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8 juin 2025
PAPE DJIBRIL FALL, LE FICHIER PDF RELANCÉ
Redevenu député suite à la démission de Déthié Fall, il reste un électron libre dans le paysage politique, revendiquant une troisième voie qui le place dans une position ambiguë : pas assez coopératif pour l'opposition, trop critique pour la majorité
PDF. Trois lettres, une signature, un style. Pape Djibril Fall, longtemps silencieux dans le tumulte politico-médiatique sénégalais, a choisi de réapparaître à sa manière : clair, offensif, documenté. Comme un fichier resté en veille, il s’est ‘’reconnecté au système’’ par un point de presse bien calibré, renouant avec son verbe tranchant et sa posture de veilleur civique. Une sortie que ses partisans attendaient et que ses adversaires ont forcément notée.
Installé à la tête du mouvement Les serviteurs, hier, Pape Djibril Fall a tenu sa conférence dans un climat de tension politique marqué par des secousses à la fois sociales et institutionnelles. En ligne de mire : les licenciements au Port autonome de Dakar (PAD). L’ancien journaliste devenu député a brandi ce qu’il appelle des preuves irréfutables, des documents confidentiels qui viendraient contredire la version officielle défendue à l’Assemblée nationale par le Premier ministre Ousmane Sonko et le ministre des Mines Birame Souleye Diop.
Selon lui, ce sont bien 700 travailleurs qui ont été remerciés, dans des conditions opaques orchestrées par Waly Diouf Bodian, le directeur général du PAD. ‘’Certains ont été convoqués pour négocier leur départ. Ce n’est pas une décision collective, c’est un fait prémédité’’, a-t-il martelé.
En face, le pouvoir dément, minimise, temporise. Eux parlent d’optimisation des ressources humaines. Lui dénonce une manœuvre brutale, un coup porté au tissu social. Et pour appuyer ses dires, PDF agite les dossiers, les chiffres, les noms, à sa manière, presque clinique dans l’exposé, mais vibrante dans la charge émotionnelle.
Car au-delà du fond, la forme est restée intacte. Dans son éternel costume-cravate, oscillant entre wolof et français, Pape Djibril Fall alterne citations religieuses, métaphores bibliques et formules politiques, dans une rhétorique qui mêle pédagogie et ironie. Il n’a rien perdu de cette technique oratoire qui l’avait propulsé de chroniqueur télé à la figure montante de l'Assemblée nationale.
Ce point de presse, le premier depuis longtemps, a aussi été l’occasion pour lui de solder des comptes restés en suspens. D’abord, sur le traitement de la jeunesse où il a appelé à une politique du ‘’maintien au pays’’ plutôt qu'à l’exportation des cerveaux par l’immigration choisie. Ensuite, sur la presse, prenant la défense du journaliste Pierre Simon Faye, placé sous contrôle judiciaire. ‘’C’est une dérive grave. On ne peut pas criminaliser l’information’’, a-t-il soutenu, défendant la liberté d’informer comme socle de toute démocratie crédible.
Puis, dans un registre plus institutionnel, il a tiré à boulets rouges sur le Premier ministre. ‘’Il a préféré s’acharner sur l’opposition. Quand il dit que tout est aérien, c’est parce qu’il est lui-même déconnecté des réalités urgentes’’, a-t-il lancé. Un tacle assumé, alors que les relations entre l’ex-chroniqueur et le chef du gouvernement n’ont jamais été au beau fixe.
PDF a aussi interpellé de manière frontale l’Union des magistrats sénégalais (UMS), lui reprochant son silence face à ce qu’il qualifie de persécution du ministre de la Justice. Une sortie qui peut surprendre, mais qui s’inscrit dans son discours plus large : sans justice, pas de paix, répète-t-il. À ses yeux, la justice sénégalaise doit être libérée — non pas par le peuple, comme l’avait suggéré le président Diomaye Faye, mais du pouvoir Exécutif lui-même. ‘’Le peuple doit faire pression sur le président, pas sur la justice’’, insiste-t-il.
Cette conférence de presse, plus qu’un simple retour, est un acte de réappropriation politique. Depuis son élection à l’Assemblée nationale en décembre 2024, Pape Djibril Fall s’était montré discret, effacé, presque absent. On l’avait brièvement vu, écourté dans sa prise de parole au Parlement par le président El Malick Ndiaye, puis sèchement recadré par Ousmane Sonko sans droit de réplique. Ce mutisme apparent avait nourri les rumeurs : retrait stratégique ? Isolement ? Lassitude ? Lui répond aujourd’hui : hibernation volontaire, mais pas abdication.
Avec ce retour, il rebranche son canal direct avec les citoyens, contourne l’arène parlementaire pour réinvestir le terrain médiatique. Il renoue avec ce qui avait fait sa force : sa voix singulière, entre impertinence maîtrisée et gravité assumée. Il est de nouveau ce média à lui seul, comme lorsqu’il électrisait le plateau de ‘’Jakaarlo’’ sur la TFM.
Mais cette sortie soulève une question : quel est son cap politique ? Veut-il redevenir un simple éclaireur ou cherche-t-il à structurer une opposition hors système ? Ce flou est entretenu, peut-être volontairement.
Pour l’heure, il multiplie les symboles, recolle les fragments, aligne les priorités — jeunesse, justice, souveraineté — et construit un récit de vigilance, à défaut d’alternative.
PDF est de retour. Pas dans un format compressé. Mais dans un mode décryptage, prêt à relancer sa version.
PDF, le solitaire obstiné de l’hémicycle
À observer Pape Djibril Fall aujourd’hui, on pourrait croire à un retour stratégique. Mais à bien y regarder, il s’agit peut-être plus d’un rebond instinctif. Devenu député par défaut, à la suite de la démission de Déthié Fall, investi sur la même liste Samm sa Kaddu, PDF a intégré l’Assemblée nationale sans l’élan d’une campagne personnelle victorieuse. Déthié Fall, rallié en pleine campagne électorale à Pastef, avait clairement annoncé qu’il ne siégerait pas s’il était élu. Ce qui ouvrit la porte au journaliste devenu homme politique. Une entrée par la petite porte, mais que Pape Djibril s’est empressé de verrouiller pour ne pas en ressortir.
