L’EXÉCUTIF ET LE LÉGISLATIF PLACÉS SOUS CONTRÔLE JUDICIAIRE*
EXCLUSIF SENEPLUS - Les tentatives répétées d'instrumentalisation de la justice par le pouvoir politique ont paradoxalement nourri les aspirations d'émancipation du Conseil constitutionnel. Pour les Sages, un processus de maturation interne s'est opéré
De l’ingratitude du devoir au devoir d’ingratitude : La révolution des « sages ».
L’indépendance des juges, comme l’indépendance dans la vie, ne se demande pas, car elle ne se donne pas. Elle s’arrache d’âpres luttes, c’est connu.
Longtemps soupçonné d’être de connivence ou en intelligence avec l’exécutif et sous le joug du législatif, le Conseil constitutionnel vient, une fois de plus, en déclarant « non conforme à la Constitution » la proposition de loi interprétative, d’apporter la preuve d’avoir définitivement arraché son indépendance à travers un coup de force institutionnel, réalisé avec tact et douceur, mais sur une longue période de maturation.
Beaucoup d’événements ont jalonné cette longue marche vers l’indépendance. Nous en citerons quelques-uns.
L’assassinat de Me Babacar Seye : un traumatisme indélébile dans l’inconscient collectif des juges
Dans le monde de Me Babacar Séye, on ne meurt que cinq fois. En effet, ce brillant avocat , devenu éminent membre et vice président du Conseil constitutionnel a subit un inédit quintuple assassinat.
Nous sommes le 15 mai 1993, il est 15h passées de quelques minutes. Quelques heures plus tôt, le Conseil constitutionnel venait de publier les résultats définitifs des dernières élections législatives en faveur du président Abdou Diouf. Une Renault 25 conduite par M. Abdou Aziz Ngom, assisté de son collègue le brigadier-chef Momar Niang, lui aussi membre des forces de sécurité, abordait tranquillement le virage de la rue des ambassadeurs, sur la corniche-Ouest presque déserte, lorsqu’elle est rattrapée par un autre véhicule, noir comme le présage qu’il portait, avec à son bord trois individus armés. Plusieurs détonations et Me Babacar Seye, vice président du Conseil constitutionnel du Sénégal s’affalait sur la banquette arrière. Le Conseil constitutionnel et la nation venaient d’être atteints en pleine tempe, la République venait de poser un genoux à terre. L’enquête complexe au parfum d’inachevé qui s’en suivit aboutira à l’arrestation et à la condamnation d’un groupuscule d’individus le 30 septembre 1994 à 18 et 20 ans de travaux forcés. Les commanditaires ne seront jamais inquiétés. Par cet acte froid et lâche, c’est le Conseil constitutionnel qui était visé. Les sages n’en ont jamais doutés.
En 2002, il est à nouveau « assassiné » par une grâce accordée à ses assassins par le president Wade, arrivé deux ans plus tôt au pouvoir.
Le 7 janvier 2005, Me Séye est à nouveau victime de la loi portée par le député Ibrahima Isidore Ezan avec la complicité de l’Assemblée nationale, qui votera cette proposition de loi d’amnistie. En votant cette loi, l'Assemblée, avec l’assentiment du président Wade, a consacré l’indécence et l’ingratitude de l’État à l’égard d’un de ses plus grand serviteur.
Le 15 février 2005, le Conseil constitutionnel, sans rancune, sans esprit de corps, valide la loi Ezan et « libère » définitivement les assassins de son honorable vice-président. Il vient de donner le coup de grâce à son défunt vice-président.
Le cinquième et dernier « assassinat » de l’honorable Me Babacar Seye est toujours en cours . La scène de crime ? Les plateaux télé. Le complice s’appelle « la presse » ; une certaine presse. Une certaine presse qui ne mérite pas ce nom, car elle permet de façon indigne à l’un des protagonistes redevenu acteur entièrement à part de la scène politique nationale, de se pavaner nonchalamment sur la scène de crime, de plateau en micro, donnant des bons points par-ci, révélant et sanctionnant par-là au grand dépit de la morale, des magistrats et du peuple.
Bien sûr, les protagonistes ont été amnistiés à travers une procédure parfaitement légale. Mais tout ce qui est légal n’est pas moral et le comportement de certains d’entre eux est amoral et immoral et au-delà de l'indécence, leur exhibitionnisme, frise la provocation. La République est aussi portée par des codes et des vertus non-écrits sans lesquelles elle n’est pas juste.
Les lois d’amnistie ne sont pas forcément initiées pour des soucis d’une justice impersonnelle , elles sont parfois de beaux costumes taillés aux mensurations de leurs initiateurs. Le débat actuel sur la dernière loi de cette nature nous en donne une illustration parfaite.
