Le DG du Grand Théâtre rétropédale
Après la polémique créée par sa note de service, le Directeur général du Grand Théâtre national a pris la décision hier, pour garantir, selon lui, la conformité avec la loi et la protection des droits des femmes. Selon Serigne Fall Guèye, cette note visait, entre autres, à encourager une appropriation par le personnel des valeurs fondamentales de l'établissement au regard de ses missions. A travers cette démarche, ajoute-t-il, l'administration du Grand Théâtre a voulu suggérer un cadre cohérent, respectueux de sa vision institutionnelle, et en accord avec les valeurs d'exemplarité, de rigueur et de fierté culturelle qu'elle souhaite promouvoir. Pour lui, l’intention n'était nullement de restreindre les libertés individuelles ni de manquer de respect à la personne humaine mais plutôt de valoriser l'image professionnelle, culturelle et identitaire à travers ses agents, dans le cadre exclusif de son fonctionnement.
28 personnes arrêtées à Mbour
Le poste de police de Mbour a procédé à l’interpellation de vingt-huit 28 personnes dont 1 Comorien, 1 Gambien et 26 Sénégalais. Parmi eux, selon une note, figurent 13 femmes et 15 hommes. D’après le texte, l’un des responsables présumés, se présentant comme agent de QNET et domicilié au quartier Médine (Mbour), a également été interpellé. Tous les individus ont déclaré avoir été invités à participer à une formation organisée par QNET à Mbour. Certains reconnaissent avoir versé de l’argent pour acheter des produits liés à l’activité de vente en ligne de cette entreprise, dont les pratiques s’apparenteraient à un système pyramidal. Selon les premiers éléments de l’enquête, ajoute la police, cette structure cible des jeunes sans emploi, leur promettant de fausses opportunités professionnelles. Ces pratiques suscitent des plaintes récurrentes de la part des parents auprès des autorités locales. Deux responsables présumés de ce réseau, se présentant comme agents QNET, ont été déférés devant le procureur de la République près le Tribunal de Grande Instance de Mbour.
Opération de sécurisation à Ziguinchor
Un individu de nationalité étrangère a été interpellé par le poste de police de Yamatogne de Ziguinchor ce mardi au niveau du poste de contrôle situé sur l’axe routier menant vers la Guinée-Bissau. Selon une note, cette arrestation résulte d’une opération de sécurisation menée par les forces de l’ordre. Au cours de l’opération, souligne la police, un véhicule de transport de passagers, de type « sept places », en provenance de la Guinée-Bissau, a été immobilisé pour un contrôle de routine. Lors de la fouille, rapporte le texte, les agents ont découvert un sachet noir soigneusement dissimulé dans les poches d’un passager. Celui-ci contenait cinquante boulettes deb haschich et destinées à être revendues. Interrogé de manière sommaire, le mis en cause a reconnu avoir acquis la marchandise en Guinée-Bissau au prix de 1 000 FCFA l’unité, avec l’objectif de la revendre en Gambie à raison de 10 000 FCFA la boulette, dans l’intention de réaliser un important bénéfice. Le mis en cause a été placé en garde à vue.
Les victimes du combat Diop 2 et Tapha Mbeur
Trois individus ont été interpellés par le Commissariat d’arrondissement de Pikine. Selon une note de la police, le premier l’a été pour vol en réunion avec usage de moyen de transport. Le deuxième a été interpellé pour rébellion, coups et blessures volontaires ayant entraîné une ITT de 03 jours sur un agent de police en service, ainsi que pour entrave à une mission de police. Tandis que le dernier a été écroué pour vol de téléphone portable. Ces interpellations ont été effectuées en marge du combat de lutte entre Diop 2 et Tapha Mbeur. Les mis en cause ont été placés en garde à vue.
Grève SYTJUSTUNTJ
La réunion entre l’Entente SYTJUST-UNTJ et le ministère de la Fonction publique n'a débouché sur aucun accord. C’est ce qui ressort d’un communiqué de l’Entente SYTJUST-UNTJ rendu public hier. Selon le texte, l’absence du ministre de la Fonction publique, en déplacement à l’étranger, a privé les échanges de toute possibilité d’engagement gouvernemental ferme. L’Entente a néanmoins accepté, dans un esprit de responsabilité, de dialoguer avec les représentants présents, renseignent les syndicalistes. D’après eux, aucun point inscrit dans les préavis de grève n’a connu d’avancée, notamment l’augmentation des indemnités de logement et de participation à la judicature, le rappel des 19 mois de prime, l’élargissement du fonds commun des greffes, l’alignement des greffiers à la hiérarchie A2 et le reclassement des agents des hiérarchies B et C totalisant au moins 5 ans d’ancienneté. Toutefois, une nouvelle rencontre est attendue, à une date qui sera précisée par les autorités.
Réception de 26 250 tonnes d’engrais urée
L’État du Sénégal a réalisé plus de deux milliards de FCFA d’économies grâce au mécanisme d’achat groupé, dans le cadre du programme Bulk Procurement, a annoncé le ministre Mabouba Diagne. Il s'exprimait hier, lors de la réception du troisième navire, chargé de 26 250 tonnes d’engrais urée. Cette cargaison vient s’ajouter aux deux premières livraisons effectuées dans le cadre du même dispositif mis en œuvre par le ministère de l’Agriculture.
12 931 candidats au BFEM en lice à Saint-Louis
12 931 candidats ont entamé l’examen du Brevet de fin d'études moyennes (BFEM) dans la région de Saint-Louis. Ils sont répartis dans 104 jurys sur l'étendue du territoire régional. Selon les autorités académiques, les filles représentent 7 805, soit 60,35% de l’effectif total contre 5 126 pour les garçons soit 39,65%. Pour ce qui est de l'IEF de Saint-Louis commune, le nombre de candidats dépasse les 3 000. L’IEF de Saint-Louis Commune a organisé une rencontre d’échanges avec les présidents de jurys du BFEM 2025. Cette rencontre avait pour objectif de mettre ces derniers à niveau et surtout partager avec eux le dispositif d’organisation. Il a dans cette dynamique rappelé les enjeux qui s’attachent à l’organisation du BFEM mais aussi les recommandations du ministère de l’Éducation nationale. Pour l’organisation pratique, l’IEF a convoqué au total 424 enseignants dont 25 présidents de jury, 25 chefs de centres, 294 surveillants et 84 secrétaires. Toutes les parties prenantes ont été invitées à la vigilance et particulièrement les parents d’élèves à apporter aux candidats l’accompagnement nécessaire pour un respect des règles et des codes de conduite au niveau des centres.
Escroquerie au visa
J. Mendy est actuellement dans les liens de la détention pour escroquerie au visa et association de malfaiteurs. Le démarcheur de visas a profité de l'inattention des dames M. Doucouré et B. Darboe pour leur soutirer respectivement 2,359 millions et 2,148 millions de francs. Selon nos sources, les faits remontent en 2024 depuis la Gambie où J. Mendy a convaincu d'abord la dame Doucouré qui voulait rallier la France de lui confier son dossier. La dame Darboe est également tombée dans le coup. Elles ont été convoyées au Sénégal par J. Mendy qui leur démarche des visas. Après avoir obtenu dans un premier temps un visa pour l'Égypte où elles ne séjourneront pas faute de billets, Mendy est revenu à la charge en les sommant de verser de l'argent pour un visa transit en Lituanie dans le souci de rejoindre la France. Là aussi, les victimes ne verront que du feu. Entre rendez-vous manqués, coups de fils, les victimes ont fini par se rendre à la Police des Parcelles assainies pour porter plainte contre le mis en cause qui sera cueilli par les limiers. Il a reconnu les faits tout en accusant ses collaborateurs. Les limiers lui ont délivré un ticket gratuit pour la prison. J. Mendy doit chercher des arguments solides pour convaincre le juge.
