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7 juin 2025
LA FIN DES PERRUQUES CHEZ MISS CÔTE D'IVOIRE
En Côte d'Ivoire, le comité du célèbre concours de beauté bouleverse les normes en interdisant perruques et extensions capillaires. Une décision sans précédent dans un pays où ces pratiques sont culturellement ancrées
(SenePlus) - Dans un virage aussi audacieux qu'inattendu, le comité national de Miss Côte d'Ivoire a pris une décision révolutionnaire pour son édition 2025 : interdire aux candidates le port de perruques et d'extensions capillaires. Cette mesure, que le journal Le Parisien qualifie de "séisme dans le monde des concours de beauté en Côte d'Ivoire", marque un tournant dans un pays où ces artifices sont considérés comme une norme sociale.
Selon la BBC citée par Le Parisien ce lundi 7 avril, cette nouvelle règle rompt avec une tradition bien établie. Sur les 28 reines de beauté couronnées lors des précédentes éditions, seules deux avaient osé se présenter avec leurs cheveux naturels, dont Marlène Kany Kouassi, élue en 2022. Sa victoire avait d'ailleurs suscité de vives réactions à l'époque.
Victor Yapobi, président du comité Miss Côte d'Ivoire, défend fermement cette position : "Elles peuvent venir nattées, elles peuvent venir avec les cheveux courts, si elles n'ont pas de cheveux, elles peuvent venir rasées", avait-il déclaré en février à RFI, selon Le Parisien. Il a réitéré sa vision auprès de la BBC en marge d'une sélection locale : "La beauté doit être naturelle."
Cette démarche s'inscrit dans une politique plus large du comité qui lutte également contre la chirurgie esthétique et l'utilisation de crèmes éclaircissantes pour la peau. Elle représente une volonté affirmée de promouvoir l'authenticité et la diversité des standards de beauté.
Le ban sur les artifices capillaires s'applique désormais à l'ensemble des élections régionales qui se déroulent ce printemps dans 13 villes ivoiriennes, avant la grande finale prévue le 28 juin à Abidjan. Mais ce n'est pas la seule nouveauté du concours 2025, rapporte Le Parisien.
Le comité a également élargi la tranche d'âge des participantes, désormais fixée de 18 à 28 ans (contre 25 ans auparavant), tout en maintenant une taille minimale de 1,67 m. Autre changement notable : les frais d'inscription ont été réduits, passant de 75 à 45 euros. "Nous avons constaté que ces jeunes femmes dépensaient beaucoup d'argent pour participer et que cela commençait à peser sur leur budget", explique Victor Yapobi.
Cette initiative, première du genre dans la région selon Le Parisien, n'a pas encore été suivie par les pays voisins. Elle a néanmoins suscité de nombreuses réactions depuis son annonce en février.
Parmi les candidates, certaines accueillent ce changement avec enthousiasme. C'est le cas de Laetitia Mouroufie, qui tente sa chance pour la deuxième fois : "L'an dernier, je portais des extensions, parce que je pensais que c'est ce qu'il fallait avoir pour être belle. Cette année, j'ai davantage confiance en moi", confie cette jeune femme de 25 ans.
Le journal conclut que cette décision représente "un premier pas vers une acceptation de plus en plus grande du cheveu naturel dans la société ivoirienne", suggérant que l'impact de cette mesure pourrait dépasser le cadre du concours pour influencer les normes de beauté dans l'ensemble du pays.
par Seydou Ka
SOULEYMANE BACHIR DIAGNE, UN SAGE HUMANISTE
Son grand mérite, c’est d’avoir « réconcilié » l’Islam avec la philosophie, d’avoir montré que foi et raison ne s’opposent pas, d’avoir rendu la philosophie accueillante pour la démarche spirituelle
L’Université Columbia de New York a célébré le Pr Souleymane Bachir Diagne lors d’une conférence internationale en son honneur, du 3 au 5 avril 2025. Cet événement, faisant suite à l’hommage que lui avait rendu l’Université Cheikh Anta Diop en décembre 2017, marque le couronnement d’une carrière universitaire exceptionnelle.
