Au nom de quels us et coutumes devrait-on cautionner que d’innocents enfants, qui ne demandent qu’à grandir en intelligence et en sagesse soient brimés, enchainés et traités comme du bétail ?
Tiens donc, les souteneurs du maître coranique tortionnaire de Ndiagne sont en colère, au point d’avoir saccagé un tribunal ! Un lieu sanctuarisé, dans tous les pays du monde et dans toutes les civilisations, depuis les origines. Voilà, donc, une grosse pierre dans le jardin des autorités. Qu’elles lavent l’affront ! Mais que ces souteneurs du sieur Cheikhouna Guèye sachent qu’ils n’ont pas le monopole de la colère. La nôtre est sans commune mesure avec celle qui les étreint.
Il faut dire aussi que leur comportement est la manifestation d’un obscurantisme, une manière rétrograde et inacceptable de voir le monde. Et surtout de voir les enfants. Au nom de quelle logique, de quels us et coutumes devrait-on cautionner que d’innocents enfants, qui ne demandent qu’à grandir en intelligence et en sagesse, entourés de l’amour de leurs parents et de la bienveillance de leurs instructeurs, soient brimés, enchainés et traités comme du bétail ?
Dernièrement, quelqu’un a eu le toupet de dire qu’il ne s’agit pas là d’esclavagisme, puisque nos aïeuls déportés par nos chers ‘’amis’’ Blancs étaient soumis à un travail forcé ; ce qui n’est pas le cas pour nos pauvres talibés.
Mais, diantre, que font les enfants de la rue, à longueur d’année, à arpenter les rues de Dakar et autres capitales régionales ? N’y sont-ils pas dans l’unique but d’enrichir un quidam qui se drape du manteau de la religion pour subvenir à ses besoins ? Cette comparaison est encore plus inacceptable qu’elle laisse entendre que la seule différence, entre le traitement fait aux esclaves et celui fait aux enfants talibés, est le travail forcé. Que tout le reste (les conditions terribles de vie, l’absence de soins, du minimum vital, l’exposition quotidienne au danger, les sévices corporels, les abus sexuels…) est acceptable. Qu’ajouter à cela ?
Que fait l’Etat pour mettre fin à cette exploitation des enfants par des adultes, plus abjecte que toutes les formes d’esclavage qui ont existé et existent encore aujourd’hui ? Que fait la société pour conjuguer au passé cette page sombre et inacceptable de l’histoire du Sénégal qui se targue d’être un pays religieux ? Je doute fort que Dieu regarde d’un œil bienveillant la manière dont le peuple sénégalais traite ‘’ses’’ enfants. Jésus Christ ne dit-il pas, dans Mathieu 19-14 : ‘’Laissez les petits enfants, et ne les empêchez pas de venir à moi ; car le royaume des cieux est pour ceux qui leur ressemblent.’’ Et je ne doute pas un seul instant que le Prophète Mohamed (Psl) n’ait pas le même regard protecteur envers les tout-petits.
Ainsi, la balle est dans notre camp, nous citoyens de ce pays qui ne cautionnons pas la mendicité des enfants. Le moment est venu de se lever et de dire non ! De refuser, tous ensemble, de donner, à partir, d’aujourd’hui, un seul kopeck à un jeune talibé. Car c’est le meilleur moyen de le maintenir dans la rue. Notre conviction est que : tant qu’il y aura une main pour donner, il y aura une pour recevoir.
Nous sommes coupables de ne rien faire, face à la détresse de ces milliers d’enfants. Qui, pour la plupart, deviendrons les grands bandits de demain. Car on leur aura volé leur enfance, les aura vidés de toute leur humanité pour ne laisser que des loques humaines. Des êtres incapables d’empathie dont ils n’auront jamais bénéficié. En effet, on mésestime les ravages psychologiques de ces années d’errance et de sévices pour ces talibés.
C’est dommage que l’ancienne Cour d’assises ait arrêté de mener des enquêtes de moralité des accusés jugés pour les crimes les plus graves. Celles-ci montraient que la plupart d’entre eux avaient été talibés dans leur prime enfance. Et ce serait bien qu’il y ait des études sur l’évolution psychologique de ces enfants appelés à devenir des adultes dans un avenir proche. D’ailleurs, il est aussi intéressant de voir que les maitres coraniques adeptes de ces brimades ont eux aussi été victimes de ces pratiques qu’ils considèrent comme une norme.
Mais nous devons tous convenir que, devant l’arbitraire et l’injustice, celui qui ne dénonce pas est complice. Cette position de neutralité est un aveu de lâcheté. Faisons justice à ces milliers d’enfants et sortons-les de la rue !
UNE ENQUÊTE SANS SUSPECT
Malgré les deux mois d’audition devant les enquêteurs de la Division des investigations criminelles, presque un mois devant le doyen des juges d’instruction, les autorités judiciaires semblent avoir du mal à trouver un inculpé, dans l’affaire Petro-Tim
Malgré les deux mois d’audition devant les enquêteurs de la Division des investigations criminelles, presque un mois devant le doyen des juges d’instruction, les autorités judiciaires semblent avoir du mal à trouver un inculpé, dans l’affaire Petro-Tim. Ce qui fait croire à certains que le dossier file droit vers un enterrement de première classe.
Quelquefois, la justice marche à la vitesse de croisière. D’autre fois, elle est comme une tortue. Prenant tout son temps, n’en déplaise à ses détracteurs. Dans l’affaire Aliou Sall, rien ne semble presser, pour les autorités judiciaires. Hier, le doyen des juges d’instruction a bouclé ses auditions, avec la déposition des représentants de Franck Timis. Au total, ils étaient près d’une vingtaine de personnes à défiler devant le juge d’instruction Samba Sall, toutes entendues à titre de simples témoins.
Du côté de la plateforme Aar Linu Bokk, on prend acte, tout en bandant les muscles. ‘’Nous invitons le doyen des juges à agir, d’une manière rapide et impartiale, pour retrouver et sanctionner tous ceux qui se seront rendus coupables d’acte de corruption dans la gestion du pétrole et du gaz’’, indiquent les camarades de Guy Marius Sagna dans leur déclaration. D’ores et déjà, la structure prévient qu’elle va rejeter toute décision judiciaire tendancieuse et inéquitable.
