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2 octobre 2025
UN 8 MARS EN SOUVENIR DES HÉROÏNES DE NDER
Les femmes du village de Nder, ont commémoré dimanche le bicentenaire de l’acte historique posé par les femmes de cette localité en 1820, en choisissant de se sacrifier collectivement en s’immolant par le feu plutôt que d’être réduites à l’esclavage
Les femmes du village de Nder, une localité de la commune de Gnith, dans le département de Dagana, ont commémoré dimanche le bicentenaire de ‘’Talatey Nder’’ (mardi de Nder), l’acte historique posé par les femmes de cette localité en 1820, en choisissant de se sacrifier collectivement en s’immolant par le feu plutôt que d’être réduites à l’esclavage, a appris l’APS.
Elles ont voulu ainsi ‘’résister à l’oppression et à l’invasion maure, pour sauvegarder la dignité de la femme face à l’esclavage de l’émir du Trarza’’, a magnifié Fatou Sidibé Guèye, coordonnatrice du comité de pilotage du bicentenaire.
La mobilisation culturelle organisée à l’occasion de la journée du 8 mars vise à ‘’inspirer les jeunes du Walo’’ en particulier et du Sénégal en général’’. Elle vise aussi à les amener à "s’ancrer aux valeurs de leurs ancêtres qui ont eu à sauvegarder la dignité humaine, en refusant l’humiliation et la domination’’.
Mme Sidibé souligne que l’histoire de Nder est ‘’un exemple de bravoure’’ de la part de ces femmes qui ‘’avaient montré la voie à toutes les femmes du Sénégal’’.
‘’Aujourd’hui, les femmes de Nder réclament une autonomisation pour un accès aux terres du Walo. Nous allons collecter 2020 signatures et faire un plaidoyer auprès du président de la République, afin que la journée du Talatey Nder, soit inscrite dans l’agenda culturel au Sénégal’’, a-t-elle martelé.
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« LA QUESTION DES FEMMES EST D’ABORD POLITIQUE »
Eugénie Aw, journaliste et ancienne Directrice du Cesti, revient pour ce 8 mars, sur les grandes questions qui agitent l’évolution du droit des Femmes notamment les femmes des médias
L’ex-directrice du Centre d’études des sciences et techniques de l’information (CESTI), Eugénie Rokhaya Aw, est une des premières journalistes femmes et spécialistes de la communication sénégalaise. Elle revient, pour ce 8 mars, sur les grandes questions qui agitent l’évolution du droit des Femmes notamment les femmes des média. Et partage au passage, quelques préjugés qui collent à la peau.
LES FEMMES INVISIBLES DANS UN MONE CRÉÉ POUR LES HOMMES
Médicaments, voitures, design… sont adaptées aux normes masculines Et donc, mettent en danger la vie des femmes. Les exemples cités parlent d’eux-mêmes
Médicaments, voitures, design… la journaliste Caroline Criado Perez démontre dans un livre que créations et recherches sont adaptées aux normes masculines.
C’est clair, tout va de travers. Enfin pour la moitié de l’humanité. Les toilettes pour femmes ? A inventer, les envies pressantes sont à réprimer. La hauteur des poignées dans le bus pour ne pas valdinguer ? Une cata. Les ceintures de sécurité ? Quand on est enceinte, on rentre le ventre. La liste des objets, commodités ou même de médicaments qui pourraient être labellisés «exclusivement réservés aux hommes» est longue comme un discours de mâle occupé à faire du mansplaining - expliquer à une femme ce qu’elle sait déjà… C’est ce que démontre la journaliste et activiste britannique Caroline Criado Perez, spécialiste des études de genre, dans Femmes invisibles (comment le manque de données sur les femmes dessine un monde fait pour les hommes) traduit en français après avoir décoiffé outre-Manche. Elle livre une démonstration minutieuse, après avoir épluché «des milliers d’études» qui le plus souvent laissent les femmes de côté. Un examen du sol au plafond de ce qui cloche, plus ou moins gravement.
Souris mâles
«Le corps de l’homme est le modèle universel sur lequel on a bâti notre monde, même lorsqu’il s’agit de tester ou fabriquer des médicaments. Comment est-ce encore possible au XXIe siècle ?» interroge l’auteure. Chez les femmes, les médicaments (mis au point à l’aide de sujets masculins) contre la tension artérielle ne sont pas aussi efficaces. Les statines, amplement prescrites pour prévenir certaines maladies cardiaques, ont principalement été testées sur des hommes. Or des recherches conduites en Australie indiquent que les femmes qui en prennent à doses élevées font face à un risque accru de diabète. Le valium, largement prescrit aux femmes (pour des troubles qui vont de l’anxiété à l’épilepsie), n’a jamais été testé sur elles.
La quasi-totalité des tests sur la douleur ont été réalisés sur des souris mâles et il a fallu attendre 2016 pour que le National Institutes of Health (institut américain de la santé) impose que les études qu’il finance soient analysées par sexe. «C’est un problème historique qui trouve son origine dans l’assimilation du corps masculin au corps humain, par défaut», analyse la Britannique. C’est une image de mâle musclé qui illustre les manuels d’anatomie - l’argument selon lequel le corps féminin avec ses hormones fluctuantes est peu pratique pour faire des recherches est une vieille rengaine.
Les spécificités de ce corps sont régulièrement zappées. Exemple : en cas de crise cardiaque, seulement une femme sur huit signale ressentir le symptôme classique de la douleur dans la poitrine, mais plutôt des douleurs dans l’estomac, un essoufflement, des nausées et de la fatigue (en particulier les jeunes femmes). Conséquence : selon des recherches britanniques, «les femmes sont 50 % plus susceptibles d’être mal diagnostiquées en cas de crise cardiaque». On notera aussi qu’en 2013, quand a été mis au point un cœur artificiel, il était trop gros pour le corps d’une femme (une version adaptée existe désormais).
De l’auto au piano
Autre anomalie : depuis les années 60, la formule usuelle pour régler la température dans les bureaux est basée «sur le métabolisme au repos d’un homme moyen de 40 ans, pesant 70 kilos», écrit Caroline Criado Perez. Problème : le niveau métabolique de jeunes femmes adultes accomplissant un travail de bureau léger serait sensiblement plus bas. Bilan : les bureaux actuels sont en moyenne trop froids pour les femmes.
Criado Perez balance : «La conception automobile a une longue et scandaleuse histoire dans l’art d’ignorer les femmes.» Depuis des décennies, le mannequin le plus utilisé dans les tests de collision mesure 1,77 mètre et pèse 76 kilos : plus grand et plus lourd qu’une femme moyenne. Les Etats-Unis ont attendu 2011 pour faire ce genre de tests avec des mannequins féminins. Et un seul test réglementaire de l’UE fait appel à un mannequin femme. Et encore, quelle femme ? Ce mannequin n’est testé que… dans un siège passager. Et il s’agit d’une version réduite d’un homme moyen… Résultat, encore aujourd’hui (la dernière étude date de 2019), les femmes présentent 47 % de risques supplémentaires d’être gravement blessées dans un accident de voiture (qu’un homme attaché dans le même type d’accident) et 17 % de mourir. L’inégalité va se nicher jusque dans le design, où la main de l’homme reste l’étalon. Ainsi, l’envergure moyenne d’une main de femme se situe entre 18 et 20 cm quand le clavier d’un piano fait environ 122 cm de long. Plus prosaïquement, depuis que la hauteur moyenne d’un smartphone a atteint les 14 cm, textoter se complique. Tu la vois ma main ?
