Néocolonialisme, de dépendance à la dette ou au contraire opportunité à saisir ? L'implantation fulgurante de la Chine en Afrique alimente les fantasmes chez certains experts, mais aussi nourrit l'espoir d'une nouvelle opportunité à saisir. Partisan d'une approche plus lucide dans l'établissement des relations entre l'Afrique et la Chine, l'économiste sénégalais Adama Gaye, auteur de «Chine-Afrique : le dragon et l'autruche» (L'Harmattan, 2006), décortique, en compagnie de Li Anshan, directeur du Centre d'études africaines de l'Université de Pékin, les ressorts d'une relation plus historique que l'image récente qu'on lui prête. Entretien croisé.
La Tribune Afrique : En septembre 2018, lors du Sommet Chine-Afrique, le président Xi Jinping annonçait une enveloppe de 60 milliards d'investissements. Une relation purement économique et commerciale, est-ce tout ce que la Chine peut offrir à l'Afrique ?
Li Anshan : C'est peut-être la seule représentation des faits qui domine dans les médias. Mais si l'on regarde de plus près le plan d'action et l'agenda de ce que la relation Chine-Afrique sera dans les prochaines années, on trouvera que c'est un plan assez complet. La relation entre l'Afrique et la Chine a souvent été plus politique et idéologique dans les années 1960-1970, puis économique dans les années 1980-1990. Elle est maintenant plus diversifiée qu'elle ne l'a été puisqu'elle inclut la paix et la sécurité, l'éducation et des aspects plus sociaux.
Adama Gaye: A l'origine, la Chine n'a eu que des relations politiques avec l'Afrique puisque c'est du soutien de l'Afrique dont elle avait besoin dans une période de rivalité idéologique après l'avènement de la République communiste de Chine en 1949. Plus tard, avec sa politique d'isolationnisme diplomatique après Tiananmen, la Chine avait besoin d'«amis» à l'étranger qu'elle a pu trouver auprès des pays africains notamment dans l'obtention de son siège en tant que représentant de la Chine au détriment de Taïwan.
Mais aussi, la Chine devient progressivement un grand partenaire de l'Afrique. Depuis qu'elle a réussi à atteindre un certain développement économique, elle apporte un important soutien financier au Continent. A mon sens, ce que l'Afrique doit prendre en considération, c'est la manière dont la Chine est parvenue à atteindre ce niveau après s'être relevée de siècles d'humiliations pour devenir cette nation leader dans le monde.
Je crois aussi que la Chine n'a besoin d'être vue comme un « modèle» même si elle en constitue un, en quelque sorte. Nous aspirons à des nations africaines libres, fortes, respectées comme la Chine l'a réussi. Au regard de cela, Chine-Afrique, c'est un bon partenariat en ce qu'elle constitution une solution alternative aux partenaires traditionnels.
Mais comme tout partenariat, la relation doit être basée sur des discussions franches et ouvertes qui permettront aux Africains de pouvoir avoir plus de la Chine mais aussi de dire ce qui ne leur convient pas. L'Afrique gagnerait plus à être audacieuse et venir à la table des discussions pour y exposer ses propres intérêts, ses propres besoins.
Nouvelle colonisation, spirale de la dette, ingérences déguisées. Finalement, à en entendre les mises en garde de certains spécialistes de la Chine, peut-on envisager une relation «Win-Win » entre l'Afrique et la Chine ?
Adama Gaye: Il faut d'abord relever que les clichés réduisent la dimension d'une question sérieuse. Je crois qu'un des aspects les plus importants de la relation Afrique-Chine réside dans le fait que la Chine offre à l'Afrique, une nouvelle chance de briller à nouveau. La Chine donne à l'Afrique l'opportunité de discuter avec d'autres partenaires que les superpuissances qui ont longtemps été le maître du jeu dans le monde. Mais aussi l'occasion d'apprendre comment bénéficier d'un modèle de gestion efficace de l'Etat dirigé vers l'intérêt de la collectivité. Dans cette perspective, je crois que la Chine a beaucoup à offrir à l'Afrique.
D'un autre côté, je ne crois pas que ce soit du «colonialisme» ou du «néocolonialisme». La Chine poursuit et défend ses intérêts. Si l'on regarde la politique de la Chine avec d'autres pays, la relation se construit selon le même sur la poursuite des intérêts tout en bâtissant une relation de partenariat baptisé « WIN-WIN ». C'est l'Afrique de profiter de cette relation gagnante en lieu et place de la victimisation sur le néocolonialisme ou sur la question des employés chinois sur les chantiers de la Chine sur le Continent. Quand l'Afrique arrivera avec un message clair sur ses intérêts et ses attentes, la Chine l'incorporera
Li Anshan : Une vision négative ou positive sur la relation Afrique-Chine dépend du point de vue où l'on se place pour l'observer. D'un point de vue occidental c'est peut-être compris négativement à dessein. D'un autre c'est peut-être que la relation est assez mal comprise. Mais d'un point de vue africain, les inquiétudes sont naturelles dans le sens où il y a un héritage colonial qui peut pousser à une posture d'auto-défense. Mais nous devons observer la relation Chine -Afrique depuis son essence.
Ma seule préoccupation est de voir l'Afrique prendre la Chine et les autres puissances comme des modèles à copier. L'Afrique doit créer son propre modèle selon ses propres considérations. L'Afrique doit prendre les choses positives qui l'intéressent des Etats-Unis, de la Chine, de la France, du Royaume-Uni, d'autres pays pour ensuite les adapter à ses propres réalités et son modèle. Mais toute coopération est un processus de compromis, de bénéfices des avantages mutuels sur lesquels les partenaires doivent travailler ensemble.
Finalement, l'Afrique doit-elle avoir peur de la Chine ? Quelles sont les pistes pour en faire une meilleure relation?
Li Anshan : On ne voit que le développement rapide de la Chine ces dernières années, mais ce que l'on ne sait pas c'est que la Chine a aussi appris de l'Afrique. A titre d'exemple, dans les années 1970 et 1980, la Chine voulait construire un pipeline entre Sichuan et Shanghai, sans connaître la technologie à utiliser. Pour cela, nous sommes allés en Algérie où nous avons appris comment le faire. Le plus cocasse réside dans le fait que c'était une entreprise ouest-allemande qui pilotait le projet sur place. Les employés algériens nous apprenaient comment faire au moment où les ingénieurs étrangers étaient en weekend ou en congés.
Tout cela pour dire que la relation s'inscrit dans un processus d'apprentissage réciproque si l'on se place dans un esprit d'ouverture. Les Chinois doivent aussi beaucoup apprendre des Africains notamment leur interaction avec la nature, leur vie collective, leurs valeurs...
Adama Gaye : Je ne crois pas que l'Afrique devrait avoir peur de la Chine. Elle doit étreindre la Chine pour en faire un vrai partenaire. Il y a beaucoup à apprendre de la Chine notamment sur comment elle a résisté aux autres pays pour obtenir leur indépendance, leur intégrité. D'un autre côté, l'Afrique peut apprendre de la Chine, sa manière de relancer sa culture, sa tradition, sa façon de voir lucidement les choses sans copier aveuglément les autres modèles. Nous devons travailler avec la Chine tout en posant des actes et des conditions claires concernant cette relation pour bâtir un partenariat. Ce qui est tout à fait possible !
«L'AFRIQUE, C'EST CHIC ! »
Maguette Mbow, fondateur de cette startup, revient sur les fondamentaux du concept mais aussi sur l'événement « L'Afrique, c'est chic world waw fest», qui se poursuit jusqu'au 23 décembre 2018 à Dakar
La Tribune Afrique |
Maimouna Dia |
Publication 08/12/2018
«L'Afrique, c'est chic world» est une plateforme économique et culturelle de promotion d'une image positive de l'Afrique. L’idée est de contribuer à l'industrialisation et la transformation digitale, en collaboration avec les secteurs privé et public pour générer des industries créatives, en développant l’entreprenariat et l’employabilité des Africains. La startup travaille sur la promotion de 9 secteurs d'activités identifiées comme des gisements d'emplois pour le Continent. Dans cet entretien, Maguette Mbow, fondateur de la startup, revient sur les fondamentaux du concept mais aussi sur l'événement « L'Afrique, c'est chic world waw fest», qui se poursuit jusqu'au 23 décembre 2018 à Dakar. La capitale sénégalaise, ville hôte de l'édition 2018, est la première étape d'une série d'événements itinérants sur le Continent.