Depuis le démarrage de cette procédure, les commentaires n’ont jamais cessé. Pendant que certains accusaient Aliou Sall et Cie d’avoir perçu des fonds indus dans l’affaire Petro-Tim, d’autres parlaient simplement de corruption et de délits connexes. Pour le moment, rien n’a filtré sur les faits visés par le procureur de la République dans son réquisitoire introductif. Certains s’étonnent d’ailleurs que, malgré la gravité des faits incriminés, que personne n’ait été inculpé. Même Aliou Sall et Franck Timis, qui sont les principaux concernés dans cette affaire. A en croire cet avocat qui ne peut dévoiler son nom à cause de l’interdiction du bâtonnier, les choses sont quand même un peu bizarres et inhabituelles. Il se dit convaincu que le procureur avait suffisamment d’éléments pour inculper ou classer l’affaire sans suite.
‘’On a comme l’impression, souligne-t-il, qu’il y a une volonté, soit de passer la patate chaude au magistrat instructeur, soit une volonté de noyer le poisson. Autrement, je ne vois pas comment ne pas inculper certains, quitte même à leur accorder la liberté provisoire ou les placer sous contrôle judiciaire’’.
Généralement, explique la robe noire, quand on saisit le juge d’instruction, c’est parce qu’on estime qu’il y a des éléments pouvant constituer une infraction. Et on lui demande d’ouvrir une information pour savoir qui sont les véritables coupables et si les soupçons sont avérés ou pas.
Ainsi, pense-t-il, ‘’dans cette affaire, vu toutes les péripéties qui ont émaillé la procédure, on peut s’étonner que le juge d’instruction ait été saisi sans que personne ne soit inculpé’’.
Toutefois, de l’avis de Maitre El Hadj Diouf, avocat de Franck Timis et Aliou Sall, il n’y a pas à fouetter un chat. Selon lui, le procureur aurait bien pu classer l’affaire sans suite. Mais, essaie-t-il de comprendre, ‘’peut-être, s’il l’avait fait, on aurait dit que c’est parce qu’il reçoit des instructions du gouvernement. Vous le savez, le procureur dépend hiérarchiquement du ministre de la Justice. Ce qui n’est pas le cas du juge d’instruction qui fait librement son travail. Qui ne reçoit aucune instruction de la part d’aucune autorité’’.
Selon Me Diouf, toute cette accusation repose sur du toc. ‘’C’est du vent’’, clame-t-il. Avant d’enchainer : Il n’y a pas d’hypothèses possibles. Une grosse farce, ça aboutit à quoi ? Des accusations mensongères, diffamatoires, ça aboutit à quoi ? Quand vous racontez des histoires, il n’y a pas d’hypothèses envisageables. Vous êtes même passible de poursuites.’’
Par rapport aux auditions du représentant de Timis Corporation hier, il peste : ‘’Timis Corporation est venue démonter les accusations de la Bbc ! Nous avons démontré qu’il n’y a jamais eu de corruption dans cette affaire. On ne montrera aucun compte, dans aucune banque de la place, pour prouver ces accusations. Cela a été inventé de toutes pièces par la Bbc. On ne peut pas inculper des gens sur la base d’un simple reportage sans fondement.’’
Pourquoi l’affaire n’a pas été classée ?
Il faut rappeler qu’avant même que le juge d’instruction ne soit saisi de cette affaire, des plaintes avaient été agitées. La Division des investigations criminelles saisie pour en connaitre davantage. Mais malgré toutes ces formalités, rien ne semble convaincre le parquet sur la culpabilité des principaux concernés. Renforçant ceux qui se demandent déjà pourquoi l’affaire n’a pas été classée.
Mais si l’on en croit ce magistrat, il n’y a jusque-là rien d’anormal. Cela veut dire simplement que le procureur n’avait pas estimé, au vu des informations en sa possession, qu’il y ait d’éléments probants pour justifier l’inculpation de qui que ce soit dans cette affaire.
‘’En saisissant le juge d’instruction via un réquisitoire introductif, le parquet considère, peut-être, qu’il y a bel et bien infraction. Mais il n’a peut-être pas trouvé d’indices graves et concordants de nature à motiver l’inculpation d’une personne. C’est pourquoi il a saisi le juge d’instruction qui, en toute indépendance, a ouvert une information judiciaire. Si ce dernier, au cours de ses auditions, constate qu’il y a des indices graves et concordants contre quelqu’un, il va l’inculper et prendre contre lui les mesures qui s’imposent’’, analyse notre interlocuteur.
A ce jour donc, la justice est toujours à la recherche d’informations. Maintenant que tous les protagonistes ont été entendus, elle peut soit inculper certains, soit estimer qu’il n’y a pas matière à continuer les poursuites, indiquent les experts.
"LA CAF EST DIRIGÉE PAR UNE BANDE D'INCAPABLES"
Pape Diouf évoque l’actualité du foot africain, notamment les dernières décisions du comité exécutif de la Confédération africaine de football. Comme à ses récentes habitudes, l’ancien président de l’OM n’a pas ménagé Ahmad Ahmad et son équipe
A la pause d’un débat passionnant sur l’«impact de la prise de parole sur la performance», thème du colloque organisé par Montpellier Business School de Dakar hier à Dakar, Pape Diouf a bien voulu donner un peu de son temps à L’Observateur et beaucoup de son avis sur l’actualité du football africain, dont les dernières décisions du comité exécutif de la Confédération africaine de football (Caf). Comme à ses récentes habitudes, l’ancien président de l’Olympique de Marseille n’a pas ménagé Ahmad Ahmad et son équipe.
Après avoir organisé pour la première fois la Can 2019 en été, la Confédération africaine de football (Caf) envisage déjà de revoir la période de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2021 prévue au Cameroun. La compétition pourrait se rejouer en janvier-février, comme naguère. Incompréhensible, non ?
Pour ma part, je ne pense pas qu’il vaille trouver d’autre raison que l’inconséquence de l’institution (la Caf, Ndlr). Elle avait tout fait pour faire comprendre que la Coupe d’Afrique des nations de football ne doit se disputer qu’en été. Et subitement, la voilà qui fait un pas en arrière. L’institution et ceux qui la dirigent montrent leur inconséquence de plus, puisqu’ils avaient soit raison avant, donc ils ont tort aujourd’hui, ou vice versa. Je pense que la Caf ne mérite pas des égards, depuis que Issa Hayatou (président de la Caf de 1988 à 2017, Ndlr) est parti, c’est une institution qui vit au rythme, non seulement des faux-pas, mais surtout de l’inconséquence.
