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7 juin 2025
par Mohamed Gueye
MACKY SALL A EU 12 ANS AVANT L’USURE DU POUVOIR
Un an après l'arrivée de Pastef, les contradictions s'accumulent : suppression des machines à café dans l'administration et serrage de ceinture pour les fonctionnaires, mais missions à l'étranger en classe affaires et véhicules de luxe pour les élus
Un litre de carburant Super revient à 990 Cfa au Sénégal, et celui du gasoil à 775 francs. A Bamako, le même litre est passé de 800 à 775 Francs Cfa. A Ouagadougou, l’essence revient actuellement à 850 francs le litre, et le gasoile est à 675 francs Cfa. Le carburant du Mali, comme d’ailleurs tous les hydrocarbures raffinés destinés à ce pays enclavé, passe par le Port de Dakar, tandis que celui du Burkina arrive à travers la Côte d’Ivoire et le Togo. Ah ! A ce propos, à Abidjan, l’essence coûte 855 francs Cfa et le gasoil 700 Cfa.
Les automobilistes du Sénégal et d’autres usagers se posent encore la question de savoir pourquoi les prix de ces produits raffinés sont si chers chez nous, alors que, contrairement au Mali, au Burkina et au Niger, le Sénégal se targue de disposer d’une des plus anciennes raffineries de l’Afrique de l’Ouest, à côté de la Sir de Côte d’Ivoire. A l’international, le prix du carburant, tous produits confondus, est à la baisse, du fait d’une conjoncture internationale favorable. Quasiment tous les pays d’Afrique de l’Ouest ont été entraînés par ladite conjoncture internationale et ont baissé leurs prix. On peut parier que la majorité de ceux qui l’ont fait ne l’ont pas regretté. Exception des plus notables, le Sénégal du «Projet» porté par la Vision 2050 a décidé de maintenir les tarifs hérités du temps de Macky Sall, quand le contexte était à la guerre entre l’Ukraine et la Russie, qui a vu le prix du baril flamber. Dans ce pays, la taxation est particulièrement lourde sur les prix des produits pétroliers. Il y a plus de dix ans déjà, les pétroliers sénégalais se plaignaient de ce que la taxation pressurait les consommateurs et ne laissait quasiment pas de marge aux distributeurs. A ce jour, pas grand-chose n’a changé. Sur le litre payé à la pompe, les pétroliers assurent recevoir moins de 10% du prix, tandis que les caisses de l’Etat, à travers multiples taxes, encaissent l’essentiel. Cette situation a déjà fait l’objet de nombreuses analyses dans les médias sénégalais, depuis bien longtemps.
Pendant longtemps, les pouvoirs publics semblaient se mettre à l’écoute de leur opinion publique et s’arrangeaient, un tant soit peu, pour alléger les charges pesant sur les consommateurs du Sénégal. Bizarrement, dans ce régime qui s’est adjugé pour mission de créer un pays «souverain, juste et prospère», ce dernier terme de la profession de foi ne semble pas proche d’être réalisé, tant le confort relatif des citoyens commence à devenir un mirage. Le paradoxe est qu’aujourd’hui, le Sénégal se targue d’être devenu un pays producteur de gaz et de pétrole. Si l’on peut comprendre que l’Etat et ses partenaires veulent d’abord sécuriser leur retour sur investissement afin de pouvoir dégager des marges, on serait tout de même en droit de demander à ne pas payer plus cher notre combustible que les voisins moins bien nantis. Surtout que quand un pays a pour ambition d’enrichir ses citoyens, il ne met pas en œuvre des conditions pour les appauvrir encore plus.
Des voix commencent déjà à s’élever dans les couloirs du régime pour rappeler les exigences des partenaires financiers étrangers, en première ligne desquels se trouve le Fonds monétaire international (Fmi), qui ne cessent de demander à l’Etat une réduction de son train de vie, ainsi que la suppression de certaines subventions dont celles sur l’énergie est la plus symbolique, tellement elle est devenue récurrente depuis une vingtaine d’années. Ce serait vraiment le monde à l’envers que le régime dictatorial et antipopulaire du sanguinaire Macky Sall, dont les mains sont tachées du sang de 80 martyrs sénégalais, soit celui qui a le plus résisté face aux oukases de ses maîtres étrangers, et que le régime populaire le mieux élu de l’histoire du Sénégal puisse se plier à ces exigences indignes. Et il ne s’agit pas que de la seule question qui puisse choquer.
Ayant trouvé un pays au quatrième sous-sol de son niveau de développement, le pouvoir patriotique a demandé à tous les citoyens de se serrer la ceinture, au propre comme au figuré. Les fonctionnaires voient leurs avantages rognés -sauf, comme par hasard, ceux des services fiscaux de l’Etat-, des employés des secteurs public et parapublic se retrouvent au placard s’ils ont de la chance, quand ils ne sont pas radiés des services pour divers motifs. Le tout, dans l’optique de faire faire des économies. On a même vu notre Premier ministre faire la leçon à des agents de l’Administration sur l’efficacité énergétique dans les bâtiments de l’Etat. Les recommandations sont allées jusqu’à la suppression des machines à café dans certains bureaux. Une manière de souligner que même des économies de bout de chandelle sont bonnes à prendre.
Au moment où ces sacrifices sont demandés au commun des fonctionnaires, des directeurs se disputent avec leurs prédécesseurs sur l’acquisition de véhicules de fonction dont le montant avoisine les 100 millions de francs Cfa. Des ministres sont mis à l’index pour avoir échangé du mobilier de bureau en bon état contre un autre encore plus impressionnant, aux frais du contribuable. Tous ces comportements faisaient l’objet de critiques acerbes de la part des nouvelles autorités, à l’époque où elles se trouvaient dans l’opposition.
