SenePlus | La Une | l'actualité, sport, politique et plus au Sénégal
4 octobre 2025
POURQUOI LA FRANCE A-T-ELLE DU MAL À REGARDER EN FACE SON HISTOIRE COLONIALE ?
Macron a été le premier président à qualifier la colonisation de "crime contre l'humanité", plus de 60 ans après les guerres d'indépendance. Comment expliquer ces années de silence ? Entretien avec l' historienne Christelle Taraud
"Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte." Dans son Discours sur le colonialisme en 1950, l'écrivain et homme politique martiniquais Aimé Césaire dénonçait puissamment l'idéologie colonialiste européenne et accusait ses "maîtres" d'être incapables de regarder en face et de résoudre le "problème colonial" qu'ils avaient créé. Soixante-dix ans après cet écrit, après la fin des guerres d'indépendance, l'histoire de la colonisation française et les processus de décolonisation restent partiellement connus et étudiés.
Pourtant, les débats autour du passé colonial français se multiplient ces dernières années : appels à reconnaître les massacres et leurs victimes, restitution des œuvres d'art, déboulonnage de statues… Il faudra attendre 2017 pour qu'Emmanuel Macron soit le premier président français à qualifier la colonisation de "crime contre l'humanité" et à lancer, trois ans plus tard, une mission sur la mémoire de la colonisation et la guerre d'Algérie. Lors de son discours sur les "séparatismes", le 2 octobre dernier, il a évoqué les "traumatismes" du passé colonial, que la France n'a "toujours pas "réglés". Assiste-t-on à la fin d'un tabou ? Peut-on "réconcilier" les mémoires ? Franceinfo a interrogé Christelle Taraud, historienne spécialiste de la colonisation et des décolonisations. Elle a notamment publié Idées reçues sur la colonisation (Le Cavalier bleu, 2018).
Franceinfo : Tout d'abord, lorsque l'on parle de colonisation puis des décolonisations, de quelle période parle-t-on ?
Christelle Taraud : La question coloniale en Europe remonte à la période dite des "Grandes explorations" à partir du XVe siècle, lorsque les premiers empires, portugais et espagnol pour l'essentiel, ont commencé à se constituer en Afrique et en Amérique. Mais aujourd'hui, dans le débat public, les personnalités politiques, les chercheurs, se réfèrent assez rarement à ces empires, sauf lorsqu'est évoqué l'histoire de l'esclavage, puisque la traite atlantique est le produit direct de ce partage du monde.
Maintenant, lorsqu'on parle de colonisations européennes, on se réfère surtout aux empires coloniaux qui ont été bâtis à partir du début du XIXe siècle, où l'on assiste à une occupation totale des territoires – ce qui n'était pas le cas dans les phases d'expansion coloniale précédentes – et on évoque presque exclusivement les empires français et anglais, alors qu'il y a aussi eu des empires portugais, néerlandais, belge ou allemand.
Quant à "l'ère des indépendances", elle débute, officiellement, juste après la Seconde Guerre mondiale. Pour la France, elle démarre avec la guerre d'Indochine (1946-1954) et se termine avec la guerre du Cameroun (1955-1961) et la guerre d'Algérie (1954-1962). D'autres territoires, appelés dans le langage impérialiste "des confettis d'empire", ont obtenu leur indépendance bien après. Il faudra attendre 1977 pour Djibouti, et rappelons qu'il y a eu un référendum pour l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie cette année.
Après la fin des guerres d'indépendance, quelle a été l'attitude des dirigeants français vis-à-vis de ce passé colonial ?
Je pourrais la résumer en une formule lapidaire : glorification de l'œuvre, déni des crimes. La politique de l'Etat a été de mettre en avant les "bienfaits" de la "mission civilisatrice" française, tout en taisant les crimes. Juste après les accords d'Evian en 1962 [qui entérinent l'indépendance de l'Algérie] et jusqu'en 1982, l'Etat fait passer deux décrets et trois lois qui empêcheront toute poursuite concernant les crimes commis durant cette guerre. Ces textes ont imposé une chape de plomb sur tout ce qui a été réalisé par l'armée française en Algérie, mais aussi le rôle et les actions de l'Organisation de l'armée secrète (OAS).
France Télévisions utilise votre adresse email afin de vous adresser des newsletters. Pour exercer vos droits, contactez-nous. Pour en savoir plus, cliquez ici.
"Une civilisation qui choisit de fermer les yeux à ses problèmes les plus cruciaux est une civilisation atteinte." Dans son Discours sur le colonialisme en 1950, l'écrivain et homme politique martiniquais Aimé Césaire dénonçait puissamment l'idéologie colonialiste européenne et accusait ses "maîtres" d'être incapables de regarder en face et de résoudre le "problème colonial" qu'ils avaient créé. Soixante-dix ans après cet écrit, après la fin des guerres d'indépendance, l'histoire de la colonisation française et les processus de décolonisation restent partiellement connus et étudiés.
Pourtant, les débats autour du passé colonial français se multiplient ces dernières années : appels à reconnaître les massacres et leurs victimes, restitution des œuvres d'art, déboulonnage de statues… Il faudra attendre 2017 pour qu'Emmanuel Macron soit le premier président français à qualifier la colonisation de "crime contre l'humanité" et à lancer, trois ans plus tard, une mission sur la mémoire de la colonisation et la guerre d'Algérie. Lors de son discours sur les "séparatismes", le 2 octobre dernier, il a évoqué les "traumatismes" du passé colonial, que la France n'a "toujours pas "réglés". Assiste-t-on à la fin d'un tabou ? Peut-on "réconcilier" les mémoires ? Franceinfo a interrogé Christelle Taraud, historienne spécialiste de la colonisation et des décolonisations. Elle a notamment publié Idées reçues sur la colonisation (Le Cavalier bleu, 2018).
Franceinfo : Tout d'abord, lorsque l'on parle de colonisation puis des décolonisations, de quelle période parle-t-on ?
Christelle Taraud : La question coloniale en Europe remonte à la période dite des "Grandes explorations" à partir du XVe siècle, lorsque les premiers empires, portugais et espagnol pour l'essentiel, ont commencé à se constituer en Afrique et en Amérique. Mais aujourd'hui, dans le débat public, les personnalités politiques, les chercheurs, se réfèrent assez rarement à ces empires, sauf lorsqu'est évoqué l'histoire de l'esclavage, puisque la traite atlantique est le produit direct de ce partage du monde.
