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13 juillet 2025
‘’NOS MAGISTRATS SONT TOTALEMENT INDÉPENDANTS DU POUVOIR EXÉCUTIF’’
Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, Malick Sall, a déclaré dimanche que les magistrats sénégalais sont ‘’totalement indépendants’’ du pouvoir exécutif, ce que conteste souvent certains observateurs et usagers des services judiciaires.
Dakar, 15 juin (APS) - Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, Malick Sall, a déclaré dimanche que les magistrats sénégalais sont ‘’totalement indépendants’’ du pouvoir exécutif, ce que conteste souvent certains observateurs et usagers des services judiciaires.
‘’Ils (les magistrats) ont toutes les garanties constitutionnelles. Je vous assure qu’ils prennent cette garantie. Ce sont des juristes comme moi. Je n’ai pas besoin de leur demander de prendre des décisions (…). Ils connaissent la Constitution comme moi. Ils disent la justice mieux que moi, [...] ils sont totalement indépendants’’, a soutenu M. Sall.
L’avocat nommé à la tête du ministère de la Justice depuis avril 2019 était l’invité dimanche de l’émission ‘’Jury du dimanche’’, diffusée par Iradio et iTV (privées). Il soutient n’avoir jamais cherché à influencer un magistrat.
‘’Depuis un an et quelques mois que je suis là, aucun juge ne peut dire que je l’ai appelé dans un dossier civil, commercial ou pénal pour lui dire : +Voilà ce que le pouvoir politique veut, ou ce que le chef de l’Etat veut+’’, a juré Malick Sall.
‘’Je vous l’assure, le président de la République ne peut pas mettre un visage sur 95% des magistrats. Il ne les connaît pas’’, a-t-il ajouté, soutenant que ‘’c’est la Constitution du Sénégal qui donne une garantie d’indépendance à la justice’’.
Interrogé sur la liberté provisoire accordée au député Seydina Fall dit Bougazelli, inculpé pour ‘’association de malfaiteurs, contrefaçon de billets de banque ayant cours légal, blanchiment de capitaux et tentative de corruption’’, M. Sall a dit que ce militant du parti au pouvoir n’avait pas bénéficié d’une ‘’protection judiciaire’’.
M. Fall a bénéficié d’une liberté provisoire après que l’un de ses avocats, Me Clédor Ciré Ly, a invoqué la dégradation de son état de santé.
‘’Objectivement, si Bougazelli avait une protection judiciaire ou politique, il ne serait pas en prison‘’, a argué le ministre de la Justice.
Selon lui, le député de Guédiawaye (banlieue de Dakar) a présenté plus d’une vingtaine de demandes de liberté provisoire.
‘’Toutes les demandes ont été rejetées avant qu’il n’obtienne cette liberté provisoire’’, a-t-il précisé.
Dakar, 15 juin (APS) – Les quotidiens reçus lundi à l’APS se sont surtout intéressés à la polémique sur les terres de la région de Dakar et à l’affaire Batiplus, un dossier de détournement d’argent dans une entreprise privée appartenant à des Libanais vivant à Dakar.
Sous l’égide de l’association SOS Littoral, la société civile sénégalaise proteste depuis plusieurs jours contre l’occupation des terres situées au bord de l’Atlantique.
Les autorités gouvernementales sont accusées d’avoir fermé les yeux sur la vente de ces terres qui, selon la loi, doivent rester la propriété de l’Etat et être exploitées exclusivement par ce dernier, au profit de tous. Et, des hommes d’affaires et des chefs religieux ont été mis en cause dans l’acquisition des terres du littoral.
‘’Les voix continuent de s’élever pour condamner le bradage du littoral. Après le maire de Mermoz Sacré-Cœur, Barthélémy Dias, et le collectif SOS Littoral, c’est au tour du président des Pastef-Les Patriotes, Ousmane Sonko, de descendre hier sur les lieux pour manifester son amertume et sa consternation’’, écrit L’As.
‘’Le ton ferme (...), il a promis la destruction de tous les édifices en question, dès son accession au pouvoir. Le leader des Pastef-Les Patriotes est formel. Ousmane Sonko juge illégale la construction sur le littoral. Raison pour laquelle hier, dans un live sur la plage de Mermoz, il a averti les propriétaires des bâtiments et a menacé de démolir tous les édifices’’, ajoute le même journal.
‘’Toutes les autorités dont les responsabilités sont engagées dans cette affaire devront rendre compte devant la justice’’, lit-on dans L’As, qui cite M. Sonko.
Le journal EnQuête évoque un autre litige lié à la terre, à Diass, une commune située dans la région de Dakar, où il y aurait eu ‘’un deal entre le maire, un promoteur [immobilier] et des autorités administratives’’.
Il y avait ‘’un projet futuriste pour le village de Boukhou’’, qui s’est mué en ‘’une distribution abusive d’un titre foncier appartenant à l’Etat du Sénégal’’, selon le même journal. Il rappelle que tout est parti d’une idée qui ‘’ne germait pas que dans la tête de l’ex-président de la République, Abdoulaye Wade, qui a décidé d’y installer le nouvel aéroport international de Dakar’’.
Mais, plusieurs années après le départ de M. Wade de la présidence de la République, ‘’un promoteur immobilier (…) est venu leur présenter (aux populations de Diass) le projet de lotissement d’un terrain de 55 hectares dans le village, sur un espace compris dans la forêt classée de Diass’’. Et ‘’l’homme d’affaires affirme (...) détenir tous les documents’’ attestant que le terrain est sa propriété, rapporte le même journal.
Les nombreux conflits liés à la terre font croire à EnQuête qu’il est ‘’difficile de trouver une partie du pays qui échappe aux litiges fonciers’’.
Les journaux annoncent que le journaliste Cheikh Yérim Seck, patron du site d’information YerimPost (privé), est convoqué lundi devant la section judiciaire de la Gendarmerie. Seck ‘’s’est prononcé sur divers sujets d’actualité dont le bradage du foncier et l’affaire Batiplus. Concernant cette dernière, il a indiqué que le montant de 650 millions de francs (…) saisi chez les Libanais gérant Batiplus est faux’’, lit-on dans EnQuête.
‘’Je vais vous faire une révélation : la Gendarmerie a saisi chez eux (chez les Libanais propriétaires de la société Batiplus) 4 milliards’’, a déclaré le journaliste à la télévision 7TV (privée), ce qui serait à l’origine de sa convocation par les gendarmes, selon le même journal.
‘’Dans les jours à venir, trois dignitaires seront visés par un mandat d’arrêt international. L’annonce est faite par Cheikh Yérim Seck au cours d’une émission’’ de la 7TV, rapporte Tribune.
WalfQuotidien évoque la ‘’crise de confiance au château’’, autrement dit, au sein du gouvernement, entre le président de la République et les ministres.
‘’Si vous êtes journaliste, ne soyez pas étonné que vos appels téléphoniques à certains membres du gouvernement sonnent dans le vide par ces temps qui courent. (…) Parce que lors du dernier conseil des ministres, Macky Sall a vertement critiqué ses hommes sur les fuites dans la presse de certaines informations stratégiques’’, explique-t-il.
WalfQuotidien ajoute que Macky Sall ‘’n’y est pas allé par le dos de cuillère pour flinguer le gouvernement qu’il soupçonne de sourcer la presse, notamment sur ses colères, des décisions ou encore des bisbilles entre collègues’’.
Source A s’est intéressé à la dernière réunion du ministre de l’Education nationale, Mamadou Talla, avec les leaders des syndicats d’enseignants. ‘’Pour maquiller son amateurisme (…), source de la reprise avortée des cours, le 2 juin dernier, Mamadou Talla a tenté de se justifier en indiquant que ce n’est que vers 20 heures que son collègue Abdoulaye Diouf Sarr l’a informé de la contamination de certains enseignants’’ au coronavirus, écrit-il.
Mais les enseignants, eux, étaient ‘’convaincus que ses explications sont tirées par les cheveux’’, et certains d’entre eux ‘’ont fait comprendre à M. Talla que la contamination de leurs collègues a servi de prétexte ‘’pour cacher tous les dysfonctionnements et carences notés dans la préparation de la reprise’’ des cours, poursuit le journal, qui évoque ‘’la stigmatisation des enseignants’’.