La Tribune Afrique : «L'Afrique, c'est chic world» est le nom de votre startup. Qu'est-ce qui se cache derrière cette appellation aux connotations positives ?
Maguette Mbow : L'Afrique, c'est chic world est la nouvelle plateforme d'innovations économique, sociale et culturelle, génératrice de bien-être, d'industries, de startups et d'emplois en Afrique. Entre imaginaire, méthode et métamorphose, entre traditions, générations et modernité, entre jeunesse, sagesse et racines, entre technologies, digital et innovation, cette production originale puise son inspiration dans le patrimoine culturel, ancien et moderne de l'Afrique. Cela, à travers ses symboles «Adinkra 5.0» revisités dans une vision positive de l'image du Continent. L'objet de ce nouvel univers créatif est de réinventer en permanence l'Afrique, de régénérer ses valeurs, de recomposer ses liens et de transmettre à nouveau du sens aux jeunes générations. Le tout à travers un nouveau fond créatif, une nouvelle forme narrative, un champ lexical, un langage, un code source, une nouvelle combinaison d'idéogrammes messagers et de motifs graphiques, ancrés dans la matrice africaine et propulsés dans un monde Afrofuturiste doté d'énergies et de possibilités infinies, au service du développement et du rayonnement de l'Afrique.
En trois ans d'existence, la structure a réalisé plus de 50 productions d'événements sur fonds propres et réunit une communauté en ligne de plus de 100 000 abonnés. L'esprit de cette initiative est global et représentatif d'une nouvelle Afrique diverse, internationale, créative, collaborative, innovante. Lorsque vous tapez le nom de l'Afrique sur les moteurs de recherche, vous avez bien souvent une image qui ne correspond pas à la réalité du Continent, en matière de développement économique, culturel et social. L'Afrique c'est chic, c'est une marque qui promeut la nouvelle image de l'Afrique. C'est-à-dire, cette Afrique qui produit, se développe et crée un modèle qu'il doit transmettre au monde, en s'appuyant avant tout sur ses valeurs et savoir-faire traditionnels et culturels. Dans ce sens, notre événement «L"Afrique, c'est chic world, waw fest» a pour objectif de replacer l'Afrique -berceau de l'humanité- au premier plan sur la carte des cultures du monde.
Vos activités portent sur plusieurs secteurs, tous différents. Pourquoi avoir ratissé aussi large au lieu de se focaliser sur une seule thématique ?
L'objectif de L'Afrique, c'est chic world, c'est de travailler sur deux axes : l'entreprenariat et l'employabilité des Africains sur le Continent. Alors nous avons choisi neuf secteurs d'activités identifiées comme étant des gisements d'emplois. Parmi ces derniers, vous avez l'industrie de la mode, qui rassemble un certain nombre d'activités. Le coton est produit en Afrique dans la plupart des régions, il doit être exploité, pour être transformé avant d'être commercialisé en Afrique. Quand vous produisez un événement autour de la mode, de la graine du coton jusqu'au podium du défilé, en passant par la boutique qui commercialise les produits textiles, vous reconstituez une filière textile avec toute une chaîne de valeurs, de métiers, de savoir-faire qui s'articule, tant bien que mal en Afrique, pour réaliser le produit fini. Par conséquent, ce secteur nous apparaît comme un gisement d'emplois pour les africains quand nous savons la richesse en ressources naturelles sur le Continent. Nous avons identifié à ce jour plus de 80 corps de métiers différents dans le travail du cuir, du coton, du lin qui concourent à la réalisation de cette chaîne de valeur dans le secteur textile, verticale et intégrée.
L'idée de L'Afrique, c'est chic world est de révéler ces niches d'emplois qui sont aujourd'hui mal identifiées, cartographiées, peu structurées, maîtrisées pour en faire des filières attractives et qualifiantes vers lesquelles bon nombre des 23 millions de jeunes entrants par an sur le marché de l'emploi en Afrique, peuvent s'orienter, innover et se développer. Par nos actions sur le terrain relayer par notre plateforme digitale, nous investissons à court, moyen et long terme dans une démarche de valorisation, d'accompagnement et de développement de capacités de nos jeunes, par des cycles de formations intensives, opérationnelles et d'insertion professionnelle dans des activités génératrices de revenus.
Par ailleurs, le tourisme est un moteur de croissance performant. D'après le rapport Hospitality Report Sénégal 2016 portant sur le secteur de touristique au Sénégal la croissance du secteur devrait être supérieure 5% par an sur les 10 prochaines années. L'Afrique, c'est chic world a pour vocation de contribuer à la professionnalisation de ce secteur-clé pourvoyeur d'emplois.
Dans le cluster « Sport », nous nous intéressons au développement de valeurs, de sens, et de liens, dans une tendance globale à la digitalisation exacerbée qui comporte, pour nos jeunes, des risques de perte de repères et de crises d'identité. En effet, le sport nous enseigne des notions simples de savoir-être, du vivre-ensemble elles que l'endurance, la performance, la compétition, le respect de soi et de l'autre, le jeu collectif... génératrices de développement culturel, spirituel, social
Ensuite, nous avons le cluster High Tech ou digital, qui est une opportunité pour l'Afrique de devancer le progrès. Dans le cas du mobile money, l'Afrique est aujourd'hui le continent précurseur qui développement le plus d'innovations et d'usages pour régler des problèmes de bancarisation, ceux des transferts de fonds et d'autres continents viennent s'inspirer de ces innovations africaines. Avec plus de 20 ans d'expérience dans le numérique, L'Afrique, c'est chic world considère le digital comme la principale clé de transformation, de création, de startup et d'emplois en Afrique avec plus de 450 «Tech Hub» actives sur le continent en 2018.
Vos activités s'étendent également à la gastronomie et à la décoration. Comment le digital peut-il contribuer au développement de ces deux secteurs en Afrique ?
La gastronomie est un secteur important pour nous. En Afrique, nous avons des recettes ancestrales, un art culinaire qui a tendance à disparaître, à être oublié. Nous voulons à travers le digital, mettre en lumière ces recettes de nos grands-mères. La gastronomie est un secteur générateur d'emplois et même un outil de diplomatie culturelle comme c'est le cas pour des pays comme la France. Nous voulons grâce au digital transposer, diffuser les recettes africaines et l'art culinaire du Continent vers d'autres cultures. C'est un secteur qui mérite d'être valorisé.
Notre concept inclut également la décoration d'intérieur qui offre un potentiel de création d'emploi inestimable. En Afrique, nous avons des menuisiers, des tapissiers, des artisans, bref, des métiers à intelligence manuelle, comme nous aimons les qualifier. Les acteurs de ces secteurs sont souvent en chômage faute de débouchés commerciaux. La Chine devenue en moins d'un siècle, l'atelier du monde en misant d'abord sur une main- d'œuvre industrialisée, dont nous disposons en Afrique à travers nos artisans souvent formés sur le tas, capables de réaliser des objets sur-mesure, à partir de nos matières premières (bois, cuir, coton,...) à partir de nos savoir-faire ancestraux qui avec le digital doivent pouvoir retrouver toutes leurs lettres de noblesse dans les échanges commerciaux tant à l'échelle continentale qu'internationale.
Passé le cadre idéologique, comment le concept est-il intégré par les populations cibles en Afrique et par la diaspora ?