Maintenant, lorsqu'on parle de colonisations européennes, on se réfère surtout aux empires coloniaux qui ont été bâtis à partir du début du XIXe siècle, où l'on assiste à une occupation totale des territoires – ce qui n'était pas le cas dans les phases d'expansion coloniale précédentes – et on évoque presque exclusivement les empires français et anglais, alors qu'il y a aussi eu des empires portugais, néerlandais, belge ou allemand.
Quant à "l'ère des indépendances", elle débute, officiellement, juste après la Seconde Guerre mondiale. Pour la France, elle démarre avec la guerre d'Indochine (1946-1954) et se termine avec la guerre du Cameroun (1955-1961) et la guerre d'Algérie (1954-1962). D'autres territoires, appelés dans le langage impérialiste "des confettis d'empire", ont obtenu leur indépendance bien après. Il faudra attendre 1977 pour Djibouti, et rappelons qu'il y a eu un référendum pour l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie cette année.
Après la fin des guerres d'indépendance, quelle a été l'attitude des dirigeants français vis-à-vis de ce passé colonial ?
Je pourrais la résumer en une formule lapidaire : glorification de l'œuvre, déni des crimes. La politique de l'Etat a été de mettre en avant les "bienfaits" de la "mission civilisatrice" française, tout en taisant les crimes. Juste après les accords d'Evian en 1962 [qui entérinent l'indépendance de l'Algérie] et jusqu'en 1982, l'Etat fait passer deux décrets et trois lois qui empêcheront toute poursuite concernant les crimes commis durant cette guerre. Ces textes ont imposé une chape de plomb sur tout ce qui a été réalisé par l'armée française en Algérie, mais aussi le rôle et les actions de l'Organisation de l'armée secrète (OAS).
L'attitude de l'Etat français concernant la guerre d'Algérie a été celle de la terre brûlée.Christelle Taraudà franceinfo
Le début de la période dite postcoloniale se traduit également par toute une série d'assassinats de leaders indépendantistes. Je pense à Félix Moumié, grande figure de l'indépendance du Cameroun français, assassiné en 1960 à Genève, mais aussi à l'opposant marocain Mehdi Ben Barka, enlevé en plein Paris et probablement tué en région parisienne en 1965. Ou à l'affaire Maurice Audin, qui n'est toujours pas réglée. Sa veuve est morte en 2019 sans savoir où se trouve le corps de son époux et sans avoir pu lui donner une sépulture.
Cette politique plus néocoloniale que postcoloniale a aussi perduré sous d'autres formes, comme ce que l'on a appelé la "Françafrique" : un système d'interdépendances que la France a construit vis-a-vis de ses anciennes colonies d'Afrique subsaharienne dans le but d'y maintenir son pré carré.
Hormis la guerre d'Algérie, l'histoire des guerres et des massacres coloniaux (Sétif, Guelma et Kherrata en Algérie en 1945, Haïphong au Vietnam en 1946…) est très peu connue, tout comme l'enrôlement de peuples colonisés dans l'armée française. Comment l'expliquer ?
Une nation a toujours plus de mal à parler des guerres ou des massacres qu'elle a commis que des choses bénéfiques qu'elle a apportées. Lors de la libération de Paris, le récit officiel est que la France continentale se libère par elle-même ; on en a exclu, de facto, tous les Français non blancs et/ou non chrétiens.
CES GOULOTS QUI ETRANGLENT LES COLLECTIVITES TERRITORIALES
Financement du développement local, manque de ressources, exclusion des acteurs territoriaux dans la prise de décision… facteurs qui bloquent l’effectivité de la territorialisation des politiques publique
Intervenu en 2013, l’Acte III de la décentralisation est une réforme allant dans le sens d’approfondir la décentralisation. Sept ans après sa mise en œuvre, des experts approchés par «L’As» jugent que l’esprit est bon, même la réforme est incomplète. Et face aux nombreux facteurs qui bloquent l’effectivité de la territorialisation des politiques publiques, ils recommandent à l’Etat d’appliquer la phase 2 de la réforme. Car celle-ci permet de corriger toutes les incohérences et d’assurer le financement du développement local avec la mise en place du fonds de financement des territoires.
L’Acte III de la Décentralisation vise deux objectifs majeurs : la promotion de la viabilité des territoires et des pôles de développement et le renforcement des capacités des collectivités territoriales. Ainsi avec la suppression des Conseils régionaux, les départements qui étaient des entités administratives ont été érigés en collectivités territoriales auxquelles l’Etat a transféré un certain nombre de compétences. Le but est d’assurer une bonne territorialisation des politiques publiques. Mais, à en croire le directeur exécutif de l’ONG 3D, pour que les collectivités puissent remplir leurs missions efficacement, il faut un certain nombre de préalables. Moundiaye Cissé pense que le fait de changer le nom des communautés rurales pour en faire des communes, ce n’est pas ce qui est fondamental mais plutôt le contenu. «On pouvait garder les communautés rurales et leur donner des prérogatives que détiennent les communes. Voilà une réforme qui a été amorcée en grande pompe, mais l’Etat n’est pas allé jusqu’au bout de sa logique», dit-il.
Selon le secrétaire général du Gradec, le problème des Conseils départementaux réside dans le fait qu’ils n’ont pas de territoire leur permettant de disposer de ressources dans le cadre de la fiscalité locale. «Contrairement aux communes qui bénéficient de ressources propres tirées des impôts locaux, le Conseil départemental ne compte que sur le fonds de dotation de la décentralisation alloué par l’Etat pour faire face à ses obligations dans le cadre des compétences qui lui sont transférées, bien qu’il ait la possibilité d’explorer les opportunités qu’offre la coopération décentralisée. Dans ces conditions où les ressources demeurent insuffisantes, il leur est difficile de remplir leurs missions», souligne Ababacar Fall. Une position que partage Moundiaye Cissé qui relève beaucoup plus de saupoudrage dans la gestion de la décentralisation en lieu et place mise en œuvre de politiques publiques avant de soulever un réel décalage entre la vision du chef de l’Etat et la réalité sur le terrain. «A mon avis, le ministre en charge de la Décentralisation n’a pas su articuler la vision du chef de l’Etat avec ce qu’il met en œuvre sur le terrain. Aujourd’hui, il est indispensable de s’interroger sur les causes qui ont empêché les différents ministres en charge de la Décentralisation de mettre en œuvre le rapport qui sur les recommandations de la phase 2 de la décentralisation», déclare-t-il.