Après près d’un demi-siècle consacré à l’enseignement, le philosophe sénégalais prend donc sa retraite de l’université. Mais cela ne veut pas dire qu’il arrêtera toute production intellectuelle. « Ce qui va changer, me confiait-il lors de notre dernier entretien en octobre 2024 à Dakar, c’est que je n’aurai plus un emploi du temps et des enseignements réguliers à donner et des copies à corriger, (mais) je vais continuer à être présent dans ces lieux qui ont été des lieux de ma production intellectuelle et je passerai plus de temps à Dakar ».
En effet, durant sa longue carrière universitaire, le Pr Diagne a été un pont entre ces trois continents (l’Afrique, l’Europe et l’Amérique), mais aussi entre les religions et les cultures. Son œuvre est une réflexion à la croisée des disciplines et des mondes, incarnant une forme de pensée transculturelle qui traverserait les continents comme les époques en ne cessant de les mettre en dialogue. Ce n’est sans doute pas un hasard si le concept de traduction est au cœur de son impressionnante œuvre. Il a largement contribué à réhabiliter la contribution de l’Afrique et du monde musulman dans l’histoire de la philosophie. Contre ceux qui en Occident ont voulu effectuer un « nettoyage ethnique » de l’histoire de la philosophie pour éliminer l’apport des musulmans dans la « translatio stodiorum » – la transmission de la philosophie grecque à l’époque moderne – pour en faire une histoire « proprement européenne », Diagne rétablit la vérité, en montrant que loin d’être linéaire (d’Athènes, à Paris et Berlin), cette histoire fait des détours à Bagdad et Cordoue.
Ainsi, son grand mérite, c’est d’avoir « réconcilié » l’Islam avec la philosophie, d’avoir montré que foi et raison ne s’opposent pas, d’avoir rendu la philosophie accueillante pour la démarche spirituelle. En démontrant que le pluralisme est « le meilleur signe du rôle de la raison dans la religion », il a su surmonter le piège d’une raison exclusiviste et hégémonique. Comme on l’a vu dans l’histoire de l’Islam lorsque le calife abbasside Al-Ma’mun avait voulu imposer le mutazilisme à l’ensemble de la communauté. Ce qui, historiquement, a entraîné une méfiance profonde vis-à-vis du rationalisme (la philosophie) dans le monde musulman. Diagne cultive le juste milieu qui consiste à reconnaître le rôle primordial joué par la raison dans la religion islamique, et en même temps éviter le littéralisme qui nous entraîne dans l’anthropomorphisme.
Dans son ouvrage intitulé « L’islam rationnel de Souleymane Bachir Diagne » (Riveneuve, 2023, 220 pages), le philosophe guinéen Alioune Bah a montré comment le philosophe sénégalais a contribué à la « reconstruction de la pensée religieuse de l’Islam ». D’ailleurs, Diagne aime répéter que « l’Islam est une religion de la raison ». Dans un contexte de montée en puissance de l’islamophobie, de nombreux intellectuels musulmans vivant en Occident fuient le débat, un évitement qui ne fait qu’alimenter le soupçon et les invectives contre les musulmans. Lui, n’a jamais esquivé la question.
Il n’a pas peur de confronter ses idées avec d’autres intellectuels ouvertement islamophobes (Jean-Loup Amselle, Rémi Brague) pour déconstruire l’islamophobie, y compris sous sa forme dite « savante ». Mais plus que son érudition et la finesse de sa pensée, c’est l’humanisme de Souleymane Bachir Diagne qui m’a particulièrement impressionné depuis dix-sept ans que je le fréquente. Son amie Barbara Cassin a raison de le qualifier de sage. Dans un monde marqué par le retour de la haine, la brutalité et le repli identitaire, nous avons plus que jamais besoin des lumières de ce savant véritablement humaniste.
