Dakar, 11 fév (APS) – Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, est arrivé mardi soir pour une visite de trois jours au Sénégal.
Il a été accueilli par le ministre d’État, secrétaire général de la présidence de la République, Mahamad Boune Abdallah Dionne, à l’aéroport Blaise Diagne.
M. Trudeau effectue une visite officielle au Sénégal pour "consolider les relations de coopération multiformes" entre Dakar et Ottawa.
Cette visite d’une durée de trois jours intervient dans un "contexte particulier", 2020 étant déclarée "année du Canada au Sénégal", selon le Bulletin d’information gouvernementale (BIG, officiel).
Les deux pays entretiennent, depuis 1962, "d’étroites relations fondées notamment sur les valeurs communes de respect des libertés et de l’Etat de droit ainsi qu’une appartenance à la francophonie".
Selon le BIG, les relations économiques entre Dakar et Ottawa "offrent un potentiel intéressant de croissance, notamment dans les secteurs des mines, de l’agriculture, du pétrole, du gaz, des énergies propres et du numérique".
Une soixantaine de compagnies canadiennes sont aujourd’hui actives dans les domaines stratégiques de l’économie sénégalaise à l’instar du secteur minier, souligne-t-on.
Le BIB relève que les échanges commerciaux entre les deux pays s’établissaient à 60,7 millions $ CAD en 2018 (environ 27.282.405.722 FCFA).
Il signale que les entreprises canadiennes occupent une place stratégique dans différents secteurs, particulièrement le secteur aurifère.
Selon le BIG, "en 2020, les investissements canadiens au Sénégal dépasseront le milliard de dollars canadiens (environ 449.463.026.725 FCFA)".
La structure souligne qu’afin de "mieux valoriser" les atouts dont dispose le Sénégal, l’Ambassade sénégalaise à Ottawa organise, chaque année, un forum économique au Canada. L’édition 2020 prévue au mois de juin 2020 sera organisée en partenariat avec la Province du Québec et sa Délégation Générale à Dakar.
Le BIG signale aussi que l’aide publique au développement, estimée à 1,3 milliard de dollars CAD (environ 452.162.647.000 FCFA) depuis 1962, "a significativement contribué aux efforts de lutte contre la pauvreté" au Sénégal.
Selon la même source, "entre 2017 et 2018, cette aide a atteint 87,82 millions de dollars CAD (environ 39.708.923.000 CFA), faisant du Canada le troisième bailleur de fonds bilatéral pour le Sénégal qui en est le premier bénéficiaire en Afrique de l’Ouest".
Elle rappelle qu’en novembre 2013, les deux pays ont signé un cadre de responsabilité mutuelle en matière de coopération au développement.
Le Sénégal et le Canada entretiennent une coopération dans les domaines militaire, culturel, de la formation professionnelle, selon le BIG, notant qu’en 2018, il y avait 1430 étudiants sénégalais qui détenaient un permis valide pour étudier au Canada.
Le Bulletin signale que le Sénégal et le Québec sont liés par un Accord d’Entente et de Coopération au titre duquel, et chaque année, un lot de 52 bourses d’exemption est mis à la disposition du Sénégal.
En matière de formation professionnelle, le Québec est en partenariat avec le Sénégal dans le cadre de la mise en place des Instituts supérieurs d’enseignement professionnel (ISEP), souligne-t-on.
par Boubacar Diouf
POURQUOI PAS SARKOZY À LA CPI ?
L’OTAN qui s’inquiète de ce qui passe en Libye, c’est un peu comme un pyromane qui revient sur le lieu de l’incendie qu’il a allumé pour pleurer avec les propriétaires de cette résidence familiale
La France ayant ratifié le statut de Rome qui reconnaît la Cour pénale internationale (CPI), advenant sa condamnation dans l’affaire du pognon libyen, je pense que Sarkozy mériterait aussi d’être jugé à la CPI pour trahison contre l’humanité. Je m’explique.
Quand je regarde ce qui passe en Libye, la seule image qui me vient en tête, c’est le scénario qui se joue lorsqu’une grosse proie tombe dans la savane. Quand un gros ongulé s’effondre dans la savane, les compétitions, affrontements et jeux d’influence de toute sorte entre carnivores s’organisent rapidement autour de sa carcasse.
Très souvent, ce sont les volées de vautours qui, de leurs yeux perçants et de leurs piaillements sinistres, tombent du ciel pour enfoncer leur tête dénudée dans les entrailles de la bête.
Friands de viscères, les gros mâles exigeront prestement par la force que les plus petits attendent qu’ils finissent de manger avant d’ambitionner. Mais bientôt, ces oiseaux se feront abréger leur repas par l’arrivée des hyènes qui s’empareront de la bête morte. Délogés de la grande mangeaille, les vautours stationneront non loin du repas en espérant profiter de la moindre faille dans le dispositif des hyènes pour foncer sur la proie et en arracher rapidement un morceau. Il arrive aussi que les effluves de boustifaille parviennent aux narines des lions qui, contrairement à la croyance populaire, ne lèvent pas le nez sur la charogne quand la chasse n’est pas fructueuse. Ils viendront évincer les hyènes qui essayeront incessamment de revenir à la table en hurlant au ciel leur frustration.
En peu de temps, la carcasse deviendra le terrain de toutes les convoitises. Les vautours, les corbeaux et les marabouts se tiendront non loin des hyènes, mais aussi des lycaons qui, en bande organisée, peuvent même déloger les lions par la force du nombre. De cette grosse proie généreuse, chacun voudra obtenir un morceau. Voilà une situation hypothétique qui rappelle ce qui se passe aujourd’hui en Libye. Ce riche pays est devenu une grosse proie, objet de toutes les convoitises, et un lieu de convergence de beaucoup de nations prédatrices. Pendant que certains profitent du chaos pour y écouler des armes, d’autres voient le territoire libyen comme une carte maîtresse pour leurs ambitions géopolitiques. Mais, toutes ces armées et influences étrangères qui y débarquent en disant vouloir le bien des Libyens cherchent davantage à le prendre qu’à le faire.
Difficile de ne pas être cynique quand on voit des pays de l’OTAN se réunir en Allemagne pour parler de stabilité en Libye.
L’OTAN qui s’inquiète de ce qui passe en Libye, c’est un peu comme un pyromane qui revient sur le lieu de l’incendie qu’il a allumé pour pleurer avec les propriétaires de cette résidence familiale.
Oui, la campagne militaire en Libye a été mandatée par l’ONU, mais ce qu’on oublie souvent de préciser c’est que la bénédiction a été obtenue avec l’acharnement d’une personne : Nicolas Sarkozy. Souvenons-nous. Isolé en Europe dans son désir d’instaurer une zone d’exclusion aérienne en Libye, Sarkozy s’était tourné vers la Ligue arabe pour le soutenir. Il savait en effet que le roi Abdallah d’Arabie détestait le colonel libyen.
En cause, en mars 2009, devant tous les dirigeants du monde arabe réunis à Doha, le belliqueux chef de Tripoli avait qualifié le monarque saoudien de marionnette au service des Britanniques et des Américains. Pour lui faire payer son arrogance, l’Arabie saoudite pèsera alors de tout son poids, très lourd, pour que la Ligue arabe demande à son tour cette zone d’exclusion aérienne que voulait Sarkozy. Avec ce coup de main béni, le duo Sarkozy-Juppé réussira à convaincre Barack Obama et David Cameron que le combat qu’ils allaient livrer en Libye était noble et indispensable pour la protection des populations civiles contre les troupes de Kadhafi qui planifiaient de massacrer des insurgés retranchés à Misrata et Benghazi.
Le mandat du Conseil de sécurité des Nations unies dans la poche, Sarkozy est allé en guerre avec sa coalition. Une guerre qu’on nous avait présentée comme une entreprise préventive de protection des civils contre un imminent carnage. Pourtant, sans vouloir excuser Kadhafi pour ses dérives autoritaristes et violentes, on sait aujourd’hui que cette entreprise militaire sur fond de nobles sentiments était bien plus un honteux projet personnel de convoitise des richesses de ce pays; un cas typique d’impérialisme sauvage et dominateur.
En septembre 2016, la Commission des affaires étrangères du Parlement britannique, qui s’est penchée tardivement sur la question, est arrivée à la conclusion que la décision de bombarder la Libye en 2011 était « fondée sur des postulats erronés ». Elle ajoute même que les véritables motivations de Nicolas Sarkozy étaient bien plus de servir les intérêts de son pays, de mettre la main sur plus de pétrole libyen et d’accroître l’influence de la France en Afrique du Nord.
Les parlementaires britanniques ont également souligné que cette guerre était indissociable des intérêts politiques personnels de Sarkozy.
Ce faisant, ils confirmaient dans leur rapport ce que beaucoup de gens soupçonnaient largement. Rappelons ici que les premières bombes de la France ont commencé à tomber quand le fils du dictateur libyen, Saïf Al-Islam, a sorti des infos que Sarkozy ne voulait certainement pas entendre. Il a demandé à Nicolas de rembourser l’argent que son père lui avait donné pour sa campagne de 2007, que certains évaluent à 50 millions d’euros.