S’il bénéficiait de l’aura d’ancien chroniqueur et d’un capital de sympathie auprès d’un public jeune et urbain, son positionnement politique a toujours été ambigu. Porté un temps par une coalition électorale disparate, regroupant des figures comme Barthélemy Dias, Boucane Guèye Dany, Anta Babacar Ngom ou Cheikh Ahmed Tidiane Goum, il était le cadet du groupe, le plus médiatique sans être nécessairement le plus politique. Dès les premiers mois suivant les élections législatives de novembre 2024, cette alliance de circonstance s’est disloquée, révélant des fractures idéologiques et personnelles profondes. Et l’une des plus visibles fut celle qui l’opposa, en sourdine d’abord, puis frontalement à Bougane Guèye Dany. Leur passé commun dans le monde des médias avait déjà laissé des traces. Dans une émission restée célèbre en 2017, PDF avait pointé du doigt l’attitude jugée autoritaire de Bougane, accusé d’avoir freiné la création d’un syndicat de jeunes journalistes au sein d’un groupe de presse. Une affaire encore non résolue, mais dont l’ombre plane sur leurs relations.
Dès lors, difficile d’imaginer une cohésion durable entre eux dans un cadre politique, même sous la bannière de Samm sa Kaddu.
Anta Babacar Ngom, quant à elle, semblait initialement proche de PDF. On les a vus côte à côte sur les podiums, unis dans le combat contre l’arrestation de Bougane à Tambacounda. Mais la convergence fut éphémère. À peine quelques mois après l’élection, elle rejoint le camp des boycotteurs, refusant de siéger lors de la question orale d’Ousmane Sonko, au nom d’un acte de résistance symbolique. PDF, lui, choisit de rester. Il brave la marée des 130 députés ‘’pastefiens’, assis parmi les siens, minoritaires, sans ciller. Une posture courageuse ou isolée ? La réponse dépend du point de vue, mais elle révèle à minima un hiatus dans sa propre coalition, qui n’était peut-être qu’un attelage électoral sans projet commun.
Pape Djibril Fall a toujours revendiqué sa troisième voie, celle d’un homme libre, sans mentor, sans parrain, sans assujettissement. Une posture louable dans une démocratie balisée par les fidélités et les trahisons, mais aussi un positionnement risqué et souvent illisible. Car à trop vouloir échapper aux étiquettes, on finit par brouiller son propre message. Pendant que certains le classent dans l’opposition radicale, d’autres l’accusent de modération, voire tactique. Lui dit refuser le jeu binaire entre pro et anti-Pastef, mais semble aussi incapable de fédérer autour de lui un camp crédible. Pas assez coopératif pour l’opposition, trop critique pour la majorité.
Dans l’arène parlementaire, il n’a pas non plus su imprimer sa marque. Lors de sa prise de parole à l’hémicycle ce lundi 14 avril, il est interrompu par le président de l’Assemblée nationale, El Malick Ndiaye, sur fond de priorisation de l’ordre du jour. Le Premier ministre lui rétorque avec une froideur désarmante, ne laissant aucun espace à la réplique. La scène est révélatrice du peu d’influence qu’il pèse dans le jeu institutionnel. Sa capacité d’agacement est réelle, son pouvoir de nuisance limité.
Cette faible capacité d’alliances est l’une de ses failles les plus manifestes. Même Cheikh Ahmed Tidiane Youm, son ancien compagnon de liste, a pris le soin de se rapprocher du régime après les tensions entre le Pur et le pouvoir. PDF, lui, reste en solitaire, comme à ses débuts. Il semble avoir fait du rejet des chapelles politiques sa boussole.
Mais à l’ère des coalitions dynamiques, cette posture d’indépendance devient parfois une impasse. Elle alimente l’idée qu’il n’est qu’un acteur de témoignage, capable de coups d’éclat, mais incapable de peser sur la balance.
Et pourtant, malgré un score insignifiant aux dernières présidentielles, où il ne dépassait guère les 1 %, malgré l’absence de base territoriale solide et en dépit de ses errements stratégiques, Pape Djibril Fall s’accroche. Mieux, il continue d’exister médiatiquement, à travers ses sorties bien calibrées, ses conférences de presse et ses déclarations ciblées. Il sait choisir ses moments, ses mots, ses combats. La presse, la jeunesse, la justice : autant de thèmes consensuels qui lui permettent de se positionner sans trop de risques. Il ne mord pas, mais griffe à intervalles réguliers.
Mais combien de temps cette présence sans pouvoir tiendra-t-elle ? À trop s’appuyer sur la médiatisation pour compenser l’absence de relais politiques, on s’expose à une forme d’essoufflement. L’effet de nouveauté s’estompe. Le regard du public devient plus exigeant. Et PDF, qui n’a jamais réussi à traduire sa popularité médiatique en implantation électorale solide, pourrait se retrouver à jouer les figurants dans un théâtre où il rêvait d’être acteur principal.
En somme, le fils de Thiadiaye est un électron libre, à la fois courageux dans l’arène et isolé dans les rapports de force, brillant orateur, mais stratège fragile, symbole d’une jeunesse consciente, mais parfois victime de ses propres contradictions. Son parcours interpelle sur le sort de ces figures hybrides, nées du journalisme et aspirant à la politique, mais prisonnières d’un entre-deux : trop engagées pour rester analystes, trop seules pour devenir leaders.
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LA MÉTAMORPHOSE DE BABACAR DIOP
L'ancien leader étudiant, aujourd'hui à la tête d'une ville de 800 000 habitants à Thiès, conjugue réalisations concrètes et travail mémoriel dans une vision politique nourrie par les grandes figures de l'histoire
Dans un entretien exclusif accordé à l'émission "Belles Lignes", le Dr Babacar Diop, maire de Thiès, a présenté sa vision politique et ses réalisations à la tête de la municipalité. L'ancien leader étudiant, devenu édile de la capitale du rail, a abordé plusieurs sujets allant de sa gestion municipale à sa conception de l'histoire nationale.
"J'aspire à devenir un homme d'État", a déclaré Dr Diop, expliquant sa transformation d'activiste bouillant en maire privilégiant l'action concrète plutôt que les discours. "Un homme d'État n'est pas un activiste. Ce sont mes actions qui doivent parler à ma place aujourd'hui", a-t-il souligné.