A l’époque, on nous avait brandi l’argument selon lequel la Can a été décalée au mois de juin pour satisfaire les clubs européens qui se plaignaient de perdre leurs joueurs africains en pleine saison. Est-ce qu’on peut aussi penser que la Caf veut bien changer de date, juste parce que la Fifa compte organiser son nouveau mondial des clubs en juin ?
Ce n’était pas seulement pour ne pas mécontenter les clubs européens, c’était d’après les dirigeants de la Caf, La solution avec un L majuscule. Aujourd’hui, ils reviennent en arrière. Je me demande bien où se trouve la vérité. Est-ce qu’elle était là lorsque la Caf avait décidé de reculer la Can au mois de juin ? ou est-ce que c’est maintenant ? J’ai toujours soutenu que depuis le départ d’Issa Hayatou, nous sommes malheureusement gouvernés par une bande d’incapables qui ne savent absolument pas à quel saint se vouer et qui ne font pas du tout avancer le football africain.
Parler de conditions météorologiques au Cameroun en juin peut être une bonne raison non ?
Ce sont des prétextes fallacieux. Toute décision appelle une explication. Ce qui est plus difficile, c’est de trouver des justifications. Et en l’occurrence, il n’y a aucune justification.
Au regard des changements et revirements auxquels la Caf commence à nous habituer, pensez-vous que le Cameroun organisera la Can 2021 ? Il se murmure depuis quelque temps que l’Algérie serait le plan B ?
Le Cameroun a été victime d’un traquenard. Si on reprend l’histoire de la Coupe d’Afrique des nations, il n’y a pas un pays, hormis l’Afrique du Sud, qui était prêt à la veille du déroulement de la compétition. Arriver à priver le Cameroun de l’organisation de la compétition, c’était là aussi un prétexte, puisqu’il n’était pas difficile à la Caf de trouver les raisons (non-livraison à date due des stades de compétition et d’entraînement, des infrastructures d’accueil aussi, Ndlr). Ces mêmes raisons, on pouvait les trouver lorsque la Can s’était déroulée au Mali. On pouvait les trouver aussi lorsque la Can s’était déroulée en Angola (2010) pour retirer à ces pays-là l’organisation de la compétition. On ne l’avait pas fait. A propos du Cameroun, je crois qu’il y a des objectifs inavoués de la Caf.
Serez-vous surpris si la Caf d’Ahmad Ahmad décide d’organiser la Can tous les quatre ans, comme l’Euro par exemple ?
Avec cette Caf-là, il faut s’attendre à tout. Disputer la Can tous les quatre ans, ça peut être l’objet d’un débat. Je ne suis pas contre ce débat-là. Mais il ne faut pas que ce soit de la part de la Caf, encore une manière de fuir ses responsabilités. Il faut une concertation assez large, mais pas simplement une décision de bureau. Il faut que ce soit une décision comprise et admise par l’ensemble du football africain. Et jusqu’ici, toutes les décisions qui ont été prises l’ont été en catimini.
Et cette décision d’organiser la Supercoupe de la Caf à Doha, au Qatar, elle vous convient ?
Je crois que c’est d’abord une question de finances. Je refuse de comprendre ça parce que la compétition africaine doit se dérouler sur le continent. Aller à Doha, histoire seulement de ramasser des subsides financiers, tout en négligeant l’aspect sportif, me parait être une inconséquence.
A votre avis, c’est quoi le problème de la Caf, l’institution elle-même ou son président, le Malgache Ahmad Ahmad ?
Je ne sais pas s’il y a eu des antécédents avec l’ancien président (Hayatou, Ndlr) ou pas, je ne sais pas si devant sa volonté forcenée d’être novateur, Ahmad Ahmad ne s’est pas sérieusement planté, mais la question mérite d’être posée. On se pose la question, puisque jamais la Caf n’a connu autant de changements en si peu de temps. Des changements qui tous ne vont pas dans le sens du développement du football africain.
Pensez-vous que Ahmad Ahmad est un revanchard qui prend des décisions allant dans le sens d’effacer toutes les traces laissées par son prédécesseur, Issa Hayatou ?
C’est peut-être petit de penser comme ça, mais on finit par penser à ces choses-là.
Qu’est-ce que le football africain peut faire pour se reprendre ?
Reconsidérer la composition de la Caf, changer radicalement cette institution et porter en son sein de véritables personnes désireuses de faire avancer le football africain et non la laisser des gens qui n’ont comme objectif que de défendre leurs intérêts.
Que Fatma Samoura, secrétaire générale de la Fifa, soit mise à la disposition de la Caf pour diriger un audit général de l’instance continentale, peut-il aider ?
Non, ça montre l’incurie qui est aujourd’hui la marque de la Caf. Jamais la Caf n’avait été sous tutelle de la Fifa ! Jamais ! Depuis que la Fifa nous a imposé une personnalité pour surveiller le déroulement des opérations, ça montre un peu qu’en haut lieu, on ne fait plus confiance à la Caf. Donc, nous avons tout à fait le droit de ne plus du tout faire confiance à la Caf.
Selon le quotidien catalan Mundo Deportivo, Lionel Messi aurait remporté le trophée du Ballon d’Or 2019. Ça vous semble logique ?
C’est vrai que Sadio Mané est très méritant. Ce serait une bonne chose pour lui et pour ceux qui l’aiment de le savoir couronné. Sauf qu’un vote reste toujours compliqué. Un vote est toujours difficile à déchiffrer avant. Sur le Ballon d’Or, il faut définitivement s’entendre. Est-ce que le Ballon d’Or doit revenir au meilleur joueur intrinsèquement dans le monde ou est-ce qu’il doit revenir à un joueur qui aura aidé son équipe à obtenir d’excellents résultats durant l’année civile ? Si on considère que le Ballon d’Or doit aller au meilleur joueur du monde, évidemment que Messi le mérite. Et si c’est l’autre hypothèse qui est retenue, on peut penser que Sadio Mané a largement de quoi faire valoir pour gagner le Ballon d’Or.