Le médium qui permet de valoriser, de diffuser le concept est l'événement «L'Afrique, c'est chic world, waw fest» qui permet la rencontre physique entre des interlocuteurs. Il s'adresse aux Africains du Continent, à différents corps de métiers interculturels, interprofessionnels. C'est un événement, un festival où se côtoient des entreprises, des étudiants, des investisseurs, des familles, des enseignants. L'objectif est réunir «les Afriques». Nous nous adressons également aux Africains de la diaspora. Car l'histoire de l'Afrique, c'est aussi celle des déplacements et migrations de ses populations vers l'Amérique, l'Europe et le reste du monde. L'objectif est de lancer un message à cette diaspora, en leur rappelant que l'Afrique est leur terre d'origine, de refuge et que c'est aussi une terre d'opportunités, un marché à haut potentiel, pour connecter ou reconnecter cette diaspora à sa matrice africaine, qui nous lie tous. Nous les appelons à recréer, à renouer le lien avec le Continent, car il est essentiel de «s'enraciner dans sa culture avant l'ouverture», comme disait Léopold Sedar Senghor, l'enracinement permet d'être en accord avec son histoire, sa culture et l'ouverture permet de transmettre son histoire et de recevoir l'histoire des autres dans le cadre d'un échange, que Senghor appelait «la civilisation de l'universel». C'est le «Momentum de l'Afrique» qui doit conduire à la réappropriation de ces valeurs, cette histoire, ces savoir-faire panafricaine dans la logique de l'intégration structurée par l'agenda 2063 de l'Union africaine, «L'Afrique que nous voulons».
A L'Afrique c'est chic Word, nous sommes partie prenante pour accompagner cette émergence africaine en contribuant au développement d'une chaîne de valeur verticale et transversale dans les différents secteurs d'activités des neufs thématiques que nous traitons, afin de retenir, de «fixer» les jeunes africains sur le Continent par la créations d'opportunités professionnelles. Le rêve africain est à portée de clic aujourd'hui avec le digital. A ce titre, nous avons déjà amorcé la duplication du concept «L'Afrique, c'est chic world» sur tout le Continent. Actuellement, nous collaborons déjà avec des pays comme le Rwanda, l'Afrique du Sud, le Maroc, le Bénin, le Ghana... Cette unité africaine, nous ne faisons pas que d'y penser ou d'en parler, nous la réalisation au jour le jour, par notre génération interconnectée, intercontinentale et diasporique.
Comment se déroulera l'événement «L'Afrique, c'est chic world, waw fest» ?
«L'Afrique, c'est chic world, waw fest» est la nouvelle production pour le développement des industries culturelles, créatives et digitales en Afrique. Il s'agit d'un festival de 27 jours, du 27 novembre au 23 décembre 2018, avec une audience totale de 100 000 personnes sur différents sites d'une ville symbolique africaine. Dakar étant la première de la série d'événements itinérants sur le Continent. L'évènement se distingue par son contenu scientifique, éducatif et technologique visant à valoriser le savoir-faire africain et à promouvoir la transition des savoir-faire traditionnels vers la modernité accompagnée par les nouvelles technologies. Le Festival est également un rendez-vous privilégié pour les investisseurs dans les neuf (9) domaines culturels : Mode, cinéma, littérature, voyages, technologie de pointe, musique et danse, sports, arts, y compris la photographie, architecture et déco, la gastronomie, etc. Tous les décideurs, entrepreneurs, entreprises et institutions peuvent exposer leurs produits et services sur la plateforme, et à travers le programme du festival, adresser leurs prospects, clients et investisseurs mais aussi communiquer sur leur image, leurs expertises, leurs innovations, saisir sur les opportunités d'affaires... C'est un véritable dispositif de rencontres économique, sociale et culturelle propice à la prospection, à la relation client, à l'entrepreneuriat et aux opportunités de levée de fonds, d'investissements et développement en Afrique.
C'est la première fois que nous organisons un événement aussi grand. Cette fois, la rencontre va se dérouler sur près d'un mois, c'est-à-dire du 27 novembre au 23 décembre, à Dakar, la Capital sénégalaise. Une ville avec un certain nombre de monuments et lieux symboliques comme l'île de Gorée, le monument de la Renaissance africaine reflet d'une Afrique émergente, la Place du Souvenir Africain qui est un espace de commémoration et de respect de la dignité africaine.
«L'Afrique, c'est chic world, waw fest» se veut une manifestation panafricaine, comment faire circuler le concept au niveau des différents pays ?
Une prochaine étape du festival consistera à déplacer la prochaine rencontre à Kigali au Rwanda et des échanges sont en cours pour l'organiser dans plusieurs autres capitales africaines.
Par ailleurs, parmi nos actions, projets, souhaits et appels que nous portons à l'Union africaine, figure également la création d'une célébration annuelle des cultures africaines, un événement planétaire d'une à trois journées dans l'année, en simultané et en direct de tous les pays du continent africain où les projecteurs du monde entier s'orientent vers les différentes facettes des cultures africaines... Dès lors, il devient aisé de planifier les retombées économiques, pour les secteurs du tourisme, de la culture....
Quelles sont les activités prévues au festival ?
Sur les 27 jours du festival, nous avons prévu des manifestations scientifiques. Les matinées seront dédiées à des conférences sectorielles, les après-midis à des workshops, des ateliers pratiques sectoriels. Le soir, nous avons programmé des afterwork, des networking interprofessionnels, interculturels et intergénérationnels qui permettront de renforcer les liens tissés dans la journée. Le tout ponctué par des manifestations culturelles, artistiques modernes et traditionnelles, des visites organisées des sites à Dakar et au niveau des villes de l'intérieur à travers des partenariats avec des instances touristiques locales. Ce qui permet d'intégrer dans le festival une offre de circuit touristique et culturel.
Un volet économique a été intégré pour permettre la rencontre entre investisseurs et porteurs de projets. Nous organisons également la 2e édition du notre «Creative Lab» à Dakar, en partenariat avec l'ISM Digital Campus, sur les métiers de la réalité virtuelle, de la création graphique ou de «design thinking» pour l'Afrique. Au programme, nous aurons également, des expositions culturelles avec des artistes, de la projection de cinématographique, des séances de littérature. Le digital sera évidemment partout au cœur de cette plateforme qui célèbre cette Nouvelle Afrique, optimiste, forte du legs de ses aïeux, de l'expertise de sa diaspora, du dynamisme de sa jeunesse : son dividende démographique.
SIDY LAMINE NIASSE ET LA PRÉSIDENTIELLE 2019 EN EXERGUE
Dakar, 08 déc (APS) - L’inhumation du président-directeur général du groupe Walfadjri, Sidy Lamine, décédé mardi à l’âge de 68 ans, et la présidentielle de 2019 constituent les sujets dominants de l’actualité abordée ce samedi par les quotidiens dakarois.
WalfQuotidien fait le récit de ‘’l’ultime voyage de Sidy Lamine’’, inhumé vendredi après-midi à Léona Niassène, à Kaolack. Il y avait, lors de la cérémonie, une ‘’union de prières’’ dans cette cité religieuse, ainsi que dans celle de Médina Médina, relève le journal, décrivant l’’’effervescence populaire sur tout le trajet’’.
‘’L’aurore éternelle’’, titre le quotidien Enquête qui précise que le défunt ‘’repose désormais à Léona Niassène, près de son père, El Hadji Ibrahima Niasse, défunt Khalife de Léona’’.
Le journal remarque néanmoins que l’’’enterrement du journaliste et homme religieux n’a pas été du tout repos’’. La publication explique en effet que ‘’comme à Dakar’’ où une discorde avait éclaté sur le lieu de son enterrement, ‘’la question sur le lieu d’inhumation du Mollah de Sacré-Cœur s’est posé à Léona’’.