Sous sa direction, la mairie de Thiès affiche un bilan considérable. Le budget municipal a été triplé en trois ans et plusieurs espaces publics privatisés ont été récupérés, notamment la mythique Place de France, inaugurée en 1952. "Quand je suis arrivé, j'ai trouvé que le patrimoine de Thiès avait été bradé, espolié, privatisé", a-t-il révélé.
L'éducation constitue un axe prioritaire de sa politique municipale. Le budget alloué aux bourses est passé de 7 millions à 238 millions FCFA, permettant de financer environ 1500 étudiants dans 36 établissements. "Je connais la souffrance au niveau des quartiers populaires, je connais le manque de perspective des jeunes", a expliqué ce produit de l'école publique.
Dr Diop mène également un important travail mémoriel. L'érection d'une statue de Lat Dior et le projet de construction d'une Place des Martyrs pour honorer les cheminots exécutés le 27 septembre 1938 témoignent de sa volonté de réhabiliter des figures historiques négligées. "Nous devons déterrer ces martyrs, nous devons réveiller ces martyrs, sinon l'histoire ne nous le pardonnera jamais", a-t-il affirmé.
Intellectuel nourri par la littérature et l'histoire, le maire de Thiès puise son inspiration chez des figures comme Caton d'Utique, Abraham Lincoln et Mamadou Dia. Sur ce dernier, il estime qu'"il est difficile de lutter contre un martyr" et que "dans le temps de l'histoire, Mamadou Dia va l'emporter devant Senghor".
Pour Dr Babacar Diop, la fonction de maire est empreinte de grandeur et exige "beaucoup de sincérité". "Cette ville, je l'aime d'un amour très profond", a-t-il conclu avec émotion.
YANKHOBA SEYDI REVISITE LES RACINES DU LIBÉRALISME
Dans son ouvrage « Libéralisme : une affaire de philosophie et de liberté, une histoire de libération », l'enseignant-chercheur à l’UCAD fait une véritable ode à la liberté individuelle, appelant à distinguer ce courant de pensée des dérives capitalistes.
Yankhoba Seydi enseignant-chercheur au Département Anglais de l’Université Cheikh Anta Diop, nous invite à travers son nouvel ouvrage « Libéralisme : une affaire de philosophie et de liberté, une histoire de libération » à une odyssée intellectuelle autour du concept du libéralisme avec comme socle la promotion et la défense de la liberté individuelle. Dans une démarche pédagogique, il passe en revue les différentes évolutions du concept de libéralisme.
C’est une ode à la liberté que nous propose Yankhoba Seydi à travers 254 pages de son ouvrage intitulé « Libéralisme : une affaire de philosophie et de liberté, une histoire de libération ». L’enseignant-chercheur à l’Ucad, dans un style clair et simple, nous convie à une odyssée intellectuelle qui s’est fixée pour mission de revisiter les origines historiques et philosophiques du libéralisme. A travers cet ouvrage, l’auteur nous replonge dans les profondeurs de l’âme humaine ou brille la flamme de la liberté. « L’homme est libéral par essence, car cette liberté lui permet de tirer profit de sa créativité, de son travail et de son imagination. Tout le monde est libéral que cela se sache ou pas », dit –il dans le livre.
Cette proclamation montre la couleur dès le début de l’ouvrage où M. Seydi nous indique que le libéralisme est la seule vision du monde qui offre à l’individu un contrôle sur sa destinée et un idéal de vie pour toute l’humanité. L’auteur nous renseigne aussi dans cette première partie que le libéralisme qui s’appuie sur une vision fondée sur l’individu et la coopération volontaire entre les humains, a un caractère universel transcendant les cultures et les traditions. Cette quête de liberté, déclare-t-il s’illustre à travers les révolutions du Mandé ou celle des Torodo de Thierno Souleymane Baal et Abdel Kader Kane ou bien dans le Taoïsme chinois. Sur ce rapport, le spécialiste de la civilisation britannique nous démontre à travers la première partie intitulée « le Libéralisme à la loupe de l’histoire origines d’un concept et d’un idéal de vie » les évolutions du libéralisme qui remontent depuis la Grèce antique, mais qui va réellement se conceptualiser à travers la reforme calviniste du XVIe sans oublier les travaux des grands penseurs du XVII au XIXe siècle comme John Locke considéré comme le père fondateur du libéralisme ainsi qu’Adam Smith, John Maynar Keynes, Karl Hayek.
Toujours au début du livre, l’auteur nous renseigne aussi que la pensée libérale n’est que la traduction sur le plan intellectuel, économique et politique de liberté qui sommeille en chaque être humain. Un libéralisme qui, affirme-t-il, est l’étape décisive d’une évolution de la pensée libérale. Sur le plan institutionnel, le libéralisme prend le parti de l’individu dont les droits et devoirs doivent être garantis et protégés dans une société démocratique. Cette dernière est définie dans l’ouvrage comme un ensemble de trois éléments : liberté individuelle, Etat de droit et démocratie libérale. Une notion qui, soutient-il, défend la notion de choix pour un peuple libre de ses actions et opinions s’appuyant sur la liberté d’association et une presse libre.
Dans cette odyssée vers les sources du libéralisme, Yankhoba Seydi rappelle la lutte séculaire contre le totalitarisme qui menace toujours la liberté individuelle socle du libéralisme. Un droit qui consacre la centralité de l’homme dans les institutions et dans l’organisation économique d’une société libérale.
Convergences et divergences entre capitalisme et libéralisme
Dans la deuxième partie du livre, l’auteur tente de démontrer la prééminence de la liberté individuelle dans le processus de modernisation de nos sociétés. Selon lui, le libéralisme est un principe révolutionnaire qui aura marqué l’histoire européenne marqué pendant des siècles par le règne de l’absolutisme. Ainsi, les révolutions anglaise (1688), américaine (1776) et française (1789) sont les héritières de siècles d’évolutions du libéralisme qui aura accompagné le processus de libération des peuples face à l’oppression féodale. Ainsi à travers les pages, M. Seydi détaille les différents combats du libéralisme pour l’émergence d’une société moderne. Cette modernité, souvent conjuguée avec la mondialisation et des concepts économiques (la loi du marché, le protectionnisme) peut souvent prêter à confusion en assimilant libéralisme et capitalisme.