Tous ces événements cumulés ont sûrement provoqué un traumatisme chez les juges, qui ont compris que l’État ne garantissait ni leur vie, ni leur honneur.
Ainsi, dans la période post-traumatique, l’honorable juge sénégalais a senti une solitude immense et un manque de reconnaissance de la part de ceux pour qui il avait embrassé une noble vocation qui, dans toutes les religions monothéistes, est réservée au seul créateur suprême : unique juge. Une vocation qui force respect et honneur, mais qui pouvait être le pire des cauchemars dès lors que les protagonistes du jeu démocratique et plus précisément de l’État de droit ne jouaient pas honnêtement leur rôle.
Le juge ne savait pas qu’on pouvait ainsi tuer un vice-président du Conseil constitutionnel de la trempe de Me Seye, au service de l’Etat de droit pour que les soient auteurs libérés par une loi sur commande approuvée à une écrasante majorité, sans aucune autre forme de procès.
Une instrumentalisation de la justice devenue inacceptable
La justice est souvent “instrumentalisée”, à son corps défendant, par les hommes politiques et le Conseil constitutionnel n’échappe pas à cette règle malheureuse. En effet, la tendance un peu vicieuse des hommes politiques est de passer par la haute juridiction pour faire valider ou invalider des actes à portée hautement politique.
La tentative du « coup d’État institutionnel » à la veille de la dernière présidentielle ne voulait pas emprunter une autre voie. C’est ce qui s’est passé récemment en France pour circonscrire la loi immigration. Cette stratégie politicienne a été aussitôt condamnée par le président de la juridiction, à l’époque M. Laurent Fabius.
« Le Conseil constitutionnel [n’est] ni une chambre d’écho des tendances de l’opinion, ni une chambre d’appel des choix du Parlement, mais le juge de la constitutionnalité des lois », a rappelé son président, qui a regretté que « cette définition simple n’était probablement pas ou pas encore intégrée par tous ». M. Fabius, qui a critiqué la « confusion » chez certains entre le droit et la politique, a appelé à « respecter l’Etat de droit, qui se définit par un ensemble de principes cardinaux comme la séparation des pouvoirs, le principe de légalité et l’indépendance des juges ».
Les Sénégalais ont toujours rêvé de juges s’adressant aux politiques avec autant d’autorité et d’indépendance. Loin de ce juge flagorneur et louangeur à l’ouverture récente des cours et tribunaux.
La relation entre l’exécutif et le judiciaire a tout le temps suscité le doute, eu égard à de nombreuses procédures judiciaires au parfum de règlements de comptes politiques. Pourtant les juges sont, pour leur écrasante majorité, des professionnels aguerris qui ne condamnent que lorsqu’ils ont des preuves factuelles d’infractions pénales indiscutables et documentées.
Un déficit de confiance exacerbé dans la relation justice-politiciens -citoyens, entre 2021 et début 2024
Comme pour la société contemporaine, il y a une véritable crise morale dans le champ politique sénégalais où des politiciens décomplexés ont changé de paradigmes dans leur façon de faire de la politique. En effet, dans la période pré-électorale de la dernière présidentielle, ils n’ont pas hésité a attaquer frontalement les institutions de la République. Ce fut un mal, qui n’était pas nécessaire.
Cette période fut une descente aux enfers pour le juge qui a vu sa réputation dégringoler de son piédestal à cause des soupçons de connivence avec l’exécutif, mais aussi et surtout à cause des attaques venant d’opposants recalés par le Conseil constitutionnel au scrutin.
En effet, Il y a à peine un an, la réputation des juges était au ras des pâquerettes, avec des citoyens remontés contre ce pilier de la démocratie, à la fois vigie, sentinelle et arbitre incontournable de l’État de droit.
La justice diabolisée, présentée comme un des instruments de répression inféodé à l’exécutif, avait perdu la confiance d’une grande partie de la population sénégalaise opposée au régime en place.
Certains politiciens ont, paraît-il, réussi à éliminer des adversaires par l’instrumentalisation des procédures judiciaires et des adversaires se sont défendus en utilisant la tactique de la décrédibilisation du Juge en le présentant comme le bras armé et le complice du pouvoir exécutif.
C’est ainsi que l’honneur de beaucoup de juges fut traîné dans la boue résiduelle d’une confrontation politique de bas étage dans laquelle tous les acteurs politiques, sans exception, portent leur part, plus ou moins grande, de responsabilité.