La commerçante s’essaie au vol
Commerçante de son état, A. Diop, une fois condamnée pour complicité de vol, n'a pas voulu se reconvertir dans le droit chemin. Elle a récidivé. A. Diop est arrêtée à nouveau aux abords d'une pharmacie à l’Unité 18. Selon nos sources, A. Diop s'est introduite très tôt dans une maison à la Cité Fadia pour y subtiliser deux téléphones portables avant de se rendre à l’Unité 18 pour commettre le même forfait. Elle ignorait qu'un policier la surveillait de près. Au moment de fuir, le flic a averti les occupants de la maison avant de poursuivre la mise en cause qui s'apprêtait à prendre un taxi. Il a retrouvé par devers elle 4 téléphones portables et une somme de 8 mille francs. Ce qui va motiver sa conduite à la Police des Parcelles assainies. A. Diop a reconnu avoir perpétré deux vols. Ce qui va motiver sa garde à vue et son défèrement au parquet pour flagrant délit de vol.
Arrestations dans l’affaire de la mosquée d’Ainoumane 03
Ce sont au total six personnes, dont une interpellée par les éléments de la Dscoss de Pikine, qui sont actuellement en détention. Selon nos sources, sur les 13 individus déférés en premier lieu par la Police de Guédiawaye suite à la destruction des constructions d’un promoteur, 8 personnes avaient été libérées par le procureur après leurs auditions et 5 ont été placées sous mandat de dépôt. Hier, c'est la Dscos de Pikine qui a convoqué un membre du comité de gestion pour le placer en garde à vue.
L’Etat paie plus de 84 milliards de FCfa de bourse par an
Le ministre de l’Enseignement Supérieur a révélé hier, lors d’un déjeuner de presse, que le gouvernement paye plus de 84 milliards de francs Cfa de bourse par An. Les bourses nationales sont estimées à 76,8 milliards FCFA par an contre 7,5 milliards FCFA par an pour l’étranger. Selon Dr Abdourahmane Diouf, en 2024 un étudiant coûte à L’Etat 1 178 742 F par année en moyenne. Le coût pédagogique est de 542 702 F et celui social est de 636 040 F Cfa. Dr Abdourahmane Diouf dénombre 53 334 étudiants boursiers dont 2 330 dans le privé, soit 70% de taux d’allocation. Sur 10 étudiants, 7 reçoivent une aide. Aussi le ministre de l’Enseignement Supérieur souligne-t-il qu’il a trouvé un budget de 10 mois au lieu de 12.
Gaïndé Macky et Cie libérés par le procureur
Arrêtés lundi devant le tribunal de grande instance hors classe de Dakar, les trois soutiens de Badara Gadiaga, dont A. M. alias « Gaïndé Macky » ont été déférés ce mardi, avant d'être libérés par le procureur de la République. Pour rappel, la militante de l'APR, Gaïndé Macky et ses camarades ont été interpellés par les policiers du commissariat de Rebeuss devant le tribunal de grande instance hors classe de Dakar, alors qu'ils étaient rassemblés pour dénoncer l'arrestation du chroniqueur de l'émission « Jakaarlo » sur la TFM
Par Alassane KITANE
SAVONS-NOUS ENCORE ENTENDRE UN DISCOURS ?
Je suis foncièrement contre le président et son Premier ministre. Je n’ai aucun doute sur leur impuissance à prendre en charge les problèmes du pays. Néanmoins, l’essentiel doit être préservé : la République, la paix et la stabilité
Je suis foncièrement contre le président et son Premier ministre. Je n’ai aucun doute sur leur impuissance à prendre en charge les problèmes du pays.
Néanmoins, l’essentiel doit être préservé : la République, la paix et la stabilité.
* Le président a rappelé pourquoi il a séjourné en prison durant 11 mois. Pour moi. Il l’a dit pour expliquer son option de libérer la Justice. C’est très important et ce, pour deux raisons : a) il prend le contre-pied de son sulfureux Premier ministre (Petit modèle) qui s’est défoulé sur la Justice, b) en rappelant la noblesse des raisons de son embastillement, il demande indirectement à l’autre (ou à nous autres), la cause de son embastillement (lui, puisque Diomaye est le moi à partir duquel est diffusé le sens), c’est-à-dire la direction des choses et leur signification.
* En portant les habits du conciliant, du faiseur de paix, du pardonneur, Diomaye désigne aux Sénégalais la cause du problème : man nitu jàmm la= kooka moy nitu fitna.
* En rappelant la situation de laquelle nous sommes miraculeusement sortis, il met la balle dans le camp des agitateurs. * En prétendant que le seul combat qui vaille est celui contre les problèmes des Sénégalais, Diomaye surclasse Sonko, c’est à se demander s’il ne méprise pas sa sortie maladroite.
* En précisant le contenu de ses rencontres avec des investisseurs aux Etats-Unis, Diomaye coupe l’herbe sous les pieds des conspirationnistes (cf. la vidéo qui circule sur les Rs d’un énergumène qui prétend que Diomaye est devenu le machin des Occidentaux et qu’il aurait monnayé son deal avec Sonko contre un second mandat que lui garantiraient les puissances occidentales) : il expose au public les raisons des rencontres qu’il a eues avec des patrons au pays de l’Oncle Sam.
* A aucun moment il n’a prononcé le nom de Sonko, contrairement à ce dernier lors de sa sortie. On se rappelle qu’il a apostrophé le président.
* Le plus important dans le discours de Diomaye, c’est qu’il dit qu’au-delà de l’honneur et du prestige que confèrent les charges de président de la République, il y a la responsabilité.
Par El Hadji Ibrahima SALL
LE SENEGAL N’A PAS BESOIN D’UN CHAOS GLORIEUX
La dette financière se négocie. La dette morale, elle, se paie devant l’histoire. Prenons acte de ce qui nous est dit. Et redonnons au Sénégal la fierté d’un destin maîtrisé.
La dégradation de la note souveraine du Sénégal par les agences de notation internationales ne saurait être traitée comme un fait divers. Elle marque un tournant. Elle sonne comme un signal d’alarme, lancé au sommet de l’Etat, à la classe dirigeante, mais aussi à l’ensemble de la population. Avec la nouvelle note souveraine, notre pays est jugé «très proche du défaut, voire en situation critique».
Plusieurs facteurs l’expliquent. Une dette publique trop élevée : l’Etat emprunte beaucoup, parfois au-delà de sa capacité réelle à rembourser. Des difficultés budgétaires : les recettes fiscales ne couvrent plus suffisamment les dépenses.
Des retards dans les projets pétroliers/gaziers qui devaient améliorer la situation économique. Des incertitudes politiques : tensions sociales, changement de gouvernement, instabilité institutionnelle.
Depuis quelques mois déjà, nous étions jugés comme un pays «très risqué» pour les investisseurs, mais pas encore en défaut. Et nous étions condamnés à payer des taux d’intérêt très élevés pour continuer à emprunter.
Aujourd’hui, avec la dernière dégradation, notre pays ne peut quasiment plus emprunter sans garanties massives. Nos créanciers s’attendent à un défaut partiel ou une restructuration de la dette. Enfin, nous avons perdu sévèrement la confiance des marchés et des investisseurs.
Mais je sais aussi qu’il est des moments où il faut regarder le réel en face, sans filtre ni euphémisme. Depuis plusieurs années, le modèle de croissance du Sénégal repose sur un endettement soutenu, justifié par de grands projets d’infrastructures et, plus récemment, par la promesse pétrolière et gazière. Ce pari aurait pu être vertueux s’il s’était accompagné d’une montée en puissance de la production nationale, d’une meilleure mobilisation des ressources internes et d’un climat politique apaisé. Ce n’est pas le cas.
Notre pays s’est mal endetté. Notre pays n’a pas toujours bien investi. Nos politiques et programmes publics sont mal conçus, mal exécutés, mal évalués. La conséquence de tout cela est que le Sénégal a gaspillé du capital depuis des décennies. Et nous persistons malheureusement dans cette voie
Aujourd’hui, la conséquence de ces choix économiques est que le Sénégal emprunte pour rembourser, dépense sans créer suffisamment de valeur, et peine à restaurer la confiance auprès des investisseurs nationaux, des banques, des investisseurs internationaux et des partenaires au développement. Ce déclassement de notre crédibilité financière n’est pas une insulte faite à notre dignité. C’est le constat et la sanction que nous vivions au-dessus de nos moyens, et cela finit par se voir.