Aujourd’hui, le président de l’Assemblée nationale, en réponse aux critiques de son opposition qui l’accusait de se préparer à payer des véhicules 4X4 tout neufs aux députés de l’Assemblée, vient de répondre de manière défiante : «J’assume pleinement l’achat des véhicules pour les députés.» Il est allé jusqu’à ajouter : «Je n’accepterai pas de diriger une institution qui emprunte les taxis ou Jakarta.» Pour couronner les choses, M. Ndiaye vient de se rendre en mission aux Emirats arabes unis, avec une bonne délégation de parlementaires. On sait qu’un billet ordinaire en classe économique sur la compagnie Emirates ne coûte pas moins d’un million de Cfa. Il serait curieux de savoir combien de députés vont tenir compagnie au président de l’institution parlementaire en classe Affaires de l’avion, et à combien le séjour de la délégation va revenir aux caisses du Trésor.
Sans faire insulte aux élus du Peuple de croire que leur séjour dans ce pays ne serait pas utile au pays, on ne peut s’empêcher de se rappeler les directives émises dans une circulaire du chef du gouvernement, le 22 janvier dernier, en matière des voyages et missions à l’étranger. Si l’Assemblée n’est pas le gouvernement, elle n’en reste pas moins une institution de la République.
Le Premier ministre s’est, lui, rendu à Ouagadougou avec une bonne délégation ministérielle. Ayant été à l’origine des décisions de restriction de dépenses, on pourrait parier qu’il n’aura pas enfreint ses propres directives ; même si l’on peut se demander ce que faisaient certains fonctionnaires au sein de la délégation. Mais cela n’est pas le plus important.
Si un an et un mois après l’arrivée de Pastef au pouvoir, on en vient à vouloir comparer l’état de marasme de la population avec certaines dépenses somptuaires des tenants du pouvoir, c’est que l’on essaie de voir à quel point le chemin de nos espoirs semble encore éloigné.
Depuis 2000, c’est la première fois qu’un régime ne semble pas faire de l’emploi des jeunes sa priorité. Au-delà de nombreuses critiques portées sur sa gouvernance, on ne peut passer sous silence la priorité que Macky Sall a donnée à l’emploi des jeunes, auquel il a consacré un ministère et pas moins de 3 agences. Wade s’est rendu célèbre, entre autres, grâce à ses promesses sur l’emploi des jeunes. Or, maintenant que des jeunes dont certains ont moins de trente ans, se retrouvent aux affaires, ils semblent oublier les millions d’autres qui ne rêvent que de décrocher leur premier emploi. Il est vrai que les vrais militants ont pu, eux, se caser et caser leurs proches. Ils commencent à oublier le prix du loyer. Dès son arrivée au pouvoir, Macky Sall a pris la question à bras-le-corps. Quand l’inflation a ratatiné sa première baisse de loyers, l’ancien chef de l’Etat n’a pas hésité, en novembre 2022, à reprendre une nouvelle mesure pour imposer la baisse. Et il a voulu l’imposer par la force.
Si les décisions de l’ancien leader de l’Apr n’avaient plus un écho favorable après douze ans de règne, ses propres erreurs, ainsi que l’usure du pouvoir y ont contribué. Sans parler de l’action de son opposition et des erreurs de ses partisans. Mais il lui a quand même fallu douze ans pour que cette usure se fasse sentir. Le régime patriotique, lui, se convainc sans doute qu’avec sa belle manière de gérer sa barque, il pourra atteindre sans aucun écueil les rivages de la Vision 2050. Son navire est insubmersible.
LES MILLIARDS ÉCHOUÉS DE TAHIROU SARR
Le directeur de Sofico reste incarcéré en dépit d'une consignation record de 394 milliards FCFA, soit plus de quatre fois le manquant initial estimé à 91 milliards. Une situation juridique paradoxale
Si ses biens cautionnés ont été inscrits au livre foncier de l’Etat, ainsi qu’un chèque de 11 milliards F déposé au niveau de la Cdc, Tahirou Sarr n’est pas encore sorti de l’auberge, alors qu’il a déjà consigné 394 milliards 423 millions F Cfa.
Tahirou Sarr reste en prison en dépit de son cautionnement en nature de 11 milliards F Cfa et l’immaturation de certains de ses biens immobiliers entre Dakar et Mbane sur le livre foncier de Saint-Louis. Dans ses arrêts 20 et 21 rendus le 2 mai, la Chambre d’accusation financière du Pool judiciaire financier a confirmé que l’ordonnance aux fins de cautionnement a déjà produit tous ses effets pour avoir connu une exécution complète.
Elle a même admis que le cautionnement en nature du directeur de la société Sofico satisfait à l’article 140 du Code pénal après qu’il a consigné à hauteur de 394 milliards 423 millions F Cfa, «qui couvre largement la totalité du manquant initial fixé à 91 milliards F Cfa».
Aujourd’hui, Tahirou Sarr peut-il escompter une liberté provisoire déjà refusée ? Pour des raisons comme les risques de pression sur les témoins, notamment les fonctionnaires du Trésor, les concertations frauduleuses entre l’inculpé et ses coauteurs et complices présumés, les responsables des banques, les risques de trouble à l’ordre public ont été évoqués pour lui refuser sa mise en liberté provisoire. Dans son arrêt, la Chambre d’accusation assure qu’à propos des contestations relatives à l’évaluation immobilière, l’Agent judiciaire de l’Etat n’a pas fourni un motif bien défini, permettant de déterminer la nature des contestations, de manière à savoir si elles portent sur des incohérences dans le rapport lui-même ou sur la violation d’une règle de procédure, en soutenant en outre que l’irrégularité fondée sur l’absence de communication préalable de l’offre de cautionnement au Ministère public est devenue inopérante, surtout que, dit-elle, le Ministère public, encore moins l’Agent judiciaire de l’Etat n’avaient jugé nécessaire d’attaquer ladite ordonnance dans les délais.