Par Abdou Karim FOFANA
LE LITTORAL, L’HUMAIN ET L’ACTION PUBLIQUE
Si nous voulons un développement harmonieux et durable de notre pays, nous devons éviter de nous émouvoir de manière populiste à propos de l’investissement étranger et accepter d’accueillir les porteurs de projets d’où qu’ils puissent venir
La gestion du littoral de notre pays et, plus particulièrement, de la corniche de Dakar occupent depuis quelques jours le devant de l’actualité. Dans une époque dominée de plus en plus par le futile, l’éphémère, l’instantané, la recherche de sensationnel, je me réjouis qu’un sujet aussi important occupe une telle place dans le débat public. Il faut cependant constater que la discussion de fond entre personnes engagées dans la seule bataille qui vaille dans notre démocratie: celle des idées, se trouve néanmoins pollué par des gens dont l’unique motivation est de substituer à la pensée mère de l’action, les petites querelles politiciennes. Afin de contribuer à remettre au centre des préoccupations la réflexion fécondante, je propose un retour à la sérénité et un recours aux faits. Pour cela, il me semble important de convoquer l’histoire.
LA REGLEMENTATION A TRAVERS L’HISTOIRE
L’Etat du Sénégal a aujourd’hui soixante ans d’existence et les tentatives d’organisation de l’occupation de son littoral sont plus vieilles que son accession à la souveraineté internationale. Le transfert de la capitale de l’Afrique Occidentale Française de Saint-Louis à Dakar, en 1902, a permis l’élaboration du premier Plan Directeur d’Urbanisme (PDU) pour Dakar en 1946, par Lopez, Gutton et Lambert, qui sera modifié en 1957 puis remplacé par celui de 1967 dénommé Plan Ecochard. Sur cette base un Plan d’Urbanisme de Détails (PUD) a été élaboré pour la corniche de Dakar et approuvé par décret. Ses principales orientations étaient l’interdiction de prise de possession d’assiettes et l’autorisation d’installations précaires et révocables ou de constructions légères et démontables. Vingt ans après le Plan Ecochard - durée de vie d’un PDU - une révision a été entamée dans les années quatre-vingt. Le PDU de Dakar horizon 2001 reprenait dans ses grandes lignes celui de 1967 surtout pour ce qui concernait les zones de la commune de Dakar dont le bâti était déjà dense et la morphologie quasi définitive. Ce plan n’a pas été approuvé par décret. Durant cette période, a été construite dans le périmètre de la future commune de Dakar Plateau, sur la corniche ouest, la première maison qui surplombait l’atlantique marquant le début de l’agression de cette zone dont la convoitise introduisit rapidement une forme de compétition.
En 2000, le PDU de Dakar de 2001 est remplacé par celui fixé à l’horizon 2025, suite logique des plans successifs qui ont défini, selon les époques, les grandes lignes du développement physique de l’agglomération dakaroise. Deux ans plus tard, le ministre de l’Urbanisme etde l’Aménagement du territoire mettait en place, par arrêté ministériel n°529 en date du 22 janvier 2002, la Haute Autorité pour l’aménagement de la corniche de Dakar.
AUTORISATIONS DELIVREES PAR DES OPPOSANTS
Entre 2002 à 2012, des aménagements sur la route de la corniche ont été réalisés décuplant l’intérêt pour une zone déjà très convoitée. De nouveaux hôtels sont construits, ceux déjà existants sont rénovés voire agrandis et des maisons sortent de terre suite au déclassement de certaines parties et malgré l’élaboration d’un PUD, certes non approuvé par décret, ainsi que la révision de plusieurs règlements particuliers d’urbanisme en rapport avec la corniche. On peut citer les règlements particuliers de la zone des Almadies, de Dakar-Plateau et du Point E qui bénéficiaient d’un décret d’approbation. Les baux, durant cette décennie, ont été octroyés et les autorisations de construire délivrées par des autorités gouvernementales et des maires membres d’organisations politiques aujourd’hui adversaires de notre majorité. En effet, la procédure en la matière obéit aux étapes suivantes : un décret de déclassement pris par le président de la République sur avis favorable d’une commission dirigée par le gouverneur territorialement compétent, un avis favorable de la Commission de Contrôle des Opérations domaniales (CCOD), la délivrance d’un bail par les services des domaines, un examen des plans de construction par les services d’urbanisme, une autorisation de construire par le maire de la commune concernée. L’action du président Macky Sall En 2012, à la faveur de l’élection du président Macky Sall, une procédure de révision a permis la production du PDU de Dakar et ses environs, horizon 2035, caractérisé par une approche inclusive tenant compte des aspects liés aux concepts de villes durables et résilientes. Faisant preuve d’exemplarité, le chef de l’Etat a rendu une parcelle qui lui avait été attribuée sur la corniche, a retiré un titre délivré à un pays ami pour la construction d’une résidence diplomatique, s’est rendu sur la corniche pour constater la situation et a demandé à l’Ordre des architectes de lui proposer un projet d’aménagement qui est attendu depuis 2014. Sa détermination à apporter une solution définitive s’est parfois heurtée à la multiplicité des acteurs et à leurs difficultés à travailler en synergie. Au-delà du littoral, le président Sall est sensible aux défis environnementaux tels que la pollution marine - le vote de la loi sur l’interdiction du plastique est aussi lié à cette préoccupation -, la dépollution de la Baie de Hann dont le financement est ficelé ainsi que la reforestation.
ORGANISER L’OCCUPATION
Il faut rappeler que nous avons, à travers l’histoire, toujours eu des populations habituées à vivre en bord de mer : les pêcheurs tioubalo peulh, niominka sérère, lébou, certains habitants historiques de zones côtières etc. Il y a aussi des occupations d’ordre économique, d’utilité publique et d’intérêt général. La réalisation de réceptifs hôteliers est, par exemple, importante pour le tourisme, secteur qui contribue de manière significative au PIB national et dont l’apport sera encore plus déterminant en cette période de relance économique liée à la Covid19. Le problème réside surtout dans les affectations privées concédées, parfois au mépris de la loi, qui sont à dénoncer et à combattre. Se lancer, aujourd’hui dans des actions punitives ne relève pas du bon sens. Nous avons assez d’espace pour rendre accessible la corniche. Il est impossible de ne pas l’occuper. Il faut organiser, aménager les parties non occupées. Il y a une occupation égoïste et une occupation d’intérêt public équitable quant à l’accès des populations à la mer. Des centres commerciaux de Copa Cabana, par exemple, aux hôtels de La Rochelle en passant par les aménagements payants de la corniche d’Abu Dhabi, tous les pays disposant d’un atout littoral l’exploitent selon des ratio hôtels - accès public - plages de pêcheurs - aménagements etc. L’enjeu réside dans l’optimisation de cette exploitation.
ACCUEILLIR L’INVESTISSEMENT EXTERIEUR
Si nous voulons un développement harmonieux et durable de notre pays, nous devons éviter de nous émouvoir de manière populiste à propos de l’investissement étranger et accepter d’accueillir les porteurs de projets d’où qu’ils puissent venir. Cela, quitte à exiger légalement une participation, jusqu’à un certain niveau, de privés nationaux dans tout investissement venu de l’extérieur. A défaut, le Sénégal sera une terre d’opportunités non exploitées et un terrain de chasse pour les spéculateurs. Dans les années 2000, on a beaucoup parlé de scandales fonciers supposés. Celui lié à des investissements à Mbane avait, par exemple, connu un grand retentissement. Aujourd’hui, malgré les supposés déséquilibres évoqués dans les modalités de concession à certains privés, cette commune est devenue une grande plateforme où des opérateurs venus d’autres parties du monde réalisent une production agricole de qualité. Les populations travaillent avec eux dans une harmonie parfaite et un développement économique local inspirant. A côté de l’agriculture familiale et vivrière, un tel modèle est à promouvoir, dans le respect strict des règles garantissant l’intérêt national et sans se soucier de la propagation de fake news et de faits alternatifs inhérents à notre époque.
ESQUISSE D’UN FUTUR HARMONIEUX
Après avoir convoqué l’histoire, il nous faut ainsi esquisser le futur, faire une projection sur l’avenir de notre corniche et de notre littoral. Ma conviction est que la prise en charge de cette question nécessite, après l’état des lieux physiques déjà effectué et la concertation ouverte avec les acteurs, l’adoption de mesures prioritaires que sont : la signature d’un décret déclarant d’utilité publique l’aménagement etla restructuration de la corniche, prescrivant les mesures de sauvegarde et autorisant l’élaboration d’un nouveau Plan d’Urbanisme de Détails, l’élaboration du Plan participatif d’aménagement et de développement durable de la corniche ouest, la mise en œuvre du projet d’aménagement et de restructuration de la corniche ouest. Ces mesures nécessaires rentrent dans une vision voulant que la corniche de Dakar et, de manière générale, nos 760 kilomètres de littoral soient préservés afin de confirmer le constat de l’architecte allemand Jochen Brandi qui, rapporte mon ami Moctar Ba, président de la Plateforme pour l'Environnement et la Réappropriation du Littoral, ébloui par ses formes remarquables, estime que le potentiel de la corniche de Dakar va bien au-delà de Central Park à New York, du Bois de Boulogne à Paris ou des 3000 parcs pour les trois millions d'habitants de la ville de Vienne.