PAR Scandre HACHEM
POUR UNE MISE EN PLACE DE L'ENSEIGNEMENT GÉNÉRALISÉ DES LANGUES NATIONALES
Il s'agira de commencer par le CP, puis de le poursuivre année après année. En l'espace de cinq ans, l'ensemble du cycle primaire serait entièrement couvert
Le souhait d'une introduction de l'enseignement des langues nationales dans le cursus scolaire a été exprimé dès les premières années qui ont suivi l'indépendance.
En 1978, l'enseignement du poulaar est introduit à l'université de Dakar comme matière facultative dans un premier temps.
L'enseignement des langues nationales, wolof, poulaar, sérère et diola, est aujourd'hui intégré à la filière des langues à la faculté des lettres et sciences humaines.
D'immenses progrès ont été réalisés dans la maîtrise de nos langues à tous les niveaux, tant du point de vue de la syntaxe que de la grammaire, de l'écriture que du vocabulaire.
Le Sénégal dispose désormais des atouts nécessaires à l'introduction de l'apprentissage généralisé des langues nationales : d'une part les outils de base ont été élaborés et sont bien fixés, d'autres part les moyens institutionnels, humains technologiques pour appuyer un tel projet sont disponibles. Cela peut donc se réaliser, et pour un coût on ne peut plus raisonnable eu égard aux enjeux.
Envisager l'introduction de ce processus d'apprentissage généralisé à l'école primaire.
Tous les enseignants des écoles parlent couramment au moins une langue nationale et peuvent prendre en charge son enseignement.
Il s'agira de commencer par le CP, puis de le poursuivre année après année.
En l'espace de cinq ans, l'ensemble du cycle primaire serait entièrement couvert.
L'enseignant apprendra à maîtriser les outils en même temps qu'il enseignera la langue à ses élèves. Dans chaque région, deux langues seraient obligatoirement enseignées, le wolof (langue communément parlée dans toutes les régions) et une seconde langue au choix plus spécifique à la population de l'environnement, pulaar, sérère ou diola, sans exclure pour autant les autres langues. Chaque langue pourrait disposer d’une heure à une heure trente minutes de cours par semaine prise en charge par l'enseignant ou, exceptionnellement, par un vacataire en concertation avec le chef de village ou de quartier.
Coordonner et accompagner ce processus
Une équipe pédagogique et technique devra bien sûr être créée pour coordonner et accompagner ce projet. Cette équipe devrait être relayée à terme par une commission au niveau de chaque académie. Le rôle de cette équipe sera d'élaborer un programme d'apprentissage par niveau ainsi que de son suivi. Celui-ci n'a pas besoin d'être entièrement prêt pour commencer l'opération. Il suffit de le préparer pour le CP d'abord, puis année après année, en gardant à l'esprit qu'il devra être amélioré en permanence grâce à la remontée des enseignants eux-mêmes et au suivi de la commission chargée spécifiquement de l'élaboration des programmes.
Les outils technologiques permettent d'assurer un tel suivi avec toute la souplesse nécessaire et une réactivité optimale.
Il faut pour cela exclure l'idée d'un programme fixé dans un livre imprimé, à tout le moins durant les premières années de l'opération. Il faudrait au contraire effectuer la transmission par internet des programmes par tranche bimensuelle, ce qui permettrait d'améliorer les tranches précédentes et les suivantes au fur et à mesure de la remontée des critiques et suggestions.
Cela évite la réédition systématique des livres, opération particulièrement coûteuse, et la nécessité d’attendre une à plusieurs années pour en améliorer le contenu, ce qui ne ferait que décourager les acteurs de terrain, favoriser le mécontentement et encourager les inerties.
L'option envisagée ambitionne au contraire à l'excellence, avec la possibilité d'une amélioration systématique et rapide des outils et accompagnements humains.
Une formation des formateurs
Des outils pédagogiques devront être réalisés et mis à la disposition des enseignants. De même que pour les programmes, ces outils, qui devront être simples et très légers, pourront être améliorés régulièrement.
De plus, un ou deux week-ends de formation et d'échanges seraient organisés chaque année à une échelle géographique limitée pour éviter les grands messes et les frais de déplacements et d'hébergement inutiles et coûteux. N'aurait donc à se déplacer que le formateur dont le rôle sera essentiellement de favoriser les remontées d'expérience, les échanges, l'expression des critiques et des propositions pour améliorer et enrichir la démarche.
Un cycle continu de formation par session d'une semaine devrait être mis en place durant l'année scolaire.
Cela suppose, bien sûr, la formation de formateurs, sélectionnés sur la base du volontariat, essentiellement parmi les personnels de l'éducation nationale, actifs ou à la retraite.
Du primaire au collège, puis au lycée
Ces cinq années d'expériences acquises, de plus à une très large échelle, seront un puissant levier pour réitérer l'opération au niveau des collèges tout en l'adaptant à leurs spécificités et contraintes, levier psychologique, levier pédagogique, maîtrise des outils.
En l'espace d'une quinzaine d'années au maximum, nous pourrions obtenir une généralisation de l'enseignement des langues nationales dans l'ensemble de l’Éducation nationale du premier et du second degré, avec la possibilité d'un cursus universitaire spécialisé ouvert à un niveau de licence, master et doctorat, et à terme l'enseignement de certaines matières en langues nationales, comme le font les écoles bilingues.
On peut raisonnablement attendre qu'un tel projet, avec les perspectives qu'il ouvrirait, encouragerait fortement des vocations à poursuivre des études supérieures dont l'objectif est l'enseignement de langues nationales au même titre que le français, l'anglais, l’arabe ou autre.
Favoriser l'édition en langues nationales
Des romans, des essais et autres documents sont édités aujourd'hui en langues nationales. Tous ces écrits restent très circonscrits à quelques cercles intellectuels volontaires et persévérants. L'introduction de l'apprentissage généralisé des langues nationales dans le primaire devra servir de levier pour favoriser l'édition de livres et d'albums destinés à cette tranche d'âge, popularisant par là même la démocratisation de la lecture dans la langue maternelle. Nous n'aurions plus des livres édités à quelques petites centaines d'exemplaires au mieux, mais à des milliers régulièrement réédités comme c'est le cas pour les livres Jeunesse lorsqu'ils sont d'excellente qualité. Cela constituerait un puissant facteur de développement de l'édition et préparerait dans la même logique à l'émergence future de livres pour adolescents puis adultes à grand tirage.