La politique du Parquet
Il faut savoir que le Parquet judiciaire financier a déjà validé plusieurs offres de consignation depuis son entrée en action. La dernière en date est celle de Racine Sy, qui a mis sur la table plus de 797 millions F pour éviter un mandat de dépôt, ainsi que plusieurs personnalités dans le cadre de la reddition des comptes. Au Parquet de Dakar et au Parquet général, c’est la même stratégie qui semble être adoptée avec l’approbation de la politique de consignation au sein du Parquet qui reste un et indivisible.
L'EXPOSITION QUI RAVIVE LES PLAIES DU SÉNÉGAL DE MACKY SALL
"Première ligne" fait œuvre de mémoire immédiate en capturant les moments les plus intenses des manifestations qui ont conduit à la chute de l'ancien président. Une plongée visuelle dans la genèse douloureuse du Sénégal d'aujourd'hui
(SenePlus) - Au Musée des Civilisations noires de Dakar, l'exposition « Première ligne » plonge les visiteurs dans les violentes manifestations qui ont secoué le Sénégal entre 2021 et 2024. Une immersion poignante dans les événements qui ont précipité la chute de Macky Sall et l'avènement de Bassirou Diomaye Faye à la présidence.
Nuages suffocants de gaz lacrymogènes qui enveloppent les silhouettes de manifestants, barricades enflammées bloquant des carrefours, visages marqués par les blessures et la détermination – l'exposition photographique « Première ligne » ne fait pas dans la demi-mesure. Elle capture, à travers l'objectif sensible d'Abdou Karim Ndoye, la chronique visuelle d'une période tourmentée qui a profondément marqué l'histoire récente du Sénégal.
Pour les Sénégalais qui ont vécu ces événements de l'intérieur, l'exposition provoque une onde de choc émotionnelle. « Ça me rappelle des moments très très difficiles que nous avons vécus ici au Sénégal. Plus jamais ça… C'était très difficile, j'en ai les larmes aux yeux actuellement », confie Fodé Mané, professeur venu avec ses élèves, comme le rapporte RFI.
Dans une petite salle dédiée, les photographies documentent méticuleusement les blessures infligées aux manifestants durant les affrontements avec les forces de l'ordre. Ces images-témoignages constituent une preuve visuelle de la violence qui a caractérisé la répression sous l'ancien régime.
L'exposition revêt également une dimension pédagogique essentielle, permettant à ceux qui n'ont pas directement vécu ces événements de comprendre l'ampleur de cette page cruciale de l'histoire politique sénégalaise. Éloïse, une jeune femme d'origine sénégalaise venue de France, reconnaît sa méconnaissance antérieure : « Je ne connaissais pas depuis la création du parti jusqu'à l'élection du président. Je connaissais juste le nouveau président, mais je ne savais pas tout ce qui s'était passé avant. »
L'œil du témoin au cœur de l'action
Derrière l'objectif se trouve Abdou Karim Ndoye, photographe de terrain devenu depuis conseiller à la présidence et photographe officiel de Bassirou Diomaye Faye. Présent quotidiennement sur le lieu de l'exposition, il contextualise chaque image pour les visiteurs, transformant l'expérience en une véritable leçon d'histoire contemporaine.
Parmi ses clichés, une image prise en mai 2023 à Ziguinchor le touche particulièrement : de jeunes militants assis sur des sacs empilés formant une barricade pour protéger le domicile d'Ousmane Sonko, alors figure de l'opposition. « Cette photo me parle bien parce qu'elle traduit parfaitement la première ligne », explique-t-il à RFI. « Quand vous regardez les postures, les cagoules, je trouve l'image assez iconique... J'avais trouvé extraordinaire ce que ces jeunes-là étaient en train de faire parce que ça, c'est du jamais vu dans l'histoire politique du Sénégal. »
Ce qui frappe le photographe, c'est la détermination sans précédent de cette jeunesse : « Pour moi, il fallait capturer ces instants-là. Les barrages, leurs stratégies... Ce sont des gens qui étaient prêts, déterminés à se battre coûte que coûte, au péril de leur vie. »
L'exposition ne se contente pas de documenter la répression. Elle retrace également l'ascension politique d'Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye, jusqu'à leur arrivée triomphale au pouvoir en avril 2024. Ce parcours, de la répression à la victoire électorale, attire de nombreux sympathisants du nouveau régime, venus contempler les étapes de ce qu'ils considèrent comme leur combat.
De la contestation à l'alternance politique
« Ça nous a fait plaisir de voir comment les jeunes se sont battus pour le président Diomaye et Sonko. C'était vraiment intéressant », confie Mamie à la sortie de l'exposition, selon RFI.
L'exposition prévoit également un mur, encore vierge pour le moment, destiné à recenser les noms des victimes des répressions, dans une démarche mémorielle essentielle pour le travail de vérité et potentiellement de réconciliation nationale.
Le contraste entre la violence des événements documentés et la présence actuelle au pouvoir de ceux qui étaient alors pourchassés donne à cette exposition une dimension particulièrement symbolique – celle d'un cycle politique qui s'est achevé et d'une nouvelle ère qui s'est ouverte pour le Sénégal.
L'exposition « Première ligne » est visible au Musée des Civilisations noires de Dakar jusqu'au 31 octobre 2025, offrant aux Sénégalais et aux visiteurs étrangers l'occasion de comprendre les ressorts d'une mobilisation populaire qui a profondément transformé le paysage politique du pays.
LA DÉBÂCLE DES BOULANGERIES SOLAIRES
L'entreprise allemande Solar Baker, qui promettait de construire plus de 30 boulangeries solaires au Sénégal, fait face à une crise profonde après le licenciement controversé de son directeur général adjoint et la fermeture de sa boulangerie à Gossas
Après avoir mobilisé des millions d'euros pour un projet de boulangeries solaires à fort impact social au Sénégal, l'entreprise allemande Solar Baker est au bord de l'implosion.