LA CHRONIQUE HEBDO DE PAAP SEEN
FACE À LA MER
EXCLUSIF SENEPLUS - Redonner aux dakarois leur littoral est une priorité. Voilà un vrai chantier pour le ministre de l’Urbanisme qui multiplie les sorties musclées pour désencombrer la capitale. Mais il ne le fait que contre les faibles - NOTES DE TERRAIN
Je suis un peu essoufflé. J’ai pris le sentier descendant qui mène à la plage des Mamelles. C’est toujours éprouvant physiquement d’emprunter cette piste naturelle en balcon. Arrivé au bout de l’itinéraire, je suis étonné de voir autant de monde sur le rivage. A vue d’œil, il n'y a pas d’espace libre. Je décide de m’installer dans l’un des petits restaurants de bord mer. Toutes les places, en bas, sont occupées. Je m’installe dans la première rangée, en haut. Le panorama n’est pas magnifique, mais j’ai fait un long chemin pour venir jusque-là. Impensable de faire demi-tour. Quatre personnes sont assises à côté. Deux hommes, deux femmes. Ils fument tranquillement et discutent à haute voix. L’un d'eux me demande de les rejoindre. Je décline poliment.
Un couple, assis dans un hamac, en face de moi, flirte. Ils manquent à plusieurs reprises de se renverser. Des français, apparemment. L’homme porte une chemise col mao verte, un pantalon beige et des chaussures de marin. Il a accroché ses lunettes noires sur le haut de son habit. Sa compagne a des cheveux bouclés. Ses chaussettes dépassent le haut du tibia, et arrivent presque au niveau de ses genoux. A son accoutrement, on dirait qu’elle revient d’une randonnée. Sa chemise déboutonnée laisse apparaître une partie de son épaule et un débardeur noir. Elle porte un pantalon court, gris foncé, et des chaussures de trekking.
Les quatre personnes se moquent, en wolof, du couple. L’un d’eux, une bouteille de Flag à la main, prend une grande gorgée, sourit, et m’interpelle. Il porte un maillot de l’AC Milan, un pantalon de survêtement blanc et des baskets Adidas de la même couleur. Il me dit que le couple français pourrait attendre de rentrer pour se faire des câlins. La femme attablée près de lui, sa compagne certainement, n’est pas du même avis. “Dara amu ci”, lui dit-elle. Elle l’embrasse sur la bouche, comme si elle voulait marquer pleinement sa désapprobation. Je suis d’accord avec elle. On ne s’aime que pour le partager.
Je suis venu à la plage pour bénéficier d’un moment de solitude. C’est peine perdue. L’homme, avec la bouteille de bière, insiste pour discuter. Il me demande si je suis du coin. Je lui réponds que j’habite à Ouakam, mais je suis Rufisquois. Il a des amis là-bas. A "Këri Kaw et Këri Suuf" Je ne les connais pas. On discute de tout et de rien. Il me dit qu’il vient chaque week-end sur cette plage. Qu’il y a très peu de Sénégalais. Qu'on est pourtant à Dakar. Ce qu’il dit n’est pas faux. Mais si les Sénégalais ne sont pas nombreux, c’est parce qu’ils ont été dépossédés de leur littoral. Les plages deviennent de moins en moins accessibles pour les citoyens lambda. Et c’est uniquement la faute des autorités publiques.
Rapacité brutale. Il y a très peu d’espace à Dakar, où l’on peut profiter de la mer tranquillement. Tout a été bradé. Le domaine public maritime, malgré les lois qui le rendent non aedificandi, n’appartient plus aux populations. A cause des mauvaises actions de prédateurs sans scrupule. Nous bénéficions à peine de cette Corniche magnifique. Un petit parcours pour satisfaire les joggers. Des mini-poches de plages. C’est tout. Alors qu’ailleurs les gouvernants penchent durablement les villes vers leur avenir écologique et favorisent l’urbanisme participatif, nos élites incivilisées, quant à eux, détruisent la qualité de la vie. Elles vont même jusqu’à empiéter sur le domaine public et détruire la nature pour accumuler des biens illicites. Au lieu d’un devoir d’exemplarité, elles font preuve d’une foncière immoralité. Cette boulimie implacable est difficile à comprendre. C’est à se demander s’ils sont vraiment conscients. Leur manque de discernement est impardonnable.
Un jour ou l’autre, il faudra démolir. Nous n’aurons pas le choix, si nous voulons un développement urbain viable. La légitimité de l’Etat repose sur la justice. Elle est affaiblie lorsque ceux qui gouvernent se déresponsabilisent, pactisent avec les prédateurs qui détruisent nos lieux de vie. Cette sympathie insoutenable des puissants à la prédation nous prive de nos biens communs. De nos droits inaliénables. La domestication de l’ordre au Sénégal, la démocratisation du social ainsi que la construction d’une société de confiance passeront d’abord par la remise en question de cet accaparement criminel de notre patrimoine naturel. Car c’est une absence de considération et un mépris qui incite la banalité du mal par toute la société.
Le bradage du littoral devrait occuper la place centrale du débat public. Redonner aux habitants de Dakar leur espace naturel, surtout leur littoral, est une priorité. Voilà un vrai travail pour l’actuel ministre de l’Urbanisme, du Logement et de l’Hygiène publique. Ce dernier, plein de bonne volonté, multiplie les sorties et les campagnes musclées pour désencombrer la capitale et lutter contre l’insalubrité. Mais il ne le fait que contre les faibles. Les marchands ambulants du rond-point Liberté 6 et de Sandaga, les mécaniciens du stade Léopold Sédar Senghor sont des cibles faciles. Ce ne sont pas eux qui nous empêchent d’aller trouver un peu de bonheur à la plage. Ils ne menacent ni notre santé ni notre bien-être.
Nous avons continué la discussion en parlant de football. Le gars avec la bière est un ancien footballeur. Il a joué en Europe. On a parlé du football local et de l’équipe nationale. C’était la meilleure partie de notre bavardage. Et puis on s’est dit à la prochaine. Je ne suis finalement pas resté longtemps. Pas parce que j’étais en mauvaise compagnie. La discussion était cordiale. Mes voisins avaient un esprit généreux et une énergie formidable. Riaient, criaient et invitaient à la bonne humeur. Mais je n’étais venu que pour respirer et profiter de la mer.
L'ÉDUCATION DES JEUNES FILLES, NOTRE ARME FATALE !
Plus que jamais nous devrions pousser nos filles à inonder les meilleures universités et écoles, à rivaliser de compétences avec les hommes. Nous avons l’impérieux devoir de leur apprendre l’autonomie et le « gueum sa bop rien que sa bop »
Le 8 mars est toujours une belle occasion de rappeler l’importance des femmes dans la marche du monde, et d’y dénoncer les inégalités qu’elles subissent depuis des siècles.
Pour ce qui nous concerne nous les Africaines, notre combat est toujours en cours. De notre naissance jusqu’à notre vie d’adulte, nous devons faire face à beaucoup d’injustices et à des violences bien encore trop nombreuses.
Je salue les organisations féministes qui défendent et promeuvent nos droits pour améliorer nos conditions partout dans la société. Le chantier est titanesque. Me Abdoulaye Wade, sous l’influence des féministes et de leur combat épique depuis l’indépendance, avait entrepris sous son magistère des réformes pour y introduire plus de parité. Ce fut le cas à l’Assemblée nationale où le nombre de femmes sénégalaises dépassent proportionnellement de loin celles des françaises. C’est dire le bond que nous sommes en train d’accomplir dans un milieu politique très masculin, voire sexiste !
Toutefois, la parité n’est pas encore atteinte. Ni à l’Assemblée nationale, ni ailleurs ! Le chemin est semé d’embuches comme nous le vérifions dans les résistances pour la prochaine application de la loi sur la criminalisation du viol et de la pédophilie. Des spécialistes en genre estiment que la parité serait seulement atteinte dans 100 ans. Attendrons-nous jusque-là ?