Penser l'édition simultanément pour le livre imprimé et le livre électronique
Les smartphones et tablettes sont aujourd'hui largement présents dans toutes les classes moyennes, voire au-delà. Ils sont ainsi accessibles aux enfants, leur usage est courant dès leur plus jeune âge et ils ne s'en privent pas, bien au contraire.
Leur utilisation est généralement réduite aux dessins animés et aux jeux.
La disponibilité de livres électroniques ouvre un champ nouveau et d'autant plus attractif qu'il sera exprimé dans la langue maternelle. Mieux, cela valorisera naturellement celle-ci alors que la langue valorisée dès cet âge est plutôt la langue française et, quelquefois, anglaise. De fait, dans les classes moyennes, l'enfant a tendance aujourd'hui à s'exprimer en français, les parents projetant déjà l'enfant dans un avenir pré conçu. Cette langue n'est pas seulement valorisée à l'école, mais dans l'intimité familiale où la télévision, la tablette et le smartphone, quand ce n'est pas l'échange entre parents, se diffusent en français.
Loin de moi l'idée de rejeter une quelconque langue étrangère, elles sont sources de richesses irremplaçables. Mais il serait temps de donner toute leur place aux langues nationales. Et ce n'est pas les unes contre les autres, ni même les unes sans les autres, mais les unes avec les autres. L'apprentissage généralisé des langues nationales, la disponibilité des livres et documents en édition imprimée et électronique favoriseront la créativité électronique et la création à terme de jeux électroniques en langues nationales.
La place décisive que représente le numérique dans le monde, tant du point de l'économie, de la communication, de la formation et des échanges de toutes sortes et à tous les niveaux met le Sénégal comme l'ensemble de l'Afrique dans l'exigence de maîtriser ce domaine et ils ne pourront y parvenir qu'en participant activement à son élaboration et à son développement. Cela ne sera possible à grande échelle que par la maîtrise et l'usage généralisé des langues nationales.
« C’EST LÀ QU’IL M’A RÉPÉTÉ À QUATRE REPRISES "NÈGRE DE MERDE" »
Dimanche 24 novembre, match de cinquième division italienne. Omar Daffe, 37 ans et gardien d’origine sénégalaise, est victime d’insultes racistes. Contrairement à d’autres victimes de ce fléau, il a décidé de quitter la pelouse. Témoignage
Dimanche 24 novembre, match de cinquième division dans les environs de Piacenza en Émilie-Romagne. Omar Daffe, 37 ans et gardien d’origine sénégalaise du club visiteur de l'ASD Agazzanese 1920, est victime d’insultes racistes d’un supporter local de Bagnolese. Contrairement à d’autres victimes de ce fléau, il a décidé de quitter la pelouse. Il témoigne.
Il y avait-il un enjeu particulier lors de ce dernier match, dimanche 24 novembre, sur la pelouse de Bagnolese ?
C’était un match du dimanche comme les autres. Mais dès le début du match, l’ambiance était un peu « nerveuse » , car Bagnolese restait sur deux défaites de rang. Les deux équipes voulaient gagner, ce qui est normal car tu joues toujours pour gagner.
Et puis, autour de la trentième minute de jeu, il y a ce contact avec un attaquant local...
C’était vers la 25e minute de jeu.
Il y a effectivement un contact avec l’un des adversaires dans ma surface, mais l’arbitre ne siffle pas, car il estime que tout est licite. À partir de là, les supporters locaux ont commencé à haranguer l’arbitre. Ils lui disaient qu’il y avait penalty. L’arbitre a stoppé le jeu, a demandé à l’attaquant d’arrêter ses simulations et m’a averti parce que j’avais été lui parler pour lui dire d’arrêter son cinéma. Le jeu a repris normalement, mais cinq minutes plus tard, un homme a commencé à crier dans ma direction : « Nègre de merde ! » Je me suis tourné vers lui et je lui ai dit : « Oui, c’est moi. Viens me le redire dehors ! » C’est là qu’il m’a répété ensuite à quatre reprises : « Nègre de merde ! » Je n’ai appris que quelques jours plus tard que c’était le père du joueur en question, avec qui j'avais eu un accrochage sur l'action précédente. Les autres supporters n'ont rien fait, certains l’applaudissaient même, tandis que la plupart des autres étaient encore énervés après l’arbitre. Du coup, j’ai dit que je ne me sentais plus en état de jouer et j’ai quitté le terrain. Alors que lui, personne ne lui a demandé de quitter l’enceinte.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que tu es victime de racisme. L’an dernier, déjà, tu avais vécu un épisode similaire...
Oui, c’était face à une autre équipe. Mais tu sais, je suis arrivé en Europe à l’âge de 16-17 ans, et cela arrive plusieurs fois par an dans ce championnat. Les auteurs m’insultent, puis se cachent dans la foule et font comme si de rien n’était. L’an dernier, j’avais raconté la scène à un journal. Et un jour après les faits, on m’avait reproché d’avoir inventé l'histoire...
Revenons à ce match de Bagnolese. Dans ta tête, tu as immédiatement l’idée de quitter le terrain ? Qu’est-ce qui te pousse à le faire ?
Non, pas du tout. Sur le moment, je pensais que l’arbitre ou quelqu’un d’autre allait faire quelque chose. J’ai préféré sortir, car je ne voulais pas répondre par la violence, il y a des règles et il faut les suivre. L'unique chose que j'aurais pu faire, ça aurait été de sortir et d'appeler la police pour me défendre. Mais il faut savoir qu’entre ces quatre insultes, il s’est quand même passé une ou deux minutes. C’était impossible de ne pas les entendre, mais je ne voulais pas non plus ne rien faire. La première fois, je n'ai pas réagi. C'est à la quatrième reprise que ça m'a énervé. Je n’ai pas peur de me défendre physiquement, attention. Mais je suis père de famille, j’ai deux enfants et il y a une question que je me pose : qu’est-ce que je peux leur dire si, en tribunes, ils voient un homme insulter leur père de « nègre de merde » ?