« Le capitalisme prospère bien dans une économie construite sur le modèle libéral », argue-t-il. Toutefois, ajoute-t-il sans liberté, le capitalisme peut aussi fonctionner. En outre, malgré les convergences entre ses deux concepts, force est de constater qu’il dresse un cadre scientifique afin d’étudier les vraies différences entre libéralisme et capitalisme « Le libéralisme n’est pas le capitalisme. Il est clair que le capitalisme dans sa démarche peut entraver et souvent, l’expression de la liberté », dit-il de manière sèche tout en indiquant que certaines dérives du capitalisme comme la quête forcenée à la richesse et d’accumulation de biens ne sied pas souvent à la promotion du libéralisme.
LA SODAV ENGAGE UNE NOUVELLE PHASE DE PAIEMENT DU DROIT D’AUTEUR
La Société sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins a lancé une répartition complémentaire portant sur un montant global de 75,8 millions FCFA. Elle concerne notamment les droits numériques de la musique pour l’année 2023.
La Société sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins (SODAV) a annoncé le démarrage, vendredi, du paiement d’une répartition complémentaire portant sur un montant global de 75 836 857 francs CFA.
Cette répartition concerne principalement les droits numériques dits ”Call ring back tones” correspondant aux ”dalal tones” pour la musique de l’année 2023 avec un montant total de 35 035 796 FCFA, et les droits étrangers relatifs à la réciprocité avec la ”SACEM” [Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique en France] pour un montant de 10. 446.447 FCFA.
La SODAV va aussi partager aux artistes les droits numériques sur d’autres musiques, d’un montant de 18 692 954 FCFA.
Pour cette répartition, le secteur des arts visuels, abonnés et la Biennale 2022, en fait partie avec un montant de 11 661 660 FCFA à reverser aux artistes.
Interrogé par l’APS sur la portée de cette opération, Aly Bathily, directeur gérant de la SODAV, a invité à ”éviter toute confusion” dans cette répartition.
”Cette répartition ne doit pas sembler faible. Il s’agit d’une répartition complémentaire, qui rémunère une partie des droits numériques. Ce n’est pas le grand paiement annuel. D’autres répartitions auront lieu dans l’année”, a-t-il tenu à préciser.
Il a ajouté que la SODAV a veillé à ce que chaque ayant droit reçoive ce qui lui revient. ”Nous avons veillé à ce que les droits qui doivent revenir à ces gens-là puissent être payés. Et cela va continuer. Nous irons aussi vers la chorégraphie”, a-t-il martelé.
Pour Aly Bathily, la SODAV doit ”affirmer son rôle de société de gestion collective pluridisciplinaire et équitable”.
”Tous les bénéficiaires de droits prévus par la loi doivent être servis. L’époque où l’on pensait que la SODAV ne gérait que la musique est révolue. Nous avons le devoir de gérer tous les secteurs, et nous le ferons en parfaite conformité avec notre mission”, a-t-il assuré.
LE QUAI BRANLY RÉEXAMINE L'HÉRITAGE CONTROVERSÉ DE LA MISSION DAKAR-DJIBOUTI
Intimidation, menaces, tromperies : le butin de la mission révèle enfin ses obscures origines. Le musée parisien a confié aux chercheurs des pays concernés le soin d'enquêter sur les méthodes d'acquisition de ces milliers d'objets prélevés en Afrique
(SenePlus) - Le Musée du quai Branly-Jacques-Chirac présente depuis le 15 avril une exposition inédite consacrée à la mission Dakar-Djibouti, cette expédition scientifique française menée entre 1931 et 1933 qui a permis de rapporter quelque 3 200 objets africains dans les collections nationales.
L'originalité de cette démarche ? Le musée parisien a choisi d'inverser les perspectives en confiant l'étude de ces collections à des chercheurs originaires des pays concernés, dans ce que l'institution appelle une "contre-enquête", selon Le Monde.
La mission Dakar-Djibouti, dirigée par l'ethnologue Marcel Griaule et dont l'écrivain Michel Leiris était membre, avait pour objectif officiel de "sauvegarder les traces de cultures qui disparaissent au contact des colons et du monde moderne". Mais comme l'a révélé Leiris lui-même dans son journal "L'Afrique fantôme" (1934), les méthodes d'acquisition étaient souvent peu scrupuleuses.
"Partout où elle passe, la mission se comporte en terrain conquis", résume Didier Houénoudé, universitaire béninois ayant participé au projet. L'exposition confirme que les objets ont souvent été obtenus par intimidation ou tromperie, certains étant même des objets personnels que "les familles n'auraient en aucun cas cédés volontairement".
Pour mener cette "contre-enquête", le Quai Branly a invité six chercheurs africains à examiner les archives de l'expédition. Daouda Keita, directeur du Musée national du Mali, a ainsi pu étudier pendant deux mois les 1 650 objets provenant de son pays.
"On a voulu inverser les points de vue", explique Gaëlle Beaujean, responsable des collections Afrique au Quai Branly, rappelant que des centaines d'Africains impliqués dans les travaux de la mission ont été les grands oubliés de cette histoire, dans le quotidien français.
La démarche a également permis des enquêtes de terrain dans 30 localités sur les 340 traversées par l'expédition. Au Mali, Daouda Keita a pu rencontrer les descendants des gardiens de sanctuaire qui ont confirmé que "Marcel Griaule les a menacés. Il y a eu intimidation, et ces objets ont été pris par la force".
Cette collaboration a déjà des conséquences concrètes. Le Mali a pu formuler une demande de restitution précise grâce à l'accès aux archives. "Les objets proposés à la restitution au Mali dans le rapport Sarr-Savoy ne nous convenaient pas. Nous savions qu'il y en avait beaucoup d'autres, plus importants. Mais nous n'avions pas les informations ni les preuves", précise Daouda Keita.
Le conservateur malien espère que cette coopération "franche et ouverte" avec le Quai Branly servira de modèle pour d'autres musées occidentaux.