Il suffit de lire toutes les révélations apportées sur le sujet par le site Mediapart.fr pour comprendre à quel point les liens entre Kadhafi et Sarkozy avaient été solidement resserrés par l’argent du pétrole libyen. L’un voulait se faire lécher proprement pour redevenir fréquentable après sa désignation comme commanditaire de l’explosion du vol 103 de la Pan Am et l’autre était convaincu que l’argent n’a pas d’odeur quand il peut mener à la présidence.
Alors, en octobre 2005, Mouammar Kadhafi, diabolisé par l’Occident, a accueilli Sarkozy en Libye et il s’est passé quelque chose. Même si l’histoire ne dit pas s’il y a eu un trip-au-lit entre les deux pendant cette visite, comme dirait Jay Du Temple à Occupation double, on sait qu’il a eu bien des rapprochements qui ont donné à Sarkozy l’envie de revoir son richissime ami. Si bien qu’en décembre 2007, en visite à Paris avec ses lunettes noires qui lui donnaient l’allure d’une rock star du désert, Kadhafi avait installé une tente bédouine dans le parc de l’hôtel Marigny et demandé que Sarkozy vienne le voir. Que voulez-vous, quand on tient solidement quelqu’un par les couilles, on n'a pas besoin de forcer pour lui faire comprendre qui est le patron.
Aujourd’hui, rares sont les gens qui pensent que ce sont de simples bons sentiments qui ont guidé la décision du président français d’aller en guerre. Toutes les révélations sur les liens entre Sarkozy et Kadhafi qui continuent de défrayer la chronique semblent démontrer que le président français cherchait aussi une façon d’empêcher que ses propres squelettes ne sortent des dunes du désert libyen et viennent le hanter à l’Élysée. En fait, La campagne militaire de 2011 en Libye cache un scénario qu’on a déjà vu en Irak avec la propagande de George Bush autour d’armes de destruction massive qui n’ont jamais existé. Résultat, comme l’Irak avant elle, la Libye aussi est aujourd’hui devenue un énorme bourbier, pour ne pas dire un volcan actif dont les projections brûlent le Sahel et font beaucoup de morts.
Pendant les dernières années de son règne, le colonel Kadhafi disposait d’un arsenal évalué à 50 milliards de dollars par les experts.
En plus d’une partie de cet armement qui s’est évanouie dans la nature, la Libye instable est devenue également un gigantesque marché d’armes pour tous les groupes djihadistes qui traumatisent le Sahel. Sans établir un lien de causalité directe généralisé, les spécialistes de la question s’accordent sur le fait que depuis la mort de Kadhafi et la déstabilisation de son pays, le Sahel est devenu le lieu de prédilection de tous les mouvements extrémistes et criminels qui y assassinent des gens par milliers. Juste pour cette année, l’ONU évalue le nombre de victimes du djihadisme au Sahel à 4000. Ajoutez à ces carnages les centaines de milliers de réfugiés au Burkina Faso, au Mali et au Niger et vous comprenez toute l’ampleur de la malédiction libyenne.
Maintenant, en dehors de la France de Macron qui s’active fortement dans le Sahel et l’Amérique qui l’assiste avec des drones et des infos, où sont passés les autres pays qui ont participé à déstabilisation de la Libye ? Que font de significatif la Belgique, la Bulgarie, le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Espagne, les Pays-Bas, la Roumanie, la Grèce, la Turquie, l'Arabie saoudite devant tous ces Africains qui meurent par milliers, indirectement victimes d’une guerre qui n’était pas la leur ?
Pendant que les pays du Sahel enterrent leurs morts et que les réfugiés pleurent la terre de leurs ancêtres, la Libye voit discrètement ou ostensiblement converger sur son territoire bien des nations prédatrices qui la perçoivent désormais comme une proie imposante agonisant dans la savane. L’enjeu ici : qui se taillera la part du lion ?
GRIBOOUILLE DE LA SEMAINE PAR IBOU LO
LA PEUR DU CORONAVIRUS
EXCLUSIF SENEPLUS - L'épidémie qui a déjà fait plus de mille morts en Chine suscite des craintes au pays de la Teranga où autorités publiques et populations sont en alerte maximale
Le Coronavirus est l'objet de votre rubrique de la semaine, un dessin de notre illustrateur qui met en exergue l'inquiétude du Sénégal face à cette épidémie qui continue de décimer la population chinoise et d'ailleurs.
Iboo Lo est ingénieur chargé d’affaires et libéro les lundis soirs. Il est également dessinateur - illustrateur à l'humour à la fois sucré, pimenté et surréaliste sur la vie sociale et politique du Sénégal et de sa diaspora. Ses dessins sont à retrouver sur SenePlus, chaque semaine à travers la "Griboouille de la semaine".
par Makhtar Diouf
LE FRANC CFA OU LE CHAOS ?
EXCLUSIF SENEPLUS - Le cheminement avec le Cfa a été parsemé d’autres embûches non favorables au développement - Gardons notre BCEAO expurgée de ses scories coloniales pour mener notre première expérience de monnaie commune indépendante
D’éminents économistes africains et français ont attiré l’attention sur le franc Cfa avec des éclairages pertinents. Mais bon nombre d’Africains francophones sont sceptiques, résistants au changement, pensant que le franc Cfa est la panacée, et que les pays africains de la zone franc (pazf) sont incapables de prendre en mains leur destinée monétaire. Sans le franc Cfa, ce sera le chaos. Ils sont comme cet esclave dont parlait Cheikh Anta Diop : libéré par son maître, il va jusqu’à la porte, puis revient ; il ne sait pas où aller, il a perdu tout repère, toute idée d’émancipation, pensant que la servitude est sa condition naturelle.
Par conséquent, le devoir d’information et de sensibilisation doit continuer. Commençons par attirer l’attention sur l’historique du franc Cfa, dans ses aspects techniques, mais d’abord dans son côté crapuleux jonché de délits et de crimes, pour voir qui y tenait vraiment et pourquoi.
La face crapuleuse de l’historique du franc Cfa
Deux présidents français pourtant assez différents, le général de Gaulle et Nicolas Sarkozy ont fait du franc Cfa un cactus : qui s’y frotte s’y pique. Comme le montrent les exemples suivants.
Guinée : Faux monnayage contre Sékou Touré
Lorsque Sékou Touré proclame l’indépendance de la Guinée en 1958 et sort de la zone franc en 1960 pour créer le franc guinéen devenu syli, il devient pour de Gaulle l’homme à abattre. Le témoignage nous vient d’un de ses hommes de main pour les affaires africaines, surnommé « ministre de l’Afrique », Maurice Robert, un des piliers de la Françafrique, moins connu que Jacques Foccart dont il est un proche collaborateur. Il est chargé du secteur Afrique du Sdece (Service de documentation extérieure d’espionnage et de contre-espionnage).
En 2004, un an avant sa mort, il libère sa conscience en publiant un ouvrage (Entretiens avec Jacques Arnault) intitulé Maurice Robert, ministre de l’Afrique. Voici ce qu’il écrit sur leurs rapports avec Sékou Touré :
Nous devions déstabiliser Sékou Touré, le rendre vulnérable, impopulaire et faciliter la prise du pouvoir par l’opposition… Parmi ces actions de déstabilisation, je peux citer l’opération “Persil”, par exemple, qui a consisté à introduire dans le pays une grande quantité de faux billets de banque guinéens dans le but de déséquilibrer l’économie… Cette méthode du faux monnayage est en revanche redoutablement efficace : les billets (fabriqués en France), de très bonne qualité, font tabac à Conakry, où le climat humide détériore la monnaie (guinéenne) imprimée à Prague, et inondent le marché guinéen. Cette phase de l’opération ‘’Persil’’ est un succès, ce qui ne fut pas le cas des autres.
Les ‘’autres cas’’, c’est l’armement et l’entraînement de mercenaires pour faire tomber Sékou Touré, comme l’écrit Maurice Robert, ajoutant que sa liquidation physique avait même été envisagée. Le faux monnayage est un délit contre lequel la police internationale Interpol a été créée en 1923. De Gaulle s’y est livré pour défendre son franc Cfa.
Togo : Sylvanus Olympio assassiné
Sylvanus Olympio n’a pas le profil du « président africain ami de la France ». Par ses origines lointaines (Brésil, Nigéria). Par sa formation : diplômé de London School of Economics and Political Science, ancien cadre de la multinationale Unilever. Il est polyglotte : anglais, français, allemand (né à Lomé sous l’occupation allemande).
En mai 1960 il déclare à l’Agence France Presse : « Je vais faire mon possible pour que mon pays se passe de la France». Selon Maurice Robert, à l’Elysée, Olympio est considéré comme plus dangereux que Sékou Touré. Début janvier 1963 il décide de quitter la zone franc pour créer une monnaie togolaise indexée au deutchmark allemand. Le 13 de ce mois il est criblé de balles à 7 h du matin, alors que la radio France Inter a annoncé sa mort une heure plus tôt. Selon le vétéran togolais GoodwinTeteh, il a été tué par des militaires français. L’ambassadeur de France au Togo Henri Mazoyer avait demandé à un légionnaire français Gnassingbé Eyadéma (futur président) d’endosser le crime contre paiement de 300 000 francs, une fortune à l’époque.