Quelle a été la réaction des autres joueurs ?
À vrai dire, sur le coup, ils étaient paralysés. Après cinq ou six minutes à l’intérieur du stade, mes coéquipiers m’ont rejoint. Ils m’ont dit qu’ils ne rejoueraient pas après ce qu’il s’était passé. Et puis, quand le match a été définitivement arrêté, les joueurs de Bagnolese et leur coach sont venus me voir pour me demander pardon. Pour m’apporter leur soutien.
Qu’est-il advenu de la fin du match ?
L’arbitre m’a mis un rouge car – dans les règles – je n’ai évidemment pas le droit de quitter le terrain. Il a ensuite sifflé la fin du match car le reste de mon équipe ne voulait plus jouer. On devrait savoir ce qu’il advient aujourd’hui. (Le « Giudice Sportivo » , juge sportif, du comité régional n’a pas tenu compte des incidents, et a donné match perdu 3-0 à l’équipe d’Omar et infligé un point de pénalité, N.D.L.R.)
Dans la vie, tu es aussi entraîneur d’une équipe d’U6 et entraîneur des gardiens pour le compte de la Fédération italienne. As-tu eu l’occasion de reparler de l’incident avec les enfants ?
Je n’en ai pas encore parlé avec eux, car je ne pouvais pas me présenter sur les terrains vu que j’étais suspendu. Mais eux, ils m’ont envoyé une vidéo de soutien où ils disaient « Non au racisme » . J’ai aussi reçu des messages de soutien partout d’Italie, du Sénégal ou même de France. Ça fait du bien, forcément.
PAR Achille Mbembe
PROFONDE GRATITUDE À LA RÉPUBLIQUE DU SÉNÉGAL
Je suis fier que le Sénégal - et donc l’Afrique - m’offre un abri et un lieu de repos pour l’esprit, un lieu où je ne suis pas mis constamment en demeure de justifier qui je suis, voire persécuté
C’est toujours délicat de traiter en public d’affaires privées. Mais la nouvelle est à présent publique.
À la République du Sénégal, je voudrais donc publiquement exprimer ma tres profonde gratitude.
Le Sénégal représente un très grand pays dans notre histoire intellectuelle, artistique et culturelle. Il nous a légué certains de nos plus grands penseurs et écrivains, des femmes et des hommes sans lesquels il nous aurait été difficile d’aller fièrement au-devant du monde, et de dialoguer avec celui-ci les yeux ouverts.
J’ai, pour ma part, puisé à pleines mains dans ce riche héritage et j’ai, plus que de raison, été l’objet des soins de ce pays.
J’ai, à titre d’exemple, passé des années cruciales de ma propre vie à Dakar, l’une des rares ‘villes ouvertes’ de notre continent. J’habitais à Yoff, tout près de l’aeroport Léopold Sedar Senghor. Mes deux voisins étaient le romancier et cinéaste Sembene Ousmane et
le grand sculpteur Ousmane Sow. Je travaillais non loin de l’Universite Cheikh Anta Diop.
Le premier Président camerounais, Ahmadou Ahidjo, repose dans un cimetière non loin de Yoff. Et l’un de mes premiers gestes en arrivant à Dakar en 1996 consista à aller me recueillir sur sa tombe, alors même qu’en rapport avec ceux dont je suis le descendant en esprit, il fit preuve d’une grande cruauté.
Dans un autre des cimetières dakarois repose l’un de mes amis intellectuels les plus proches, Tshikala Kayembe Biaya, Congolais ne dans le Kasai, et sans doute l’un des esprits les plus curieux de son époque.
Je retourne à Dakar chaque fois que j’en ai l’occasion et je suis fier de contribuer au rayonnement intellectuel du Sénégal et de l’Afrique par le biais, entre autres, des Ateliers de la pensée de Dakar qu’avec Felwine, nous avons mis en place.
Pas une seule fois au cours de ces longues années aurai-je été traité comme un étranger.
Nous ne choisissons ni le lieu de notre naissance, ni nos parents. Je suis né en Afrique. L’Afrique est notre promesse à tous et à toutes. Mon sort est lié au sien tout comme à celui de notre monde dans son ensemble. Avec beaucoup d’autres, mon grand rêve est qu’elle se mette debout sur ses propres jambes et qu’elle devienne sa puissance propre, un vaste espace de libre séjour et de libre circulation pour tous ses enfants.
Ainsi, chacun d’eux comptera véritablement et, bravant des risques mortels, aucun ne sera obligé de se transporter au loin, dans des pays où nul ne l’attend, ou nul ne veut de lui, et où de toutes les façons, il finira par être brutalisé et à jamais blesse.
Beaucoup d’entre nous, le long du chemin, sont contraints ou choisissent de vivre loin de leur pays de naissance. Certains optent pour d’autres nationalités. Je suis fier que le Sénégal - et donc l’Afrique - m’offre un abri et un lieu de repos pour l’esprit, un lieu où je ne suis pas mis constamment en demeure de justifier qui je suis, voire persécuté.
Je ne reviendrai pas sur la façon dont le Cameroun aura traité certains de ceux qui sont passés avant nous - Ruben Um Nyobe, Félix Moumie, Abel Kingue, Osende Afana, Mongo Beti, Engelbert Mveng, Jean-Marc Ela, Fabien Eboussi Boulaga et plusieurs autres. Je n’evoquerai pas l’extraordinaire calvaire ni le stress et l’angoisse qu'éprouvent les siens qui vivent à l’exterieur des qu’il s’agit d’obtenir des papiers ou de les renouveler.
Qu’un État normalement constitué choisisse consciemment d’exposer les siens de cette manière en ces temps de suspicion de l’étranger, de nationalisme régressif et de cloture identitaire, voilà quelque chose qu’il m’est très difficile de comprendre.