L'exposition "Mission Dakar-Djibouti (1931-1933) : contre-enquêtes" est visible au Musée du quai Branly jusqu'au 14 septembre 2025.
par Ibrahima Silla
SOLEILS INVINCIBLES, UN ROMAN DE JOUVENCE
La lecture de cette œuvre envoûtante de Cheikh Ahmadou Bamba Ndiaye nous entraîne dans une expédition qui, à peine entreprise, devient une sorte de centre de rétention dont il est impossible de s’échapper
Parler d’un roman, c’est d’une certaine manière le réécrire. Y rajouter ses propres mots sans en trahir le sens en s’obstinant à vouloir faire coïncider l’inspiration de l’auteur avec l’imagination du lecteur. Voilà ce que la lecture de ce beau et captivant roman de Cheikh Ahmadou Bamba Ndiaye, Soleils invincibles, m’a inspiré comme réflexions traduites ici en périphrases.
Toute lecture est une réécriture. Lire et laisser libre cours à l’imagination sans pervertir l’histoire au moment de la recension. Lire sans trahir. Le lecteur peut dès lors prendre une voie secondaire pour mieux suivre la trame de l’histoire narrée par l’auteur. Nul besoin donc de partir de la même inspiration pour arriver aux mêmes émotions, surtout quand on a affaire à une grande et savoureuse œuvre romanesque, telle celle produite par Cheikh Ahmadou Bamba Ndiaye.
La réussite d’un roman se mesure par l’intensité des sentiments éprouvés. Un roman, pourrait-on dire, est réussi quand l’auteur arrive à nous faire ressentir des degrés de sentiments diffus, sans qu’on ait besoin de les vivre ou d’en faire personnellement l’expérience.
On ne sort jamais indemne de la lecture d’un roman. Celui-ci fait partie de ce que je qualifierai de « roman de jouvence ». Il a été ma cure ces dernières semaines.
Sous l’éblouissement des rayons du soleil illuminant nos imaginaires, ligne après ligne, mot après mot, émotion après émotion, la lecture de cette œuvre envoûtante de Cheikh Ahmadou Bamba Ndiaye nous entraîne dans une expédition qui, à peine entreprise, devient une sorte de centre de rétention dont il est impossible de s’échapper. La lecture de ce roman nous propulse dans des imaginaires de contrées proches et lointaines, partie intégrante de nos quotidiens culturels et existentiels.
Soleils invincibles est un roman à charge pour diverses raisons que le lecteur découvrira au fil des pages. Ce roman est aussi un voyage. Une escapade touristique, devrais-je dire, qui nous invite à lire entre les lignes et entre les signes. On y découvre comment la nouvelle ruée vers « l’eldorado occidental » piège chacun dans l’étau de l’autre, agrippé à ses préjugés.
Lire Soleils invincibles m’a permis de découvrir ce que la claustrophobie identitaire doit à l’intolérance de la présence de l’autre, source de toutes les formes d’extrémismes. On y découvre notamment ce que l’on détruit en voulant construire ; ce que l’on perd en partant et ce que l’on gagne en revenant de ces contrées lointaines, fontaines d’imaginaires dégoulinant notamment dans l’esprit de nombreux jeunes migrants ou étudiants aimantés par l’Occident. Le risque derrière la volonté. L’horreur dans l’espoir. Le rêve d’un monde nouveau qui se heurte à la résurrection des vestiges d’un monde ancien, avec ses immondices de désillusions et déceptions que la magie des voyages et de la proximité n’a pas fait disparaître. À vouloir un « autre ici », l’on s’expose à sombrer dans un « même ailleurs », avec, à la clé, une vie en dents de scie faite de blessures à panser et à repenser à perpétuité.
J’y découvre en substance, à quel point la phobie de l’autre conduit toujours à la claustrophobie identitaire difficile à refouler. Ce qui suffit amplement à entraîner l’esprit dans un corps-à-corps entre le révoltant et le réconfortant. Sans le moindre préavis devant l’horreur, il cherche à faire vivre l’horreur aux récalcitrants asphyxiés par la déportation de l’espoir vers des terres promises encore et toujours compromises par leur désir de vivre dans une bulle.
Pour de nombreux jeunes d’ici, réussir consiste à voyager pour ne pas finir sur le pavé des origines qui maintiennent les rêves d’ailleurs en résidence surveillée. Être présent dans des lieux propices à l’éclosion des ambitions. Perdre le contact avec les siens. Nouer de nouveaux liens à partir des géométries de l’imaginaire cherchant à se juxtaposer à la géographie des nouveaux eldorados, où l’ambition vient déposer ses valises et bien souvent ses illusions. Abandonner par lâcheté ou par nécessité parents, pays, travail, convictions, repères, etc. pour aller vivre ailleurs, loin des siens et de tous ces « trop de riens » caractéristiques de son monde fui, malgré ses beautés endormies et ses richesses ensevelies qui ne permettent pas de mettre la main sur le bonheur toujours fuyant et furtif.
Véritable machine à broyer des destins rêvés, planifiés, caressés, le voyage devient une morsure envoûteuse et venimeuse qui laisse des traces inhospitalières sur les présences corporelles, culturelles ou autres. Sortir du néant pour trouver une place au soleil délocalisé. Soleils invincibles en dépit des récurrentes attaques historiques, culturelles et existentielles. Soleils résilients face à la brutalité des errances et remontrances venant et partant d’ici, tels les braquages affectifs tendus au nom du brassage parental ou de la géopolitique des tracasseries, conventions et convenances familiales, oscillant entre finesse diplomatique et réalisme sentimental. Éloges et blâmes. Tensions et réconciliations. Pertes et gains. Gré et regrets. Fantaisies et caprices.
Lire Soleils invincibles permet de voir et de savoir, en regardant ces terres promises et compromises qu’il ne suffit pas de les chérir pour espérer les conquérir. L’ambition devient transgression. L’impression une conviction. L’expression une forme d’agression, l’identité une réputation qui n’inspire ni le respect, ni la compassion ou l’empathie. Ces « gens-là » semblaient venir d’une autre galaxie, même si on les voyait partout ; qu’on applaudissait leurs semblables quand ils battaient des records sportifs ou se faisaient distinguer dans des performances sportives ou musicales. La présence acceptée suffit largement comme présent à apprécier. Le flux des plus belles rencontres peut à tout instant virer aux plus moches séparations.