Les juges ne seront pas les seules victimes de ce haro. Les FDS (Forces de Défense et de Sécurité) et la quasi-totalité des institutions représentatives de l’Etat impliquées dans le processus électoral en prendront pour leur grade. La faute à une opposition qui a légitimé l’usage de cette arme politique non-conventionnelle pour combattre un président qui a leur yeux était à la tête d’un gang de malfrats, déguisés en politiciens et qui, sous une apparente légalité s’adonnait à des complots et plus largement à de la délinquance d’État.
Ainsi, certains leaders n’ont pas hésité à lâcher leurs militants et sympathisants contre ce corps d’élites présumés impartiaux et justes dans toute démocratie qui se respecte.
Cette situation a atteint le summum de l'indécence avec les accusations de corruption contre d’éminents membres du Conseil constitutionnel. Des accusations gravissimes portées par des membres du PDS et qui ne sont pas étrangers à la prise de conscience des sages, lesquels ont enfin compris que leur indépendance était leur seul bouclier face à des politiciens irresponsables et des militants fanatisés.
Ce dernier crachat jeté sur la robe du juge constitutionnel a surement été la goutte de crachin de trop.
L’influence du Droit et de la jurisprudence comparés
L’analyse comparée de la jurisprudence est fondamentale pour les acteurs du Droit et le juge constitutionnel ne déroge sûrement pas à la règle. Il est intellectuellement, scientifiquement et professionnellement tenu de mesurer sa future décision à l’aune de la jurisprudence comparée. C’est à dire du Droit qui se dit ailleurs.
Moins d’un mois avant le rejet du report de l’élection présidentielle au Sénégal, le Conseil constitutionnel français venait de donner un uppercut mémorable à la « loi immigration » en la censurant partiellement mais considérablement dans sa décision du 25 janvier 2024.
Les sages français venaient ainsi, de démontrer une fois de plus leur indépendance, mais pas seulement ...
En effet, ils ont montré à travers leur pouvoir de contrôle de conformité, leur détermination à protéger les droits et libertés individuelles quitte à aller au-delà des articles numérotés de la loi. Si ce n’est pas du toupet ...!
Ce positionnement autoritaire au sens noble a pu inspirer le Conseil constitutionnel sénégalais qui a longtemps « refusé » de débrider ses prérogatives à travers un déni de compétences et une perplexité à contrôler au-delà des textes.
Cet excès de prudence peut s’expliquer par le contexte politique souvent hautement inflammable et la crainte d’être taxés de politicards en robe de juge .
Pour le Sénégal, l’ensemble des membres sont des professionnels du Droit rompus à son exercice. Ceci peut être un frein parce que la portée politique n’est pas toujours prise en compte. C’est peut-être ce qui explique la timidité du juge constitutionnel sénégalais face à des problèmes purement politiques, issus de confrontations politiques, mais transposés sur la scène judiciaire. Il serait d’ailleurs intéressant de varier la provenance des membres du Conseil en y nommant d’éminents hommes politiques, expérimentés et investis d’un sens élevé de l’État. Laurent Fabius, ancien president du Conseil constitutionnel français était un éminent homme politique et ancien premier ministre. D’ailleurs, toujours en France , tous les anciens chef de l’Etat sont des membres de droit du Conseil constitutionnel. Mais aucun d’entre eux n’y a encore siégé.
Le Conseil constitutionnel est, selon le contexte politique, sujet à des saillies politico-judiciaires. En effet, les avocats spécialisés dans la clientèle politique l’encombrent de procédures, notamment sur les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) pour montrer qu’ils ont épuisé toutes les voies de recours ou pour stopper ou ralentir le rouleau compresseur de l’exécutif contre un adversaire un peu trop ambitieux .
L’exécutif et le législatif placés sous contrôle judiciaire. Les juges ont-ils pris le pouvoir ?
C’est la résultante d’un long processus de maturation qui a conduit à la révolte des sages, avec comme point culminant, les événements politiques ayant conduit à la dernière alternance. Quand le chaos s’installe dans une démocratie et que les acteurs politiques sur les nerfs, s’affranchissent de toute limite et défient ou tentent de pervertir les institutions, il y a péril en la demeure.
Les forces de sécurité s’érigent en paravent contre les menaces physiques sur la stabilité nationale. La justice, quant à elle, déploie son parapluie de légalité au-dessus du peuple parce que les rapaces du chaos et de l’injustice survolent les droits et libertés individuelles et collectives.
Dès lors, l’État doit rester fort et debout afin de permettre à ces autorités d’aller puiser aux tréfonds de leurs prérogatives, les moyens de rétablir l’ordre républicain et l’État de droit.
C’est ainsi que devant l’autorité vacillante de l’exécutif et les errements du législatif, les juges du Conseil constitutionnel vont siffler la fin de la récréation à travers un arrêt historique. Dans son arrêt, le Conseil constitutionnel a en effet rejeté les deux textes fondant le report de l’élection présidentielle au 15 décembre 2024.