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LES UNES DE LA PRESSE DE CE MARDI 8 AVRIL 2025
Sud Quotidien, Walf Quotidien, Yoor-Yoor Bi, L'Observateur, Libération, Le Quotidien, Enquête, Vox Populi, Le Verdict News, L'As, Record, Le Soleil, Le Témoin Quotidien, WiwSport
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DÉCARBONATION DU TRANSPORT MARITIME, L’AFRIQUE APPELLE À UNE TRANSITION ÉQUITABLE
Responsable de 3 % des émissions mondiales de GES, le transport maritime vise la neutralité carbone d’ici 2050. L’OMI envisage une taxe carbone universelle, dont les modalités seront discutées du 7 au 11 avril à Londres.
Le secteur du transport maritime, responsable de 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), s’est engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Pour accompagner cet objectif, l’Organisation maritime internationale (OMI) étudie l’instauration d’une taxe carbone universelle, dont les modalités seront discutées du 7 au 11 avril à Londres, avec une adoption prévue en octobre 2025. Si elle était fixée à 100 dollars par tonne, cette taxe pourrait générer près de 60 milliards de dollars par an, selon la Banque mondiale.
Mais cette transition suscite de nombreuses interrogations, notamment de la part des pays en développement. L’Afrique, en particulier, s’inquiète de l’impact d’une telle taxe sur ses économies, son commerce et sa sécurité alimentaire. Plusieurs études, dont l’analyse d’impact globale de l’OMI, soulignent que les pays les plus vulnérables pourraient subir des effets négatifs si les mesures proposées ne sont pas accompagnées de mécanismes d’équité.
Une opportunité à condition d’être équitable
Pourtant, cette transition est aussi perçue comme une chance de transformation. L’Afrique possède d’immenses ressources pour produire des carburants propres, comme l’hydrogène vert, et jouer un rôle stratégique dans la décarbonation mondiale. Mais pour que cette opportunité se concrétise, les pays africains réclament des garanties : une redistribution équitable et transparente des revenus de la taxe, basée sur les besoins sociaux, climatiques et économiques ; des financements sous forme de subventions et non de prêts ; et des exemptions temporaires pour protéger leurs exportations et leur sécurité alimentaire.
Des voix africaines fortes
Plusieurs responsables africains ont exprimé leurs attentes à l’approche de la réunion cruciale de l’OMI.
« La décarbonisation du transport maritime n’est pas une option, mais un impératif », a affirmé Amb Ali Mohamed, envoyé spécial du Kenya pour le climat. « Mais elle ne doit pas se faire au détriment des économies africaines. Les fonds collectés doivent être redistribués sous forme de financements pour l’adaptation et la résilience. »
Pour Faten Aggad, directrice exécutive du Centre africain des politiques d’avenir, il est essentiel que « le principe du pollueur-payeur reste au cœur des discussions », avec des capitaux non porteurs d’intérêts affectés à des projets énergétiques et sociaux.
Stanley Raja Korshie Ahorlu, président de la Chambre de la marine marchande du Ghana, rappelle que l’Afrique dispose d’atouts majeurs : une population jeune, un vaste marché, des ressources naturelles abondantes. « Mais elle fait aussi face à des défis structurels : une flotte insuffisante, un déficit de formation maritime, des infrastructures portuaires sous-développées. La taxe carbone pourrait être un levier pour corriger ces déséquilibres. »
Une taxe mondiale, un enjeu commun
À mesure que l’OMI affine les contours de cette politique, une tendance se dessine : affecter une partie des recettes à la lutte contre le changement climatique dans les pays en développement, notamment les petits États insulaires et les pays les moins avancés. Eldine Glees, conseillère en politique maritime au Centre micronésien pour le transport durable, souligne que « la taxe mondiale sur le carbone est une occasion unique de transformer les risques climatiques en investissements durables. »
L’Afrique se mobilise donc pour que la transition verte du transport maritime soit aussi une transition juste. Elle réclame une politique cohérente, ambitieuse, mais surtout inclusive, afin de ne pas creuser davantage les inégalités économiques et climatiques à l’échelle mondiale.