Alors l’Etat s’achemine vers le budget-programme, indique directeur exécutif de l’Ong 3D, il est inadmissible que les collectivités territoriales restent toujours dans le budget moyen. «C’est une incohérence. Car, si on veut parler de territorialisation des politiques publiques, cela devrait être en articulation des formats des budgets. Si au niveau central, on a des budgets programmes on devrait l’avoir au niveau des collectivités territoriales», dit-il. Et Moundiaye Cissé de poursuivre qu’on ne devrait pas prendre des décisions dans les collectivités territoriales sans pour autant demander leurs avis. A ce titre, il cite le récent décret sur l’affectation et la désaffectation des terres qui a été pris sans l’implication des acteurs territoriaux. Il relève également d’autres contraintes, notamment celle liée à la faiblesse des capacités techniques et de gestion des collectivités territoriales dans leurs aptitudes à prendre en charge, entre autres, la réalisation d’infrastructures et les services sociaux de base. Il y a également le déficit de mécanisme cohérent et effectif pour assurer la mobilisation des citoyens dans toute l’action publique locale.
PHASE 2 DE L’ACTE III : UNE SOLUTION A TOUTES CES INCOHERENCES
A en croire le SG du Gradec, l’Etat comme les départements Collectivités territoriales sont aujourd’hui conscients de cette situation et essaient, dans le cadre de la phase 2 de l’Acte III de la décentralisation, de trouver des solutions garantissant aux collectivités des ressources suffisantes pour faire face à leurs missions. Il s’agit entre autres du transfert effectif des ressources concomitamment aux compétences transférées, du renforcement des moyens et les capacités des collectivités territoriales en mettant en place des mécanismes de financement pertinents et efficients, de l’exploitation au maximum des opportunités de la coopération décentralisée et de la mise en place d’un fonds de solidarité des collectivités territoriales à alimenter par la TRIMF, la taxe sur les exploitations minières, une quote-part sur les péages d’autoroutes, quais et bacs, les nuitées d’hôtels, les transferts d’argent.
D’autre part, souligne Moundiaye Cissé, la phase 2 devrait également renforcer la question de l’autonomie budgétaire des collectivités territoriales. Elle permet aux collectivités territoriales de faire des emprunts obligataires, de développer le partenariat public-privé et de rendre effective la territorialisation des politiques publiques. Suite à la pandémie de Covid19, il est prévu 25% à 70% de pertes de recettes au niveau des Collectivités Territoriales. Par conséquent, Moundiaye Cissé pense que sans transferts conséquents de ressources de l’Etat vers les Collectivités Territoriales, ces dernières feront face à de sérieux problèmes pour payer les salaires et assurer le fonctionnement de leurs services. «D’où l’importance de mettre en application la phase 2 avec notamment la mise en place de la commission nationale des finances locales, la commission d’évaluation des charges des compétences transférées et l’accroissement du taux de 5% de la TVA jusqu’ici allouée aux collectivités territoriales», affirme le Directeur Exécutif de l’Ong 3D. A cet effet, il recommande la redynamisation des travaux de la commission d’évaluation de la charge financière des compétences transférées pour une meilleure équité dans les rapports financiers entre l’État et les collectivités territoriales. Il propose également l’augmentation de la part de celles-ci sur la TVA qui était de 5,5% à au moins 25 %, vu le nombre assez important de collectivités territoriales au Sénégal. Et enfin, Moundiaye Cissé invite l’Etat à renforcer les connaissances et l’engagement des populations locales sur le Civisme fiscal.
UN BEAU BATIMENT, UNE COQUILLE VIDE, DES MOYENS DERISOIRES
Les Conseils départementaux ne sont pas dotés de moyens conséquents pour dérouler leur lourde feuille de route
Les Conseils départementaux ne sont pas dotés de moyens conséquents pour dérouler leur lourde feuille de route. C’est l’avis de Pape Moussé Diop, premier secrétaire élu du Conseil départemental de Thiès, qu’il peint sous les traits d’un beau bâtiment abritant une coquille vide.
Le Conseil départemental a été institué à la faveur de l’Acte 3 de la décentralisation. C’est une institution transversale chargée de gérer 9 compétences transférées. Mais force est de reconnaître, selon les acteurs à la base, que les moyens ne suivent pas pour lui permettre d’accomplir la mission qui lui est dévolue.
En ce qui concerne le Conseil départemental de Thiès, renseigne son premier secrétaire élu Pape Moussé Diop, il a hérité de tout le passif du Conseil Régional. «Malheureusement aujourd’hui, il n’y a que le bâtiment qui est beau, le reste est une coquille vide, faute de moyens conséquents». Il accuse les Collectivités territoriales qui sont en contact direct avec les populations de les assimiler souvent à des institutions budgétivores, dans la mesure où le Sénégalais Lambda ne peut pas avoir une perception claire de ce que gère par exemple le Conseil départemental. Une institution qui vit cependant dans d’énormes difficultés financières.
Directeur Administratif et Financier (DAF) de l’institution départementale de Thiès, Amadou Sidibé estime que le Conseil départemental est le parent pauvre de la décentralisation. Aussi, invite-t-il l’Etat à faire des efforts pour l’accompagner dans l’accomplissement de sa mission de développement territorial. «La principale difficulté résulte du fait que les moyens viennent exclusivement de l’Etat, à travers le fonds de dotation et le fonds de concours, distribués sur la base d’un arrêté ministériel. Cette année, une petite hausse a été opérée et c’est ainsi que les fonds d’investissements sont passés de 70 à 96 millions de Fcfa, tandis que les fonds de dotation tournent autour de 135 millions de Fcfa. Cependant, le budget prévisionnel de l’institution sur le fonctionnement tourne autour de 224 millions de Fcfa contre 137,7 millions pour le fonds de concours». Ce qui constitue un gros gap. Or, il s’agit de gérer un grand département, avec beaucoup de priorités à satisfaire, notamment sur l’amélioration du plateau technique médical et de la carte sanitaire. Sur ce registre, souligne Amadou Sidibé, le département compte beaucoup de collèges d’enseignement moyen (CEM) sans clôture, des lycées qui manquent de salles pour la physique, des postes de santé sans maternité. Pire, certaines zones enclavées sont dépourvues de ces infrastructures de base.