Ma philosophie sur la thématique de l’égalité femme homme est assez différente de celle des amazones. Je pars du principe que les femmes ne doivent pas être ghettoïsées ou stigmatisées. Elles doivent refuser de se contenter des rôles et positions réservés d’emblée aux femmes dans les organisations sociales, professionnelles et politiques. Nous ne sommes pas des potiches !
Trouvez-vous normal que, en 2020, nous devions battre le pavé pour revendiquer des droits qui sont naturellement les nôtres ? Trouvez-vous normal que nous sommes encore soumis à la domination de l’homme, car le code de la famille consacre la puissance paternelle au détriment de l’autorité conjointe ?
Je pense que notre meilleure arme, c’est de nous imposer aux hommes. La seule façon d’y parvenir, c’est l’éducation de nos jeunes filles, à leurs plus jeunes âges, pour leur inculquer force et dignité. Il faut qu’il y ait autant de filles qui réussissent leurs BFEM et BAC que les garçons. Il faut un nombre équivalent de filles en université que celui des garçons. Ce n’est pas le cas aujourd’hui !
C’est par l’acquisition de connaissances et de compétences que nous parviendrons à renverser la situation en notre faveur. Aujourd’hui plus que jamais nous devrions pousser nos filles à inonder les meilleures universités et grandes écoles, à rivaliser de compétences à tous les échelons avec les hommes. Nous avons l’impérieux devoir de leur apprendre l’indépendance, l’autonomie et le « gueum sa bop rien que sa bop ». C’est cela qu’on appelle soigner par la racine. Je vous le répète : nous devons enseigner chaque jour à nos filles qu’elles sont capables et fortes autant sinon plus que les garçons à affronter la vie.
L’Oréal, en novembre 2019, à Dakar, a organisé une cérémonie de remise de prix pour célébrer les scientifiques de l’Afrique de l’Ouest. Deux sénégalaises ont été primées : Fatoumata Ba et Najah Fatou Coly. C’est un exemple à suivre pour les filles et les femmes. C’est assurément notre meilleure perspective, celle d’éduquer et de donner confiance à nos filles.
par Charles Faye
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AU CORONAVIRUS, MALHEUR EST BON !
Puisse chacun d’entre nous combattre le spontanéisme et le «grawoul» pour s’imposer une rigueur, un respect sacré des règles et normes qui doivent régir toute vie collective surtout dans les grandes agglomérations urbaines
Le monde prend peur et nous avec et ce n’est peut-être pas si mal que ça, en ces temps, où l’on ose tout. Dit et montre tout, sans barrières, convaincu de notre droit du tout-savoir, du-tout dire que nous confère faussement l’ère digitale et sa révolution.
La maison de verre, nous y sommes enfin ! Les érudits avaient prévenu ! Mais, nous n’avons rien voulu entendre. C’est tellement plus simple.
Voilà que l’économie mondiale se crispe, après avoir été dopée par la vraie-fausse mondialisation, puis essoufflée par les frasques et rafales des replis identitaires et communautarismes délirants.
Le coronavirus est passé par-là. Dynamitant certitudes, garanties et autres spéculations de spécialistes de monnaie, bourses et marchés.
Ce n’est pas encore la panique, mais la peur de voir les cours s’effondrer est réelle. Le sauve qui peut n’est certes pas encore décrété, mais il se prépare. Le pire est en ligne de mire.
Vérité en deçà des Pyrénées, erreur au-delà.
Inféodée à l’inorganisation selon les études les plus poussées des réflexions hellénistes les plus brillantes, l’Afrique prend la mesure du covid-19.
Mais bon, elle a vu pire. Sauf que ce coup-ci, le virus coronaire fait son entrée sur ses terres, dans la peau de ses visiteurs étrangers. Pour une fois, Afriquia ne transmet pas le virus. Au contraire, elle le réceptionne. Mais faut-il s’en étonner.
Le futur du monde qu’elle représente est désormais couru par ce même monde. La crue mondiale y débordera. Alors préparons-nous à vivre, ou plutôt, revivre des arrivées massives, d’investisseurs, de travailleurs et chômeurs et les ménages d’ailleurs, qui ne verraient leur salut social, voire humanitaire, qu’en Kam. N’est-ce pas Wakam.
Le meilleur du coronavirus est justement cette réflexion à laquelle nous invite mon ami et frère Aly Ba : « Puisse chacun d’entre nous combattre le spontanéisme et le «grawoul» pour s’imposer une rigueur, un respect sacré des règles et normes qui doivent régir toute vie collective surtout dans les grandes agglomérations urbaines».
Transposés dans le monde politique, celui des affaires sociales et économiques, ces valeurs auront forcément pignon sur rue, dans la bonne et sobre gouvernance, dans la transparence et le respect des rendez-vous électoraux, dans la démocratie et la liberté d’expression.
Au regard des interdits du Macky, de priver de conseil des ministres les pigeons voyageurs revenus des salons parisiens, ou encore du confinement de tout le gouvernement jusqu’à nouvel ordre, l’on pourrait jubiler et louer l’émergence d’une résilience nouvelle.
D’autant que la remise à l’endroit de notre ADN normée à l’indiscipline notoire est devenue une nécessité dit le Macky.
Reste quand même à dire au même Macky que la reconversion devrait être conjuguée d’abord par lui-même, ensuite par nous et pour nous tous ! Pour notre plus grand bien.
Les Sénégalais n’attendent pas de voir les théoriciens de son 3e mandat exclus du conseil des ministres. C’est le cadet de leur souci et je prie le Macky de me croire. Certes, ils exigent de lui des réponses à leur préoccupation sociale, économique, sanitaire etc., mais aussi de la grandeur ! Et ça, ça ne se négocie pas ! Ouattara l’aura lui-même compris.
Quant au Coronavirus, pas besoin d’un dessein ! You are not welcome !
SAYDA MARIAMA NIASS, UNE VIE AU SERVICE DE L'ENSEIGNEMENT CORANIQUE
Il est des hommes qui, par leur génie et la maitrise de leur art, émergent du lot du commun des mortels. Au Sénégal, on en compte de ces hommes et femmes qui sont entrés dans l’histoire du pays, grâce au service rendu à la société et à la religion
Il est des hommes qui, par leur génie et la maitrise de leur art, émergent du lot du commun des mortels. Au Sénégal, on en compte de ces hommes et femmes qui sont entrés dans l’histoire du pays, grâce au service rendu à la société et à la religion. Sayda Mariama Niass fait partie de ces perles rares qui marqueront à jamais les esprits. Une référence dans l’enseignement du Coran au Sénégal et dans le monde.
Née en 1932 à Kossi, un village situé à une dizaine de kilomètres de Kaolack, Sayda Mariama Niass s’est très tôt distinguée par son attachement au Coran, comme le souhaitait son père El Hadj Ibrahima Niass Baye. Ainsi, c’est à l’âge de 5 ans qu’elle a intégré le Daara de Cheikh Muhammad Wuld Rabbani, grand érudit mauritanien qui enseignait le Coran à la plupart des enfants de Baye Niass. Dès ses premiers pas au Daara, Sayda Mariama signe un pacte avec la religion : servir l’islam et le Coran toute sa vie durant.
Elle n’a ainsi pas attendu l’âge adulte pour enseigner la parole sainte. Toute petite, elle suppliait son oustaz de lui laisser dispenser le cours à ses camarades.