Mais il est encore temps. Car le Sénégal ne manque ni d’intelligence, ni d’énergie, ni de ressources. Ce qui manque, c’est le courage d’un vrai tournant.
Un tournant vers la sobriété budgétaire, la justice fiscale, la transparence, la fin des gaspillages, la réduction des privilèges indus, et l’investissement dans ce qui fait la force d’un pays : l’éducation, l’agriculture, l’industrie locale, la santé publique. Et ces politiques-là, nous ne pouvons les mener sans financement extérieur. Elles devront être conduites efficacement, avec le souci de l’évaluation permanente. Pour cela, il nous faut des stratégies réalistes et des structures adéquates, et des hommes crédibles par l’expertise, l’expérience et la sagesse.
La condition du tournant, c’est le rétablissement de la confiance. La seule et unique institution économique, ai-je l’habitude de dire. La confiance est l’un des piliers les plus discrets, mais les plus essentiels de la société. Elle précède le Droit, l’économie ou même la morale organisée. Sans elle, aucune promesse n’est crédible, aucun contrat n’est envisageable, aucune autorité ne peut s’exercer durablement. Le président de la République a aujourd’hui l’occasion d’engager un nouveau pacte avec le pays. Non pas un pacte de communication, mais un pacte de rigueur et de vérité. Il peut faire du choc de cette dégradation un levier pour réformer en profondeur, pour expliquer au Peuple sénégalais que le temps de la facilité est terminé, mais que l’effort partagé et le sérieux peuvent sauver notre avenir commun.
Le tournant, c’est aussi engager le pays dans la paix sociale et la stabilité politique
En cette période d’incertitudes, il est urgent de rappeler un principe fondamental : la stabilité politique, une condition de survie nationale. Le Sénégal, par son histoire, son ancrage démocratique, a toujours incarné un équilibre fragile, mais précieux entre liberté et ordre, vie politique et paix sociale. Ce pacte tacite, noué entre les générations, doit être réaffirmé avec force et lucidité.
L’investissement ne va jamais là où règnent la violence, la confusion et le vacarme des affrontements sans fin.
Il va là où l’on bâtit des institutions solides, des politiques publiques cohérentes et des transitions apaisées. Le Sénégal a su, pendant de longues années, malgré les tensions, préserver ce climat de confiance relatif qui a permis d’attirer des partenaires économiques, des bailleurs de fonds et des investisseurs régionaux.
Mais cette confiance est fragile, en plus de ne pas suffire. La paix sociale est en dernière instance l’objectif recherché.
Préserver la paix sociale suppose de ne pas instrumentaliser la pauvreté, de ne pas jouer avec la colère des jeunes, ni d’attiser les divisions ethniques ou religieuses. Il est temps que les élites politiques, économiques, syndicales et religieuses du pays se regardent en face et se posent la vraie question : que lèguerons-nous à nos enfants ? Un pays pacifié, juste et en progrès ? Ou un champ de ruines et de rancunes accumulées ?
Oui, les gouvernants ont une responsabilité primordiale dans la préservation de la stabilité. Mais l’opposition aussi, la Société civile également, les médias encore plus, tous doivent refuser les logiques de destruction systématique. L’alternance démocratique, les critiques virulentes, les manifestations pacifiques sont légitimes. Mais elles doivent être portées par un souci supérieur : ne jamais briser ce qui unit, ne jamais hypothéquer l’avenir du pays au nom des ambitions personnelles.
La dette financière se négocie. La dette morale, elle, se paie devant l’histoire. Prenons acte de ce qui nous est dit. Et redonnons au Sénégal la fierté d’un destin maîtrisé.
Par El Hadji Ibrahima SALL
Economiste,
Ancien ministre
Auteur de «Un autre Sénégal est possible »
Par Mohamed GUEYE
LA POLITIQUE COMME DIVERSION
Depuis près de deux ans, on ne nous a présenté aucun projet crédible de création d’emploi. Quand cela arrive, ce sont souvent des chantiers ouverts en son temps par le régime de Macky. C’est le cas même pour des projets rapportés de Chine...
Le Premier ministre nous a informés, il y a une semaine, qu’il travaillait à la mise en place d’un Plan de relance économique, commercial et budgétaire pour faire démarrer l’économie et sortir le pays du marasme dans lequel il se trouve. Ses équipes se pencheraient sur la question, et on peut être certains d’être bientôt fixés sur les moyens pour que le Sénégal sorte enfin de la conjoncture économique pénible que traversent les populations.
Le Premier ministre, lors de sa dernière sortie, a promis d’appeler, dans les jours prochains, à une mobilisation générale du Peuple autour de ses gouvernants, pour atteindre les objectifs de développement. Le chef du gouvernement estime que le pays a suffisamment de ressources pour réussir son décollage, et que la mobilisation qu’il appelle n’a que trop tardé. Il a rappelé, une fois de plus, que si les dirigeants qui ont précédé son régime avaient entamé le travail qu’il est en train d’accomplir, le Sénégal aurait un niveau d’émergence «comparable à celui du Maroc».
M. Sonko a depuis longtemps affirmé que la situation du pays était encore pire que ce que ses camarades et lui ont imaginé avant leur arrivée au pouvoir. Il a affirmé que si Macky Sall leur avait laissé un Sénégal similaire à celui que lui avait laissé Wade, le pays serait déjà sur la voie du redressement.
Après deux ans, Macky Sall lançait son Pse
On ne peut douter de sa parole, sauf à rappeler que le prédécesseur de Macky Sall, lui, avait prévenu des risques d’un changement de pouvoir, en prophétisant que les salaires ne pourraient pas être payés dans les trois mois qui suivraient. Macky n’a pas fait de récriminations ni de plaintes, et s’est consacré à trouver les moyens de remplir ses devoirs de dirigeant. Il s’est non seulement attelé à payer les salaires et à régler les encours de la dette, mais il a en plus commencé à mettre en œuvre le programme qui l’avait porté au pouvoir, son fameux «Yoonu yokkutee». Après deux ans d’exercice, durant lesquels il a ébauché ses priorités, parmi lesquelles celle qu’il avait indiquée avant sa prise de pouvoir, Macky Sall a viré de bord, en se lançant dans l’élaboration et la mise en œuvre du Plan Sénégal émergent (Pse). Ce dernier plan est celui par lequel il a pu lever, auprès des financiers internationaux, plus de 19 000 milliards de francs Cfa pour financer sa politique de grands travaux et d’infrastructures. Parmi les grands succès obtenus durant son mandat, Macky Sall et ses partisans aiment bien mettre en avant les routes, l’amélioration de la fourniture en énergie, ainsi que certaines constructions. Des succès indéniables, au regard du niveau où le pays était à leur arrivée. Cela a l’avantage de mettre un gros voile sur l’échec le plus patent de Macky Sall, même s’il l’a hérité des régimes passés. Il s’agit de la politique d’emploi, en particulier l’emploi des jeunes. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir essayé. En 2011, le programme «Yoonu yokkutee» prévoyait de créer 500 mille emplois par an pour les 5 années suivantes. En 2019, les ambitions ont été revues à la baisse, et Macky Sall n’affichait plus que 500 mille nouveaux emplois envisagés pour la fin de son mandat. Toute l’imagination du Président et l’activisme de ses collaborateurs n’ont pas permis d’obtenir ces chiffres. Et comme avec Abdou Diouf et Abdoulaye Wade, on peut sans risque de beaucoup se tromper, affirmer que cet échec aura été l’une des plus grandes explications du désaveu de son régime. Quoi qu’il en soit, il aura essayé.