Eldorado. De rocades en bivouacs et de bastonnades en couacs administratifs, à partir d’une conception de la vie, moins en termes de carrière ou de projet, que d’opportunités offertes par un nomadisme souvent fait, au besoin, d’improvisations, mais toujours guetté par l’imprévisible qui frappe à l’improviste. L’arbitraire punit au hasard, frappant sans discrimination pour mieux discriminer en toute discrétion, avec la complicité d’une force censée émaner du droit et de la justice pour faire régner l’ordre, mais qui ne s’encombre pas des bonnes mœurs, pourtant plus importantes que toutes les lois.
Loin de soi. Loin de la loi. On finit par se rendre compte que la présence non autorisée est la première défiance à la loi. Ne point s’interdire de faire des choses que la loi interdit tout comme celui qui se sait, en dépit de toutes les considérations éthiques, qu’il est le premier à violer la loi en devenant un clandestin. Je devrais dire « présence à caractère clandestin ». La nuance est de taille.
Parti en quête de sécurité, se retrouver dans un « dilemme de sécurité » face à la « gangstérisation de l’identité ». Se retrouver en danger devant des fauves et des êtres d’armes en uniformes, sans état d’âme ni pitié de l’être devant les identités qu’ils ne considèrent pas comme partie intégrante de l’humanité pour mériter liberté, égalité et fraternité. Inaptes à s’ajuster à la cosmopolite contemporaine. Prêts à vous intoxiquer l’existence pour vous inciter à renoncer à nourrir une quelconque ambition de recommencer votre vie en dehors de votre lieu de naissance et d’assignation à résidence ; de ne tenter aucune pirouette en prenant la direction corrompue du bon vent indiquée par la girouette de l’imaginaire occidental, terre d’abondance, de style de vie idéal, de prospérité inépuisable ou d’hospitalité pour les réfugiés aux motivations diverses et variées, mais toujours légitimes parce que justifiées, même étant illégales.
Le juste n’est pas toujours légal. Le légal n’est pas toujours juste. L’équilibre se perd. Les équilibristes s’y retrouvent et en abusent, tel le lecteur qui ne se contente pas juste de lire ; mais qui réécrit au risque de trahir. Que l’imagination nous en garde.
Ibrahima Silla est enseignant-chercheur en science politique à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis.
L’ÉCONOMIE SÉNÉGALAISE N’EST PAS À L’ABRI DES RÉPERCUSSIONS DE LA SURTAXE DOUANIÈRE AMÉRICAINE
Des experts s’inquiètent des répercussions possibles sur les exportations, les importations et les investissements, en particulier si l’AGOA venait à être suspendue ou renégociée.
Les droits de douane additionnels fixés par Donald Trump, dans la guerre commerciale menée par les États-Unis contre la Chine notamment, peuvent avoir des répercussions sur le commerce international et affecter d’autres pays n’étant pas visés par le président américain, y compris le Sénégal, selon des experts interrogés par l’APS.
M. Trump a annoncé une hausse des droits de douane sur plusieurs produits importés par les États-Unis, dont le pétrole, le gaz et l’or.
“Pour l’économie sénégalaise, l’annonce de cette surtaxe américaine soulève des inquiétudes, car elle peut créer une menace sur les exportations sénégalaises et entraîner des effets en cascade sur l’économie du pays”, prévient Souleymane Keïta, un enseignant-chercheur de la faculté des sciences économiques et de gestion (FASEG) de l’université Cheikh-Anta-Diop (UCAD) de Dakar.
De l’avis de M. Keïta, cette mesure commerciale du président des États-Unis d’Amérique peut avoir un “impact direct” et devenir une “menace” sur les exportations du Sénégal, dans la mesure où le pays de Donald Trump est un partenaire commercial “important” de l’économie sénégalaise, un partenariat acté par l’AGOA, la Loi sur la croissance et les possibilités en Afrique.
Son collègue Malick Sané, professeur titulaire des universités et enseignant à la FASEG de l’UCAD, déclare que les droits de douane additionnels américains vont “forcément impacter” les prix des produits d’exportation du Sénégal et leur faire “perdre un peu de leur compétitivité”.
“Toutefois, s’il s’agit d’un droit de douane plancher, cela signifie que tous les pays seront au même niveau. Et dans ce cas, il n’y a aura pas tellement d’impact sur la compétitivité de notre économie”, analyse M. Sané.
La surtaxe américaine va entraîner une hausse des coûts des importations du Sénégal, selon Souleymane Keïta.
“Risque de ralentissement des investissements venant des États-Unis”
Certaines entreprises sénégalaises importent divers produits américains, qui vont des médicaments aux équipements technologiques, ce qui peut affecter les industries locales, signale-t-il.
En plus, “on risque d’assister à un ralentissement des investissements venant des États-Unis, et les entreprises américaines pourraient réduire les financements destinés à des projets mis en œuvre au Sénégal, si le commerce mondial se dégrade”, poursuit M. Keïta.
Malick Sané fait observer que les conséquences de la guerre commerciale ne peuvent pas être de la même ampleur pour tous les pays, d’autant plus que les produits commercialisés entre les États-Unis et le reste du monde varient d’un pays à un autre. “Ce ne sont pas les mêmes produits. À mon avis, les États-Unis ne peuvent pas prendre des mesures autant nuisibles pour nous que pour la Chine et l’Europe”, soutient M. Sané.
La guerre commerciale menée par le président américain devrait entraîner des droits de douane de 145 % pour la Chine, de 20 % pour l’Union européenne, de 24 % pour le Japon, de 25 % pour la Corée du Sud et de 26 % pour l’Inde, de 46 % pour le Vietnam et de 49 % pour le Cambodge.
Certains pays, dont le Sénégal, “ne sont pas une menace” pour les entreprises américaines, signale Malick Sané, estimant que le fait qu’ils exportent des produits non transformés rend “l’impact” de la mesure commerciale et douanière américaine “très faible” pour eux.
