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30 septembre 2025
LE CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L'ONU S'ESSAIE, DIFFICILEMENT, À LA VISIOCONFÉRENCE
La Russie refuse jusqu'à aujourd'hui que des votes se déroulent de manière "virtuelle" et réclame des sessions "physiques" au siège de l'ONU que le secrétaire général, Antonio Guterres, a gardé ouvert en dépit de la pandémie de coronavirus
Le Conseil de sécurité de l'ONU a tenu mardi, pour la première fois de son histoire, une visioconférence pour une réunion informelle sur la République démocratique du Congo, marquée selon des diplomates par plusieurs difficultés techniques. "C'est un peu artisanal, on va encore tâtonner mais on va y arriver", veut croire sous couvert d'anonymat l'un de ces diplomates. "Il vaut mieux travailler à minima que pas du tout", confie-t-il à l'AFP, en regrettant que le Conseil de sécurité, sous présidence chinoise en mars, n'ait pas été plus actif depuis sa dernière réunion au siège de l'ONU le 12 mars.
La réunion, qui devait servir de "test", selon une source diplomatique, n'avait pas été mise à l'agenda officiel du Conseil de sécurité. Elle s'est déroulée sans accès pour les médias avec des ambassadeurs ou des adjoints confinés chez eux devant leur écran d'ordinateur. Selon des diplomates, la réunion a duré au total plus de quatre heures, y compris la discussion qui a suivi la session congolaise sur l'organisation de la suite du travail du Conseil. En cause notamment, des interruptions de séance dues à divers incidents, allant de la déconnexion de certains à des problèmes d'alimentation électrique. Sur une image diffusée sur Twitter, la Tunisie est le seul pays non représenté par un diplomate. "Leur connexion a été coupée un très court moment", précise à l'AFP un participant.
Si le Conseil de sécurité a l'habitude d'entendre des intervenants par vidéo, en direct du pays où ils sont affectés, une telle réunion par vidéo pour l'ensemble de ses 15 membres "ne s'est jamais produite dans son histoire", relève un spécialiste de l'Organisation.Toutes les interventions se sont déroulées en anglais, favorisant les pays anglo-saxons, le recours au chinois, au russe, à l'arabe, à l'espagnol ou au français, les cinq autres langues officielles à l'ONU, n'étant pas possible en raison d'impossibilités techniques.
La Russie refuse jusqu'à aujourd'hui que des votes se déroulent de manière "virtuelle" et réclame des sessions "physiques" au siège de l'ONU que le secrétaire général, Antonio Guterres, a gardé ouvert en dépit de la pandémie de coronavirus.
A l'initiative de la France, un communiqué sur la RDCongo, ayant obtenu l'assentiment des 15 membres du Conseil, a été publié après la réunion. Il souligne leur "inquiétude face à l'instabilité continue dans l'est du pays" et à la "situation humanitaire, notamment à cause de l'épidémie de rougeole actuelle".
LA FRANCE DÉPLORE DES ÉLECTIONS NON "CRÉDIBLES" EN GUINÉE
Paris "condamne les actes de violence qui ont entraîné la mort de plusieurs Guinéens" et "appelle tous les acteurs guinéens, quels qu'ils soient, à la responsabilité et à la plus grande retenue"
La France a estimé mardi que le référendum constitutionnel et les élections législatives organisées dimanche en Guinée n'étaient "pas crédibles" et condamné les violences qui ont suivi. "La France suit avec préoccupation la situation en Guinée, après l'organisation du scrutin", a déclaré la porte-parole du ministère des Affaires étrangères. "Le caractère non inclusif de ces élections et non consensuel du fichier électoral, ainsi que le rôle joué par des éléments des forces de sécurité et de défense excédant la simple sécurisation du processus, n'ont pas permis la tenue d'élections crédibles et dont le résultat puisse être consensuel", a-t-elle ajouté. Paris "condamne les actes de violence qui ont entraîné la mort de plusieurs Guinéens" et "appelle tous les acteurs guinéens, quels qu'ils soient, à la responsabilité et à la plus grande retenue", a-t-elle poursuivi.
Après des mois de tensions qui avaient déjà coûté la vie à au moins 32 civils et un gendarme, le président Alpha Condé a décidé de tenir le référendum et de passer outre aux protestations de l'opposition, qui l'accusent de vouloir briguer un troisième mandat.Au moins 14 personnes ont été tuées dans les violences qui ont entaché le vote à travers le pays, selon l'opposition. Les autorités parlent de six morts, dont deux dues à un "accident" et un problème de santé.
par Nioxor Tine
L’ÉTAT D’URGENCE SEUL NE FERA PAS DE MIRACLE !
L’usage de moyens de coercition pourrait signifier l’existence de gaps dans le processus communicationnel, qui doit s’efforcer de rendre des connaissances scientifiques complexes accessibles à nos populations encore largement analphabètes
Trois semaines, jour pour jour, après la déclaration du 1er cas de COVID-19 dans notre pays, le président de la République a annoncé l’instauration de l’état d’urgence, à compter de ce 23 mars à minuit. Il s’agirait, selon lui, de relever le niveau de la riposte face à la progression inquiétante de la maladie. Les autorités devraient plus le comprendre comme un signal fort de leur engagement à contenir l’épidémie, que comme un rouleau compresseur répressif.
Il faut noter, en effet, que cet état d’urgence, dont les fondements se trouvent dans la lutte contre la pandémie au COVID-19, intervient dans le contexte d’une gouvernance d’exception, en cours dans notre pays depuis quelques années, caractérisée par des violations abusives des libertés publiques.
Il est important, à ce stade, de préciser qu’aucune loi d’exception, ni aucun consensus national, ne sauraient empêcher le contrôle citoyen aussi bien sur la gestion de la pandémie en cours que sur tous les autres forfaits et délits auxquels certains membres de notre classe politique nous ont habitués (détournements de deniers publics, accaparement des terres...).