Vox populi note lui aussi que ‘’l’enterrement a eu lieu […] après moult tractations à l’arrivée de la dépouille dans la cite religieuse’’. ‘’Sidy Lamine Niasse à Léona pour l’éternité’’, affiche le journal, précisant qu’il ‘’repose dans le mausolée familial de la grande mosquée de Léona’’.
L’Observateur en déduit que ‘’Sidy [est] admis à la chambre des +pairs+’’. Selon le quotidien du groupe Futurs Médias, il est ‘’enterré aux côtés de son frère, le défunt khalife Cheikh Ibrahima Niass’’.
Le journal signale que ‘’dans une lettre publique datant du 4 décembre 2018 et adressée à Ahmed Khalifa Niass, frère de Sidy Lamine’’, l’ancien président Abdoulaye Wade ‘’salue la mémoire du défunt avant de confier qu’ils travaillaient ensemble sur un projet qu’il aimerait poursuivre avec son potentiel successeur’’.
A en croire Direct Info, son inhumation à Léona a été rendu possible après un consensus trouvé entre ses enfants, qui souhaitaient qu’il repose au cimetière de Yoff, à Dakar, et sa famille de Kaolack, qui voulait qu’il soit inhumé à Léona.
Les quotidiens dakarois informent par ailleurs que Karim, le fils de l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade, a déposé sa caution pour la présidentielle du 24 février 2019. Libération indique que ‘’le chèque de 30 millions F cfa a été déposé hier [jeudi] à la caisse des dépôts par Omar Sarr’’, le secrétaire général adjoint du Parti démocratique sénégalais (PDS), ancien parti au pouvoir.
Mais selon Le Quotidien qui donne aussi cette information, ‘’Wade-fils n’a pas encore notifié le nom de son parti ou sa coalition devant le Conseil constitutionnel, comme l’ont déjà fait certains candidats déclarés’’. ‘’C’est donc un acte posé en direction de la Présidentielle du 24 février alors même que sa condamnation à 6 ans de prison ferme et à une amende de 138 milliards de F Cfa ne plaiderait pas en faveur de la validation de sa candidature’’.
Toujours à propos de cette présidentielle, Sud Quotidien titre sur la ‘’menace de forclusion’’ et de ‘’retard dans la course au dépôt des dossiers auprès des +7 sages+’’ du Conseil constitutionnel. ‘’Candidats en sursis’’, s’exclame le journal.
‘’Si le Code électoral, en ses articles L57, L116 et L118, applique de manière méthodique ses dispositions, beaucoup de candidats à la candidature pour la prochaine présidentielle verront soit leur candidature déclarée forclose pour défaut de pièces dans leur dossier de candidature, soit perdre des parrains pour avoir été les derniers à déposer leur candidature’’.
Au sujet de la vérification des parraines, Le Quotidien assure que ‘’les candidats [sont bel et bien impliqués’’.
En économie, Le Soleil signale que l’Union européenne (UE) va mettre ‘’près de 492 milliards’’ à la disposition du Sénégal. Selon le journal, les deux parties ont signé vendredi à Dakar, le document de stratégie conjointe européenne pour le Sénégal.
Le quotidien nationa révèle par ailleurs à propos des accords gouvernement-syndicats d’enseignants, que ‘’les deux parties [sont] satisfaites de l’état d’exécution’’.
«JE SUIS UN HOMME LIBRE. MON BLANCHIMENT N’A PAS ETE NEGOCIE»
El hadj Amadou Kane Diallo, président du mouvement Bamtaré
Ousseynou BALDE & Aïssatou Diao KANE |
Publication 08/12/2018
A l’approche de la présidentielle de 2019, le président du mouvement «Bamtaré» s’engage à fond pour la réélection du candidat de Bennoo Bokk Yakkar, Macky Sall, au premier tour. L’ancien Directeur du Cosec organise un grand meeting à Ndioum le 10 décembre prochain. Mais Amadou Kane Diallo entend joindre l’utile à l’agréable : faire le bilan des signatures collectées dans une atmosphère de fête, avec en toile de fond une prestation de Baaba Maal. Dans cet entretien avec «L’As », l’ancien maire de Ndioum précise que son ralliement à la mouvance présidentielle n’a pas été une condition de son blanchiment par la justice.
L’As : Pourquoi avez vous attendu maintenant pour rejoindre le président Macky Sall, alors que «Bamtaré» avait voté Non au referendum.. ?
Amadou Kane Diallo : Notre ambition, c’était de mettre en œuvre notre vision du développement au niveau de l’Etat. Pour ce faire, il faut soit être président de la République soit être un élément important du gouvernement pour être écouté. Dès le départ, nous avons visé le pouvoir. Car on ne fait de la politique que pour conquérir le pouvoir et l’exercer. Nous sommes allés avec nos propres moyens aux élections législatives et nous étions présents dans les 45 départements du Sénégal et dans la diaspora.Nous sommes partis seul sans coalition, sans moyens. J’ai fait deux fois le tour du pays. Au finish, on s’est classé 26e sur 47 listes, mais sans avoir un député. Il est donc irréaliste de chercher à présider le Sénégal alors qu’on n’a pas été élu. C’est ainsi que les membres du Mouvement Bamtaré ont décidé de choisir un candidat pour la présidentielle de 2019. Notre analyse nous a fait ressortir qu’il y avait deux candidats qui pouvaient nous intéresser, c’est-àdire d’où on venait, le PDS, ou le candidat sortant. Malheureusement, au Parti de démocratique sénégalais personne ne nous a contactés. Le régime en place nous a revanche contactés pour une alliance. La base a adhéré et exigé qu’on soutienne le candidat Macky Sall en direction de la présidentielle de 2019.
On sait que vous avez été blanchi par la justice dans une affaire de détournement de deniers publics. N’était ce pas là un moyen de vous tenir et vous contraindre à rejoindre la mouvance présidentielle ?
Non !!! Justement si c’était le cas, j’aurais accepté la main tendue de mon oncle (frère de mon père), le ministre Mansour Elimane Kane, depuis trois à quatre ans, ou celle de Thierno Madani Tall, entres autres. Même si le président Macky Sall me convoquait à cette époque, je n’aurais pas répondu parce que j’avais les mains liées. J’avais un dossier judiciaire. Et pour aller travailler avec le président Sall, il faut avoir les mains propres. Macky avait bien compris. J’étais très dur, je présidais le front du non du département de Podor lors du référendum. Je suis quelqu’un qui croit en ce qu’il fait. Moi, je ne fais pas de coup bas, je donne des coups directs. A l’époque, presque tout le monde était intervenu pour que je rejoigne la mouvance présidentielle. Alors si je voulais être blanchi, je pouvais le négocier, mais je refusais. On a rejoint le président Macky Sall au moment le plus difficile. On ne l’a pas fait lorsqu’il était facile de le faire, c’est-à-dire en début de mandat pour avoir notre part du gâteau. Je connais Macky Sall depuis longtemps, c’est un frère. Mais la politique, c’est la politique ; et les coups se paient cash, les erreurs se paient aussi. J’ai été agressé politiquement, j’ai toujours répondu et j’ai fait face à la justice pendant 6 ans. Personne ne me soupçonne aujourd’hui d’avoir rejoint le président Sall pour avoir une liberté ou des prébendes. Le juge d’instruction qui avait mon dossier avait demandé depuis trois ans qu’on m’accorde un non-lieu. Il faut rappeler que le dossier ne concerne pas seulement Amadou Kane Diallo, mais aussi Ameth Fall Braya et trois autres directeurs du Cosec. Nous étions inculpés pour les mêmes motifs, mais le juge d’instruction a estimé qu’il n’y a pas matière à juger. Mais politiquement, c’est normal qu’on fasse trainer le dossier : une manière de me mettre la pression. Mais quand ils se sont rendus compte que cette pression était inutile, qu’à chaque élection j’augmentais mon électoral et que cela pourrait être dangereux pour eux, les gens ont laissé la justice faire son travail correctement. Finalement, je suis blanchi. Le dossier n’a rien ; je n’ai pas pris de l’argent, je n’ai pas vu la couleur de l’argent. C’était des problèmes de maitrise de procédures de marchés publics. C’est tout. Et le rapport 2008 de l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP) se trouve dans le net. Il y avait 84 entreprises qui étaient auditées, dont le Cosec. Le point de vue de l’auditeur, c’était que le Cosec a fauté dans le respect des procédures ; mais dans le fond, il s’agit d’un petit nombre de marchés pour des montants non significatifs. Est-ce que cela doit amener quelqu’un en prison ? C’est cela l’opinion de l’auditeur ! Ce n’est pas une négociation, du tout ! Je suis vraiment un homme libre, avec un mouvement libre et implanté un peu partout dans ce Sénégal.