Mali : coup d’Etat contre Modibo Keita
Au Mali, le président Modibo Keita quitte la zone franc en 1962 et crée une monnaie nationale. En 1968, il est renversé par un coup d’Etat qui installe au pouvoir un autre ancien légionnaire de l’armée française Moussa Traoré qui fait revenir le Mali dans la zone franc. Modibo Keita meurt en détention en 1977 dans des conditions non élucidées.
Côte d’Ivoire : Laurent Gbagbo enlevé et déporté
A la suite des élections controversées de 2010 en Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo au pouvoir se voit refuser les caisses de la BCEAO pour les besoins de son administration. Il décide de quitter la zone franc et de créer une monnaie ivoirienne, ce qui aurait sonné le glas du franc Cfa. Aussitôt le 3 avril 2011, Sarkozy lui envoie son armée pour l’enlever et le déporter aux Pays-Bas (Cour pénale internationale). Il installe au pouvoir A. Ouattara, ancien cadre du FMI, ancien sous-gouverneur puis gouverneur de la BCEAO, intégriste du franc Cfa.
Libye : Khadafi assassiné
Le journaliste américain Sydney Blumenthal est le conseiller technique de Hilary Clinton, ministre des affaires étrangères (Secretary of State) sous l’administration Obama 2009 - 2013. Il envoie à celle-ci secrètement par courrier électronique privé ‘’email’’ (ce qui est illégal) plus de 3000 mémos. En 2015, la justice américaine découvre l’affaire qui fait scandale (Hilary emailgate). Un de ces mémos du 2 avril 2011 révèle les véritables raisons de l’intervention française en Libye sur ordre de Sarkozy et de l’assassinat de Khadafi le 20 octobre 2011 :
Selon des sources autorisées, Khadafi disposait d’une masse de 143 tonnes d’or et du même montant d’argent équivalent à plus de 7 milliards de dollars qu’il comptait utiliser pour créer une monnaie africaine qui aurait entre autres été une alternative au franc Cfa. C’est lorsque Sarkozy a été informé de ce plan par ses services de renseignement qu’il a déclenché l’attaque en Libye en soutien des rebelles. Il déclare alors que Khadafi est une menace pour la sécurité financière du monde et que la France a décidé d’assumer son rôle devant l’histoire.
Cette monnaie africaine devait aussi « mettre fin à la tyrannie du dollar, monnaie de compte du pétrole » et c’est Hilary Clinton de mèche avec Sarkozy qui a persuadé Obama d’intervenir aussi en Libye avec le mensonge amplement médiatisé d’action humanitaire contre Khadafi qui allait massacrer son peuple.
Pourquoi diantre cet acharnement de gouvernements français à défendre le franc Cfa jusqu’au crime ? Quel est le mobile du crime ? Et si François Mitterrand avait été mis sur une piste ? Dans un ouvrage de 1957 Présence française et abandon, l’ancien ministre des colonies (1950-51), écrivait : « Sans l’Afrique il n’y aura pas d’Histoire de France au 21ème siècle ... Déjà la France sait combien l’Afrique lui est nécessaire » (p. 237).
Dans l’antre du franc Cfa
Pour pénétrer l’antre du franc Cfa, sans risque d’erreur ou de subjectivisme, prenons comme boussole deux ouvrages écrits par des Français ardents défenseurs de la zone franc : Bernard Vinay, ancien gouverneur de la Banque des Etats d’Afrique centrale, auteur de Zone franc et coopération monétaire, Ministère de la coopération, 1980 ; Patrick et Sylviane Guillaumont, professeurs d’Economie à l’université de Clermont-Ferrand, consultants des autorités monétaires françaises, auteurs de Zone franc et développement africain, 1984.
Bernard Vinay dit d’emblée que « la zone franc est une organisation unique au monde » (p.3) et qu’elle repose sur trois principes : parité du franc Cfa avec le franc français en libre convertibilité ; centralisation des devises africaines (réserves de change) au Trésor français avec garantie du franc Cfa ; libre circulation des capitaux. Le pivot de la zone franc est la centralisation des devises. C’est pour cela que la zone franc a été créée en 1939 par la France avec toutes ses colonies d’Afrique et d’Indochine pour se constituer un fonds de guerre.
Compte d’opérations et Garantie de la France
Selon B. Vinay « la France s’engage à fournir sur simple demande des francs français avec lesquels les agents économiques des pays partenaires pourront, soit régler leurs achats de biens et services, soit acquérir sur le marché des changes de Paris toutes les devises dont ils pourraient avoir besoin… »
Que deviennent les devises des pays africains au Trésor français ? :
Les conventions que les banques centrales (de la zone franc) ont passées avec le Trésor français leur font obligation de centraliser toutes leurs ressources de change en francs français dans les ‘’ comptes d’opérations’’ que cet organisme leur a ouverts ... La Banque de France devait se porter acheteur de la monnaie dont le cours en francs français risquait en fonction d’un excédent des demandes sur les offres de dépasser la limite haute. Dans ces conditions les opérations de change sur le marché des changes de Paris pouvaient conduire la Banque de France à intervenir et éventuellement à accumuler des ressources de change provenant de cessions par des agents économiques des pays partenaires de la zone franc (p.225).
Cela signifie que les devises africaines au Trésor français sont converties en francs français pour soutenir le cours du franc français au jour le jour, contribuant ainsi, autant que possible, à la stabilité de cette monnaie.
Rappelons qu’en juillet 1944, 44 pays se réunissent à Bretton-Woods aux Etats-Unis pour se pencher sur l’instabilité monétaire. Le FMI et la Banque mondiale sont créés. Une autre mesure prise est la fin de l’étalon-or (émission de monnaie gagée sur l’or). Les Américains dont l’économie n’a pas été affectée par la guerre qui a eu lieu en Europe ont l’économie la plus puissante et peuvent imposer le dollar comme gage de toute émission monétaire. C’est l’avènement du ‘’gold exchange standard’’ (étalon change or) : l’émission du dollar est gagée sur l’or, et l’émission des autres monnaies est gagée sur le dollar jugé aussi bon que l’or (« as good as gold »), à un taux fixe autour d’une marge de fluctuation de plus ou moins 1 pour cent (passé à plus ou moins 2,25 pour cent). Ces monnaies doivent être soutenues sur le marché des changes par des opérations d’achats et de ventes de devises pour rester dans ces limites afin d’éviter la dévaluation.
Pierre Mendès-France représentant français à la réunion de 1944 signe l’accord, mais de Gaulle ne le ratifie qu’un an après, le 26 décembre 1945, après avoir la veille (25 décembre) créé le franc Cfa. Bizarre, non ?
La garantie a-t-elle été effective ?
Suivons B. Vinay : « La garantie est virtuelle aussi longtemps que les instituts d’émission (africains) disposent de réserves (p. 116) … Lorsque les pays de la zone franc disposent de réserves de change, cette garantie est purement nominale puisqu’elle n’est pas mise à contribution » (p.117).
P et S Guillaumont présentent l’évolution des avoirs extérieurs des pays de l’UEMOA (p. 68 – 69) : de 1963 à 1979 ils ont été créditeurs et en progression. Et ils écrivent : « Lorsque le solde est positif, il constitue un gain de devises pour la France (p. 57) ».
Lorsque le solde du compte d’opérations des pays de l’UEMOA devient négatif en 1979, la France s’écarte pour faire passage au FMI qui intervient pour la première fois dans ces pays avec des financements assortis de conditionnalités : les programmes d’ajustement structurel. P et S Guillaumont en rendent ainsi compte : « La conditionnalité du FMI modérait les risques que pouvait faire courir à la France l’automaticité du recours au compte d’opérations » (p. 209).
Quels risques pour la France ? Pour une fois qu’il lui est donnée l’occasion de faire jouer sa garantie, elle se décharge sur le FMI. (C’est la France qui en 1962 avait parrainé l’admission de ses anciennes colonies au FMI). S’il est vrai que les avoirs extérieurs des pazf n’ont jamais atteint 10 pour cent des avoirs extérieurs français, la Banque de France les utilisait tout de même sur le marché des changes pour soutenir le cours du franc français. Autre mise à contribution des pazf. En 1940, les Allemands occupent Paris, et les autorités françaises pour sauvegarder les lingots d’or de la Banque de France en transfèrent une partie sur l’axe Dakar-Thiès-Kayes.
Franc Cfa et développement
L’argument sempiternellement avancé pour le franc Cfa est la stabilité. Quelle stabilité ? Sûrement pas politique, au regard du record détenu de coups d’Etat. Au plan économique, dans l’UEMOA a, 6 pays sur 8 sont classés PMA (pays moins avancés). La stabilité se réduit en fait à l’octroi de crédits au compte-gouttes aux économies africaines, pour soi-disant éviter l’inflation.
Lisons B. Vinay : Les politiques de crédit expansionnistes sont généralement inadaptées dans ces pays. Les structures de production sont insuffisamment diversifiées, et en tout état de cause manquent d’élasticité : elles ne sont pas prêtes à répondre à une croissance rapide de la demande provoquée par le développement du crédit. Un développement rapide du crédit est de ce fait plus enclin sur le plan intérieur à peser sur les prix qu’à générer l’activité (p. 95).