Construire plus de 30 boulangeries solaires dans différentes localités du Sénégal. C'était, au début, l'ambition de l'entreprise allemande Solar Bakery. Les promoteurs avaient mis en avant l'aspect social pour mieux charmer les investisseurs qui ont fait montre d'un grand engouement pour ce projet d'entrepreneuriat social. Pour démarrer, une levée de fonds a été lancée sur un site de Fund Raising allemand et les réactions avaient largement dépassé les attentes. Près de 1,200 million d'euros a été mobilisé, alors que les besoins exprimés étaient estimés à seulement 250 000 euros destinés uniquement au financement de la boulangerie pilote qui devait être implantée à Gossas, dans la région de Fatick, à environ 180 km de Dakar, soit un taux de couverture de plus de 1000 %.
Par la suite, les promoteurs ont revu à la hausse leurs ambitions en portant le programme à 50 boulangeries solaires, à raison de 250 000 l'unité.
En attendant la mise en place de ce Solar Bakery de Gossas, un centre de formation a été implanté à Mballing, dans le département de Mbour, dans l'optique de former les agents qui doivent travailler sur toute la chaine. Un centre qui allie à la fois formation et pratique, et qui a commencé à fonctionner depuis le mois de septembre 2024.
Depuis quelques semaines, la construction de celui de Gossas a été terminée, selon nos sources, mais le centre n'a pu être ouvert à cause de certains problèmes de gouvernance.
En effet, la personne qui pilotait jusque-là l'affaire, un certain M. Tounkara, a été débarquée dans des conditions peu orthodoxes, selon des travailleurs avec qui nous avons discuté. “On l'a informé de son licenciement le 15 avril et ça devait prendre effet à partir du 30 avril. Trois jours après son départ, la boulangerie a été fermée, envoyant une vingtaine de travailleurs au chômage technique. Je pense que tout ça, c'est un plan ourdi pour saboter l'exploitation, je ne sais à quelles fins”, fulmine un de nos interlocuteurs.
En fait, le 3 mai dernier, le nouveau directeur administratif et financier de Solar Bakery Sénégal s'est présenté dans les locaux de la boulangerie, pour payer les salaires. Seulement, cette fois, c'est avec des états dans lesquels il est mentionné que les travailleurs sont des prestataires, des agents qui, pour certains, travaillent dans l'entreprise depuis plus d'un an, sans aucun type de contrat. Constatant le terme ‘’prestataire’’ mentionné par le Daf qui vient d'être nommé, certains travailleurs refusent de signer, car pour eux ils sont des salariés et non des prestataires. Des altercations s'en sont suivies et la boulangerie a fermé ses portes depuis lors.
Pour dénoncer ce qu'ils considèrent comme des “violations graves” du Code du travail, un groupe de travailleurs a saisi l'inspection du travail et en même temps le tribunal du travail pour “abus de confiance, travail dissimulé, tentative de requalification frauduleuse de contrat et entrave à l'accès au lieu de travail”, contre l'un des cogérants allemands et le Daf qui est sénégalais.
Du côté du top management, on essaie plutôt d'orienter les accusations vers Mamadou Tounkara, qui était le directeur général adjoint de Solar Bakery et qui pilotait sur place le projet. Selon des sources proches du dossier, le directeur administratif et financier a évoqué des investissements de deux millions d'euros dans ce projet, sans atteindre les résultats escomptés. Ce qui serait, selon lui, à l'origine de tout ce remue-ménage. Des accusations rejetées en bloc par certains travailleurs.
Interpellé, le responsable des opérations, M. Cissokho, apporte des précisions : “Après avoir parlé de deux millions devant les travailleurs, ils sont revenus pour présenter des relevés bancaires qui font état de 150 millions de francs CFA globalement.”
Mais pour Cissokho qui était aussi comptable de l'entreprise, ces accusations sont sans fondement. “C'est juste que, qui veut se débarrasser de son chien l'accuse de rage. Ils savent bien comment cet argent a été dépensé et toutes les preuves sont disponibles. Il s'agit de dépenses relatives à l'acquisition des machines, les travaux de la boulangerie de Gossas, les containers qu'on a achetés, le paiement des salaires depuis novembre 2024...”, se défend le responsable des opérations qui dénonce un dévoiement de l'objet initial du projet.
“Nous appelons les autorités sénégalaises à veiller au respect de la législation et les autorités allemandes à diligenter un audit sur l'utilisation des fonds participatifs qui ont été mis à la disposition, la conformité aux engagements qui ont été pris auprès notamment des investisseurs”, a-t-il poursuivi.
Pour les travailleurs, c'est une grosse désillusion qui arrive au pire moment, alors que la boulangerie commençait à prendre son envol. “Nous étions devenus autonomes. La boulangerie de Mballing qui fonctionne arrive à se prendre en charge toute seule et à faire des bénéfices. Rien que pour le mois d'avril, nous avons eu des entrées de l'ordre de plus de six millions de francs CFA”, a souligné le responsable des opérations. Raison pour laquelle les travailleurs ont initié une série de procédures aussi bien devant le juge pénal que devant le tribunal du travail.
Il faut noter que cette affaire est loin de révéler tous ses secrets, car les investisseurs allemands cités sont aussi mêlés à d'autres entreprises plus importantes qui mènent d'autres projets de plus grande envergure au Sénégal et dans d'autres pays de la sous-région comme le Mali. L'un d'eux est d'ailleurs sous le feu des projecteurs des médias allemands depuis quelques jours, pour différents scandales.
Pour rappel, le projet des boulangeries solaires vise à réduire la pauvreté, promouvoir l’égalité hommes-femmes, utiliser une énergie propre et abordable, offrir des emplois décents et contribuer à la croissance sociale tout en respectant la protection du climat.