Ayant ainsi très tôt mémorisée le livre saint, elle devient la chouchoute de son père, El Hadj Ibrahima Niass, qui l’honore grandement. Il la couvre de cadeaux et l’invite à l’accompagner dans ses nombreux voyages à l’étranger. C’est le guide religieux en personne qui lui enseigna l’arabe et les sciences religieuses. Celle qu’on appellera plus tard ‘’Yaye Boye’’ va bénéficier de toutes les attentions de Cheikh Al Islam qu’elle a côtoyé durant 43 ans. ‘’Toutes mes filles ont appris le Coran, mais tu es celle qui est la plus attachée au livre saint. Et c’est pour cela que je te préfère’’, raconte-telle, en évoquant ses relations avec son défunt père.
Ainsi, après avoir terminé ses études coraniques et sciences religieuses, Sayda Mariama Niass commença à enseigner le livre saint dans son Daara à Kaolack, alors qu’elle n’avait que 14 ans. Elle rejoint Dakar, en 1952, avec son époux El Hadj Oumar Kane, et continue sa passion d’enseigner. Elle reçoit les enfants de ses coépouses et d’autres du quartier dans sa chambre, à son domicile de l’avenue Malick Sy à cet effet. Le nombre de jeunes qui venaient étudier auprès d’elle ne cessant d’augmenter, elle se voit obliger de déménager son Daara dans la petite mosquée construite par son époux au milieu de la concession familiale, pour accueillir son beau monde. Elle dispensait ses cours pendant les weekends et les grandes vacances, pour permettre aux enfants d’allier enseignement coranique et école française.
Sa rencontre avec Abdou Diouf en 1984
N’ayant pas assez de moyens, à l’époque, pour trouver un espace approprié pour recevoir ses disciples qui devenaient de plus en plus nombreux, Sayda Mariama aménagea la cour de la concession familiale pour exercer son métier. Et à force de persévérer dans sa passion, la chance lui sourit finalement.
Ainsi, en 1981, le président Abdou Diouf, Premier ministre jusque-là, remplace à la tête de l’Etat Léopold Sédar Senghor. Le nouveau président fait alors le tour des concessions des chefs religieux du pays pour solliciter des prières. A l’étape de Kaolack, Sayda Mariama, en tant que fille de Baye Niass, est invitée avec son Daara à la cérémonie de réception du nouveau président. Elle effectue le déplacement pour aller assister à la cérémonie à Kaolack. A cette occasion, ses talibés accueillent le successeur de Senghor par des récitals de Coran mélodieux. Emerveillé par la maitrise des mômes du livre saint, le président Diouf demanda à rencontrer l’enseignante de ce fameux Daara venu de Dakar.
Et à son retour à la capitale, il reçoit Sayda Mariama qui l’informe qu’elle avait son école dans la cour de sa maison. Le président Abdou Diouf décide alors de lui attribuer un vaste terrain à la Patte d’Oie, en 1984. Cet espace abrite, aujourd’hui, le complexe scolaire El Hadj Ibrahima Niass, premier du genre à Dakar, qui concilie enseignement général et enseignement coranique. ‘’En plus de m’avoir octroyé un terrain, le président Diouf m’avait fait une lettre de recommandation pour que j’aille voir les chefs d’Etat arabes pour chercher des financements pour construire mon école. J’ai ainsi pu bénéficier des largesses de certains rois et émirs pour la construction du complexe sis à la Patte d’Oie et le rachat des locaux de Sacré-Cœur et Mermoz’’, partage-t-elle.
La création de l’institut d’enseignement El Hadj Ibrahima Niass
Aidée par d’influents dignitaires arabes, Sayda Mariama Niass entreprend ainsi, en 1984, à l’élargissement de ses Daara pour y intégrer l’enseignement général. Elle crée le complexe Cheikh Al Islam, El Hadj Ibrahima Niass de la Patte d’Oie pour l’enseignement général. ‘’La première parole du Saint Coran nous incite à apprendre et pas seulement le Coran, mais tout. En effet, il nous est recommandé d’apprendre et il n’est pas dit qu’il faut apprendre que le Coran. Cela veut dire que nous devons tout apprendre. C’est pourquoi, dans les instituts, en plus du Coran, on a intégré l’enseignement classique, car c’est aussi utile pour les enfants et pour la société toute entière’’, estime-t-elle.
Depuis son érection en institut, le Daara Al Qu’ran Al Karim de Sayda Mariama Niass fonctionne à temps plein, 9 mois sur 12 et reçoit des élèves venus de divers horizons, du cycle primaire au moyen et secondaire. Ayant connu des succès et le nombre d’élèves ne cessant d’augmenter, Sayda Mariama décide d’ouvrir d’autres instituts du genre dans d’autres quartiers de Dakar. Les sections de Mermoz et de Sacré-Cœur sont alors mises en place.
Une mère de famille parfaite
Elle est connue comme une brillante enseignante. Mais Sayda Mariama Niass n’en demeure pas moins une maman présente pour ses enfants. Elle alliait convenablement enseignement et activités ménagères. Ainsi, à l’instar de tous les enfants qu’elle a élevés, elle a inculqué une éducation exemplaire à ses 8 bouts de bois de Dieu. Ses 4 fils et 4 filles ont tous su bien allier enseignement coranique et enseignement général. Certains sont devenus des cadres. C’est le cas de son fils ainé, Cheikh Tidiane Ben Amar Kane, agronome de formation et qui, après avoir assuré plusieurs fonctions à la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’agriculture), est revenu auprès d’elle à Dakar pour prendre le relais. Il gère actuellement les instituts d’enseignement.
Sa petite sœur Aïssatou Kane est un haut fonctionnaire à la BCEAO de Dakar. Quant au benjamin Ousmane Kane, après la maitrise du Coran auprès de sa mère, à l’instar de ses autres frères et sœurs, il a continué ses études classiques aux USA où il a obtenu son doctorat. Il exerce actuellement en tant qu’enseignant chercheur à l’université d’Harvard aux Etats-Unis. Ces parcours sans faute de ces enfants s’expliquent par le fait que Sayda Mariama, en plus d’être attachée à l’enseignement du Saint Coran, accorde une attention particulière à l’enseignement classique.
Décoration à l’Ordre national du Lion
Son parcours de travailleuse et de fervente éducatrice a valu à Sayda Mariama Niass des hommages de reconnaissance à travers le monde et dans son propre pays. Pour avoir donné à l’enseignement du Coran ses lettres de noblesse, pour avoir représenté le Sénégal partout, la République lui a rendu un hommage bien mérité. Et cela continue. Si les présidents Wade et Diouf l’ont soutenue en de multiples occasions, le président Macky Sall est allé plus loin. En 2016, il l’a décorée de la médaille de l’Ordre national du Lion pour services rendus à la nation.
En plus des autorités étatiques, les chercheurs et universitaires du pays ont décidé de lui rendre hommage, de son vivant. C’est dans ce sens que le directeur de l’Institut islamique de la grande mosquée de Dakar lui a consacré un ouvrage entier.
En effet, Oustaz Thierno Ka, en collaboration avec l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, à travers son Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) dans ses rubriques d’hommages aux grandes figures islamiques du Sénégal, lui a consacré un ouvrage d’une cinquantaine de pages. Et travers ce dernier publié en 2013, l’islamologue Thierno Kâ retrace le riche parcours de cette dame au teint clair, de petite taille, mais grande par l’esprit.
Le monde du cinéma s’est aussi associé à ces hommages à Sayda Mariama Niass. A cet effet, le journaliste et réalisateur Cheikh Adramé Diop lui a consacré un documentaire de 58 minutes qui revient sur son parcours atypique. Deux ans de tournage, plusieurs pays visités, de longs séjours à Kaolack et au village de Kossi ont permis au journaliste de produire un film de haute facture sur la dame. Ses enfants, ses frères, sa famille proche et des oustaz tels qu’Aliou Sall, feu Barhama Diop et de nombreuses personnalités qui sont passées par son Daara y font des témoignages touchants. Sans compter les habitants de Kossi, ces vieux qui ont vécu, à l’époque de Cheikh Ibrahima Niass, y racontent l’enfance de Ya Sayda.