Contrairement à Macky Sall, le duo actuellement au pouvoir, s’il a promis de changer le Sénégal, ne s’est jamais engagé à changer les Sénégalais. Se basant sur les découvertes en hydrocarbures, ainsi que sur les autres ressources du sol et du sous-sol, le Premier ministre, avant son arrivée au pouvoir, promettait de faire décoller le pays deux mois après leur prise de fonction. Le jeudi dernier, il a déclaré que les revenus espérés du pétrole et du gaz, dès lors qu’on aura fait rendre gorge aux exploitants étrangers qui spolient le peuple de ses retombées, permettraient enfin à la population -qui pour le moment est appelée à faire montre de patience- de voir ses conditions s’améliorer.
L’argent à recouvrer, oui. Quid des emplois à créer ?
C’est comme si nous étions encore à l’époque où l’on disait aux Sénégalais de réclamer, chacun, ses 400 mille francs Cfa à Aliou Sall, l’ancien représentant au Sénégal de la société Petro Tim, dont on disait que ce sont ses liens de famille avec l’ancien chef de l’Etat qui lui ont permis d’obtenir des licences sur des blocs que Franck Timis a fini par vendre à la société Kosmos, tout en sécurisant des royalties à vie pour sa personne et son bras droit. Le bloc de Gta, que la société Bp va bientôt commencer à exploiter, n’a pas encore commencé à produire, et la désinformation est apparue au grand jour. Il n’empêche que l’on veut faire croire encore aux Sénégalais que la manne tombera demain du ciel pour nous rassasier. On n’aura pas besoin de travailler.
La preuve. De tous les contrats dont l’Etat appelle à la renégociation, on ne nous parle que des milliards en francs et en dollars perdus, en termes de taxes non reversées ou de bénéfices non déclarés. Rien, ou presque, n’est dit sur les emplois créés ou à créer. Rien n’est encore présenté en chiffres sur les retombées positives en matière de contenu local. Bref, nous sommes encore, semble-t-il, à l’époque où les jeunes gens n’auront pas besoin de trouver de l’emploi, parce que les montants dus par les étrangers nous dispenseront de tout effort. Pourtant, même le Qatar et les Emirats arabes unis, émirats pétroliers devant l’éternel, se débattent, avec les milliards de dollars de revenus dus aux hydrocarbures, pour trouver des emplois rémunérés à leurs petites populations nationales. Macky Sall avançait des chiffres. Aujourd’hui, si l’on sait que le chômage croît, personne ne nous dit comment le juguler, ni par quels moyens
Bientôt deux ans…
Les volontés affichées du pouvoir de régler des comptes ont conduit, en moins de deux ans, à rompre d’avec le Fonds monétaire international, notre garantie et notre appui face aux bailleurs multilatéraux. Cela nous a coûté près de 1800 milliards de francs de financement dont nous ne savons pas encore si nous n’allons pas être obligés de rembourser les sommes déjà avancées. Tout cela, parce que nous avons dit à notre premier partenaire financier que, sept ans durant, il a travaillé avec des personnes qui lui présentaient des chiffres falsifiés.
A ce jour, le Fonds nous demande de démontrer en quoi ces chiffres étaient faux. Tous les fonctionnaires du ministère des Finances et du budget, associés aux magistrats de la Cour des comptes, n’ont pas été, à ce jour, capables de produire des chiffres crédibles et convaincants. De guerre lasse, les autorités ont fini par s’adresser à un cabinet international pour leur dénicher les fameux chiffres falsifiés et la dette cachée de Macky Sall. On aurait pensé qu’avec ses 4000 cadres, le parti Pastef n’aurait pas eu de problèmes pour satisfaire ces partenaires, eux qui sont tant férus de chiffres.
La preuve, ne sont-ils pas déjà en contentieux avec Woodside, qui exploite le pétrole de Sangomar pour le compte du Sénégal ? Tout cela, sur encore un problème de taxes non reversées, pour lesquelles l’Etat demande près de 50 milliards de Cfa. L’ennui est que la compagnie australienne a porté l’affaire devant le Cirdi, et a bloqué le reversement de toutes les sommes dues au Trésor avant que le contentieux ne soit vidé. Le Premier ministre nous promet que les sommes dues seront recouvrées, vaille que vaille. Il ne nous dit pas à quel moment et à quel prix. Comme il ne nous dit pas non plus ce que cela vaudra à ce moment.
Pour ne pas arranger les choses, les deux agences de notation parmi les trois plus importantes dans le monde, Moody’s et Standard & Poor’s, ne cessent, depuis fin 2014, de noter à la baisse le crédit du Sénégal, ce qui nous plonge dans un marasme total. Les places financières internationales, qui se réfèrent à ces agences ainsi qu’à la réputation du pays auprès du Fmi, entre autres, ne sont pas encouragées à prêter de l’argent à notre pays, sinon à des taux d’intérêt exorbitants. D’ailleurs, même le marché obligataire de l’Uemoa dont le Sénégal est l’un des clients les plus fiables, a pris l’option d’emboiter le pas à ces partenaires, pour nous prêter maintenant au prix fort.
On se tourne maintenant de manière systématique vers le marché régional pour faire des emprunts qui couvrent à peine les dépenses de fonctionnement de l’Etat. Les montants que l’on en tire ne permettent que de payer des salaires et de faire face à des besoins urgents de la population. Mais on ne peut investir. La preuve, depuis près de deux ans, on ne nous a présenté aucun projet crédible de création d’emploi. Quand cela arrive, ce sont souvent des chantiers ouverts en son temps par le régime de Macky Sall. C’est le cas même pour des projets rapportés de Chine et d’ailleurs.
Une crise politique en diversion ?
Dans ces circonstances, comme qui dirait, pour faire diversion, on a voulu nous alimenter l’imagination avec un conflit d’égos au sommet de l’Etat. Oubliant que c’était la recette la plus efficace pour chasser loin de nous les investisseurs, après avoir découragé les entrepreneurs nationaux, déjà bien en butte à toutes sortes de brimades. Heureusement que l’un des conducteurs de l’attelage étatique a vite compris le besoin de remettre les choses en l’état et de calmer le jeu. Il faut leur souhaiter de comprendre qu’ils ont intérêt à accélérer enfin les choses pour présenter le fameux plan de relance promis par le Premier ministre, dont on se demande comment il va s’articuler avec la fameuse Vision 2050
Elu par défaut et installé sans état de grâce, Macky Sall a dû batailler pour gagner le cœur de ses concitoyens par son travail. Deux ans après avoir quitté le pouvoir, son aura sur les réseaux sociaux et dans les conversations des Sénégalais ne fait que monter.
Moins de deux ans après être arrivés au pouvoir, portés par un grand élan populaire, les dirigeants actuels semblent déjà s’être essoufflés, étouffés par l’ampleur de la demande que leurs discours ont fait naître. S’ils ne changent pas de cap, deux ans après leur arrivée au pouvoir, ils n’auront semé que la désolation et la désillusion.
LE SENEGAL ELIMINE LE TRACHOME
L e Sénégal vient de réaliser une prouesse. Le trachome, une maladie cécitante, n’est plus un problème de santé publique. L’information a été donnée par l’Oms hier, mardi, dans un communiqué.
Le Sénégal a éliminé le trachome, une maladie cécitante, en tant que problème de santé publique. La nouvelle a été confirmée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), ce15 juillet.
L e Sénégal vient de réaliser une prouesse. Le trachome, une maladie cécitante, n’est plus un problème de santé publique. L’information a été donnée par l’Oms hier, mardi, dans un communiqué. Une décision qui signifie que plus de 9 millions de personnes dans le pays ne risquent plus de perdre la vue à cause de cette maladie. Cela rapproche également un peu plus l’objectif ambitieux de l’OMS d’éliminerle trachome à l’échelle mondiale.