Quels sont les objectifs visés à travers le méga-meeting à Ndioum pour le 10 décembre ?
Le mouvement «Bamtaré» et ses alliés organisent le 10 décembre à Ndioum un méga meeting politique, culturel et inclusif, dans le but de soutenir notre candidat Macky Sall. Ce sera sous la présence du ministre Abdoulaye Daouda Diallo. Nous révèlerons le nombre de signatures que le mouvement Bamtaré a récolté pour le parrainage du président Macky Sall et remercierons ma base naturelle, Abdoulaye Maal représentant de la diaspora, les Ndioumois et tous les militants. A travers ce meeting, nous visons à transformer les parrains en électeurs. A partir de ce jour, on va transformer les parrains en vrais électeurs. Et puis cette date correspond à la fin du parrainage. C’est pourquoi on tient au slogan : «Ila Macky Sall». Il faut que les Sénégalais acceptent de laisser Macky Sall terminer son travail. Cinq ans, ce n’est pas beaucoup.
Pourquoi avez-vous couplé le meeting à la clôture des « Blues des fleuves » de Baaba Maal ?
L’artiste Baaba Maal est le concepteur de cette manifestation ; c’est lui-même qui a fixé la date du 10 décembre, après le festival «les Blues des fleuves». Il clôture l’évènement avec le méga-meeting politique, culturel et inclusif du Mouvement «Bamtaré». Baba Maal et moi avons des relations très profondes. On a le même combat, c’est-à-dire le combat pour l’épanouissement culturel de la communauté et le développement. D’ailleurs, mon dernier fils porte le nom du lead vocal de Dande Lenol, Baaba Maal Diallo
LES RECETTES FISCALES PASSENT DE 19 A 50 MILLIARDS ENTRE 2014 ET 2017
Le rapport de conciliation 2017 de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) laisse apparaître que la région de Thiès conforte sa place de première région minière du Sénégal, en terme de contribution au budget national, mais aussi, en terme d’implantation d’entreprises extractives. Le rapport révèle que la contribution fiscale du secteur dans la région est dans une tendance haussière, passant de 19 milliards en 2014 à 50 en 2017.
Tous les acteurs impliqués dans le secteur minier, ainsi que la société civile, les autorités locales et administratives de la région de Thiès se sont retrouvées, hier, dans la capitale du rail. C’était pour les besoins de la dissémination du rapport ITIE 2017, qui donne une cartographie claire du secteur minier et extractif et toute sa chaine de valeur, avec des informations fiables et exhaustifs. Il ressort de ce rapport 2017, note Abdoul Aziz Diop, Coordonnateur Général Adjoint du Forum civil, membre du Comité national Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE) au Sénégal au nom de la coalition « Payez ce que vous publiez », que Thiès reste la première région minière, en terme de contribution fiscale, avec une tendance haussière.
En effet en 2014 la contribution globale de la région était de 19 milliards de Fcfa et 50 milliards en 2017 dans le budget de l’Etat. Au niveau national, la contribution était de 46 milliards en 2016 et est passée à 126,7 milliards en 2017 dont 84,7% proviennent du secteur minier et 15,3% des hydrocarbures. Ainsi pour l’année 2017, le secteur minier est le premier contributeur de revenus tirés du secteur extractif avec un total de 107,3 milliards de Fcfa contre 19,4 milliards de Fcfa provenant des hydrocarbures (pétrole et gaz). Mais, selon Abdoul Aziz Diop, il y a un paradoxe car l’Etat a prévu qu’une partie de cette somme doit être reversée aux collectivités locales sous forme de fonds de péréquation et d’appui aux collectivités locales. Ledit fonds a été institué en 2009 et en 2015 il y a eu un nouveau Décret pris par le Chef de l’Etat, suivi de l’arrêté interministériel 22-469 du 20 décembre 2017 qui fixe les clés de répartition. Mais, à ce jour se désole-til, les collectivités locales n’ont encore rien reçu alors que les entreprises ont déjà payé.
D’après lui, l’Etat a ainsi perçu toutes les sommes, mais sans verser aux collectivités locales la part qui leur est due. Ce qui pose, à ses yeux, un problème d’équité et cela occasionne beaucoup de frustrations. Et la conséquence immédiate est que les populations impactées par ces entreprises continuent de vivre le paradoxe de l’abondance avec des entreprises assises sur des milliards de bénéfice, à côté de communautés qui sont dans l’extrême pauvreté. Pour lui, il urge de prendre les décisions idoines pour que ces fonds de péréquation soient reversés le plus rapidement possible aux collectivités locales. Il ajoute que la clé de répartition de ces fonds pose encore problème car se fondant sur le critère démographique. Mais, dit-il, l’Etat a pris une mesure importante en fixant le taux de 0,5% du chiffre d’affaire annuel hors taxe des entreprises en exploitation et qui doit être reversé aux collectivités locales qui abritent les dites industries extractives. Pour lui, il suffit de prendre l’exemple de Darou Khoudos pour se rendre que si cette mesure est pleinement mise en œuvre, les collectivités locales abritant les exploitations vont bientôt décoller économiquement. En effet, en 2016 les Industries Chimiques du Sénégal (ICS) ont fait un bénéfice de 142 milliards de F cfa et la GCO plus de 50 milliards de Fcfa soit un cumul de 200 milliards. Si cet arrêté était effectif, Darou Khoudos pourrait se retrouver avec un milliard, ce qui triple son budget annuel. Selon lui, le Sénégal a suffisamment montré qu’il est un pays modèle dans ce domaine, mais il faut agir car l’impact des mesures prises sont encore très faibles sur les communautés. Et pour ce faire, il faut que le ministère des Finances fasse en sorte que ces fonds soient inscrits dans le budget de l’Etat. Il s’y ajoute la nécessité de réunir tous les acteurs, les élus locaux, les services de l’Etat, la société civile autour d’une table pour essayer de voir comment faire pour que l’exploitation minière ait un impact positif sur le vécu des communautés riveraines qui ont perdu leurs moyens de suffisance et de survie.
Dans le même temps, indique Abdoul Aziz Diop, les dépenses sociales des entreprises dans la région de Thiès sont de 1 milliard dont 5% pour la santé, et 22% pour l’éducation. C’est encore très faible, dit il, et souvent la plus grande partie de ces fonds sociaux sont orientés vers des dépenses de prestige. Par exemple, les billets pour La Mecque ne profitent qu’à des individus et parfois à une clientèle politique. Pour lui, un cadre de concertation à la base pourrait prendre en charge toutes ces questions, avec des consensus forts et que les acteurs refusent d’en faire une rente politique car les populations ont besoin de rente minière, pétrolière et gazière.
"LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE EST SUR UNE PENTE DANGEREUSE"
Le reggae man ivoirien Tiken Jah Fakoly aborde de nombreux sujets, notamment sa carrière, son engagement politique, sans oublier d’évoquer son probable retour au Sénégal après son interdiction de séjour en 2007 - ENTRETIEN
Chanteur engagé, panafricaniste reconnu, Tiken Jah Fakoly, de son vrai nom Doumbia Moussa Fakoly, ne met pas de gants quand il parle du continent. Ses sorties sont très écoutées et lui valent souvent des déboires. Au Sénégal, le régime du président Wade l’avait expulsé. Même son statut de réfugié ne l’empêche pas de se montrer particulièrement virulent contre certains gouvernements africains. Dans cet entretien exclusif avec «L’As», le reggae man ivoirien qui vit en exil au Mali aborde de nombreux sujets, notamment sa carrière, son engagement politique, et sans oublier d’évoquer son probable retour au Sénégal après son interdiction de séjour en 2007.