Adramé Diop est tout simplement parti à la source pour ressortir la vie de cette dame devenue une icône de l’enseignement coranique et surtout de la modernisation des Daara au Sénégal. Et ce, depuis longtemps. Chez Sayda Mariama, il n’a jamais été question de talibés qui mendient dans la rue. Au Daara Qu’ran Al Karim, on s’habille comme à l’école moderne. ‘’Le Coran est saint, on doit l’apprendre avec un corps propre et surtout dans un esprit tranquille’’, estime l’éducatrice.
Agée aujourd’hui de 88 ans, Sayda Mariama refuse de prendre sa retraite. Elle continue d’enseigner à ses petits-enfants et certains mômes qui fréquentent le Daara de Mermoz où elle vit actuellement.
IMMERSION DANS LE QUOTIDIEN DES BOUCHÈRES DE CASTORS
Elles sont nombreuses, ces braves dames qui embrassent de plus en plus des métiers qui étaient jusque-là réservés aux hommes, pour donner un coup de main au chef de famille tenaillé par la dépense quotidienne
Elles sont nombreuses, ces braves dames qui embrassent de plus en plus des métiers qui étaient jusque-là réservés aux hommes, pour donner un coup de main au chef de famille tenaillé par la dépense quotidienne. Une immersion au marché Castors permet à ‘’EnQuête’’ de découvrir le quotidien et l’ambiance des femmes vendeuses de viande, pour ne pas dire bouchères.
‘’Mbarou yapp’’, marché Castors ! L’atmosphère est très animée. La musique projetée par un magnétophone couvre à peine le bruit des marchandages. Certains vendeurs, reprenant les refrains d’un single de Wally Seck, en rajoutent à l’ambiance chaleureuse et très vivante. Sur les nombreuses tables faisant office de lieux de travail pour ces commerçants, est posée de la viande à gogo. Quelques dames, prenant place au milieu des nombreux bouchers, attirent la curiosité de certains visiteurs. C’est normal. Ce n’est pas dans tous les marchés sénégalais que l’on retrouve ces bouchers d’un autre genre.
Chez les Diouf, la vente de viande est une affaire de famille. Homme comme femme, tout le monde est dans le commerce de viande. Le teint bien caramélisé, une coiffure imposante constituée de longues mèches tombant jusqu’à hauteur de la ceinture, la taille élancée, Anta Diouf est occupée à nettoyer sa marchandise composée essentiellement de boyaux de mouton et de bœuf (‘’yelle’’, ‘’laxass’’, ‘’mbakk’’). Elle est devenue, depuis toute petite, dit-elle, bouchère. Un métier qu’elle a hérité de sa mère et que celle-ci a hérité de sa grand-mère. ’’On m’a baptisée avec l’argent de la boucherie’’, lance-t-elle dans un éclat de rire, laissant paraitre une belle dentition. Elle poursuit : ‘’Je fais ce métier depuis toute petite, en compagnie de ma mère. Et quand je suis devenue plus grande, j’ai commencé à travailler à mon propre compte. Le métier est, certes, très difficile, mais c’est mieux que de rester sans rien faire. Nous sommes une famille de griots, mais nous travaillons. La boucherie, c’est notre domaine et toute la famille y est. Notre papa est le délégué des bouchers du marché’’, dit-elle avec fierté.
En face d’Anta, sa mère, Soxna Diarra Mbaye s’occupe, de son côté, à nettoyer sa marchandise tout en bavardant avec les autres vendeuses. Toutes les deux quittent chaque matin Guédiawaye pour passer la journée au marché Castors en vendant de la viande, tout en assurant l’animation dans ce coin du marché. L’ambiance est tout simplement agréable à leur côté. On se taquine, on rit, on papote avec des brins d’humour qui retiennent parfois certains passants, obligés de ralentir le pas pour savourer cette belle ambiance.
‘’Je suis vendeuse de viande depuis toute petite. A l’époque, j’accompagnais ma maman au marché’’, se souvient mère Soxna Diarra Mbaye, la maman d’Anta Diouf. Elle ajoute : ‘’Ce travail me permet d’aider mon mari dans la dépense quotidienne. Le métier est, certes difficile pour nous les femmes, mais on rend grâce à Dieu, car on parvient à prendre en charge nos besoins. J’ai souvent mal aux pieds, à force de rester debout toute la journée. Parfois, c’est tout mon corps qui me fait mal, à cause du poids de la viande que je soulève ou du nettoyage des boyaux. Mais, avec l’ambiance dans le marché, on ne sent rien. C’est à la maison qu’on se rend compte qu’on est épuisée’’, explique la bonne dame.
À côté d’Anta et de sa mère, son amie Fatou Seck est aussi dans la vente de viande. Mais à la différence de ses voisines, Fatou évolue dans le marché de la viande de mouton uniquement. ‘’Je ne vends que de la viande de mouton. Ce n’est pas facile, mais on essaye de gérer. Aujourd’hui, les femmes travaillent comme les hommes. Ces derniers, seuls, ne peuvent pas prendre en charge toutes les dépenses. C’est donc aux femmes de les aider. Je suis griotte et bouchère. Mais quand mes ‘’geer’’ (nobles) ont besoin de moi pour leurs cérémonies, j’y vais pour perpétuer la tradition de mes ancêtres’’, laisse-t-elle entendre.
Seul homme au milieu de ces dames, Moussa Diouf revient sur les bienfaits du métier, non sans s’adonner à une classification des griots. ‘’En fait, explique-t-il, parmi les griots, il y a ceux qui chantent, ceux qui animent les cérémonies familiales, comme il y a aussi des éleveurs et des bouchers. Nous, nous faisons partie des bouchers. Toute la famille : les parents, les sœurs, le mari, les enfants, tous sont des bouchers. Ce qui montre qu’on exerce un bon métier. Si ce n’était pas le cas, les parents ne le partageraient pas avec leurs enfants. On ne peut qu’en être fier alors’’.
Pendant que sa mère et sa sœur Anta s’occupent à nettoyer les boyaux de mouton et de bœuf, lui, ayant épuisé déjà sa marchandise, se charge de l’animation musicale.
NGONE NDOUR, LA BOSS DES PLATINES
La directrice de Prince Arts a compris très tôt que la réussite, la reconnaissance et surtout le respect dans son métier se conquièrent. Elle ne s’est jamais contentée d’être la sœur de Youssou Ndour, pour espérer mériter quoi que ce soit dans la vie
Drapée dans une jolie djellaba bleue de nuit, la tête entièrement couverte d’un foulard noir, Ngoné Ndour attire par sa simplicité. Ce mercredi 4 mars, à notre arrivée à Prince Arts, c’est elle en personne qui nous ouvre la porte avec un sourire qui nous met à l’aise. Salamalecs chaleureux, comme de vieilles connaissances. La voix un peu grave et dans un français parfait, l’ingénieure du son nous entretient de son riche parcours, son amour pour les enfants, son attachement à la religion.