RENFORCER L’ACTION PUBLIQUE
Sans une action publique forte, sans détermination politique, il sera impossible d’exploiter efficacement ce potentiel. L’action de la société civile et des lanceurs d’alerte est utile. Cependant entre les manipulations et, parfois, les tergiversations politiques, nous risquons de tuer l’action publique. Si nous laissons la responsabilité de cette action à des lanceurs d’alerte souvent peu ou mal informés des tenants et aboutissants et en proie, de bonne foi, aux manipulations, nous la tuons. Les hommes politiques n’auront plus d’utilité puisque la dictature de l’opinion sans preuves et de l’émotion facile leur fera fuir la responsabilité de rétablir les faits et de poser des actes pour le mieux-être de tous. Il s’agit là d’un défi générationnel. Nous avons été élus pour mettre en œuvre des politiques publiques. Nous devons avoir le courage de dire aux populations la vérité, de les informer sur l’intérêt véritable de notre pays. L’Etat a le devoir d’être transparent, organisé, méthodique mais l’Etat ne doit pas manquer de volonté pour réaliser des projets utiles à l’en commun. Ma vision est qu’il nous faut bâtir des villes où l’humanité fait sens, des villes qui se soucient de l’humain dans l’urbain. Cela passe par la valorisation de nos meilleurs atouts. Il nous faut planifier la ville en concevant les espaces publics et les usages comme lieux de créativité et d’inclusion, la construire dans une continuité de temps et d’espace en agissant sur la forme urbaine et en anticipant sur les extensions urbaines, la définir comme un bien commun.
«IL FAUT AVOIR LE COURAGE DE SA VISION ET DE SON OPINION»
L’idée de quitter à la tête du Comité national de gestion (CNG) de la lutte n’est pas à l’ordre du jour pour Alioune Sarr. Invité de la «Tribune de l’ANPS», le président de cette instance est revenu sur la situation actuelle de la lutte.
L’idée de quitter à la tête du Comité national de gestion (CNG) de la lutte n’est pas à l’ordre du jour pour Alioune Sarr. Invité de la «Tribune de l’ANPS», le président de cette instance est revenu sur la situation actuelle de la lutte. Dans cette première partie, il évoque l’âge limite des lutteurs et se prononce également dur le problème des arbitres.
Président, comment se porte la lutte au Sénégal ?
Je supervise le CNG au Sénégal et toutes les formes de lutte. Je pense qu’elle se porte, comme toutes les disciplines sportives au Sénégal, avant la Covid-19, relativement bien. Mais, vous savez que dans la vie tout est subjectif et nous pensons que par rapport aux objectifs fixés par l’autorité, cela va dans son ensemble. Même si, tout le monde ne le reconnaît pas et c’est normal, parce qu’une œuvre humaine est toujours perfectible.
Comment analysez-vous votre présence à la tête du CNG depuis plus de 26 ans ?
La Lutte est une discipline agitée. Est-ce qu’il existe sur terre une activité qui n’est pas assez agitée? Quelle que soit la situation dans laquelle on se trouve, la vie est dynamique. Chaque période appelle des corrections et des nouveautés et une nouvelle façon de voir. Cela pose souvent des problèmes dans sa globalité. Et ce fameux chanteur congolais disait que la vie est un éternel combat. Un combat, il faut avoir le courage de l’accepter, de le mener, selon sa propre stratégie ou du groupe.
26 ans à la tête du Cng, cela ne vous use pas ?
Je dirais oui et non. Elle use parce que tout simplement nous avons affaire à des groupes qui n’ont d’objectifs que de résoudre des problèmes crypto-personnels. Il faut tout le temps faire face pour rappeler à tout un chacun que la mission est globale et que c’est l’intérêt du sport sénégalais en particulier de la lutte, dont le développement du Sénégal sous une certaine mesure, qui est en jeu, et non pas les querelles. Cela peut user et ne pas user, si on a l’intime conviction que ce que nous faisons avec conscience, nous le faisons sans avoir peur de faire mal. Quand vous devez tracer une voie, forcément vous aurez à déplacer, recentrer et recadrer. Tout cela ne peut pas plaire à tout le monde. Il faut avoir le courage de sa vision et de son opinion, surtout avoir en tout instant en tête que cette mission nous vient du sommet de l’Etat. Nous sommes Sénégalais et patriotes, et tant que nous pensons la mener, nous la mènerons sans état d’âme.
De structure d’exception, le CNG est devenu pour certains une structure pérenne. qu’en pensez-vous ?
On parle de Comité national de gestion et non d’exception. Je rappelle que la lutte est passée par toutes ses émotions à savoir toutes les formes de structure (fédération, comité d’exception, les comités tout simplement). Et depuis 1994, c’est le Comité national de gestion au Sénégal. Certains l’appellent comité d’exception, mais je voudrais simplement rappeler ce que disait François Bopp que «tant qu’il serait ministre des Sports au niveau de la lutte et des courses hippiques, il n’y aurait pas encore de fédération ». Etait-il un visionnaire ? Sommes-nous prêts ? Et quand on parle de fédération, on parle de structure de base. Avec le CNG, je l’ai personnellement toujours défendu. C’est à travers les structures de base dans toutes les régions ou dans la majorité des régions du pays qu’il faudrait insister pour pouvoir arriver à une fédération. Je ne veux pas et il faut qu’on se regarde dans les yeux et qu’on se dise certaines vérités. Il ne suffit pas que deux pelés et deux tondus se retrouvent pour dire que j’ai une structure. Beaucoup de nos structures ne sont que de nom.
Selon vous pourquoi les grandes affiches ne se font pas à l’Arène nationale ?
Elles se tiennent à l’Arène nationale. Il est difficile de changer les habitudes et il y a eu de la pression lors du dernier combat sous prétexte que Léopold Sédar Senghor a plus de places. Aucun stade ne peut recevoir tous ceux qui veulent aller au stade, certains feront le déplacement et d’autres resteront à la maison. Mais, j’ai eu à le dire et si la décision n’incombait qu’au président du CNG, tous les combats de lutte organisés à Dakar, se passeraient au niveau de l’Arène nationale. Nous avons, pendant plus d’un quart de siècle, insisté pour que la lutte puisse avoir son stade. Nous l’avons, il faut l’utiliser. Le stade est adéquat, contrairement à certaines déclarations. Ce n’est pas un produit chinois, mais c’est une réalisation chinoise à partir de réflexions des Sénégalais. Souvent, les Sénégalais se trompent de combat. Quand on confie à quelqu’un, tout le monde ne peut pas être à côté pour dire voilà ce que je veux. Dès l’instant que quelqu’un a été choisi avec son équipe pour diriger, qu’on permette à cette équipe de diriger, mais c’est difficile au Sénégal. Tout le monde est expert. Tout le monde pense. Et souvent ceux qui parlent le plus, ce sont ceux qui en savent le moins.
Quel regard portez-vous sur le MMA ?
Je n’ai pas beaucoup de pensées par rapport à cela. J’ai eu à voir cette forme de sport en dehors du Sénégal. Je n’ai pas grand-chose à dire. Je constate que les gens sont en cage. Je ne connais pas le règlement et il y a beaucoup de violence, beaucoup plus dans la lutte, même si les gens portent des gants. C’est tout ce que je peux dire en attendant de connaître ce sport.
Pouvez-vous revenir sur la limitation d’âge des lutteurs pour la retraite ?
J’ai un journal sportif et ils ont tracé la carrière de Mbaye Guèye (ancien Tigre de Fass) qui à 40 ans disait qu’il n’avait plus envie. Après sa défaite de 1987, il s’est retiré. Je pense que cela fait réfléchir ceux qui pensent qu’on ne doit pas limiter l’âge d’un sportif. Dans toute les discipline sportives, qu’on limite ou on ne limite pas, à partir 30 voire 40 ans ou plus, vous n’attirez pas. En plus, le sport individuel réclame tellement d’efforts pour le corps et vouloir continuer face à des jeunes mieux entraînés et plus aptes physiquement, cela peut causer des problèmes. Avant quand le lutteur n’était qu’un pêcheur ou un cultivateur, on pouvait aller très loin. Mais aujourd’hui nous nous battons et les sportifs font d’autres sports de combat pour être au top. Le médecin sportif que je suis, l’être humain que je suis, avant d’être président, pense que 45 ans c’est même trop.
