertu et l’amour du beau, du Juste et du Vrai dans le cœur des jeunes de notre pays, les enseignants sont de ceux qui ont un haut degré du patriotisme.
En ployant le genou devant les bailleurs qui financent le secteur éducatif, l’Etat a décidé d’envoyer les enseignants et les élèves, futurs élites de ce pays, au front d’une guerre sanitaire aux conséquences probablement désastreuses pour la nation. Qu’en sera-t-il de la relève après l’effondrement ?
Avec les mesures barrières édictées par les autorités sanitaires, je subirai une amputation dans la gestion de ma salle de classe. Je ne saurai faire les cents pas entre les rangées pour vérifier la prise de note des élèves, je ne saurai donner une barre de craie à l’un d’eux pour la correction d’un exercice au tableau, je ne saurai et je ne saurai… Ils se méfieront de moi comme je me méfierai d’eux. Ce sera très pénible !
Ainsi, la relation pédagogique subit un sacré coup. Tout cela à cause d’un diabolique projet de vouloir mettre en mal les enseignants et les populations. La détermination et le don de soi de cette armée sans armure en fer ou acier ont eu raison de la monstruosité des politiques. Et demain, nous irons à l’école !
ALOYSE DIOUF QUITTE LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ
Le Directeur de Cabinet d'Abdoulaye Diouf Sarr va rejoindre l'OMS Sénégal
C’était la der, pour Dr Aloyse Waly Diouf. Le Directeur de Cabinet du ministère de la Santé et de l’Action sociale a présenté, pour la dernière fois, la situation du jour de l’évolution du coronavirus au Sénégal. Pour cause, il a annoncé sa démission du département ministériel. Une nouvelle mission l’attend au bureau de Dakar de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS).
Sur sa page Facebook, il a adressé un message à l’endroit de son désormais ex patron, le ministre Abdoulaye Diouf Sarr : « Aucune séparation n’est facile ! Monsieur le Ministre, cher ADS (Abdoulaye Diouf Sarr), si au moment d’écrire ces lignes ,ma plume trahit les effluves de mon esprit. C’est parce que ma reconnaissance envers vous à jamais ne tarira. En vous j’ai découvert un leader, un meneur d’hommes et de femmes, un homme qui inspire confiance et qui sait faire confiance. Ces trois années vécues à vos côtés m’ont beaucoup forgé. Aujourd’hui, je vous remercie d’avoir accepté que je puisse partir vers un autre challenge. Vos conseils avisés et vos encouragements me permettront sans doute de faire face à ce nouveau défi. Merci Mr le Ministre, cher ADS ! Diokondial (merci, en sérère) ! »
Selon nos informations, il devrait être remplacé à la direction du Cabinet ministériel par Alphonse Ousmane Thiaw, actuel Conseiller technique du Directeur de la Pharmacie nationale d’approvisionnement, chargé des affaires juridique et du contentieux.