L’AS : Quelle est l’actualité musicale de Tiken Jah Fakoly ?
Tiken Jah Fakoly : L’actualité, c’est l’enregistrement du prochain album qui va sortir en avril 2019. On a commencé l’enregistrement dans mon studio à Abidjan et on doit faire la deuxième phase à Bamako. C’est pour enregistrer les instruments traditionnels. Depuis quelques années, j’ai commencé à introduire certains instruments traditionnels dans le reggae. Après, on ira à Paris pour faire le mixage.
Comment voyez-vous l’évolution de la musique reggae en Afrique ?
Je pense que la musique reggae évolue bien. Elle vient d’être reconnue patrimoine mondial de l’UNESCO. C’est vrai qu’il y a beaucoup de jeunes, aujourd’hui, qui ont commencé une carrière dans cette musique après nous. Mais ils n’ont pas encore cette notoriété internationale. Cela n’enlève en rien l’évolution que connaît le reggae en Afrique et cette musique va continuer pendant longtemps.
Le message révolutionnaire de cette musique n’est-il pas un frein à son développement ?
C’est vrai que l’esprit révolutionnaire retarde la promotion de cette musique. Les radios et les télévisions censurent souvent la musique reggae. Quand les jeunes qui font du reggae commencent leur carrière, ils n’ont pas la chance d’avoir la même promotion que leurs camarades qui font d’autres genres musicaux. Cela retarde certes la promotion de cette musique. Le reggae véhicule un message de conscientisation, c’est une musique de combat. Quand cette musique a été créée en Jamaïque, beaucoup pensaient que c’était un phénomène de mode, mais après des décennies, le reggae est toujours là présent. Cependant je reconnais que l’esprit révolutionnaire va nous retarder, mais cela ne va pas nous freiner.
Musique et engagement politique font-ils bon ménage ?
S’agissant de la musique reggae, on n’a pas le choix. Le reggae, depuis sa création, a toujours rimé avec l’engagement politique. On ne peut pas faire de reggae sans parler de politique. Cette musique défend la cause des populations manipulées par les politiciens. Si le reggae man dit qu’il ne parle pas de politique, alors il lui sera difficile de faire du bon reggae.
Quel est votre regard sur la musique sénégalaise ?
J’aime la musique sénégalaise. Elle est appréciée partout dans le monde. La nouvelle génération de musiciens sénégalais commence à s’ouvrir aux autres genres musicaux. Avant, on entendait les mêmes percussions, les mêmes sonorités, mais on sent qu’aujourd’hui, les jeunes commencent à urbaniser le mbalax. Du coup, il est en train de s’exporter. C’est vrai qu’avec Youssou Ndour, cette musique s’est déjà imposée au niveau national et commençait à être exportée à l’international, mais ce n’était pas assez. Il fallait une ouverture internationale des artistes sénégalais aux autres genres musicaux du monde pour pouvoir exporter cette musique vers d’autres horizons et espérer que le monde entier puisse s’accaparer du mbalax. Maintenant, je suis content de voir que de jeunes artistes sénégalais comme Viviane Chidid, entre autres, essaient de se lancer dans cette ouverture en mélangeant le mbalax avec d’autres sonorités extérieures.
Vous avez été expulsé du Sénégal. Que pensez-vous de la démocratie sénégalaise?
La démocratie sénégalaise ne se porte pas mal, parce que les opposants s’expriment. Mais le constat que l’on fait, c’est qu’elle commence à être sur une pente un peu dangereuse. Parce que, quand on commence les emprisonnements des opposants politiques, alors la démocratie est perturbée. Les emprisonnements des opposants politiques créent de la frustration, des énervements. Cela peut engendrer beaucoup de querelles dans le champ politique. Il faut éviter les injustices et les emprisonnements des opposants politiques. L’exemple de la Côte d’Ivoire doit servir à tous les pays de cette région ouest africaine. Quand les populations sont à bout, la situation peut dégénérer et perturber la stabilité du pays. Sinon dans l’ensemble, la démocratie se porte bien ; il ne faut pas oublier de rappeler que le Sénégal fait partie des rares pays qui n’ont pas connu de coups d’Etat. Cela prouve que la parole a toujours été ouverte, les débats se passent sans censure dans les médias. C’est un bon signe pour la liberté d’expression. Si cette dernière se porte bien dans un pays, cela montre que la démocratie ne se porte pas mal. La seule tâche noire au tableau de cette démocratie, c’est l’expulsion tout dernièrement du jeune frère activiste, Kémi Séba. Même si nous, en tant qu’activistes, nous ne partagions pas avec lui certaines idées. Toutefois, nous pensons que le gouvernement du Sénégal ne devait pas l’expulser. Certes, Kémi Séba a la nationalité française, mais il a la peau noire, il est d’origine béninoise, donc le Sénégal, c’est son pays. Cette expulsion fera tache d’huile dans l’histoire de la démocratie sénégalaise.
Quand est-ce que vous allez vous produire de nouveau au Sénégal ?
Je pense que cela aura lieu bientôt. J’aime le Sénégal et je sais que je compte beaucoup de fans dans ce pays. Mais il faudrait que les promoteurs viennent nous chercher pour leur faire des spectacles. Il y a une date qui est annoncée pour le 20 janvier 2019 en Casamance. Je souhaite qu’après cette date du 20 janvier, ou même avant, on puisse faire un autre concert à Dakar. Encore faudrait-il que les promoteurs sachent qu’on est ouvert et qu’on a envie de jouer toujours au Sénégal.
Abdoulaye Wade vous avait interdit l’entrée au Sénégal, est il plus démocrate que Macky Sall ?
Je ne sais pas qui est plus démocrate que l’autre. Macky est sorti de l’école de Wade, même si à la fin cela n’a pas marché entre eux. Ce que je sais, c’est que Wade m’a interdit l’entrée au Sénégal, à travers son ministre de l’Intérieur d’alors Ousmane Ngom, et Macky Sall a expulsé Kémi Séba. On en déduit que l’esprit de l’expulsion et de l’interdiction de séjour au Sénégal est encore là, toujours présent. J’espère que le prochain président qui viendra après Macky Sall fera beaucoup mieux en matière de liberté d’expression, pour que la démocratie sénégalaise puisse rayonner totalement et sans restriction. J’ai été interdit de séjour au Sénégal en 2007 et, trois ans après, j’ai rencontré Wade. Il m’a fait savoir qu’il n’était pas au courant que j’étais interdit de séjour au Sénégal. C’est Ousmane Ngom, ministre de l’Intérieur d’alors, qui a décidé cela sans son autorisation. Mon interdiction de séjour a tellement fait de bruit que cela m’aurait surpris que Wade ne soit pas au courant. Il m’a dit aussi que le Sénégal est le pays de la Téranga (hospitalité), et c’est surprenant qu’un africain y soit interdit de séjour. L’interdiction a été levée en 2010. Je devais jouer un concert à Dakar mais, malheureusement, la pluie a fait que cela n’a pas pu avoir lieu. Le Sénégal va bientôt devenir un pays pétrolier.
Quels conseils donneriez-vous au régime en place ?
Le conseil que je peux donner est de faire très attention. La découverte du pétrole est un bonheur pour un pays, mais elle peut être aussi source de malheurs. La Libye, l’Irak sont des exemples concrets du malheur découlant de l’or noir. J’espère que le gouvernement sénégalais tirera les leçons de ces nombreux pays détruits par le pétrole. Je sais que les dirigeants sont conscients de cela et ils sauront prendre leurs précautions pour épargner le Sénégal des revers que peut causer le pétrole.