Rappelons que le trachome est causé, selon l’Oms, par une infection bactérienne. Des infections répétées provoquent des cicatrices à l’intérieur de la paupière, faisant pivoter les cils vers l’intérieur, qui frottent alors contre l’œil à chaque clignement. Les personnes décrivent la douleur comme celle d’avoir du sable dans les yeux et finissent souvent par s’arracher les cils ou les raser avec une lame de rasoir. Non traité, le trachome peut entraîner une perte de vision permanente. Pour Dr Mouctar Dieng Badiane, coordonnateur du Programme national de promotion de la santé oculaire du Sénégal, au niveau du ministère de la Santé : « Au Sénégal, l’élimination du trachome n’est pas seulement un succès de santé publique. C’est l’histoire d’un pays qui a su mobiliser ses communautés, ses professionnels de santé et ses partenaires pour transformer une menace silencieuse en victoire collective. Cette réussite incarne la détermination à inscrire durablement la santé oculaire dans les priorités nationales. »
Cheikh Ibrahima Seck, directeur pays de Sightsavers Sénégal qui a appuyé le ministère de la Santé du Sénégal dans cette élimination a déclaré : « Félicitations au Sénégal pour l’élimination du trachome, une maladie cruellement cécitante. À une époque où de nombreux progrès récents en santé mondiale sont menacés, il faut célébrer cette réussite monumentale.
Voyez ce que nous pouvons accomplir lorsque les ministères de la Santé, les ONG, les bailleurs et des milliers d’agents de santé communautaires unissent leurs forces. Il faut aussi garder en tête que cette annonce est à la fois une célébration et un engagement à rester vigilants pour éliminer le trachome partout. » Notons que dans la lutte contre le Trachome, il a fallu 13 ans au Sénégal pour arriver à l’élimination de la maladie.
DONALD TRUMP ET LES DIVERSES TRADITIONS DE LA POLITIQUE ETRANGERE AMERICAINE
Les actions de Donald Trump sur la scène internationale sont souvent jugées imprévisibles, voire irrationnelles. Mais en réalité, ces décisions s’inscrivent dans diverses traditions politiques américaines qui ne datent pas d’hier
Les actions de Donald Trump sur la scène internationale – qu’il s’agisse des rebondissements de sa guerre tarifaire, de son comportement sur le dossier russo-ukrainien ou, tout récemment, de son implication dans la guerre Israël-Iran – sont souvent jugées imprévisibles, voire irrationnelles. Mais en réalité, ces décisions s’inscrivent dans diverses traditions politiques américaines qui ne datent pas d’hier.
I l faut au moins un an pourjuger la politique étrangère d’une nouvelle administration américaine, et c’est d’ailleurs le temps minimum que celle-ci se donne pourrédiger sa traditionnelle « stratégie de sécurité nationale » qui indique le cap et les priorités. Ainsi, la première administration Trump avait publié la sienne fin 2017, et l’administration Biden n’avaitrendu son texte public qu’en octobre 2022, soit presque deux ans après son arrivée à la Maison Blanche.
Entre les craintes de « tsunami » et le choc suscité par le discours de J. D. Vance à Munich, il est néanmoins possible dès aujourd’hui de baser l’analyse sur des faits et pas seulement sur des présupposés. Trois points de repère doivent entrer ici en considération : le facteur personnel ; les traditions de la politique étrangère américaine ; et le poids du contexte géopolitique.
Le facteur Trump : chaos ou pragmatisme ?
Du premier mandat de Donald Trump, on avait retenu une présidence mal préparée, chaotique et freinée par «l’État profond» américain (l’administration, les diplomates, l’armée, les services de renseignement), par exemple dans ses velléités de se rapprocher de la Russie ou de trouver un accord avec la Corée du Nord.
Le second mandat a commencé avec une volonté beaucoup plus affirmée de s’emparer de l’ensemble des rênes du pouvoir. En mars dernier, l’épisode de la fuite de la « boucle Signal » – le rédacteur en chef de The Atlantic aurait accidentellement été ajouté à une conversation confidentielle du gouvernement américain durant laquelle était discutée une opération de frappes aériennes contre les Houthis au Yémen – révélait déjà les contours et les débats du nouveau cercle décisionnel américain.
Se borner à fustiger l’imprévisibilité ou la vanité du président américain, et tout ramener à la question de savoir « où sont les adultes dans la pièce », ne permet ni de comprendre ni de rendre compte de la logique de ses décisions. Il est certain que les va-et-vient des menaces de droits de douane, par exemple, ou que les polémiques à répétition dans les relations avec les dirigeants étrangers, comme avec les présidents Zelensky et Macron, continuent de dérouter les observateurs et les usagers des pratiques diplomatiques.
Pour autant, ily a toujours, dans les actions et les déclarations du président américain, une finalité interne, populiste et électoraliste qui doit être prise en compte par ses interlocuteurs étrangers, même si c’est un facteur évident de complication. Mais l’analyse doit porter le regard au-delà de ces péripéties de forme.
Le trumpisme dans les traditions de politique étrangère américaine : populisme et réalisme
Walter Russel Mead a élaboré en 2001 une classification célèbre des traditions de la politique étrangère américaine : l’isolationnisme de Jefferson (président de 1801 à 1809), l’économisme de Hamilton (secrétaire au Trésor de 1789 à 1795), le populisme d’Andrew Jackson (président de 1829 à 1837), ou encore le libéralisme internationaliste de Woodrow Wilson (président de 1913 à 1921). Plus simplement, Henry Kissinger avait opposé en 1994 la posture du « phare » de la liberté (dans une logique jeffersonienne, donc isolationniste) à celle du « croisé » (dans une logique wilsonienne, donc interventionniste), plaidant pour sa part pour une autre voie intermédiaire, qu’il qualifiait de réaliste, inspirée de la diplomatie bismarckienne.
La politique étrangère de Donald Trump s’inscrit parfaitement dans la tradition jacksonienne, avec son populisme nationaliste avide de puissance et de force (« America First », « Make America Great Again », la « paix par la force »), illustré par des visées expansionnistes sur le Canada, le Groenland ou encore le canal de Panama. Mais on peut aussi voir chez lui certaines tendances isolationnistes au repli (qui remontent aux origines, dès le premier président américain George Washington), ainsi qu’une priorité affichée pourl’économie (qui peut rappelerla vision d’Hamilton, favorable au libre-échange mais n’écartant pas le protectionnisme).
Sur le plan des faits, Trump n’est pas un belliciste, mais ce n’est pas non plus un pacifiste ni un isolationniste, comme l’avaient déjà montré ses frappes en Syrie en 2017 et en 2018. Ses frappes sur le Yémen et sur l’Iran en 2025 l’ont confirmé : il n’entend pas mettre fin au leadership militaire américain dans le monde.
Au niveau économique, Trump renoue avec une tradition protectionniste américaine d’avant la Seconde Guerre mondiale (quirappelle les tarifs McKinley en 1890 et la loi sur les droits de douane Hawley-Smoot en 1930), mais sans renoncer à conclure des accords commerciaux, qui restent la finalité ultime de ses guerres commerciales, dans une logique de rééquilibrage.
C’est évidemment avec l’internationalisme libéral américain que la rupture est la plus flagrante, et le contraste est net avec l’administration Biden qui avait ressoudé les alliances de Washington avec ses alliés traditionnels (UE, Japon, Australie…) face aux régimes autoritaires russe et chinois. Il reste que Trump n’a pas remis en question la présence de son pays au sein de l’OTAN, cherchant plus à faire payer ses alliés qu’à supprimer la garantie de sécurité américaine.
Le changement de posture sur la Russie n’est pas, en soi, un changement d’alliance. En effet, Washington n’est pas allé jusqu’à forcer Volodymyr Zelensky à se plier aux conditions maximalistes de Poutine. Trump est sans doute freiné en cela par l’hostilité profonde de l’opinion américaine à l’égard de la Russie. Surla Chine, sa position dure est en revanche dans la continuité de la position des administrations précédentes
Par ailleurs, il fautrappeler que les républicains sont marqués par une tradition réaliste (Eisenhower, Nixon, Bush père) par opposition à la tradition plus idéologique des démocrates – à l’exception très particulière de la présidence de George W. Bush, dominée par les « néoconservateurs », que Pierre Hassner caractérisait comme un « wilsonisme botté »
Dans la lignée de Kissinger, Trump n’est ni dans l’isolement du « phare », ni dans la « croisade » démocratique, mais dans une logique transactionnelle qui dépend des rapports de puissance. C’est en effet à cette logique qu’il faut raccrocher ses efforts plus ou moins fructueux de régler les conflits (Gaza, Inde/Pakistan, RDC/ Rwanda, Ukraine).