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ÊTRE FRANÇAIS ET NOIR
Dans "Dans le noir je crie", Sikou Nakaté dévoile le "labyrinthe intime" vécu par les hommes noirs en France, coincés entre injonctions à la masculinité exacerbée et quête d'identité. Un témoignage rare sur une réalité souvent invisible
Dans son premier livre "Dans le noir je crie", publié aux éditions Stock, Sikou Nakaté livre un témoignage poignant sur la condition des hommes noirs en France, décrivant cette expérience comme "être au cœur d'un labyrinthe intime".
L'auteur, qui s'était déjà illustré en 2020 avec son documentaire "Dans le noir les hommes pleurent", poursuit sa réflexion sur la masculinité, particulièrement celle vécue dans les quartiers défavorisés où elle est "exacerbée" et centrée sur le physique.
Nakaté évoque les nombreux préjugés auxquels les hommes noirs sont confrontés quotidiennement. "Celui qui m'écrase le plus, c'est celui de la dangerosité", confie-t-il, dénonçant également la bestialisation du corps noir et l'interdiction tacite d'exprimer des émotions.
Son parcours personnel, du quartier populaire aux milieux bourgeois, a été marqué par un double choc : celui d'être "le seul pauvre dans un monde qui ne l'était pas" puis de découvrir un "racisme quotidien subtil" qu'il n'avait pas connu dans son quartier d'origine. Un racisme qui, selon lui, "gagne en intensité de manière très forte", notamment via les réseaux sociaux.
Se décrivant comme "en exil intime" et "apatride", Nakaté exprime le trouble identitaire de celui qui doit "constamment prouver sa citoyenneté" tout en étant renvoyé à un pays d'origine avec lequel il entretient un rapport distant. Une situation douloureuse qu'il tente néanmoins de transformer en force : "Avec le temps, j'ai l'impression que ça peut être une richesse de ne jamais s'asseoir, d'être toujours en mouvement."
LE MALI FERME SON ESPACE AÉRIEN AUX AVIONS ALGÉRIENS
Cette décision intervient après que le ministère algérien de la Défense a pris la décision de fermer son espace aérien aux vols maliens plus tôt dans la journée.
En réponse à une décision similaire d’Alger, le gouvernement malien a annoncé la fermeture immédiate de son espace aérien à tous les avions civils et militaires en provenance ou à destination de l’Algérie. Cette mesure, entrée en vigueur le lundi 7 avril 2025, restera en place jusqu’à nouvel ordre.
Cette décision intervient après que le ministère algérien de la Défense a pris la décision de fermer son espace aérien aux vols maliens plus tôt dans la journée.
Dans un communiqué officiel, le gouvernement malien a justifié cette réciprocité par le soutien présumé du régime algérien aux activités terroristes internationales.
Les autorités maliennes ont appelé à la compréhension de la communauté nationale et internationale face à cette situation.
par Thierno Alassane Sall
LA GRANDE SUBSTITUTION POLITIQUE
Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
J'ai reçu ce jour le Rassemblement des Travailleurs Sénégalais (RTS) licenciés par les nouvelles autorités (CDC, DDD, FONGIP, PAD).
Plusieurs centaines de personnes concernées et un objectif commun à toutes ces sociétés : faire de la place aux militants du Parti qui a conquis le Sénégal. Licencier des Sénégalais par la main droite, en recruter d’autres par la main gauche, avec comme critère discriminant l’appartenance politique. Pire détournement - ou plutôt instrumentalisation - de la demande sociale d’une rationalisation. Et si le Projet n'était rien d'autre que de se partager le Sénégal conçu comme un butin de guerre ?
Les concernés déplorent, faits et preuves à l'appui, une brutalité sauvage dans la sélection des personnes à licencier, la violence dans l'annonce des décisions, la gestion inique de tous le processus : violations caractérisées de leurs droits avec un ultimatum (accepter le licenciement aux conditions fixées sans négociations ni préavis par l'entreprise ou le licenciement immédiat sans droits ni compensation financière d'aucune sorte).