Je voudrais, avec d’autres, nourrir l’espoir qu’un jour prochain, il en ira autrement.
par l'éditorialiste de seneplus, serigne saliou guèye
ROMPRE LES CHAÎNES DE LA HONTE
EXCLUSIF SENEPLUS - Le Sénégal est devenu une géhenne pour la plupart de ces souffre-douleur appelés talibés. Les marabouts-négriers parlent d’une mortification de l’âme et du pétrissage du corps de l’enfant
Serigne Saliou Guèye de SenePlus |
Publication 28/11/2019
Des chérubins enchainés en guenilles, la tête crasseuse, pieds nus, le corps sale et eczémateux qui témoigne de plusieurs semaines sans bain, deux lourdes entraves de fer qui enserrent les chevilles et comparables aux « compes » que l’on mettait aux pieds des prisonniers et des esclaves dans l’Antiquité romaine, soit pour les punir, soit pour les empêcher de s’enfuir, voilà les images odieuses que les Sénégalais ont découvertes, il y a quelques jours, à travers les réseaux sociaux avec stupéfaction. Cette basse œuvre porte l’empreinte d’un certain Khadim Guèye, un vil tortionnaire maquignonné en dispensateur de savoir coranique vivant à Ndiagne, un village proche de Coki dans la région de Louga. Et cela avec la complicité des parents des victimes et du maréchal-ferrant ayant conçu ces objets qui nous plongent dans la rémanence des siècles obscurantistes de la traite des noirs. Nonobstant l’horreur de la scène, certains écervelés, comme des esclavagistes des temps modernes, justifient cet acte inhumain comme un modèle d’éducation dont les Serigne daara ont toujours usé pour assagir les talibés rétifs.
Aujourd’hui que le verdict est tombé et que le procureur requiert deux ans dont deux mois ferme, il est à craindre que la sortie du khalife général des mourides, Serigne Mountakha, qui, me semble-t-il, n’a pas été bien informé de ce qui s’est passé réellement à Ndiagne, influe sur la sentence prochaine du juge. Jamais le guide de Touba n’aurait donné son onction pour la maltraitance infantile. Le défunt khalife Serigne Saliou Mbacké, qui inspire beaucoup l’actuel guide des mourides, a créé des centaines de daara et a toujours considéré les enfants comme des trésors au point qu’il était toujours leur premier défenseur, leur premier protecteur. Il avait strictement interdit dans ses daara tout châtiment corporel.
Khadim Guèye a violé l’intégrité physique des enfants, par conséquent il doit être châtié à la hauteur de la faute commise, même si des énergumènes ont osé caillassé le tribunal de Louga comme pour mettre en garde le juge qui a annoncé que l’affaire est mise en délibérée au 4 décembre prochain. Mais que les sachants, les associations de maitres ou autres organisations religieuses, cessent de crier attaque contre l’islam chaque fois qu’un maitre coranique est arrêté pour des actes délictuels (viol, acte de pédophilie, violence faite aux enfants). S’il y a des ennemis patentés de l’islam, ce sont ces adultes qui se font entretenir honteusement pendant des années par la sébile de jeunes enfants sans en contrepartie leur enseigner le « alif bâ tâ » du coran. On reste sceptique sur l’application stricte de la loi à l’encontre de ce marabout tortionnaire puisque le cas du maitre coranique Oumar Sylla à Diourbel libéré quelques heures après son arrestation risque de servir de jurisprudence. On se rappelle du traitement dégradant et cruel que ce marabout au cœur sec et racorni avait fait subir à une vingtaine de talibés en les enchainant avec des entraves métalliques qui n’ont rien à envier à celles avec lesquelles on neutralisait nos ancêtres pour les transbahuter de force vers le nouveau continent.
Le Sénégal : le Golgotha des enfants talibés
Le Sénégal est devenu une véritable géhenne pour la plupart de tous ces souffre-douleur qu’on appelle talibés. Et pour donner une justification spirituelle à cette exploitation lucrative et à cette souffrance suprême exercée sur des enfants, les marabouts-négriers parlent d’une mortification de l’âme et du pétrissage du corps de l’enfant. Si le coran est le texte de référence des marabouts-négriers, ils doivent savoir qu’aucune sourate, qu’aucun hadith ne recommande ni légitime la maltraitance des enfants. Le prophète Mahomet (alayhi salat wa salam) était doux et clément envers les enfants. Dans un hadith rapporté par Ibn Hibban, le meilleur des hommes dit : « Il suffit pour l’homme comme péché de négliger ceux dont il a la charge ». Dans le même sillage, Al Boukhari aussi rapporte : « Le Messager d’Allah ayant embrassé Al-Hassan ibn Ali au moment où Al-Aqra’ ibn Habiss At-Tamimy se trouvait assis auprès de lui, ce dernier dit : « J’ai dix enfants et jamais je n’ai embrassé un seul d’entre eux ! » Le Prophète le regardant alors, dit : « On ne fera pas miséricorde à celui qui ne fait pas miséricorde » ».
Il faut s’affranchir de ces poncifs misérabilistes qui laissent croire que la réussite d’un enfant passe irrémédiablement par la souffrance, la violence physique et psychique. Ces méthodes d’enseignement inhumaines sont éculées et doivent faire place à une pédagogie nouvelle qui puisse placer l’enfant au cœur du projet éducatif du maitre coranique. Refuser ce progrès pédagogique au nom d’une aversion du modernisme, c’est s’ancrer davantage dans cette mentalité barbare millénaire qui considère l’enfant rétif comme un animal à corriger avec des méthodes qui insultent la dignité humaine.