Autrement dit, il faut laisser les pays africains dans le statu quo du sous-développement. Il ajoute : « Les banques centrales de la zone franc ont pendant longtemps fixé des taux d’intérêt parmi les plus bas du monde » (p.98). Une bonne manière d’encourager la fuite de capitaux vers des sites plus rémunérateurs.
Le cheminement avec le franc Cfa a été parsemé d’autres embûches non favorables au développement. Par exemple, les entreprises françaises ont longtemps disposé d’un quasi-monopole sur les importations de produits manufacturés des pazf. Avec l’osmose entre le franc français et le franc Cfa, traiter avec un fournisseur français, c’est comme aller faire ses courses au marché du quartier. Alors que son concurrent allemand peut être plus compétitif en prix et qualité, mais éloigné par les complexités de change monétaire, et aussi la langue. Les dévaluations du franc français, 8 fois depuis 1948, compte tenu de la parité fixe avec le franc Cfa, ont entraîné des pertes importantes pour les pazf. Surtout au niveau de la dette contractée en d’autres devises. Des milliards de francs sont ainsi partis en fumée.
Il n’est pas étonnant que le franc Cfa n’ait pas contribué au développement des pazf. Les derniers Rapports 2018 et 2019 sur l’Indice de développement humain du Programme des Nations unies pour le développement sont accablants. Les 8 pays de l’UEMOA figurent tous dans le peloton de queue, derrière le Cap Vert et la Mauritanie, pays hors zone franc. L’indice de développement humain prend en compte le revenu par tête, mais aussi les indicateurs d’éducation et de santé. Parmi les 12 premiers pays africains figure un seul de la zone franc, le Gabon classé 7ème grâce à son revenu par tête généré par d’importants pétrodollars et une faible population d’un peu plus de 2 millions d’habitants.
Les obstacles au développement des pays africains de la zone franc sont certes nombreux. Mais le franc Cfa en est un. « Le sort de l’homme se joue sur la monnaie », écrivait Jacques Rueff, conseiller monétaire du général de Gaulle, dans L’âge de l’inflation (1963).
Quand la France lâche du lest
L’appartenance à la zone franc autorisait à faire fi de la souveraineté des membres africains. Comme le dit B. Vinay :
Jusqu’en 1973, les gouverneurs généraux des banques centrales étaient désignés par le gouvernement français (p. 126). Après l’africanisation des postes de direction, un accord entre la France et les pays membres stipule que deux administrateurs désignés par le gouvernement français participent au conseil d’administration de la BCEAO dans les mêmes conditions et avec les mêmes attributions que les administrateurs désignés par les Etats membres (p.127)… Il est des circonstances où les décisions des conseils d’administration ne peuvent être prises qu’avec l’appui effectif de la représentation française » (p. 129).
La sortie de Madagascar et de la Mauritanie en 1973 n’a pas été sans effet sur les mesures de concession partielle de souveraineté qui allaient suivre. Sans doute pour ne pas donner des idées à d’autres. Le premier Africain gouverneur de la BCEAO est nommé en 1974, et en 1977-78 le siège est transféré de Paris à Dakar.
L’année 2019 a été marquée par des attaques sans précédent contre le franc Cfa : manifestations, écrits documentés d’intellectuels africains appuyés par des démocrates français, accusations de responsables politiques italiens contre la France dans sa politique avec les pays africains … La coupe était devenue trop pleine. Ce qui a conduit au projet de remplacer le franc Cfa par l’éco, avec comme principales mesures la fin de la détention des réserves de change de l’UEMOA en France et de la représentation française dans la BCEAO.
Du franc Cfa à l’éco
Le projet éco court-circuite le projet initial de dirigeants africains de la sous-région consistant à procéder en deux étapes : dans un premier temps, au niveau de l’UEMOA remplacer le franc Cfa par une monnaie indépendante, adopter une monnaie commune entre les pays à monnaies autonomes, pour dans un second temps fusionner les deux monnaies dans le cadre de la Cedeao, à l’horizon 2005.
Les pays de la Cedeao hors zone franc ont été pris de court par l’initiative éco. Dans l’immédiat, les pays Uemoa doivent lancer leur expérience de monnaie autonome, quitte à ce que des pays de la Cedeao viennent y adhérer par la suite individuellement.
Pour une monnaie ouest-africaine non-Cfa
Faut-il brûler le palais présidentiel de Dakar parce qu’il a été la résidence des gouverneurs de l’AOF ? Personne n’y pense. Gardons notre BCEAO, expurgée de ses scories coloniales, pour mener notre première expérience de monnaie commune indépendante.
Quid des critères de convergence ?
Les critères de convergence (CDC) sont des normes présentées comme devant être respectées par chacun des pays engagés dans une expérience de monnaie commune : taux d’inflation, taux de déficit budgétaire, taux d’endettement, à ne pas dépasser. Le traité de Maastricht de 1992 instituant l’Union européenne en remplacement de la Communauté économique européenne incorpore les CDC sur conseil de l’économiste canadien Robert Mundell, théoricien de la zone monétaire optimale.
Cependant, au moment de lancer la monnaie commune euro en janvier 2000, la moitié des pays membres ne remplit pas les exigences des CDC. Mais il faut faire vite et on ferme les yeux. La marche de l’euro est par la suite truffée de manipulations et maquillages de statistiques par certains membres pour se conformer aux CDC.
Il est certes préférable dans une zone monétaire que chaque économie fonctionne avec une bonne maîtrise de l’inflation, du déficit budgétaire, de l’endettement …, pour éviter de grandes disparités. Mais il n’y a pas lieu de faire des critères de convergence une obsession, de s’y focaliser au point de bloquer l’avènement de monnaies communes africaines. Depuis les années 1960, l’inflation est devenue le cauchemar des pays occidentaux. La lutte contre l’inflation est ainsi le premier objectif de politique économique dans ces pays développés. Cet objectif, quelle que soit son importance, peut-il constituer la priorité des priorités dans des pays africains qui cherchent à se développer ?
Mythe autour de la convertibilité
Certains Africains se confortent dans la possibilité de pouvoir convertir leurs francs Cfa en d’autres monnaies. Encore que cette convertibilité soit limitée, même entre le franc Cfa d’Afrique de l’Ouest et celui d’Afrique centrale. Il existe actuellement dans le monde 180 monnaies différentes, dont 18 totalement convertibles sans restriction, le reste étant constitué par des monnaies partiellement convertibles et des monnaies non convertibles. Ce sont les gouvernements et leurs banques centrales qui chaque année décident du degré de convertibilité de leurs monnaies, tenus d’en informer le FMI.
Les monnaies classées les plus convertibles (dollar US, euro, franc suisse, livre sterling, yen japonais) sont certes celles de grandes puissances économiques. Mais la monnaie du Kenya, le shilling, est totalement convertible, alors que le réal, monnaie du Brésil émergent, n’est que partiellement convertible. Pourtant le produit intérieur brut du Brésil fait 27 fois celui du Kenya, et le revenu par tête d’habitant 4,5 fois (chiffres 2019). En Chine, il a été décidé que la monnaie le renminbi (unité de compte yuan) ne soit que partiellement convertible.
Ce n’est pas la monnaie qui fait elle-même sa convertibilité. C’est le gouvernement qui en décide. Il n’existe aucun critère unanimement établi pour conférer la convertibilité à une monnaie. On aurait tort de penser que la convertibilité, même limitée, du franc Cfa est un gage de monnaie forte qu’il serait aventureux d’abandonner.
Atouts d’une monnaie UEMOA non-Cfa
Les pays de l’UEMOA sont parfaitement en mesure de battre leur monnaie par la BCEAO sans ingérence de la France. Ce ne sont pas les atouts qui manquent.
(1)Selon le ‘’Rapport sur la politique monétaire de l’UEMOA, BCEAO, juin 2019’’, le montant des réserves de change est de 8 874,5 milliards francs Cfa en mars 2019, soit un taux de couverture de l’émission monétaire de 77,1 pour cent et près de 5 mois d’importations de biens et services. Ce qui est bien suffisant pour émettre une monnaie solide et crédible.
(2)Un facteur important d’une expérience monétaire est l’indépendance de la banque centrale. Une banque centrale commune à un groupe d’Etats est une garantie. Elle ne peut être manipulée par un seul Etat jusqu’à déclencher une spirale inflationniste.
(3)La BCEAO dispose d’une quarantaine d’années d’expérience en sol africain. Les banques centrales des pays africains à monnaies autonomes n’avaient pas une telle expérience en matière de gestion monétaire au moment de s’affranchir de la tutelle monétaire coloniale. Pourtant, par leurs performances économiques ces pays n’ont rien à envier aux pazf.
(4)La monnaie commune non-Cfa ne risque pas d’être perturbée par le voisinage avec les monnaies inconvertibles des pays frontaliers. L’insularité géographique a été un facteur non négligeable de la réussite monétaire du Cap Vert, à la différence de la Guinée-Bissau qui a fini par adopter le franc Cfa.