Les États-Unis entre leadership et retrait
Donald Trump est confronté, au-delà de ses orientations populistes, nationalistes et idéologiquement réactionnaires, à des changements structurels de la géopolitique mondiale qui mettent au défi le leadership américain depuis longtemps. Et là encore sa politique paraît afficher des continuités dont on peut donner plusieurs exemples.
L’unilatéralisme qu’ont manifesté par exemple les frappes au Yémen ou en Iran est une tradition très ancienne de la puissance américaine. « Multilateral when we can, unilateral when we must », disait un slogan de l’époque Clinton/Albright. Trump accentue certes le mépris des institutions multilatérales et des alliés, mais ce n’est pas de lui que date le mépris américain pour le droit international.
La tentation du retrait stratégique remonte à la présidence de Barack Obama et découle du fardeau militaire, politique, financier, humain, moral, qu’a été l’enlisement en Afghanistan et en Irak. Trump a essayé d’accélérer ce retrait durant son premier mandat, mais c’est Obama qui avait retiré les troupes américaines d’Irak en 2011, et c’est Biden qui a quitté l’Afghanistan en 2021. Trump a aussi manifesté la même réticence à engager des opérations autres qu’aériennes. En cela, il s’inscrit dans les pas d’Obama qui privilégiait une « guerre furtive » contre le terrorisme, dont les récentes frappes de Trump au Yémen et en Iran apparaissent comme un prolongement.
Le durcissement de la relation avec la Chine est également une évolution qui enjambe les mandats de Obama, Trump et Biden. C’est devenu la priorité de la politique étrangère américaine. Entre les années 2000 et 2020, un Dialogue quadrilatéral pourla sécurité (« Quad ») avait été lancé entre les ÉtatsUnis, l’Australie, l’Inde et la Chine. Ce format, destiné à contenirl’expansion chinoise, a été relancé parl’administration Trump en 2017. Il a donné lieu à plusieurs sommets sous l’administration Biden, et il a été l’objet de la première rencontre multilatérale à laquelle a participé le Secrétaire d’État Marco Rubio en janvier 2025.
Découlant de la volonté de réduire la dépendance à la Chine, les politiques d’autonomie stratégique de l’administration Biden (comme la loi sur la réduction de l’inflation « IRA » de 2022 et le « Chips Act » de 2023) ont été poursuivies sous une autre forme : le soutien aux énergies fossiles plutôt qu’aux renouvelables, ou encore les investissements venus de l’étranger plutôt que les subventions. Mais leur objectif, de même que celui des « tariffs », reste le même : relocaliser la production aux États-Unis, dans une optique mercantiliste, pour accroître la puissance économique américaine, réduire les vulnérabilités, diminuerles déficits et créer des emplois.
Enfin, la proximité avec Israël, plus que jamais revendiquée par l’administration Trump, est consubstantielle à la politique étrangère américaine depuis la création de l’État juif. Les démocrates avaient pris certaines distances avec la politique de Benyamin Nétanyahou, mais pas au point de s’en désolidariser totalement. Il est probable qu’Israël n’a pu attaquer l’Iran sans un soutien américain. En revanche, Trump a manifesté à plusieurs reprises son impatience vis-à-vis de son allié israélien, sans que tout cela n’ait encore débouché sur une politique complètement cohérente.
Trump déchaîné ou Trump enchaîné ?
Les premiers mois du deuxième mandat Trump montrent qu’il n’y a pas de plan établi et méthodique pour mettre en œuvre une politique étrangère radicalement nouvelle.
Trump n’est peut-être plus freiné par « l’État profond » comme il l’avait été durant son premier mandat, mais il est confronté à des pesanteurs géopolitiques qui ne peuvent qu’entraver sa volonté et ses actions quand il veut s’affranchir des réalités. Ce qui, pour les partenaires historiques de l’Amérique, est une évolution plutôt réconfortante.
Par Henriette Niang KANDE
GREFFAGES, PERRUQUES ET PARANOÏA ADMINISTRATIVE
La dépigmentation est un véritable fléau sanitaire. Mais ce combat ne se mène pas avec des interdictions infantilisantes et sexistes. Il passe par l’éducation, pas par des circulaires dignes d’un manuel de surveillance en colonie
Il est des jours où l’on se demande si certains directeurs généraux ne confondent pas leur bureau avec le trône d’un royaume imaginaire. Voici donc que, du haut de son piédestal de moquette et de nœud papillon amidonné, le directeur général du Grand Théâtre national du Sénégal s’est érigé en arbitre des élégances capillaires et des pigments cutanés. Dans une « note de service » au sérieux chirurgical, il interdit, tenez-vous bien, le port de greffages, de perruques et la pratique de la dépigmentation. Rien que ça. On croirait un décret tombé d’un royaume d’opérette, où l’on confond « mission culturelle » et obsession capillaire.
Il paraît que cela visait à « préserver l’image de l’institution » et à promouvoir « les valeurs panafricaines ». Comme si des tissages peuvent faire s’effondrer les colonnes du Grand Théâtre. Comme si les mèches sont des armes de destruction massive. Pourtant, ces mêmes femmes, avec ou sans perruque, sont celles qui assurent la marche de sa direction, préparent les logistiques, coordonnent les programmes. Elles travaillent pendant que Monsieur inspecte la brillance du cheveu humain synthétique et scrute la carnation des coudes, à défaut de scruter les états financiers.
Soit. Poussons la logique jusqu’au bout. Puisque le paraître est objet de règlement intérieur, on aurait pu attendre avec impatience la note suivante : interdiction aux hommes de venir au travail avec des cheveux teints, des ventres ballonnés ou des costards imitation « grands couturiers ». On pourrait même y glisser une clause contre les nœuds papillon qui donnent des airs de gourou d'une secte capillairement frustrée.
Qu’on se comprenne bien : la dépigmentation est un véritable fléau sanitaire. Elle détruit la peau, altère la santé, et alimente un imaginaire dangereux fondé sur le rejet de soi. C’est un combat légitime que de vouloir l’endiguer. Mais ce combat ne se mène pas avec des interdictions infantilisantes et sexistes. Il passe par l’éducation, la sensibilisation, la valorisation des peaux noires, pas par des circulaires dignes d’un manuel de surveillance en colonie.
Quant aux greffages et perruques, faut-il rappeler à ce directeur que ce sont des choix esthétiques, parfois économiques, souvent pratiques ? Est-ce qu’on interdit aux hommes de se raser la tête pour cacher la calvitie ? De porter des faux cols pour allonger le cou ? Où commence la liberté de se présenter au monde comme on l’entend, et où finit le délire d’un chef d’établissement trop zélé ?
En réalité, ce qui dérange ici, ce n’est pas la perruque. Ce n’est pas le greffage. Ce n’est même pas la dépigmentation. Ce qui dérange, c’est qu’un homme, grisé par un soupçon d’autorité, s’autorise à fixer des normes esthétiques à des femmes qui, elles, sont là pour travailler, pas pour plaire à ses fantasmes d'authenticité.
La beauté, le style, le choix capillaire ou vestimentaire, relèvent de la sphère privée tant qu’ils ne compromettent pas l’exercice professionnel. Or, ce qui est ici en cause, ce n’est pas l’efficacité des employées, mais leur conformité à un canon subjectif décrété « panafricain ». En prétendant redresser l’image d’une institution par la restriction de la liberté des femmes, le directeur oublie que l’éthique professionnelle ne se coiffe pas et ne se maquille pas. Elle se manifeste dans la rigueur, la compétence, l’engagement.
Lui, il regarde les cheveux des femmes. Mais jamais leur CV. Il mesure la longueur des mèches, pas celle des compétences. Il repère les perruques mais jamais les idées. Il écoute les claquements des talons sur le carrelage, mais jamais les propositions..