Les griefs des travailleurs
Absence de contrats pour le personnel local, non-affiliation à l’Institution de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres) et à la Caisse de sécurité sociale (CSS), rétention de salaires, intimidation, agression physique et usage de nervis… Voilà, entre autres, les griefs que le personnel reproche à la direction devant le tribunal du travail. Les parties ont été hier à l'inspection régionale du travail pour médiation. Les négociations se sont soldées par un échec et les parties vont se retrouver devant le tribunal pour régler leur différend. Selon des sources qui ont pris part à cette confrontation, aucun accord n'a pu être trouvé et l'inspecteur l'a constaté sur procès-verbal de non-conciliation.
Lors de cette rencontre, les travailleurs sont revenus sur leurs revendications, à savoir : des contrats de travail en bonne et due forme ; l'inscription à la Caisse de sécurité sociale et à I'IPM, les indemnités diverses, le primes de transport, entre autres.
Pour se dédouaner, la direction de l'entreprise a argué que les plaignants étaient en réalité liés à un prestataire et n'étaient pas des salariés de l'entreprise. “Il n'existe pas une relation de travail entre l'entreprise et ces travailleurs”, a défendu le représentant de la direction.
La prochaine manche se jouera devant le tribunal du travail qui va statuer sur ce litige.
TRAVAIL DOMESTIQUE, KANORA LANCE UNE PLATEFORME POUR SORTIR DE L’INFORMEL
La plateforme ambitionne de transformer en profondeur le quotidien des travailleuses domestiques au Sénégal. Portée par la vision de sa fondatrice Mame Awa Mbaye et soutenue par l’État, cette initiative se veut à la fois humaine, sociale et économique.
« Plus de 90 % des travailleurs domestiques évoluent dans l’informel. Ce manque de structuration entraîne une faible spécialisation et une précarité professionnelle. » C'est le diagnostic fait par Mame Awa Mbaye, fondatrice de KaNora Services. La plateforme KaNora Services ambitionne de transformer en profondeur le quotidien des travailleuses domestiques au Sénégal. Portée par la vision de sa fondatrice et soutenue par l’État et les bénéficiaires eux-mêmes, cette initiative se veut à la fois humaine, sociale et économique.
Tout a commencé par une prise de conscience intime. « Un jour, j'ai posé une question à une jeune femme qui travaille avec moi depuis plusieurs années. Je lui ai demandé de quoi tu rêves. Elle m’a regardée avec douceur et m’a répondu tout naturellement : je n’ai pas de rêve. Cette phrase m’a bouleversée », raconte Mame Awa Mbaye, fondatrice de KaNora Services. Derrière cette réponse simple, c’est tout un pan de la société invisible qui s’est révélé à elle : celui des jeunes femmes, souvent venues de milieux précaires, qui accomplissent les tâches essentielles au sein des foyers, sans droits, sans reconnaissance, et sans perspective d’avenir.
De ce choc est née KaNora, une plateforme de services à domicile, mais surtout un levier d’autonomisation pour ces travailleuses de l’ombre. « KaNora, c’est la volonté de changer ce récit. De faire en sorte que ces jeunes femmes puissent travailler dans la dignité, se protéger, apprendre, épargner, bâtir et surtout rêver », affirme-t-elle. L’initiative s’inscrit dans la dynamique portée par le ministère du Travail sénégalais, représenté lors du lancement par Mme Katy Sow, conseillère technique.
Selon Mme Mbaye, au-delà du simple placement de personnel de maison, KaNora propose un accompagnement global. Couverture maladie, retraite, formation continue, professionnalisation des agences de placement : tout un écosystème est mis en place pour sécuriser et valoriser ces jeunes femmes. « Notre ambition va au-delà de la plateforme. Nous espérons générer un effet de transformation en chaîne capable de toucher des centaines de milliers de jeunes femmes à travers le pays », explique la fondatrice.
L’approche est saluée par les premiers utilisateurs du service. Pour Mame Aby Seye, cliente de KaNora, la plus-value est évidente : « Ce qui m’a plu, c’est cette approche à 360 degrés. On ne s’occupe pas uniquement de ceux qui demandent le service, mais aussi de ceux qui travaillent. Ils ont des droits, des besoins, et cette plateforme y répond avec rigueur et humanité. »
Un prolongement de la politique publique
Présente à la cérémonie, Mme Katy Sow du ministère du Travail a tenu à souligner la convergence entre l’approche de KaNora et les réformes en cours au sein de l’État sénégalais. « C’est juste un prolongement de ce que l’État est en train de faire. On travaille sur la réforme du Code du travail, la protection sociale et l’intégration du secteur informel. Le ministère est très intéressé pour accompagner ce genre d’initiatives. »
Elle insiste aussi sur la nécessité d’un déploiement territorial : « J’aimerais bien voir KaNora dans les pôles de développement territoriaux. Ils font un travail remarquable, et leur impact peut s’étendre bien au-delà de Dakar. »
Avec KaNora, il ne s’agit pas seulement de créer de l’emploi. Il s’agit de restaurer une dignité, de construire un avenir, d’ouvrir un champ des possibles. « Aujourd’hui, nous lançons KaNora. Et avec elle, nous redonnons à des centaines de milliers de jeunes femmes le pouvoir de rêver et de réaliser leur rêve », conclut Mame Awa Mbaye.
SOPHIE GLADIMA PLACÉE SOUS MANDAT DE DÉPÔT
L’ancienne ministre des Mines et de la Géologie est poursuivie pour un présumé détournement d’un milliard de francs CFA dans le cadre de projets liés à la riposte contre la pandémie de Covid-19
L’ancienne ministre des Mines et de la Géologie, Aïssatou Sophie Gladima, a été placée sous mandat de dépôt ce mercredi 21 mai 2025, à l’issue de son audition par la Commission d’instruction de la Haute Cour de Justice. Cette mesure intervient dans le cadre de l’enquête sur la gestion des fonds alloués à la riposte contre la pandémie de Covid-19.