D’un côté, « le décret n° 2024-106 du 3 février 2024, portant abrogation du décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024, est annulé ».
De l’autre, « la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée sous le n° 4/2024 par l’Assemblée nationale, en sa séance du 5 février 2024, est [jugé] contraire à la Constitution ».
Cette décision a certainement sauvé notre pays de lendemains très incertains. Elle a peut-être sauvé notre démocratie et notre pays d’un chaos qui pouvait produire des conséquences regrettables pour tous les protagonistes.
Revanche sur les politiciens et non vengeance, ni diktat
La confrontation des trois pouvoirs doit mener à leur équilibre. Il n’y aura ni gouvernement, ni diktat des juges. C’est la loi de la démocratie, le système que le Sénégal a choisi. En effet, « Ne succombons […] pas à la tentation de concevoir les relations entre justice et pouvoir politique comme l’affrontement entre des politiques vénaux et corrompus et un aréopage de sages, de savants et de justes ; pas plus que comme le conflit entre une classe politique seule détentrice de la légitimité démocratique et des juges irresponsables – à tous les sens du terme ».
La démocratie est un système qui porte le principe de séparation et d’équilibre des pouvoirs dans son ADN. C’est un système qui ne fonctionne que dans cet équidistance et ce schéma au risque d’être dévoyé. Et une démocratie imparfaite ou pervertie est pire qu’une dictature. Aucun des trois pouvoirs ne peut et ne doit être tenté par le diable de la convoitise des prérogatives des autres.
S’il y a aujourd’hui des craintes ou soupçons de gouvernement ou de dictature des juges, c’est que sur ce terrain républicain oú se joue le match démocratique atypique dans lequel l’exécutif et le législatif portent le même maillot, le Conseil constitutionnel, arbitre par excellence, a marqué deux fois. Cette situation lui donne une ascendance certaine , mais ce n’est qu’un passage transitoire, indispensable pour remettre les pendules à l’heure de l’État de droit.
Cette mise en garde s’adresse à l’exécutif, à l’Assemblée nationale et aussi à une certaine opinion publique qui, selon le contexte politique, entretient des tensions et une pression sur les acteurs judiciaires. Au-delà du Conseil constitutionnel, ce sont tous les magistrats qui doivent prendre leur indépendance. Laquelle, comme le respect, ne se souhaite pas, ne se mendie pas, il s’exige et s’arrache sans ménagement.
L’indépendance du juge est sa meilleure assurance vie, son passeport pour la respectabilité. C’est un élément fondateur de l’État de droit et de la démocratie.
* Extrait d’un essai à paraître.
SENEPLUS SOUS CYBERATTAQUE
Votre site d'information fait face à une agression massive, comme Seneweb en février. Un timing préoccupant alors que le gouvernement menace de fermer des centaines d'organes de presse, alarmant les défenseurs de la liberté d'expression
(SenePlus) - Votre portail d'information, SenePlus.com, est depuis quelques jours victime d'une importante cyberattaque, un incident qui a pris une nouvelle dimension ce lundi 5 mai 2025. Cette offensive numérique n'est pas un cas isolé, puisque Seneweb, autre média en ligne important du pays, a également été ciblé par une attaque similaire en février dernier.
L'attaque contre SenePlus, de type DDoS (Déni de Service Distribué), vise à rendre le site inaccessible en le submergeant de requêtes provenant de différentes parties du monde. Les équipes techniques travaillent actuellement avec leurs partenaires dans le domaine de la cybersécurité pour maintenir l'accès au site et renforcer notre défense.
Seneweb avait subi le même type d'offensive entre le 17 et le 27 février 2025 en provenance des États-Unis, de la Russie, de la France et de l'Indonésie entre autres, d'après un communiqué du média.
Ces cyberattaques interviennent alors qu'au moins 381 organes de presse sénégalais sont menacés de fermeture par les nouvelles autorités pour "non-conformité" au Code de la presse. Une situation que de nombreux acteurs du secteur considèrent comme "une atteinte grave à la liberté de la presse".
Les attaques DDoS contre les sites d'information sont devenues fréquentes à l'échelle mondiale, touchant aussi bien des médias locaux qu'internationaux. Dans le contexte politique actuel du Sénégal, ces agressions numériques contre deux des plus importants médias en ligne du pays soulèvent des questions préoccupantes sur l'avenir de la liberté d'expression et le droit à l'information.
PRIX MARC-VIVIEN FOÉ, UN SÉNÉGALAIS PARMI LES TROIS FINALISTES
Le vainqueur de ce trophée qui récompense le meilleur joueur africain de Ligue 1 sera dévoilé le 12 mai sur RFI et France 24. En attendant, portrait croisé de ces talents en lice pour succéder à Pierre-Emerick Aubameyang.