La directrice de Prince Arts a compris très tôt que la réussite, la reconnaissance et surtout le respect dans son métier se conquièrent. Elle ne s’est jamais contentée d’être la sœur de Youssou Ndour, pour espérer mériter quoi que ce soit dans la vie. À l’image de son frère, devenu star planétaire à force d’exceller et persévérer dans son métier, Ngoné est une bosseuse qui croit fermement à l’adage qui dit que la réussite est au bout de l’effort. Le féminisme et les privilèges dues à la femme la laissent de marbre. ‘’Je ne suis pas féministe pour beaucoup de raisons. Je me dis que la femme a sa place dans la société comme l’homme. Je pense que si on considère le côté professionnel, on ne doit pas parler de genre. Ce n’est pas parce qu’on est femme qu’on doit être privilégiée. On doit parler de l’individu et se baser sur la compétence de la personne pour lui donner un poste. Je crois plus au mérite. Je ne suis pas féministe, mais je défends l’intérêt de la femme. Pour moi, défendre l’intérêt de la femme n’est pas pareil au féminisme. Je ne veux pas qu’on violente les femmes, mais je ne suis pas obnubilée par cela’’, tranche-t-elle.
Convaincue que c’est par l’effort et le travail bien fait que l’on gagne le respect, Ngoné a fait du mérite son credo. Ses anciens collègues ainsi que tous ceux qui ont eu à travailler avec elle sont unanimes. Ngoné est une bosseuse et maitrise bien son domaine. ‘’Je n’ai jamais vu une bosseuse comme Ngoné. Elle aime travailler et fait tout pour avoir de bons rapports avec tout le monde. Elle est ouverte et demande conseil à tout le monde. Elle est correcte, polie et très pieuse. C’est une travailleuse hors pair’’, témoigne une de ses collaboratrices à la Sodav.
Née et grandie à Dakar, Mme Ndour a aussi fait ses humanités dans la capitale sénégalaise. Après une première partie de son cursus à Dakar, elle prend la destination de Londres pour poursuivre ses études. Influencée par son frère de chanteur, elle choisit d’évoluer dans le domaine de la culture, mais loin des micros et des scènes. A la place, elle travaille et manie le son en faisant des études en ingénierie de son. Un domaine qui était, jusqu’à-là, réservé aux hommes. ‘’C’est une influence que j’ai reçue de mon frère. J’ai toujours été passionnée par la musique et quand je grandissais, j’ai vu que sa carrière se développait un peu et j’ai eu une très grande influence venant de lui. Comme je ne savais pas chanter, quand je suis partie en Angleterre, j’ai eu à faire une connaissance qui m’a informée de l’école de formation d’ingénierie de son. J’aimais beaucoup les métiers d’homme et je n’avais jamais entendu parler d’un ingénieur de son femme en Afrique. J’ai décidé de suivre cette formation pour intégrer le secteur de la musique’’, se rappelle-t-elle.
Ses diplômes en poche, elle retourne au bercail pour exercer son métier. Faute de studio de production musicale à Dakar, à l’époque, elle se voit obliger de délaisser son métier d’ingénieur de son pour intégrer l’entreprise de son frère évoluant toujours dans le domaine de la musique. De simple secrétaire, puis chef de projet, en passant par la direction de l’usine de fabrication de cassettes, ensuite de Jololi, elle a su gravir les échelons pour arriver, grâce à sa hargne et à son savoir-faire, au sommet et devenir la directrice générale de Prince Arts.
Aux commandes de cette société de production de musique et d’organisation de spectacles, depuis sa création en 2007, cette belle dame, élancée au teint d’ébène et à la mine rayonnante, fait vibrer beaucoup d’amateurs de la belle musique. ‘’Le grand bal’’, les éditions du ‘’Grand bégué’’, les somptueuses soirées de spectacle de Youssou Ndour au King Fahd Palace sont ses œuvres. La ravissante petite sœur assure la direction artistique de la plupart des albums de son frère, Roi du mbalax. Elle manage également les spectacles de promotion et dirige la distribution des cassettes.
L’expérience ‘’Sen Petit Gallé’’ et ‘’Sen Petit Génie’’
Très ambitieuse et créative, elle ne se limite pas à la promotion des albums de Youssou Ndour. Cultivée et passionnée de culture, Ngoné Ndour est aussi dans la production de contenus pour le Groupe Futurs Médias. A l’ère du copier-coller des médias, elle innove et fournit à la TFM des émissions créatives. C’est l’exemple de ‘’Sen Petit Gallé’’ ou encore de ‘’Sen Petit Génie’’, deux émissions culturelles destinées essentiellement aux enfants.
En effet, très attachée aux chérubins, cette mère d’un unique fils a voulu, à travers son métier, faire sourire autant que faire se peut les petits bouts de chou. Ainsi, partie du constat que le paysage médiatique sénégalais manque de contenus pour ces mômes, elle crée deux émissions qui ont pour but de montrer le talent des enfants. ‘’Il y a une émission que je suivais sur la chaine Africable qui s’appelait «Mini-star» que j’adorais vraiment et je prenais tout mon temps pour la regarder. J’avais aussi constaté qu’au niveau du paysage culturel, il n’existait pas d’émissions du genre ou de projets pendant les vacances, pour montrer le talent des enfants. C’est pour cela qu’on a monté «Sen Petit Gallé», en nous inspirant certes de «Mini-star», mais en apportant des modifications pour y mettre notre touche personnelle. Ainsi, on a intégré beaucoup de choses que «Mini-star» n’avait pas’’, indique-t-elle.
Créé en 2013, ce concours est devenu le rendez-vous des grandes vacances à ne pas manquer. Et il n’est pas suivi que par les enfants. Bien d’adultes ne ratent pas les diffusions à la télé. Toutefois, il y a des gens qui n’ont pas adhéré au concept. En effet, des Sénégalais reprochent à l’émission de promouvoir le divertissement à la place de l’éducation pour les enfants. Mais pour l’initiatrice, loin de la décourager, ces critiques lui permettent plutôt d’améliorer la production. Consciente que la perfection n’est pas de ce monde, elle prend les critiques positivement pour pouvoir évoluer. ‘’Je vis positivement les critiques, parce que je me dis que nous sommes tous différents par rapport à notre perception du monde. J’aime les enfants et le milieu de la culture me passionne et j’ai pensé que, de par mon métier, je peux développer un volet enfant. Je pense que la culture peut beaucoup contribuer et contribue beaucoup à l’éducation’’, estime-t-elle. Encore que, disons que ceux qui ne se retrouvent pas dans ‘’Sen Petit Gallé’’ le seront forcément dans ‘’Sen Petit Génie’’.
En effet, toujours dans le souci de participer à l’épanouissement des enfants, la directrice de Prince Arts a mis en place, en collaboration avec la Coalition des organisations en synergie pour la défense de l'éducation publique (Cosydep) ‘’Sen Petit Génie’’. Une émission éducative. Un concours pour génies en herbe destiné aux élèves des classes de CM1. Outre la culture générale des enfants, l’émission permet d’équiper les écoles en salle informatique. En effet, pour chaque édition, l’école championne a droit à une salle informatique entièrement équipée. Et depuis sa création, sept écoles en ont bénéficié.
Malgré son âge et son allure de grande dame, Ngoné Ndour dit pourtant se sentir toujours gamine. Cela, parce que toujours passionnée et très attachée aux enfants avec qui elle entretient des relations très particulières. ‘’Je me suis dit que je suis restée enfant dans ma tête, car je suis beaucoup plus sensible et en sécurité avec les enfants qu’avec les adultes. J’ai toujours été comme ça. Pour moi, il n’y a pas plus génial que d’avoir des enfants. Ils sont purs. Avec eux, il n’y a pas de mensonge, ni de trahison. Je me sens plus à l’aise quand je suis avec eux qu’avec les adultes, parce que dans le monde des adultes, il y a beaucoup de rivalité, de jalousie, d’hypocrisie et de problèmes’’, considère-t-elle. Sa meilleure amie n’a pas 10 ans, dit-on.