Malgré une telle situation, Amadou Sidibé affirme que des efforts importants ont été faits à Thiès, en termes de réalisations. A l’en croire, toutes les communes ont été dotées d’un lycée. Dans le domaine de l’éducation, beaucoup de CEM ont été clôturés. Il s’y ajoute la construction de salles de classe, la réalisation de maternités, la mise à disposition d’équipements. Pour lui, il appartient à l’Etat de redoubler d’efforts pour accompagner les Conseils départementaux qui n’ont pas de niches de recettes, à part le domaine maritime. Et pour le cas de Thiès, les recettes issues du domaine maritime sont partagées avec la commune de Kayar, étant donné que le code ne prévoit pas encore une clé de répartition.
Pape Moussé Diop trouve que la feuille de route est lourde ainsi que les charges, au moment où les moyens font défaut. «Cependant, il aurait suffi que l’Etat mette un budget de 500 millions de Fcfa à la disposition de chaque Conseil départemental pour régler définitivement le problème de moyens», dit-il. Et par rapport à l’impact de la COVID-19, le Directeur Administratif et Financier soutient que l’Etat pourrait prendre certaines initiatives pour mieux accompagner les Collectivités territoriales, à travers son plan de relance économique. Il s’agira simplement d’éponger les dettes contractées par ces Collectivités pour accompagner les populations et lutter contre la pandémie. Ce qui leur permettra de respirer et de se consacrer aux tâches de développement.
BILAN SOMBRE DE L’ACTE III DE LA DECENTRALISATION
Quelques années après l’entrée en vigueur de l’acte III de la décentralisation qui a institué le Conseil départemental, le département de Saint-Louis tarde toujours à décoller
L’acte III de la décentralisation n’a pas encore résolu les problèmes du département de Saint-Louis. Au contraire, des conseillers départementaux pensent que cette réforme a porté un grand préjudice au développement de leur localité.
Quelques années après l’entrée en vigueur de l’acte III de la décentralisation qui a institué le Conseil départemental, le département de Saint-Louis tarde toujours à décoller. Selon plusieurs membres du Conseil départemental, cette réforme a porté un grand préjudice au développement de leur collectivité. «La première considération qu’il faut prendre en compte, c’est que l’Acte III de la décentralisation a consacré une tare congénitale à toutes les collectivités territoriales. Les problèmes rencontrés sont d’ordre structurel. Les théories de territorialisation des politiques publiques sont inopérantes, faute de moyens conséquents. Le Conseil régional avait un budget de près de 2 milliards Fcfa. Aujourd’hui, celui du Conseil départemental de Saint-Louis fait environ 360 millions Fcfa», souligne Dr Abdoulaye Ndoye, conseiller départemental et coordonnateur régional de Rewmi. Il ajoute que le budget accordé à l’investissement est de 150 millions Fcfa. «Comment peut-on espérer le développement dans des cas pareils ?
L’exemple le plus patent, c’est la subvention accordée à l’hôpital régional de Saint-Louis qui est passée de 120 millions Fcfa à 20 millions Fcfa, difficilement bouclée», se désole Dr Ndoye avant d’ajouter : «Il n’y a que 200 millions Fcfa qui sont prévus pour le fonctionnement. Avec ça, comment peut-on faire face aux besoins de développement des 5 communes du département. Nous dépendons totalement de la subvention de l’Etat(fonds de concours et de dotation). Il n’y a pas de fiscalité. Faute de moyens, il est difficile de travailler. Il faut augmenter au quintuple le montant alloué au Département pour faire face aux besoins des populations», propose-t-il. Il estime par ailleurs que le partenariat du Conseil départemental est plombé dans la mesure où il n’y a pas son répondant à l’étranger. La seule possibilité qui existe, c’est la collaboration entre départements, ce qui n’est pas évident.
Pour Abdoulaye Ndoye, les départements ne sont pas des entités viables telles qu’ils se présentent actuellement, car l’acte 3 de la décentralisation a été fait dans la précipitation. Pour régler le problème, il propose le retour de la Région. «La seule solution que j’envisage, c’est le retour à la Région. On peut même aller plus loin avec la provincialisation.
«LA PLUS GROSSE PERTE DE L’ACTE III, C’EST LA COOPERATION DECENTRALISEE»
Interrogé, le secrétaire général du Conseil départemental de Saint-Louis, Amath Dia, abonde dans le même sens que Dr Abdoulaye Ndoye. «Quand on supprimait la Région, le Conseil régional avait un budget de 460 millions Fcfa et 1,5 milliard Fcfa, ce qui faisait presque 2 milliards Fcfa. Entre 2014 et 2015, les trois départements réunis ont reçu moins que ce que la Région avait à sa disparition. Il n’y a pas eu d’évolution alors que les charges ont été multipliées par trois», affirme M. Dia. Au moment où on supprimait la région en 2014, ajoute-t-il, les engagements financiers tournaient autour de 6 407 000 000 Fcfa avec les programmes Aïcha (hydraulique), Astelle (élevage), la construction du lycée de Mboumba pour 1,3 milliard Fcfa. «La plus grosse perte de l’acte III, c’est la coopération décentralisée. Aucune convention de partenariat n’est scellée. La coopération bilatérale est morte. Avec l’ancienne région, il n’y a que les Yvelines qui restent avec Podor. Nord-Pas-de Calais, Midi-Pyrénées, Rhône-Alpes, Conseil régional du Nord sont tous partis», informe M. Dia. Il estime qu’à cause de la modicité des moyens, des départements ont du mal à exécuter leurs budgets pour diverses raisons, notamment celles inhérentes aux procédures de passations de marchés.