A votre avis, c’est quoi le problème avec le corps arbitral ?
Une nouvelle fois, ceux qui soulèvent le problème des arbitres sont loin de connaitre la réalité. Est-ce que vous savez que toutes les semaines, quand l’activité était normale, le bureau du Cng se réunit tous les lundis. Et à cette réunion, participe le président de la commission central des arbitres. Tous les problèmes sont débattus. Mais retenons ceci, la plus belle fille au monde ne peut donner que ce qu’elle a. Le dialogue n’a jamais été rompu. Ils ont posé des actes. Nous avons répondu par rapport à la réalité du terrain. Je suis allé jusqu’à leur dire que s’ils pensent trouver les moyens de la solution de m’indiquer la direction et je me battrai. Il ne faut pas que les gens pensent que quelques lutteurs gagnent des centaines de millions que l’arbitre qui doit arbitrer le combat doit gagner des centaines de millions. Jusqu’à preuve du contraire, ceux qui sont dans la lutte, en dehors des lutteurs, sont des bénévoles. Même si on leur donne quelques honoraires, mais ce n’est pas proportionnel par rapport à ce qu’ils font. Donc, il ne faut pas biaiser l’esprit de notre présence pour développer la lutte. Hélas, c’était le problème avec le corps arbitral.
Aviez-vous dialogué avec eux ?
Nous avons dialogué. Je dirais même sur presque une décennie. Au moment où la vache était très grasse, et que les promoteurs avaient assez de moyens, les arbitres n’ont pas dit qu’au-delà des honoraires qu’ils considèrent comme des miettes, mais qui représentent la partie la plus importante de que le Comité National reçoit comme le droit d’organisation, je leur avais permis de négocier directement avec les promoteurs. Ils voulaient en faire des expressions de sponsorisation. En général, ce n’est pas normal que les arbitres puissent bénéficier de sponsorisation. Je l’avais accepté pour les aider. Et il arrivait qu’ils reçoivent 500.000 FCFA ou un million FCFA à se partager entre trois et cinq personnes. Pendant ce temps, les gens ne disaient pas grand-chose. Mais aujourd’hui que la vache est maigre, qu’elle ne donne plus 40 litres de lait, mais plutôt un litre, il faut que tout un chacun se contente de sa part en attendant de réfléchir ensemble. Mais quand ces acteurs qui sont des Sénégalais que je considère jusqu’à la preuve du contraire comme des patriotes disent que nous ne pouvons plus faire cela, j’ai dit qu’ils sont des bénévoles. Dès l’instant que vous pensez que ce n’est pas votre métier principal ou vous pensez que vous ne pouvez plus, mais retirez-vous tout simplement. Au-delà du président, j’ai même convoqué à plusieurs réunions les arbitres qui étaient à Dakar pour échanger.
par Mody Niang
LUTTE CONTRE LA CORRUPTION, LE SÉNÉGAL TRAÎNE LOURDEMENT LES PIEDS
Dans ce pays, la corruption est nourrie au sommet de l’État - Le décret nommant Mansour Faye et le ‘’vrai-faux’’ qui a créé ‘’l’honorariat’’ pour les anciens présidents du CESE se disputent l’indécence et l’absence d’éthique
Par notre comportement de tous les jours, nous Sénégalaises et Sénégalais, donnons raison au vieux président-politicien qui, fort d’une certaine conviction, nous a gouvernés à sa guise et souvent avec mépris pendant douze longues années. Cette conviction était fondée sur la certitude que nos mémoires étaient courtes. Il disait exactement ceci, au cours d’un bureau politique ou son équivalent : « Senegale, boo ko laaje lu mu réere biig du la ko wax, te gëmul ludul nguur ak xaalis. » En français, il le dirait ainsi : « Le Sénégalais a la mémoire courte et ne croit qu’à l’argent et aux honneurs. » Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, il a parfaitement raison. Dans toute grande démocratie, dans seulement tout pays sérieux, les graves forfaitures qui ont jalonné sa longue et infecte gouvernance lui auraient valu les pires déboires judiciaires[1]. Au lieu de cela, les foules continuent de courir derrière lui et nombre de journaux lui réservent encore leurs ‘’Une’’.
Voilà huit ans qu’il a quitté le pouvoir et son digne successeur se fait la même conception de nous et mène exactement la même nauséabonde gouvernance. Nous constatons que, depuis le 2 avril 2012, son installation officielle, les scandales succèdent aux scandales, aussi graves les uns que les autres, sans susciter la moindre indignation du peuple. Les plus récents crèvent nos yeux et nous percent les tympans. Ce sont, naturellement, la gestion des milliards destinés à l’aide des populations démunies laissée à son beau-frère, le très contesté contrat liant la Senelec à Akilee, les dizaines de licences de pêche accordées en dehors de toute réglementation à des bateaux chinois qui pillent sans état d’âme nos maigres ressources halieutiques, ce vrai-faux décret qui accorde de façon indécente des privilèges exorbitants aux anciens présidents du Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Il y a eu une période où les partenaires dits techniques considéraient le Sénégal comme un exemple de bonne gouvernance et de démocratie. C’était très mal connaître nos réalités. Á supposer qu’ils aient eu raison, le Sénégal marque le pas et se fait distancer par nombre d’autres pays. Parmi eux, je ne citerai pas le Botswana et la République des Îles du Cap-Vert qui sont loin, très loin devant nous. Je prendrai plutôt des exemples encourageants de pays considérés jusqu’ici comme corrompus ou très corrompus.
Je partirai du Burkina Faso, qui n’est pas considéré d’ailleurs comme un pays très corrompu, peut-être même pas corrompu, mais l’exemple est fort intéressant. Un ex-ministre de la Défense, Jean-Claude Bouda, a été arrêté et écroué à la Maison d’Arrêt et de Correction de Ouagadougou. C’était le mardi 26 mai dernier. Selon Yaya Boudani, correspondant de RFI à Ouagadougou, tout est parti d’une plainte du Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC) pour « délit d’apparence et enrichissement illicite ». Suite à cette plainte, l’ex-ministre a été auditionné puis directement transféré à la Maison d’Arrêt et de Correction de Ouagadougou.
Les déboires de l’ex-ministre ont commencé, en décembre 2018, par des photos d’une luxueuse villa qui font le tour de la Toile et qui serait la propriété de l’ex-ministre de la Défense. Après quelques mois d’enquêtes, le REN-LAC dépose une plainte pour des faits de « délit d'apparence, d’enrichissement illicite, de fausses déclarations d'intérêts et de patrimoine », entre autres. La luxueuse villa, dont le coût est estimé à près de 500 millions de francs CFA, n'apparaissait nulle part dans la déclaration des biens de l’ex-ministre à sa nomination au sein du gouvernement. Et le REN-LAC estime, qu’en tous les cas, « les ressources qu’il avait déclarées ne pouvaient non plus lui permettre une telle acquisition ». De source judiciaire, il est poursuivi pour « faux et usage de faux, blanchiment de capitaux et délit d'apparence ». Pas seulement. Son nom est également cité dans d’autres dossiers pour lesquels aucune plainte n’est pour le moment déposée.
Une villa de 500 millions de francs CFA considérée comme très luxueuse et ne figurant pas dans la déclaration de ses biens au moment où il entrait dans le gouvernement ! Une telle villa, c’est mille fois rien au Sénégal. Dans les quartiers comme l’ancienne Zone de captage et l’ancienne réserve foncière de la Foire de Dakar, l’ancienne Bande verte qui longeait la Voie de Dégagement Nord (VDN), la Cité Kër Góor gi (qui porte bien son nom), la Cité des Mamelles et des quartiers alentours, le Domaine public maritime de plus en plus privatisé, on trouve des milliers de villas et d’immeubles devant lesquels la luxueuse villa de l’ex-ministre burkinabè est une case. Parmi ces villas et ces immeubles, il y en a – et ils sont nombreux –, dont des observateurs avertis estiment les coûts à un, deux, trois, quatre milliards de francs CFA ou plus. Ce qui est insoutenable, c’est que ces villas et immeubles appartiennent à des fonctionnaires qui ne comptent pas parfois plus de dix ans d’ancienneté, et à des Sénégalaises et Sénégalais qui, avant le 1er avril 2000 et le 2 avril 2012, auraient bien du mal à se construire une maison de deux millions de francs. Et encore ! On imagine donc aisément le fossé qui existe entre la gouvernance au Burkina Faso et celle qui prévaut chez nous surtout depuis le 1er avril 2000.