Ce qui transpire entre les lignes amidonnées de cette note de service, c’est surtout un sexisme crasse, moisi, rassis, qui s’invite dans l’administration comme un mauvais parfum dans un huis clos mal aéré. Cette circulaire n’a visé ni les barbes mal taillées ni les crânes dégarnis. Non. Elle a visé exclusivement les femmes. Leur liberté de se coiffer. Leur droit de se présenter au travail dans des tenues décentes, mais comme bon leur semble. Et si, pour une fois, on laissait les femmes être compétentes avec ou sans perruque, et qu’on demandait aux directeurs d’être discrets avec ou sans nœud papillon ?
Dans une société moderne, l’autorité tire sa légitimité non de l’arbitraire, mais de la raison, de la justice et du service du bien commun. Lorsqu’un dirigeant, même dans le cadre d’une institution culturelle, se met à imposer des normes esthétiques, il outrepasse sa mission : celle de garantir des conditions de travail équitables, respectueuses des libertés individuelles. Plus fondamentalement, cette posture trahit un fantasme d’autorité, celui d’un pouvoir qui croit pouvoir réglementer jusque sur les corps, comme si l’habit faisait la dignité, et la coiffure, la moralité. C’est confondre l’ordre avec l’obsession, la responsabilité avec le contrôle.
On pensait avoir tout vu, mais non. Après la tempête, le capitaine a cru bon de sortir une vidéo dans la nuit, pensant peut-être, qu’à la lumière des caméras, ses arguments passeraient mieux. « Je veux défendre l’identité africaine », Rien que çà ! Il ignore que la culture ne se mesure pas à la longueur des mèches ni à la teinte d’un fond de teint. Que l’histoire capillaire de ce continent ne se résume pas à une charte d’entreprise digne d’un salon de contrôle de la bienséance coloniale. Ce directeur, qui veut « valoriser l’image identitaire » ignore visiblement que l’identité s’imagine, se danse, se chante… Elle ne se décrète pas par circulaire. Elle n’est jamais une donnée figée, mais une construction mouvante, tissée entre mémoire, regard d’autrui et désir de soi. Elle oscille entre l’héritage que l’on porte et la liberté que l’on prend pour s’en affranchir. Être soi, c’est donc apprendre à se reconnaître dans ce qui change, autant que dans ce qui demeure. À trop jouer les arbitres du bon goût, il en a oublié le sens même du mot culture : liberté, diversité, expression. Trois mots qui, visiblement, ne figurent pas dans sa trousse de toilette idéologique.
Hier dans la matinée, miracle ! Tel un fakir revenu à la raison après avoir marché sur trop de braises brûlantes d’indignation publique, le même homme retire sa note. Et dans un communiqué au vernis lisse comme un brushing, il invoque un « malentendu professionnel » et une volonté de « clarifier le cadre de fonctionnement ». En clair, il a compris qu’il nageait à contre-courant, sans bouée et sans shampooing.
En 2025, au Sénégal, on mérite mieux qu’un théâtre où l’on joue à réglementer les mèches pendant que les rideaux de la compétence restent fermés. Si une femme est performante, créative, ponctuelle et rigoureuse, mais qu’elle porte une perruque ? Et après ? Et si elle a la peau trop claire au goût du directeur serait-elle à « rééduquer » ? En revanche, la note de service nous donne à penser que si une femme est médiocre mais naturelle comme un spot publicitaire vantant du karité, elle coche peut-être les cases. Voilà où mène le glissement d’un pouvoir administratif vers une pathologie esthétique. On dirait un vieux feuilleton colonial qui revient par la porte du théâtre national, version autoritarisme et lubies capillaires.
Ce directeur n’est pas chef d’institution. Il est chef de rayon dans un salon de beauté. Et encore, un salon où l’on te vire si tu ne corresponds pas à son goût personnel. Il est incapable de diriger une équipe. Il régente des apparences. Il ne promeut pas la culture, il administre ses complexes. Qu’il commence par se coiffer les idées, avant de vouloir décoiffer les femmes. Et qu’il sache enfin que la compétence ne s'attache ni aux mèches, ni aux peaux, mais à ce qu’on a dans la tête. Ce qui, manifestement, lui manque.
Au final, ce monsieur n’a ni le profil, ni la fibre, ni la posture d’un gestionnaire d’institution culturelle. Et puis, peut-être frustré par sa propre transparence managériale, il s’imagine qu’un afro naturel est une stratégie de gouvernance. Et que l’ennemi du progrès se cache dans une mèche brésilienne. Dans tous les cas, et en attendant, les perruques ont gagné. Et lui, il s’est décoiffé tout seul.
Par Vieux SAVANE
LE PRIX D’UNE VRAIE RUPTURE
Reconstruire l’autorité n’est pas gouverner par la peur ou la force, mais restaurer la confiance en montrant que l’État peut, et doit, être un levier d’émancipation
Avant que la tutelle ne vienne mettre un holà face à l’indignation grandissante qui provenait d’un peu partout, le dérisoire, l’accessoire en note de service avait pris ses quartiers, comme s’il n’y avait pas d’autres urgences. Voilà que le directeur du Grand Théâtre faisait savoir qu’« il est porté à la connaissance de l’ensemble du personnel que le port de greffages, de perruques et la pratique de la dépigmentation sont formellement interdites au sein de l’administration ».
Et curieusement, cela était devenu quelque chose qui « vise à préserver l’image de l’institution, laquelle se doit de promouvoir les valeurs panafricaines, conformément à l’une de ses missions ». Et lui donc ! Sa veste européenne cintrée, son nœud papillon d’un autre âge, ses chaussures de ville bien cirées, sa grosse montre bien mise en exergue ?
A croire que peu lui importe de savoir ce qui doit se produire dans un lieu de création plutôt réduite à ressembler à une grande salle de spectacles. Cette sortie du Directeur général est symptomatique de ces nominations fantaisistes qui répondent à des critères autres que ceux de la compétence et de l’expertise. La rupture tant chantée est encore une fois de plus absente car manifestement ce monsieur ne semble pas savoir ce qui attendu de lui.
Et pourtant, au XVIIIe siècle déjà, Souleymane Baal, figure emblématique de la révolution torodo au Fouta Toro, insistait sur l’importance de choisir des dirigeants compétents, de consulter les sages, et de rejeter les préférences ethniques voire partisanes pourrait-on ajouter . C’est ainsi qu’il dénonçait l’hypertrophie de l’ego qui fait croire à certains qu’ils sont l’alpha et l’oméga de toute chose. Il appelait au contraire à l’humilité, clé de l’écoute, de la concertation, de la justice. Et tout cela adossé à des règles claires : l’égalité devant la loi, la séparation des pouvoirs, l’existence de contre-pouvoirs, et la reddition des comptes.
Loin de cette direction, il nous est au contraire servi des tirades relatives au distinguo opéré entre un Sénégal qui « n’est pas en crise » mais plutôt « en manque d’autorité ».
A l’évidence, la crise est bien là et l’une de ses facettes les plus dramatiques est repérable dans ce désespoir bavard qui s’exprime par des prises de risques dans ces pirogues qui quittent nos côtes, chargées de jeunes en quête d’un avenir qu’ils désespèrent de trouver sur place. Ils fuient non seulement la pauvreté, mais l’absence d’horizon, le chômage endémique, les injustices sociales.
Aussi importe-t-il de rappeler que marquer son autorité pour l’Etat, c‘est apporter des réponses aux problèmes qui taraudent les citoyens relativement à la santé, à l’emploi, à la nourriture, à l’éducation. C’est aussi, et surtout, promouvoir des valeurs de travail, d’équité d’honnêteté.