Le gouverneur de la banque centrale de Mauritanie dans une interview à ‘’La Tribune Afrique’’ en juillet 2018 déclarait : « Nous avons quitté le Franc Cfa et nous ne le regrettons pas ». Il ajoutait que l’inflation y est bien maîtrisée autour de 3 pour cent. Lorsque la Mauritanie crée sa propre monnaie (ouguiya) en 1973, ses avoirs extérieurs au Trésor français ne sont que de 3. 136 millions francs Cfa, le montant de loin le plus faible des membres de la BCEAO où le montant total est de 72.192 millions francs Cfa, soit 4 pour cent seulement.
Ce que le Cap Vert et la Mauritanie ont fait individuellement, pourquoi les 8 pays de l’UEMOA ne peuvent pas le faire, et en mieux, avec une banque centrale commune indépendante des Etats et sans tutelle extérieure ? Les citoyens de cette zone monétaire peuvent se rassurer. Il n’y a pas péril en la demeure.
Mais il ne faut pas se faire d’illusions. Une nouvelle monnaie n’a jamais et nulle part été plébiscitée par les populations. Dans l’Union européenne, les Suédois et les Danois ont par référendum rejeté l’adhésion à l’euro. Pour les Britanniques, il n’était pas question d’abandonner la livre sterling. L’euro a tardé à être accepté et a encore ses détracteurs. Il en sera de même avec la nouvelle monnaie non-Cfa.
L’appréhension des populations à l’égard d’une nouvelle monnaie a surtout prévalu tant que la masse monétaire était constituée pour l’essentiel par la monnaie liquide dite fiduciaire (billets et pièces métalliques). Cette inquiétude peut être dissipée en partie avec l’avènement de la monnaie électronique qui permet les transactions (paiement de factures, envois d’argent, achats sur Internet… etc.) sans contact physique avec des signes monétaires.
Pour plus d’indépendance, la nouvelle monnaie non-Cfa, peu importe le nom à lui donner, devra être indexée à un panier de monnaies et non au seul euro. Cela évitera en tout cas à la nouvelle BCEAO d’être présentée comme la Banque centrale européenne en Afrique de l’Ouest.
NB. Cfa : Colonies françaises d’Afrique, puis Communauté financière africaine. Cette étude a été limitée à la zone franc Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo).
par Demba Moussa Dembélé
LE COMBAT INTELLECTUEL ET POLITIQUE DE SAMIR AMIN
Il était particulièrement préoccupé par l’avenir de l’agriculture paysanne, menacée par les projets de « modernisation » capitaliste » et la ruée vers les terres
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Demba Moussa Dembélé |
Publication 11/02/2020
Le 12 août 2018 disparaissait à Paris, l’économiste égyptien Samir Amin, à l’âge de 87 ans. Fondateur de l’association Enda Tiers-Monde, du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique (CODESRIA), du Forum du Tiers-Monde et du Forum mondial des alternatives (FMA), dont les sièges se trouvent à Dakar, au Sénégal, Amin donne à ces institutions la vocation de conduire une réflexion autonome et de promouvoir des solutions endogènes aux défis de développement de l’Afrique et d’autres pays du Sud.
Sa pensée a influencé des générations d’intellectuels africains et féconde aujourd’hui leurs travaux. Alors que le mouvement anti-franc CFA se développe depuis deux ans, on peut par exemple se souvenir qu’Amin avait, dès 1973, présenté à Abidjan, en Côte d’Ivoire, une étude intitulée « Les obstacles monétaires à l’expansion du commerce intra-africain et au développement en Afrique » (1), au cours d’une réunion d’experts. Il y soulignait que seul un système monétaire autonome peut être un instrument au service d’un développement autocentré. « Un système monétaire autonome se caractérise par l’existence d’une Banque centrale gérée librement et qui contrôle l’ensemble des établissements primaires de crédit. » Le fait qu’il n’existe pas de banques centrales véritables dans les pays de la zone franc signifie que ces pays « n’ont, pratiquement aucun contrôle sur leurs institutions monétaires », observait-il. Cette étude, vieille d’un demi-siècle (47 ans), conforte les positions actuelles de ceux qui exigent la fin du franc CFA et la création d’une monnaie souveraine, au service du développement autocentré des pays africains.
Pour Amin, la plupart des économies africaines sont des économies extraverties liées étroitement aux économies des anciennes puissances coloniales. Cette extraversion renforce leur dépendance vis-à-vis du système mondial. Cela explique la faillite de ce qu’on a appelé « développement » en Afrique. Face à cette faillite, deux types d’illusions se font jour. Les illusions à propos d’un « développement capitaliste » au sein du système, illustré par le discours sur « l’émergence », tenu notamment par les pays utilisant le franc CFA (2). En effet, selon Amin « il n’y a pas d’émergence sans une politique d’État, assise sur un bloc social confortable qui lui donne légitimité, capable de mettre en œuvre avec cohérence un projet de construction d’un système productif national autocentré… Aux antipodes de l’évolution favorable que dessinerait un projet d’émergence authentique de cette qualité, la soumission unilatérale au déploiement du capitalisme mondialisé des monopoles généralisés ne produit que ce que j’appellerais “lumpen-développement” (3) ». Le deuxième type d’illusion est illustré par des comportements passéistes, para-ethniques ou parareligieux, qui risquent de mener à plus d’impasse, voire à des catastrophes (4).
Ainsi, la vraie réponse à la faillite du développement en Afrique réside-t-elle dans la déconnexion par rapport au système mondial et la mise sur pied de projets de développement autocentré, ouvrant la voie à l’industrialisation. Samir Amin était particulièrement préoccupé par l’avenir de l’agriculture paysanne, menacée par les projets de « modernisation » capitaliste » et la ruée vers les terres. À cet égard, il plaide pour un soutien accru et multiforme à l’agriculture paysanne et aux politiques de souveraineté alimentaire (5).
L’appel à la déconnexion est une autre illustration de l’audace de Samir Amin. En effet, c’est au milieu des années 1980, alors que la plupart des pays d’Afrique étaient sous ajustement structurel de la part de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international (FMI), dans le but de les « insérer davantage dans l’économie mondiale », que Samir Amin lança son appel (6). La déconnexion ne signifie nullement autarcie mais nécessité pour un pays de maîtriser ses relations avec l’extérieur, en contrôlant notamment la politique de commerce extérieur et les mouvements de capitaux. Ce contrôle est d’autant plus indispensable que le commerce extérieur et les mouvements de capitaux constituent les principaux canaux par lesquels les multinationales saignent les pays du Sud, notamment en Afrique. Entre 2001 et 2010, les pays africains ont perdu plus de 400 milliards de dollars, du fait de la falsification des prix dans les transactions commerciales (La Tribune Afrique, 14 octobre 2017). En outre, le rapport du Groupe de haut niveau, dirigé par l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki, indique que quelque 50 milliards de dollars sortent chaque année de l’Afrique, sous forme de flux financiers illicites, dont 95 % dus aux activités des multinationales.
La déconnexion est donc une condition essentielle à l’élaboration d’un projet autocentré, par l’appropriation du processus de développement et la maîtrise de l’accumulation interne. Voilà pourquoi, parmi les repères historiques qui ont influencé son parcours intellectuel et politique, la Conférence afro-asiatique de Bandung, organisée en 1955 en Indonésie, tient une place spéciale chez Amin. On doit aussi à « l’ère de Bandung » la création du Groupe des 77 (G77), regroupant aujourd’hui plus de 100 pays du Sud, y compris la Chine. Le G77 fut à l’origine de la création de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced) en 1964. La Cnuced est considérée comme une institution au service des pays du Sud. Son secrétariat général a toujours été confié à un ressortissant du Sud. Son premier secrétaire général, Raul Prebisch, d’Argentine, a profondément marqué l’institution. L’actuel secrétaire général est un kényan. Le G77 fut également l’initiateur du débat sur le Nouvel ordre économique international (NOEI), aux Nations unies, à partir du milieu des années 1970, mettant en avant les principales revendications des pays du Sud, en matière de commerce et de transferts de ressources. Que l’appel à la déconnexion ait été lancé la même année que la résolution historique de l’Assemblée générale des Nations unies sur le « droit au développement » relève sans doute du hasard (7). Notons que, dans le combat intellectuel et politique pour l’émancipation des peuples contre le capitalisme et l’impérialisme, Amin a cheminé avec d’illustres compagnons, notamment André Gunder Frank, Arghiri Emmanuel, Giovanni Arrighi, Immanuel Wallerstein ainsi que ceux de l’École de la dépendance, en Amérique latine, ou avec Raul Prebisch, qui fut le premier secrétaire général de la Cnuced.
Le capitalisme, devenu obsolète et « sénile », a épuisé son utilité. Il n’a plus grand-chose à offrir à l’humanité, sinon des guerres pour le contrôle des ressources, l’instrumentalisation du terrorisme, l’extrême concentration des richesses, la négation des droits humains les plus élémentaires et la destruction de l’environnement. Bref, une dérive vers la barbarie (8). Certes, un système pire pourrait lui succéder. Mais pour Amin, le socialisme reste la seule solution acceptable.