L’autre exemple aussi encourageant, me vient du Bénin où un procureur, celui de Kandi, est mis en examen pour «intelligence avec un groupe terroriste». Il n’était pas seul d’ailleurs : le procureur de la République, le premier substitut et le commissaire par intérim de la même ville, ont été placés sous mandat de dépôt, pour « intelligence avec un groupe de terroriste, abus de fonction et corruption ». Tout est parti, selon RFI, de l'arrestation d'un suspect présenté comme un agent de renseignement d'un groupe de terroristes dans le Parc W, partagé par le Niger et le Burkina Faso. Le procureur de Kandi reçoit le dossier, le traite et le classe sans suite. Ce qui suscite l’indignation de ceux qui ont interpellé le suspect. Ils informent leur hiérarchie et les choses vont vite : les magistrats sont alors soupçonnés d'intelligence avec les terroristes, notamment de corruption, inculpés et placés sous mandat de dépôt. Une telle fermeté, une telle objectivité dans le traitement d’un dossier judiciaire de ce niveau, nous éloigne de notre pays.
Un autre exemple, vraiment inimaginable dans ce Sénégal de Macky Sall celui-là, avec les deux précédents d’ailleurs, me vient de la République démocratique du Congo (RDC). Oui, de la RDC. Il s’agit d’un procès inédit dans ce pays, celui du Directeur de cabinet du chef de l’État Félix Tshisekedi. Il s’agit de Vital Kamerhe, son principal allié, qui s’était désisté avant l’élection présidentielle du 30 décembre 2018 en sa faveur, élection qu’il a remportée, même avec beaucoup de contestations, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.
Vital Kamerhe n’est pas seulement l’allié, le Directeur de cabinet de Félix Tshisekedi, mais il était au cœur du landerneau politique depuis vingt ans. Malgré tout, son procès anticorruption s’est ouvert le 11 mai 2020, après une détention préventive depuis le 8 avril 2020. Il était poursuivi, avec deux autres personnes, pour le détournement présumé de 50 millions de dollars, soit l’équivalent d’environ 46 millions d’euros. Cet argent était destiné, selon les observateurs, à la construction de maisons sociales préfabriquées, donc à l’intention des Congolais les plus modestes. On retiendra aussi, que lors de l’audience retransmise par la chaîne d’État RTNC, M. Vital Kamerhe « est apparu les traits tirés, barbe grisonnante, vêtu de la tunique jaune et bleue propre aux détenus de la prison centrale de Makala où se tient le procès ». Il n’est pas au bout de ses peines car, dans son réquisitoire, le procureur de la République réclame vingt (20) ans de travaux forcés pour détournements de deniers publics et quinze (15) de prison pour corruption. La délibération du juge est attendue le 20 juin 2020 (RFI, journal parlé de 6 heures 30 du vendredi 12 juin dernier).
Ce procès n’était pas passé inaperçu. Il était couvert notamment par Le Monde, l’AFP, l’Agence Reuters. Les experts du Groupe d’études sur le Congo (GEC) de l’université de New York le résument ainsi : « Jamais dans l’histoire politique congolaise de ces deux dernières décennies, un acteur aussi important de la scène politique ne s’est retrouvé derrière les barreaux ». Un tel procès ne verra jamais le jour au Sénégal, tant que Macky Sall y sera président de la République. Au contraire, les plus gros pilleurs de deniers publics y sont promus à des postes stratégiques où ils continuent tranquillement leurs forfaitures.
Le dernier exemple extérieur que je propose aux lecteurs, serait considéré chez nous comme sensible parce que touchant à la sécurité nationale, comme « secret défense », quelle que soit sa gravité. L’exemple se passe au Niger, en guerre contre des djihadistes. Dans cette perspective, l’armée a passé de gros marchés d’armes dans des conditions peu orthodoxes. L’affaire, qui touche directement le ministère de la Défense nationale (MDN), fait état de graves malversations qui mettent les réseaux sociaux dans tous leurs états. D’énormes sommes d’argent – on avance jusqu’à 1700 milliards de francs CFA –, auraient pris d’autres destinations, allant nourrir peut-être les comptes en banque de quelques personnels politiques et militaires ou ont servi à construire de villas de haut standing. Pour en avoir le cœur net, le nouveau ministre de la Défense nationale, M. Issoufou Katambé, ordonne une enquête. Les inspections et les audits qu’il a diligentés révèlent de pratiques malsaines qui sont à la base de l’évaporation de tous ces milliards dont on ne trouve aucune trace sur le terrain. Le rapport d’audit, même provisoire, a permis au ministre Katambé de découvrir, entre autres forfaits, qu’une commande d’entretien d’avions a été faite pour le compte d’une entreprise qui n’existe que dans l’imagination de ses auteurs pour un coût de 1,9 milliard, alors que la commande, reprise, ne devait coûter à l’État que 900 millions, avec des entreprises réelles et justifiant d’une expérience avérée. Pire, avant que la prestation ne soit faite, le 1,9 milliard FCFA a été sorti du Trésor national. C’est également le cas de deux hélicoptères de transport de troupes, commandés paraît-il sous Kalla Moutari (ancien ministre), mais jamais livrés.
Ces deux hélicoptères d’un coût de 30 millions de dollars ont été surfacturés à 47 millions de dollars. Le manque à gagner pour l’État s’élèverait à près de 100 milliards de francs CFA. L’audit a mis en cause plusieurs personnes pour surfacturation et non-livraison de matériel militaire. De lourds soupçons pèsent ainsi sur certains gradés de l’armée nigérienne comme sur des hommes politiques, membres influents du Parti nigérien pour la Démocratie et le Socialisme (PNDS), parti au pouvoir, ainsi que des hommes d’affaires. Ces derniers ont voulu d’ailleurs trouver un arrangement et payer en douce les milliards illicites qu’ils ont encaissés. Les magistrats ont alors tapé sur la table et l’affaire suit son cours.
Ce qui est remarquable, le président de la République Issoufou Mahamadou n’a pas encore levé le plus petit doigt et laisse faire. Que nous sommes loin du Sénégal de Macky Sall où le gouvernement a acheté et déployé un nouveau matériel militaire, notamment des chars de combat et des hélicoptères probablement pour des centaines de milliards de francs CFA, et peut-être bien plus. Dans quelles conditions ? Nous ne le saurons jamais, en tout cas tant que le président-politicien régnera sur le pays. Notre ministre des Forces Armées ne s’aventurerait jamais, comme son homologue nigérien, à s’intéresser aux conditions dans lesquelles nos différents armements sont achetés, depuis le 2 avril 2012. Ni lui, ni la Cour des Comptes, ni aucun autre organe de contrôle. Pourtant, le candidat Macky Sall nous avait promis fermement que la Cour des Comptes vérifierait la gestion de toutes les institutions en les citant : présidence de la République, Assemblée nationale, Cours et tribunaux, Armée nationale, etc. En tout cas, quand on lit les deux tomes du livre du Colonel Abdoul Aziz Ndao, on peut se poser légitiment des questions sur l’achat de différents matériels par nos armées. Nous n’aurons jamais, malheureusement, de réponses à ces questions, avec un Macky Sall à la tête de notre pays.
Je pouvais continuer de donner d’autres exemples de pays qui font des efforts dans le sens d’une meilleure gouvernance, notamment en luttant efficacement contre la corruption et en promouvant la transparence dans la gestion des affaires publiques. Dans ce pays de Macky Sall, au contraire, la corruption est nourrie et entretenue au niveau le plus élevé de l’État. Ce qui se traduit, au quotidien, par une succession de scandales aussi graves les uns que les autres.
Le président français, Emmanuel Macron, a demandé aux présidents de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental (qui n’a rien à voir avec le nôtre), de lui proposer des priorités d’actions pour la suite du quinquennat. Il a aussi annoncé la création prochaine d’une commission indépendante chargée d’évaluer la gestion de la crise du Coronavirus par l’Exécutif (CNews du 5 juin 2020). Cette commission ne verra jamais le jour au Sénégal. Mansour Faye en est tellement convaincu qu’il se moque de nous en déclarant qu’ « il a le devoir, l’obligation de rendre compte ». La nomination de cet homme à la tête de son ministère (du ciel, de la terre, des eaux et de l’air que nous respirons) est l’un des plus gros scandales de l’infecte gouvernance du président-politicien. Le décret qui l’a nommé et le ‘’vrai-faux’’ qui a créé ‘’l’honorariat’’ pour les anciens présidents du CESE se disputent âprement l’indécence et l’absence totale d’éthique.