Quelle appréciation faites vous de la situation au Mali, avec les menaces djihadistes ?
Je pense que le terrorisme est une affaire internationale. C’est le monde entier qui est concerné, cela doit être un combat commun. Donc les grandes puissances mondiales doivent soutenir le Mali pour stopper ce phénomène. Ce pays est en difficulté aujourd’hui, et la communauté internationale doit toujours continuer à l’épauler dans cette lutte contre le terrorisme, parce que toute la région ouest africaine est menacée. Il faut aussi que l’Armée malienne soit beaucoup plus armée, qu’elle soit encouragée, et qu’il y ait moins de corruption pour que les soldats puissent accepter de sacrifier leur vie.
«IL NOUS FAUT UNE GESTION PLUS SOBRE ET VERTUEUSE DES FINANCES»
En faisant des commentaires sur le budget de l’Etat du Sénégal de l’année 2019, le professeur de droit, Abdoul Aziz Kébé, a révélé hier, lors d’un séminaire sur la justice fiscale, que plusieurs entreprises nationales sont endettées. Il annonce que les 21 sociétés publiques ont une dette qui s’élève à 361 milliards de francs CFA. Il a cité l’exemple du Port Autonome de Dakar qui traîne une dette de 20 milliards de francs CFA. Par ailleurs, l’universitaire appelle à une gestion sobre et vertueuse des finances.
Le professeur de Droit, Abdou Aziz Kébé, est également revenu sur les différentes formes de budgets adoptés par le Sénégal. Pour celui de 2019, l’agrégé en Droit soutient que nous avons un budget moyen et non celui de programme qui ne repose pas sur la transparence, encore moins sur la performance. « L’Etat ne cherche pas la performance, mais la régularité », a dit l’enseignant à la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar.Il explique que dans un budget programme, les crédits sont affectés à des finalités. Ce qui est contraire à celui classique dont les crédits sont affectés à des services. Abdou Aziz Kébé soutient qu’en 2020, quand le Sénégal va adopter un budget programme, la progression sera l’unité de spécialisation et de vote. Dans ce type de budget, M. Kébé souligne qu’il y aura une responsabilité des gestionnaires. « Tous les ministres seront des ordonnateurs de dépenses contrairement à ce qui se passe actuellement », explique le professeur. A ce changement, s’ajoutent des mutations organisationnelles aménagées. C’est le cas de la mise en place d’une Cellule d’Etude et de Planification au sein du ministère de l’Economie, des Finances et du Plan.
INFORMATIONS FINANCIERES NON EXHAUSTIVES
Pour le professeur agrégé en Droit, un budget programme appelle deux choses : la transparence et la performance. Malgré un budget moyen, le professeur Kébé informe que des bonds ont été faits en matière d’économie depuis 2012. C’est dans ce sens qu’il cite l’exemple de la transparence. Selon lui, il y a eu une augmentation du droit de regard parlementaire. « Le parlement est informé de tout le processus budgétaire. Il en est de même pour le citoyen qui est au cœur du budget, car son droit à l’information a augmenté », dit-il.
Abdou Aziz Kébé n’a pas manqué de dire que l’information financière doit être exhaustive, sauf les informations classées « secret défense ». « Elles doivent être simples pour qu’elles soient bien lues et rendues à temps réel. Il ajoute qu’il y a beaucoup de limites dans l’information financière au Sénégal. « Les déclarations de patrimoine ne sont pas publiées et tout n’est pas accessible pour les citoyens», lance-t-il. Sur l’endettement, le professeur estime qu’il est souvent provoqué par le déficit qui est inférieur aux charges. Du fait du montant de la dette qui est de 6 000 milliards de francs CFA, l’agrégé en Droit souligne que le contexte n’est pas favorable à des légèretés. « Il nous faut une gestion sobre et vertueuse des finances, comme cela se fait partout dans le monde », dit-il. Il rappelle qu’en 2009, l’Union Economique Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) avait sorti des directives afin d’adopter une autre façon de dépenser.
Dans ces dernières, l’UEMOA avait mis en place un code de transparence ainsi que la publication des déclarations de transparence. Il souligne que le Sénégal a été le premier pays à appliquer ces directives, au mois de décembre 2012.
Moins d’une semaine après sa décision de retirer l’organisation de la CAN 2019 au Cameroun, la Confédération africaine de football (Caf) a décidé de confier l’édition de 2021 au pays de Paul Biya. Et la Côte-d’Ivoire dans tout cela ?
Décidément, la Confédération africaine de football (Caf) ne sait plus sur quel pied danser. Après avoir énergiquement retiré l’organisation de la CAN 2019 au Cameroun, elle vient de prendre une décision plutôt surprenante. En effet, initialement confiée à la Côte-d’Ivoire, l’organisation de l’édition de 2021 reviendrait au Cameroun. Une information confirmée hier par le 2e vice-président de la Caf. «L’édition 2021 de la CAN aura lieu au Cameroun qui a été dessaisi la semaine dernière de l’organisation de la prochaine édition prévue en juin prochain», a fait savoir Constant Omari, sur les ondes de Radio France internationale (RFI).
LA COTE D’IVOIRE PAS PRETE ?
Pour justifier une telle décision, le dirigeant estime que le pays d’Alassane Ouattara ne pourrait pas être dans les dispositions pour terminer ses travaux à temps. «Selon les canaux d’informations à la disposition de l’instance dirigeante du football africain, la Côte d’Ivoire ne pourra pas être prête pour abriter la CAN 2021. (…). Par certains canaux, il y avait déjà des contacts officieux avec les deux pays, la Côte d’Ivoire et le Cameroun. A partir du moment où nous n’avions pas encore reçu le répondant de la Côte d’Ivoire, notre président Ahmad n’était chargé que d’annoncer la décision. La nuit même durant laquelle nous avons reçu la confirmation du Cameroun, le président a signé une lettre à l’attention du chef de l’Etat camerounais pour lui confirmer que son pays avait la CAN 2021. Vingt-quatre heures après, nous avons reçu le retour de la Côte d’Ivoire. Et le dimanche, la lettre a été adressée à la Côte d’Ivoire», a détaillé Constant Omari. Ces propos de Constant Omari ne font que confirmer la position du président Ahmad Ahmad. Dans un entretien accordé à Afrique Média TV, le Malgache avait annoncé que la Caf souhaiterait que le Cameroun récupère l’organisation de la CAN 2021 et que l’on confie celle de 2023 (déjà attribuée à la Guinée) à la Côte-d’Ivoire.
CAN 2023 : LE DOSSIER GUINEEN REEXAMINE
Alors qu’elle avait déjà savouré l’attribution de la CAN 2023, la Guinée n’est pas encore à l’abri d’un retrait. En décidant de donner l’édition de 2021 au Cameroun, la Caf a en même temps placé la Côte-d’Ivoire pour 2023. Seulement, cette place revenait déjà aux Guinéens. A en croire Constant Omari, la Confédération africaine de football (CAF) va réexaminer la désignation de la Guinée. «Nous avons demandé à notre secrétariat général de nous ressortir le dossier guinéen», a informé le Congolais sur les ondes de RFI. En y voyant plus clair, une CAN 2023 en terre guinéenne n’est plus d’actualité. Et si 2021 et 2023 reviennent respectivement au Cameroun et à la Côte d’Ivoire, la Guinée devrait espérer pour 2025.
LE CONGO CANDIDAT POUR LA CAN 2019
Alors que la Caf cherche toujours un pays pour abriter l’édition de 2019, le nombre de candidats a augmenté. Après les candidatures annoncées de l’Afrique du Sud et du Maroc, le Congo-Brazzaville a présenté son dossier. L’annonce a été faite hier par le deuxième vice président de la Caf, le Congolais Constant Omari.