L’allocution du chef de l’État avait un goût d’inachevé, dans la mesure où elle a occulté le confinement général, qui était attendu comme mesure-phare, ayant pour corollaire la réduction des activités économiques aux secteurs les plus essentiels. Il semble malheureusement difficilement réalisable, dans des pays comme les nôtres, dont les économies extraverties sont placées sous la tutelle d’officines financières internationales, qui promeuvent des recettes ultra-libérales et antisociales.
Au-delà de l’état d’urgence se pose la question de la gestion même de la pandémie. Et là, on ne peut manquer de ressentir la désagréable impression que les briefings quotidiens du cabinet du ministre en charge de la Santé sont en décalage avec la réalité de la propagation du virus dans notre pays.
Le nombre heureusement encore faible de cas communautaires et la prépondérance de cas importés et de cas contacts n’est-elle pas en contradiction avec l’indiscipline constatée de nos compatriotes, qui ne se conformeraient pas suffisamment aux directives des techniciens du ministère en charge de la Santé ? Les quelques dizaines de tests réalisés quotidiennement suffisent-ils pour avoir une vue d’ensemble de la situation nationale ?
Heureusement que l’Institut de Recherche en Santé de Surveillance Épidémiologique et de Formation (IRESSEF) a été retenu comme second laboratoire, après celui de l’Institut Pasteur, pour la réalisation des tests de dépistage. Il faudrait aller plus loin et décentraliser aussi bien cette activité de dépistage que celle de prise en charge des patients, si possible, dans toutes les régions de notre pays.
Il urge, dans ce cadre, de faire appel à l’expertise de pays comme la Chine et Cuba et d’acquérir les équipements indispensables à la prise en charge optimale des cas graves nécessitant une réanimation.
Une autre question fondamentale qui mérite une réponse claire de la part de nos décideurs est celle de savoir dans quelle perspective s’inscrit cet état d’urgence sans confinement.
S’agit-il d’une stratégie d’atténuation, qui vise à ralentir l’épidémie sans prétendre l‘arrêter ? Il s'agit de retarder le pic de demande de soins tout en protégeant les personnes les plus à risque de faire une forme sévère de la maladie. Dans ce cas de figure qui pose des problèmes éthiques et s’accompagne souvent d’une forte mortalité, la distanciation sociale ne devrait concerner que les personnes âgées ou d’autres plus à risque de faire une forme sévère de la maladie.
Ou alors cherche-t-on à faire une politique de suppression, qui essaie de réduire le nombre de cas à un faible niveau, tout en essayant de l'y maintenir de manière durable ? Cette option difficile à réaliser dans nos pays à revenus faibles ou intermédiaires présuppose un confinement pour toute la population et présente l’inconvénient de devoir être maintenue jusqu’à la découverte du vaccin. Cette politique de suppression appliquée, avec succès, en Chine et en Corée du Sud est onéreuse et expose à des ré-infestations, à partir de voyageurs étrangers.
L’instauration de l’état d’urgence traduit, quelque part, l’échec de la communication sur les risques et l’engagement communautaire (RCCE), supposée préserver les individus d’éventuelles infections et enseigner aux communautés les attitudes correctes pour empêcher la propagation de l’agent pathogène.
C’est ainsi qu’il faut regretter les mouvements d’humeur à Touba et Yoff contre les arrêtés interdisant les rassemblements durant les prières du Vendredi. Et ce, d’autant que les autorités religieuses, toutes obédiences confondues, avaient accepté de surseoir à de grandes manifestations nationales comme le Kazu Rajab, la ziarra de Médina Gounass, l’Appel des layènes...etc. prévues, en ce mois de Mars.
Il est clair que s’agissant des nouvelles maladies émergentes, dont la coronavirose due au COVID-19, pour lesquelles il n’y a ni vaccin ni médicament efficace, la communication joue un rôle capital. Il s’agit de faire prendre conscience aux individus et aux communautés des risques et de les responsabiliser pleinement pour les maîtriser.
Une bonne communication devrait permettre aux citoyens de garder le cap face à la quantité astronomique d’informations qui les submergent, d’avoir confiance dans les actions gouvernementales destinées à enrayer l’épidémie et de suivre correctement les mesures édictées par le système sanitaire.
A contrario, une mauvaise communication pourrait nuire à la réputation du système sanitaire ou entamer sérieusement la confiance que les populations devraient lui témoigner. Elle peut également avoir des répercussions économiques et même entraîner des pertes en vies humaines.
L’usage de moyens de coercition pourrait donc signifier l’existence de gaps dans le processus communicationnel, qui doit s’efforcer de rendre des connaissances scientifiques complexes accessibles à nos populations encore largement analphabètes.
L’épidémie de la maladie à virus Ebola en Afrique de l’Ouest d’il y a six ans a suffisamment montré l’importance de s’appuyer sur la participation communautaire, afin d’impliquer les communautés dans la riposte, par le biais d’interventions dont elles s’approprient.
Les larges concertations en cours pour conjurer les risques de calamité publique constituent un moment propice pour remettre la vie démocratique de la Nation à l’endroit et préparer de manière optimale l’ère post-COVID-19.
par Mamadou Kane
LA FIN D’UN MONDE N’EST PAS LA FIN DU MONDE !
Le virus couronné fait la ronde à la seconde. Que m’accompagne la guitare du griot. Le soir dans Dakar au rythme d’un duo. Baaba Maal et Mansour les voix sublimes. Nature humaine-animale en plein rythme
Plus froids que la glace quand le soleil s’éteindra
Plus chauds que l’or fondu quand l’enfer surgira
Louons, Le Maître au ciel paternel
Qui embrasse la terre maternelle
À nourrir les peuples fraternels
De la Mecque Jérusalem au Vatican
Les saints sereins entendent un chant
La fin d’un monde n’est pas la fin du monde !
CRÉER LA MÉDINA A COÛTÉ 1.099.607 FRANCS EN 1914
Après la peste de 1914 au Sénégal, après plus de 1.600 morts à Dakar, on s'est décidé à créé un "village de ségrégation" qui devait s'appeler ...Ponty Ville
Petit rappel historique : les épidémies se suivent et se ressemblent presque...