Selon des informations, Mme Gladima est mise en accusation pour un présumé détournement de deniers publics. L’enquête porte notamment sur l’utilisation controversée d’une enveloppe d’un milliard de FCFA destinée à divers projets. Parmi ceux-ci figure la construction d’un centre gravimétrique à Kédougou, un projet qui n’a jamais vu le jour malgré le décaissement partiel des fonds.
Cette arrestation s’inscrit dans la dynamique de reddition des comptes enclenchée par les nouvelles autorités sénégalaises, qui ont promis d’apporter des réponses concrètes aux soupçons de mauvaise gestion des ressources publiques liées à la crise sanitaire.
L’affaire pourrait connaître de nouveaux développements dans les jours à venir, alors que d’autres anciens responsables sont également visés par des procédures similaires.
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DES FOUILLES POUR FAIRE PARLER LES MORTS DE THIAROYE
Au cimetière militaire de Thiaroye, des archéologues sondent actuellement le sol à la recherche de preuves matérielles qui pourraient enfin révéler l'ampleur réelle du massacre de tirailleurs africains perpétré par l'armée coloniale française en 1944
(SenePlus) - Des recherches archéologiques sont actuellement en cours au cimetière militaire de Thiaroye, dans la banlieue de Dakar, afin d'élucider l'un des massacres les plus sanglants de la période coloniale française au Sénégal. Selon les informations rapportées par Le Monde avec l'AFP ce mercredi 21 mai, ces fouilles, qui ont débuté il y a une dizaine de jours, visent à faire la lumière sur de nombreuses zones d'ombre entourant le massacre de tirailleurs africains perpétré par l'armée française le 1er décembre 1944.
"De nombreuses zones d'ombre subsistent sur les circonstances du massacre commis le 1er décembre 1944, l'un des pires de la colonisation française au Sénégal : le nombre de tirailleurs tués, leur identité, le lieu de leur inhumation...", souligne le quotidien français.
Ces fouilles, dont l'accès est strictement contrôlé, interviennent dans un contexte où les autorités sénégalaises cherchent à établir "la manifestation de toute la vérité" sur ce drame. Le gouvernement avait annoncé le 19 février dernier le lancement de ces investigations archéologiques, réclamées depuis longtemps par des chercheurs.
L'ampleur réelle de ce massacre fait l'objet de vives controverses entre historiens et entre les gouvernements français et sénégalais. Si les autorités françaises de l'époque avaient reconnu la mort de 35 personnes, "plusieurs historiens avancent un nombre de victimes bien plus élevé – jusqu'à 400 soldats", rappelle Le Monde.
Ce bilan contesté s'ajoute aux nombreuses interrogations concernant l'identité précise des victimes et la localisation exacte de leur sépulture. Les tirailleurs massacrés, qui ne venaient pas uniquement du Sénégal mais aussi d'autres pays africains, avaient été rapatriés des combats en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale et réclamaient le paiement d'arriérés de solde.
Un responsable du cimetière, cité par le journal, a indiqué que l'accès au site est fermé "depuis deux mois en raison de travaux". De son côté, un membre du comité de commémoration a précisé : "Nous ne communiquons pas pour le moment sur cette question. Le gouvernement sénégalais le fera le moment venu."
Un enjeu politique et mémoriel
Ces fouilles s'inscrivent dans un contexte politique particulier, le gouvernement sénégalais reprochant à la France "de dissimuler des faits sur ce massacre en retenant notamment des documents d'archives permettant de connaître le bilan humain", précise l'article.
En novembre 2024, à la veille du 80e anniversaire du massacre, la France avait officiellement reconnu les faits comme un "massacre". Le Sénégal avait alors commémoré l'événement "avec une envergure inédite", rappelle Le Monde.
En avril 2024, les autorités sénégalaises, "qui se réclament du souverainisme", avaient mis en place un comité de chercheurs chargé de remettre un rapport sur le massacre. Prévu initialement pour le 3 avril, ce rapport n'a toujours pas été rendu public, et "aucune explication officielle n'a été fournie sur les raisons de ce report", selon le quotidien français.
Les résultats de ces fouilles archéologiques pourraient donc constituer une étape décisive dans la réécriture de cette page douloureuse de l'histoire coloniale française et dans les relations franco-sénégalaises, alors que la question mémorielle demeure un enjeu sensible entre les deux pays.
L'AFRIQUE DESSINE SA SOUVERAINETÉ MONÉTAIRE
L'Association des Banques Centrales Africaines a franchi une étape décisive dans le projet de monnaie unique continentale avec l'adoption des statuts de l'Institut Monétaire Africain, qui préparera la création de la future Banque Centrale Africaine
Le siège de la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) a abrité hier la première réunion statutaire de l'année en cours de l'Association des Banques Centrales Africaines. Au cœur des discussions, l'avancement des projets clés pour la mise en place d'une monnaie unique africaine, la consolidation de l'intégration financière du continent et les défis économiques actuels.
Réunis à Dakar hier, les membres de l'Association des Banques Centrales Africaines (ABCA) ont relancé les discussions sur la création d'une monnaie unique et de l'intégration financière du continent. Entre adoption des statuts de l'Institut Monétaire Africaine, stratégie pour les paiements mobiles et plaidoyer pour une autonomie économique accrue, la rencontre marque une nouvelle étape vers une souveraineté monétaire africaine.