Les trois finalistes du Prix Marc-Vivien Foé sont connus : le Sénégalais Habib Diarra, l’Ivoirien Evann Guessand et le Marocain Achraf Hakimi, par ordre alphabétique, sont les derniers à briguer la succession du Gabonais Pierre-Emerick Aubameyang.
Qui sera désigné le meilleur joueur africain de la saison 2024-2025 cette année ? Réponse le 12 mai prochain pour connaître le gagnant qui sera annoncé sur les ondes de RFI et sur les sites internet rfi.fr et france24.com. En attendant, présentation par ordre alphabétique des trois finalistes.
Habib Diarra, milieu de terrain (Strasbourg/ Sénégal)
À Strasbourg, cette saison, la jeunesse a pris le pouvoir et le brassard. Habib Diarra est le plus jeune capitaine de Ligue 1, à 20 ans. Une évidence en interne, dès l’entame de la saison, selon le coordinateur sportif du club alsacien et ex-Lion de la Teranga, Kader Mangane. « Malgré son jeune âge, c’est sa troisième saison à Ligue 1. Par rapport à notre groupe très jeune, Habib était le seul joueur expérimenté malgré son jeune âge. Formé au club, il incarne aussi les valeurs du club, du groupe, avec un très bon état d’esprit. »
Une joie de vivre qui fait la force d’un groupe strasbourgeois cosmopolite, où Habib Diarra, passé par Mulhouse dans son enfance, apparaît comme un local de l’étape. Milieu défensif, travailleur et polyvalent, il occupe aussi plus de place en sélection, à l’image de ses trois buts en novembre dernier, preuve de sa capacité à transférer les attentes autour de son capitanat en club jusqu’au niveau international.
Evan Guessand, attaquant (Nice/ Côte d’Ivoire)
Du haut de son mètre 88, Evan Guessand plane enfin sur la Ligue 1. À bientôt 24 ans, cet enfant de la balle, fils et frère de footballeur, confirme les attentes placées en lui par ses formateurs niçois. Ses statistiques ne disent pas tout. Il y a aussi cette présence, ce danger qu’il fait peser sur les défenses. « C’est un joueur qui a énormément progressé, qui s’est imposé vraiment comme un leader d’attaque, note Patrick Juillard, consultant dans l’émission Radio Foot Internationale. Il a pu jouer sur un côté ou au poste d’avant-centre, dans les deux cas, il a été très impactant. Il a montré des qualités physiques, parce qu’il est puissant, de vitesse et aussi d’efficacité, qu’il a beaucoup améliorée depuis ses débuts ».
Un déclic mental aussi. International ivoirien depuis l’été dernier, Evan Guessand a trouvé un équilibre, un cadre idéal pour s’exprimer. « Il a trouvé un coach (Emerse Fae) plus offensif qui lui a fait confiance. Maintenant, il a atteint une certaine forme de maturité, même si, à mon avis, il peut aller plus haut encore. »
Achraf Hakimi, défenseur (Paris SG/Maroc)
Le Parc des Princes s’est habitué à scander son nom. Cette saison, Achraf Hakimi a notamment marqué face au PSV Eindhoven et Aston Villa en Ligue des champions. Logique selon le défenseur marocain arrivé en 2021 au PSG qui est désormais un cadre de son équipe. « J’ai plus de responsabilités, je suis l’un des capitaines de l’équipe. Je prends ce rôle à cœur, sûr et en dehors du terrain. Si on a besoin de moi, je suis là. »
Lorsque Marquinhos est absent, c’est à l’ancien Madrilène que Luis Enrique confie le brassard de capitaine. Aujourd’hui, Hakimi est un prétendant naturel au prix Marc-Vivien Foé. Éric Rabesandratana, consultant pour Radio Foot Internationale, en a fait son favori. « Dans son comportement, il a la tête d’un gagnant. Dans ses performances sportives, dans son état d’esprit, dans son implication, c’est un autre Hakimi. Pour moi, il mérite 100 fois d’avoir ce titre. C’est incontestable. » Deuxième du classement l’an passé, le Marocain pourrait cette fois rafler le trophée. Il succéderait notamment à ses compatriotes Sofiane Bouffal et Marouane Chamakh, premier lauréat en 2009.
"DIALLO PICCI", RETOUR SUR LA VIE D’UN DÉBROUILLARD PORTÉ PAR SES AILES
Amadou Diallo a su s’envoler vers la gloire et la renommée à force de persévérance et d’audace. En ce 05 mai 2025 commémorant son rappel à Dieu en 1998, retour sur le parcours d’un homme passionné par les oiseaux.