Après la peste de 1914 au Sénégal, après plus de 1.600 morts à Dakar, on s'est décidé à créé un "village de ségrégation" qui devait s'appeler ...Ponty Ville. Finalement, après les rebuffades des indigènes et tout le tralala pour le leur faire avaler, il a fallu qu'El Hadj Malick Sy intervienne pour calmer tout ce beau monde. Le village, qui devait être implanté dans le précarré des ...chacals, Tilène pour les affranchis, se dénommerait Médina. Ce déménagement aura coûté à l'administration coloniale la colossale somme de 1.099.607 francs en tout. dont "46 % (513.054 francs) d'indemnités pour destruction ou déplacement de baraques, paillotes et mobiliers divers". Les 23 % (259.816 francs) auraient été consacrés à "la construction du village de ségrégation".
On ne retiendra pas les leçons de l'histoire après les indépendances. Mais après cette tragédie de 1914, "la peste tira l'administration de sa torpeur et mit au premier plan de ses objectifs, les problèmes de la salubrité urbaine et de la lutte préventive contre les endémo-épidémies, en même temps d'elle raffermit dans leurs positions, les partisans de la ségrégation résidentielle entre noirs et blancs".
MANU DIBANGO, UN SAX' ENTRE L'EUROPE ET L'AFRIQUE
Retour sur le parcours de cet homme que rien ne prédestinait à une carrière d'artiste.Encore moins à être repris par Beyoncé ou Rihanna
"Bâtisseur de ponts entre l'Occident et l'Afrique": voilà comment se décrivait le saxophoniste Manu Dibango, première personnalité mondiale morte à 86 ans des suites d'une contamination au coronavirus, figure de l'afro-jazz devenu star avec son hit "Soul Makossa.
"J'ai l'harmonie des Bach et des Haendel dans l'oreille avec les paroles camerounaises.C'est une richesse de pouvoir avoir au minimum deux possibilités.Dans la vie, je préfère être stéréo que mono", racontait-il à l'AFP en août 2019, ponctuant ses réponses de son rire tonitruant et communicatif.
"Son héritage, immense, va rester, sa créativité était géniale, il faisait danser les gens, avec une efficacité redoutable", a commenté auprès de l'AFP, Martin Meissonnier, DJ et producteur historique des musiques du monde, "anéanti par son décès".
Le chanteur Youssou Ndour a twitté sa "tristesse": "Tu as été un grand frère, une fierté pour le Cameroun, et pour l'Afrique toute entière"."Le monde de la musique perd l'une de ses légendes", a également regretté sur les réseaux sociaux le ministre de la Culture français Franck Riester.
Retour sur le parcours de cet homme que rien ne prédestinait à une carrière d'artiste.Encore moins à être repris par Beyoncé ou Rihanna.
Emmanuel N'Djoké Dibango est né le 12 décembre 1933 à Douala (Cameroun), dans une famille protestante très stricte."Mon oncle paternel jouait de l'harmonium, ma mère dirigeait la chorale.Je suis un enfant élevé dans les +Alléluia+.Ça n'empêche que je suis africain, camerounais et tout ça", confiait encore cette haute silhouette au crâne glabre à l'AFP.Son père, fonctionnaire, l'envoie en France à l'âge de 15 ans, dans l'espoir d'en faire un ingénieur ou un médecin.
- Trois kilos de café -
Après 21 jours de bateau, Manu Dibango rejoint Marseille, puis Saint-Calais dans la Sarthe.Dans ses bagages, "trois kilos de café" -- denrée rare dans l'immédiat après-guerre et titre de son autobiographie --, pour payer sa famille d'accueil.Puis il étudie à Chartres, où il fait ses premiers pas musicaux à la mandoline et au piano.
Dans cet univers blanc, l'adolescent qui, de son propre aveu, "ne connaissait pas la culture africaine", s'identifie aux vedettes afro-américaines de l'époque.Count Basie, Duke Ellington, Charlie Parker deviennent ses "héros".
"Papa Manu" découvre le saxophone lors d'une colonie de vacances, traîne dans le Saint-Germain-des-Près de Boris Vian et finit par échouer à la seconde partie de son baccalauréat. Son père, mécontent, lui coupe les vivres en 1956.Il part alors pour Bruxelles, où il court le cachet, jouant de la variété."A mon époque, il fallait faire des cabarets, des bals, des cirques.Jouer avec un accordéoniste comme André Verchuren assurait quelques dates", racontait-il.
Son séjour belge est marqué par deux rencontres fondatrices: la blonde Marie-Josée, dite "Coco", qui devient sa femme, et Joseph Kabasélé, chef d'orchestre de l'African Jazz.Dans l'effervescence des indépendances, le musicien congolais lui ouvre les portes de l'Afrique.
Manu Dibango le suit à Léopoldville (ancien nom de Kinshasa, ndlr) où il lance la mode du twist en 1962, puis ouvre une boîte au Cameroun.
- Procès contre Michael Jackson -
Trois ans plus tard, il est de retour en France, sans le sou.Il devient pianiste de rock pour Dick Rivers, organiste puis chef d'orchestre pour Nino Ferrer.
En 1972, on lui demande de composer l'hymne de la Coupe d'Afrique des nations de football, qui doit se tenir au Cameroun.Sur la face B du 45-tours, il enregistre "Soul Makossa". Des DJs new-yorkais s'entichent de ce rythme syncopé.Une autre vie commence.
Le saxophoniste part jouer au théâtre Apollo, temple de la musique afro-américaine à Harlem, se métisse encore un peu plus en tournant en Amérique du sud.
En 1982, vient une autre forme de consécration."Soul Makossa" est samplé par Michael Jackson dans son album "Thriller"...sans son autorisation.Manu Dibango intente le premier d'une longue série de procès pour plagiat, qui se solde par un arrangement financier.Mais la victoire est ailleurs: le musicien est devenu une référence mondiale de la world music.