Le respect des droits d’auteur, son autre combat
En plus d’être directrice de Prince Arts, Ngoné Ndour est aussi la présidente du Conseil d’administration de la Sénégalaise du droit d’auteur et des droits voisins (Sodav). Une société des artistes née d’une longue lutte des acteurs culturels pour le respect des droits d’auteur et des droits voisins. Faisant partie du comité de pilotage de la loi 2008 sur les droits d’auteur et droits voisins, après la mise en place de la Sodav, elle a postulé pour la présidence du conseil d’administration. Mais elle a perdu, lors de l’élection, contre Angèle Diabang. Deux ans après son élection, la réalisatrice a jeté l’éponge. Ngoné Ndour a, cette fois-ci, été élue en assemblée générale, en 2016, pour conduire les destinées de la première société civile des acteurs culturels sénégalais.
Très au fait de ce qui se passe dans le milieu culturel, elle fait tout pour contribuer au développement du secteur. Elle fait du combat pour le respect des droits d’auteur au Sénégal une affaire personnelle. Son objectif, aujourd’hui, est de faire en sorte que l’artiste se nourrisse de son art et que la Sodav assure sa mission de protection de leurs droits à tous les égards. En remplaçant le BSDA, la Sodav a étendu ses compétences aux droits voisins, incluant les interprètes. Cela va donc du musicien au danseur, en passant par le comédien ou encore le producteur audiovisuel et phonographique.
Un autre combat qui tient à cœur l’actuelle PCA, est le respect de la copie privée. Il s’agit des supports importés qui sont assujettis à la redevance appelée rémunération de propriété privée. ‘’La copie privée est l’un des plus importants droits économiques pour les sociétés de gestion collective. Cette redevance est reversée au niveau de la Sodav pour les partager aux ayants droit, à savoir les auteurs, les artistes interprètes et les producteurs. C’est une manne financière importante, parce qu’il s’agit des supports comme les téléphones portables, les clés USB, les disques durs, c’est-à-dire tout ce qui peut enregistrer une image ou un son et qui est importé. Il y a une redevance fixée dessus et que la Sodav pourrait récupérer pour reverser aux ayants droit. Cette copie privée est tellement importante pour la survie de la Sodav’’, explique-t-elle.
Femme de culture et de religion
Les évènements malheureux peuvent parfois nous ouvrir les yeux pour peser davantage sur le sens de notre vie. C’est ce qui est arrivé à Ngoné Ndour. La perte de son mari, il y a 4 ans, fut un évènement qui l’a assez marquée et l’a rapprochée davantage de la religion. Restée veuve depuis lors, elle a complètement changé de style vestimentaire. Le voile, les habits décents sont devenus de rigueur chez elle. Cet épisode douloureux de sa vie a renforcé sa foi.
‘’Depuis 4 ans, je porte le voile pour des raisons que tout le monde sait. J’avais perdu mon mari et durant mon veuvage, j’ai eu à beaucoup lire et à apprendre la religion, parce que j’avais beaucoup plus de temps pour me concentrer. Depuis, je porte le voile, parce que Dieu nous a dit ça. C’est ce que j’ai lu, compris et c’est ce que je fais. Ce n’est pas pour la mode. Qui me connait, sait que je ne badine pas avec ma religion. Je porte le voile, parce que c’est une recommandation divine. Avant, je portais tout, mais j’étais attachée à la religion. Pour moi, en matière de religion, il ne doit pas y avoir de «thiakhaane». Perdre un mari est très difficile et cela m’a permis de me ressaisir’’, laisse-t-elle entendre sur un ton assez ferme.
LE DUR QUOTIDIEN DES "MÈRES-PÈRES"
Elles sont instruites ou analphabètes, citadines ou campagnardes. Elles sont simplement femmes, mères, mais aussi… pères, en l’absence des ex-conjoints qui ont décidé tout bonnement de fuir leurs responsabilités. Elles ont accepté de partager leur vécu
Elles sont instruites ou analphabètes. Elles sont citadines ou campagnardes. Elles sont simplement femmes, mères, mais aussi… pères. En l’absence des ex-conjoints qui ont décidé tout bonnement de fuir leurs responsabilités, elles assurent seules. Ces braves dames prennent en charge toutes les dépenses de la famille. Cela va de la scolarité à la prise en charge médicale des enfants, en passant par la dépense quotidienne. Trois d’entre elles ont accepté de partager leur vécu avec ‘’EnQuête’’.
Les souvenirs restent vivaces dans la tête d’Aida Faye. Elle les aborde péniblement et peine à aligner correctement des phrases. Si la naissance d’un enfant est, pour beaucoup de couples, un évènement heureux, pour elle, les circonstances de la venue au monde de sa fille cadette, en 2018, sont pénibles et inoubliables.
‘’J’ai travaillé comme lavandière durant toute ma grossesse, pour payer mes ordonnances et les échographies’’, se remémore-t-elle, le regard vide, un brin de tristesse dans la voix.
Et pourtant Aida était toujours dans les liens du mariage, mais ne ressentait nullement la présence de son époux qui s’est détourné d’elle et de ses enfants. ‘’Mon mari disait qu’il n’avait pas les moyens de subvenir à nos besoins, alors que c’était faux. Il était toujours absent, durant mes grossesses, particulièrement les deux dernières. Je continuais à travailler et à garder un peu d’argent de côté pour les frais d’accouchement et les petites dépenses qui l’accompagnent’’.
Le coup a été encore plus dur à encaisser, après la naissance de sa fille. La mère de 3 enfants gardait encore l’espoir de célébrer cet évènement heureux auprès de son époux. Elle attendra en vain… ‘’Il n’est même pas venu au baptême et n’a rien donné pour les préparatifs. Il a juste délégué une de ses sœurs’’, regrette-t-elle.
Cet épisode était comme un halo de lumière. Elle a décidé de ne plus continuer à vivre dans ce ménage qui n’en était que de nom. Elle a demandé le divorce et continué à prendre en charge sa famille, comme elle le faisait si bien jusque-là. ‘’C’est difficile de supporter seule tous les frais. Je prends en charge la scolarité, les fournitures, je prévois l’argent pour les fêtes et, quelquefois, des ordonnances ne manquent pas’’. Elle est encore lavandière et se désole que l’argent qu’elle gagne couvre à peine ses nombreuses charges. Elle a d’ailleurs décidé, depuis quelque temps, de s’investir dans un petit business de produits cosmétiques et autres literies.
Mais le manque d’argent n’est qu’une partie des problèmes que cette mère-père rencontre. C’est la croix et la bannière, quand il s’agit d’obtenir des papiers pour ses enfants. ‘’Mon deuxième enfant n’a pas eu d’extrait de naissance, jusqu’en classe de 6e. A chaque fois que je demandais à son père de lui en faire, puisque, juridiquement, il est le seul apte à le faire, il refusait. Il disait que les enfants ne vivaient pas sous son toit, donc il n’avait aucune obligation envers eux’’, se souvient-elle.
Vêtue d’une taille-basse en brodé marron, un voile sur la tête, Aida enchaine son récit teinté de déceptions et d’amertumes. ‘’Pour se donner bonne conscience, mon ex disait à qui voulait l’entendre que j’ai toujours refusé son aide, ce qui n’est pas vrai. Il se targue même de m’offrir à chaque Tabaski la somme de 10 000 F et un gigot, alors que j’ai trois enfants en charge. Ce geste ne représente rien pour moi’’, clame la jeune dame.
‘’Un jour, vos enfants essuieront vos larmes’’
La situation d’Aida Faye n’est pas un cas isolé. Elle est le quotidien de plusieurs femmes sénégalaises qui, en l’absence d’un ex-mari, prennent seules en charge leurs enfants. Sur Facebook, elles se signalent, dans l’anonymat, à travers de tristes témoignages dans des groupes exclusivement réservés à des femmes. Si d’aucunes, en quête de soutiens, racontent leur calvaire, d’autres se vantent d’avoir traversé le désert, seules, en assurant une éducation exemplaire à leurs enfants. ‘’Courage aux femmes qui sont obligées de jouer aussi le rôle du père. Croyez-moi, un jour, vos enfants essuieront vos larmes’’, avait posté une dame dans un groupe de femmes, en guise de réconfort.