Parmi les dossiers phares examinés figure le projet de statuts de l'Institut Monétaire Africain (IMA), approuvé lors de la réunion ministérielle du Comité Technique Spécialisé (CTS) en novembre 2024. L'IMA, qui sera basé à Abuja, au Nigeria, servira d'organe transitoire pour la création de la future Banque Centrale Africaine (BCA). Ses missions couvriront des aspects techniques, juridiques, institutionnels et statistiques en vue du lancement d'une monnaie unique africaine. Le document de référence définit également sa gouvernance, articulée autour d'un conseil d'administration, d'un comité technique de convergence, d'un secrétariat, et de liens étroits avec la Commission de l'Union africaine (CUA), les banques centrales, les instituts monétaires régionaux et les institutions internationales.
Un autre point de la rencontre concerne l'élaboration d'une stratégie continentale d'intégration des paiements mobiles. Le but affiché est de faciliter les échanges commerciaux intra-africains et promouvoir l'inclusion financière, en appui à la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAf). Cette initiative s'inscrit dans l'Agenda 2063 de l'Union africaine, qui vise à faire passer la part des échanges intra-africains de 12% en 2013 à 50% d'ici 2045.
Un contexte mondial incertain
S'exprimant à l'ouverture des travaux, Jean-Claude Kassi Brou, gouverneur de la BCEAO, a salué la volonté des États de bâtir un système monétaire africain « intégré, stable, résilient et porteur d'opportunités ». Il a toutefois mis en garde contre un environnement international tendu, marqué par la montée des tensions commerciales, les aléas climatiques et la pression croissante sur la soutenabilité des dettes publiques. Cependant, il a salué les bonnes perspectives au sein de l'Union, malgré les nombreux défis. En effet, la croissance économique du continent est projetée à 6,4% et l'inflation devrait se maintenir dans la fourchette cible de 1 à 3%. Le gouverneur a réaffirmé l'engagement de la BCEAO en faveur de la coopération monétaire africaine.
Plaidoyer pour l'intégration monétaire
Présidant la séance, Dr Rama Krishna Sithanen, président de l'ABCA et ancien ministre des Finances de Maurice, a appelé à une intensification de l'intégration monétaire et financière. Face aux risques de fragmentation géoéconomique, à la dépendance persistante au dollar et à la montée des mesures protectionnistes, il a insisté sur la coopération entre banques centrales africaines comme rempart à la vulnérabilité économique du continent. Il a également encouragé les États à adopter les normes internationales en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT), tout en modernisant leurs législations nationales.
Dr Sithanen a par ailleurs dénoncé le coût élevé des envois de fonds vers l'Afrique subsaharienne, estimé à 8,37% selon le rapport 2024 de la Banque mondiale. Il a plaidé pour des solutions alternatives afin de réduire ces frais et renforcer les flux financiers intra-africains. Il s'est enfin félicité de l'initiative de création d'une agence africaine de notation financière par l'Union africaine, adaptée aux réalités locales, et a salué le potentiel de la ZLECAf malgré son sous-usage, imputé à un déficit d'infrastructures, de financements et de facilités douanières.
Appelant à une plus grande autonomie des États dans la mobilisation des ressources internes, il appelle tous les États à se mobiliser face à une « aide publique au développement ». « Nous devons nous tenir debout et entreprendre les réformes nécessaires pour attirer les investisseurs institutionnels », a-t-il conclu son propos.
LANCEMENT DES TRAVAUX D'UNE TECHNOPÔLE AU CŒUR DU SÉNÉGAL
Le projet Notto Diobass Smart City franchit une étape décisive avec le lancement des travaux de construction de l'Université Smart Notto Diobass (USND)
La mise en route du projet «Notto Diobass Smart City» a franchi un nouveau pas hier, avec le lancement officiel des travaux de construction de l'université Smart Notto Diobass (USND). Première phase du projet global, l'USND, résolument tourné vers l'innovation et le développement durable, sonne comme une technopole au cœur du Sénégal.
Après l'approche d'appropriation communautaire déroulée dans les différentes zones de la commune, le projet «Notto Diobass Smart City» est entré hier dans une nouvelle phase, avec le lancement officiel des travaux de construction de l'Université Smart Notto Diobass (USND). Il s'agit «d'un projet résolument tourné vers l'innovation et le développement durable, qui comprendra notamment des amphithéâtres et laboratoires de pointe, des espaces de vie étudiante, un campus connecté et écoresponsable». Il s'agit donc de la première phase de réalisation de Notto Diobass Smart City et sonne comme une technopole au cœur du Sénégal.
«Le projet «Notto Diobass Smart City» est conçu pour vous avec vous et par vous. Notto Diobass, c'est un Sénégal en miniature, une terre de partage, de dialogue, où musulmans, catholiques, Sérères, Wolofs, Hal Pulaar, Bambara, etc. vivent ensemble depuis des siècles, dans la paix, la cohésion. Et aujourd'hui, la commune est en train d'ouvrir un nouveau chapitre de son histoire», a indiqué d'emblée Alioune Sarr maire de la commune, devant un parterre de chefs d'entreprise et de personnalités diverses.
Pour lui, il s'agit d'un projet ambitieux qui, bien plus qu'un projet d'urbanisation, est également une vision stratégique de planification territoriale à court, moyen et long terme. «Il est fondé sur l'exploitation intelligente de nos ressources naturelles, notamment foncières, mais également de notre savoir-faire local. Il s'agit d'une promesse tenue devant les populations, de faire de Notto Diobass un pôle d'attractivité, de formation, d'emplois, mais aussi un pôle où la vie est digne de celle vécue dans les grandes villes du Sénégal et du monde. Dans chaque pays du monde quand vous êtes à côté d'un l'aéroport, d'un port ou d'une autoroute, vous êtes automatiquement une ville développée», a-t-il ajouté.
Il renseigne que Notto Diobass Smart City est bâti sur trois pôles. Il s'agit de la restructuration et la régularisation des hameaux et des champs, ensuite l'aménagement des lotissements selon les normes, avec tout ce qu'il faut en termes d'équipements sociaux de base, d'assainissement, d'électrification, de santé. Le troisième pôle concerne la création d'une Aéroville, d'un parc dédié à l'agriculture, mais aussi un business parc, pour capter toutes les opportunités liées à la proximité de l'aéroport. Ce qui permettrait à la zone d'être un centre pour les grandes entreprises, qui pourront héberger ceux qui sont dans les services.