Dans les deux cas, la misère retardée de quelques maigres mois ou la misère immédiate. À la clé, des enfants renvoyés de l'école, des mois de loyer impayés, les affres des jours sans pain. Ils disent : "ils nous parlent de Jub, jubal, jubbanti, nous on est victimes du Dëŋ, dëŋal,dëŋŋalaat."
LE SÉNÉGAL SE QUALIFIE POUR LES QUARTS DE FINALE DE LA CAN U17
Grâce à leur succès face à la Somalie, les Lionceaux se sont également qualifiés pour la Coupe du Monde de la catégorie prévue au Qatar en novembre.
L’équipe nationale des moins de 17 ans a battu (2-0) celle de la Somalie, lundi, se qualifiant pour les quarts de finale de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de cette catégorie et à la prochaine Coupe du Monde.
Ibrahima Sory Sow, sur penalty (29e mn), et El Hadj Ibrahima Sow dans les arrêts de jeu, ont inscrit les buts des Lionceaux.
Avec deux victoires et un match nul, les protégés de l’entraineur Pape Ibrahima Faye (PIF) comptent 7 points et terminent à la deuxième place du groupe C.
La Tunisie, vainqueur de la Gambie (2-1), termine premier de ce groupe, grâce à une meilleure 0différence de buts.
Dans le groupe D, la Côte d’Ivoire a dominé (4-2) le Mali, terminant en tête du Groupe D avec 7 points.
En quart de finale, les Lionceaux vont croiser vendredi les Eléphanteaux, tandis que les Tunisiens affrontent les Maliens.
Comme les Lionceaux du Sénégal, les moins de 17 ans du Mali et de la Côte d’Ivoire se sont aussi qualifiés pour les quarts de finale et la Coupe du monde prévue au Qatar (3-27 novembre 2025).
par Abdoul Aziz Diop
LE COTISATIONNISME OU LA FIN DU NUMÉRAIRE DANS LES RELATIONS INTERNATIONALES
EXCLUSIF SENEPLUS - Que vaut Diomaye-Moy-Sonko face à Trump-Moy-Musk ? Ce n’est pas en attisant les tensions internes par la désignation de boucs émissaires que notre pays donne le sentiment d’être assez préparé aux mutations en cours
Le député non inscrit Thierno Alassane Sall, auteur de la première proposition de loi d’intérêt général portant abrogation de la loi d’amnistie n° 2024-09 du 13 mars 2024, a pris l’initiative du débat national sur la « guerre commerciale » annoncée par le président américain Donald Trump. Voici, in extenso, la réflexion que le parlementaire a publiée sur sa page du réseau professionnel LinkedIn et à laquelle nous avons réagi.
Nous citons Thierno :
« La nouvelle guerre commerciale déclenchée par les États-Unis, qui n’épargne même pas ses alliés traditionnels, nous concerne également. Le monde peut basculer dans une crise dont les premières victimes seront ceux qui ne s’y sont pas préparés. Aucun pays, aussi périphérique soit-il, ne peut échapper aux secousses des grandes plaques tectoniques de l’économie mondiale.
Le Sénégal, en apparence éloigné de ce tumulte, risque de subir des contrecoups économiques majeurs : chaos économique mondial, ralentissement des échanges, perturbation des chaînes logistiques, hausse des prix des biens importés. Et malheureusement, comme toujours, les répercussions sociales toucheront en premier les populations les plus vulnérables.
Mais le plus grave est ailleurs. Alors que le monde entre dans une phase de reconfiguration brutale des rapports de force, nous restons spectateurs : désorganisés, souvent mal informés, et sans vision cohérente. La situation mondiale actuelle exige de notre gouvernement une stratégie claire, fondée sur l’anticipation géopolitique, la préparation du pays à d’éventuelles crises, et un engagement fort en faveur de la justice sociale.
Le Sénégal n’est pas hors du monde, et nous ne sommes certainement pas les mieux protégés. Cela doit nous inciter à plus de vigilance, de lucidité et de sérieux. » Fin de citation.