"MANU DIBANGO A CRÉÉ DES PONTS, IL A FAIT EXISTER L’AFRIQUE BIEN AVANT LA WORLD MUSIC"
Au micro d'Aissa Thiam d'Africa radio, l'artiste béninoise Angélique Kidjo, très touchée, a rendu hommage à la légende de la musique décédée ce mardi
Au micro d'Aissa Thiam, Angélique Kidjo, très touchée, a rendu hommage à Manu Dibango
"J’ai vu Manu pour la dernière fois le 7 janvier dernier. On préparait le concert des 60 ans des Indépendances Africaines de Carnegie Hall. Chez lui à la maison à Champigny. On a fait beaucoup de musique, nous avons beaucoup ri, je me suis rendue compte à quel point il avait contribué à la musique mondiale, il avait joué avec les plus grands dans le monde. Il m’a complètement époustouflé. C’est pour ça qu’il était Manu.
Par son talent, il a créé des ponts, il a fait parler, exister l’Afrique bien avant la World Music. Il a produit les artistes africains comme Bella Bellow et moi, il était là au début des années 90, quand j’ai signé avec Island Records, il a été le premier que j’ai appelé pour jouer sur l’album avec Ray Lema.
Pour moi, c’est un géant de la musique, c’est un baobab. C’est une perte énorme pour moi et pour le Continent. Quand mon père est décédé, je pleurais, il était là et il m’avait dit : « ton père n’est pas parti, il est avec toi ». Pour moi Manu n’est pas parti. Il est et restera toujours avec moi.
Aujourd’hui je pleure..."
"MANU DIBANGO A MARQUÉ DE SON EMPREINTE LA MUSIQUE"
Le musicien A'Salfo Traoré de Magic Système a rendu hommage sur les ondes d'Africa radio au saxophoniste camerounais, décédé ce mardi à Paris
A'Salfo Traoré a aussi rendu hommage à Manu Dibango dans le Journal des auditeurs de Stéphanie Hartmann.
Le leader des Magic System a salué, la carrière et l'Homme.
"Je l’ai découvert, petit, quand il était à la tête de l’orchestre de la Radio Télévision Ivoirienne. Manu Dibango a toujours su adapter son saxo à toutes les époques. Je me souviens avoir joué avec lui pour les 15 ans d’Africa N°1 au Casino de Paris. Il est rentré dans 1er Gaou avec une facilité incroyable. Manu n’a jamais vieilli, dans son âme et dans son corps. Il a fallu cette fichue maladie pour nous l’enlever. C’est quelqu’un qui a toujours été de bonne humeur, toujours positif. Ma dernière rencontre avec Manu c’était pour le lancement d’Africa Radio à Abidjan en juin 2019. Il était là en pleine forme, avec des projets plein la tête et son rire si célèbre.
"Manu fait partie de ceux qui ont emmené la musique africaine vers les sommets. Quand j’écoute ses émissions avec Robert Brazza j’apprends à chaque fois quelque chose. C’était une encyclopédie de la musique africaine..."
par Ibrahima Thioye
OUI POUR LE CONFINEMENT TOTAL COUPLÉ À UN DÉPISTAGE MASSIF !
EXCLUSIF SENEPLUS - Il vaut mieux ériger l’organisation nécessaire, en faisant appel à toutes les forces vives de la nation, plutôt que de se retrouver dans un schéma où notre plateau médical risque d’être mis complètement à genoux
Au Sénégal, nous avons une fâcheuse habitude de nous mêler de tout. Je m’étais engagé dans la voie du mutisme, estimant que la bonne conduite devant cette pandémie est de laisser la parole aux décideurs et aux experts. Je salue toutes les bonnes initiatives qui ont été prises jusqu’ici, mais compte tenu de la gravité de la situation, je crois qu’il faut faire plus, en s’appuyant sur nos réalités socio-culturelles.
Comment aborder ce sujet sans tomber dans des polémiques inutiles, en étant constructif, pragmatique et ayant comme seul souci l’évitement du pire ? C’est l’exercice que je vais essayer de faire.
Le gros souci avec ce virus, c’est sa vitesse de propagation. Pour la réduire deux démarches sont actuellement utilisées : dépistage massif et confinement.
Le dépistage massif suivi d’une mise en quarantaine des personnes testées positives permet de ralentir la contagion. Il contribue à une meilleure maîtrise de la situation. La différence entre la situation de l’Allemagne et celle de la France est comme deux conducteurs dont l’un a un véhicule sans défaut, l’autre a un véhicule qui roule à 140 km/h alors que son tableau de bord lui indique 80 km/h. Il est plus exposé que celui qui a un tableau de bord fiable. C’est sûr que nous sommes dans la même situation que le France. J’espère que nos autorités sont en train de faire le maximum pour multiplier les capacités de dépistage.
L’idée de réduire sa stratégie au seul dépistage n’est pertinente qu’au début de l’infection (dans le contexte où la capacité de dépistage absorbe le flux du nombre de personnes infectées). Lorsque le virus s’est installé et qu’on ne maîtrise pas sa propagation, le bon sens recommande de le coupler au confinement.
Le confinement est la seconde mesure qui donne un coup de frein à la propagation du virus. Il s’agit juste d’observer 3 à 4 semaines de sur-place. Que donne le confinement sans dépistage massif ? Une vitesse de propagation réduite, mais pas à la hauteur des résultats obtenus avec le couplage.
Quel est l’obstacle majeur à l’organisation du confinement ? Tout de suite la question de la survie de plus de 80% de la population active se pose. Ils vivent au jour le jour. Je crois qu’il vaut mieux ériger l’organisation nécessaire, en faisant appel à toutes les forces vives de la nation, plutôt que de se retrouver dans un schéma où notre plateau médical risque d’être mis complètement à genoux. Ce serait une situation catastrophique que personne ne souhaite.
Quelles sont les mesures que le président doit ajouter à celles déjà prises ?