Amadou Diallo plus connu sous le nom de Diallo « Picci » a su s’envoler vers la gloire et la renommée à force de persévérance et d’audace. En ce 05 mai 2025 commémorant son rappel à Dieu en 1998, retour sur le parcours d’un homme passionné par les oiseaux.
La plus célèbre route de Thiaroye porte son nom : Tally Diallo. C’est l’histoire d’un jeune Foutanké qui a débarqué à Dakar dans l’anonymat pour devenir célèbre grâce à la vente des oiseaux. D’où le sobriquet de «Diallo Picci». Un destin qui a pris son envol à l’âge de 15ans. Né en 1918, il commence déjà à se débrouiller sur le débarcadère de l’île de Gorée où il plonge pour récupérer des pièces de monnaie jetées par de touristes.
Plus tard, il sera employé comme contremaître dans une usine de pêche. Cette étape va changer le cours de sa vie car c’est dans cette usine que le déclic va arriver. Amadou Diallo remarque que beaucoup d’amis de son employeur viennent chez lui pour admirer des oiseaux. Il flaire un bon filon et décide d’aller attraper des oiseaux pour les vendre aux Européens. Il commence par les oiseaux de Dakar avant de s’étendre peu à peu à l’intérieur du Sénégal.
Le jeune homme commence ainsi à voler de ses propres ailes. Diallo Picci, sans le savoir, se lance sur un chantier qui va le rendre riche. Il parcourt les régions du Sénégal à la recherche d’espèces rares. De retour à Dakar, il se rend au marché Kermel pour vendre ses oiseaux aux Européens, qui se les arrachaient. Les rêves pleins la tête, l’argent commençant à couler à flots, il décide de conquérir le marché international. Diallo Picci décide de se rendre en Europe.
Dans son domaine de Thiaroye, il aménage une grande concession juste pour y abriter des oiseaux. Ce qui va lui valoir quelques moqueries. C’est de ces moqueries, d’ailleurs, qu’on lui colle le sobriquet de « Diallo Picci». Ces remarques et ces moqueries, « Diallo Picci» n’en a cure. Il pense plutôt à agrandir ses activités. L’activité de Diallo suscite un intérêt chez le Président Léopold Sédar Senghor qui a eu écho de ce Foutanké qui a séduit l’Europe. Et le chef de l’État de décider d’aller visiter l’oisellerie à Thiaroye. C’est lorsque ce dernier venait rendre visite à Amadou Diallo, qu’il avait exigé la construction de la route goudronnée menant tout droit chez son ami Foutanké.
L’histoire d’Amadou Diallo est la preuve qu’il est possible de prendre son destin en main avec de l’audace . Le passionné mourut le 05 mai 1998 à l’âge de 80 ans, laissant derrière lui un héritage qui fait toujours jaser. Comme quoi, il suffit de déployer ses ailes et de rêver grand.
96 PATIENTS DIALYSÉS EN DANGER AU HANGAR DE YOFF
À la veille de leur séance du mardi 6 mai, ces malades font face à une rupture alarmante de kits de dialyse, de réin et de solutions de glucose. Une situation critique qui fait planer un risque vital.
Une situation critique menace actuellement la continuité des soins des 96 patients dialysés pris en charge au niveau du hangar des pèlerins de l’aéroport Léopold Sédar Senghor de Yoff. À la veille de leur prochaine séance, prévue ce mardi 6 mai, une rupture inquiétante en kits de dialyse, en réin et en solutions de glucose fait planer un risque vital sur les malades.
Chaque séance de dialyse est indispensable à la survie des patients insuffisants rénaux. En manquer une seule peut entraîner de graves complications. Face à cette urgence, les malades et leurs familles lancent un appel solennel aux autorités sanitaires et à l’ensemble des institutions concernées.
Des échanges ont eu lieu avec le Directeur du centre de dialyse ainsi qu’avec le Professeur référent d’après un malade qui s’est confié à nous. « Nous ne pouvons pas nous permettre de rater une seule séance. C’est une question de survie. Nous demandons simplement à être soignés dans la dignité », confie la patiente.
Les patients appellent les autorités sanitaires et gouvernementales à agir sans délai pour garantir l’approvisionnement des centres et assurer la continuité des traitements.
CAN U20, LES LIONCEAUX S’INCLINENT FACE AU GHANA
Avec seulement un point pris en deux matchs, le Sénégal est désormais en position délicate dans le groupe. Son dernier match de poules contre la RDC, leader après sa victoire contre la Centrafrique (3-1), s’annonce capital.