Amin exhortait les forces progressistes à lutter pour la démocratisation des sociétés africaines, accompagnée de progrès social. Dans cette lutte, il imaginait un important rôle pour les mouvements sociaux du continent. C’est pourquoi il fut un des membres-fondateurs du Forum social africain, en janvier 2002, à Bamako (Mali), aux côtés d’Aminata Dramane Traoré et d’invités d’honneur, comme l’ancien président algérien Mohamed Ben Bella, l’historien Joseph Ki-Zerbo (Burkina Faso) et l’écrivain sénégalais, Boubacar Boris Diop. Pour hâter la fin de ce système, il exhortait les gauches radicales, au Sud et au Nord, à faire preuve « d’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace (9) » tant dans la pensée que dans l’action.
(2) Outre le fait que le franc CFA est un obstacle à « l’émergence », les dirigeants de ces pays s’arrachent les cheveux pour avoir un « bon classement » dans le Doing Business de la Banque mondiale, dont le but est de désarmer davantage les États au profit des entreprises multinationales !
(3) Samir Amin, L’implosion du capitalisme contemporain,, p.49
(4) Samir Amin, Sur la crise. Sortir de la crise du capitalisme ou sortir du capitalisme en crise, Le Temps des Cerises, Paris, 2009
(6) Samir Amin, La déconnexion, pour sortir du système mondial, La Découverte, Paris, 1986.
(7) La résolution 41/128 a été adoptée le 4 décembre 1986 par 146 pays, avec une seule opposition : celle des États-Unis. La plupart des pays européens s’étaient abstenus.
Le 11 février 1990, après 27 années et 190 jours de prison, le Sud-Africain Nelson Mandela qui avait été condamné à la réclusion à la perpétuité au plus fort de la période de ségrégation raciale, retrouve la liberté. Retour en cinq questions sur les circonstances et les conséquences de cette libération dont les images avaient fait à l’époque le tour du monde. Entretien avec Jean Guiloineau, biographe (1) du dirigeant historique noir et futur président de l’Afrique du Sud démocratique et multiraciale.
RFI : Les Sud-Africains célèbrent ce 11 février le 30e anniversaire de la libération de Nelson Mandela. Pourriez-vous nous rappeler les circonstances qui ont rendu possible cette libération ?
Jean Guiloineau : L’évènement principal dont la sortie de prison de Nelson Mandela n’était qu’une des conséquences, c’était l’arrivée de Gorbatchev au pouvoir à Moscou. Les réformes engagées par ce dernier ont conduit à la chute des régimes communistes en Europe. C’est la fin de la guerre froide et la fin de la politique internationale fondée sur les rivalités entre les deux superpuissances qu’étaient alors les États-Unis et l’Union soviétique. L’Afrique du Sud était l’un des principaux alliés de Washington sur le continent africain pendant la Guerre froide.
Or dans les années 1980, avec les signes d’essoufflement du communisme, cette alliance était devenue encombrante pour les États-Unis, d’autant que la majorité noire, victime de terribles violences policières, était proche de l’explosion. Sous la pression de Washington, Pretoria n’avait d’autre choix que de négocier avec le Congrès national africain (ANC) et notamment avec son dirigeant Nelson Mandela, qui s’était imposé comme le leader incontournable de la majorité noire du pays.
Les négociations ont commencé dès 1987 sous le président Pieter Botha et ont été menées à leur terme par Frederik de Klerk qui annonça au Parlement le 1er février 1990 la décision de son gouvernement de libérer Mandela. L’apartheid sera officiellement aboli en juin 1991. À mon avis, rien ne symbolise le changement de paradigme politique à l’époque que l’incident qui a eu lieu au début des négociations. Mandela qui est encore en prison était invité à prendre le thé à la présidence par le couple présidentiel.
A l’entrée du salon où Pieter Botha et sa femme attendent leur invité, le ministre de la Justice qui est en quelque sorte le geôlier en chef de Mandela et qui l’accompagne, se rend compte tout d’un coup que les lacets des chaussures de Mandela étaient défaits. Qu’est-ce qu’il fait ? Le ministre s’agenouille pour faire les lacets du plus célèbre prisonnier du monde sous sa charge. Tout un symbole !
Une foule immense attendait Mandela le 11 février 1990, lorsqu’il sortit de prison la main dans la main avec son épouse Winnie. Comment s’explique cette popularité alors qu’à part quelques proches qui avaient le droit de lui rendre visite en prison et ses co-détenus, personne ne l’avait aperçu depuis 1964 ?
En effet, condamné en 1964 à la prison à vie, Mandela restera incarcéré 27 ans, d’abord sur l’île de Robben Island jusqu’à 1982, avant d’être transféré à Pollsmoor et enfin à la prison Victor Verster, située dans la ville de Paarle, à une soixantaine de kilomètres au nord du Cap.
Pendant ces longues trois décennies, ses amis et son épouse Winnie Mandela ont tout fait pour garder vivace sa mémoire. Dans les années 1980, je me souviens d’avoir vu des posters à son effigie ornant les murs des bidonvilles.
Winnie Mandela rencontrait les leaders étrangers en visite en Afrique du Sud pour leur parler de la cause des noirs que défendait son mari.
Et puis, il y a eu en juillet 1988, au stade Wembley de Londres, à l’occasion du soixante-dixième anniversaire de Mandela, ce concert de rock monstre en présence de Harry Bellafonte, Whitney Houston et Stevie Wonder.
Ce concert qui était suivi par 72 000 spectateurs et 200 millions de téléspectateurs, a fait de Mandela cette icône de liberté emprisonnée qu’il était devenu et à laquelle les Sud-Africains noirs pouvaient s’identifier. C’est dans ces années-là que le mythe Mandela est né.
Tout le monde garde en tête l’image de Nelson et Winnie Mandela, sortant de prison, main dans la main et les poings levés. Les hommes et femmes rassemblés devant la porte de la prison ce 11 février 1990 les voient sortir, mais est-ce qu'ils savent-ils où ils vont ?
Ils franchissent la porte de la prison Victor Verster vers 15 heures. Ils montent dans la voiture qui doit les conduire au Cap. Arrivés à leur destination, ils traversent à pieds la vaste place devant la mairie où une foule immense s’était rassemblée.
C’est du balcon de l’Hôtel de ville que Mandela prononcera son premier discours d’homme libre. Pour renouer le fil de la conversation avec son peuple, il dira en commençant qu’il a toujours combattu la domination blanche ainsi que la domination noire, et a rappelé qu’il avait consacré sa vie à « l’idéal d’une société démocratique et libre dans laquelle tous vivraient ensemble, dans l’harmonie, avec d’égales opportunités ».
C’était exactement ce qu’il avait dit au tribunal, vingt-sept ans plus tôt, en concluant sa plaidoirie au procès de Rivonia, avant de se voir condamné à prison à vie pour « haute trahison et tentative de renversement par la force du gouvernement ».
Au Cap, il se fait siffler par les jeunes noirs venus l’écouter, car ceux-ci attendaient un discours de guerre. Il leur a donné un discours de paix. C’est ce qui avait d’ailleurs été négocié avec les autorités. Mandela a joué le jeu.
Non seulement parce qu’il avait donné sa parole, mais surtout parce qu’il était conscient que s’ils appelaient la jeunesse à prendre les armes, comme il aurait pu très bien le faire, il aurait fait basculer son pays dans la guerre civile.
Ce n’était pas ce qu’il souhaitait pour les siens ni pour le pays en général.
Ses héritiers se demandent aujourd’hui s’il ne s’était pas trompé le 11 février en n’appelant pas les jeunes à poursuivre la révolution…
Mandela n’était pas un pacifiste à la Gandhi. Il avait défendu la lutte armée. C’est lui qui a créé en juin 1961 l’Umkhonto we Sizwe, la branche armée de l’ANC, mais il n’a jamais oublié que le rapport de force était défavorable aux noirs.
C’est la leçon qu’il a retenue de sa rencontre en 1962 avec les leaders du mouvement de libération algérien, pendant sa tournée clandestine dans une dizaine de pays d’Afrique.Houari Boumédiène et Ahmed Ben Bella qu’il a rencontrés au moment où se signaient les Accords d’Évian, lui ont expliqué une chose fondamentale : face à la puissance militaire des colonisateurs, aucune perspective de victoire militaire pour les colonisés n'était envisageable. Et d’ailleurs les Algériens n’avaient pas remporté une victoire militaire, mais une victoire politique, lui ont dit ses interlocuteurs. On lui a également dit que pour créer les conditions d’une victoire politique, il fallait engager la lutte armée. Mandela s’en souviendra toute sa vie.