MANQUE DE LEADERSHIP DU PRESIDENT DU CONSEIL DEPARTEMENTAL DE FATICK
Le Conseil est aujourd’hui l’une des institutions les moins dynamiques de la région
Le Conseil départemental de Fatick est aujourd’hui l’une des institutions les moins dynamiques de la région de Fatick. Le manque de leadership de son président ainsi que l’analphabétisme de la majorité de ses conseillers font que l’institution tarde à prendre son envol.
Les compétences dévolues au Conseil départemental de Fatick semblent être méconnues de ses membres. La plupart d’entre eux agissent sous la dictée. Les intérêts personnels ont toujours primé sur les intérêts généraux. Conséquence : le Conseil départemental de Fatick, bien que faisant pratiquement ce que font tous les Conseils départementaux, a tout de même sa façon bien singulière de faire les choses. C’est d’ailleurs ce qui explique le fait que les quelques cadres qui siègent au conseil aient tout bonnement décidé de ne plus se présenter aux réunions. On peut entre autres citer les ministres Mbagnick Ndiaye et Aly Coto, l’ancien président du conseil régional de Fatick Coumba Ndoffène Bouna Diouf, la responsable libérale Bakhao Diongue, ainsi que la député Yaye Mané Albis … « La faiblesse du Conseil départemental de Fatick est que tous les responsables se sont retirés, laissant leurs places aux suppléants », a soutenu Mamadou Saliou Faye qui se souvient encore de la première réunion du Conseil. « Il y a eu une dame, quand on a appelé son nom, elle répétait sans cesse ‘’Makhey’’ (qui signifie : je suis ici, en sérère).
La plupart des conseillers ne sont que des figurants dans le Conseil. Seuls quelques-uns animent les débats. Les ténors ont boudé le Conseil. » Il faut dire qu’il n’y a pas photo entre le Conseil départemental de Fatick et le défunt Conseil régional, en termes de réalisation. Pour rappel, le président Oumar Sène est venu à la tête du Conseil départemental de Fatick par pur accident.
En effet, alors que l’on s’attendait à un seul candidat de Bby pour le poste de président du Conseil départemental, le parti présidentiel avait présenté deux candidats : Aly Coto Ndiaye, tête de liste majoritaire de la coalition Bby et Omar Sène élu sur la liste proportionnelle. Une prolongation, en son temps, du duel entre Mbagnick Ndiaye et son frère Woula Ndiaye. Au final, le duel a été largement remporté par l’ex-Pcr de Diaoulé qui avait récolté 36 suffrages contre 24 pour Aly Coto Ndiaye.
par Yoro Dia
MACKY SALL RÉCOMPENSE LE VICE
L’exemple de «Terme Sud» illustre à merveille le mal qui ronge le pays. L’Etat est souvent mis volontairement devant le fait accompli parce qu’on compte sur le vice du masla pour une tolérance à posteriori
«On gouverne mieux les hommes par leurs vices que par leur vertu.» Ainsi parlait Napoléon Bonaparte. On a tout à fait l’impression qu’il parlait du Sénégal, ce pays où l’Etat semble gouverner les hommes par leurs vices comme le masla. L’exemple de «Terme Sud» illustre à merveille le mal qui ronge le pays. Des militaires occupent des logements de fonction, ne sont plus en fonction, refusent de quitter les lieux et empêchent ainsi aux ayants droit de jouir de leurs droits, vont en justice, perdent naturellement la partie et par une stratégie de victimisation, parviennent à transformer la victime (l’Armée) en coupable idéal. Le combat classique de David et de Goliath et avec naturellement l’opinion qui se met du côté de David le faible. En démocratie, la «fabrique de l’opinion», comme dit Loïc Blondiau, et l’avoir avec soi pour qu’elle mette la pression sur le gouvernement afin de le faire reculer, est un b.a.-ba qu’on apprend en communication. Donc, c’est de bonne guerre pour les déguerpis de Terme Sud qui l’ont utilisé.
Par contre, ce qui n’est pas bien pour la guerre pour la résurrection de la vertu citoyenne (rampe de lancement de tous les pays émergeants), c’est la décision du chef de l’Etat, chef de l’Armée, de leur octroyer huit cent millions. Cet acte de générosité confirme l’idée qu’on gouverne mieux les hommes par le vice. Par cet acte, le chef de l’Etat sanctionne tous les militaires vertueux qui ont libéré leurs logements de fonction à la fin de leur service, et encourage le vice qui consiste à resquiller un logement de fonction, ou des voitures de fonction. Avec cette décision, l’Etat valide à posteriori une pratique courante chez des ministres, des universitaires, de hauts fonctionnaires à occuper leur logement et garder leur voiture de fonction bien après avoir quitté leurs fonctions. C’est un précèdent dangereux. Et les déguerpis de Terme Sud vont faire des émules dans tous les secteurs et on demandera au président régler la note.
Avec ce vice, le patrimoine bâti de l’Etat va fondre comme neige au soleil et l’Etat va continuer à dépenser des milliards pour acheter des véhicules de fonction. L’opposition aussi encourage le gouvernement par le vice, dans une surenchère émotionnelle et politicienne avec la majorité. Aussi bien le chef de l’Etat que son opposition se comportent comme s’il n’y avait pas une décision de la Cour suprême, la plus haute juridiction du pays, en encourageant chacun de son côté et à sa manière le vice. Terme Sud permet de comprendre comment le gouvernement, par le vice, est responsable du grand désordre qui sévit dans notre pays, avec la privatisation totale des espaces publics, l’encombrement humain des trottoirs, la privatisation des ronds-points et des terre-pleins.
Le désert du désordre ne cesse d’avancer parce que le vice de l’incivisme et de l’incivilité est toléré, et la vertu citoyenne considérée comme un anachronisme ou un comportement de Martien. Parmi les prérequis de l’Emergence, il y a naturellement la stabilité politique, l’Etat de droit, la sécurité juridique et judiciaire, les investissements…, mais il faut y ajouter un bulldozer. Le bulldozer de la vertu qui va raser toutes les citadelles bâties par le vice du fait accompli. L’Etat est souvent mis volontairement devant le fait accompli parce qu’on compte sur le vice du masla pour une tolérance a posteriori.
Aujourd’hui, nous avons presque tous les prérequis de l’Emergence. Il ne nous reste que le bulldozer pour raser les zones de non-droit, réminiscences de l’ancien monde.