La Francophonie a réussi là où beaucoup d’autres ont échoué : diviser les Africains au lieu de les rassembler, les opposer à leur diaspora, et Césaire, Damas, Nkrumah et d’autres ont dû se retourner dans leurs tombes
Ceux qui, à défaut d’inventer son nom, l’ont portée sur les fonts baptismaux, L.S.Senghor ou H.Bourguiba, rêvaient de bâtir une communauté solidaire, égalitaire et altruiste, et qui au passage contribuerait à la défense, à la consolidation et au partage de la langue de Molière. Aujourd’hui la Francophonie n’est plus un rêve, elle possède une personnalité juridique, une administration, des centaines de serviteurs patentés, souvent généreusement, un budget et des objectifs chiffrés et réalisables.
Mais en grandissant elle semble peu à peu s’écarter des chemins dessinés par ses promoteurs et aujourd’hui on peut se poser la question de savoir si ses membres africains ne font pas l’objet d’une grande duperie.
LA FRANCOPHONIE EST-ELLE TOUJOURS FRANCOPHONE ?
En prenant de l’enflure au cours des ans, la Francophonie a vu son centre de gravité se déplacer. Elle compte aujourd’hui près de 90 Etats et gouvernements membres dont les plénipotentiaires s’expriment pour une bonne part en anglais au cours de ses sommets et dans plus de la moitié de ces pays la langue française n’est enseignée ni au primaire ni au moyen. L’OIF est devenue une sorte d’ONU de pays sous influence de la France et son poids au plan international est à la mesure de celui de la langue française dans le monde, c’est-à-dire modeste. Elle compte parmi ses membres, de plein droit ou associés, des pays qui n’ont ni une histoire ni une tradition francophones et il faut avoir beaucoup de chance pour se faire comprendre, en français, dans les rues de Bangkok, de Skopje ou de Doha… à moins de tomber sur des touristes ou des expatriés. Elle a tenu son dernier sommet dans un pays qui compterait 20.001 francophones, 20.000 même depuis la mort de Charles Aznavour. Elle ne peut même plus se vanter d’avoir parmi ses objectifs celui de « promouvoir la démocratie et les droits de l’homme », elle qui était prête à accueillir dans ses rangs l’Arabie Saoudite… n’eût été le scandale Khashoggi ?
LA FRANCOPHONIE A-TELLE DES MILITANTS AU NORD ?
Le président Macron a affirmé avec justesse que « le français s’est émancipé de son lien avec la nation française », mais il a oublié d’ajouter que la France demeure malgré tout le seul dépositaire de l’état-civil de cette langue, même si aujourd’hui, en termes de population, le premier pays et la première ville francophones sont en Afrique et que dans moins d’un quart de siècle les 4/5 des francophones seront Africains. La Francophonie est financée par le Nord, mais seul le Sud semble croire en elle, se passionne pour son idéal, mobilise des foules pour accueillir ses manifestations, et cette répartition des tâches est malsaine parce que, comme le dit le proverbe, c’est celui qui paye qui commande. Alors que les chefs d’états africains ou leurs représentants s’échinent à ne jamais user d’une autre langue que le français, à cultiver un français châtié au risque de le rendre quelquefois incompréhensible à leurs peuples, les présidents français prennent des libertés avec leur langue maternelle.
Le président Sarkozy s’était fait remarquer, dans ses allocutions non écrites, par ses fautes de syntaxe, (« On se demande c’est à quoi ça leur a servi ! »), ses dérapages grammaticaux, ses libertés avec les accords et même par ses écarts de langage (comme le fameux « Casse-toi pôv con ! ») que n’oseraient point se permettre, en public, ses collègues africains francophones. Il a si souvent malmené la langue française que certains se sont demandé si les médias ne devraient pas réécrire ses discours avant de les diffuser !Quant au président Macron, il snobe le français dans des instances au sein desquelles pourtant cette langue a un statut de langue officielle, et pour se justifier, prétend que le plurilinguisme est essentiel à sa promotion .
En France même, alors qu’il existe un organisme chargé de trouver des équivalents aux mots étrangers, il a souvent recours à des expressions anglaises, comme ce fut le cas pendant sa campagne électorale déjà, et plus tard jusque devant le Collège de France où, selon Bernard Pivot, il aurait « dévalué la démocratie d’expression française» en parlant de « bottom » démocratie. De manière générale lorsqu’il s’exprime en français il use et abuse d’anglicismes (helpers, time-love, green tech, silver economy etc.) ou emploie un jargon professionnel incompréhensible au Français moyen.
LA FRANCOPHONIE EST-ELLE PANAFRICANISTE ?
Les membres africains de la Francophonie ont failli à la défense d’une communauté africaine globale à l’occasion du dernier renouvellement de sa plus haute autorité. L’argument développé par la France, qui voulait se débarrasser de Michaëlle Jean pour incompatibilité d’humeur et que les chefs d’états africains ont pris à leur compte sans état d’âme, était qu’il fallait faire place à une « africaine ». L’ancienne Secrétaire Générale est pourtant noire, elle a ses origines à Haïti, la première république noire du monde moderne. En l’opposant à une africaine d’Afrique, un peu comme en France on oppose les « souchiens » et ceux qui sont issus de l’immigration, on a trahi le cœur même des principes sur lesquels repose le panafricanisme. La Francophonie a réussi là où beaucoup d’autres ont échoué : diviser les Africains au lieu de les rassembler, les opposer à leur diaspora, et Césaire, Damas, Nkrumah et d’autres ont dû se retourner dans leurs tombes.
LA FRANCOPHONIE EST-ELLE SOLIDAIRE ?
La France n’est pas à elle seule la Francophonie, mais c’est à travers son comportement qu’on peut juger l’état d’esprit de l’institution. Des évènements récents, qui nous concernent directement, donnent à penser qu’il y a comme une faille dans son engagement pour une coopération durable et solidaire, à laquelle elle a souscrit en même temps que tous les membres de la Francophonie. Depuis un siècle, l’Université française est l’Alma mater des étudiants issus des anciennes colonies françaises d’Afrique et pendant plusieurs décennies l’université de Dakar était rattachée à l’académie de Bordeaux.
Pour des raisons qui tiennent à la fois à l’histoire (la colonisation), à la géographie (relative proximité), et tout simplement aux réalités du terrain (même système éducatif, même langue etc.), la France reste la destination privilégiée de nos chercheurs et de nos étudiants. Pourtant, il y a quelques semaines, un professeur de l’Université sénégalaise, muni d’un ordre de mission officiel, a été interpellé à son entrée en France par les services de la police, et détenu pendant plusieurs jours sans raison valable, et je n’ai pas connaissance que ses collègues français, solidairement, ou l’Agence universitaire de la Francophonie aient émis une protestation vigoureuse contre ce traitement… Il y a quelques jours, la France a annoncé une augmentation exponentielle (de 170 à 2770 euros pour la licence !) des droits de scolarité dans ses universités pour les étudiants en provenance de pays non membres de l’Union Européenne. Cette mesure, qui n’épargne pas les pays africains, n’est pas seulement une rupture du principe d’égalité d’accès au service public, elle constitue pour nos pays une rupture de contrat et même une trahison. Elle tend à n’accepter dans les établissements supérieurs français que les enfants des riches, et même des très riches à notre échelle, ou les surdoués, puisque les autorités françaises, pour la justifier, invoquent leur désir d’octroyer des bourses aux meilleurs étudiants. Dans les deux cas, c’est une mesure discriminatoire qui met en échec le principe de démocratisation de l’enseignement supérieur, et elle peut condamner les universités africaines à ne compter dans leurs facultés que les rebuts des établissements secondaires. Il y a de quoi s’inspirer de l’exemple du Rwanda qui en dix ans a basculé de la langue de Molière à celle de Shakespeare, de la langue imposée à la langue choisie, et rappeler à la France, qui a tendance à l’oublier, que le français reste pour nous une langue étrangère.