Tout comme, pour un père ou une mère de famille qui n’assume pas son rôle vis-à-vis de ses enfants, point d’autorité pour un Etat qui n’assume pas le sien. Il importe toutefois de ne point succomber au pessimisme ambiant mais de reconvoquer certaines figures contemporaines emblématiques. A l’image de Youssou Ndour qui, à force de travail, d’abnégation, de foi en soi, à son pays et à son continent, a réussi à se positionner au plan national et international sans avoir à s’exiler. Un autre exemple de courage et de détermination qui s’est imposé à nous ces derniers jours se donne dans la trajectoire bouleversante et lumineuse de Pape Nantango Mbaye (voir L’Observateur du 10 juillet 2025). Ce dernier nous rappelle une vérité essentielle selon laquelle, le possible est au cœur de l’expérience humaine. Né avec un lourd handicap qui le prive de l’usage de ses bras, il a refusé la fatalité. Soutenu par une chaîne silencieuse de générosité nourrie par de bonnes personnes, sa maîtresse Louise Thiam Cissé, sa professeure d’anglais Fatou Touré Dieng , le médecin généraliste Mamadou Maguette Dieng, ses camarades de classe, il a conquis ce que beaucoup auraient jugé inaccessible pour lui : un bac scientifique, série S2, mention bien.
Le courage de Pape Nantango Mbaye, son obstination, sa dignité, doivent à coup sûr inspirer nos politiques publiques. En ce sens qu’elles doivent garder à l’esprit qu’il appartient désormais à l’État de comprendre que les grandes ruptures politiques ne se mesurent ni à l’aune des discours, ni des slogans, ni des notes de service, mais à leur capacité à transformer concrètement le quotidien des citoyens. Une manière de signifier que la République ne se juge pas à l'affichage des principes, mais à leur incarnation dans les faits. Et c’est en cela que son autorité va s’affirmer.
A l’évidence, un État démocratique ne saurait être le prolongement d’un ego surdimensionné. Il se définit bien au contraire par son impartialité, la promotion du mérite, la neutralité des institutions. Les responsables publics, hauts fonctionnaires, directeurs d’entreprises nationales, magistrats, doivent être nommés pour leurs compétences, non pour leur loyauté clanique.
Reconstruire l’autorité n’est pas gouverner par la peur ou la force, mais restaurer la confiance en montrant que l’État peut, et doit, être un levier d’émancipation. Ce qui est alors attendu, c’est de transformer le quotidien des populations, donner un espoir, tracer un horizon. Il en va de la crédibilité de l’Etat et de ses dirigeants.
RÉFLEXION SUR LA RECONFIGURATION DE DAKAR
Dans le cadre de l’élaboration de la politique nationale d’urbanisation du Sénégal, Dakar a abrité, hier, la cérémonie de clôture de ce processus entamé depuis 2021, et qui a mené les autorités dans les 13 autres régions
Dans le cadre de l’élaboration de la politique nationale d’urbanisation du Sénégal, Dakar a abrité, hier, la cérémonie de clôture de ce processus entamé depuis 2021, et qui a mené les autorités dans les 13 autres régions. L’atelier a permis de placer la région de Dakar au centre de la dynamique urbaine du pays. Il est ainsi prévu une transformation en profondeur de l’urbanisation de la capitale sénégalaise.
Le ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement du territoire a présidé, hier, à Dakar, l’atelier de consultation régionale sur la politique d’urbanisation. L’objectif est de mettre en place une réflexion collective sur l’évolution de Dakar, de l’indépendance à nos jours, et sur sa transformation en un modèle de métropole durable, inclusive et innovante. « Nous nous rassemblons pour écrire une nouvelle page de notre histoire urbaine, où chaque rue, quartier, ville incarne, non seulement les défis d’aujourd’hui, mais aussi les rêves de demain. Ce travail, entamé depuis 2021, a fait le tour des 13 autres régions, et c’est Dakar – notre capitale, notre vitrine, mais aussi notre alerte urbaine – qui clôt ce processus », a déclaré Moussa Bala Fofana. Selon lui, Dakar concentre les enjeux, les opportunités de rupture et de relance. Dans ce cadre, il a souligné que cette localité n’est pas seulement la capitale, mais « un territoire à reconfigurer, à désengorger, à réinventer au cœur d’un maillage équilibré de pôles territoriaux dynamiques. »
L’urbanisation de Dakar était au cœur des débats. Cette rencontre, qui a réuni des experts, professeurs d’université, membres d’organisations internationales et des élus, a permis de discuter des problématiques urbaines. L’atelier de consultation régionale de Dakar vise à impulser une nouvelle dynamique à la discussion sur la planification territoriale multiéchelles, à travers la finalisation du diagnostic de la politique nationale de l’urbanisation. Cette dernière cherche à créer un cadre d’échanges et de connexions entre les acteurs de la région de Dakar, afin de nouer des partenariats avec d’autres qui partagent des intérêts communs dans le domaine du développement urbain durable.
« Ensemble, faisons de Dakar le laboratoire vivant de l’Afrique de demain. Une métropole qui rayonne sans dominer, qui innove sans exclure, qui grandit sans étouffer, pour montrer au monde entier que l’urbanisme sénégalais est une réponse africaine, ancrée dans nos réalités, mais résolument tournée vers l’avenir », a soutenu M. Fofana. Il a, en outre, assuré que les autorités détiennent les outils, la vision et la volonté nécessaires pour que cette transformation soit réalisable.
Des défis énormes
Dakar abrite, à elle seule, plus de 4 millions d’habitants. Aujourd’hui, les défis urbains de la capitale sont, entre autres, l’étalement urbain, la croissance rapide, la concentration du Pib et les problèmes de congestion.
D’après le ministre de l’Urbanisme, des Collectivités territoriales et de l’Aménagement du territoire, ce rééquilibrage va permettre la création de l’équité spatiale, en corrigeant les fractures entre le centre et les périphéries. Pour lui, il faut un changement de paradigme en s’appuyant sur l’Agenda « Sénégal 2050 », tout en donnant aux autres pôles du territoire national leur dignité, leur attractivité et leur capacité à retenir les populations et les investissements.
« Dakar est le symbole de notre centralisation historique, mais aussi le label d’un nouveau urbanisme à inventer. Elle incarne les défis du présent et l’exigence de prospective. Si nous réussissons à transformer Dakar, alors nous allons réussir à inspirer le reste du pays », a fait savoir M. Fofana.
LA MOBILISATION POUR L’AVORTEMENT MEDICALISE SE POURSUIT
Le Comité de plaidoyer (« Task Force ») sur la santé de la reproduction des femmes et des filles pour leurs droits à la vie, poursuit son combat pour la légalisation de l’avortement médicalisé en cas de viol, d’inceste ou de pédophilie.
Le Comité de plaidoyer (« Task Force ») sur la santé de la reproduction des femmes et des filles pour leurs droits à la vie, poursuit son combat pour la légalisation de l’avortement médicalisé en cas de viol, d’inceste ou de pédophilie. Il a, dans ce cadre, invité les autorités sénégalaises à respecter le Protocole de Maputo sur les droits reproductifs des femmes. « Ce protocole plaide pour l’autorisation de l’avortement médicalisé en cas d’agression sexuelle, de viol, d’inceste, surtout lorsque la grossesse met en danger la santé mentale et physique de la mère », peut-on lire. Les membres dudit comité ont organisé, hier, à Dakar, un déjeuner de presse. Selon eux, cette législation permettrait de réduire les cas d’infanticide et de mieux protéger les droits des femmes.
Lors de cette rencontre, la directrice de l’Ong PP Global, Amy Sakho, est revenue sur la situation préoccupante des avortements clandestins au Sénégal. Selon elle, la Direction de la santé de la mère et de l’enfant du ministère de la Santé et de l’Action sociale a fait état d’un cumul de près de 34.079 avortements clandestins en 2020. Un chiffre alarmant qui illustre l’ampleur du phénomène dans le pays. En 2022, l’Ong PP Global a mené une étude pour évaluer la situation des femmes incarcérées au Sénégal pour cause d’avortement ou d’infanticide. Elle « avait démontré que, sur un total de 344 femmes détenues, plus de 54 étaient poursuivies pour infanticide et 5 pour avortement clandestin », a rappelé Mme Sakho. Des chiffres qui font froid dans le dos et qui motivent la « Task Force » à travailler sur une proposition de loi pour venir en aide à ces femmes. Pour la coordonnatrice de la « Task Force », Aïssatou Ndiaye, les pressions socioculturelles sont telles qu’une femme enceinte hors mariage subit l’exclusion sociale et la stigmatisation.