«ON S’EST DIT QU’IL VAUDRAIT MIEUX QUE LE PRESIDENT DISSOLVE LES DEPARTEMENTS»
Ibrahima dit Habib Sall, vice-président du conseil départemental de Dagana, relève les problèmes liés à la délimitation des territoires, à l’absence d’une autonomie financière, à la taxation indue des départements, entre autres
Dans cette interview, le vice-président du conseil départemental de Dagana parle sans langue de bois des difficultés rencontrées dans l’organisation et le fonctionnement de leur Institution, mais aussi de l’absence de moyens suffisants pour mener à bien leurs missions. Ibrahima dit Habib Sall relève également dans cet entretien les problèmes liés à la délimitation des territoires, à l’absence d’une autonomie financière, à la taxation indue des départements, entre autres.
«L’AS» : Sept ans après l’érection du département en collectivité territoriale, peut-on dire que cette Institution décentralisée est viable ?
IBRAHIMA DIT HABIB SALL : Il y a eu trois réformes majeures au Sénégal : celle de Senghor qu’on appelle la ruralisation ; celle de Abdou Diouf qu’on appelle la régionalisation ; et celle de Macky Sall qui date de 2013 et qui érige les départements en collectivités territoriales. C’est une réforme très intéressante et très importante, mais malheureusement, on n’est pas allé au bout du processus. D’ailleurs, il n’y a que quatre décrets d’application qui sont sortis depuis 2013 en attendant une vingtaine dans le circuit. Tout est bloqué. Nous sommes aussi confrontés à un problème de délimitation des collectivités locales. On ne connaît même pas les limites des territoires. Aujourd’hui, personne ne peut te dire où se trouvent exactement les limites entre Dagana et Podor. C’est la même chose avec les communes. En tout cas, pour ce qui est du Conseil départemental, nous attendons que le Président de la République prenne la question en main. Il a fait des efforts ; mais il doit les redoubler et nous donner les moyens de notre politique. (…) A un moment, on s’est dit qu’il vaudrait mieux que le président de la République dissolve les départements. Ce sont des Institutions qui sont là avec beaucoup de charges et beaucoup d’ambitions, mais elles n’ont pas les moyens de leur politique.
Pourtant, les Conseils départementaux doivent normalement avoir un budget et bénéficier de fonds venant de l’Etat central ?
Les Conseils départementaux n’ont pas de recettes encore moins de fiscalités. Tout ce qu’on a, c’est le concours de l’Etat, particulièrement le fonds d’équipement des collectivités locales et le fonds de concours. On nous donne pratiquement 65 millions Fcfa pour l’investissement et environ 135 millions Fcfa pour le fonctionnement. Si on prend par exemple le Conseil départemental de Dagana, on a neuf domaines de compétences parmi lesquels la santé. D’ailleurs, Dagana a un hôpital de niveau 1 et on est en train de se battre pour avoir un hôpital de niveau 3 comme c’est le cas à Podor et à Saint-Louis. L’équité territoriale voudrait qu’on ait quand-même le même plateau technique. On se bat pour cela. En ce qui concerne l’éducation, nous avons plus de vingt-cinq collèges et presque six ou sept lycées et des centres de formation sous notre responsabilité. Donc, quand on vous donne 60 millions Fcfa et qu’on vous demande de vous occuper de tout cela ; vous voyez que ce n’est pas possible.
Comment se fait-il que vous éprouviez des difficultés à mener à bien vos missions ?
C’est parce que la territorialisation des politiques publiques n’est pas exercée pleinement. Jusqu’à présent, on n’a pas transféré aux Conseils départementaux les moyens qu’il faut. Je ne suis contre personne mais le PUMA, qu’est-ce qu’il fait ? Si vous voyez la matrice d’intervention du PUMA, vous vous rendez compte que tout ce qu’il fait, c’est intervenir au niveau de collectivités territoriales, construire des postes de santé, des cases des Tout-petits, etc. Or, les collectivités territoriales peuvent faire tout ça. Promovilles, c’est la même chose. De même, il y a des compétences dédiées au ministère du Développement communautaire, de l’Équité sociale et territoriale alors qu’elles doivent nous être dédiées. Juste pour dire que les collectivités territoriales peuvent prendre tout cela en charge si on leur donne les moyens. Mais malheureusement, on n’a pas de moyens. Avant l’arrivée d’Oumar Guèye, il y avait beaucoup de retards dans la disponibilité même des fonds qui nous sont dévolus. Mais cela s’améliore petit à petit. Il arrivait qu’on reçoive les fonds vers juillet-août alors que les percepteurs clôturent leur année budgétaire au mois de novembre.
Dans le passé, vous aviez décrié l’absence d’une autonomie financière et une taxation indue. Qu’en est-il aujourd’hui ?
Il nous est impossible d’ouvrir un compte bancaire propre à l’institution. Même l’argent obtenu des partenaires étrangers est obligatoirement logé au Trésor. C’est un goulot d’étranglement qui nous empêche de mener à bien nos activités. On a beaucoup de partenaires ; on développe la coopération décentralisée, mais cela nous bloque et nous retarde dans la réalisation de nos projets. Par exemple, si la collectivité décroche des fonds chez des partenaires, elle est obligée de loger ces fonds au Trésor. Et quand la collectivité veut débloquer les fonds, le payeur lui applique la TVA de 18%. C’est inadmissible de vouloir taxer les partenaires qui viennent financer nos projets. Ce n’est pas sérieux. Si nous avions nos propres comptes différents de ceux logés au Trésor, cela nous aurait facilité de nombreuses interventions sur le terrain. Mais à l’état actuel, même si nous décrochons des fonds ailleurs, nous sommes soumis au diktat des payeurs qui peuvent rejeter nos demandes. Le plus écœurant, c’est que la TVA nous est précomptée alors qu’on devait en être exonéré. Ainsi, si l’Etat dit avoir donné 65 millions Fcfa d’investissements, en réalité, il faudra compter 65 millions Fcfa moins 18%. C’est anormal.
Cela dit, est-ce que les acteurs territoriaux ont toutes les compétences requises pour gérer les collectivités ?