D’après les juristes, ces femmes sont dans ce qu’on appelle ‘’une famille monoparentale’’. Au Sénégal, ces femmes ont décidé de se battre pour que leurs enfants aient un minimum de bien-être. C’est le cas de Bineta Diallo, la maman d’une jeune fille de 15 ans. Elle l’élève seule, depuis sa naissance. Elle, au moins, a un salaire net qu’elle perçoit tous les mois. La quarantaine bien sonnée, Bineta est enseignante.
‘’Je n’ai pas demandé à naitre. Le jour qu’on t’annoncera ma mort…’’
Dans cette matinée du 27 février, Bineta Diallo nous reçoit dans l’école où elle sert. Son syndicat est en débrayage et elle a suivi le mot d’ordre. Dans une robe en tissu voile de couleur blanche aux motifs multicolores, un large sourire aux lèvres, elle explique fièrement à ses collègues la raison de notre visite. ‘’Elle est venue pour un entretien dans le cadre du 8 Mars. C’est pour parler du statut des femmes-mères, femmes-pères’’, lance-t-elle sur un ton taquin. Dans le bureau de la directrice où elle nous invite, Mme Diallo est très à l’aise pour revenir sur son histoire.
Si Aida Faye pose surtout le problème financier, Bineta est, quant à elle, plus préoccupée par la présence d’une autorité masculine pour l’éducation de sa fille.
‘’Le père a plus de rigueur dans l’éducation, alors qu’entre la mère et l’enfant, il y a de la complicité et de la compassion. Les femmes sont dociles. Au plan financier, je n’ai pas de problème, même s’il faut reconnaître quand même que, quand on est deux, il est plus facile de joindre les deux bouts. Je suis obligée de me sacrifier pour faire plaisir à ma fille et la mettre à l’abri du besoin. Une manière pour moi de l’aider à ne pas ressentir l’absence de son père’’, confie-t-elle.
Mais l’argent ne peut nullement remplacer l’affection d’un père. Malgré tous les efforts de Bineta, sa fille paraît être en manque de quelque chose. ‘’C’est à travers ses comportements que je peux lire sa tristesse. Elle essaye peut-être de m’épargner ses états émotionnels, mais c’est perceptible’’, se désole l’institutrice au teint clair.
Pis, dit-elle, la jeune fille envoie quelquefois des messages pas des plus gentils à son père pour se plaindre de cette distance. Ce dernier, dit-elle, n’appelle même pas pour prendre de ses nouvelles. ‘’Sa fille lui envoie des messages, des fois, pour se plaindre. Elle lui dit : «Pourtant, je n’ai pas demandé à naitre. Je suis sûre que mes frères sont dans de bonnes conditions. Est-ce que tu te soucies de mon existence ? On risque de t’appeler un jour pour te dire que ta fille est morte et là tu ne sauras pas quoi dire», raconte la maman désespérée par l’attitude de sa fille.
Face à cette situation, le papa rejette la faute sur son ex-femme qu’elle soupçonne de monter sa fille contre lui. Après son divorce, Bineta Diallo n’a pas voulu aller au tribunal pour faire au moins bénéficier à sa fille d’une pension alimentaire. Elle ne voulait compter que sur elle-même. Seulement, la mère de famille ne pensait pas que son ex-mari allait définitivement tourner le dos à sa fille, qui n’a jamais connu l’amour d’un père.
Mery Badiane : ‘’Je sens qu’il lui manque quelque chose que je ne peux lui donner’’
Il en est de même pour les deux jeunes garçons de Mery Badiane. Le plus âgé a 14 ans et l’autre 11 ans. Ce dernier ne connaît pas son père qui pourtant vit à Dakar comme lui. Le père étant absent depuis sa naissance, il n’appelle que de très rares fois. Mery croit que son ex-mari lui en veut, parce qu’il ne voulait pas divorcer, mais ne comprend pas qu’il tourne le dos à ses fils.
‘’Je vis avec mes enfants chez ma mère. Mon père étant décédé, il n’y a pas de figure paternelle à la maison. Il n’est pas facile, pour une femme, de devoir éduquer seule deux garçons. Mais j’y arrive tant bien que mal. Quand j’ai des problèmes, des fois, pour les corriger, j’appelle mon frère. Ils l’écoutent et font ce qu’il leur demande souvent’’, partage-t-elle. ‘’J’ai une chance que beaucoup de femmes vivant dans des familles monoparentales n’ont pas. J’ai pu avoir, avant mon divorce, la puissance maternelle. Je suis celle qui, légalement, décide de tout pour mes enfants. S’ils doivent voyager ou avoir un passeport, je n’ai pas besoin d’aller voir le père. C’est moi qui leur donne les autorisations’’, se réjouit-elle.
‘’Mon seul problème, aujourd’hui, et que je ne peux résoudre, est cette affection qui leur manque. Je remarque souvent que le plus petit de mes deux fils semble absent. Même son maître à l’école l’a remarqué. Je sens qu’il lui manque quelque chose que je ne peux lui donner, mais je n’y peux rien’’, se désole-t-elle.
Lors du divorce, devant le juge, elle n’a pas voulu d’une pension alimentaire pour ses enfants. Malgré tout, le juge a décidé d’une somme que le père devait verser. Jusque-là, l’ex-époux de Mery Badiane ne s’en est jamais acquitté.
Qu’elle s’appelle Aida, Bineta, Mery ou autre, le plus important, pour ces femmes qui élèvent des enfants dans la monoparentalité, est leur bien-être. Elles disent s’acquitter de leur devoir sans s’occuper du reste. Les pères fuyards, le tribunal de l’histoire jugera leur comportement. Elles appréhendent l’avenir différemment, mais restent toutes marquées par leur vécu.
‘’Je prendrai ma revanche’’
L’on se demande où sont les familles de ces pères déserteurs. Bineta Diallo considère que la famille de son ex-mari est complice des agissements de ce dernier. ‘’Le jour où ma fille devra se marier, je prendrai ma revanche sur sa famille paternelle qui devait être là, en l’absence du père. Elle saura que j’ai été seule à prendre soin d’elle’’, promet-elle.
Mery Badiane, elle, attend juste que ses enfants grandissent et réussissent. ‘’C’est là que je prendrai ma revanche. Leur père et sa famille sauront que, dans la vie, il faut toujours penser à ce qui va arriver demain. Je suis certaine qu’un jour, ils voudront renouer avec ses enfants qu’ils ignorent aujourd’hui’’.
Pendant ce temps, Aida Faye a choisi de mettre une croix sur tous les hommes. Son vécu ne l’encourage guère à contracter un nouveau mariage. Elle a été déçue et touchée dans son amour-propre. ‘’Je ne vais pas souffrir dans mon coin. J’ai choisi plutôt de continuer à vivre et à travailler pour mes enfants. Je considère que cela faisait partie de mon destin et qu’il me fallait le vivre’’, relativise la jeune dame, le sourire au coin.
Mais comme dit le slameur français Grand Corps Malade dans un de ses morceaux contenu dans son album ‘’Enfants de la ville’’, ‘’Pères et mères’’ : ‘’Il y a des pères nuls et des mères extra. Or, dix mères ne valent pas un père.’’
Ainsi, la présence d’un père est importante. Mais, quoi qu’il en soit, ‘’si la mère tue l’amertume, la magie s’éveille’’, assure Grand Corps Malade.