1 Confinement total à partir de jeudi 26 mars (par exemple pour donner à tout le monde le temps de s’organiser).
2 Seules les boutiques vendant les denrées de première nécessité et les pharmacies sont autorisées à ouvrir leur porte (à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles : voir la possibilité d’une meilleure distribution du pain, en évitant que les boulangeries deviennent des lieux de contamination -test sur une semaine avec l’appui d’une « milice populaire »- ; à défaut de cela, toutes les boulangeries seront fermées, la population n’a qu’à retourner au « fondé » ou au « sombi » pour un mois).
3 Des véhicules de transport en commun seront réquisitionnés pour le transport de ceux dont les prestations sont indispensables durant cette période (personnel de santé, personnel de sécurité, personnel des pharmacies, personnes qui s’occupent de la vente de denrées de première nécessité). Tous les flux de déplacements possibles sur ces chaînes de produits doivent être examinés minutieusement (en 48h ? oui, on fait en marchant et on corrige les erreurs).
4 Toutes les familles sont invitées à faire jouer la solidarité en prenant en interne les personnes dont la survie dépend de l’activité au jour le jour (taba – taba).
5 A défaut d’une possibilité de prise en charge, le quartier, le village et la mairie s’organisent pour fournir des bons (cela se fera via une organisation avec une plateforme téléphonique sans regroupement. Les militaires et les forces de l’ordre, appuyés éventuellement par une « milice populaire », seront mis à contribution pour aider l’organisation de la distribution). L’État est prêt à mobiliser 80 milliards. Cela doit être salué. Il faut aussi organiser un téléthon durant cette période pour compléter ce budget.
6 Tout regroupement de plus de 2 personnes est interdit.
7 Gel des factures d’eau et d’électricité.
8 Demander aux opérateurs téléphoniques et autres sociétés de service d’apporter leur contribution à cet « effort de guerre » durant ce mois de lutte contre le virus.
9 Dépêcher chez tous les principaux guides religieux (en particulier, les khalifes généraux et l’archevêque de Dakar) des émissaires qui leur expliquent la démarche. Dans ce combat contre le coronavirus, il faut en faire des alliés de premier plan, car leur voix est écoutée par les populations. Aucun moyen (canal, voie, pédagogie) ne doit être négligé pour avoir leur agrément dans cette lutte.
10 Entre jeudi 26 mars et samedi 28 mars, on demande aux forces de l’ordre d’utiliser la pédagogie pour sensibiliser ceux qui ne comprennent pas. A partir de dimanche 29 mars, on applique les mesures coercitives (amendes, etc.)
11 Adopter une démarche pragmatique par rapport aux thérapies en cours de test qui se sont montrées concluantes.
Ces mesures ne sont pas exhaustives. Je suis persuadé que d’autres devraient les compléter. Mais je crois que ce sont ce type de mesures draconiennes qui peuvent nous aider à aplanir cette maudite courbe. Il s’agit essentiellement de l’adéquation charge capacité, en tenant compte d’un effet retard. Il ne s’agit pas de raisonner de façon exclusive : « confinement » ou « dépistage massif ». Il faut plutôt utiliser ces capacités pour faire face à une charge. Le confinement ralentit la vitesse de propagation. Le dépistage à grande échelle, suivi d’une mise en quarantaine, constitue le second moyen qui réduit cette vitesse de propagation. Le confinement est la mesure délicate. Il vaut mieux la faire au bon moment, plutôt que la subir.
Elle n’exige que de la discipline et de la solidarité. Pour la première qualité, nous devons tous faire des efforts, mais pour ce qui est de la seconde, je crois qu’il sera facile de faire vibrer la fibre de la solidarité car elle est inscrite dans notre culture, même si l’urbanisation croissante l’entame de plus en plus
Nombreux sont ceux qui disent que l’épicentre de la maladie s’est déplacé de la Chine vers l’Europe et que le prochain centre de gravité sera l’Afrique. Levons-nous comme un seul homme pour démentir ces prédictions assez angoissantes. En étroite collaboration avec les pays voisins, nous démontrerons à la face du monde que nous avons des ressorts puissants pour faire face à ce vilain virus.
par Ada Pouye
INVENTER UNE RIPOSTE AFRICAINE AU COVID-19
EXCLUSIF SENEPLUS - Il faut s’appuyer sur les leviers culturels qui se ressemblent presque un peu partout en Afrique avec les leaders traditionnels, les communicateurs traditionnels, les guérisseurs traditionnels et les chasseurs
La progression de la propagation du Covid -19 entamée cette semaine en Afrique est assez préoccupante dans un contexte socio culturel où la dynamique sociale est une dynamique fortement communautaire avec une urbanisation dévoyée et une promiscuité sociale sans précèdent. Toute chose étant égale par ailleurs, l’Afrique se doit d’inventer une riposte singulière en prenant toute la mesure des dynamiques sociales , politiques et économiquesactuelles et entamer une rupture dans la prévention et la prise en charge holistique des personnes et des familles affectées. Il s’agit de tirer des leçons des pays qui ont pu juguler la pandémie avec des approches adaptées au contexte socio-politique des pays et de la discipline sociale, de civisme et de citoyenneté.
On constate ces dernières semaines avec l’évolution de la pandémie que l‘Afrique est dans l’œil du cyclone ?
Aujourd’hui après la Chine, et l’Europe qui est devenue l’épicentre du Covid-19, tout le monde s’interroge sur la capacité de l’Afrique à gérer la pandémie. Cette interrogation est d’autant plus justifiée que les faiblesses sont criardes au niveau des ressources humaines, du plateau technique, de l’accessibilité des services et des soins, du financement et de la gouvernance du système de santé. La vitesse de propagation du virus des épicentres à la périphérie est à la mesure de son attractivité économique et de la mobilité internationale constatées ces vingt dernières années. L’Afrique fait l’objet de toutes les convoitises de la géopolitique mondiale où la chine, la Russie, les Etats unis, l’Europe, le Canada , la Turquie, l’Inde et le Pakistan se disputent le pactole des marchés dans tous les secteurs. Paradoxalement, au moment ou tous les continents se préparent, l’Union Africaine et les Commissions africaines ne se prononcent même pas sur les stratégies africaines de riposte avec un fonds Africain pour l’offensive contre le Covid-19. Au niveau de la CEDEAO, la Commission dispose d’une institution importante à travers l’organisation ouest africaine de santé (OAS) qui observe un étrange (ou lourd) silence bavard qui traduit son manque d’ancrage sur l’épidémiologie ouest africaine.