En particulier, la nomination de cette dame comme ‘’présidente honoraire’’ du CESE et les avantages exorbitants y afférents est une honte, un crime, un acte immoral. Nous savons quand même qui est cette dame et par où elle est passée. Je n’insiste pas sur les quarante-deux milliards de francs CFA qu’elle a gérés à sa convenance pendant les six ans qu’elle est restée présidente du CESE. Pour se faire une idée de son pillage présumé de nos maigres deniers à ce niveau, je renvoie le lecteur intéressé à la vidéo que ‘‘Xalaat TV’’ lui a consacrée. Ce ne sera pas tout d’ailleurs. Des compatriotes sont en train de fouiller dans son odyssée politique pour mettre éventuellement en évidence les fautes de gestion parfois lourdes qui auraient jalonné ce long parcours. Je crois que je jouerai ma modeste partition dans cette initiative citoyenne, dont les résultats devraient amener le président-politicien à renoncer à son ‘’vrai-faux’’ décret, si toutefois il est à la hauteur de la fonction qu’il est censé incarner.
[1] Sa seule boulimie foncière à nulle autre pareille y suffirait largement.
Abdou Karim Fofana, le ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique, devait recevoir, le vendredi 12 juin, dans l’après-midi, l’association des acteurs du littoral, sur instruction du chef de l’État, Macky Sall. Il devait être question, a expliqué la tutelle, de «recueillir des propositions de façon à sauvegarder ce qui reste» du Domaine public maritime. Mais auparavant, lors d’une visite effectuée dans la matinée du vendredi à l’extension du marché de Champs de Course, le ministre Abdou Karim Fofana, qui a dédouané et lavé à grande eau le président Macky Sall et ses gouvernements, a renvoyé le dossier du bradage du foncier du littoral dans le compte des anciens régimes dont celui de l’ancien président Abdoulaye Wade, et de la ville de Dakar notamment sous le maire Khalifa Ababacar Sall. «L’occupation du littoral ne date pas de 2012.
Avant même l’indépendance du Sénégal, il y a une occupation traditionnelle du fait des pêcheurs et certaines populations qui ont l’habitude de vivre les pieds dans l’eau. Il y a aussi une occupation économique, d’intérêt public. Aujourd’hui qui n’est pas fier d’avoir dans sa ville un hôtel comme le Terrou-bi ou le Radisson ? Et, il y a aussi les occupations privées qui ont fait l’objet d’affectations. Mais de quelles affectations ? Et (elles) datent de quand ? Quand on parle des Mamelles, mais les baux ont été faits avant 2012.
Les autorisations de lotir ont été signées en 2012 par la Ville de Dakar. Donc, on ne peut pas prendre toutes ces situations qui ont existé dans les années 2000 ou même avant, et où les débuts de construction ont commencé durant le magistère du président Macky Sall, nous dire que le régime brade le littoral. Ce n’est pas une vérité. Autre chose, les autorisations de construire données sur toute cette zone, c’est soit la Ville de Dakar, soit la Commune de Fann-Point E-Amitié, soit la commune de Mermoz-Sacré-Cœur. Qui dirigent ces communes ? Ce sont des opposants au régime. Donc, il faut qu’on rétablisse la vérité.»
760 KM DE CÔTE À SAUVEGARDER AU SENEGAL
«Je ne suis pas venu pour situer des responsabilités, pour dire que c’est l’ancien ou le nouveau régime. C’est la continuité de l’État. L’État du Sénégal a 760 Km de côtes qu’il faut sauvegarder. Nous sommes bien d’accord là-dessus. Le président (Macky Sall) a une détermination telle qu’il a été le seul président dans l’histoire du Sénégal à venir sur la Corniche pour constater de lui-même les occupations qui y sont faites. Encore plus loin, il est allé jusqu’à retirer des baux donnés à des pays amis, prenant même des risques diplomatiques sur ces sujets-là. Donc, ça montre sa détermination. C’est une nouveauté ça.»
CORNICHE OUEST : SEULES 7 KM SUR LES 16 A SAUVER DES PREDATEURS DU LITTORAL
«Donc, ce qu’il faut savoir aujourd’hui, c’est qu’il faut savoir raison garder. La Corniche Ouest, du Boulevard de la République jusqu’à la Mosquée de la Divinité, c’est à peu près 16 Km, nous avons constaté qu’il y a à peu près 7 Km sur les 16 qui sont inoccupés. On doit se battre aujourd’hui pour avoir un projet d’aménagement concerté. En 2015, le président avait demandé à l’Ordre des architectes de faire un projet. Jusqu’à présent, on l’attend. Donc, la volonté d’aménager, elle, existe. Encore le mal qui est fait au littoral, ce ne sont pas seulement des agressions en termes de construction mais c’est aussi la pollution. C’est aujourd’hui Soumbédioune avec les eaux usées. La dépollution de la Baie de Hann, c’est un projet du président Sall.»
LE LITTORAL DANS L’IMPASSE
De Cambérène au Lac Rose, en passant par Guédiawaye, Tivaouane Peul, Bambilor, jusqu’à Sangalkam, l’environnement du domaine public maritime et de toute la bande côtière est compromis.
Mariama Djigo et Fatou Ndiaye, |
Publication 15/06/2020
De Cambérène au Lac Rose, en passant par Guédiawaye, Tivaouane Peul, Bambilor, jusqu’à Sangalkam, l’environnement du domaine public maritime et de toute la bande côtière est compromis. Si ce n’est pas la bande des filaos, menacée par l’abattage des arbres, c’est le bradage du foncier qui indigne les habitants. Le déclassement abusif des terres du littoral, domaine public maritime et leur attribution à des personnes physiques et morales privées sont en effet si poussés qu’ils frisent l’indécence. Au grand dam de populations impuissantes qui, tout en déplorant le désastre, invitent l’Etat à réagir.
Samedi 13 juin, Dakar a reçu les premières gouttelettes de pluies, des signes précoces et annonciateurs de l’hivernage. La chaleur qui pointe à l’horizon, loin de diminuer d’un cran, au contraire, reste de mise. Les plages, interdites en ces temps de pandémie de Covid-19, sont pourtant prises d’assaut par des badauds à la quête de fraîcheur maritime. La présence policière n’y change pas beaucoup. La mer attire. Pendant ce temps, la bande côtière fait l’objet de convoitises. Il existe encore des espèces inoccupées qui donnent accès direct à la mer, d’une part aux Parcelles Assainies, Guédiawaye, Yeumbeul, Malika, Tivaouane Peul, entre autres. Mais de l’autre, ce sont des piquets/bornes, symboles d’une cessation de terrains, constatés par endroits qui attirent l’attention. A côté, il y a également des palissades qui servent de clôture de fortune à des jardins où s’activent des maraîchers etc. Plantes aromatiques et tas de salades reçoivent les gouttes d’eau nourricières.
LES FILAOS AGRESSES
La bande des filaos qui est un des rares poumons verts de la capitale, n’est pas dans son meilleur état. Si ses arbres ne sont pas coupés à la tige, ce sont les branches qui sont à terre. L’image de la bande des filaos, c’est aussi ces piquets/bornes plantés de part et d’autre de la route suivant les communes d’arrondissement dont dépendent ces espaces. Ils sont la marque d’une délivrance de l’espace à des fins d’habitation. Non loin de la Police de Wakhinane Nimzatt, des personnes sont assises au bord de la route. La place était un lieu de commerce de sable et de béton. Mais, récemment l’activité y est interdite. «Vous voulez du sable, des camions de béton ou de sable ?» Ce sont des jeunes accourant à notre rencontre qui nous interpellent ainsi. «Rien de tout cela», avons-nous répondu. Une réponse qui a vite déchanté et baissé les ardeurs de ses courtiers de sable et béton. Un vieux qui suivait à l’écart les échanges se joint à la discussion et se montre plus coopératif. «On nous avait prêté le site pour qu’on y stocke le sable et le béton que nous vendons. Mais, les agents des Eaux et Forêts, chargés de veiller à la sécurité des lieux, nous ont sommés d’arrêter. Nous sommes ici pour attendre les clients, pour qu’en cas de besoin, on prenne juste leur commande», explique-t-il. A la question de savoir où se trouve la partie de la bande des filaos déclassée pour les constructions, il répond : «C’est au rond-point Gadaye», sur le prolongement de la VDN vers Guédiawaye. En effet, ces attributions sont les plus flagrantes sur cette partie du littoral. Mais, elles se situent dans la commune de Yeumbeul Nord et juste après le goudron qui sépare cette commune de la ville de Guédiawaye.