Cette sortie de prison ne sera pas particulièrement gaie pour Mandela sur le plan personnel. Ses relations sont difficiles avec Winnie et elles conduiront au divorce…
Lorsque Mandela sort de prison, c’est un vieil homme. Il avait rencontré Winnie en 1958. Ils se sont mariés, et ont eu 2 enfants ensemble. À la fin des années 1950, Nelson Mandela était déjà entré dans la clandestinité. Il rendait visite à sa famille de temps en temps. Et puis, il y a eu leprocès de Rivonia. Vingt-sept années de séparation. Lorsque Nelson et Winnie se retrouvent en 1990 et peuvent revivre comme un couple normal, c’est trop tard. La vie était passée. Restée avec les enfants, Winnie Mandela avait dû faire face seule à des problèmes insurmontables pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille et assurer sa sécurité. Mariée à l’homme le plus haï de l’establishment afrikaner, elle était constamment persécutée par la police et ses agents. On lui crevait les pneus de sa voiture, on balançait des briques par la fenêtre de sa maison à Soweto…
Mais Mandela ne l’a jamais laissée tomber. Ses Lettres de prison (2) que j’ai traduites récemment en témoignent. Il a écrit régulièrement aux autorités pour leur demander de laisser son épouse et ses enfants vivre une vie normale.
Winnie, pour sa part, a été un porte-parole exemplaire de son mari, se battant inlassablement pour la cause. On l’a accusée d’avoir mené une vie personnelle dissolue. Lorsque Nelson Mandela sort de prison, ils ne se connaissent plus vraiment.
Pendant le procès pour le divorce, il lui reprochait de ne jamais venir dans la chambre à coucher quand il était réveillé.
Je crois la goutte d’eau qui a fait déborder la vase, c’était lorsque, pendant un déplacement en Suède pour être au chevet de son vieil ami Olivier Tambo, il a appelé Winnie qui se trouvait alors aux États-Unis dans la luxueuse propriété de Diana Ross, c’est son amant qui a répondu au téléphone.
Ils se sépareront en 1996, après trente-huit années de mariage. Il faut rappeler aussi que pendant toute la période des négociations avec le gouvernement, les frasques de Winnie ont été utilisées contre son mari par les autorités. Il y avait autant de raisons personnelles que de raisons politiques dans leur divorce
«IL NE FAUT PAS CÉDER A LA TERREUR»
L’ambassadeur de Chine au Sénégal ne digère pas les rumeurs et les fausses informations sur le Coronavirus
L’ambassadeur de Chine au Sénégal ne digère pas les rumeurs et les fausses informations qui circulent sur les réseaux sociaux à propos du Coronavirus.
Zhang Xun a fait face à la presse à Dakar, ce mardi pour dénoncer et inviter les populations à ne pas céder à la terreur. «Le virus fait peur, mais les rumeurs et la terreur sont pires que le virus», a déclaré le diplomate.
Il ne cache pas son mécontentement et martèle qu’ «il ne faudrait pas céder à la terreur. Car des experts ont révélé que le taux d’infection du virus est modéré et l’organisation mondiale de la santé a révélé que le Coronavirus n’est pas une pandémie, mais plutôt une épidémie».
Déterminé à rétablir la vérité et éclairer l’opinion sénégalaise sur la pneumonie virale, Zhang Xun a expliqué la situation de la Chine continue de se battre avec ses autorités va sûrement venir à bout de cette épidémie.
«Des mesures importantes réparties en 5 volets ont été prises par les autorités chinoises depuis le déclenchement de l’épidémie.
Enrayer la propagande de l’épidémie, renforcer les moyens et rassembler tous les ressources à travers le pays, accélérer la recherche, publier en temps réel les informations avec l’esprit d’ouverture et de transparence en renforçant la coopération avec la communauté internationale, mais également la limitation des déplacements des chinois pendant la fête du nouvel an sont entre autres mesures qui permettent permis de lutter efficacement contre la propagation de l’épidémie.».
Par ailleurs l’ambassadeur se réjouit des résultats positifs enregistrés dans la lutte contre le Coronavirus qui est selon lui, moins dangereux que les autres épidémies qui secouent le monde, «le taux de mortalité est de 2%.
Ce taux est plus faible que celui du syndrome respiratoire aigu sévère (Sras) 10%, celui de la Grippe H1N1 apparu aux Etats Unis 17,4 %, et celui de la grippe MERS 37%. Et son cas d’infection dans le monde représente moins de 1 %.»,
a souligné M. Xun non sans rappelé que le Coronavirus n’est pas une pandémie, mais plutôt une épidémie.
par Mamadou NDIAYE
À L’ÉCOUTE DES SILENCES
Ce qui s’est affaissé l’autre jour à Saint-Louis s’apparente à l’effondrement d’un monde cimenté par les « idéaux de solidarité, de partage, d’équité et de culture de la paix »
Certains actes taquinent l’histoire. L’indicible sauvagerie des hordes de Saint-Louis s’attaquant, toute honte bue, aux symboles d’une poussive intégration, ne traduit pas qu’un malaise. La difficulté d’exister pointe dans la furie, se manifeste dans cette même folie qui s’est emparée d’une foule déchaînée. Déjà, la colère est mauvaise conseillère. D’émotion simple, elle traduit une frustration que saisissent les manifestants pour exprimer des impatiences que rien ne justifie. Dans ce cas, les dégâts sont autrement plus fâcheux. Sans commune mesure du reste.
Les évènements de Saint-Louis, ville d’élégance, le démontrent amplement. Tragique. Incendier des pirogues arraisonnées, brûler des véhicules en stationnement, caillasser puis mettre le feu sur le siège de l’OMVS, voilà la funeste œuvre des brutes insensibles du mardi 4 février. Avec soin, l’organisme conservait dans ses locaux quelques 14 000 fiches qu’il s’apprêtait d’ailleurs à dématérialiser en les numérisant. Seuls 4 000 documents ont pu l’être. Tout le reste, c’est à dire 10 000 pièces de grande précision, a été la proie des flammes.
Quelle déception ! Même le monde médiéval n’aurait pas approuvé une telle forfaiture, à la fois un manque de civilité et un manquement à un serment. Ceux qui ont agi ainsi n’ignoraient rien de la valeur inestimable de l’édifice et de ses incomparables archives. Il s’agit d’un patrimoine collectif propre à trois voire quatre Etats qui en sont les membres fondateurs. Ce qui s’est affaissé l’autre jour à Saint-Louis s’apparente à l’effondrement d’un monde cimenté par les « idéaux de solidarité, de partage, d’équité et de culture de la paix ».
Les prémices remontent à 1802 avec la conception d’un plan agricole dès l’époque coloniale. Lequel plan se déclinera, des années durant, en missions d’études ou d’aménagement ou encore de navigabilité et même « d’instructions nautiques en 1903 entre Saint-Louis et Kayes », le long de ce majestueux fleuve qui cimente le Mali, la Guinée, le Sénégal et la Mauritanie. Proximité géographique oblige, les deux derniers pays partagent une même frontière. Sans doute une même histoire aussi. Aujourd’hui, les deux pays empruntent la même trajectoire économique « dans la coopération pour la maîtrise et l’exploitation rationnelle des ressources du fleuve Sénégal. »
De nombreuses fragilités subsistent néanmoins entre le Sénégal et la Mauritanie. A intervalles réguliers, heurts, rixes et accrochages jalonnent les rapports de coexistence entre Nouakchott et Dakar qui, pour tempérer les ardeurs, usent (sans abuser) des subtilités diplomatiques. Un jour des pêcheurs sénégalais sont arrêtés en haute mer par des gardes côtes mauritaniens pour non respect des règles en vigueur. Un autre, des conventions d’octroi de licences sont signées en grande pompe.
Concernant ce dernier aspect, la jubilation est aussi brève qu’une pluie de contre saison. En d’autres termes, un accord signé et respecté crédibilise un partenariat qui se consolide au gré des évolutions. Se jouer du temps et multiplier les ruses ne favorisent guère un climat de confiance dans un voisinage abasourdi par les fameux troubles de 1989.
Certaines voix déchirent le silence pour crier leur sort peu enviable. D’autres poussent plus loin leur radicalité allant jusqu’à exiger de la Mauritanie l’augmentation du nombre de licences à attribuer aux gens de mer qui les sollicitent. Un comble ! Après tout, c’est à un Etat souverain qu’ils s’adressent ? Verraient-ils d’un bon œil que des Mauritaniens formulent des injonctions au Sénégal ? Il y a des limites à ne pas dépasser.
N’est-il pas temps d’ailleurs pour les responsables des deux rives de prendre un peu de hauteur pour aborder les questions qui fâchent en vue de leur trouver des solutions pérennes ? Que faire face aux réalités ? Le temps file. Les hommes défilent. Qui donc pour se charger des situations qui s’enfilent ? A force d’entendre les mêmes récriminations, on a l’impression de vivre un mal récurrent.
Face à l’immensité de l’océan, ramener l’exploitation de la ressource halieutique à la seule équation des quotas est forcément réducteur. Cette vision est de courte vue et manque d’ambition puisqu’aucune projection ne la sous-tend. Le grand bruit ne concerne hélas que les pauvres pirogues de la pêche dite artisanale. Qu’en sera-t-il demain si nos pays devraient faire face à des chalutiers et autres bateaux pratiquant la pêche industrielle ? Si côté mauritanien, le raidissement ne s’explique pas, la notoire indiscipline, côté sénégalais, ruine toute prétention des acteurs de la filière,
Notre voisin du nord a une haute maitrise de sa ressource et observe avec rigueur le repos biologique indispensable à la reproduction des espèces. Les pêcheurs sénégalais arrivent souvent sur les côtes mauritaniennes avec des filets ne répondant pas aux normes. Pour avoir dilapidé avec négligence et insouciance la richesse de nos côtes, les pêcheurs sénégalais, notamment ceux de Guet Ndar et de Kayar sont mal vus à Nouakchott et Nouadhibou. Une telle réputation aiguise le soupçon et renforce la surveillance comme en son temps le « hooligan » faisait l’objet de toutes les attentions partout où il se déplaçait.