Bataille des idées
Trump et Musk sont les deux principaux locuteurs étasuniens dont les atouts financier, militaire et technologique justifient le chantage commercial auquel il expose le reste du monde à travers une remise en cause brutale des accords commerciaux patronnés par l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
L’effondrement du multilatéralisme sous les coups de boutoir des Etats-Unis coïncide avec l’arrivée au pouvoir de régimes dits souverainistes dont celui du Sénégal depuis un an déjà.
Une union souverainiste mondiale est-elle en préparation ? Si oui, de quoi est faite la contribution sénégalaise à la donne qui vient ?
Pour l’instant, tout indique que ce n’est pas en attisant les tensions internes par la désignation de boucs émissaires au niveau le plus élevé de l’État que notre pays donne le sentiment d’être assez préparé face aux mutations violentes qui s’opèrent sous nos yeux.
Qu’on le veuille ou pas, une bataille des idées est inévitable. Dans l’actuelle phase préparatoire que vaut vraiment Diomaye-Moy-Sonko face à Trump-Moy-Musk ?
Le post de Thierno Alassane Sall pose en filigrane la même question dont je nous invite à trouver la réponse décomplexée qui suppose, elle, une union sacrée par-dessus les clivages artificiels.
L’antidote du souverainisme
Interrogé (BFMTV, 3 avril 2025) sur la guerre commerciale déclarée au monde entier par Donald Trump, le journaliste français et éditorialiste politique Alain Duhamel dit de Trump qu’il est « une calamité, mais pas un idiot » avant d’ajouter que le locataire de la Maison-Blanche est « un sanguin, mais pas un crétin ». Nous en déduisons qu’il y a une chance pour les idées d’adoucir les mœurs calamiteuses et sanguinaires du milliardaire qui n’a que du mépris pour les pauvres du monde entier en commençant par ceux de l’Afrique encore spectatrice de son propre destin.
Écoutons d’abord les souverainistes d’ici :
« Il n’est pas normal que notre or, notre zircon, notre fer et que sais-je encore ne nous rapportent pas autant qu’on voudrait faute de les avoir transformés par nous-mêmes et pour nous-mêmes. Il est temps que nous soyons autosuffisant en riz… »
Mais qu’attendent-ils pour répondre concrètement à nos besoins internes. Et pendant qu’on y est, qu’ils fassent tout pour nous permettre de fabriquer nos ordinateurs, smartphones, voitures, avions, bateaux et j’en oublie.
Qu’ils fassent ce qu’ils disent qu’ils doivent faire pour être enfin souverains.
Et quand tout sera là, que faire du surplus ? Autrement dit, quel marché de consommateurs est suffisamment grand pour consommer les surplus souverainistes ?
Et même si le marché existe, mais n’est pas suffisamment grand, où stocker et comment stocker l’excès de zèle souverainiste ? Aucun territoire n’est assez vaste pour.
L’impasse indique une autre direction : le cotisationnisme.
L’antidote du souverainisme, signifie une division juste du travail qui transforme le monde en une association dont les nations qui en sont membres cotisent en se singularisant par autre chose que le numéraire à bout de souffle partout pour cause de surendettement. C’est le cotisationnisme.
Dans son exégèse publique (Tivaouane, avril 2006) du Saint-Coran, le savant soufi sénégalais Cheikh Ahmed Tidiane Sy conforte les bases théologiques du cotisationnisme à travers deux versets dont l’interprétation indépassable par le conférencier fustige l’échange inégal (verset 20:131) et l’accumulation (verset 10:58) auquel conduit le souverainisme outrancier. Les voici :
Et ne tends point les yeux vers ce dont Nous avons donné jouissance temporaire à certains groupes d’entre eux, comme décor de la vie présente, afin de les éprouver par cela. Ce qu’Allah fournit est meilleur et plus durable (20:131)
Dis: « [Ceci provient] de la grâce d’Allah et de Sa miséricorde; Voilà de quoi ils devraient se réjouir. C’est bien mieux que tout ce qu’ils amassent » (10:58)
Samir Amin (1931-2018) a longuement décrit un système d'échange inégal dans lequel « la différence de salaires entre les forces de travail de différentes nations est supérieure à la différence entre leurs productivités ».