«Il est temps de transformer l'exode rural en retour rural, transformer le chômage en opportunités, la résignation en ambition. Pour ce faire, soyons ambitieux pour notre terroir. Ensemble, unis et solidaires, nous ferons de Notto Diobass un modèle de développement intégré, un modèle de référence avec les nombreux atouts à portée de main», a-t-il confié à la jeunesse. Selon lui, l'université sera un centre de formation, qui incarnera une nouvelle génération d'institutions de formation dans les métiers. «La formation de la jeunesse de Diobass se fera», a-t-il par ailleurs affirmé ; une manière de répondre aux pourfendeurs du projet qui ont fait entendre leurs voix le matin.
À l'occasion de cette cérémonie, le maire de la commune de Notto Diobass et ses partenaires stratégiques se sont inscrits dans un élan de recherche de solutions innovantes, «pour faire de Notto Diobass une Smart City, qui accueillera des Centres de données et de traitement de l'information, ainsi que des entreprises dans les industries de transformation agricole, les industries de fabrication de matériel de construction. Le projet inclura un volet de services avec des éléments résidentiels, commerciaux et structures de santé. D'autres dynamiques territoriales d'innovation seront également développées pour répondre aux enjeux de la transition énergétique, organiser des systèmes résilients, intégrer et valoriser les potentialités du numérique dans la commune».
Cette dynamique est impulsée, de l'avis du maire, car pour s'inscrire avec les autorités de la commune de Notto Diobass et les populations dans un futur voulu et non subi, les exigences actuelles du territoire doivent être examinées, en identifiant les différentes formes d'occupation et d'utilisation de l'espace en termes de gestion durable et en donner une impulsion pour rendre Diobass dynamique et propre.
L'ÉTRANGE DOSSIER KHADIM BA
Ce personnage du secteur énergétique sénégalais, croupit depuis plusieurs semaines à la prison du Cap Manuel pour des infractions douanières et de change que rien, selon un mémorandum juridique, ne semble prouver matériellement
Depuis plusieurs semaines, Khadim Ba, homme d'affaires bien connu dans le secteur de l'énergie, est sous mandat de dépôt à la prison du Cap Manuel. En cause : une affaire de fuel, d'importations et de change. En toile de fond : un dossier douanier lourd, mais semé d'approximations et de conditionnels. Pendant que la procédure suit son cours, un mémorandum vient ébranler, point par point, la version officielle.
Il n'est ni importateur, ni déclarant, ni banquier. Pourtant, c'est lui que les agents ont trouvé au bout de la chaîne. Khadim Ba dort en prison depuis plusieurs semaines. Son nom apparaît au centre d'un dossier pour délit d'importation irrégulière et infraction à la législation des changes. Un dossier où les cargaisons sont bien arrivées, les déclarations bel et bien enregistrées, les banques dûment mandatées. Un dossier où les traces sont nombreuses, mais où les responsabilités, elles, semblent glisser de main en main.
Alors pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? Et surtout, sur quoi repose exactement l'accusation ? Dans les pages du procès-verbal, les verbes hésitent. On suppose, on présume, on écrit au conditionnel. Pourtant, la Douane agit, saisit, poursuit. Et dans l'ombre de ces actes administratifs, c'est une mécanique plus vaste qui se dévoile : celle d'un appareil qui semble avoir trouvé son homme, avant d'avoir trouvé les preuves.
Le document que nous avons reçu : un mémorandum juridique adressé aux plus hautes autorités, déroule une ligne de défense minutieuse : Khadim Ba n'est pas l'importateur des hydrocarbures en question, rôle dévolu à la Société Africaine de Raffinage (SAR). Il n'est pas non plus déclarant en douane, ni représentant légal des sociétés impliquées dans la transaction. Et selon ses conseils, les documents incriminés (attestations d'importation, autorisations de change) ont été produits dans les règles, visés par les services compétents, puis validés par les banques.
Mais surtout, le texte attaque le cœur de l'affaire : les agents de la Douane auraient agi sur la base de présomptions, sans produire les déclarations douanières censées appuyer leurs accusations. Aucune preuve matérielle des infractions n'est versée dans le dossier. Mieux : les déclarations litigieuses, listées en annexe du mémorandum, existent bel et bien et ont permis de dédouaner les marchandises au bureau des pétroles de Dakar. La Douane, elle, évoque une recherche sur le système GAINDE... qui ne les aurait pas retrouvées.
Autre faille soulevée : la loi invoquée. En matière d'infractions de change, seule la loi uniforme n°2014-12, en vigueur dans l'UEMOA, est applicable. Elle stipule que seul le ministre des Finances peut initier des poursuites. Or, dans le cas de Khadim Ba, ce n'est pas lui qui en est à l'origine. Une entorse qui rendrait, selon la défense, l'ensemble de la procédure caduque.
Le procès-verbal lui-même est contesté : cumulant infraction douanière et infraction de change sans l'autorité compétente, rédigé sans mention explicite des pièces saisies, il violerait plusieurs dispositions du Code des Douanes. À ce titre, ses nullités pourraient suffire à faire tomber toute la procédure.
Enfin, le document pose une dernière question, plus politique que juridique : pourquoi la Douane a-t-elle écarté ses interlocuteurs naturels : la SAR, le transitaire, les banques, pour cibler un homme qui, sur le papier, n'apparaît pas dans les circuits officiels des transactions incriminées ? Pourquoi construire une affaire sur un nom plutôt que sur des faits ?
En attendant des réponses, Khadim Ba reste en détention. Et le doute, lui, grandit au rythme des silences administratifs.