DES LOTISSEMENTS CONTROVERSES DANS LA COMMUNE DE YEUMBEUL NORD
C’est plusieurs hectares qui sont ainsi délimités. Ils serviraient, selon des personnes trouvées sur place, à des logements sociaux. Des affirmations qui ne les ont pas convaincus. «D’après les informations que nous avons reçues, ils vont servir à recaser des sinistrés de la banlieue ; mais j’en doute fort», soutient Amadou, un jeune homme rencontré non loin de là et qui faisait son sport. Son scepticisme, il le fonde sur la surveillance accrue dont le site fait l’objet. «Des nervis sont recrutés pour veiller sur la sécurité. Personne ne s’en approche», indique-t-il. Cette mise en grade, nous en ferons les frais quelques minutes plus tard, de retour d’une ballade pour vérifier ce que cache un grand mur autour duquel s’activent des ouvriers. «Je venais à votre rencontre. Pourquoi êtes-vous entrés dans la zone sans prévenir», nous interpelle un gros bras chargé donc, comme l’a indiqué Amadou, de veiller sur ce qui est plus qu’une étendue de terre inhabitée mais qui est très bien délimitée. Sur place, on nous souffle des noms de célébrités qui ont des acquisitions sur le site qui seraient destinées, au départ, à des logements sociaux. En face de ce périmètre bien gardé se trouve l’entrepôt d’une grande filiale chinoise. Elle est en charge de la réalisation du Bus de rapid transit (BRT). Son lieu d’implantation actuel accueillera, selon certains ouvriers trouvés sur la place, une gare de ce projet de l’Etat. Reste maintenant à savoir si, au terme des travaux, les lieux serviront au BRT ou resteront entre les mains des firmes étrangères, comme c’est le cas sur la corniche ouest de Dakar.
A LA CITE APIX, DES SITES DE RECASEMENT VENDUS
Autre lieu, même problème. Sur les sites de recasement à Tivaouane Peul, le bradage des terres est une réalité. La commune est presque en chantier, avec de belles maisons qui sortent de la terre. Dans cette partie de la banlieue dakaroise, le mal est plus profond, estiment les populations. «On est en train de nous retirer nos maisons alors que c’est l’Etat même qui nous avait installés ici, dans la Cité Apix», martèle une mère de famille. Les populations ont été déplacées à la Cité Apix suite à la démolition de leurs maisons pour les besoins du prolongement de la VDN 3. «Ce qui se passe ici est plus grave que ce qui se passe sur le littoral. Ici, c’est des maisons des déplacés qu’on est en train de reprendre par force. Ça pose problème. C’est l’Etat qui avait déplacé les populations, ensuite il a construit un joyau comme la Cité Apix. Mais, on n’a pas régularisé les déplacés. Il n’y a pas de baux. C’est fait exprès et maintenant l’Etat est en train de vendre ces maisons», explique Macodou Fall du Collectif de défense des intérêts de Tivaouane Peul. Allant plus loin, il s’interroge sur les baux des promoteurs. «Je ne sais pas comment les gens font pour avoir les baux ; mais ils les détiennent. Ce qui est plus étonnant, ce sont les baux qui viennent des domaines», dira-t-il. A ces problèmes que rencontrent les populations, s’ajoutent la «vente des terrains destinés à des populations et la construction de maisons sur les extensions des égouts», déplore Macodou Fall.
LE REGNE DES GRAVATS
De la plage des Parcelles Assainies, en passant par les abords du mausolée de Seydina Issa Laye à Cambéréne que commence à surplomber le pont du prolongement de la VDN qui sépare le lieu de culte de la mer, le décor est identique. Des plages qui grouillent de monde, des adeptes du sport qui se livrent à leurs exercices matinales et des vendeuses de poissons qui étalent leurs produits à la quête d’une clientèle. Le décor, c’est également des tas de gravats qui pullulent un peu partout. Les amas de sable et de résidus de briques sont amassés d’un côté comme de l’autre de l’extension de la VDN. Parfois, ce sont aussi des immondices que viennent ramasser les camions de l’Unité de gestion et de coordination des déchets solides (UCG) qui sont visibles sur la route notamment à Guédiawaye. Des conducteurs de taxis ont aussi fait de cette partie du littoral un lieu de retrouvaille. Au milieu des laveurs de voitures, certains discutent tranquillement en attendant que leurs véhicules subissent un coup d’éclat ou d’être servis par les vendeurs de petit-déjeuner qui y tiennent leurs commerces / gargottes.
MALIKA ETOUFFE
De longs arbres ombragent la terre. Des gravats par ci, des ordures par-là, jonchent une partie de la surface. Quelques périmètres servent de pépinières de maraichage. Nous sommes à la bande des filaos à Malika. En ce samedi 13 juin, seuls les piaillements des oiseaux font l’ambiance du site. Au décor de la bande des filaos, il faut ajouter les arbres à terre. L’on imaginerait qu’un phénomène naturel serait à l’origine. Loin de là. Ils ont été abattus par des humains. Depuis quelques années, la bande des filaos qui contribue à «fixer les dunes de sable et améliorer la qualité de l’air», subit des agressions humaines. Les arbres sont coupés et les terrains vendus. «La bande des filaos n’est plus ce qu’il était, les années derrières. La bande a perdu son visage. On avait nos champs et on élevait nos bœufs ici car nous sommes des agriculteurs ; mais aujourd’hui, la zone est en train d’être transformée et ce, au détriment des populations.
L’Etat fait beaucoup de choses sans prendre langue avec les populations», raconte Libasse Sow, chef du village de Malika sur Mer qu’on a trouvé installé chez lui, sous un hangar, avec des membres de sa famille. Plus loin, le littoral étant une zone de contact entre la terre et la mer, constitue aujourd’hui un espace de plus en plus convoité. La déforestation s’accélère, laissant derrière elle des terrains nus et ouverts à tout vent. Ce qui n’est pas sans conséquences sur la population. «Les promoteurs se sont emparés de cette bande de terre, ce qui fait que les filaos sont détruits, ce qui donnera libre champ à l’océan», déplore une vieille dame. En plus de ce problème d’abattage d’arbres et de spoliation du foncier dans le quartier, les populations devront également faire face à l’avancée de la mer. Pour cause, l’érosion grignote la côte inexorablement. «Il n’y a plus de littoral encore moins de mer car il n’y a plus de ressources dans la mer», déplore Libasse Sow.
A BAMBILOR, DEPUTES ET CELEBRITES S’ACCAPARENT LES TERRES
A Bambilor aussi, les populations sont confrontées à un bradage de leurs terres, surtout celles réservées aux espaces verts. Elles pointent du doigt le maire de la commune qui attribue les terrains à des députés, des célébrités telles que les lutteurs, les chanteurs et les danseurs. Parmi leurs indignations, il y a le projet sur un site qui doit abriter un centre de santé pour la commune. «Alors que tout le monde est au courant de ce projet, on ne cesse d’entendre les célébrités chanter les louanges de notre maire qui leur a offert des terrains au détriment des ayants-droit que sont les populations vivant à Bambilor», regrette Abdoulaye Sylla du collectif «Sam Sama Gox».
Etalant encore sa colère, il déplore la «confiscation d’une autre superficie réservée à un projet pour les jeunes qui est le fruit d’une coopération très bénéfique liant Bambilor et une ville espagnole, Manresa». Pour mettre un terme au bradage du foncier, il interpelle l’Etat. «Nous sommes pour un audit du foncier et nous demandons au président de la République d’aider les populations à avoir la mainmise sur leurs terres, de prendre des mesures sur l’utilisation et la distribution arbitraire des terres à des soi-disant couverts par lui-même mais aussi de mettre sur pied un Comité de gestion composé des chefs de villages, des Asc, des autorités coutumières et municipales ainsi que le préfet», lance Abdoulaye Sylla.
LE LAC ROSE PERD SON AUTHENTICITE
A quelques kilomètres, non loin de Sangalkam, nous voilà au Lac Rose. D’habitude mouvementé, le lieu est presque déserté. Des pirogues accostées au rivage, aux abords sont stationnées des motos pour d’éventuels visiteurs qui se font désirer. Des jeunes, portant chacun un masque en cette période de pandémie de Covid-19, les attendent impatiemment, sous un hangar. A côté, des vendeurs d’objets d’arts s’ajoutent au décor ainsi qu’un terminus de bus en face. Au Lac Rose, il n’y pas que de l’eau. Des constructions qui poussent de partout entourent le lac. On y trouve des maisons, des réceptifs hôteliers ou encore des restaurants. Lorsqu’on emprunte une piste sablonneuse de l’autre côté du lac, on voit de nombreux chantiers en cours avec les ouvriers qui poursuivent leurs activités. Mais le plus frappant, ce sont ces camions qui chargent le sable des dunes. Les populations accusent la société SOCABEG (Société d’aménagement de bâtiments et d’études générales), déjà promotrice d’une cité à Tivaouane Peulh. «Ce sont les filaos qui étaient plantés ici pour protéger le lac, depuis très longtemps, qu’on est en train de détruire. Mais aujourd’- hui, la SOCABEG a installé des piquets alors que le site est une zone protégée», dénoncent les populations de Niaga Wolof et de Niaga Peul. Elles ne comptent pas baisser les bras pour protéger leur environnement. Toutes ces agressions ont fait perdre au lac sa couleur rose qui faisait courir les touristes. A notre passage, le samedi 13 juin, la couleur du lac n’avait rien de rose. Elle était pâle. L’humidité et les herbes et champignons verts qui poussent tout autour, lui ont fait perdre sa splendeur.