S’agissant du nouveau mouvement d’idées que nous proposons ici, il tire ses ressorts économiques internes de l’économie institutionnelle ou institutionnalisme qui articule la théorie économique et les politiques économiques en faisant de l’institution son objet là où les autres théories économiques définissent la valeur.
Présentée à ses débuts par Thorstein Bunde Veblen (1857-1929), John Rogers Commons (1862-1945) et Wesley Clair Mitchell (1874-1948), l’institutionnalisme est illustré, au début du XXe et jusqu’au commencement du XXIe siècle, par les économistes John Kenneth Galbraith (1908-2006), Gunnar Myrdal (1898-1987) et François Perroux (1903-1987) à travers le néo-institutionnalisme juste après la Seconde Guerre mondiale.
De nos jours, la performance, illustrée par, entre autres, l’efficience, l’efficacité, la rationalisation et la gestion de la rareté, est au cœur de l’économie politique. De la même manière, les institutions efficientes et les réformes institutionnelles, pour toujours plus d’efficience desdites institutions, sont au cœur de l’économie politique institutionnelle.
Dans les relations internationales, la fin de la valeur coïncide avec la fin du numéraire, correspondant au postulat de base de l’institutionnalisme universel ou cotisationnisme.
Concrètement ?
À défaut d'une juste rémunération des efforts déployés au Sud, l'Impôt des droits fondamentaux (IDF), payé par le Nord et auquel sont assujetties les grosses fortunes au Sud, devrait permettre de rendre l'équilibre de la balance des paiements socialement plus juste. La satisfaction des demandes sociales incompressibles en dépend. L'équilibre obtenu grâce à l'Impôt des droits fondamentaux permet de combler les déficits, voire de créer un surplus et d'asseoir durablement la parité des fondamentaux. Celle-ci corrige les distorsions entre l'effort au Sud et sa rétribution sur le marché mondial des biens et services. Il suffit de s'en tenir ensuite, explique l’économiste sénégalais Makhtar Diouf, « à la nomenclature classique des biens de consommation (alimentation et boissons ; habillement et linge ; habitation ; hygiène et santé ; transport, télécommunication, information ; culture et loisirs) qu'on trouve dans tous les manuels d'économie politique » pour évaluer l'impact de la parité sur la population. Le but de la parité est d'asseoir partout un développement durable qui, comme chacun le sait, permet de conjuguer la croissance économique avec le souci d'équité sociale et la protection de l'environnement. La Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement (ou Sommet de la Terre) de 1992 a débouché sur un consensus international quant à la nécessité d'un développement durable.
En cas de baisse ou de suppression pure et simple de l'IDF, une parité des fondamentaux, auto entretenue est nécessaire. Celle-ci peut être gagée sur une croissance paritaire, résultat d'une diversification des produits, de la diversité des producteurs et de la suppression des subventions de toute sorte versées aux producteurs du Nord.
L'abandon par les individus de leurs identités rigides s'ils sont appelés à faire partie de sociétés diverses et à épouser les valeurs cosmopolites de tolérance et de respect pour les droits de l'homme universels est un puissant facteur d'équité sociale. Il permet, entre autres, d'éradiquer les discriminations à l'embauche. Au Sénégal notamment depuis le changement de régime. Une protection réussie de l'environnement passe, elle, par la sauvegarde de la diversité des espèces animales et végétales.
La diversité des produits et des producteurs, la promotion des modèles de démocratie multiculturelle ou consociative (Michalon, Le Monde diplomatique, janvier 2004) -, prévoyant des mécanismes efficaces de partage du pouvoir politique entre groupes culturellement divers -, et la biodiversité constituent les trois volets de la diversité durable, stade suprême du cotisationnisme.
Abdoul Aziz Diop est le fondateur de Pacte institutionnel (Pi, π) pour la défense de la démocratie et des institutions de la République…