Le Sénégal a connu une soirée difficile ce lundi au stade de Suez, où les Lionceaux se sont inclinés 1-0 face au Ghana lors de la deuxième journée de la Coupe d’Afrique des Nations U20. Tenants du titre, les jeunes Sénégalais se retrouvent désormais dos au mur dans leur quête de qualification pour les quarts de finale.
Mal entrés dans la rencontre, les Lionceaux ont rapidement été mis en difficulté par l’intensité des Black Satellites. Dès la 15e minute, une erreur de Serigne Fallou Diouf permettait à Mensah d’ouvrir le score pour le Ghana. Malgré quelques sursauts offensifs, notamment des tentatives de Yaya Diémé, le Sénégal n’a pas réussi à inverser la tendance face à un adversaire solide et bien organisé défensivement.
Au retour des vestiaires, le sélectionneur Serigne Saliou Dia a tenté de réagir en injectant du sang neuf avec les entrées d’Abdourahmane Dia et Clayton Diandy. Ce dernier s’est illustré à la 51e minute, mais sa frappe a été superbement détournée par le gardien ghanéen. Le Ghana, fidèle à sa stratégie de pressing haut et de rigueur défensive, a réussi à contenir les assauts sénégalais.
Les minutes s’égrenant, les Lionceaux ont multiplié les imprécisions et les pertes de balle, notamment dans l’entrejeu, à l’image de celle de Pape Daouda Diong à la 57e minute, qui a failli coûter un deuxième but. Malgré une fin de match plus rythmée, les tentatives sénégalaises manquaient de tranchant.
Avec seulement un point pris en deux matchs, le Sénégal est désormais en position délicate dans le groupe. Son dernier match de poules contre la RDC, leader après sa victoire contre la Centrafrique (3-1), s’annonce capital. Une victoire est impérative pour continuer l’aventure et défendre le titre acquis lors de la précédente édition.
Les Lionceaux devront faire preuve de caractère, de réalisme et de rigueur pour espérer renverser la tendance. Le moindre faux pas pourrait signifier une élimination prématurée, un scénario que les champions en titre veulent à tout prix éviter.
RÉVOLTE CONTRE LE BLANCHIMENT DE LA PEAU DANS UN FILM SÉNÉGALAIS
Déjà primé au festival Vues d'Afrique de Montréal et remarqué au FESPACO, ce film engagé raconte l'histoire de Khalilou, un étudiant dakarois qui se mobilise contre les normes de beauté imposant la peau claire
Le film Timpi Tampa, premier long métrage de la réalisatrice sénégalaise Adama Bineta Sow, qui aborde la question du blanchiment de la peau, sortira en salle le 9 mai prochain, simultanément au Sénégal, dans une dizaine de pays d’Afrique francophone et en France, a appris l’APS.
Ce long métrage de fiction, qui mêle comédie et drame social, a été présenté en avant-première ce lundi matin au cinéma Pathé de Dakar, en présence de l’équipe du film, de journalistes et de professionnels du cinéma.
Timpi Tampa aborde la question du blanchiment de la peau à travers l’histoire de Khalilou, un étudiant de 20 ans vivant à Dakar avec sa mère atteinte d’un cancer causé par des produits de dépigmentation.
Pour dénoncer les normes de beauté qui valorisent les teints clairs, il décide de se travestir pour participer à un concours de beauté universitaire, créant autour de lui, un mouvement baptisé ‘’Naturelles, Belles et Rebelles’’.
Le rôle principal est interprété par Pape Aly Diop, récompensé du prix du meilleur comédien au festival Vues d’Afrique de Montréal. Le film y a également obtenu le prix ”Agir pour l’égalité’’ ainsi qu’une mention spéciale du jury. Au dernier FESPACO, Timpi Tampa avait reçu une mention dans la section Perspectives.
”J’ai voulu traiter un sujet qui me touche profondément, avec justesse et émotion’’, a déclaré la réalisatrice Adama Bineta Sow à l’issue de la projection. Elle a souligné l’urgence de ‘’déconstruire les standards de beauté qui causent des ravages silencieux’’.
Pour le producteur Oumar Sall, le film se veut un acte de ‘’sensibilisation’’. ”Le message est universel. Il faut que ce film soit vu. Il touche chacun de nous et appelle à une prise de conscience collective”.
Distribué dans une cinquantaine de salles en Afrique et en France, Timpi Tampa ambitionne de rapprocher le cinéma africain de son public tout en portant un message fort, selon lui.
Présent à la projection, le critique de cinéma Baba Diop estime que Timpi Tampa est ”une révolution douce de notre cinématographie”, saluant un film ”à la fois populaire et exigeant, ancré dans la réalité sociale contemporaine”.