Souleymane Keïta semble partager cette remarque. Le “risque majeur” de la surtaxe annoncée par Donald Trump pourrait se limiter à une “perturbation” du commerce des États-Unis d’Amérique avec certains pays ou certaines régions du monde, dit-il en citant la Chine et l’Union européenne.
Mais M. Keïta évoque un scénario pire que celui-là : “Le commerce mondial peut être perturbé. Dans ce cas, les dommages seraient, pour le Sénégal, une hausse des prix des produits importés, dont le blé et les machines.”
Le professeur Malick Sané relève une incohérence de la surtaxe américaine avec l’AGOA, dont bénéficient certains pays.
Reste à savoir si l’AGOA va être maintenue ou pas
“Le Sénégal bénéficie de l’AGOA, qui lui permet d’exporter une gamme assez large de produits vers le marché américain sans payer des droits de douane. En principe, les pays éligibles à l’AGOA ne devraient pas être concernés par [la guerre commerciale menée par les États-Unis]. S’ils sont concernés, cela voudra dire que les États-Unis ont totalement remis en question l’AGOA”, analyse M. Sané.
Il rappelle que cet accord commercial renouvelé tous les cinq ans va prendre fin en septembre prochain. L’AGOA est une loi commerciale américaine visant à accroître l’accès des pays d’Afrique subsaharienne au marché des États-Unis d’Amérique.
“Si l’AGOA est maintenu, nous assisterons à un faible impact de la surtaxe douanière américaine sur les pays bénéficiaires, car ils vont continuer à bénéficier des facilités offertes par les États-Unis”, affirme Souleymane Keïta.
L’imprévisibilité du président américain pousse M. Keïta à envisager “plusieurs hypothèses”, concernant l’avenir des relations commerciales des États-Unis d’Amérique avec le reste du monde, le Sénégal inclus. Cette attitude lui fait dire que “si le Sénégal est partiellement exclu de l’AGOA, cela va entraîner un effondrement des exportations de produits textiles, la perte de milliers d’emplois [au Sénégal] et la réduction des recettes d’exportation”.
“Il reste à savoir si Donald Trump va mettre un terme à l’AGOA ou la reconduire”, dit Malick Sané en faisant remarquer que “notre pays peut exporter des produits aux États-Unis, jusqu’à preuve du contraire, sans payer des droits de douane sur la gamme très large de produits pris en compte par l’AGOA”.
Donald Trump estime que son pays a été pendant longtemps “pillé” et “spolié” par d’autres, alliés ou rivaux, ce qui l’a conduit à mener cette guerre commerciale, qui, de l’avis de Souleymane Keïta, devrait pousser les pays africains à “diversifier agressivement” leurs relations commerciales et à explorer de “nouvelles opportunités”.
L’Afrique devrait profiter des tensions entre les États-Unis d’Amérique et d’autres puissances économiques pour renforcer ses échanges avec l’Union européenne ou l’Inde, par exemple, dans le cadre d’accords de libre-échange, selon M. Keïta.
La guerre commerciale pourrait pousser la Chine, un partenaire commercial important de l’Afrique, à réduire ses financements destinés aux infrastructures des pays africains, poursuit-il.
Début avril, Donald Trump a annoncé une suspension de la surtaxe douanière pour certains ouverts à la négociation, dont ceux de l’Union européenne, pour une durée de quatre-vingt-dix jours. Il continue de menacer d’une surtaxe douanière certaines puissances économiques, dont la Chine.
PAR HABIB DEMBA FALL
DE RADIO KANKAN À "TOP CAS", LE DEGRÉ ZÉRO DU DÉBAT PUBLIC
Il y a quelques mois, nombre de Sénégalais se sont enthousiasmés pour le débat entretenu par les éminents intellectuels Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne. L’intérêt d’un tel exercice se trouvait dans le débat d’idées.
Il y a quelques mois, nombre de Sénégalais se sont enthousiasmés pour le débat entretenu par les éminents intellectuels Boubacar Boris Diop et Souleymane Bachir Diagne. L’intérêt d’un tel exercice se trouvait dans le débat d’idées. Des échanges d’une rare élégance autour des idées de Cheikh Anta Diop, particulièrement la question linguistique dans le panafricanisme.
À ce salon de l’excellence, se sont invités des observateurs avertis pour un ticket à zéro franc et pour le plaisir d’assister à un débat civilisé entre deux sommités de notre champ intellectuel. Il y a quelques semaines, une polémique a eu cours autour des conditions d’attribution du Grand Prix du Président de la République pour les Lettres, édition 2017. Amadou Lamine Sall, poète, Ibrahima Lô, directeur du Livre et de la Lecture et le Pr Alioune Diané de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar ont installé, le temps d’échanges de correspondances publiques, les limites d’un débat littéraire. Cela a eu un effet d’entraînement sur quelques jeunes auteurs pour aboutir, au-delà du prix littéraire, à un diagnostic de l’environnement du livre au Sénégal. Ce pays a également connu les échanges épistolaires, dans les colonnes de Wal Fadjri Quotidien, dans les années 1990, entre le défunt Mamadou Dia et le Président Abdoulaye Wade, alors opposant.
L’une des joutes intellectuelles portait sur la bonne expression : « Remonter à la nuit des temps » ou « remonter dans la nuit des temps ». Les différents usages ont été revisités, les univers syntaxiques explorés. Les deux protagonistes ont fait montre d’une grande culture. Plus que le contenu, c’est le sens du dialogue constructif qu’il faut célébrer. Le fait est devenu si rare qu’il mérite d’être souligné. Les échanges sont devenus des corps-à-corps, convoquant des invectives plutôt qu’un argumentaire-choc. La vérité partielle, voire très partiale, est délivrée en fonction de la logique de camp. Simpliste, la grille d’analyse : pour ou contre. Cette dérive est calquée sur la doctrine des thuriféraires de cette maladie infantile de la démocratie qu’est le partisanisme. La fameuse phrase de Voltaire reste sans objet : « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ».