L’Afrique totalise officiellement 1363 cas et 40 décès, dans des conditions différenciées pour la détection des cas réels. Tous les pays ne disposent pas des dispositifs de dépistage des cas de Covid-19. Rares sont les pays africains disposant de politiques de préparation de l’urgence sanitaire ou des catastrophes naturelles comme le Kenya qui avait connu une crise politique majeure qui avait justifié le développement d’une politique nationale de gestion des catastrophes. Il faut souligner que les frontières artificielles de l’Afrique héritées de la conférence de Berlin et son ouverture sur le monde font de l’Afrique une passoire de toutes les épidémies et des catastrophes naturelles. Avec l’Union africaine, et les 4 commissions économiques, l’Afrique dispose des mécanismes socio-culturels appropriés pour faire face à la pandémie. Le Centre Africain pour le contrôle et la prévention est une institution technique spécialisée de l’Union Africaine issu d’un traité adopté le 30 janvier. Il en est de même pour l’Organisation Ouest Africaine de Santé qui est une institution spécialisée de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en charge des questions de santé, l’Organisation Ouest Africaine de la Santé. Elle a été créée par protocole A/P2/7/87 du 9 juillet 1987 signé à Abuja par les Chefs d’Etat et de Gouvernement. L’OAS dispose aussi en son sein d’un centre Régional de la surveillance et du contrôle des maladies. Les mécanismes politiques, sociaux et scientifiques à travers les différentes sociétés savantes africaines dont celle qui nous concerne le plus avec la société africaine des pathologies infectieuses. A cela Il faut ajouter la cohérence du substrat socio-culturel des pays depuis l’Egypte en passant par l’Ethiopie jusqu’en Afrique de l’Ouest. Les tambours depuis la XIIe dynastie (vers 2500 avant J.-C.) ont traversé toute l’Afrique de l’Egypte à l’Ethiopie en passant par le Burundi et l’Ouganda où j’ai été impressionné par la ressemblance phonique avec les tambours de la Casamance. Il faut s’appuyer sur les leviers culturels qui se ressemblent presque un peu partout en Afrique avec les leaders traditionnels, les communicateurs traditionnels, les guérisseurs traditionnels et les chasseurs. L’Afrique dispose des leviers importants pour développer une riposte africaine qui corresponde a son ancrage avec les savoirs traditionnels et sa force de résilience sur laquelle les autres continents peuvent s’inspirer et non reproduire les mêmes modalités de riposte que les pays occidentaux. La riposte doit se centrer sur l’humain comme vecteur de la transcendance psycho-affective portée par le concept de filiation, d’affiliation et d’alliance.
Est-ce queles systèmes de santé sont suffisamment forts pour endiguer le Covid-19?
Les Etats africains essaient tant bien que mal de développer des plans, des fonds de riposte et ou des plans de contingence. Le Sénégal a particulièrement pris des mesures courageuses et salutaires pour contenir la pandémie sous le leadership du Président Macky Sall qui assure le commandement de la riposte au niveau national. Il faut regretter que l’engagement politique du Président de la République ait été brouillé pour ne pas dire parasité par la posture du Secrétaire Général du Gouvernement à Touba, privilégiant son appartenance à la confrérie plutôt qu’une position républicaine. Quel mauvais signal !
Mais au delà de ces mesures ponctuelles salutaires, nous devons nous interroger sur les politiques de santé héritées de la colonisation et après les plans d’ajustement structurels dans une perspective de préparation de tous les chocs qui vont se succéder avec l’impact des changements climatiques sur l’environnement et les mutations polysémiques.
La carte sanitaire du Sénégal en 2018 révèle la faiblesse de la couverture sanitaire avec 1380 postes de santé, 101 centres de santé, 10 hôpitaux régionaux, 12 hôpitaux nationaux. Nous avons 2 médecins pour 10 000 habitants au Sénégal, ce qui est largement en deçà des normes et standards de l’OMS (13 pour 10 000 habitants), 1 hôpital pour 495 578 habitants (Normes OMS, 1 hôpital pour 150 000 habitants). Maintenant au niveau de la spécialité et de l’expertise, le Sénégal ne compte pas plus de 50 infectiologues pour faire face à la pandémie. Tout ceci indique largement la vulnérabilité du système sanitaire pour faire face à la riposte du Covid- 19. A cela il faut ajouter le faible budget du Ministère de la Santé et de l’Action Sociale 191 714 747 125 FCFA en 2020, avec une baisse de 7 Milliards de Francs CFA par rapport à 2019. Il faut souligner que plus de 30% du budget est supporté par les partenaires techniques et financiers. «Il convient d’optimiser la fonctionnalité́ de la carte sanitaire ... en vue d’une plus grande équité, qui permette à chaque sénégalais(e), quel que soit son lieu de résidence, d’avoir accès à des soins rapides, de qualité et à un coût acceptable». Extraits du Communiqué du Conseil des Ministres du 13 novembre 2013,
Plus qu’une surprise, le Sénégal manque de stratégie de préparation à l’urgence sanitaire et nous sommes obligés de subir le virus avec les moyens du bord avec 4 unités de prise en charge et une faible capacité en termes de lits d’hospitalisation de confinement. Est-ce étonnant de voire le Sénégal occuper la 7ème place en Afrique pour le nombre de 86 cas positifs? Quelle est la réalité de la souveraineté sanitaire en termes de financement, de gouvernance et de qualité des ressources humaines ?