LUTTE CONTRE LA SPOLIATION DU LITTORAL : Les organisations de défense des droits humains engagent l’Etat
La spoliation du littoral de la région de Dakar inquiète la Ligue Sénégalaise des Droits Humains (Lsdh), la Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (Raddho) et Amnesty International Sénégal (AI Sénégal). Dans un communiqué conjoint rendu public, ces organisations de défense des droits de l’homme appellent à «l’adoption sans délais d’une loi consacrée à la gestion et à la protection du littoral que les acteurs ne cessent de demander depuis 2014», et à un «audit de tous les bâtiments implantés sur le littoral du Sénégal, en commençant par la région de Dakar». Non sans demander au Procureur de la République «d’ouvrir immédiatement une enquête aux fins d’identifier toutes les personnes impliquées dans des actes illégaux d’accaparement des terres du littoral afin qu’ils répondent de leurs actes devant la justice». Aussi exhortent-elles «l’Etat à renforcer sa politique de protection de l’environnement, de conservation et de gestion rationnelle des ressources des plages, des monuments historiques de notre patrimoine national par la mise en place d’une brigade spéciale pour mieux surveiller le littoral». Pour cause, selon ces organisations, la «Constitution adoptée par référendum en 2016 a consacré la souveraineté des populations sur les ressources naturelles et foncières, leur droit à un environnement sain».
La Lsdh, la Raddho et AI Sénégal se disent également «préoccupées par le déclassement abusif des terres du littoral, domaine public maritime, bien commun inaliénable du peuple sénégalais, et leur attribution à des personnes physiques et morales privées». Les défenseurs des droits de l’homme dénoncent la «prolifération d’édifices privés sur la corniche qui ont gravement dégradé l’environnement et le cadre de vie dans la capitale Dakar notamment et la récente tentative de construction d’un hôtel sur les flancs de la colline qui abrite le phare des mamelles constitue une agression intolérable contre notre patrimoine national», lit-on dans le document.
«S’IL AVAIT UNE PROTECTION POLITIQUE, BOUGAZELLI N’AURAIT PAS ETE EN PRISON»
Le ministre de la Justice, Garde des sceaux prend le contre-pied de ceux qui soutiennent mordicus qu’il y a la main de l’exécutif dans la libération provisoire du député de l’Alliance pour la République
Le ministre de la Justice, Garde des sceaux prend le contre-pied de ceux qui soutiennent mordicus qu’il y a la main de l’exécutif dans la libération provisoire du député de l’Alliance pour la République (Apr), Seydina Fall Bougazelli, incarcéré dans une affaire de faux billets de banque. Invité de l’émission “Jury du dimanche“ de la radio privée Iradio hier, dimanche 14 juin, Me Malick Sall soutient que «si Bougazelli avait une protection judiciaire, une protection politique, il n’aurait pas été en prison.
Et, vous savez combien de demandes de liberté provisoire Bougazelli a dû présenter avant en fin de compte d’obtenir une liberté provisoire ? Plus d’une vingtaine de demandes qui ont été rejetées. Parfois, il y a de l’amalgame».
Le ministre de la Justice, Garde des sceaux s’est en outre offusqué de la démarche de certains avocats. Il explique que tous les praticiens du droit savent que quand un prévenu est placé sous mandat de dépôt, une demande de Liberté provisoire n’est pas recevable tant que cette personne n’a pas été entendue sur le fond par le juge. Ce que «le justiciable lamda ne peut pas savoir», a-t-il admis.
Par contre, il n’a pas aimé le comportement de certaines robes noires, qui en voulant certainement «faire le buzz, s’empressent le jour même où la personne a été mise sous mandat de dépôt, de déposer une demande de liberté provisoire. Alors qu’ils savent très bien que cette demande n’est pas recevable».
Se prononçant, par ailleurs, sur le procès de l’ex-patron de l’athlétisme mondial, Lamine Diack, dont l’audience reprend ce lundi 15 juin, en France, dans une affaire de supposée corruption visant à couvrir des cas de dopage d’athlètes russes, Me Sall informe que l’Etat du Sénégal a apporté toute l’assistance nécessaire à M. Diack. Selon lui, «tout ce que l’Etat du Sénégal peut faire, c’est par le canal de son consulat, c’est-à-dire apporter une assistance morale».
ABDOULAYE DIEYE RECADRE MACKY ET SON MINISTRE
Recadrant ainsi le président Sall et son ministre Fofana, il a rappelé que la commission avait proposé au contraire «le maintien du domaine national comme élément du système foncier avec des propositions pour améliorer».
La Commission nationale de réforme foncière, dirigée par le Professeur Moustapha Sourang, n’a jamais proposé le transfert du droit d’accorder des baux aux collectivités locales, mais au contraire le maintien du domaine national comme élément du système foncier avec des propositions pour améliorer. Cette précision est de l’Enseignant chercheur à la Faculté de Droit de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad), Abdoulaye Dièye, lors de l’émission Objection de la radio Sud Fm d’hier, dimanche 14 juin.
La sortie du ministre de l’Urbanisme, Abdou Karim Fofana, justifiant le refus du chef de l’Etat, Macky Sall, de valider les propositions faites par l’équipe du Professeur Moustapha Sourang pour les réformes foncières, par la proposition faite par celle-ci, à savoir de transférer le droit d’accorder des baux aux collectivités locales, a fait sortir de sa réserve un ancien membre de ladite commission.
Invité de l’émission Objection de la radio privée Sud Fm d’hier, dimanche 14 juin, l’Enseignant chercheur à la Faculté de Droit de l’Ucad, Abdoulaye Dièye, trouve que c’est un problème que ledit ministre répète les propos tenus par son mentor, le 20 novembre 2017, lors du Conseil présidentiel. Des propos qu’il trouve «graves» dans la mesure où la Commission nationale des réformes foncières «n’a jamais proposé cela». «C’est pourquoi, en déduit-il, je maintiens ce que j’avais dit, soit il (Macky Sall) a mal compris, soit on lui a fait un mauvais compte-rendu».
Recadrant ainsi le président Sall et son ministre Fofana, il a rappelé que la commission avait proposé au contraire «le maintien du domaine national comme élément du système foncier avec des propositions pour améliorer». Tout en rappelant que ce sont les collectivités locales qui administrent les terres dans la zone des terroirs et qu’il y a des dépendances qui leur sont confiées, sans oublier les autorisations de construire, le Professeur Dieye indique que «nous avons demandé qu’il y ait des encadrements parce que nous sommes conscients des abus qu’il y a par rapport aux collectivités locales».
Concernant le statu quo noté dans les problèmes que connait le foncier sénégalais, le professeur Abdoulaye Dieye trouve qu’il y a un manque de volonté politique, depuis 1964. A son avis, le président Senghor n’avait pas mis les moyens qu’il fallait pour l’applicabilité de la loi, à savoir les décrets qu’il fallait, tout comme les arrêtés nécessaires. Il dira aussi que sous Diouf, c’était la même chose, dans la mesure où il y avait des scénarii et que même le président lui-même avait tenu un discours en 1998 au Conseil économique et social, sans suite.
Poursuivant, il rappellera qu’en 2000, le président Wade avait bénéficié de beaucoup de propositions parfois concrètes, mais que nenni. Quid du président Macky Sall ? Sur ce point, il informe que la commission dirigée par le professeur Sourang était surprise de voir le président dire, le 20 novembre 2017 : «je ne peux pas valider les propositions de la commission parce que ce qu’ils me proposent est inacceptable. Ils proposent que le droit d’accorder des baux soit transféré aux collectivités local0es». Cela, alors que le 20 avril 2017, lorsque la commission lui remettait le rapport, «il était très content disant qu’il sait que nous avons bien travaillé avec une démarche inclusive».
Pis, regrette-t-t-il, le 26 mai, le président Sall dissout la commission. Mais, il reste convaincu que le travail abattu par la Commission nationale des réformes foncières pouvait servir à procéder aux réformes nécessaires, dans la mesure où le travail avait été fait de manière inclusive.