Les acteurs territoriaux ont besoin d’un accompagnement de l’Etat. C’est vrai que c’est par la politique qu’on accède à ces stations-là, mais la gestion des Collectivités locales nécessite quand-même de la compétence. La formation des acteurs territoriaux est fondamentale. Si on prend l’exemple du foncier, on se rend compte que beaucoup de maires ont des difficultés à les gérer parce qu’ils ne comprennent pas certaines choses. Donc, l’Etat devrait les accompagner s’ils décident d’octroyer des terrains ou de faire des projets nécessitant l’utilisation du foncier au niveau de leur terroir. Ceci pourrait éviter de faire n’importe quoi avec les terres.
Y a-t-il des conflits de compétences entre les Départements et les Communes ?
Il n’y a pas de conflits de compétences particulières avec les Communes, mais c’est plutôt un manque d’harmonisation. Cependant, il y a une rivalité entre les Communes et les Départements. Et c’est surtout lié à une incompréhension des enjeux. Ce qui est vraiment problématique par ailleurs, ce sont les relations entre le président du Conseil départemental et le préfet ou le gouvernement par rapport aux compétences et aux rapports de subordination. Donc, il faudra définir tout cela. Pour le reste, les neuf domaines de compétence du Conseil départemental sont pris en compte par la loi sur l’Acte 3 de la décentralisation. Si la Commune s’occupe par exemple des écoles élémentaires et des préscolaires, les départements se chargent des CEM, lycées et autres centres de formation. Dans le domaine de la santé aussi, les Communes gèrent les districts, les centres et postes de santé alors que les départements gèrent les hôpitaux de niveau 1, de niveau 2 et de niveau 3. Donc, c’est souvent sous cette forme que les choses sont organisées.
UNE INSTITUTION MECONNUE PAR LES MBOUROIS
Le Conseil départemental de Mbour reste l’institution la moins connue par les populations de la capitale de la Petite côte, depuis son installation il y a 6 ans.
Dans le cadre d’une gouvernance de proximité, les Conseils régionaux avaient cédé la place aux Conseils départementaux. A Mbour, depuis l’installation de Saliou Samb comme président du Conseil départemental, une grande partie de la population ne connaît pas l’utilité de cette institution.
Le Conseil départemental de Mbour reste l’institution la moins connue par les populations de la capitale de la Petite côte, depuis son installation il y a 6 ans. En effet, nombreux sont les Mbourois qui ne connaissent même pas le siège du Conseil départemental. D’ailleurs, c’est même le cas de ceux qui font partie de l’élite. Ndiaga Cissé, coordonnateur régional du Conseil Local de la Pêche Artisanale (CLPA) de Thiès, figure parmi ces derniers. Bien que faisant partie des personnalités les plus connues au niveau de la commune de Mbour, il ignore tout de cette institution. «Je suis un citoyen de Mbour mais très sincèrement, je ne peux pas dire le rôle exact du Conseil départemental et ses compétences. Depuis 4 ans que je dirige le Clpa, il ne nous a appuyés qu’une seule fois en nous octroyant une enveloppe de 150 000 Fcfa pour l’achat de pots à poulpe. En dehors de cela, je peux dire en toute franchise que je ne sais pas son rôle», soutient Ndiaga Cissé.
Situé dans le quartier Château d’Eau, le Conseil départemental de Mbour est un mystère pour bon nombre de personnes. Professeur d’histoire et de géographie, Omar Diouf s’interroge sur l’opportunité de la création du Conseil départemental. «Quelle est l’utilité de cette institution ? C’est une institution dont ne parlent pas les Sénégalais, sinon ils en parlent rarement», affirme cet enseignant quadragénaire. Comme Omar Diouf, beaucoup de Mbourois ne sont pas imprégnés des compétences du Conseil départemental. Interpellée, une dame du nom d’Adama Ndoye considère que c’est une institution qui sert à caser uniquement une clientèle politique.
KEUR MASSAR, RETOUR DANS LES ZONES INONDEES
La vie reprend son cours normal, les sinistrés regagnent leurs maisons
Les familles sinistrées de la commune la plus impactée du pays regagnent petit à petit leurs différentes maisons respectives. La vie reprend son cours normal dans ces zones fortement touchées par les pluies diluviennes des 5 et 6 septembre derniers. Le niveau très élevé des eaux se voit afficher sur les murs des maisons. La terre est encore moulante. Les rares poches d’eaux qui restent sont encore visibles. Trouvés dans leurs intimités, les sinistrés partagent leurs expériences.
Toutes les expériences, ne sont pas bonnes à partager. Mais, celles des sinistrés, de la commune de Keur Massar, sont pleines d’enseignements. Dans les Parcelles Assainies de ladite commune, la vie reprend son cours normal, mais les traces des eaux restent encore visibles. Le sol est très moulant, avec un relief foncièrement argileux, qui présente en son sein, beaucoup de diaclases. Les traces très élevées du niveau des eaux, sont encore visibles sur les différents murs de ces zones impactées.
Trouvé assis devant la porte de sa maison, le Vieux Souaré Sadio, en tenue africaine, compte partager son expérience. « L’inondation a été terrible pour tout le monde, d’autant plus que je ne m’attendais pas à avoir une masse aussi importante d’eau en 48 h. Nous avons toujours vécu des inondations, mais avoir des eaux à une hauteur d’1,5m, cela dépasse l’entendement. C’était insupportable, tout le voisinage était pratiquement sorti. Dans le secteur, il n’y avait que deux maisons qui étaient habitées, vu qu’ils vivaient sur la terrasse. Mais après le pompage des eaux, le retour se fait petit à petit » un témoignasse très émouvant du Vieux Sadio.
Ce dernier vivait en ville. « Les pertes en matériel sont inestimables, nos fauteuils, frigos, matériels électroménagers pour ne citer que ces matériaux. Nous avons tout perdu» débite notre interlocuteur sur un dépit. Il n’aura pas la chance de bénéficier du cash Transfer offert par les autorités. Cette omission ne le gêne pas parce que Vieux Sadio estime que d’autres en avaient plus besoin que lui. Dans la foulée, un autre sinistré, de retour dans sa maison, ne pouvait ne pas partager son sentiment.