Quelles sont à partir de votre expérience dans la coordination humanitaire les approches qu’il faudrait privilégier, confinement général, état d’urgence sanitaire etc..?
Les leçons apprises dans les différentes crises humanitaires nous enseignent que les meilleures approches de la riposte doivent être graduelles et basées sur les communautés.
Le confinement général des populations serait une mesure suicidaire aussi bien sur le plan économico-politique et non applicable dans le contexte des pays pauvres très endettés que sur le plan même de la santé mentale. Les pays occidentaux et les régimes politiques autoritaires disposent d’un système comme disait le Président Obama pour se le permettre avec des politiques d’accompagnement du secteur privé et du secteur social.
Le tissu économique africain connait une fragilité telle que l’essentiel des revenus provient du secteur informel, qui est une économie de survie avec une forte pression démographique des jeunes faiblement éduqués ou diplômés chômeurs. Toute l’économie africaine est une économie de résilience. L’enquête régionale intégrée sur l’emploi et le secteur informel de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd), faite en 2017 a montré que 96,4% des emplois sont générés par le secteur informel contre 3,6% par le secteur formel. Le Sénégal et les pays africains en dehors de l’Afrique du sud et des pays a faible concentration de population ne peuvent pas appliquer un confinement général des populations.
La société sénégalaise à l’instar de beaucoup de pays africains est aujourd’hui à la croisée des chemins entre modernité et traditions, urbanité et ruralité, déchiré entre la société islamo-wolof et les conséquences désastreuses de la gestion politique de l’éducation dont nous héritons aujourd’hui. Les États Généraux de l’Éducation et de la Formation de 1981 qui avaient entamé le processus de sa réforme ont consacré la faillite de l’école sénégalaise .L’impact des politiques d’éducation impulsées par la Banque mondiale est un miroir de ce que nous sommes en train de vivre, une jeunesse laissée à elle-même sans aucune autre possibilité que de braver les océans ou de se réfugier dans le carcan de l’obscurantisme ambiant du salafisme tropicalisé que nous retrouvons dans certains quartiers et villages.
L’avènement de la cellule de crise sous la présidence du chef de l’Etat, et du Centre de Operations d’urgence Sanitaire et le Comité National de Gestion des Epidémies sont de bons mécanismes pour traduire la volonté politique de contenir le virus.
Cependant, il faut des plans graduels et séquentiels de riposte sur 15-21-30-60 jours et pouvoir monter à l’échelle avec des plans régionaux et départementaux de riposte. 5 régions sont présentement touchées par le Covid-19.
Le profil épidémiologique renseigne sur l’évolution du Covid -19 au Sénégal depuis la détection du premier cas le 26 Février 2020 avec une progression en pointe de 9 cas à 12 cas le Lundi 23 Mars. La particularité de la situation épidémiologique, c’est la pointe à Touba, l’extension du virus dans trois nouvelles régions et l’apparition des cas de transmission communautaire. La transmission communautaire du virus observée à Saint louis et Thiès doit faire l’objet d’investigations sérieuses pour éviter une duplication dans d’autres zones. Depuis le début de la pandémie, plus de 1000 cas contacts sont suivis et 969 contacts sont sortis du suivi selon le Coordonnateur des opérations d’urgence sanitaire Dr Abdoulaye Bousso. Il est établi au niveau des pays développés qu’un cas positif peut infecter 2,5 personnes, dans les pays africains des grandes familles polygames, les cas de contamination peuvent aller jusqu'à une vingtaine de personnes. Dans cette hypothèse haute, on devrait être à plus 3000 Contacts sans occulter ceux qui sont perdus de vue. Le problème majeur auquel nous devons faire face, c’est l’identification des contacts qui suppose une mobilisation d’une équipe intégrée de riposte composée d’un mobilisateur social issue de la communauté, d’un socio-anthropologue, d’un spécialiste de la communication pour le développement, d’un médecin, et d’un agent de sécurité. Une unité mobile de détection sous forme de test d'amplification des acides nucléiques (PCR) et une tente de quarantaine pour tous les cas suspects. Le dispositif d’accompagnement doit répondre aux normes socio-culturelles faisant du micro cerclage de toutes les maisons des cas contact en y associant l’imam, le prêtre ou le pasteur avec des précautions d’usage pour la protection des relais communautaires.
Quelles sont les modalités pratiques de l’approche de la riposte par palier ou la démarche boite à outils?
Nous sommes dans une phase où la communication pour le changement de comportement et le changement social est un élément essentiel pour éviter de verser dans la politisation de la riposte. Aujourd’hui nous assistons à une théâtralisation de la riposte et une guerre des rumeurs à qui mieux mieux. Personne n’est assez préparé pour faire face à une crise sanitaire aussi complexe et tous les moyens sont bons pour se ré-approprier des conduites à tenir ou réinterpréter les signes en fonction de ses acquis culturels et de son niveau d’éducation. Le fait nouveau dans cette crise, c’est l’irruption des médias sociaux qui portent et supportent les rumeurs et les fausses informations en ce concerne le Covid-19.
La riposte doit s’appuyer sur les évidences pour avoir des plans cohérents de réponse. A la lecture du Sitrep Numéro 5 du 20 Mars 2020, les informations suivantes se dégagent et qui sont conformes aux tendances mondiales à savoir que les hommes et les femmes âgées de 40 ans et plus sont les plus affectés par le virus tandis que pour la tranche d’âge 0-39 ans les femmes et filles sont les plus touchées par la pandémie. La distribution géographique de cas se fait comme suit: Huit districts sanitaires ont enregistré des cas: Dakar-Ouest (10cas), Dakar-Nord (3 cas), Dakar-Sud (2 cas), Dakar-Centre (1cas), Mbao (1 cas), Mbour (4 cas), Popenguine (1 cas) et Touba (25cas). L’autre information qui est importante c’est la non utilisation du numéro vert par les populations. A partir de ces informations, il est possible de pouvoir agir en connaissance de cause.