C’est ce qui explique sans doute cette indignation de l’universitaire géographe Lat Soucabé Mbow piquée dans une discussion de facebook le 27 novembre : « Les chaînes font surgir de notre mémoire des images traumatisantes de la période sans doute la plus sombre de notre passé : la traite négrière. La forme suprême de la négation de la dignité humaine. Ni dans le Coran, ni dans la Bible ou dans aucun autre texte sacré, il n'est dit qu'après sa chute, Adam le premier homme a été envoyé sur terre enchaîné. Malgré sa faute capitale - désobéissance à son Créateur - rien n'a été entrepris pour entraver sa liberté, celle d'aller et de venir. Le premier des droits naturels. Ces taalibés n'ont ni volé, ni commis de meurtre pour être punis de la façon vue sur les images montrées par les internautes. S'en indigner ne veut nullement dire que l'on est instrumentalisé par des lobbies ou des intérêts tapis dans l'ombre et décidés à aligner le Sénégal sur des valeurs qui ne sont pas les siennes. Ce siècle doit sa beauté - en dépit d'indéniables outrages à la morale publique - à la prise de conscience universelle des droits considérés comme irréfragables de l'être humain. D'où qu'il soit et quelles que soient ses origines. »
L’Etat du Sénégal laxiste, au lieu de prendre en charge la sécurité, la santé et l’éducation de cette couche vulnérable tel que le lui enjoint la Constitution, préfère la livrer à des marabouts négriers qui font de la traite des enfants un honteux business florissant. Et cette permissivité ne donne très souvent que des résultats tragiques. En témoignent tous ces enfants morts, traumatisés ou mutilés à cause d’actes de violence exercés abjectement sur eux par leurs maitres qui pensent avoir un droit de vie et de mort sur eux. Dans la nuit du dimanche 3 au lundi 4 mars 2013, vers 23 heures à la Médina, 9 jeunes talibés périssent calcinés dans un incendie. Le samedi 8 aout 2015 à Thiès, le forcené Moustapha Ngom dit «Dubaï», armé d’une machette, s’est introduit aux environs de 23 heures dans l’école coranique de Serigne Bassirou Kane de Thiès pour égorger le jeune mendiant Pape Ndiaye âgé de 7 ans. Le samedi 6 février 2016, dans le quartier Althiéry de la commune de Louga, un maitre coranique a battu à mort un talibé de 9 ans. Le 15 mars 2016 à Koungheul, un talibé a été amputé d’une jambe après avoir été fauché par un camion.
Dans son rapport paru en juin 2019, Human Rights Watch (HRW) a documenté les décès de 16 enfants talibés en 2017 et 2018 du fait d’abus, d’actes de négligence ou de mise en danger de la part de maîtres coraniques ou de leurs assistants. Ces incidents se sont produits dans les régions de Saint-Louis, Diourbel et Thiès. Parmi ces enfants, âgés de 5 à 15 ans, trois sont morts des suites de coups violents, quatre dans deux incendies de daara, cinq dans des accidents de la route alors qu’ils mendiaient ou évitaient de rentrer au daara, et quatre de maladies non traitées. Neuf de ces décès ont eu lieu en 2018, dont deux suite à des passages à tabac, respectivement à Touba en avril 2018, et à Mpal en mai 2018.
HRW a également souligné 61 cas de passages à tabac ou d’abus physiques perpétrés à l’encontre de talibés en 2017 et 2018, 15 cas de viols, tentatives de viols ou abus sexuels, et 14 cas d’enfants emprisonnés, attachés ou enchaînés dans un daara. Ces abus auraient tous été commis par des maîtres coraniques ou leurs assistants.
Quoique le Sénégal soit doté de lois solides réprimant la maltraitance des enfants, la mise en danger d’autrui, la traite des personnes, l’application de ces lois à l’encontre des maîtres coraniques responsables de pratiques inhumaines reste ineffective.
Ainsi l’article 298 du code pénal prévoit : « Quiconque aura volontairement fait des blessures ou porté des coups à un enfant au-dessous de l’âge de quinze ans accomplis, ou qui l’aura volontairement privé d’aliments ou de soins au point de compromettre sa santé ou qui aura commis à son encontre toute autre violence ou voie de fait, à l’exclusion des violences légères, sera puni d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 25.000 à 200.000 francs. » Ce qui veut dire que nous disposons de tous les instruments législatifs et juridiques pour lutter contre cette plaie qui gangrène notre société. Mais la volonté politique est inexistante. Aujourd’hui, l’on se rend compte de plus en plus que la mendicité, la première violence exercée sur les enfants talibés, reste très active au sein de l’enfer des daara.
Le programme de « retrait des enfants de la rue » initié en 2018 par le gouvernement sénégalais a fait long feu. Le président sénégalais Macky Sall avait affirmé son souhait de mettre fin à la mendicité des enfants et de retirer les enfants des rues. Mais, tel que l’a souligné HRW, « ce discours n’avait pas donné lieu à la prise de mesures cohérentes, résolues et ambitieuses pour protéger les enfants talibés victimes d’abus et d’une exploitation à travers le pays. La portée, la cohérence et l’impact des initiatives gouvernementales, notamment les projets d’aide sociale à l’attention des talibés et des daara et le programme de retrait des enfants de la rue à Dakar, ont été limités ».
Faillite de l’Etat et désengagement des parents
Mais pour des raisons politico-électoralistes, nos gouvernements laissent cette pratique qui n’a rien à envier à l’esclavagisme perdurer. Et la pression des lobbies maraboutiques qui se nourrissent éhontément de la main tendue de ces morpions sans feu ni lieu fait toujours reculer l’Etat sur ce sujet qu’on juge faussement sensible. Dans un tel environnement, serait-il possible de parler d’émergence et de développement ? Laissons le professeur Penda Mbow répondre : « le phénomène des enfants mendiants est un indicateur au développement, qu’on le veuille ou non. Et tant qu’on n’arrivera pas à l’éradiquer, le Sénégal ne sera pas un pays émergent à plus forte raison un pays développé ».
Sur un autre registre, l’Etat a failli à sa mission de protéger la vie de nos enfants et de leur assurer une réussite dans l’éducation et la formation. Aujourd’hui, nos enfants talibés sont tenaillés fatalement entre le marteau des maitres coranique avec leurs méthodes répressives inhumaines et l’enclume de l’Etat laxiste, voire pusillanime. L’Etat, dont la mission première est d’assurer à sa jeunesse les conditions d’un avenir radieux, est le garant de la sécurité, de la protection et l’éducation de nos enfants. Et il serait bon de l’interpeler toujours sur le sort inquiétant de nos enfants laissés-pour-compte exposés sans défense à l’esclavagisme mendiant, à la maltraitance, au viol et à la violence souvent mortifère.
Il ne faut pas, dans cette chaine de responsabilités, exonérer les parents de talibés démissionnaires qui ne préoccupent plus de l’éducation et de la sécurité de leur progéniture. Les difficultés de la vie, la hantise de la dépense quotidienne, le manque de communication, l’absence de contact social et la fuite de responsabilité des parents déteignent sur l’éducation des enfants. Quand un parent pense que des entraves métalliques peuvent servir de succédané à la place d’un programme éducatif bien pensé, c’est parce qu’il a lamentablement échoué dans le processus formateur de son enfant.