Ce principe fondamental de la liberté d’expression fait de celle-ci un rêve pluriel qu’aucune autre légitimité ne peut confisquer pour son propre confort. Notre quotidien, hélas, nous offre un espace de « débat » dans lequel opèrent des nervis d’un genre nouveau. Ils ne sont pas armés de gourdins ou de machettes. Ils ne sont pas bodybuildés, prêts à imposer leur masse à un agresseur. Rien de tout cela ! Ces nervis de la pensée nourrissent leurs mots de protéines de l’extravagance et de l’insolence. Ils cherchent leur vérité dans les caniveaux, faisant honneur à une nouvelle doctrine de l’espace démocratique : le débat, c’est à qui couvre le mieux son vis-à-vis de mots-ordures et d’expressions-venins. À côté des milices privées fort décriées sont nées des milices de la pensée. Armées d’insanités jusqu’aux dents, les faux veilleurs de la démocratie investissement les colonnes des pages « Contributions » des journaux et les forums de discussions des médias électroniques pour déchirer le manteau d’honorabilité d’honnêtes citoyens. Gare à ceux-là qui ont des choses à se reprocher ! Gare à ceux qui n’ont rien à se reprocher ! Les procureurs anonymes de ces tribunaux de la rue publique donnent le verdict sans appel de la mise à mort sociale.
L’espace numérique est souvent le tombeau de la dignité de beaucoup de personnes n’ayant que leurs larmes pour noyer leur peine. Dans cette fausse agora démocratique, la vérité n’est plus multicolore ; elle est unicolore. Ce délitement du débat public interroge la (bonne) conscience de la société. Au-delà du débat journalistes-chroniqueurs-influenceurs, il existe bien des mutations sociétales qui provoquent la réinitialisation du logiciel de notre capacité d’indignation face aux attentats à la dignité d’autrui. En vérité, il y a bien une demande ! « Radio Kankan », medium « rumorivore » du siècle dernier, apparaît, aujourd’hui, comme une caisse vide et ringarde face à la fabrique de rumeurs qui est le « Top Cas ».
Exit la mégère qui visitait les demeures en milieu de matinée, semant la zizanie dans les ménages. Place à la jeune dame et au monsieur hyperconnectés qui collectent les ragots du jour et les diffusent en très haute définition. Place à ce petit instrument de la modernité qu’est le téléphone. Il permet d’accéder aux salons des braves gens et d’en ressortir avec une bonne moisson sans prendre le risque de se faire remonter les bretelles par le maître de maison, celui-là déterminé à préserver la cohésion familiale. Nous sommes loin des interpellations cordiales sur l’héritage de Cheikh Anta Diop : « Bachir, tu permets ? » et « Je vous en prie » Boris. Les deux lumières de notre espace public mettent le monde d’accord. Boris a reçu le Prix international de Littérature Neustadt et Bachir a été célébré par l’Université de Columbia de New York lors d’une conférence internationale en son honneur. Cheikh Anta Diop serait sans doute fier de ces deux-là !
PAR AMADOU BA
QUAND DES LEADERS DE L’OPPOSITION APPELLENT À VIOLER LA CONSTITUTION
Au lieu d’appuyer le pouvoir judiciaire qui essaie d’assainir l’espace politique et médiatique transformé en foire à insultes et machine à cabales par des sycophantes qui se donnent au plus offrant, certains leaders adoubent et encensent ces paltoquets.
Inadmissible et inexplicable, que des leaders de l’opposition en arrivent à parler de dictature, dans leur soutien à des individus payés pour distiller moultes insanités à longueur de temps d’antenne.
Au lieu d’appuyer le pouvoir judiciaire qui essaie d’assainir l’espace politique et médiatique transformé en foire à insultes et machine à cabales par des sycophantes qui se donnent au plus offrant, certains leaders adoubent et encensent ces paltoquets rustres, grossiers et vulgaires.
Ce faisant, ils violent la constitution, qui, bien que garantissant la liberté d’opinion, en pose des limites.
En effet si L’art 10 dispose :
« Chacun a le droit d’exprimer et de diffuser librement ses opinions par la parole, la plume, l’image » la marche pacifique », le peuple sénégalais, seul constituant a rajouté: « pourvu que l’exercice de ces droits ne porte atteinte ni à l’honneur et à la considération d’autrui, ni à l’ordre public ».
Que ces leaders assument donc d’être les soutiens des discours qui portent atteinte « à l’honneur, à la considération d’autrui et à l’ordre public », s’ils ne sont eux-mêmes les véritables donneurs d’ordre.
L’espace politique doit être le lieu privilégié du débat d’idées et des confrontations idéologiques, mais dans les limites de la bienséance et la courtoisie républicaine.
Condamner les insultes et les atteintes à l’honneur, ou assumer que les insulteurs publics sont des vôtres, et que vous seriez honorés d’avoir des fils et filles comme eux.
L’ANCIEN DAGE DU MINISTÈRE DE LA SANTÉ CONSIGNE PLUS DE 440 MILLIONS POUR ÉVITER LA DÉTENTION
Inculpé dans le cadre de l’affaire sur la gestion des Fonds Covid-19, Ousseynou Ngom a versé 220 millions de francs CFA en espèces et proposé un immeuble en garantie pour couvrir le montant présumé détourné.
Dans le cadre des enquêtes sur la gestion des Fonds Covid-19, un nouveau nom s’ajoute à la liste des personnes impliquées. Il s’agit d’Ousseynou Ngom, actuel Directeur de l’Administration générale et de l’équipement (DAGE) au ministère de la Santé. Il est accusé d’avoir détourné des deniers publics pour un montant évalué à 353,7 millions de francs CFA.
Face à la justice, Ousseynou Ngom a rejeté les accusations, affirmant ne pas avoir détourné cet argent. Malgré cela, il a fait savoir qu’il était prêt à verser la totalité de la somme mise en cause. Il a ainsi consigné une première partie, soit 220 millions de francs CFA en espèces.
Pour couvrir le reste, il a proposé en garantie un immeuble à étage (R+2) d’une superficie de 204 m², situé dans le quartier de Ouakam à Dakar. Ce bien a été estimé à plus de 224 millions de francs CFA.
Ces démarches ont été jugées suffisantes par le Doyen des juges d’instruction. Après l’ouverture d’une information judiciaire, le magistrat a ordonné la mise en liberté provisoire d’Ousseynou Ngom. Il reste toutefois sous contrôle judiciaire, ce qui signifie qu’il devra se conformer à certaines obligations décidées par le juge, en attendant la suite de la procédure.