En renversant les proportions, la Mauritanie, à son tour, affiche une sidérante faiblesse dans le domaine de l’élevage vis-à-vis du Sénégal. Jamais cette délicate situation n’a été brandie comme épouvantail opposable à la partie mauritanienne. Pour ne prendre que le cheptel des camélidés, quelques 3 000 chameaux franchissent la frontière pour se retrouver une bonne partie de l’année dans les plaines du Ferlo. Parfois, les troupeaux progressent jusque dans le parc de Niokolokoba à l’est du Sénégal. En moyenne, un chameau pèse entre 600 et 800 kg et mange par jour entre 300 et 400 kg d’herbes, de branches et de fruits sauvage.
Politiquement, la gestion des chameaux est sensible en Mauritanie. Les propriétaires principaux sont de grands électeurs. Leurs avis comptent dans les choix, les décisions et les options d’envergure des gouvernements successifs. Sans inciter à la réciprocité, les négociations doivent englober l’ensemble des secteurs dont la complémentarité assure l’équilibre entre les deux pays. Une constante historique : les peuples cohabitent en dépit des vicissitudes. Pas besoin de nier l’évidence…
PREVALENCE DE L’EPILEPSIE AU SENEGAL, 300 000 PERSONNES SOUFFRENT DE CETTE MALADIE
Face à la presse à la presse hier pour célébrer la journée mondiale de l’épilepsie, la LSE a révélé que 300.000 personnes souffrent de cette maladie au Sénégal.
Grosse révélation de la Ligue Sénégalaise contre l’Epilepsie (LSE). Face à la presse à la presse hier pour célébrer la journée mondiale de l’épilepsie, la LSE a révélé que 300.000 personnes souffrent de cette maladie au Sénégal.
Considérée comme une maladie chronique, l’épilepsie est un dérèglement du cerveau dû à des crises dont certaines, comme les convulsions, sont connues. Le neuropédiatre Pr Abdoulaye Ndiaye, par ailleurs président de la Ligue Sénégalaise contre l’épilepsie (LES) est revenu sur cette maladie qui constitue la première pathologie neurologique de l’enfant. «Actuellement au Sénégal, les épileptiques sont estimés à environ 300 000 dont une grande majorité d’enfants. Ces chiffres sont minimes car il y a beaucoup de personnes qui souffrent d’épilepsie et qui ne viennent pas dans les structures sanitaires, préférant la médecine traditionnelle même s’il y a des avancées grâce au travail de la ligue», indique-t-il.
Poursuivant son propos, il affirme : «Au-delà des crises, ce qui est le plus important pour nous, c’est le retentissement de la maladie sur le vécu quotidien parce que les enfants épileptiques sont souvent sujets à des troubles cognitifs et à des difficultés d’apprentissage. L’autre problème, ce sont les troubles du comportement. Les enfants épileptiques peuvent développer des comportements qui peuvent être subtiles», dit-il.
A l’en croire, pendant longtemps, l’épilepsie était perçue comme une affection surnaturelle alors que c’est dû à un dysfonctionnement du cerveau. «Il faut dire que malgré le fait qu’un certain nombre de médicaments dits de dernière génération, selon Pr Ndiaye, ne sont pas présents dans notre pays, fondamentalement en terme de prise en charge médicale, le Sénégal n’a rien à envier aux pays les plus développés en terme de résultats, parce que nous avons la chance d’avoir les médicaments dits essentiels qui permettent de gérer l’épilepsie et d’arriver à des taux de guérison ou de stabilisation qui tournent autour de 80%. «La seule thérapeutique qui n’existe pas au Sénégal est la chirurgie de l’épilepsie. Il y a 20% pour lesquels les médicaments n’arrivent pas à soigner la maladie et parmi ces 20%, un certain nombre est candidat à la chirurgie et elle n’existe pas pour le moment. C’est encore balbutiant en Afrique ; il n’y a que l’Afrique du Sud et les pays du Maghreb qui en disposent et même dans les pays développés, ce sont des rendez-vous de plus d’un an. C’est une chirurgie hyper spécialisée et elle implique la mobilisation d’énormes ressources humaines et matérielles », précise l’homme de l’art.
«RIEN NE PEUT JUSTIFIER QUE DES MEDICAMENTS ESSENTIELS A LA SANTE DES PERSONNES MANQUENT»
Cependant, il y a des facteurs qui favorisent l’épilepsie comme les anomalies de la grossesse et de l’accouchement, les infections du cerveau, les traumatismes, les mariages consanguins, le manque de sommeil, les drogues, la méningite, le neuropaludisme et les atteintes du cerveau. «La crise d’épilepsie n’est pas mortelle. Ce qui potentiellement expose la personne épileptique, c’est une crise prolongée qui dure plusieurs minutes parce que le fait que la crise dure va impacter sur les fonctions cardiorespiratoires et cela perturbe l’organisme qui peut mener à des décès. C‘est pourquoi c’est une urgence absolue », met en garde Pr Ndiaye.
Considérée comme une maladie qui touche beaucoup plus les enfants, l’épilepsie touche aussi les adultes de tous âges. «Nous constatons depuis 3 ans des ruptures fréquentes de médicaments avec parfois des conséquences dramatiques. C’est un combat qui va au-delà des professionnels de la santé. Rien ne peut justifier ou légitimer que des médicaments essentiels à la santé des personnes manquent. Vous faites le tour des pharmacies, on vous dira que le gardénal manque alors que c’est le médicament antiépileptique le plus accessible. C’est le médicament que 80% des familles peuvent acheter parce que les autres médicaments sont beaucoup plus chers. Il ne faut pas oublier que c’est une maladie chronique et il faut le prendre au minimum durant 3 ans et dans certains cas, c’est toute la vie », se désole-t-il.
L’UCAD FERME SES PORTES A MALICK NDIAYE ET SES HÔTES
Cela a failli échapper à nos radars. Le collectif «Noo Lank», qui devait tenir une réunion stratégique dimanche dernier pour décliner une nouvelle feuille de route, a été éconduit de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad).
Cela a failli échapper à nos radars. Le collectif «Noo Lank», qui devait tenir une réunion stratégique dimanche dernier pour décliner une nouvelle feuille de route, a été éconduit de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad). Les autorités universitaires ont ainsi fermé leurs portes à Malick Ndiaye et ses hôtes qui se sont rabattus finalement ailleurs.
Le collectif citoyen «Noo Lank» organise aujourd’hui une conférence de presse pour partager avec l’opinion les axes forts de son nouveau plan d’actions. Mais force est de constater que c’est dans la douleur que cette nouvelle feuille de route a été pondue. Tout au moins, les membres du collectif ont galéré, faute de lieu où tenir leur réunion après avoir été éconduits du lieu initial où ils s’étaient donné rendez-vous, dimanche dernier.
A en croire nos sources, c’est le professeur Malick Ndiaye qui devrait accueillir les membres «Noo Lank» lors de cette rencontre stratégique. Et Monsieur Ndiaye avait choisi l’Université Cheikh Anta Diop pour recevoir ses hôtes. Mais à la surprise générale, le temple du savoir leur a été fermé. Ils ont été d’ailleurs obligés de se rabattre sur un autre lieu dont notre interlocuteur a préféré taire le nom. Cette situation est prise avec philosophie par certains membres du collectif contactés par «L’As» qui, après avoir manifesté leur désolation, ont estimé tout simplement que les autorités universitaires, le recteur en tête, n’ont pas le choix parce que nommées. «Noo Lank fait peur», soutiennent-ils. Non sans rappeler que les Universités sont des espaces de démocratie et que c’est là-bas où les jeunes apprennent la démocratie. «L’Université a accueilli Abdoulaye Wade alors qu’il était dans l’opposition. Dans les autres démocraties comme la France, on voit Mélenchon faire le tour des universités», souligne un de nos interlocuteurs. Il faut rappeler en outre que cette importante réunion avait pour objectif de préparer des changements dans la stratégie et dans la démarche du collectif qui combat la hausse du prix de l’électricité et réclame par ricochet la libération de Guy Marius Sagna.
Les leaders de «Noo Lank » avaient d’ailleurs indiqué que les marches seront maintenues ; même s’il est prévu à côté d’autres types de manifestations, de mobilisations et d’informations. Il en est ainsi de la publication d’un mémorandum qui va paraitre au courant de la semaine. Un document dans lequel il a été consigné l’ensemble des arguments qui démontre qu’il y a matière à soupçonner une fraude organisée par la Senelec. Mais également, une volonté de l’Etat du Sénégal de crever davantage les revenus des Sénégalais en complicité avec la Commission de Régulation du Secteur de l’Electricité (Crse).
Le collectif reviendra certainement en détail sur ces différentes perspectives lors de leur conférence de presse prévue aujourd’hui.