Astou Camara était de passage, chapelet à la main, vêtue tout de blanc, écharpe bleue qui cache ses épaules et une bonne partie de son corps. Elle réagit en indiquant que « wallahi, je n’ai jamais vu, dans ma vie, un niveau d’eau aussi élevé. Mais ce que je retiens dans cette histoire, c’est la solidarité entre voisins. Les inondations ont renforcé nos liens. C’est-à-dire, dans une épreuve douloureuse, comme celle des inondations, nous pouvons en tirer une leçon de vie ». Cette solidarité que la dame met en relief, est un état d’esprit. Dans les Parcelles Assainies, les jeunes se sont organisés en comités de veille et de soutien. Ils n’attendent rien de la mairie. Ils se sont donné les moyens, afin de venir en aide aux familles les plus impactées dans ces inondations inédites.
Des gravats pour remplir les poches d’eaux qui restent
Les jeunes et les bonnes volontés des zones impactées, se sont serrés les coudes, afin de faciliter le retour des familles impactées par les eaux dans leurs foyers respectifs. Les rares poches d’eaux, qui restent sont remplies de pierres et de sable. Au niveau de leur quartier général, un magasin est aménagé par les jeunes. On y retrouve des matelas étalés, un poste de télé et quelques chaises bien rangées. Une machine de pompage et des tuyaux sont juste mis devant la porte. Nourou Niang le coordinateur des différentes actions de secours, au niveau du quartier Sorry Ba explique que « nous gérons le pompage des eaux, car il existe encore des poches d’eaux et en ce qui concerne le retour des impactés, ils commencent à venir petit à petit. Nous achetons également des gravats, la charge est à 25 000 franc le plus souvent, ce sont les bonnes volontés qui mettent la main à la poche, pour faciliter le retour des familles impactées ».
A l’intérieur des Parcelles Assainies, la situation reste entière. Même s’il faut noter que le niveau de l’eau a drastiquement diminué, mais les maisons sont loin de retrouver leur aspect d’avant ces inondations. Car la zone est très basse. Moussa Tine, un jeune à la vingtaine est trouvé en pleines activités. Il déplace des sacs de sable qui servent de marche pieds. « Mes parents ont pris de l’âge, de ce fait, il est de mon devoir de faire ce travail, afin de faciliter le passage. J’étais seul dans la maison pour veiller à ce que les malfrats ne pillent pas le peu qui nous reste». Les jeunes des différentes cités se défoncent afin de rétablir et d’améliorer le cadre de vie. Mais les poches d’eau et la noirceur du sol inquiètent certains sinistrés qui commencent à regagner leurs maisons. Le jeune, revient à la charge « les agents des services d’hygiène, doivent pomper les lieux et désinfecter le sol car la terre n’était pas comme ça». Ce sentiment d’inquiétude est la chose la mieux partagée chez les sinistrés qui commencent à rejoindre leur différents maisons.
LES MOUSTARCHIDINES VONT CELEBRER LE GAMOU AU CHAMP DE COURSES DE TIVAOUNE
Serigne Moustapha Sy rame à contre-courant
Cheikh CAMARA, Correspondant permanent à Thiès |
Publication 14/10/2020
C’est dans le respect strict des mesures barrières, dans un contexte de crise sanitaire, que le guide spirituel du Dahiratoul Moustarchidina Wal Moustarchidaty (Dmwm), Serigne Moustapha Sy Al Makhtoum, et ses fidèles talibés, comptent célébrer l’édition 2020 du Gamou annuel de Tivaouane ou Maouloud au Champ de Courses de Tivaouane
« Sur instruction du responsable moral, Sérigne Moustapha Sy, le Dahiratoul Moustachidina Wal Moustachidaty va célébrer le Gamou à l’hippodrome de Tivaouane ou Maouloud Al Naby comme d’habitude au Champ de courses de Tivaouane. On a tenu une réunion dans ce sens où les instructions du responsable moral ont été déclinées par le comité d’organisation. Ce samedi 17 octobre, on va procéder au nettoiement, de fond en comble, de l’hippodrome qui va abriter le Gamou, ce, outre d’autres journées de ‘’set sétal’’ qui seront organisées afin de nettoyer le mythique lieu de célébration », a déclaré le chargé de la communication des Moustarchidines.
Selon Makhary Mbaye, « Serigne Moustapha Sy a décliné toutes les instructions allant dans le sens d’une bonne organisation du Gamou au Champ de courses ». Et d’indiquer que sur le plan sanitaire également, « toutes les mesures idoines seront prises pour éviter la propagation de la Covid19 lors de l’évènement ».
Le chargé de Com des Moustarchidines précise, d’ailleurs, « qu’une cinquantaine de médecins dont la plupart sont de leur mouvement sont à pied d’œuvre pour aider à la sensibilisation des fidèles pour le respect des mesures sanitaires édictées par les autorités. Des ambulances seront affrétées ainsi que l’ensemble des mesures d’urgence visant à organiser le Maouloud Al Naby dans des conditions sécuritaire idoines ». Un grand rendez-vous qui, au cours des éditions passées, a toujours été occasion pour le guide des Moustarchidines, qui n’est guère tendre avec les détenteurs du pouvoir, de dire ses quatre vérités à qui de droit. Au Président Macky Sall, le fils de Al Makhtoum faisait comprendre : « vous avez intérêt à faire très attention aux Khalifes généraux qui vous chantent vos louanges, vous font croire que c’est vous qui détenez le pouvoir ».
Et de préciser : « le Khalife général des Mourides ne dirige que la communauté mouride et celui des Tidianes que les Tidianes et pas toute la communauté Tidiane. Et les autres khalifes généraux de même. Vous devez savoir que c’est le peuple qui tient le pouvoir et non un cercle restreint ». Aussi le marabout lui a conseillé d’« éviter les rivalités qui ne mènent à nulle part ».
Surtout, Serigne Moustapha Sy avait invité ses talibés à se préparer pour les prochaines élections locales, législatives, et la Présidentielle à venir. « Je ne sais même si on va aller jusqu’à l’élection présidentielle. C’est Dieu Seul qui sait », avait-il dit, avant de se rappeler : « en de pareilles circonstances, j’avais demandé à l’ancien Président Abdou Diouf de choisir de sortir du Palais par la grande porte ou de mourir. Je lui avais demandé de choisir la plus simple formule. Il pensait que c’était des paroles en l’air jusqu’au jour où on l’a exfiltré de ce Palais derrière les escaliers ».