Il est important à ce stade d’avoir une approche graduelle de la prévention et de la prise en charge en s’appuyant sur le profil épidémiologique.
Le premier niveau est d’abord politique avec le chef de l’état et la cellule de crise qui fixe les orientations, prend les décisions qui facilitent l’environnement de la riposte notamment avec l’allocation de mille milliards de francs de fonds de riposte et de solidarité. L’état d’urgence et le couvre feu constituent une décision politique forte sur laquelle il est possible de bâtir pour réduire la propagation du virus. Je dois dire que l’état d’urgence quelque soit le motif me pose problème sur le plan moral parce que l’application la loi No 69-29 est un régime d’exception qui peut justifier tous les abus et les répressions et suspension des libertés (article 10 ….. autorités administratives pour assurer le contrôle de la presse, et des publications de toute nature ainsi que celui des émissions radiophoniques ou télévision, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales). J’aurais préféré que le Président parle d’état d’urgence sanitaire pour mieux qualifier la situation et ne pas nous ramener aux années sombres de notre histoire politique.
Le deuxième niveau est opérationnel avec la Coordination des opérations d’urgence sous l’impulsion du Ministère de la santé. Ce niveau semble conforter la médicalisation de la riposte au détriment d’une approche multi-sectorielle sous forme de comité interministériel d’urgence pour gérer la faisabilité politique des décisions du chef de l’état. Les agences des nations unies et les ONG sont des partenaires assez expérimentés pour apporter leur contribution dans la riposte.
Le troisième niveau est au niveau des communautés de base sans occulter les terroirs.
A ce niveau il faut une approche spécifique pour pénétrer ces communautés avec toutes les précautions de protection.
Une meilleure connaissance des normes sociales dominantes d’une société en transition socio- politique, culturelle et économique est une niche pour le dialogue et la participation communautaire.
Le quatrième niveau reste les liants sociaux et les médias
Toute la stratégie de communication pour le changement des comportements et le changement social doit reposer sur une stratégie multimédia et une stratégie de mobilisation sociale. La force de la riposte Ebola en Guinée résidait dans la dissémination des messages dans les radios communautaires y compris la recherche de contacts. Le Sénégal compte plus de 118 radios communautaires qui touchent tous les terroirs, doit former les animateurs dans la connaissance du Covid et accroître le développement des messages en communication de crise: ce serait un atout que le SNEIPS devrait utiliser pour élargir son auditoire.
Nous sommes en face de plusieurs types de vecteurs de transmission à savoir les porteurs sains, les cas positifs importés ou communautaires, et les contacts et la communauté. Chaque vecteur est en soi une cible de communication avec un message approprié qui puisse le toucher personnellement tout en intégrant son entourage. Dès le début de la pandémie, le message a porté sur les cas importés pour produire une forme de stigmatisation du Modu en oubliant dans le cycle de vie de toute personne, quand on tombe malade ou risque d’être malade, le réflexe c’est de rentrer et mourir chez soi. Le Modu Modu est en soi un pourvoyeur de ressources et en même temps il fait l’objet de jalousies de son voisinage. La communication du Ministère a contribué à jeter l’opprobre sur les immigrés. Les socio -anthropologues doivent jouer un rôle important pour juguler la pandémie au niveau communautaire, de même que les psychologues cliniciens pour entamer des approches adaptées sur le plan culturel et affectif. Le cas contact est souvent dans une phase de déni primaire sans comprendre le lien. C’est aussi à mettre sur le mode de communication choisi par le Ministère de la santé et de l’action sociale à travers un briefing journalier sur les chiffres et des cérémonies de remise de contribution financières télévisées. C’est très bien pour la transparence mais cela ne suffit pas pour mobiliser l’opinion.
Au delà de l’idée et de nos appréhensions sur les schémas de riposte et leur mise à l’échelle, des actions concrètes ci après doivent être engagées en urgence :
Adopter un programme de micro cerclage pour dire confinement sélectif des zones de résidence des cas positifs et ou des contacts dans les 5 régions.
Ensuite pour les 9 autres régions, définir des plans de préparation à l’urgence sanitaire en mobilisant toutes les ressources de la région en s’appuyant sur une cartographie communautaire des mouvements de populations.
Tous les marchés devraient faire l’objet d’une surveillance épidémiologique avec un dispositif de lavage des mains, un thermo-flashage et une unité mobile de dépistage.
Le transport en commun devra être régenté comme cela se fait pour éviter les contaminations communautaires
Tout le personnel de l’aéroport et des gares routières et ports devraient être identifiés, dépistés et placés en quarantaine humanisée.
Aujourd’hui, le Sénégal doit faire face à des changements importants dans notre mode de vie, notre manière d’être et la représentation que nous nous faisons de la vie en communauté. De toute évidence, toutes les actions doivent converger vers un maillage sociologique pour partager des messages appropriés aux communautés afin d’éradiquer le covid-19 dans un délai raisonnable.
Mettre en place des équipes communautaires de gestion des alertes et des rumeurs
Identifier toutes les localités susceptibles d’abriter des cas suspects de la maladie à virus
Mettre en place dans les localités à haut risque des unités mobiles de dépistage communautaires pour faciliter l’identification et le prise en charge des cas suspects ;
Identifier les cas suspects dans les ménages et sensibiliser sur l’importance de la notification de tous les cas de maladie en vue de permettre la détection des malades
Mettre en place un réseau de notification des contacts à base communautaire,
Ne pas laisser croire que les formations sanitaires qui devraient être des points de triage et de prise en charge primaire doivent être désertées par les populations par la peur de la contamination en milieu de soin,
Mettre en place une équipe de supervision intégrée et renforcée en vue d’intervenir de façon rapide et efficace aux alertes ;
Mettre en place un système de recherche active des cas suspects dans les établissements de soins publics et privés
Permettez-moi de conclure avec Platon «La vie, qui a en partage la tempérance, le courage, la sagesse, ou la santé, est plus agréable que celle où se trouvent l’intempérance, la lâcheté, la folie ou la maladie ».