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QUAND AIMER ÉTAIT UN ACTE DE RÉSISTANCE
Dans les colonies esclavagistes, l'affection entre personnes noires était un défi au système. Le Code Noir exige l'autorisation du maître pour tout mariage, transformant chaque union en une bataille pour la reconnaissance de l'humanité des esclaves
Dans le contexte brutal de l'esclavage, un phénomène remarquable a émergé : le Black Love. Ce concept, qui désigne l'amour entre personnes noires, est né d'une histoire complexe marquée par l'oppression coloniale et l'esclavagisme.
Avant la colonisation, la notion même de "race noire" n'existait pas en Afrique, où les identités étaient définies par l'appartenance ethnique plutôt que par la couleur de peau. C'est le système colonial qui a regroupé diverses populations africaines sous l'étiquette "noire", créant ainsi les conditions dans lesquelles le Black Love allait émerger.
Sous le régime esclavagiste, les relations affectives entre personnes noires étaient strictement contrôlées. Le Code Noir exigeait le consentement du maître pour tout mariage, et les couples pouvaient être séparés à tout moment pour être vendus. La propagande coloniale présentait également les personnes noires comme incapables d'émotions profondes ou de loyauté.
Face à cette déshumanisation, l'amour entre personnes noires est devenu un acte politique - une forme de résistance affirmant une humanité niée. Aujourd'hui, le Black Love continue d'évoluer comme un symbole d'amour transgressif et intersectionnel, célébré notamment aux États-Unis le 13 février lors de la Journée nationale du Black Love.
Ce phénomène reste un sujet de réflexion contemporain, interrogeant notamment la place des couples mixtes et le pouvoir de l'amour face aux constructions raciales héritées de l'histoire coloniale.
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LA MILITANTE QUI DÉFIAIT SENGHOR
Octobre 1975 : Eugénie Rokhaya AW est condamnée avec onze autres membres d'un parti clandestin pour avoir osé s'opposer au régime sengorien. Portrait d'une femme d'exception dont le combat politique a marqué l'histoire du Sénégal
Dans les méandres de l'histoire politique du Sénégal, certaines figures se détachent par leur courage et leur détermination. C'est le cas d'Eugénie Rokhaya AW, journaliste engagée dont le parcours exemplaire mérite d'être raconté.
Le 18 octobre 1975, sous le régime de Léopold Sédar Senghor, douze membres d'un parti clandestin appelé "And Jef" (unités dans l'action) sont condamnés par la cour de sûreté de l'État. Parmi eux, une femme se distingue par son charisme et ses convictions profondes : Eugénie Rokhaya AW. Le groupe est accusé d'avoir formé une opposition clandestine rassemblant plusieurs mouvements gauchistes et d'avoir diffusé un journal clandestin intitulé "Xarebi" (La lutte).
Dans la clandestinité, Eugénie utilisait divers pseudonymes comme « Era » pour protéger son identité. Avec ses camarades dont Marie Angélique Savané, elle dénonçait inlassablement la corruption, le népotisme et les pratiques douteuses dans l'administration sénégalaise. Son combat était celui d'une justice sociale et d'une gouvernance transparente.
Son arrestation révèle les revêtements du régime en place. Lorsque les autorités viennent la chercher, elle les prévient de son état de grossesse, mais cela n'y change rien. Malgré les interventions en sa faveur, elle restera incarcérée et fera malheureusement une fausse couche en prison. Cet épisode tragique illustre les conséquences personnelles de son engagement politique.
Tous ceux qui l'ont connu s'accordent à décrire une femme d'une "simplicité extraordinaire". Généreuse, serviable, accueillante et dotée d'une grande droiture, Eugénie était avant tout "une dame de cœur" qui pensait aux autres avant elle-même. Sa lutte était motivée par la volonté de voir ses concitoyens prendre conscience de leur oppression et s'en libérer.
Au-delà de son engagement politique, Eugénie Rokhaya AW était une intellectuelle complète : philosophe et passionnée d'art, elle a également marqué le journalisme sénégalais par son rôle de formatrice innovante au CESTI (Centre d'Études des Sciences et Techniques de l'Information). Son influence s'étend à de nombreux journalistes qu'elle a formés et inspirés.
Son histoire rappelle également, selon le journaliste Ass Mademba Ndiaye que la lutte pour la démocratie au Sénégal ne date pas d'hier. Selon ce dernier, lorsqu'on parle de prisonniers politiques, il faut se souvenir de figures comme Charles Gueye, qui a passé dix ans de sa vie en prison pour ses convictions politiques. Ces parcours rappellent que l'histoire politique du Sénégal ne commence ni en 2012, ni en 2024, mais s'inscrit dans une longue tradition de résistance.